M. Hervé Morin, ministre. ... il y a quinze jours, on m'a confirmé cette volonté de participer à ce projet. L'Espagne, l'Italie et l'Allemagne sont dans le même état d'esprit. L'une des priorités de la présidence française au deuxième semestre de 2008 sera de faire en sorte de développer une capacité d'observation - radar, optique, électromagnétique - la plus européenne possible afin de mutualiser ce programme.

Monsieur Didier Boulaud, vous m'avez interrogé sur l'accord communautaire relatif au financement de Galileo, qui est, comme vous le savez, un programme civil. (Mme Dominique Voynet s'exclame.)

Je vous indique simplement que le financement complémentaire dû à l'acquisition patrimoniale - 2,4 milliards d'euros - sera couvert par le budget communautaire moyennant, notamment, des redéploiements ne remettant en cause aucun autre projet européen. Je peux me réjouir de cet accord en tant qu'utilisateur futur de ce système.

Une attention particulière, monsieur Philippe Nogrix, sera portée au maintien de la disponibilité opérationnelle des matériels. C'est en effet un sujet majeur pour nos troupes, car cela conditionne beaucoup leur moral et leur enthousiasme.

Au-delà de la dotation de 3,3 milliards d'euros, la démarche d'amélioration de l'efficacité de la dépense de maintien en condition opérationnelle sera poursuivie.

Des choses ont été faites, et vous les avez signalées - le MCO naval, la création du SIAé dont je viens de signer les arrêtés.

Il faut qu'un même effort soit entrepris au sein de l'armée de terre afin que nous ayons des services de maintien en condition opérationnelle qui soient interarmées et au service de l'ensemble du matériel.

Le chantier qui est devant nous est énorme. Il impose de mettre à plat les normes pour que les procédures soient identiques et que, d'une armée à l'autre, les approches soient les mêmes.

Je donnerai un seul exemple. Dans le cadre de l'interarmisation, j'ai demandé un rapport aux inspecteurs généraux des armées. J'ai constaté que lorsqu'un Puma de l'armée de l'air se posait à Villacoublay et que le mécanicien appartenait à l'armée de terre, ce dernier ne pouvait pas opérer sur l'appareil, car les procédures et les règles des deux armées ne sont pas les mêmes.

Ce genre de chose doit, à terme, disparaître pour que toutes les structures qui assurent le maintien en condition opérationnelle soient au service de l'ensemble de nos armées, quelle que soit la couleur de l'uniforme.

Concernant l'enveloppe des crédits pour la préparation de l'avenir, messieurs Pierre Laffitte et Didier Boulaud, nous maintenons nos crédits d'étude amont à hauteur de 640 millions d'euros.

En effet, l'effort entre l'Europe et les États-Unis est un rapport de un à six ; la France et le Royaume-Uni assurent à eux deux plus de 60 % de l'effort de recherche commun. Je puis au moins vous annoncer une bonne nouvelle : la semaine dernière, grâce au dialogue que nous avons entrepris avec nos amis britanniques, 6 millions d'euros supplémentaires ont été accordés à un nouveau programme de l'Agence européenne de défense, l'AED, concernant les drones.

Ce sujet sera un de ceux sur lesquels la présidence française pourra faire évoluer l'Europe de la défense, afin que nous soyons en mesure de maintenir notre base industrielle et technologique, que nous puissions, ensemble, européens, mener des programmes de recherche autour de l'AED pour que cette belle idée qu'a été l'accord de Saint-Malo entre Britanniques et Français puisse enfin trouver son envol.

Je veux répondre à Mme Michelle Demessine sur l'activité de l'armée de terre. Je ne sais pas d'où viennent ses informations, mais j'ai déjà répondu dix fois à cette question : la prévision de l'activité de l'armée de terre est de quatre-vingt-seize jours par homme, comme en 2006 et comme en 2007, dont quatre jours seront financés au titre des exercices multinationaux.

Messieurs Yves Fréville et Philippe Nogrix ont évoqué la problématique des carburants.

Nous devrions finir l'année 2007 sans trop de dommage grâce à un premier trimestre pendant lequel les cours étaient relativement bas et que les armées ont judicieusement mis à profit pour rehausser leurs stocks. Cependant, l'année 2008 s'annonce difficile si l'envolée des cours constatée depuis juillet se prolonge.

