Article 5
Le titre XI du livre Ier du même code est ainsi rédigé :
« TITRE XI
« DE LA MAJORITÉ ET DES MAJEURS PROTÉGÉS PAR LA LOI
« CHAPITRE IER
« Des dispositions générales
« Art. 414. - La majorité est fixée à dix-huit ans accomplis ; à cet âge, chacun est capable d'exercer les droits dont il a la jouissance.
« Section 1
« Des dispositions indépendantes des mesures de protection
« Art. 414-1. - Pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte.
« Art. 414-2. - De son vivant, l'action en nullité n'appartient qu'à l'intéressé.
« Après sa mort, les actes faits par lui, autres que la donation entre vifs et le testament, ne peuvent être attaqués par ses héritiers, pour insanité d'esprit, que dans les cas suivants :
« 1° Si l'acte porte en lui-même la preuve d'un trouble mental ;
« 2° S'il a été fait alors que l'intéressé était placé sous sauvegarde de justice ;
« 3° Si une action a été introduite avant son décès aux fins d'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle ou si effet a été donné au mandat de protection future.
« L'action en nullité s'éteint par le délai de cinq ans prévu à l'article 1304.
« Art. 414-3. - Celui qui a causé un dommage à autrui alors qu'il était sous l'empire d'un trouble mental n'en est pas moins obligé à réparation.
« Section 2
« Des dispositions communes aux majeurs protégés
« Art. 415. - Les personnes majeures reçoivent la protection de leur personne et de leurs biens que leur état ou leur situation rend nécessaire selon les modalités prévues au présent titre.
« Cette protection est instaurée et appliquée dans le respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne.
« Elle a pour finalité l'intérêt de la personne protégée. Elle favorise, dans la mesure du possible, l'autonomie de celle-ci.
« Elle est un devoir des familles et de la collectivité publique.
« Art. 416. - Le juge des tutelles et le procureur de la République exercent une surveillance générale des mesures de protection dans leur ressort.
« Ils peuvent visiter ou faire visiter les personnes protégées et celles qui font l'objet d'une demande de protection, quelle que soit la mesure prononcée ou sollicitée.
« Les personnes chargées de la protection sont tenues de déférer à leur convocation et de leur communiquer toute information qu'ils requièrent.
« Art. 417. - Le juge des tutelles peut prononcer des injonctions contre les personnes chargées de la protection et condamner à l'amende civile prévue par le nouveau code de procédure civile celles qui n'y ont pas déféré.
« Il peut les dessaisir de leur mission en cas de manquement caractérisé dans l'exercice de celle-ci, après les avoir appelés ou entendus.
« Il peut, dans les mêmes conditions, demander au procureur de la République de solliciter la radiation d'un mandataire judiciaire à la protection des majeurs de la liste prévue à l'article L. 461-2 du code de l'action sociale et des familles.
« Art. 418. - Sans préjudice de l'application des règles de la gestion d'affaires, le décès de la personne protégée met fin à la mission de la personne chargée de la protection.
« Art. 418-1. - Supprimé.........................................................
« Art. 419. - Les personnes autres que le mandataire judiciaire à la protection des majeurs exercent à titre gratuit les mesures judiciaires de protection. Toutefois, le juge des tutelles ou le conseil de famille s'il a été constitué, peut autoriser, selon l'importance des biens gérés ou la difficulté d'exercer la mesure, le versement d'une indemnité à la personne chargée de la protection. Cette indemnité est à la charge de la personne protégée.
« Si la mesure judiciaire de protection est exercée par un mandataire judiciaire à la protection des majeurs, son financement est à la charge totale ou partielle de la personne protégée en fonction de ses ressources et selon les modalités prévues par le code de l'action sociale et des familles.
« Lorsque le financement de la mesure ne peut être intégralement assuré par la personne protégée, il est pris en charge par la collectivité publique.
« À titre exceptionnel, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué, peut, après avoir recueilli l'avis du procureur de la République, allouer au mandataire judiciaire à la protection des majeurs, pour l'accomplissement d'un acte ou d'une série d'actes requis par la mesure de protection et impliquant des diligences particulièrement longues ou complexes, une indemnité en complément des sommes perçues au titre des deux alinéas précédents lorsqu'elles s'avèrent manifestement insuffisantes. Cette indemnité est à la charge de la personne protégée.
« Le mandat de protection future s'exerce à titre gratuit sauf stipulations contraires.
« Art. 420. - Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs ne peuvent, à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, percevoir aucune autre somme ou bénéficier d'aucun avantage financier en relation directe ou indirecte avec les missions dont ils ont la charge.
« Ils ne peuvent délivrer un mandat de recherche des héritiers de la personne protégée.
« Art. 421. - Tous les organes de la mesure de protection judiciaire sont responsables du dommage résultant d'une faute quelconque qu'ils commettent dans l'exercice de leur fonction. Toutefois, sauf cas de curatelle renforcée, le curateur et le subrogé curateur n'engagent leur responsabilité, du fait des actes accomplis avec leur assistance, qu'en cas de dol ou de faute lourde.
« Art. 422. - Lorsque la faute à l'origine du dommage a été commise dans l'organisation et le fonctionnement de la mesure de protection par le juge des tutelles, le greffier en chef du tribunal d'instance ou le greffier, l'action en responsabilité diligentée par la personne protégée ou ayant été protégée ou par ses héritiers est dirigée contre l'État qui dispose d'une action récursoire.
« Lorsque la faute à l'origine du dommage a été commise par le mandataire judiciaire à la protection des majeurs, l'action en responsabilité peut être dirigée contre celui-ci ou contre l'État qui dispose d'une action récursoire.
« Art. 423. - L'action en responsabilité se prescrit par cinq ans à compter de la fin de la mesure de protection alors même que la gestion aurait continué au-delà. Toutefois, lorsque la curatelle a cessé par l'ouverture d'une mesure de tutelle, le délai ne court qu'à compter de l'expiration de cette dernière.
« Art. 424. - Le mandataire de protection future engage sa responsabilité pour l'exercice de son mandat dans les conditions prévues à l'article 1992.
« CHAPITRE II
« Des mesures de protection juridique des majeurs
« Section 1
« Des dispositions générales
« Art. 425. - Toute personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté, peut bénéficier d'une mesure de protection juridique prévue au présent chapitre.
« S'il n'en est disposé autrement, la mesure est destinée à la protection tant de la personne que des intérêts patrimoniaux de celle-ci. Elle peut toutefois être limitée expressément à l'une de ces deux missions.
« Art. 426. - Le logement de la personne protégée et les meubles dont il est garni sont conservés à la disposition de celle-ci aussi longtemps qu'il est possible.
« Le pouvoir d'administrer les biens mentionnés au premier alinéa ne permet que des conventions de jouissance précaire qui cessent, malgré toutes dispositions ou stipulations contraires, dès le retour de la personne protégée dans son logement.
« S'il devient nécessaire ou s'il est de l'intérêt de la personne protégée qu'il soit disposé des droits relatifs à son logement ou à son mobilier par l'aliénation, la résiliation ou la conclusion d'un bail, l'acte est autorisé par le juge ou par le conseil de famille s'il a été constitué, sans préjudice des formalités que peut requérir la nature des biens. L'avis préalable d'un médecin inscrit sur la liste prévue à l'article 431 est requis si l'acte a pour finalité l'accueil de l'intéressé dans un établissement. Dans tous les cas, les souvenirs, les objets à caractère personnel, ceux indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades sont gardés à la disposition de l'intéressé, le cas échéant par les soins de l'établissement dans lequel celui-ci est hébergé.
« Art. 427. - La personne chargée de la mesure de protection ne peut procéder à la modification des comptes ou livrets ouverts au nom de la personne protégée auprès d'un établissement habilité à recevoir des fonds du public.
« Si l'intérêt de celle-ci le commande, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué autorise cette modification.
« Un compte est ouvert au nom de la personne protégée auprès de la Caisse des dépôts et consignations par la personne chargée de la protection si le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué l'estime nécessaire.
« Lorsque la personne protégée n'est titulaire d'aucun compte ou livret, la personne chargée de la mesure de protection lui en ouvre un.
« Les opérations bancaires d'encaissement, de paiement et de gestion patrimoniale effectuées au nom et pour le compte de la personne protégée sont réalisées exclusivement au moyen des comptes ouverts au nom de celle-ci, sous réserve des dispositions applicables aux mesures de protection confiées aux personnes ou services préposés des établissements de santé et des établissements sociaux ou médico-sociaux soumis aux règles de la comptabilité publique.
« Les fruits, produits et plus-values générés par les fonds et les valeurs appartenant à la personne protégée lui reviennent exclusivement.
« Si la personne protégée a fait l'objet d'une interdiction d'émettre des chèques, la personne chargée de la mesure de protection peut néanmoins, avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, faire fonctionner sous sa signature les comptes dont la personne protégée est titulaire.
« Section 2
« Des dispositions communes aux mesures judiciaires
« Art. 428. - La mesure de protection ne peut être ordonnée par le juge qu'en cas de nécessité et lorsqu'il ne peut être suffisamment pourvu aux intérêts de la personne par l'application des règles du droit commun de la représentation, de celles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et des règles des régimes matrimoniaux, en particulier celles prévues aux articles 217, 219, 1426 et 1429, par une autre mesure de protection judiciaire ou par le mandat de protection future conclu par l'intéressé.
« La mesure est proportionnée au degré d'altération des facultés personnelles de l'intéressé et individualisée en fonction de celui-ci.
« Art. 429. - La mesure de protection judiciaire peut être ouverte pour un mineur émancipé comme pour un majeur.
« Pour un mineur non émancipé, la demande peut être introduite et jugée dans la dernière année de sa minorité. La mesure de protection judiciaire ne prend toutefois effet que du jour de sa majorité.
« Art. 430. - La demande d'ouverture de la mesure peut être présentée au juge par la personne qu'il y a lieu de protéger ou, selon le cas, par son conjoint, le partenaire avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité ou son concubin, à moins que la vie commune ait cessé entre eux, ou par un parent ou un allié, une personne entretenant avec le majeur des liens étroits et stables, ou la personne qui exerce à son égard une mesure de protection juridique.
« Elle peut être également présentée par le ministère public, soit d'office, soit à la demande d'un tiers.
« Art. 431. - La demande est accompagnée, à peine d'irrecevabilité, d'un certificat circonstancié rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le procureur de la République.
« Le coût de ce certificat est fixé par décret en Conseil d'État.
« Art. 431-1. - Pour l'application du dernier alinéa de l'article 426 et de l'article 431, le médecin inscrit sur la liste mentionnée à l'article 431 peut solliciter l'avis du médecin traitant de la personne protégée.
« Art. 432. - Le juge statue, la personne entendue ou appelée. L'intéressé peut être accompagné par un avocat ou toute autre personne de son choix.
« Le juge peut toutefois, par décision spécialement motivée et sur avis du médecin mentionné à l'article 431, décider qu'il n'y a pas lieu de procéder à l'audition de l'intéressé si celle-ci est de nature à porter atteinte à sa santé ou si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée.
« Section 3
« De la sauvegarde de justice
« Art. 433. - Le juge peut placer sous sauvegarde de justice la personne qui, pour l'une des causes prévues à l'article 425, a besoin d'une protection juridique temporaire ou d'être représentée pour l'accomplissement de certains actes déterminés.
« Cette mesure peut aussi être prononcée par le juge, saisi d'une procédure de curatelle ou de tutelle, pour la durée de l'instance.
« Par dérogation à l'article 432, le juge peut, en cas d'urgence, statuer sans avoir procédé à l'audition de la personne. En ce cas, il entend celle-ci dans les meilleurs délais, sauf si, sur avis médical, son audition est de nature à porter préjudice à sa santé ou si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée.
« Art. 434. - La sauvegarde de justice peut également résulter d'une déclaration faite au procureur de la République dans les conditions prévues par l'article L. 3211-6 du code de la santé publique.
« Art. 435. - La personne placée sous sauvegarde de justice conserve l'exercice de ses droits. Toutefois, elle ne peut, à peine de nullité, faire un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné en application de l'article 437.
« Les actes qu'elle a passés et les engagements qu'elle a contractés pendant la durée de la mesure peuvent être rescindés pour simple lésion ou réduits en cas d'excès alors même qu'ils pourraient être annulés en vertu de l'article 414-1. Les tribunaux prennent notamment en considération l'utilité ou l'inutilité de l'opération, l'importance ou la consistance du patrimoine de la personne protégée et la bonne ou mauvaise foi de ceux avec qui elle a contracté.
« L'action en nullité, en rescision ou en réduction n'appartient qu'à la personne protégée et, après sa mort, à ses héritiers. Elle s'éteint par le délai de cinq ans prévu à l'article 1304.
« Art. 436. - Le mandat par lequel la personne protégée a chargé une autre personne de l'administration de ses biens continue à produire ses effets pendant la sauvegarde de justice à moins qu'il soit révoqué par le juge des tutelles, le mandataire étant entendu ou appelé.
« En l'absence de mandat, les règles de la gestion d'affaires sont applicables.
« Ceux qui ont qualité pour demander l'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle sont tenus d'accomplir les actes conservatoires indispensables à la préservation du patrimoine de la personne protégée dès lors qu'ils ont connaissance tant de leur urgence que de l'ouverture de la mesure de sauvegarde. Les mêmes dispositions sont applicables à la personne ou à l'établissement qui héberge la personne placée sous sauvegarde.
« Art. 437. - S'il y a lieu d'agir en dehors des cas définis à l'article 436, tout intéressé peut en donner avis au juge.
« Le juge peut désigner un mandataire spécial, dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles 445 et 448 à 451, à l'effet d'accomplir un ou plusieurs actes déterminés, même de disposition, rendus nécessaires par la gestion du patrimoine de la personne protégée. Le mandataire peut, notamment, recevoir mission d'exercer les actions prévues à l'article 435.
« Le mandataire spécial est tenu de rendre compte de l'exécution de son mandat à la personne protégée et au juge dans les conditions prévues aux articles 510 à 515.
« Art. 438. - Le mandataire spécial peut également se voir confier une mission de protection de la personne dans le respect des articles 458 à 463.
« Art. 439. - Sous peine de caducité, la mesure de sauvegarde de justice ne peut excéder un an, renouvelable une fois dans les conditions de l'article 442.
« Lorsque la sauvegarde de justice a été prononcée en application de l'article 433, le juge peut, à tout moment, en ordonner la mainlevée si le besoin de protection temporaire cesse.
« Lorsque la sauvegarde de justice a été ouverte en application de l'article 434, elle peut prendre fin par déclaration faite au procureur de la République si le besoin de protection temporaire cesse.
« Dans tous les cas, à défaut de mainlevée ou de déclaration de cessation, la sauvegarde de justice prend fin à l'expiration du délai ou après l'accomplissement des actes pour lesquels elle a été ordonnée. Elle prend également fin par l'ouverture d'une mesure de curatelle ou de tutelle à partir du jour où la nouvelle mesure de protection juridique prend effet.
« Section 4
« De la curatelle et de la tutelle
« Art. 440. - La personne qui, sans être hors d'état d'agir elle-même, a besoin, pour l'une des causes prévues à l'article 425, d'être assistée ou contrôlée d'une manière continue dans les actes importants de la vie civile peut être placée en curatelle.
« La curatelle n'est prononcée que s'il est établi que la sauvegarde de justice ne peut assurer une protection suffisante.
« La personne qui, pour l'une des causes prévues à l'article 425, doit être représentée d'une manière continue dans les actes de la vie civile, peut être placée en tutelle.
« La tutelle n'est prononcée que s'il est établi que ni la sauvegarde de justice ni la curatelle ne peuvent assurer une protection suffisante.