Monsieur Philippe Nogrix, l'année 2007 a confirmé la nécessité de disposer d'un instrument de couverture qui nous protège de la hausse des cours. Les courbes qui m'ont été remises sur ma demande montrent que le dispositif de couverture que nous avons mis en oeuvre nous sert aujourd'hui, compte tenu de la hausse des prix du brut.

Le maintien de l'exonération de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, au-delà du 31 décembre 2008 est une condition indispensable à l'équilibre global du système.

S'agissant de l'externalisation, monsieur Philippe Nogrix, j'adopterai une attitude pragmatique. Je ne suis pas un adepte du « tout externalisation ». Un certain nombre de choses doivent être externalisées si c'est utile et si des économies peuvent être réalisées.

Ce type de formule a connu des réussites, comme l'enseignement au pilotage des avions de l'école de Cognac ou l'externalisation de la flotte des véhicules de la gamme commerciale.

Quoi qu'il en soit, en matière d'externalisation, je souhaite que l'on aborde l'ensemble des problématiques et que l'on ne se contente pas de reporter sur l'avenir un certain nombre de charges. Si nous décidons d'aller vers un peu plus d'externalisation, il faudra que nous puissions neutraliser les effets de la TVA, comme l'a fait le ministère britannique de la défense.

Je veux également aborder la question du financement des OPEX en loi de finances initiale.

Comme l'ont indiqué les rapporteurs spéciaux et un certain nombre d'orateurs - je pense à M. André Dulait -, nous avons inscrit cette année 375 millions d'euros dans le projet de budget pour 2008, auxquels s'ajouteront 100 millions d'euros décidés par le Premier ministre il y a huit jours et qui seront donc inscrits au moment de la seconde délibération. J'imagine que cette décision est en mesure d'être appréciée par M. le président de la commission des finances qui avait évoqué ce sujet lors de mon audition.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est un mieux !

M. Hervé Morin, ministre. J'aborderai également un certain nombre de sujets qui ont été évoqués par les différents intervenants.

Nous avons essayé d'inscrire la politique du ministère de la défense dans l'ensemble des politiques publiques. Vous avez parlé, par exemple, de l'environnement, et je vous remercie des précisions que vous avez apportées, monsieur Georges Othily. Nous avons décidé de nous inscrire dans une politique de développement durable, sans, bien entendu, remettre en cause les capacités opérationnelles de nos armées, car elles constituent le coeur de notre métier.

Nous disposons de tous les moyens nécessaires, pour le développement de l'éco-industrie, pour faire en sorte que nos commandes publiques soient davantage dédiées au développement durable et que, au travers de nos bâtiments, de nos casernements, de nos logements, nous participions aux économies d'énergie.

Dans ce cadre, quatre implantations de nos armées - l'École polytechnique et une implantation par armée - feront l'objet d'un bilan énergétique et environnemental complet au cours du premier semestre de 2008. Ensuite, un programme complet sera conduit pour montrer à l'ensemble du ministère de la défense que nous pouvons faire beaucoup en ce domaine et que nous pouvons donner l'exemple à l'ensemble du pays.

Le deuxième sujet abordé par M. Pierre Laffitte concernait les PME. Nous avons lancé un plan en leur faveur - je l'ai présenté ce midi même à la presse. Parmi les mesures de ce plan, figurent les délais de paiement.

Nous allons faire en sorte que les délais de paiement qui sont accordés aux grands donneurs d'ordre soient exactement les mêmes pour les PME lorsque ces grands donneurs d'ordre s'adressent à leurs sous-traitants.

Par ailleurs, nous allons rendre les plans d'étude amont beaucoup plus accessibles aux PME, qui sont souvent des trésors d'innovation, d'intelligence et de réactivité.

La question de l'égalité des chances a également été abordée.

C'est un sujet sur lequel nous mènerons un certain nombre d'expériences, en sachant que le ministère de la défense, monsieur André Dulait, est probablement l'institution où l'égalité des chances via la capacité de promotion est la plus importante. On oublie, en effet, souvent que 50 % des sous-officiers sont issus des militaires du rang et que 50 % des officiers sont d'anciens sous-officiers.

Il existe donc déjà au sein de l'armée française une vraie tradition d'ascenseur social. C'est probablement la dernière institution où, si l'on s'en donne la peine, on peut franchir des étapes et accéder à d'autres responsabilités.

J'ai néanmoins présenté un plan il y a trois mois. Un bilan a été fait la semaine dernière : tout se met en place comme nous le souhaitions.

Nous instaurerons, par exemple, un tutorat entre les élèves des grandes écoles militaires et les jeunes de lycées situés dans les zones sensibles et dans les zones rurales, là où l'idée d'accéder à une grande école militaire paraît absolument impossible.

Nous créerons des classes tampon dans les lycées militaires pour offrir à ces jeunes la possibilité d'accéder à un certain niveau de culture et d'acquérir les connaissances leur permettant de se présenter aux concours d'entrée des écoles préparatoires à égalité de chance avec les enfants de familles plus favorisées.

Même si nous maintenons la proportion des 70 % pour le personnel militaire, nous ouvrons les lycées militaires aux enfants de familles de condition modeste. Nous rouvrons également le lycée militaire de Strasbourg - qui avait été fermé en 1984 -, afin de permettre au personnel civil de la défense de passer le baccalauréat dans le cadre d'un parcours professionnel et de pouvoir progresser dans leur carrière.

Par ailleurs, nous avons décidé de développer les préparations militaires ainsi que les cadets de la défense, sorte d'encadrement notamment des activités sportives. Nous avons mené les premières expériences et les régiments qui se sont engagés dans cette voie le font avec beaucoup d'enthousiasme. Le chef d'état-major de l'armée de terre, avec lequel j'ai évoqué ce point la semaine dernière, m'a dit que tout se déroulait de façon remarquable.

Je profite de l'occasion pour indiquer à M. François Trucy que nous avons consacré 72 millions d'euros pour offrir des locaux aux établissements chargés de mettre en oeuvre la politique du dispositif « Défense deuxième chance ».

Je vous rappelle néanmoins que, malgré son nom, ce dispositif dépend non pas du ministère de la défense, mais du ministère de l'économie et des finances au titre des aides à l'emploi. Je n'entends pas que le budget de la défense, dont certains ont estimé qu'il était tendu, participe à ce qui ne relève pas directement du ministère de la défense.

Concernant les exportations d'armement, madame Dominique Voynet, je suis en contradiction totale avec vous.

Nous avons mis cinquante ans à construire une industrie de défense, qui figure parmi les plus remarquables au monde. C'est un trésor de technologie, une pointe de diamant exceptionnelle.

Cette industrie de défense, c'est l'effort d'un pays durant des décennies. Nous pouvons la maintenir et préserver les 250 000 à 300 000 emplois qu'elle représente seulement si nous sommes en mesure, dans un marché en extension - le monde entier se réarme à l'heure actuelle - de maintenir nos parts à l'exportation. Or nos parts sont en train de diminuer, en part relative j'entends, puisque nous sommes aujourd'hui quasiment devancés par les Israéliens.

Madame la sénatrice, on peut toujours rêver d'un monde sans armement, mais, malheureusement, ce monde idéal n'existe pas.

Il nous appartient de soutenir l'industrie de défense pour lui permettre, d'une part, de développer nos propres programmes - bien entendu, la vente de programmes à l'étranger diminue le coût de nos propres séries - et, d'autre part, de pérenniser l'effort industriel.

Pourquoi cette charge incombe-t-elle au ministère de la défense ? Tout simplement parce qu'il exerce la tutelle des établissements concernés. A priori, nous connaissons mieux que quiconque les programmes développés par l'industrie de défense. Nous connaissons éventuellement mieux les risques stratégiques qui pourraient découler de la vente de tel ou tel matériel à l'exportation.

Par ailleurs, un contrôle est assuré par une commission interministérielle présidée par le Secrétariat général de la défense nationale, le SGDN, donc par les services du Premier ministre, et à laquelle participent le ministère des affaires étrangères, le ministère de la défense, le ministère de l'économie et des finances, ainsi qu'un représentant de l'Élysée.

En ce qui concerne la question des exportations d'armement, une administration ou un ministère est donc chargé de soutenir cette industrie de défense et le contrôle revient à une instance collégiale placée sous l'autorité du Premier ministre.

Il y a, en matière d'exportation, quatre sujets sur lesquels nous devons progresser.

D'abord, nous devons améliorer les délais d'instruction des autorisations d'exportation. Les PME françaises nous indiquent que nos délais sont largement plus longs qu'en Allemagne et au Royaume-Unis. Nous devons donc réfléchir sur les conditions des exportations au sein de l'Union européenne, notamment pour un certain nombre de pays.