« Sous-section 1
« De la durée de la mesure
« Art. 441. - Le juge fixe la durée de la mesure sans que celle-ci puisse excéder cinq ans.
« Art. 442. - Le juge peut renouveler la mesure pour une même durée.
« Toutefois, lorsque l'altération des facultés personnelles de l'intéressé décrite à l'article 425 n'apparaît manifestement pas susceptible de connaître une amélioration selon les données acquises de la science, le juge peut, par décision spécialement motivée et sur avis conforme du médecin mentionné à l'article 431, renouveler la mesure pour une durée indéterminée.
« Le juge peut, à tout moment, mettre fin à la mesure, la modifier ou lui substituer une autre mesure prévue au présent titre, après avoir recueilli l'avis de la personne en charge de la mesure de protection.
« Il statue d'office ou à la requête d'une des personnes mentionnées à l'article 430, au vu d'un certificat médical et dans les conditions prévues à l'article 432. Il ne peut toutefois renforcer le régime de protection de l'intéressé que s'il est saisi d'une requête en ce sens satisfaisant aux articles 430 et 431.
« Il peut, à tout moment, y mettre fin, la modifier ou lui substituer une autre mesure prévue au présent titre, après avoir recueilli l'avis de la personne en charge de la mesure de protection.
« Art. 443. - La mesure prend fin, en l'absence de renouvellement, à l'expiration du délai fixé, en cas de jugement de mainlevée passé en force de chose jugée ou en cas de décès de l'intéressé.
« La mesure prend également fin lorsque la personne protégée choisit de fixer sa résidence habituelle en dehors du territoire national. Elle ne cesse pas automatiquement si le juge est informé que le majeur est hébergé et soigné dans un établissement situé en dehors du territoire national. Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent alinéa.
« Sous-section 2
« De la publicité de la mesure
« Art. 444. - Les jugements portant ouverture, modification ou mainlevée de la curatelle ou de la tutelle ne sont opposables aux tiers que deux mois après que la mention en a été portée en marge de l'acte de naissance de la personne protégée selon les modalités prévues par le nouveau code de procédure civile.
« Toutefois, même en l'absence de cette mention, ils sont opposables aux tiers qui en ont personnellement connaissance.
« Sous-section 3
« Des organes de protection
« Art. 445. - Les charges curatélaires et tutélaires sont soumises aux conditions prévues pour les charges tutélaires des mineurs par les articles 395 à 397. Toutefois, les pouvoirs dévolus par l'article 397 au conseil de famille sont exercés par le juge en l'absence de constitution de cet organe.
« Les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux ne peuvent exercer une charge curatélaire ou tutélaire à l'égard de leurs patients.
« Paragraphe 1
« Du curateur et du tuteur
« Art. 446. - Un curateur ou un tuteur est désigné pour la personne protégée dans les conditions prévues au présent paragraphe et sous réserve des pouvoirs conférés au conseil de famille s'il a été constitué.
« Art. 447. - Le curateur ou le tuteur est désigné par le juge.
« Celui-ci peut, en considération de la situation de la personne protégée, des aptitudes des intéressés et de la consistance du patrimoine à administrer, désigner plusieurs curateurs ou plusieurs tuteurs pour exercer en commun la mesure de protection. Chaque curateur ou tuteur est réputé, à l'égard des tiers, avoir reçu des autres le pouvoir de faire seul les actes pour lesquels un tuteur n'aurait besoin d'aucune autorisation.
« Le juge peut diviser la mesure de protection entre un curateur ou un tuteur chargé de la protection de la personne et un curateur ou un tuteur chargé de la gestion patrimoniale. Il peut confier la gestion de certains biens à un curateur ou à un tuteur adjoint.
« À moins que le juge en ait décidé autrement, les personnes désignées en application de l'alinéa précédent sont indépendantes et ne sont pas responsables l'une envers l'autre. Elles s'informent toutefois des décisions qu'elles prennent.
« Art. 448. - La désignation par une personne capable d'une ou plusieurs personnes chargées d'exercer les fonctions de curateur ou de tuteur pour le cas où elle serait placée en curatelle ou en tutelle, s'impose au juge sauf si la personne désignée refuse la mission ou est dans l'impossibilité de l'exercer ou si l'intérêt de la personne protégée commande de l'écarter. En cas de difficulté, le juge statue.
« Il en est de même lorsque le dernier vivant des père et mère qui exerce l'autorité parentale sur son enfant mineur ou qui assume la charge matérielle et affective de son enfant majeur, désigne une ou plusieurs personnes chargées d'exercer les fonctions de curateur ou de tuteur à compter du jour où lui-même décédera ou ne pourra plus continuer à prendre soin de l'intéressé.
« Art. 449. - À défaut de désignation faite en application de l'article 448, le juge nomme, comme curateur ou tuteur, le conjoint de la personne protégée, le partenaire avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité ou son concubin, à moins que la vie commune ait cessé entre eux ou qu'une autre cause empêche de leur confier la mesure.
« À défaut de nomination faite en application de l'alinéa précédent et sous la dernière réserve qui y est mentionnée, le juge désigne un parent, un allié ou une personne résidant avec le majeur protégé et entretenant avec lui des liens étroits et stables.
« Le juge prend en considération les sentiments exprimés par celui-ci, ses relations habituelles, l'intérêt porté à son égard et les recommandations éventuelles de ses parents et alliés ainsi que de son entourage.
« Art. 450. - Lorsqu'aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut assumer la curatelle ou la tutelle, le juge désigne un mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrit sur la liste prévue à l'article L. 461-2 du code de l'action sociale et des familles. Ce mandataire ne peut, en tout état de cause, refuser d'accomplir les actes urgents que commande l'intérêt de la personne protégée, notamment les actes conservatoires indispensables à la préservation de son patrimoine.
« Art. 451. - Si la personne est hébergée ou soignée dans un établissement de santé ou dans un établissement social ou médico-social, le juge peut désigner, en qualité de curateur ou de tuteur, une personne ou un service préposé de l'établissement inscrit sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs au titre du 1° ou du 3° de l'article L. 461-2 du code de l'action sociale et des familles, qui exerce ses fonctions dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État.
« La mission confiée au mandataire s'étend à la protection de la personne, sauf décision contraire du juge.
« Art. 452. - La curatelle et la tutelle sont des charges personnelles.
« Le curateur et le tuteur peuvent toutefois s'adjoindre, sous leur propre responsabilité, le concours de tiers capables pour l'accomplissement de certains actes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État.
« Art. 453. - Nul n'est tenu de conserver la curatelle ou la tutelle d'une personne au-delà de cinq ans, à l'exception du conjoint, du partenaire du pacte civil de solidarité et des enfants de l'intéressé ainsi que des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.
« Paragraphe 2
« Du subrogé curateur et du subrogé tuteur
« Art. 454. - Le juge peut, s'il l'estime nécessaire et sous réserve des pouvoirs du conseil de famille s'il a été constitué, désigner un subrogé curateur ou un subrogé tuteur.
« Si le curateur ou le tuteur est parent ou allié de la personne protégée dans une branche, le subrogé curateur ou le subrogé tuteur est choisi, dans la mesure du possible, dans l'autre branche.
« Lorsqu'aucun membre de la famille ou aucun proche ne peut assumer les fonctions de subrogé curateur ou de subrogé tuteur, un mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrit sur la liste prévue à l'article L. 461-2 du code de l'action sociale et des familles peut être désigné.
« À peine d'engager sa responsabilité à l'égard de la personne protégée, le subrogé curateur ou le subrogé tuteur surveille les actes passés par le curateur ou par le tuteur en cette qualité et informe sans délai le juge s'il constate des fautes dans l'exercice de sa mission.
« Le subrogé curateur ou le subrogé tuteur assiste ou représente, selon le cas, la personne protégée lorsque les intérêts de celle-ci sont en opposition avec ceux du curateur ou du tuteur ou lorsque l'un ou l'autre ne peut lui apporter son assistance ou agir pour son compte en raison des limitations de sa mission.
« Il est informé et consulté par le curateur ou le tuteur avant tout acte grave accompli par celui-ci.
« La charge du subrogé curateur ou du subrogé tuteur cesse en même temps que celle du curateur ou du tuteur. Le subrogé curateur ou le subrogé tuteur est toutefois tenu de provoquer le remplacement du curateur ou du tuteur en cas de cessation des fonctions de celui-ci sous peine d'engager sa responsabilité à l'égard de la personne protégée.
« Paragraphe 3
« Du curateur ad hoc et du tuteur ad hoc
« Art. 455. - En l'absence de subrogé curateur ou de subrogé tuteur, le curateur ou le tuteur dont les intérêts sont, à l'occasion d'un acte ou d'une série d'actes, en opposition avec ceux de la personne protégée ou qui ne peut lui apporter son assistance ou agir pour son compte en raison des limitations de sa mission, fait nommer par le juge ou par le conseil de famille s'il a été constitué, un curateur ou un tuteur ad hoc.
« Cette nomination peut également être faite à la demande du procureur de la République, de tout intéressé ou d'office.
« Paragraphe 4
« Du conseil de famille des majeurs en tutelle
« Art. 456. - Le juge peut organiser la tutelle avec un conseil de famille si les nécessités de la protection de la personne ou la nature de son patrimoine le justifient et si la composition de sa famille et de son entourage le permet.
« Le juge désigne les membres du conseil de famille en considération des sentiments exprimés par la personne protégée, de ses relations habituelles, de l'intérêt porté à son égard et des recommandations éventuelles de ses parents et alliés ainsi que de son entourage.
« Le conseil de famille désigne le tuteur, le subrogé tuteur et, le cas échéant, le tuteur ad hoc conformément aux articles 446 à 455.
« Il est fait application des règles prescrites pour le conseil de famille des mineurs à l'exclusion de celles prévues à l'article 398, au quatrième alinéa de l'article 399 et au premier alinéa de l'article 401. Pour l'application du troisième alinéa de l'article 402, le délai court, lorsque l'action est exercée par le majeur protégé, à compter du jour où la mesure de protection prend fin.
« Art. 457. - Le juge peut autoriser le conseil de famille à se réunir et délibérer hors de sa présence sur l'ordre du jour qui lui a été préalablement transmis pour information lorsque ce dernier a désigné un mandataire judiciaire à la protection des majeurs comme tuteur ou subrogé tuteur. Le conseil de famille désigne alors un président et un secrétaire parmi ses membres, à l'exclusion du tuteur et du subrogé tuteur.
« Les décisions prises par le conseil de famille ne prennent effet qu'à défaut d'opposition formée par le juge, dans les conditions fixées par le nouveau code de procédure civile.
« Le président exerce les missions dévolues au juge pour la convocation, la réunion et la délibération du conseil de famille. Le juge peut toutefois, à tout moment, convoquer une réunion du conseil de famille sous sa présidence.
« Sous-section 4
« Des effets de la curatelle et de la tutelle quant à la protection de la personne
« Art. 457-1. - La personne protégée reçoit de la personne chargée de sa protection, selon des modalités adaptées à son état et sans préjudice des informations que les tiers sont tenus de lui dispenser en vertu de la loi, toutes informations sur sa situation personnelle, les actes concernés, leur utilité, leur degré d'urgence, leurs effets et les conséquences d'un refus de sa part.
« Art. 458. - Sous réserve des dispositions particulières prévues par la loi, l'accomplissement des actes dont la nature implique un consentement strictement personnel ne peut jamais donner lieu à assistance ou représentation de la personne protégée.
« Sont réputés strictement personnels la déclaration de naissance d'un enfant, sa reconnaissance, les actes de l'autorité parentale relativement à la personne d'un enfant, la déclaration du choix ou du changement du nom d'un enfant et le consentement donné à sa propre adoption ou à celle de son enfant.
« Art. 459. - Hors les cas prévus à l'article 458, la personne protégée prend seule les décisions relatives à sa personne dans la mesure où son état le permet.
« Lorsque l'état de la personne protégée ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle éclairée, le juge peut, dans le jugement d'ouverture de la mesure ou ultérieurement, prévoir qu'elle bénéficiera, pour l'ensemble des actes relatifs à sa personne ou ceux d'entre eux qu'il énumère, de l'assistance de la personne chargée de sa protection. Au cas où cette assistance ne suffirait pas, le juge peut, après avoir ouvert, le cas échéant, une mesure de tutelle, autoriser le tuteur à représenter l'intéressé.
« La personne chargée de la protection du majeur peut prendre à l'égard de celui-ci les mesures de protection strictement nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de son comportement, l'intéressé ferait courir à lui-même. Elle en informe sans délai le juge.
« Toutefois, sauf urgence, la personne chargée de la protection du majeur ne peut, sans l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, prendre une décision ayant pour effet de porter gravement atteinte à l'intégrité corporelle de la personne protégée ou à l'intimité de sa vie privée.
« Art. 459-1 A. - L'application de la présente sous-section ne peut avoir pour effet de déroger aux dispositions particulières prévues par le code de la santé publique et le code de l'action sociale et des familles prévoyant l'intervention d'un représentant légal.
« Toutefois, lorsque la mesure de protection a été confiée à une personne ou un service préposé d'un établissement dans les conditions prévues à l'article 451, l'accomplissement des diligences et actes graves prévus par le code de la santé publique qui touchent à la personne et dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État est subordonné à une autorisation spéciale du juge. Celui-ci peut décider, notamment s'il estime qu'il existe un conflit d'intérêts, d'en confier la charge au subrogé curateur ou au subrogé tuteur, s'il a été nommé, et, à défaut, à un curateur ou à un tuteur ad hoc.
« Art. 459-1. - La personne protégée choisit le lieu de sa résidence.
« Elle entretient librement des relations personnelles avec tout tiers, parent ou non. Elle a le droit d'être visitée et le cas échéant hébergée par ceux-ci.
« En cas de difficulté, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué, statue.
« Art. 460. - Le mariage d'une personne en curatelle n'est permis qu'avec l'autorisation du curateur ou, à défaut, celle du juge.
« Le mariage d'une personne en tutelle n'est permis qu'avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué et après audition des futurs conjoints et recueil, le cas échéant, de l'avis des parents, des alliés et de l'entourage.
« Art. 461. - La personne en curatelle ne peut, sans l'assistance du curateur, signer la convention par laquelle elle conclut un pacte civil de solidarité. Aucune assistance n'est requise lors de la déclaration conjointe au greffe du tribunal d'instance prévue au premier alinéa de l'article 515-3.
« Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables en cas de modification de la convention.
« La personne en curatelle peut rompre le pacte civil de solidarité par déclaration conjointe ou par décision unilatérale. L'assistance de son curateur n'est requise que pour procéder à la signification prévue au cinquième alinéa de l'article 515-7.
« La personne en curatelle est assistée de son curateur dans les opérations prévues aux dixième et onzième alinéas de l'article 515-7.
« Pour l'application du présent article, le curateur est réputé en opposition d'intérêts avec la personne protégée lorsque la curatelle est confiée à son partenaire.
« Art. 462. - La conclusion d'un pacte civil de solidarité par une personne en tutelle est soumise à l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, après audition des futurs partenaires et recueil, le cas échéant, de l'avis des parents, des alliés et de l'entourage.
« L'intéressé est assisté de son tuteur lors de la signature de la convention. Aucune assistance ni représentation ne sont requises lors de la déclaration conjointe au greffe du tribunal d'instance prévue au premier alinéa de l'article 515-3.
« Les dispositions des alinéas précédents sont applicables en cas de modification de la convention.
« La personne en tutelle peut rompre le pacte civil de solidarité par déclaration conjointe ou par décision unilatérale. La formalité de signification prévue au cinquième alinéa de l'article 515-7 est opérée à la diligence du tuteur. Lorsque l'initiative de la rupture émane de l'autre partenaire, cette signification est faite à la personne du tuteur.