Ensuite, il n'y a aucune raison que les règles et les procédures pour exporter du matériel au sein de l'Union européenne, parfois entre deux filiales d'un même groupe, soient les mêmes que lorsque nous exportons des produits dans des pays dits « sensibles ».

En outre, il nous faut aider davantage les PME dans leurs efforts à l'exportation.

Enfin, nous devons réfléchir à la nomenclature en matière d'exportation.

Lorsque vous décidez de vendre des essuie-glaces d'une 504 qui sont peints en vert parce qu'ils sont installés sur des véhicules Panhard, la commission interministérielle des exportations des matériels de guerre, CIEMG, est la même que lorsqu'il s'agit de vendre un programme d'armement complet.

C'est donc un sujet majeur, lourd, pour le soutien à l'industrie de défense française et j'entends bien m'y consacrer.

Enfin, je souhaite aborder deux sujets : la participation de la défense à la construction européenne et l'OTAN.

Sur la construction européenne, la priorité de la France est, dans le cadre de la présidence française, de donner un nouvel élan à l'Europe de la défense. Sur ce sujet, permettez-moi de vous livrer quelques-unes des pistes que nous avons présentées à nos partenaires européens.

Comme vous le savez, c'est non pas au moment de la présidence que les choses se font mais en amont. Au moment de la présidence, vous êtes dans le consensus. Il faut donc faire progresser vos idées avant d'assumer la présidence de manière qu'elles puissent ensuite aboutir.

Parmi les propositions que j'ai formulées, la première est de doter l'Europe d'un centre de planification et de commandement autonome. L'Europe doit pouvoir mener par elle-même des opérations qui la concernent directement ou qui se situent sur ses théâtres naturels d'intervention.

La deuxième piste dont j'ai parlé est le développement de capacités militaires européennes, je pense, par exemple, aux satellites d'observation.

Une troisième piste est l'engagement d'une politique de formation commune, dotée d'un tronc commun, un « Erasmus militaire », en quelque sorte.

Une quatrième idée a trait à la mise en place d'un plan d'évacuation des ressortissants des États membres, de manière à être mieux coordonnés et plus efficaces en cas de crise.

La priorité, c'est le développement de l'Europe de la défense. Il y a aujourd'hui, de toute évidence, un manque de souffle sur cette question et il est donc nécessaire de relancer ce projet. Toutefois, l'Europe de la défense ne pourra pas se construire contre l'OTAN. Si vous évoquez la question en estimant que l'Europe de la défense s'oppose à l'OTAN ou cherche à l'affaiblir, nous ne progresserons jamais sur ce sujet.

La position française est donc simple : nous voulons faire progresser l'Europe de la défense non pas en nous opposant à l'OTAN mais de façon complémentaire avec elle, afin que nos partenaires européens acceptent ce développement.

Pour la plupart de nos partenaires européens, l'Europe de la défense, dès l'origine, a souvent été vécue comme contradictoire ou en opposition avec l'OTAN. Dès lors que nous affichons clairement que l'OTAN est un système de sécurité collectif qui a ses responsabilités, qui permet d'assurer la stabilité et la sécurité du continent européen, nous pouvons progresser sur l'Europe de la défense. Si nous sommes perçus comme voulant opposer l'une à l'autre, nous n'y parviendrons pas. Il n'y a donc pas de « course à l'OTAN ». Il y a, au contraire, la volonté de faire en sorte que, par une clarification des positions, l'Europe de la défense puisse avancer.

En conclusion, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission dont, je l'espère, vous allez tout à l'heure adopter les crédits, s'adresse aux hommes et aux femmes qui servent au ministère de la défense. Je suis certain que, comme moi, vous vous associerez, et la nation avec vous, à l'hommage que nous devons rendre à nos militaires qui ont fait le choix de servir la France, parfois au risque de leur vie.

En votant ce budget, vous apporterez votre soutien à une institution placée au coeur de la vie sociale, industrielle, économique de notre pays et qui nous rend un service indispensable : la défense, la sécurité, ainsi que la souveraineté de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Défense
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Articles additionnels après l'article 41 quater (début)

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l'état B.

État B

(en euros)

Mission

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Défense

35 976 399 571

36 765 615 661

Environnement et prospective de la politique de défense

1 686 645 347

1 654 546 754

Dont titre 2

498 411 666

498 411 666

Préparation et emploi des forces

20 972 560 160

21 249 842 723

Dont titre 2

15 142 211 280

15 142 211 280

Soutien de la politique de la défense

3 461 765 068

3 439 503 940

Dont titre 2

1 757 159 385

1 757 159 385

Équipement des forces

9 855 428 996

10 421 722 244

Dont titre 2

892 448 182

892 448 182

M. le président. L'amendement n° II-108, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense Dont Titre 2

 

 

 

 

Préparation et emploi des forcesDont Titre 2

 

 

 

 

Soutien de la politique de la défenseDont Titre 2

 

10 000 000

 

10 000 000

Équipement des forcesDont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

 

  10 000 000

 

  10 000 000

SOLDE

- 10 000 000

- 10 000 000

 

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo

M. Yves Pozzo di Borgo. Cet amendement, auquel j'ai fait allusion lors de la discussion générale, a pour objet de réduire les crédits de paiement et les autorisations d'engagement de l'action 04 - sous-action 42 - du programme 212, qui prévoit le financement du transfert de l'état-major de l'armée de terre à l'École militaire de Paris.

J'avais déjà déposé un amendement similaire l'année dernière mais, devant la totale opposition de votre prédécesseur, monsieur le ministre, je l'avais retiré.

Je présenterai deux arguments, qui me paraissent justifier cette proposition et que j'exprime en tant qu'élu local de Paris.

Le viie arrondissement est celui des ministères, de Matignon. Ces ministères, Matignon lui-même, sont installés dans des hôtels particuliers très anciens appartenant à de vieilles familles qui ont fait l'Histoire. Outre leur beauté et leur intérêt historique, ces hôtels particuliers contribuent à l'image du pouvoir que les ministères représentent.

Depuis une trentaine d'années, compte tenu de l'éclatement des structures administratives, ces constructions ne sont plus suffisantes. De grands ministères ont pris conscience de cette situation. Ainsi, l'équipement a déménagé mais il a gardé dans le viie arrondissement son hôtel particulier, qui lui permet d'afficher sa puissance. Les affaires étrangères s'apprêtent également à s'excentrer.

Le ministère de la santé s'est installé de façon un peu brutale avenue de Ségur. Deux grands ministères n'ont pas bougé : celui de l'éducation nationale, auquel j'appartenais d'ailleurs avant d'être sénateur, et celui de la défense.

Le viie arrondissement, c'est le quartier de l'armée, plus que celui de Matignon. Les habitants en sont très fiers. L'axe qui part du Trocadéro, descend vers la tour Eiffel, le Champ de Mars et l'École militaire constitue un ensemble de lieux auxquels, depuis toujours, nous avons souhaité redonner leur vocation historique.

Malraux a voulu faire des Invalides un lieu de mémoire militaire. Il avait fallu insister auprès de l'armée pour qu'elle accepte de quitter ce lieu extraordinaire. Nous rencontrons actuellement le même problème avec l'École militaire. L'armée de terre, pour différentes raisons que je ne vais pas expliciter, souhaite investir ce lieu historique ; je crois même qu'elle veut édifier un bâtiment supplémentaire. Cette décision me paraît néanmoins inopportune.

À ce premier argument, s'ajoute un second.

Très peu de lieux à Paris sont susceptibles d'accueillir les grandes écoles. Nos grandes écoles civiles se sont affaiblies parce qu'elles ont quitté Paris. Elles restent de grandes écoles françaises mais non plus internationales parce qu'elles ont quitté ce lieu mythique qu'est Paris. Le problème est que les élites internationales viennent à Paris et non ailleurs, c'est malheureux, mais c'est ainsi. Si l'on souhaite, au sein du ministère de la défense, créer une grande école européenne de la défense - c'est bien sûr au ministre, au Président de la République et à l'armée d'en décider -, on a intérêt à conserver à ce lieu mythique qu'est l'École militaire sa vocation d'éducation.

Telle est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Cet amendement a pour objet de réduire de 10 millions d'euros les crédits de paiement et les autorisations d'engagement de l'action 04 - sous-action 42 - du programme 212 et de contester la décision, incertaine selon son auteur, de transférer l'état-major de l'armée de terre de l'îlot Saint-Germain, qui est en cours de réorganisation, à l'École militaire de Paris.