« La rupture unilatérale du pacte civil de solidarité peut également intervenir sur l'initiative du tuteur, autorisé par le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué, après audition de l'intéressé et recueil, le cas échéant, de l'avis des proches.
« Aucune assistance ni représentation ne sont requises pour l'accomplissement des formalités relatives à la rupture par déclaration conjointe.
« La personne en tutelle est représentée par son tuteur dans les opérations prévues aux dixième et onzième alinéas de l'article 515-7.
« Pour l'application du présent article, le tuteur est réputé en opposition d'intérêts avec la personne protégée lorsque la tutelle est confiée à son partenaire.
« Art. 463. - À l'ouverture de la mesure ou, à défaut, ultérieurement, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué décide des conditions dans lesquelles le curateur ou le tuteur chargé d'une mission de protection de la personne rend compte des diligences qu'il accomplit à ce titre.
« Sous-section 5
« De la régularité des actes
« Art. 464. - Les obligations résultant des actes accomplis par la personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d'ouverture de la mesure de protection peuvent être réduites sur la seule preuve que son inaptitude à défendre ses intérêts, par suite de l'altération de ses facultés personnelles, était notoire ou connue du cocontractant à l'époque où les actes ont été passés.
« Ces actes peuvent, dans les mêmes conditions, être annulés s'il est justifié d'un préjudice subi par la personne protégée.
« Par dérogation à l'article 2252, l'action doit être introduite dans les cinq ans de la date du jugement d'ouverture de la mesure.
« Art. 465. - À compter de la publicité du jugement d'ouverture, l'irrégularité des actes accomplis par la personne protégée ou par la personne chargée de la protection est sanctionnée dans les conditions suivantes :
« 1° Si la personne protégée a accompli seule un acte qu'elle pouvait faire sans l'assistance ou la représentation de la personne chargée de sa protection, l'acte reste sujet aux actions en rescision ou en réduction prévues à l'article 435 comme s'il avait été accompli par une personne placée sous sauvegarde de justice, à moins qu'il ait été expressément autorisé par le juge ou par le conseil de famille s'il a été constitué ;
« 2° Si la personne protégée a accompli seule un acte pour lequel elle aurait dû être assistée, l'acte ne peut être annulé que s'il est établi que la personne protégée a subi un préjudice ;
« 3° Si la personne protégée a accompli seule un acte pour lequel elle aurait dû être représentée, l'acte est nul de plein droit sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un préjudice ;
« 4° Si le tuteur ou le curateur a accompli seul un acte qui aurait dû être fait par la personne protégée soit seule, soit avec son assistance ou qui ne pouvait être accompli qu'avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, l'acte est nul de plein droit sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un préjudice.
« Le curateur ou le tuteur peut, avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, engager seul l'action en nullité, en rescision ou en réduction des actes prévus aux 1°, 2° et 3°.
« Dans tous les cas, l'action s'éteint par le délai de cinq ans prévu à l'article 1304.
« Pendant ce délai et tant que la mesure de protection est ouverte, l'acte prévu au 4° peut être confirmé avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué.
« Art. 466. - Les articles 464 et 465 ne font pas obstacle à l'application des articles 414-1 et 414-2.
« Sous-section 6
« Des actes faits dans la curatelle
« Art. 467. - La personne en curatelle ne peut, sans l'assistance du curateur, faire aucun acte qui, en cas de tutelle, requerrait une autorisation du juge ou du conseil de famille.
« Lors de la conclusion d'un acte écrit, l'assistance du curateur se manifeste par l'apposition de sa signature à côté de celle de la personne protégée.
« À peine de nullité, toute signification faite à cette dernière l'est également au curateur.
« Art. 468. - Les capitaux revenant à la personne en curatelle sont versés directement sur un compte ouvert à son seul nom et mentionnant son régime de protection, auprès d'un établissement habilité à recevoir des fonds du public.
« La personne en curatelle ne peut, sans l'assistance du curateur, faire emploi de ses capitaux.
« Cette assistance est également requise pour introduire une action en justice ou y défendre.
« Art. 469. - Le curateur ne peut se substituer à la personne en curatelle pour agir en son nom.
« Toutefois, le curateur peut, s'il constate que la personne en curatelle compromet gravement et durablement ses intérêts, saisir le juge pour être autorisé à accomplir seul un acte déterminé ou provoquer l'ouverture de la tutelle.
« Si le curateur refuse son assistance à un acte pour lequel son concours est requis, la personne en curatelle peut demander au juge l'autorisation de l'accomplir seule.
« Art. 470. - La personne en curatelle peut librement tester sous réserve des dispositions de l'article 901.
« Elle ne peut faire de donation qu'avec l'assistance du curateur.
« Le curateur est réputé en opposition d'intérêts avec la personne protégée lorsqu'il est bénéficiaire de la donation.
« Art. 471. - À tout moment, le juge peut, par dérogation à l'article 467, énumérer certains actes que la personne en curatelle a la capacité de faire seule ou, à l'inverse, ajouter d'autres actes à ceux pour lesquels l'assistance du curateur est exigée.
« Art. 472. - Le juge peut également, à tout moment, ordonner une curatelle renforcée. Dans ce cas, le curateur perçoit seul les revenus de la personne en curatelle sur un compte ouvert au nom de cette dernière. Il assure lui-même le règlement des dépenses auprès des tiers et dépose l'excédent sur un compte laissé à la disposition de l'intéressé ou le verse entre ses mains.
« Sans préjudice des dispositions de l'article 459-1, le juge peut autoriser le curateur à conclure seul un bail d'habitation ou une convention d'hébergement assurant le logement de la personne protégée.
« La curatelle renforcée est soumise aux dispositions des articles 503 et 510 à 515.
« Sous-section 7
« Des actes faits dans la tutelle
« Art. 473. - Sous réserve des cas où la loi ou l'usage autorise la personne en tutelle à agir elle-même, le tuteur la représente dans tous les actes de la vie civile.
« Toutefois, le juge peut, dans le jugement d'ouverture ou ultérieurement, énumérer certains actes que la personne en tutelle aura la capacité de faire seule ou avec l'assistance du tuteur.
« Art. 474. - La personne en tutelle est représentée dans les actes nécessaires à la gestion de son patrimoine dans les conditions et selon les modalités prévues au titre XII.
« Art. 475. - La personne en tutelle est représentée en justice par le tuteur.
« Celui-ci ne peut agir, en demande ou en défense, pour faire valoir les droits extra-patrimoniaux de la personne protégée qu'après autorisation ou sur injonction du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué. Le juge ou le conseil de famille peut enjoindre également au tuteur de se désister de l'instance ou de l'action ou de transiger.
« Art. 476. - La personne en tutelle peut, avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, être assistée ou au besoin représentée par le tuteur pour faire des donations.
« Elle ne peut faire seule son testament après l'ouverture de la tutelle qu'avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, à peine de nullité de l'acte. Le tuteur ne peut ni l'assister ni la représenter à cette occasion.
« Toutefois, elle peut seule révoquer le testament fait avant ou après l'ouverture de la tutelle.
« Le testament fait antérieurement à l'ouverture de la tutelle reste valable à moins qu'il soit établi que, depuis cette ouverture, la cause qui avait déterminé le testateur à disposer a disparu.
« Section 5
« Du mandat de protection future
« Sous-section 1
« Des dispositions communes
« Art. 477. - Toute personne majeure ou mineure émancipée, capable, peut donner à une ou plusieurs personnes mandat de la représenter pour le cas où, pour l'une des causes prévues à l'article 425, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts.
« La personne en curatelle peut également, avec l'assistance du curateur, conclure un mandat de protection future.
« Le dernier vivant des père et mère, capable, qui exerce l'autorité parentale sur son enfant mineur ou qui assume la charge matérielle et affective de son enfant majeur peut, pour le cas où cet enfant ne pourrait plus pourvoir seul à ses intérêts pour l'une des causes prévues à l'article 425, désigner un ou plusieurs mandataires chargés de le représenter. Cette désignation prend effet à compter du jour où le mandant décède ou ne peut plus prendre soin de l'intéressé.
« Le mandat est conclu par acte notarié ou par acte sous seing privé. Toutefois, le mandat prévu à l'alinéa précédent ne peut être conclu que par acte notarié.
« Art. 478. - Le mandat de protection future est soumis aux dispositions des articles 1984 à 2010 qui ne sont pas incompatibles avec celles de la présente section.
« Art. 478-1. - Lorsque le mandat s'étend à la protection de la personne, les droits et obligations du mandataire sont définis par les articles 457-1 à 459-1. Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
« Le mandat peut prévoir que le mandataire exercera les missions que le code de la santé publique et le code de l'action sociale et des familles confient au représentant de la personne en tutelle ou à la personne de confiance.
« Le mandat fixe les modalités de contrôle de son exécution.
« Art. 479. - Supprimé............................................................
« Art. 480. - Le mandataire peut être toute personne physique choisie par le mandant ou une personne morale inscrite sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs prévue à l'article L. 461-2 du code de l'action sociale et des familles.
« Le mandataire doit, pendant toute l'exécution du mandat, jouir de la capacité civile et remplir les conditions prévues pour les charges tutélaires par l'article 395 et par le dernier alinéa de l'article 445 du présent code.
« Il ne peut, pendant cette exécution, être déchargé de ses fonctions qu'avec l'autorisation du juge des tutelles.
« Art. 481. - Le mandat prend effet lorsqu'il est établi que le mandant ne peut plus pourvoir seul à ses intérêts. Celui-ci en reçoit notification dans les conditions prévues par le nouveau code de procédure civile.
« À cette fin, le mandataire produit au greffier en chef du tribunal d'instance le mandat et un certificat médical émanant d'un médecin choisi sur la liste mentionnée à l'article 431 établissant que le mandant se trouve dans l'une des situations prévues à l'article 425.
« Art. 482. - Le mandataire exécute personnellement le mandat. Toutefois, il peut se substituer un tiers pour les actes de gestion du patrimoine mais seulement à titre spécial.
« Le mandataire répond de la personne qu'il s'est substituée dans les conditions de l'article 1994.
« Art. 483. - Le mandat mis à exécution prend fin par :
« 1° Le rétablissement des facultés personnelles de l'intéressé constaté à la demande du mandant ou du mandataire, dans les formes prévues à l'article 481 ;
« 2° Le décès de la personne protégée ou son placement en curatelle ou en tutelle, sauf décision contraire du juge qui ouvre la mesure ;
« 3° Le décès du mandataire, son placement sous une mesure de protection ou sa déconfiture ;
« 4° Sa révocation prononcée par le juge des tutelles à la demande de tout intéressé, lorsqu'il s'avère que les conditions prévues par l'article 425 ne sont pas réunies, lorsque l'application des règles du droit commun de la représentation ou celles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et aux régimes matrimoniaux apparaissent suffisantes pour qu'il soit pourvu aux intérêts de la personne par son conjoint avec qui la communauté de vie n'a pas cessé ou lorsque l'exécution du mandat est de nature à porter atteinte aux intérêts du mandant.
« Le juge peut également suspendre les effets du mandat pour le temps d'une mesure de sauvegarde de justice.
« Art. 484. - Tout intéressé peut saisir le juge des tutelles aux fins de contester la mise en oeuvre du mandat ou de voir statuer sur les conditions et modalités de son exécution.
« Art. 485. - Le juge qui met fin au mandat peut ouvrir une mesure de protection juridique dans les conditions et selon les modalités prévues aux sections 1 à 4 du présent chapitre.
« Lorsque la mise en oeuvre du mandat ne permet pas, en raison de son champ d'application, de protéger suffisamment les intérêts personnels ou patrimoniaux de la personne, le juge peut ouvrir une mesure de protection juridique complémentaire confiée, le cas échéant, au mandataire de protection future. Il peut aussi autoriser ce dernier ou un mandataire ad hoc à accomplir un ou plusieurs actes déterminés non couverts par le mandat.
« Le mandataire de protection future et les personnes désignées par le juge sont indépendants et ne sont pas responsables l'un envers l'autre ; ils s'informent toutefois des décisions qu'ils prennent.
« Art. 486. - Le mandataire chargé de l'administration des biens de la personne protégée fait procéder à leur inventaire lors de l'ouverture de la mesure. Il assure son actualisation au cours du mandat afin de maintenir à jour l'état du patrimoine.
« Il établit annuellement le compte de sa gestion qui est vérifié selon les modalités définies par le mandat et que le juge peut en tout état de cause faire vérifier selon les modalités prévues à l'article 511.
« Art. 487. - À l'expiration du mandat et dans les cinq ans qui suivent, le mandataire tient à la disposition de la personne qui est amenée à poursuivre la gestion, à la personne protégée si elle a recouvré ses facultés ou à ses héritiers l'inventaire des biens et les actualisations auxquelles il a donné lieu ainsi que les cinq derniers comptes de gestion et les pièces nécessaires pour continuer celle-ci ou assurer la liquidation de la succession de la personne protégée.
« Art. 488. - L'annulation ou la rescision des actes accomplis par le mandant et entrant dans le champ du mandat ainsi que la réduction des obligations qui en découlent sont poursuivies dans les conditions prévues à l'article 435 comme s'ils avaient été faits par un majeur en sauvegarde de justice.
« Sous-section 2
« Du mandat notarié
« Art. 489. - Lorsque le mandat est établi par acte authentique, il est reçu par un notaire choisi par le mandant et par un notaire désigné par le président de la chambre des notaires. L'acceptation du mandataire est faite dans les mêmes formes.
« Tant que le mandat n'a pas reçu exécution, le mandant peut le modifier dans les mêmes formes ou le révoquer en notifiant sa révocation au mandataire et aux notaires. Jusqu'à cette date, le mandataire peut renoncer au mandat en notifiant sa renonciation au mandant et aux notaires.
« Art. 490. - Par dérogation à l'article 1988, le mandat, même conçu en termes généraux, inclut tous les actes patrimoniaux que le tuteur a le pouvoir d'accomplir seul ou avec une autorisation.
« Toutefois, le mandataire ne peut accomplir un acte de disposition à titre gratuit qu'avec l'autorisation du juge des tutelles.
« Art. 491. - Pour l'application du second alinéa de l'article 486, le mandataire rend compte à un des notaires qui a établi le mandat en lui adressant ses comptes, auxquels sont annexées toutes pièces justificatives utiles. Celui-ci en assure la conservation ainsi que celle de l'inventaire des biens et de ses actualisations.
« Le notaire saisit le juge des tutelles de tout mouvement de fonds et de tout acte non justifiés ou n'apparaissant pas conformes aux stipulations du mandat.
« Sous-section 3
« Du mandat sous seing privé
« Art. 492. - Le mandat établi sous seing privé est daté et signé de la main du mandant et contresigné par un avocat ou par deux témoins majeurs choisis par le mandant.
« Le mandataire accepte le mandat en y apposant sa signature.
« Tant que le mandat n'a pas reçu exécution, le mandant peut le modifier ou le révoquer dans les mêmes formes et le mandataire peut y renoncer en notifiant sa renonciation au mandant.
« Art. 492-1. - Le mandat n'acquiert date certaine que dans les conditions de l'article 1328.
« Art. 493. - Le mandat est limité, quant à la gestion du patrimoine, aux actes qu'un tuteur peut faire sans autorisation.
« Si l'accomplissement d'un acte qui est soumis à autorisation ou qui n'est pas prévu par le mandat s'avère nécessaire dans l'intérêt du mandant, le mandataire saisit le juge des tutelles pour le voir ordonner.
« Art. 494. - Pour l'application du dernier alinéa de l'article 486, le mandataire conserve l'inventaire des biens et ses actualisations, les cinq derniers comptes de gestion, les pièces justificatives ainsi que celles nécessaires à la continuation de celle-ci.