La commission n'a pas examiné cet amendement. Cependant, il l'a été, ici même, dans des termes à peu près similaires l'année dernière. Il avait été dit que ce transfert permettait de conserver, d'une part, le caractère architectural de l'École militaire (M. Yves Pozzo di Borgo fait un signe de dénégation), que tout le monde apprécie et, d'autre part, l'aspect de centre de recherche affecté à cette école.

Ces observations étant faites, la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Morin, ministre. Monsieur le sénateur, je souhaite que vous retiriez votre amendement afin de préserver les 10 millions d'euros de crédits d'infrastructures dont le ministère de la défense a tellement besoin. Ce programme a été gelé sur ma décision dans l'attente des conclusions de la révision générale des politiques publiques. Il n'est donc pas question pour le moment que nous lancions des travaux.

Sans pouvoir vous en dire plus pour le moment, je souligne que d'autres hypothèses sont à l'étude et qu'elles sont de nature à vous rassurer pleinement, car il est probable que l'armée de terre s'installera dans un autre lieu.

M. le président. Monsieur Pozzo di Borgo, l'amendement n° II-108 est-il maintenu ?

M. Yves Pozzo di Borgo. La réponse de M. le ministre me donnant beaucoup d'espoir, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-108 est retiré.

L'amendement n° II-29, présenté par MM. Fréville et Trucy, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Environnement et prospective de la politique de défense Dont Titre 2

 

90.00090.000

 

90.00090.000

Préparation et emploi des forcesDont Titre 2

270.000

270.000

 

270.000

270.000

 

Soutien de la politique de la défenseDont Titre 2

 

90.00090.000

 

90.00090.000

Équipement des forcesDont Titre 2

 

90.00090.000

 

90.00090.000

TOTAL

270.000

270.000

270.000

270.000

SOLDE

0

0

 

La parole est à M. François Trucy, rapporteur spécial.

M. François Trucy, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le ministre, il s'agit là d'une question de principe que la commission des finances avait déjà soulevée de la même manière l'an dernier.

En effet, en ce qui concerne le financement des OPEX - dont on a surabondamment parlé ce soir encore - une inscription de crédits est prévue, alors que rien n'est prévu pour le financement des OPINT. Bien entendu, il n'est pas question de comparer le volume des crédits des OPEX, qui sont évalués à 681 millions d'euros en 2007, avec celui des OPINT. Pourtant, il s'agit là de deux obligations qui, même si elles ne sont pas de même nature ni de même taille, sont tout aussi importantes.

L'inscription d'un budget de 90 000 euros au profit des OPINT que la commission des finances vous propose satisfait donc à une mesure de principe, puisque, dès lors qu'il existe une mission, il faut qu'il y ait des crédits. Tel est l'esprit dans lequel cet amendement a été déposé.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Morin, ministre. Je suis favorable à cet amendement afin d'aller dans le sens vertueux auquel, chaque année, le Sénat nous invite.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-29.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense » figurant à l'état B.

Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission « Défense », modifiés.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 49 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 327
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 201
Contre 126

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. J'appelle en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels et qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Défense ».

Article 33 et Etat B
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2008
Articles additionnels après l'article 41 quater (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l'article 41 quater

M. le président. L'amendement n° II-30, présenté par MM. Fréville et Trucy, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. Après l'article 41 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement transmet au Parlement un rapport présentant les résultats des expérimentations menées pour la mise en oeuvre du nouveau régime dérogatoire d'avance de trésorerie dite avance « activité des forces », dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi.

II. En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Défense

La parole est à M. Yves Fréville, rapporteur spécial.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial. Les forces armées connaissent ce que l'on appelle les « dépenses à bon compte et fonds d'avance », dont le montant total s'élevait à 10,5 milliards d'euros. C'est une procédure héritée de l'Ancien Régime : le colonel partait avec ses fonds, qu'il utilisait de manière assez souple et assez libre.

Aujourd'hui, cette procédure a été bien entendu modifiée : les avances de trésorerie pour la solde ont été régularisées, ainsi que les avances pour l'alimentation. Reste ce que l'on appelle le système des « masses », qui donne une certaine souplesse dans l'utilisation des fonds. Qui dit souplesse dit avantages, mais aussi inconvénients, y compris au regard de la LOLF.

Le ministère est en train de réformer ce système, de façon intelligente puisqu'il le fait essentiellement en suivant une méthode expérimentale. Nous avons d'ailleurs rendu visite à deux unités qui appliquent cette réforme.