« Il est tenu de les présenter au juge des tutelles ou au procureur de la République dans les conditions prévues à l'article 416.
« CHAPITRE III
« De la mesure d'accompagnement judiciaire
« Art. 495. - Lorsque les mesures mises en oeuvre en application des articles L. 271-1 à L. 271-4 du code de l'action sociale et des familles au profit d'une personne majeure n'ont pas permis une gestion satisfaisante par celle-ci de ses prestations sociales et que sa santé ou sa sécurité en est compromise, le juge peut ordonner une mesure d'accompagnement judiciaire destinée à rétablir l'autonomie de l'intéressé dans la gestion de ses ressources.
« Il n'y a pas lieu de prononcer cette mesure à l'égard d'une personne mariée lorsque l'application des règles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux et aux régimes matrimoniaux permet une gestion satisfaisante des prestations sociales de l'intéressé par son conjoint.
« Art. 495-1. - La mesure d'accompagnement judiciaire ne peut être prononcée si la personne bénéficie d'une mesure de protection juridique prévue au chapitre II du présent titre.
« Le prononcé d'une mesure de protection juridique met fin de plein droit à la mesure d'accompagnement judiciaire.
« Art. 495-2. - La mesure d'accompagnement judiciaire ne peut être prononcée qu'à la demande du procureur de la République qui en apprécie l'opportunité au vu du rapport des services sociaux prévu à l'article L. 271-6 du code de l'action sociale et des familles.
« Le juge statue, la personne entendue ou appelée.
« Art. 495-3. - Sous réserve des dispositions de l'article 495-7, la mesure d'accompagnement judiciaire n'entraîne aucune incapacité.
« Art. 495-4. - La mesure d'accompagnement judiciaire porte sur la gestion des prestations sociales, à l'exception des prestations de retraite, choisies par le juge, lors du prononcé de celle-ci, dans une liste fixée par décret.
« À titre exceptionnel, par décision spécialement motivée, le juge peut étendre la mesure d'assistance judiciaire à tout ou partie des ressources du majeur, dès lors que la seule gestion des prestations sociales n'est pas suffisante pour assurer la santé ou la sécurité du majeur.
« Le juge statue sur les difficultés qui pourraient survenir dans la mise en oeuvre de la mesure. Il peut en modifier l'étendue ou y mettre fin à tout moment.
« Art. 495-5. - Lorsqu'une mesure de tutelle aux prestations sociales ordonnée en application des articles L. 552-6 et L. 755-4 du code de la sécurité sociale coexiste avec une mesure d'accompagnement judiciaire, les prestations versées du chef de la première sont exclues de plein droit du champ de la seconde.
« Art. 495-6. - Seul un mandataire judiciaire à la protection des majeurs inscrit sur la liste prévue à l'article L. 461-2 du code de l'action sociale et des familles peut être désigné par le juge pour exercer la mesure d'accompagnement judiciaire.
« Art. 495-7. - Le mandataire judiciaire à la protection des majeurs perçoit les prestations incluses dans la mesure d'accompagnement judiciaire sur un compte ouvert au nom de la personne auprès d'un établissement habilité à recevoir des fonds du public, dans les conditions prévues à l'article 427, sous réserve des dispositions applicables aux mesures de protection confiées aux personnes ou services préposés des établissements de santé et des établissements sociaux ou médico-sociaux soumis aux règles de la comptabilité publique.
« Il gère ces prestations dans l'intérêt de la personne en tenant compte de son avis et de sa situation familiale.
« Il exerce auprès de celle-ci une action éducative tendant à rétablir les conditions d'une gestion autonome des prestations sociales.
« Art. 495-8. - Le juge fixe la durée de la mesure qui ne peut excéder deux ans. Il peut, à la demande de la personne protégée, du mandataire ou du procureur de la République, la renouveler par décision spécialement motivée sans que la durée totale puisse excéder quatre ans.
« Art. 495-9. - Les dispositions du titre XII relatives à l'établissement, la vérification et l'approbation des comptes et à la prescription qui ne sont pas incompatibles avec celles du présent chapitre sont applicables à la gestion des prestations sociales prévues à l'article 495-7. »
M. le président. Sur cet article, je suis saisi d'un grand nombre d'amendements.
L'amendement n° 228 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme Férat et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 415 du code civil par une phrase ainsi rédigée :
Elles peuvent être assistées par un avocat.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Cet amendement a pour objet de poser le principe selon lequel un majeur protégé ou à protéger peut être assisté par un avocat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous admettrez, monsieur Détraigne, que cette disposition relève du domaine réglementaire, puisqu'il s'agit de procédure civile.
En outre, le projet de loi ne modifie en rien les règles relatives à l'assistance d'un avocat devant le tribunal d'instance. Je rappelle que les articles 827 et 828 du nouveau code de procédure civile prévoient que, devant le tribunal d'instance, les parties se défendent elles-mêmes en principe. Elles ont la faculté de se faire assister ou représenter par un avocat, mais aussi par leur conjoint, un parent ou un allié.
Telle est la raison pour laquelle je vous demande de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je partage l'avis de la commission, monsieur Détraigne.
Ou bien la disposition que vous proposez est redondante, parce que tout le monde peut prendre un avocat, ou bien elle empêche une personne autre qu'un avocat d'être présente, ce que le Gouvernement désapprouve totalement.
Par conséquent, dans les deux cas, il convient que vous retiriez votre amendement.
M. le président. L'amendement n° 228 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Détraigne ?
M. Yves Détraigne. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 228 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 12, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 415 du code civil, remplacer le mot :
appliquée
par le mot :
assurée
La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 14, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après les mots :
après les avoir
rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 417 du code civil :
entendus ou appelés
La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il s'agit, là encore, d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 419 du code civil, insérer une phrase ainsi rédigée :
Il en fixe le montant.
La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 252 rectifié, présenté par MM. Vasselle, P. Blanc et Texier et Mme Hermange, est ainsi libellé :
Compléter la dernière phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 419 du code civil par les mots :
en fonction de ses ressources
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. C'est un amendement de précision, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ce n'est pas vraiment un amendement de précision, mon cher collègue !
L'indemnité due à la personne chargée de la protection, selon l'importance des biens gérés ou la difficulté d'exercer la mesure, est entièrement à la charge de la personne protégée. Il n'est pas possible d'y déroger.
En revanche, comme le prévoit l'amendement de la commission des lois, il appartiendra au conseil de famille ou, à défaut, au juge des tutelles d'en fixer le montant. À ce moment-là, il tiendra bien évidemment compte des ressources du majeur protégé.
Je vous demande donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi la commission sera contrainte, à son grand regret, d'émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le Gouvernement émet exactement le même avis que la commission.
Cet amendement n'a rien d'un amendement de précision, sauf à penser que la précision consiste à faire payer l'État lorsque les ressources de la personne protégée sont insuffisantes ! Mais, dans ce cas, l'amendement va très au-delà de la précision, vous l'admettrez. Il serait même passible de l'article 40 de la Constitution, puisqu'il entraînerait une dépense nouvelle pour l'État.
M. le président. L'amendement n° 252 rectifié est-il maintenu, monsieur Vasselle ?
M. Alain Vasselle. Je constate qu'il y a deux poids deux mesures. En effet, quand un amendement de précision émane de la commission, il ne soulève aucune difficulté. En revanche, lorsqu'il vient d'un membre de la Haute Assemblée, cela pose des problèmes majeurs ! (Rires.)
De surcroît, la précision proposée me paraît confortée par le président de la commission, puisque, selon lui, il va de soi que, lorsque les ressources de l'intéressé sont insuffisantes, le magistrat doit en tenir compte.
Par conséquent, les mots que je propose d'ajouter « en fonction de ses ressources » précisent bien les conditions dans lesquelles le magistrat devra apprécier s'il y a lieu de prévoir ou non une participation financière.
J'aurais préféré entendre le garde des sceaux me répondre que mon amendement est satisfait dans la mesure où il appartiendra au juge d'apprécier le niveau de ressources de l'intéressé pour fixer son niveau de contribution. S'il m'avait donné cette explication de texte, j'aurais eu l'assurance que les magistrats seront tenus d'appliquer la disposition dans cet état d'esprit, auquel cas mon amendement ne se justifiait plus et pouvait être retiré.
Mais, à ce stade du débat, j'attends de M. le président de la commission des lois qu'il veuille bien confirmer l'interprétation qu'il a faite de cette disposition et du Gouvernement qu'il dise qu'il la partage, auquel cas je serais prêt à retirer l'amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. M. Vasselle est désespérant ! (Sourires.)
Il nous fait croire que c'est un amendement de précision et qu'il ne connaît pas le sujet, alors qu'il a ici un objectif extrêmement précis.
Je vous répète donc ce que j'ai déjà dit, monsieur Vasselle, et je souligne que c'est exactement la réponse que vous attendiez : comme le prévoit notre amendement, il appartiendra au conseil de famille ou, à défaut, au juge des tutelles de fixer le montant de la contribution, en tenant compte bien évidemment des ressources du majeur protégé. Je vous l'ai dit !
M. Alain Vasselle. Oui, monsieur le président, je ne le conteste pas, mais je demande que le garde des sceaux confirme qu'il est bien d'accord avec votre interprétation.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oh !
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur Vasselle, l'article 5 comprend plusieurs alinéas. Certains d'entre eux vous donnent satisfaction, car c'est l'État qui va payer.
En revanche, l'un des alinéas prévoit le cas où un tuteur, chargé de régler une succession lourde et importante en faveur d'un majeur protégé, doit être indemnisé, compte tenu du temps et de l'énergie qu'il a consacrés à ce problème. Il le sera, non pas par l'État, mais par un prélèvement sur l'héritage.
Vous le voyez, je ne peux pas vous donner satisfaction à tous les alinéas !
Cela étant, monsieur le président, je veux bien que nous fassions ce travail de commission avec M. Vasselle, mais cela prend du temps !
M. le président. Qu'en est-il en définitive de l'amendement n° 252 rectifié, monsieur Vasselle ?
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, je persiste et je le maintiens, pour que les choses soient claires !
M. Alain Vasselle. De peu !
M. le président. L'amendement n° 227 rectifié bis, présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 419 du code civil :
« Lorsque le financement de la mesure ne peut être intégralement assuré par la personne protégée, il est pris en charge par la collectivité publique, selon des modalités de calcul commune à tous les mandataires judiciaires à la protection des majeurs quelles que soient les sources de financement. Ces modalités sont fixées par décret.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Cet amendement a pour objet de préciser que le barème de financement d'une mesure de protection judiciaire est le même, quelle que soit la source de financement, qu'il vienne d'une collectivité locale, comme le département, de l'État, ou d'ailleurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Tout en étant a priori favorable à cet amendement, la commission se ralliera à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 253 rectifié, présenté par MM. Vasselle, P. Blanc et Texier et Mme Hermange, est ainsi libellé :
Compléter la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 419 du code civil par les mots :
en fonction de ses ressources
Cet amendement n'a plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 185, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 420 du code civil :
« Lorsque les mandataires judiciaires, à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, perçoivent une autre somme ou bénéficient d'autres avantages financiers en relation directe ou indirecte avec les missions dont ils ont la charge, la somme perçue ou l'avantage devra être inscrite dans une annexe figurant au bilan comptable dans des conditions définies par décret.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet article pose une interdiction absolue et indistincte pour tout mandataire de percevoir des avantages, quelle que soit leur forme, dès lors qu'ils ont un lien direct ou non avec les missions dont il a la charge.
S'il est tout à fait normal que le législateur veuille encadrer le dispositif, l'encadrement qui nous est proposé nous paraît excessif et, surtout, contre-productif.
Cet article remet en cause certains avantages, alors qu'ils permettraient d'améliorer le fonctionnement des services de tutelle, ce qui profiterait indirectement au majeur protégé.
Par ailleurs, certaines associations tutélaires perçoivent des cotisations qui entrent dans la catégorie des avantages financiers directs ou indirects prohibés par l'article 5.
Telle est la raison pour laquelle nous tenons à cet amendement, qui vise à restreindre la portée de l'interdit fixé par cet article.
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 420 du code civil :
Sous réserve des aides ou subventions accordées par les collectivités publiques aux personnes morales pour leur fonctionnement général, les mandataires judiciaires à la protection des majeurs ne peuvent, à quelque titre et...
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux personnes morales, associations tutélaires, de continuer à bénéficier d'aides des collectivités territoriales au titre de leur fonctionnement général, qu'il s'agisse de subventions ou de mise à disposition de locaux.
L'amendement n° 185 me paraît donc satisfait par celui de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le rapporteur a très bien justifié son amendement. Ce dernier est en effet plus précis que celui de Mme Josiane Mathon-Poinat, qui est donc satisfait.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 185 et favorable à l'amendement n° 16.
M. le président. Madame Mathon-Poinat, l'amendement n° 185 est-il maintenu ?
Mme Josiane Mathon-Poinat. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 185 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 16.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 315, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 420 du code civil par les mots :
qu'après autorisation du juge des tutelles
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement a pour objet de maintenir le principe de l'interdiction pour un mandataire judiciaire à la protection des majeurs de délivrer un mandat de recherche des héritiers.
Toutefois, en cas de décès, le mandataire doit remettre aux héritiers une copie des derniers comptes de gestion. Or, lorsqu'il n'existe pas d'héritier connu, il faut engager des recherches. C'est la raison pour laquelle cet amendement vise à permettre au mandataire de justice de demander au juge la possibilité d'émettre un mandat de recherche d'un héritier, le juge exerçant alors un contrôle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Il s'agit, me semble-t-il, d'un excellent amendement.
L'Assemblée nationale avait sans doute un peu trop limité les droits des généalogistes. Il est important de reconnaître que, dans un certain nombre de cas, cette profession est fort utile. Or, autorisé par le juge des tutelles, le recours aux services d'un généalogiste me paraît légitime. Voilà donc une précision qui est la bienvenue !
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je voterai ce dispositif.
Toutefois, à ce sujet, je tenais à rebondir sur un amendement que j'ai retiré. Il portait sur le texte proposé pour l'article 411 du code civil et traitait des cas de vacance de tutelle. J'aurais souhaité que, dans cette situation, la recherche de membres de la famille puisse également être engagée.
Monsieur le garde des sceaux, selon vous, la vacance de tutelle n'est avérée que lorsqu'il n'y a plus aucun membre de la famille. Cependant, un autre cas de figure peut se présenter ; il s'agit du cas où aucun membre de la famille ne veut exercer la tutelle. Voilà une situation que vous n'avez pas évoquée.
Je me permets d'intervenir dans la discussion pour que ces éléments figurent dans le compte rendu de notre débat. Ceux qui liront le texte connaîtront ainsi les raisons pour lesquelles, en cas de vacance, l'exercice de la tutelle est systématiquement confié à une collectivité locale, en l'occurrence le département.
Encore une fois, deux cas de figure peuvent se présenter : soit il n'existe plus aucun membre d'une famille - ce qui doit être rarissime - soit les membres de la famille refusent tous d'exercer la fonction de tuteur. Or je crois savoir que les magistrats ne font pas beaucoup d'efforts pour savoir s'il existe encore des membres de la famille, et ils confient automatiquement l'exercice de la mesure à la collectivité locale.
Pour toutes ces raisons, j'aurais souhaité que la disposition que nous examinons actuellement s'applique aux situations de vacance que je viens de décrire et que l'on profite de la navette entre les deux assemblées pour améliorer le texte en ce sens.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais il n'y a pas de navette !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Monsieur Vasselle, comme je le disais tout à l'heure, il peut arriver que les membres d'une famille souhaitent participer au conseil de famille sans vouloir exercer la fonction de tuteur. Dans cette hypothèse, rien n'empêche qu'un mandataire de justice à la protection des majeurs soit désigné en qualité de tuteur et qu'un conseil de famille l'accompagne dans sa tâche. En l'occurrence, on ne parle pas de vacance, monsieur Vasselle.
Toutefois, s'il ne se trouve personne pour exercer les fonctions de tuteur, il est alors généralement rare de trouver des membres de la famille ayant intérêt et vocation à participer au conseil de famille. C'est dans ces conditions que la vacance est prévue ! Si personne ne veut s'intéresser au majeur, le juge prononce une tutelle et désigne un mandataire professionnel.
M. le président. L'amendement n° 264, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer la dernière phrase du texte proposé par cet article pour l'article 421 du code civil.
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. L'article 421 du code civil tel qu'il résulte du texte proposé par le projet de loi traite de la responsabilité des organes chargés de la mesure de protection judiciaire en cas de dommages résultant de leurs fautes. Il prévoit que, en cas de tutelle, la gravité de la faute n'est pas exigée. En revanche, pour la curatelle, la responsabilité n'est engagée qu'en cas de faute lourde, sauf s'il s'agit d'une curatelle renforcée.
Le présent amendement a pour objet de permettre que soit engagée la responsabilité du curateur dans les mêmes conditions que celle des autres organes de la mesure de protection judiciaire. Il ne vise en aucun cas à confondre tutelle et curatelle et encore moins à fondre le régime de la curatelle dans celui de la tutelle. Chaque régime doit conserver sa spécificité.
Nous estimons néanmoins que le fait de conserver au curatélaire la responsabilité de ses actes n'est pas exclusif de la mise en jeu de la responsabilité du curateur, ni incompatible avec cette dernière. Dans sa mission d'assistance, le curateur peut également commettre une faute. Sa responsabilité pour faute simple doit pouvoir être engagée.
C'est pour cela que nous demandons la suppression de la dernière phrase de l'article proposé.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Une erreur est commise ici. C'est pourquoi il convient de rappeler une distinction fondamentale.
En cas de tutelle, le tuteur se substitue à la personne protégée, il est donc normal que sa responsabilité puisse être engagée pour faute simple.
En revanche, la curatelle simple n'est qu'une mesure d'assistance. Autrement dit, le majeur protégé reste responsable de ses actes. C'est la raison pour laquelle la responsabilité du curateur ne peut être recherchée que pour faute lourde.
En effet, dans un cas, la responsabilité de la personne protégée disparaît derrière celle du tuteur et, dans l'autre, la personne protégée reste responsable. Pour ces raisons, il nous paraît légitime que seule la faute lourde engage la responsabilité du curateur. En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Si le droit civil distingue entre curateur et tuteur, c'est qu'il existe des différences, notamment en matière de responsabilité.
Or, l'amendement n° 264 tend à ce que le régime de responsabilité soit le même. Ce n'est pas possible ! Un curateur ne prend des décisions que pour des actes très graves, mais rarement. De son côté, le tuteur agit au quotidien pour les actes de la vie courante et aussi les actes graves. Leur responsabilité ne peut pas être identique. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à votre amendement.
M. le président. L'amendement n° 265, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 422 du code civil, après les mots :
protection par
insérer les mots :
le procureur de la République,
Cet amendement n'a plus d'objet.
L'amendement n° 266, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 426 du code civil, remplacer le mot :
protégée
par les mots :
en tutelle
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. L'article 426 du code civil tel qu'il est rédigé dans le projet de loi fixe le régime des actes liés au logement et aux meubles du majeur protégé. Les personnes chargées d'administrer le patrimoine du majeur ont l'obligation de maintenir à la disposition de la personne protégée son logement et ses meubles aussi longtemps que son état autorise son maintien ou son retour dans son domicile.
Ainsi rédigé, l'article 426 traite, sans discernement, les personnes sous protection. Certes, le logement doit bénéficier d'une protection particulière pour les personnes vulnérables, mais la protection ne doit pas jouer indistinctement dans tous les cas. Elle doit au contraire être adaptée à la situation du majeur.
Les personnes sous curatelle doivent conserver la faculté d'exprimer leur consentement pour les décisions prises à ce sujet. Le principe de proportionnalité doit pouvoir s'appliquer dans ce domaine. La capacité, les droits et libertés de la personne concernée ne doivent être contraints que dans la limite de l'objectif recherché. Or, si une personne est placée sous curatelle, c'est que sa situation ne justifie pas de la mettre sous tutelle. En conséquence, elle doit demeurer libre, sous les conditions propres à son régime de protection, de disposer de ses meubles ou de son logement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il convient de rappeler les dispositions de l'article 426 du code civil, qui sont essentielles. En effet, elles garantissent la protection du logement de la personne protégée. À ce titre, nous souhaitons renforcer le contrôle du juge.
Or, si votre amendement devait être adopté, mon cher collègue, cette protection serait limitée au majeur sous tutelle, sans être étendue aux majeurs bénéficiant d'une curatelle ou soumis au régime d'un mandat de protection futur. Votre amendement aurait donc pour objet de restreindre la protection que nous voulons accorder, par ce texte, à tous les majeurs protégés, qu'il s'agisse d'une tutelle, d'une curatelle ou d'un mandat de protection future.
C'est la raison pour laquelle nous demandons le retrait de cet amendement, sinon la commission émettra un avis défavorable, mais je ne pense pas que votre souhait soit de restreindre la protection conférée par la loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Gautier, l'amendement n° 266 est-il maintenu ?
M. Charles Gautier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 266 est retiré.
L'amendement n° 235 rectifié bis, présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Mouly, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 426 du code civil, après les mots :
dont il est garni
insérer les mots :
, qu'il s'agisse d'une résidence principale ou secondaire,
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Il s'agit en quelque sorte d'un amendement de précision. Il vise à indiquer que les opérations de conservation du logement peuvent porter aussi bien sur la résidence principale que sur la résidence secondaire, le cas échéant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Toute mesure d'aliénation étant soumise à l'autorisation du juge des tutelles, prévoir en plus l'avis du médecin me semble superfétatoire et surabondant.
M. Paul Blanc. Il n'est pas question de médecin !
M. Robert Bret. Mais oui, il n'en est pas question ici !
M. Henri de Richemont, rapporteur. Pour ces raisons, la commission demande le retrait de l'amendement, sinon elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Sagesse ! (Exclamations au banc des commissions.) Une telle disposition alourdit le texte, mais je ne m'y oppose pas !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Le Gouvernement semble admettre qu'un juge des tutelles a besoin de l'avis d'un médecin agréé avant d'autoriser une cession ou plus généralement un acte de disposition. Je ne vois pas très bien quel rôle le médecin agréé devrait jouer dans de telles circonstances ! Si telle est bien la sagesse du Gouvernement, permettez-moi tout de même d'être quelque peu étonné ! Je maintiens ma position.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Sauf erreur de ma part, il y a malentendu, monsieur le rapporteur !
Je rappelle les termes du premier alinéa de l'article 426 : « Le logement de la personne protégée et les meubles dont il est garni sont conservés à la disposition de celle-ci aussi longtemps qu'il est possible. » Mon amendement vise donc simplement à préciser que « le logement » peut aussi bien désigner la résidence secondaire, si la personne l'utilise également.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. C'est oublier, mon cher collègue, que le troisième alinéa de ce même article s'applique également : « S'il devient nécessaire ou s'il est de l'intérêt de la personne protégée qu'il soit disposé des droits relatifs à son logement ou à son mobilier par l'aliénation, la résiliation ou la conclusion d'un bail, l'acte est autorisé par le juge ou par le conseil de famille s'il a été constitué, sans préjudice des formalités que peut requérir la nature des biens. [...] » Je ne vois pas ce que l'on peut demander de plus, puisqu'il est bien évident que c'est le juge ou le conseil de famille qui donne l'autorisation.
Encore une fois, je ne vois pas très bien ce que vient faire ici le médecin !
M. Yves Détraigne. Mais il n'est pas question de médecin !
M. Henri de Richemont, rapporteur. La résidence secondaire ne peut pas être aliénée sans l'accord du juge des tutelles !
M. Henri de Richemont, rapporteur. Le garde des sceaux confirme que j'ai raison mais, dans le même temps, s'en remet à la sagesse du Sénat ! Je ne comprends plus très bien !
M. Henri de Richemont, rapporteur. Réformer le code civil n'est pas affaire de gentillesse, monsieur le garde des sceaux (Rires.), et je ne vois aucune raison d'ajouter une précision qui n'est pas nécessaire.
Je pense que le juge des tutelles a la compétence et la sagesse nécessaires pour décider s'il y a lieu ou non d'autoriser l'aliénation de la résidence secondaire.
M. le président. L'amendement n° 186, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Remplacer les deux premières phrases du troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 426 du code civil par une phrase ainsi rédigée :
S'il devient nécessaire ou s'il est de l'intérêt de la personne protégée qu'il soit disposé des droits relatifs à l'habitation ou que le mobilier soit aliéné, l'acte devra être autorisé par le juge des tutelles ou par le conseil de famille s'il a été constitué, après avis du médecin traitant, sans préjudice des autres formalités que peut requérir la nature des biens.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement vise à étendre la consultation préalable du médecin à toutes les situations possibles.
Bien évidemment, l'avis du médecin est purement consultatif, mais il est tout de même important, s'agissant notamment des droits relatifs à l'habitation et au mobilier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Je ne peux que me répéter : je crois que le juge dispose de la sagesse et de la compétence nécessaires pour prendre les décisions qui s'imposent, et que son rôle est de protéger le majeur qui doit être protégé. En outre, remplacer l'avis du médecin agréé par celui du médecin traitant ne me paraît pas nécessaire.
La commission s'est donc prononcée défavorablement et demande le retrait de l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Dans tout le projet de loi, il est question d'un médecin agréé ; Mme Mathon-Poinat demande ici que soit pris l'avis du médecin traitant. Il faudrait donc, par coordination, modifier l'ensemble du texte !
L'avis est défavorable.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 171 rectifié, présenté par MM. Leroy, Hérisson et Doligé et Mme Sittler, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article 427 du code civil :
« Art. 427. - La personne chargée de la mesure de protection ne peut procéder à la modification des comptes ouverts au nom de la personne protégée auprès d'un établissement habilité à recevoir des fonds du public, sauf si l'intérêt de la personne protégée le commande, et après accord du juge des tutelles.
« Cependant, l'encours moyen mensuel nécessaire aux dépenses quotidiennes de chaque personne protégée est mutualisé dans un compte général divisé en sous-comptes individualisés. Ce compte général mutualisé fait l'objet d'un placement financier rémunéré au jour le jour.
« Les produits de ce compte sont contrôlés par les commissaires aux comptes de chaque organisme tutélaire et sont soumis à un examen annuel d'une commission présidée par le préfet, dont la composition et le rôle sont fixés par décret. Ils sont affectés, pour une part, à la réduction de la charge de l'État et, pour une autre part, à l'attribution directe ou indirecte d'aides ponctuelles aux majeurs sous protection selon une répartition fixée chaque année par la commission. La part revenant à l'État ne saurait être inférieure aux trois quarts des produits financiers ainsi générés.
« Si l'intérêt de celle-ci le commande, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué autorise cette modification.
« Un compte est ouvert au nom de la personne protégée auprès de la Caisse des dépôts et consignations par la personne chargée de la protection si le juge ou le conseil de famille, s'il a été constitué, l'estime nécessaire.
« Lorsque la personne protégée n'est titulaire d'aucun compte ou livret, la personne chargée de la mesure de protection lui en ouvre un.
« Les opérations bancaires de paiement et de gestion patrimoniale effectuées au nom et pour le compte de la personne protégée sont réalisées au moyen des comptes individualisés au nom de l'intéressé. La durée d'une opération de paiement n'excède pas quinze jours.
« Les fruits, produits et plus-values générés par les comptes individuels et les valeurs appartenant à la personne protégée lui reviennent exclusivement.
« Si la personne protégée a fait l'objet d'une interdiction d'émettre des chèques, la personne chargée de la mesure de protection peut néanmoins, avec l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, faire fonctionner sous sa signature les comptes dont la personne protégée est titulaire.
La parole est à Mme Esther Sittler.
Mme Esther Sittler. La rédaction actuellement proposée pour l'article 426 du code civil prive l'État, les contribuables et les majeurs sous tutelle d'État du bénéfice des produits financiers possibles des comptes courants mutualisés des majeurs sous tutelle d'État. Ce bénéfice est estimé à 20 millions d'euros par an.
Par compte courant mutualisé, il convient d'entendre l'encours moyen mensuel nécessaire pour régler les dépenses courantes du mois sur un compte courant unique géré par l'organisme tutélaire, les autres comptes de placement ouverts auprès d'un organisme bancaire au nom du majeur demeurant individuels.
Rémunéré au jour le jour, ce compte courant mutualisé permettrait de dégager des produits financiers dont il faudra assurer le contrôle ; la Caisse des dépôts et consignations pourrait réaliser ce travail ou construire un cahier des charges concernant la gestion et le fonctionnement de ces comptes. Chaque compte courant mutualisé doit être divisé en sous-comptes individualisés afin de permettre d'identifier tous les mouvements pour chaque majeur.
Les produits financiers de ces comptes seraient affectés, pour partie, aux caisses de l'État, afin d'atténuer la charge que constitue le financement des tutelles d'État, et, pour l'autre partie, à l'attribution directe ou indirecte d'aides ponctuelles aux majeurs sous protection les plus démunis, après examen d'une commission présidée par le représentant de l'État - le préfet - et dans laquelle siégeraient éventuellement un représentant des services fiscaux - le trésorier-payeur général -, un représentant des juges des tutelles, un représentant des greffiers en chef et un représentant de l'organisme tutélaire.
Le système du compte courant mutualisé permet d'offrir au majeur protégé une meilleure sécurité, une transparence totale de gestion et une diminution du coût de ses services bancaires. Enfin, selon une première estimation, il permettrait à l'État de récupérer plus de 20 millions d'euros par an.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Remplacer les deux premiers alinéas du texte proposé par cet article pour l'article 427 du code civil par deux alinéas ainsi rédigés :
« La personne chargée de la mesure de protection ne peut procéder ni à la modification des comptes ou livrets ouverts au nom de la personne protégée ni à l'ouverture d'un autre compte ou livret auprès d'un établissement habilité à recevoir des fonds du public.
« Le juge des tutelles ou le conseil de famille s'il a été constitué peut toutefois l'y autoriser si l'intérêt de la personne protégée le commande.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'interdire à la personne chargée de la protection d'un majeur non seulement de modifier le compte ou le livret déjà ouvert au nom du majeur, mais d'en ouvrir un autre sans l'accord du juge.
C'est là une protection, monsieur le président, que nous considérons comme absolument essentielle.
M. le président. L'amendement n° 187, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 427 du code civil, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout mandataire judiciaire à la protection des majeurs peut, tout en conservant les comptes déjà ouverts au nom du majeur protégé, ouvrir un autre compte de dépôt auprès d'un établissement habilité à recevoir des fonds du public. Ce compte doit être individuel et nominatif.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Notre amendement est assez proche de celui de la commission des lois.
La rédaction proposée dans le projet de loi pour l'article 427 du code civil nous a conduits à nous interroger sur l'interdiction de modifier des comptes ouverts.
En posant l'interdiction d'ouvrir un autre compte au nom du majeur protégé dès lors que celui-ci est déjà titulaire d'un compte bancaire, l'article 427, tel qu'il nous est soumis, peut susciter pour les associations tutélaires de graves difficultés dans le suivi et la gestion des comptes sans pour autant que le majeur protégé en tire un quelconque avantage. En effet, ses ressources et son patrimoine doivent être gérés à partir de comptes individuels, nominatifs et personnalisés ; de même, les intérêts doivent lui être reversés, et à lui seul. Ainsi, il sera définitivement mis fin à la pratique des comptes pivots.