Il serait intéressant, monsieur le ministre, que vous puissiez nous présenter un rapport sur les résultats de cette expérimentation, afin de vérifier que la LOLF est bien respectée, la souplesse obtenue et les contrôles nécessaires réalisés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Morin, ministre. Une réforme du système est en effet en cours, sur la demande de la Cour des comptes. Nous la menons sous la forme d'une expérimentation qui aura lieu au cours de l'année 2008.

Je veux bien émettre un avis favorable sur cet amendement, mais je risque de ne pas pouvoir vous remettre un rapport avant le dernier trimestre de l'année 2008, puisque l'expérimentation ne se terminera qu'à la fin de l'année prochaine.

Monsieur le rapporteur spécial, si vous en étiez d'accord, nous pourrions convenir de nous rencontrer, afin que vous procédiez vous-même à l'évaluation de la situation, compte tenu des pouvoirs de contrôle sur pièces et sur place qui sont les vôtres.

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, rapporteur spécial.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, je vous propose de rectifier mon amendement en remplaçant les mots : « dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi » par les mots : « à la fin de la période d'expérimentation ».

M. Hervé Morin, ministre. Dans ces conditions, j'émets un avis favorable.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° II-30 rectifié, présenté par MM. Fréville et Trucy, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :

I. Après l'article 41 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement transmet au Parlement un rapport présentant les résultats des expérimentations menées pour la mise en oeuvre du nouveau régime dérogatoire d'avance de trésorerie dite avance « activité des forces », à la fin de l'expérimentation.

II. En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Défense

Je mets aux voix l'amendement n° II-30 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 41 quater.

L'amendement n° II-31 rectifié, présenté par MM. Fréville et Trucy, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l'article 41 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement transmet au Parlement chaque année, avant le 30 juin, l'état pluriannuel actualisé des besoins de financement dans le domaine des équipements de la défense.

La parole est à M. Yves Fréville, rapporteur spécial.

M. Yves Fréville, rapporteur spécial. La LOLF ne traite de la pluriannualité que sous un angle purement juridique. Or le Parlement a souvent besoin d'avoir une vision, sinon définitive, du moins indicative, de l'évolution des crédits d'équipement.

La commission des finances a apprécié l'effort qui a été accompli dans le « bleu » budgétaire de cette année, où la vision de l'échéancier des paiements en matière d'équipements est améliorée. Ces programmes d'équipement durent parfois une vingtaine d'années ; je pense par exemple au programme des FREMM.

L'année dernière, le Parlement avait voté un amendement présenté par la commission des finances, devenu l'article 104 de la loi de finances pour 2007, qui prévoyait que le Gouvernement informerait les commissions des finances de l'échéancier des paiements des grands programmes d'équipement dépassant un milliard d'euros - l'échelle était considérable -, sous réserve, bien entendu, du respect du secret-défense.

En 2008, nous souhaiterions aller plus loin et disposer d'un échéancier plus global, cette notion étant discutée avec les commissions des finances, de manière à avoir une vision de l'échéancier pluriannuel des dépenses d'équipement. À l'évidence, cet échéancier serait purement indicatif et n'aurait pas de valeur juridique, mais il apporterait aux commissions des finances et, par là même, à l'ensemble du Parlement, les éléments qui ont fait défaut cette année.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Hervé Morin, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, nous allons vous donner plus que satisfaction sur cette question.

En premier lieu, je pense que nous devons évoluer vers une programmation glissante. En effet, il me paraît nécessaire de disposer d'une actualisation de notre loi de programmation au fur et à mesure de l'évolution des programmes, des nécessités opérationnelles, etc.

En second lieu - la question est encore en cours de discussion au sein du Gouvernement - je souhaite que nous nous orientions vers un budget triennal, c'est-à-dire que nous puissions disposer, dans le cadre du vote du budget annuel, d'une projection sur trois ans, qui nous donnerait une vraie perspective budgétaire.

J'espère présenter au Parlement, au printemps prochain, une loi de programmation glissante. J'espère aussi que le budget pour 2009, en conservant la construction annuelle qui résulte du cadre légal et constitutionnel dans lequel nous évoluons, comportera également une projection sur trois ans.

Compte tenu de tous ces éléments, il me semble que vous pourriez retirer votre amendement.