Un majeur a cependant besoin de pouvoir effectuer sur son compte bancaire des opérations de retrait pour les dépenses de la vie courante, comme vient de l'évoquer M. de Richemont. Mais, en même temps, et c'est là que surgissent les difficultés, le représentant légal, lui, doit percevoir les ressources du majeur et les affecter aux dépenses courantes. Il doit donc lui aussi effectuer des opérations techniques, telles que le calcul des prélèvements mensuels ou de reversement à l'aide sociale.
Notre solution permettrait à la fois de lutter contre les comptes pivots, de sauvegarder les intérêts de la personne protégée et de donner aux associations, notamment, les moyens de faire fonctionner les comptes.
M. le président. L'amendement n° 229 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme Férat et les membres du groupe Union centriste-UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 427 du code civil :
« La personne protégée reste propriétaire des fruits, produits et plus-values résultant des fonds, valeurs et biens, dont ils sont issus.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 229 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 267, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 427 du code civil par les mots :
et disposer de tous les moyens de paiement habituels
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Cet amendement, qui vise à clarifier la rédaction proposée pour le sixième alinéa de l'article 427 du code civil, va dans le sens des recommandations du Médiateur de la République, qui vient d'ailleurs de remettre son rapport au Président de la République.
Il conviendrait de modifier également le code monétaire et financier, qui interdit aux banques de délivrer un chéquier au titulaire du compte placé sous tutelle et à la personne qui en a la charge.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 171 rectifié, 187 et 267 ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Alors que nous supprimons les comptes pivots, l'amendement n° 171 rectifié vise d'une certaine façon à les rétablir en créant un compte mutualisé. Je considère pour ma part que chaque majeur sous tutelle a le droit d'avoir non seulement son propre compte, mais également les ressources qui en sont issues. Le priver de cette dernière possibilité et affecter une partie des ressources de son compte à l'État ou à d'autres organismes me paraît absolument attentatoire à sa liberté. C'est la raison pour laquelle, bien entendu, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 187 me paraît satisfait par celui de la commission des lois. J'en demande donc le retrait.
Enfin, sur l'amendement n° 267, qui apporte une précision très utile, la commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les quatre amendements restant en discussion ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Madame Sittler, votre amendement n° 171 rectifié vise à rétablir le principe des comptes pivots.
J'ai été comme vous très sensible aux démarches de certaines associations bien connues de tous les départements français : elles sont venues vous rendre visite, elles sont venues me rendre visite, on les a vues partout, à l'Assemblée nationale comme au Sénat.
Soyons clairs : les résolutions prises sont excellentes, et les dérapages liés aux comptes pivots appartiennent désormais au passé. Le compte pivot, je le précise, c'était un compte unique sur lequel était placé l'argent de toutes les personnes sous tutelle, argent que l'on faisait travailler en oubliant quelquefois de reverser les intérêts aux personnes protégées.
On vous expliquera que jamais de telles choses ne se sont produites ; sans doute ! Mais, du fait de l'opacité qui prévaut, le risque existe. Or une personne sous tutelle mérite dignité et doit être traitée comme nous le sommes nous-mêmes. Pourquoi en serait-il autrement ? Ce serait très choquant ! Et j'imagine, mesdames, messieurs les sénateurs, que votre compte n'est pas confondu avec ceux de tous vos voisins : vous avez un compte individualisé, et il n'est pas question pour vous de le noyer dans un compte unique pour le quartier, dans un compte pivot.
Mme Sittler formule dans son amendement une proposition d'une grande complexité technique visant à la mutualisation des comptes, mais elle ne fait que réinventer un compte pivot.
Alors, je le dis franchement : c'est non ! Ce ne serait pas respectueux de la dignité de la personne sous tutelle ou sous curatelle, ce qui n'est pas moralement acceptable.
Mme Esther Sittler. Je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 171 rectifié est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le garde des sceaux.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Mon argumentation vaut pour tous les amendements en discussion.
Ainsi, madame Mathon-Poinat, l'amendement n° 187 pourrait peut-être prendre le même chemin que celui de Mme Sittler !
Mme Josiane Mathon-Poinat. Il est pourtant beaucoup plus pertinent !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Vous voulez rétablir le droit pour le tuteur d'ouvrir dans sa propre banque un compte au nom de la personne protégée. Mais il doit respecter la personne dont il gère le compte et ne pas l'obliger à changer de banque : ce ne serait pas respectueux de la personne !
Certes, il s'agit ici non pas de récréer un compte pivot, mais de faciliter la vie du tuteur, notamment pour les actes de gestion. Mais ce n'en est pas souhaitable pour autant, en raison, je le répète, du respect dû à la dignité de la personne placée sous tutelle.
L'avis est donc défavorable.
M. de Richemont, en revanche, tient à préciser par son amendement n° 17 que, si la personne sous tutelle devait ouvrir un autre compte, il faudrait que ce soit le juge qui le lui permette. Il s'agit d'une sécurité supplémentaire, et le Gouvernement a émis un avis favorable.
Monsieur Gautier, après M. le rapporteur, j'ai bien envie à mon tour de vous rappeler que nous sommes en train de faire du droit, et que le droit, c'est concis, c'est beaucoup de sens en peu de mots. Or l'amendement n° 267 tend à décrire dans la loi quels sont les moyens de paiement habituels... Franchement, monsieur le sénateur, une précision de cette nature n'a pas sa place dans la loi, ni même dans le règlement : elle relève du contrat ! L'amendement est donc tout à fait superfétatoire.
Mon objection ne porte pas sur le fond, monsieur Gautier ; simplement, parce que nous faisons du droit, le Gouvernement a émis un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 428 du code civil, après les mots :
mesure de protection judiciaire
insérer les mots :
moins contraignante
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. L'amendement n° 18 est un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 428 du code civil :
« La mesure est proportionnée et individualisée en fonction du degré d'altération des facultés personnelles de l'intéressé.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 268, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 428 du code civil par un alinéa ainsi rédigé :
« Toute décision judiciaire de mesure de protection est motivée en précisant tant la proportionnalité que l'individualisation de la mesure de protection.
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Si le propre d'une décision judiciaire est d'être motivée, le législateur est en droit d'apporter les précisions utiles qui permettront à la famille ou aux proches de la personne à protéger de prendre connaissance avec justesse des raisons qui justifient la décision judiciaire. C'est la raison pour laquelle il convient de prévoir que toute décision judiciaire de mesure de protection précise les critères de proportionnalité et d'individualisation sur lesquels elle se fonde et qui formeront le coeur de la motivation du juge.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement est sympathique, mais il est profondément dangereux.
Si vous précisez chaque fois qu'un juge doit motiver ses décisions, cela veut dire que, lorsque vous ne le précisez pas, il n'aura pas à les motiver. Or, un juge doit toujours motiver ses décisions. Telle est la raison pour laquelle prévoir qu'une décision doit être motivée nous semble dangereux car, si cette obligation ne figure pas dans un texte, le juge pourrait croire qu'il est dispensé de motiver sa décision, ce qui n'est pas le cas.
Par conséquent, la commission vous demande de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. La motivation est déjà inscrite comme principe général dans l'article 455 du nouveau code de procédure civile. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 430 du code civil, remplacer les mots :
ministère public
par les mots :
procureur de la République
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 269, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 431 du code civil par les mots :
ou du médecin de l'équipe pluridisciplinaire de la maison départementale des personnes handicapées prévu à l'article L. 146-8 du code de l'action sociale et des familles.
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. L'article 431 du code civil dans la rédaction du projet de loi exige, à peine d'irrecevabilité, que la demande d'ouverture d'une mesure de protection soit accompagnée d'un certificat médical rédigé par un médecin choisi sur une liste établie par le procureur.
Le présent amendement prévoit que le certificat circonstancié qui accompagne la demande d'ouverture de la mesure de protection puisse être également rédigé par le médecin de l'équipe pluridisciplinaire de la maison départementale des personnes handicapées.
On ne peut contester que des garanties soient apportées sur tout le territoire national quant à la qualification des médecins qui seront amenés à intervenir dans ces situations. L'objectif de l'agrément est de s'assurer que ceux-ci présenteront les mêmes garanties. Les médecins concernés sont appelés à accomplir un acte d'une extrême gravité : constater que les patients souffrent d'une altération des facultés mentales ou corporelles qui nécessite la mise en place d'une protection particulière. L'agrément permettrait un contrôle et assurerait la cohérence des décisions dès lors qu'elles seront établies sur le fondement de critères communs.
Or, dans la pratique, l'agrément ne correspond qu'à l'inscription sur une liste. Il ne joue pas véritablement le rôle auquel il est destiné. Par ailleurs, les médecins qui exercent dans les maisons départementales des personnes handicapées possèdent un savoir et de véritables compétences en matière de handicap. Au regard de leurs qualifications, rien n'empêche qu'ils puissent figurer sur la liste des médecins agréés.
Le projet de loi les contraint à entreprendre une démarche administrative qui relève d'un formalisme superflu, car il méconnaît la réalité, celle du manque de médecins s'intéressant au handicap et connaissant bien la personne handicapée.
Il n'y a aucune raison pour que le Sénat refuse qu'un médecin d'une maison départementale des personnes handicapées établisse le certificat. Les collectivités territoriales et l'État auraient tout à y gagner, en termes d'économies et de gains d'efficacité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement introduit une confusion entre la compensation du handicap prévue dans la loi du 11 février 2005 et la protection juridique.
La loi prévoit qu'un majeur ne peut être placé sous mesure de protection que sur la base d'un certificat médical rédigé par un médecin présentant toute garantie d'expérience et d'indépendance et agréé et, par conséquent, figurant sur la liste établie par le procureur.
Seul le médecin inscrit sur cette liste peut établir le certificat sur la base duquel le juge des tutelles se prononcera.
Toutefois, cela n'interdit aucunement au médecin d'une maison départementale des personnes handicapées de se faire agréer sur la liste établie par le procureur et, s'il figure sur cette liste, il établira le certificat en tant que médecin agréé et non pas en tant que médecin de l'établissement.
Que ces médecins se fassent agréer et vous aurez satisfaction, mon cher collègue, mais nous ne pouvons pas introduire une exception au principe que nous avons posé dans la loi en permettant que des médecins, parce qu'ils sont des médecins d'établissement, n'aient pas besoin de se faire agréer.
M. Paul Blanc. Tout à fait d'accord !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur Gautier, comme M. le rapporteur l'a très bien expliqué, le juge ne prendra une décision que sur l'avis d'un médecin agréé et non pas du médecin traitant, qui pourrait être complaisant.
Il y a donc une cohérence de l'ensemble du texte, le médecin doit être agréé.
Le même amendement avait été déposé à l'Assemblée nationale. Il s'agit d'un bel hommage aux maisons départementales des personnes handicapées, ce dont je me réjouis.
Par ailleurs, si les départements considèrent qu'il est simple d'avoir dans les maisons départementales des personnes handicapées un médecin agréé, que ces derniers présentent leur candidature et ils n'auront pas beaucoup de difficultés à obtenir l'agrément. Mais nous gardons l'homogénéité du texte, le médecin doit être agréé, sinon, on en revient au médecin traitant et, très honnêtement, des dérives sont possibles.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mes chers collègues, j'attire votre attention sur le fait que nous sommes en train de réformer un livre du code civil.
Je ne sais pas s'il y a même dix ans on aurait imaginé inscrire dans le code civil des formules du type de celle qui nous est proposée, s'agissant du « médecin de l'équipe pluridisciplinaire de la maison départementale des personnes handicapées » ! On aurait sans doute considéré que les conditions de l'agrément étaient de la compétence du procureur, à fixer par une circulaire ou par toute autre mesure d'ordre réglementaire.
De plus en plus, on mélange deux niveaux. Eh bien, non ! Au législateur que nous sommes revient la tâche de fixer les principes présidant à la réforme de la tutelle et de la protection des majeurs, mais il faut nous en tenir là parce que tout le reste, c'est-à-dire les mesures d'application, relève du domaine réglementaire.
Je le dis une fois pour toutes à l'occasion de cet amendement, mais que mon ami Charles Gautier ne s'en émeuve pas outre mesure, car je vise beaucoup d'autres amendements de même nature : restons-en, dans le code civil, aux principes qui concernent le droit civil, et renvoyons les mesures d'application au pouvoir réglementaire.
Mes chers collègues, que deviendrait le code civil si nous continuions sur cette pente ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 189, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 431 du code civil, remplacer les mots :
est fixé
par les mots :
et les modalités de sa prise en charge au titre de l'aide juridictionnelle sont fixés
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement vise à revoir le financement du certificat médical certifié délivré par un médecin spécialiste. Le laisser à la charge du requérant est injuste parce que, étant considéré comme une expertise et non comme une simple consultation, le certificat médical donne lieu à des honoraires payés au médecin qui ne peuvent donc ouvrir droit à une prise en charge par la sécurité sociale. Toutefois, ces honoraires sont extrêmement élevés.
De ce fait, un justiciable pourrait hésiter à faire valoir ses droits en justice en raison du coût exorbitant d'un acte préalable nécessaire à la saisine du juge. Et c'est encore plus vrai quand ce justiciable ne dispose pas de ressources suffisantes.
Or, comme la protection juridique des plus vulnérables est tout de même une mission incombant à la collectivité, il convient dès lors de prévoir une prise en charge du coût du certificat médical délivré par un expert dans le cadre de l'aide juridictionnelle.
Par ailleurs, la loi de février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a réaffirmé l'existence d'un droit à une compensation des conséquences du handicap, de nature universelle.
Ce droit, qui avait déjà été posé par les lois de janvier 2002 et de mars 2002, a été défini comme une obligation faite à l'ensemble de notre collectivité de répondre à tous les besoins des personnes, notamment des personnes handicapées - places dans les établissements spécialisés, allocations diverses - et en particulier de permettre « l'accès aux moyens et prestations accompagnant la mesure de mise en oeuvre de la protection juridique ».
Par conséquent, le rôle conféré au certificat médical, dans le cadre du projet de loi, participe plus d'une mise en oeuvre d'une protection juridique puisqu'il est requis, en effet, sous peine d'irrecevabilité de la demande.
Ce problème a été abordé ce matin par la commission des lois : si le coût du certificat médical n'est pas pris en charge par la sécurité sociale, il doit obligatoirement être pris en charge par l'aide juridictionnelle.
M. le président. L'amendement n° 106 rectifié, présenté par Mme B. Dupont, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 431 du code civil par une phrase ainsi rédigée :
Il est pris en charge par l'État pour les personnes dont les ressources sont inférieures à un plafond fixé par ce même décret.
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Je plaide également pour la prise en charge au bénéfice des personnes en difficulté ayant les revenus les plus modestes, parce qu'il serait paradoxal que ces dernières ne puissent pas être aidées pour être protégées. Mais je ne parlerai pas d'aide juridictionnelle, chère collègue, puisque la décision du juge ne sera pas encore prise. Il faut donc que le coût de ce certificat soit pris en charge par l'État.
M. Vasselle va peut-être réagir si je lui dis qu'une partie des frais pourrait être remboursée par la sécurité sociale. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 189, nous considérons que le certificat médical ne peut pas relever de l'aide juridictionnelle, puisqu'il est délivré en amont de toute décision de justice.
Nous comprenons très bien que le coût puisse être élevé pour les familles et il faudrait peut-être trouver une solution pour faire en sorte que le certificat médical ne soit pas à leur charge. Il me semble d'ailleurs qu'un décret doit prévoir les modalités de prise en charge de ce certificat médical.
En tout état de cause, cela ne peut pas relever de l'aide juridictionnelle. Même si l'État doit participer, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'un coût important pour les finances publiques. La commission émet donc un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 106 rectifié, la commission aimerait connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le Gouvernement invoque l'article 40 de la Constitution sur les deux amendements.
M. le président. Monsieur le président de la commission des finances, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Ces deux amendements, s'ils étaient votés, accroîtraient la charge publique. Par conséquent, l'article 40 est applicable.
M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements nos 189 et 106 rectifié ne sont pas recevables.
L'amendement n° 178 rectifié bis, présenté par M. About et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par cet article pour l'article 431 du code civil, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - La liste des médecins spécialistes est établie chaque année par le procureur de la République, après consultation du préfet. À cette fin, celui-ci procède à une enquête de moralité. Cette enquête est renouvelée au moins tous les cinq ans.
« Cette liste précise obligatoirement la spécialisation de chaque médecin.
La parole est à M. Nicolas About.
M. Nicolas About. Cet amendement vise à attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité, dans le cadre du décret, de préciser les conditions dans lesquelles le procureur de la République établit la liste des médecins spécialistes qui apportent leur expertise lors d'une procédure de mise sous tutelle.
Cette liste devra donner lieu à une consultation du préfet, à une enquête de moralité des personnalités pressenties et préciser la spécialité de chaque médecin.
En effet, on n'examine pas de la même manière le patient qui souffre d'autisme et celui qui est atteint de la maladie d'Alzheimer. Le fait qu'un médecin figure sur la liste ne constitue pas en soi la garantie du diagnostic qui sera fait ni de l'avis médical qui sera rendu.
Je souhaite donc que M. le ministre s'engage à apporter toutes ces précisions dans le décret.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Je comprends fort bien les préoccupations de M. About. Toutefois, comme l'a rappelé M. le président de la commission des lois, on ne peut charger le code civil de dispositions de nature réglementaire.
M. Nicolas About. Ce n'est pas ce que j'ai demandé ! Je voulais simplement entendre M. le garde des sceaux.
M. Henri de Richemont. La commission souhaite donc le retrait de l'amendement no 178 rectifié bis. À défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur About, cette liste ne peut pas comprendre que des médecins spécialistes.
M. Nicolas About. Non, en effet !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. C'est pourtant l'objet de votre amendement, et reconnaissez que c'est une mauvaise idée.
M. Nicolas About. Je vise les médecins agréés.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. La liste des médecins agréés ne peut pas contenir que des médecins spécialistes. Certains généralistes de talent, et je suis persuadé que vous en connaissez au moins un, ont des compétences particulières, en gériatrie par exemple.
M. Nicolas About. Oui, moi ! (Sourires.)
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Absolument, mais je n'osais pas citer votre nom ! (Nouveaux sourires.) Vous pourriez, à ce titre, figurer sur la liste des médecins agréés. De ce point de vue, le projet de loi est très libéral.
En revanche, votre amendement restreint la possibilité, pour des médecins de votre qualité, de figurer sur cette liste. C'est dommage !
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, pour explication de vote.
M. Paul Blanc. Je partage le point de vue de M. About, mais il me semble qu'il conviendrait de solliciter l'avis du Conseil national de l'ordre des médecins, qui peut en effet apporter un éclairage intéressant sur les médecins pressentis pour figurer sur la liste des experts.
M. le président. Monsieur About, l'amendement no 178 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Nicolas About. M. le garde des sceaux semble ignorer que la médecine générale peut désormais être considérée comme une spécialité. Mais le simple généraliste que je suis ne lui en tiendra pas rigueur.
Monsieur le garde des sceaux, l'objet de ma question était de savoir si vous aviez l'intention d'apporter dans le décret les précisions que je souhaitais. Il ne s'agit pas de jouer sur les mots « généralistes » et « spécialistes ». L'affaire est plus sérieuse.
M. Alain Vasselle. C'est un amendement d'appel.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur About, si je comprends bien, vous souhaitez que le décret précise la spécialité du médecin !
M. Nicolas About. Absolument !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. J'en suis d'accord. Et son âge ? (Exclamations amusées sur quelques travées.)
M. le président. La parole est à M. Nicolas About.
M. Nicolas About. C'est sans doute très amusant, mais je n'ai pas pour habitude de rire à propos du handicap ou de tout autre sujet de cet ordre.
Il arrive trop fréquemment que des personnalités figurant sur des listes d'experts soient considérées comme des références alors qu'elles n'ont aucune compétence quant au sujet traité et n'y connaissent rien.
Nous devons veiller à la bonne prise en charge des citoyens. Il s'agit d'une question très sérieuse qui ne mérite pas d'être balayée d'un revers de main.
Néanmoins, respectueux que je suis du code civil, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement no 178 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 219 rectifié, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat et Payet, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par cet article pour l'article 431 du code civil, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - L'équipe pluridisciplinaire des maisons départementales des personnes handicapées, telle que visée à l'article L. 146-8 du code de l'action sociale et des familles, comprend un médecin inscrit sur la liste mentionnée à l'article 431 du présent code afin de pouvoir délivrer, le cas échéant, le certificat médical mentionné au même article.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Après avoir entendu le rapporteur et le ministre expliquer, s'agissant de l'amendement no 269, que le médecin d'une équipe pluridisciplinaire pourrait sans difficulté être agréé par le procureur de la République, et soucieux de ne pas encourir les foudres du président de ma commission, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement no 219 rectifié est retiré.
L'amendement n° 107, présenté par Mme B. Dupont, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article 431-1 du code civil, remplacer les mots :
peut solliciter
par le mot :
sollicite
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. Comme je l'ai indiqué au cours de la discussion générale, la commission des affaires sociales estime souhaitable que le médecin expert sollicite obligatoirement l'avis du médecin de la famille et qu'il ne s'agisse pas seulement d'une possibilité. Elle considère en effet que ce dernier est le mieux placé pour connaître l'environnement social et familial de la personne à protéger.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. La consultation du médecin traitant par le médecin agréé peut se révéler utile et elle est d'ailleurs prévue dans le texte adopté par l'Assemblée nationale.
En revanche, la commission considère qu'il n'est pas souhaitable de la rendre obligatoire ; elle doit rester facultative.
J'ajoute que certaines personnes n'ont pas de médecin traitant ou qu'elles peuvent être en conflit avec leur médecin traitant, surtout lorsque celui-ci a été choisi par la famille.
La commission considère que l'adoption de cet amendement aurait pour conséquence d'allonger, de compliquer et de fragiliser les procédures. C'est la raison pour laquelle elle en demande le retrait. À défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je suis désolé de dire à M. de Richemont que je soutiens l'amendement de Mme Dupont, et ce pour deux raisons.
En premier lieu, monsieur le rapporteur, vous avez déclaré - sans doute s'agissait-il d'une erreur - que certains patients pourraient ne pas avoir de médecin traitant. Or, le Parlement a adopté des dispositions rendant obligatoire le choix d'un médecin traitant. Tous les Français sont donc censés avoir un médecin traitant.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Moi, je n'en ai pas !
M. Alain Vasselle. En second lieu, compte tenu de l'esprit dans lequel nous avons élaboré la réforme de l'assurance maladie, et compte tenu aussi du rôle essentiel, et même pivot, que joue le médecin traitant dans le parcours de soins, il me paraît incontournable de solliciter son avis. Ne pas le prendre en considération serait faire fi des dispositions que le Parlement a adoptées à l'unanimité.
Telles sont les raisons pour lesquelles je ne peux qu'inviter la Haute Assemblée à suivre la commission des affaires sociales et à adopter cet amendement pertinent.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mes chers collègues, nous ne sommes plus du tout dans le sujet !
Le médecin expert, je le rappelle, doit déterminer si une personne a besoin d'une mesure de protection et, dans l'affirmative, la nature de cette mesure. Il a donc un rôle protecteur. Et rien n'empêche, bien au contraire, la personne de se munir de son dossier médical et de certificats médicaux du médecin traitant.
Que l'on accorde au médecin expert la possibilité de solliciter l'avis du médecin traitant, j'en suis d'accord. En revanche, doit-on le contraindre à le faire systématiquement ? L'avis du médecin traitant est-il indispensable ou même utile lorsqu'il s'agit d'apporter une expertise sur une personne atteinte d'une maladie psychiatrique grave ? Je ne le pense pas.
Une telle disposition compliquerait le dispositif et induirait un coût supplémentaire puisque le médecin traitant donnera son avis à l'issue d'une consultation qui sera remboursée par la sécurité sociale, cher collègue Alain Vasselle.
L'objet de l'expertise médicale, c'est la protection de la personne, et uniquement cela. Il s'agit de vérifier que l'on n'abuse pas de la procédure de mise sous tutelle, comme cela a pu se produire dans le passé, même si ces abus sont devenus moins fréquents depuis le vote de la dernière loi. Naguère, il suffisait de produire quelques certificats médicaux, et la mise sous tutelle était chose faite. Que l'on pense à Baudelaire !
Je comprends la préoccupation des auteurs de l'amendement. Si le médecin expert estime qu'il doit consulter le médecin traitant, il peut le faire, mais je ne vois pas l'utilité de l'y contraindre.
M. Alain Vasselle. Alors, il ne le fera jamais !
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le mieux est l'ennemi du bien, mesdames, messieurs les sénateurs.
Je voudrais convaincre le Sénat ne serait-ce que sur un plan pratique. Imaginez que vous soyez en situation d'être mis sous tutelle. Peut-on concevoir que vous iriez consulter un médecin agréé sans lui présenter votre dossier médical ? Qui peut croire cela ? Or, le dossier médical n'est rien d'autre que le dossier de votre médecin traitant.
Le médecin agréé va infirmer ou confirmer - probablement confirmer - l'avis du médecin traitant. Et pourtant, vous voulez qu'il sollicite obligatoirement une nouvelle fois ledit médecin traitant. Tant mieux pour lui, cela lui fera une consultation supplémentaire !
Cela ne relève ni du droit ni de la loi - la loi doit être concise, claire, et non pas bavarde -, cela relève du simple bon sens. La sollicitation de l'avis du médecin traitant figure de manière implicite dans la loi. Dès lors, pourquoi vouloir alourdir la rédaction ?
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est très défavorable à cet amendement.
M. le président. Madame le rapporteur pour avis, l'amendement n° 107 est-il maintenu ?
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. Forte de la garantie que le médecin expert sera choisi sur une liste de personnalités compétentes et qu'il pourra prendre connaissance du dossier médical de la personne, je retire l'amendement no 107.
M. le président. L'amendement n° 107 est retiré.
L'amendement n° 179 rectifié bis, présenté par M. About et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par cet article pour l'article 431-1 du code civil, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les documents, en particulier d'ordre médical, produits à l'occasion d'une décision d'ouverture ou de renouvellement d'une mesure de protection, ne sont pas communicables par le juge à des tiers, exception faite d'un tiers de confiance.
La parole est à M. Nicolas About.
M. Nicolas About. Cet amendement vise à rappeler que le juge est le garant du caractère strictement confidentiel des documents médicaux produits à l'occasion d'une procédure de mise sous tutelle.
On me répondra sans doute que cela va sans dire. Je considère néanmoins que cela va mieux en le disant. De nombreuses personnes - le conseil de famille, pour ne citer que lui - sont impliquées dans cette opération de tutelle et les documents n'ont pas à être transmis à des tiers.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Dire que le juge est le garant du caractère strictement confidentiel des documents médicaux me paraît en effet aller de soi.
Cet amendement n'apporte rien au droit en vigueur, ni a priori, ni a posteriori. Une telle disposition jetterait en outre une certaine suspicion sur les juges, soupçonnés de pouvoir ne pas respecter le caractère confidentiel des documents médicaux qui leur sont fournis lors d'une procédure de mise sous tutelle.
Les juges étant soumis au secret professionnel, il ne me semble pas nécessaire d'alourdir le code civil en y inscrivant une telle disposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. L'amendement de M. About est redondant puisqu'il est satisfait par le droit de la confidentialité.
M. le président. Monsieur About, l'amendement n° 179 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Nicolas About. Je prends bonne note que l'ensemble des documents produits à l'occasion d'une décision d'ouverture ou de renouvellement d'une mesure de protection ne sont pas communicables par le juge à des tiers. Si cela se produisait, il s'agirait d'une faute lourde.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Absolument !
M. Nicolas About. Dans ces conditions, je retire l'amendement no 179 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° 179 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 21, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil :
L'intéressé peut être accompagné par un avocat ou, sous réserve de l'accord du juge, par toute autre personne de son choix.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement vise à préciser de quelle assistance peut bénéficier un majeur qui se présente devant un juge.
La présence de l'avocat est bien entendu possible - je considère qu'elle est même souhaitable -, mais le projet de loi prévoit que le majeur peut être assisté par « toute autre personne de son choix ».
La commission considère que cette faculté peut être dangereuse puisque le majeur pourrait être assisté par des personnes qui ont sur lui une influence morale, voire physique.
Pour remédier à cette situation, l'amendement no 21 dispose que le majeur peut être assisté par toute personne de son choix autre qu'un avocat, sous réserve de l'accord du juge. Le juge pourra ainsi apprécier si la personne pressentie pour assister le majeur susceptible d'être mis sous tutelle agira pour le bien de ce dernier.
M. le président. L'amendement n° 181 rectifié bis, présenté par M. About et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil :
Après avoir informé l'intéressé qu'il peut être accompagné par un avocat ou toute autre personne de son choix, le juge le convoque, l'entend puis statue.
La parole est à M. Nicolas About.
M. Nicolas About. Selon moi, les personnes qui doivent être placées sous tutelle, et qui sont donc particulièrement fragiles et peu averties, doivent être informées de ce qu'elles peuvent se rendre à la convocation du juge accompagnées d'un avocat ou de toute autre personne de leur choix.
S'agissant de la personne qui accompagne l'intéressé, je ne partage pas l'avis exprimé par M. le rapporteur, et ce pour une bonne raison : je fais confiance au juge, qui, avec clairvoyance et discernement, pourra se rendre compte si la personne accompagnante oeuvre, ou non, dans l'intérêt du majeur qui va être placé sous tutelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Le nouveau code de procédure civile prévoit que le juge informe de ses droits la personne qui se présente devant lui.
Par ailleurs, l'amendement n° 181 rectifié bis, tel qu'il est rédigé, ferait tomber l'amendement n° 21 de la commission. Or, monsieur About, si ce dernier n'était pas adopté, le juge n'aurait pas la possibilité de s'opposer à l'assistance d'une personne qui se présente aux côtés d'un majeur. Il devrait constater la présence, aux côtés du majeur devant être protégé, d'une personne qu'il devrait écouter.
En revanche, s'il est adopté, le juge pourra s'opposer à la présence d'une personne qui ne présenterait pas toutes les garanties nécessaires et suffisantes pour protéger le majeur devant être mis sous tutelle.
Je vous demande donc, monsieur About, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur About, l'amendement n° 181 rectifié bis vise à préciser que chaque personne a le droit d'être assistée par un avocat.
Cette mention est superfétatoire, puisque toutes les convocations adressées par les greffes des tribunaux français renseignent la personne sur ses droits. Il est expressément précisé qu'elle peut se faire assister d'un avocat. Cela devrait donc vous rassurer !
Par ailleurs, l'amendement n° 21 de la commission est excellent, car il tend à apporter une précision utile. En effet, si la personne devant être placée sous tutelle est accompagnée d'une personne de son choix qui monopolise la parole, le juge peut souhaiter se trouver seul avec la personne directement concernée par la mesure. Or l'amendement n° 21 vise justement à préciser que le juge a la liberté d'accepter ou non la présence d'une tierce personne et d'entendre ou non les deux dans la même audition.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 21 et demande à M. About de bien vouloir retirer l'amendement n° 181 rectifié bis, qui n'apporte strictement rien.
M. le président. L'amendement n° 181 rectifié bis est-il maintenu, monsieur About ?
M. Nicolas About. Monsieur le rapporteur, monsieur le garde des sceaux, nous n'avons pas la même logique. Cependant, je ne pense pas pouvoir trouver les mots pour vous convaincre.
Nous avons peut-être trop travaillé avec les personnes en grande difficulté et les personnes handicapées pour pouvoir nous adapter à la logique qui nous est proposée.
M. Paul Blanc. Tout à fait !
M. Nicolas About. Ayant en mémoire les longs débats que nous avons eus sur les personnes handicapées, qu'elles soient handicapées physiques ou psychiques, je pense qu'il est nécessaire de rappeler cette obligation d'information. Cela étant, je note que, quand c'est moi qui propose d'apporter une telle précision, elle est superfétatoire, mais, quand la commission prévoit que « l'intéressé peut être accompagné par un avocat », là, la précision est utile !
Selon moi, les personnes concernées doivent pouvoir être accompagnées par toute autre personne de leur choix. C'est sans doute la meilleure garantie que nous puissions leur donner. Par ailleurs, je ne doute pas que le juge pourra parfaitement entendre, s'il le souhaite, la personne elle-même. Il saura faire la part des choses.
Pour en avoir été témoin, je sais qu'il arrive trop souvent que l'on tente de dissuader la personne accompagnante, en particulier s'agissant de personnes handicapées. J'ai moi-même accompagné plusieurs fois des personnes handicapées qui étaient convoquées par des commissions d'évaluation et je sais très bien comment les choses se passent : ce n'est pas très simple pour les personnes handicapées, surtout quand elles ne peuvent pas se défendre elles-mêmes ! Et il est trop facile d'écarter, pour régler plus simplement le dossier, une personne qui pourrait défendre activement, peut-être il est vrai de façon jusqu'au-boutiste, les droits de ces majeurs.
Pour ma part, je pense qu'il faut respecter le droit des personnes. Or, parmi les droits fondamentaux, il y a le droit de pouvoir être représenté par la personne de son choix. C'est d'ailleurs dans cette logique que, tout à l'heure, mes chers collègues, nous adopterons des dispositions qui nous permettront de désigner dès maintenant la personne qui nous représentera lorsque nous ne serons plus capables de pourvoir nous-mêmes à nos intérêts. Alors, pas question de laisser entendre que cette personne pourra purement et simplement être renvoyée chez elle !
Parce que je pense qu'il faut faire confiance aux personnes, je maintiens l'amendement n° 181 rectifié bis.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. S'agissant de l'obligation d'information, M. le garde des sceaux vous a répondu, monsieur About. Je n'y reviens donc pas.
Concernant les personnes qui accompagnent le majeur, nous savons que certaines d'entre elles n'interviennent pas forcément dans l'intérêt de la personne qui doit être protégée. (M. Nicolas About s'exclame.). Ce sont d'ailleurs les juges qui nous ont demandé d'apporter la précision prévue par l'amendement n° 21. La commission des lois n'a rien inventé !
Et vous mettez en avant votre grande expérience dans ce domaine. Comme si nous-mêmes n'étions pas tous des élus avertis de ces choses...
M. Nicolas About. J'ai simplement voulu dire que cette expérience pouvait être bouleversante !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Les membres de la commission des lois, qui sont sénateurs, comme vous, sont tout à fait en mesure d'apprécier la situation. Alors, si vous tenez absolument à prendre des exemples personnels, allons-y !
Pour ma part, je suis maire d'un village et j'ai présidé un établissement pour handicapés durant des décennies. Je crois donc que nous connaissons tous ces réalités.
M. Nicolas About. Oui !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. L'amendement n° 21 de la commission, qui sera mis aux voix en premier, ce qui réglera peut-être le problème, vise aussi à éviter que des personnes accompagnantes ne s'expriment au nom des intéressés, alors même qu'elles ne défendent pas les intérêts de ces derniers.
Mes chers collègues, je vous rends vigilants sur ce point : le dispositif proposé par la commission des lois est protecteur. J'insiste donc pour que l'amendement n° 21 soit adopté.
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote sur l'amendement n° 21.
M. Charles Gautier. On comprend qu'un juge puisse chercher à éliminer de l'entourage d'une personne faible ou handicapée quelqu'un qui exercerait une influence malfaisante ou serait de mauvais conseil. Mais cette attitude ne peut pas être adoptée a priori. Pour que tel ne soit pas le cas, il faut que la personne convoquée puisse être accompagnée de la personne de son choix, ce qui permet au juge de constater son influence positive ou négative.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est ce que prévoit l'amendement !
M. Charles Gautier. On ne peut pas écarter une personne a priori. Il faut que cela se fasse a posteriori !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. M. Charles Gautier dit exactement ce que j'écris ! Il s'agit de donner au juge le pouvoir d'exercer son discernement.
M. Charles Gautier. Mais après ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Quand les personnes sont devant lui, il décide si, oui ou non, il doit autoriser la personne accompagnante à rester, une fois qu'il a vérifié que celle-ci est bien là pour défendre les intérêts du majeur devant être protégé.
Nous faisons confiance au juge et nous nous en remettons à son sens du discernement pour déterminer où est l'intérêt de la personne qui doit être protégée.
Bien entendu, monsieur About, il ne s'agit pas d'interdire à l'intéressé d'être assisté par une personne de son choix. Simplement, si le juge considère que l'accompagnant n'est pas là pour le bien de la personne devant être protégée, il doit pouvoir refuser sa présence. Si nous n'adoptons pas l'amendement n° 21, il n'aura pas ce droit.
M. Jacques Blanc. Nous sommes d'accord !
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 181 rectifié bis n'a plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 109 est présenté par Mme B. Dupont, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 190 est présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 270 est présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après les mots :
à sa santé
supprimer la fin du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil.
La parole est à Mme le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 109.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. Comme je l'ai déjà évoqué lors de la discussion générale, cet amendement vise à supprimer la restriction selon laquelle le juge peut écarter l'audition du majeur vulnérable « si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée ».
La commission des affaires sociales a jugé qu'il était important que le juge voie toutes les personnes concernées, même si on peut estimer qu'elles ne sont pas capables de comprendre la portée de sa décision.
Cependant, la question de ne pas déranger le juge inutilement si la personne ne peut pas comprendre sa décision a été posée ce matin en commission. À la limite, il faudrait prévoir une exception uniquement pour le cas où la personne n'est pas en mesure d'exprimer sa volonté ou n'est pas en état de comprendre la portée du geste du juge. Dans ce cas-là, on éviterait ainsi au juge de se déplacer inutilement. Mais, pour les personnes qui peuvent se déplacer, il est important, me semble-t-il, que le juge puisse les recevoir.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 190.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement, qui a fait ce matin l'objet d'une discussion en commission, est identique à l'amendement n° 109.
Si la mention « si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée » était conservée, elle risquerait de priver la plupart des personnes atteintes d'altération de leurs facultés de leur audition par le juge. Il est donc nécessaire de supprimer une telle mention.
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour présenter l'amendement n° 270.
M. Charles Gautier. Monsieur le président, je considère qu'il vient d'être, par deux fois, brillamment défendu !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. La commission des lois a eu un long et intéressant débat ce matin, au cours duquel s'est dégagé un consensus pour considérer que, si un malade est dans le coma, il n'y a pas lieu, pour le juge, de venir l'entendre, car cela ne servirait à rien.
C'est la raison pour laquelle je vous propose, madame le rapporteur pour avis, de rectifier votre amendement n° 109, en remplaçant l'expression « si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée » par les mots « ou si elle est hors d'état d'exprimer sa volonté », qui visent clairement les cas d'inconscience.
Lorsque la personne est consciente, le juge doit venir auprès de la personne, mais, lorsque le certificat médical déclare que celle-ci est inconsciente, un tel déplacement n'est pas utile.
M. le président. Madame le rapporteur pour avis, acceptez-vous de rectifier l'amendement n° 109 dans le sens proposé par M. le rapporteur ?
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. Parmi les personnes hors d'état d'exprimer leur volonté, on trouve, par exemple, les autistes, qui sont mutiques. Dans ce cas, le juge n'a pas à se déplacer, ce sont les personnes qui doivent se rendre à sa convocation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. L'expression proposée figure dans le code de la santé publique et vise clairement les cas d'inconscience.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. J'accepte donc de rectifier l'amendement n° 109 dans ce sens.
M. le président. Madame Josiane Mathon-Poinat, acceptez-vous également de rectifier l'amendement n° 190 ?
Mme Josiane Mathon-Poinat. Tout à fait, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Charles Gautier, en est-il de même pour l'amendement n° 270 ?
M. Charles Gautier. Absolument, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 109 rectifié est présenté par Mme B. Dupont, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 190 rectifié est présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 270 rectifié est présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
À la fin du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil, remplacer les mots :
ou si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée
par les mots :
ou si elle est hors d'état d'exprimer sa volonté
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à ces trois amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 109 rectifié, 190 rectifié et 270 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 230 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme Férat et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil par une phrase ainsi rédigée :
Dans cette hypothèse, le juge fait commettre d'office par le bâtonnier, un avocat à cette personne afin qu'elle soit représentée par lui dans la procédure de protection et la durée de son fonctionnement.
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Avec cet amendement nous allons en quelque sorte au bout de notre logique.
Il vise à compléter le second aliéna de l'article 432 du code civil pour indiquer que, si le juge ne peut pas procéder à l'audition de l'intéressé, il saisit le bâtonnier pour qu'un avocat soit commis d'office afin de s'assurer que les droits de l'intéressé sont réellement défendus.
M. le président. L'amendement n° 271, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil par une phrase ainsi rédigée :
Dans cette hypothèse, le juge fait commettre d'office par le bâtonnier un avocat à cette personne, ou désigne un membre de la famille ou un proche afin qu'elle soit représentée par lui dans la procédure de protection et la durée de son fonctionnement.
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Cet amendement est proche du n° 230 rectifié bis, mais il est plus large, puisqu'il vise également, outre l'avocat, un membre de la famille ou à un proche de la personne.
Lorsque le juge décide de ne pas procéder à l'audition d'une personne si cette audition risque de porter atteinte à sa santé ou si l'état de cette personne ne lui permet pas d'en comprendre la portée, le présent amendement prévoit que le juge demande au bâtonnier de commettre un avocat d'office ou qu'il désigne un membre de la famille ou un proche afin que la personne à protéger puisse être représentée dans la procédure et pendant toute la durée de celle-ci. Voilà qui assurerait une meilleure garantie de protection et humaniserait le dispositif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Je dois dire que je ne comprends pas très bien l'objet de l'amendement n°230 rectifié bis. Si, sur avis médical, le juge décide qu'il ne sert à rien d'aller voir le malade parce que celui-ci est hors d'état d'exprimer sa volonté, voire inconscient, je ne vois pas très bien ce que pourra faire de plus l'avocat commis par le bâtonnier ! Il se trouvera en réalité dans la même situation que le juge qui aura considéré qu'il n'y avait pas lieu de procéder à l'audition.
Cet amendement n'a donc pour intérêt que de désigner une sorte de tuteur ad hoc pour les besoins de la procédure, mais, s'il s'agissait bien de cela, il conviendrait alors de désigner un mandataire spécial et non un avocat. Je demande par conséquent le retrait de cet amendement.
L'amendement n° 271 vise également à créer une sorte de tutelle ad hoc pour les besoins de la procédure. Nous considérons que cela n'a pas d'intérêt dans la mesure où la procédure, menée par le juge des tutelles, s'en trouve alourdie. Ce juge agit sur la base d'un avis médical, exclusivement dans l'intérêt du majeur devant être protégé. Je ne vois donc pas pourquoi, si celui-ci ne peut s'exprimer ou est hors d'état d'être entendu par le juge, une sorte de nouvelle tutelle serait prononcée, qu'elle soit assurée par un avocat, par un membre de la famille ou par un proche.
L'avis est donc défavorable sur les deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Monsieur le président, le rapporteur a brillamment exposé les choses.
Je comprends le souci de M. Détraigne : il s'agit de trouver une solution si la personne ne parvient pas à s'exprimer. De ce point de vue, les avocats sont sans doute plus doués que les juges, et vous savez que je ne vous contredirai pas ! (Sourires.) Toutefois, je ne vois vraiment pas pourquoi une personne hors d'état de s'exprimer parlerait mieux devant un avocat que devant un juge !
En ce qui concerne l'amendement n° 271, monsieur Gautier, j'aurais pu y être favorable si vous aviez supprimé la première partie de la phrase, relative à l'avocat commis d'office. Il est vrai en revanche que certaines personnes ne parleront qu'en présence d'un membre de leur famille. Si vous consentez à rectifier votre amendement en conséquence, j'émettrai un avis favorable.
M. le président. Monsieur Gautier, acceptez-vous la rectification suggérée par M. le garde des sceaux ?
M. Charles Gautier. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 271 rectifié, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil par une phrase ainsi rédigée :
Dans cette hypothèse, le juge désigne un membre de la famille ou un proche afin que cette personne soit représentée par lui dans la procédure de protection et la durée de son fonctionnement.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Vous savez combien je suis favorable à la défense de la famille ! Si le Gouvernement considère que la présence d'un membre de la famille peut apporter quelque chose de plus lorsqu'une personne est hors d'état de s'exprimer, je m'incline et émets donc un avis favorable. J'ajoute que je suis heureux de donner ainsi satisfaction à mes collègues !
M. le président. Monsieur Détraigne, l'amendement est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. Monsieur le président, j'approuve la rectification que vient de suggérer M. le garde des sceaux à M. Gautier. Je retire par conséquent mon amendement au profit du sien, qu'il a rectifié.
M. le président. L'amendement n° 230 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 271 rectifié.
M. Alain Vasselle. Je voterai cet amendement et me réjouis que l'on ait enfin réussi à trouver une solution qui permettra à un membre de la famille d'être entendu.
Tout à l'heure, c'est volontairement que je n'ai pas réagi sur l'amendement présenté par Mme Dupont, qu'elle a ensuite rectifié sur l'indication du rapporteur.
Vous semblez considérer que, lorsqu'un majeur doit être mis sous protection, il n'existe que deux cas de figure : ou bien il est capable de s'exprimer devant le juge, et alors il prend un avocat pour se défendre, ou bien il est totalement inconscient et dans l'incapacité de s'exprimer. Dans ce dernier cas, on ne lui donnait pas jusqu'à présent la possibilité de se faire accompagner d'une personne de son choix ou d'un membre de sa famille.
Il faut pourtant bien qu'un proche puisse être aux côtés de la personne qui, par hypothèse ici, n'a pas la capacité de s'exprimer- je pense notamment aux handicapés mentaux -, car ce proche peut parfaitement faire état devant le juge des raisons pour lesquelles la mesure de protection est souhaitée, et pourquoi elle est justifiée et nécessaire. Il faut prendre en compte ces cas et faire preuve d'humanité dans les dispositions législatives que nous prenons.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je suis au regret de devoir dire à M. Vasselle qu'il mélange tout !
Le juge n'est pas obligé d'entendre la personne soit quand des raisons de santé s'y opposent, soit du fait qu'elle n'est pas en état d'exprimer sa volonté, ce qui correspond dans notre esprit à un coma. Cette formule, technique, est reprise mot pour mot de ce qui figure déjà dans le code de la santé publique, monsieur Vasselle.
Mais nous parlons maintenant de tout autre chose. Il s'agit d'autoriser à se faire accompagner les personnes ayant des difficultés. Permettre de le faire à un membre de la famille est une bonne idée. Vous voyez que ces deux choses sont totalement différentes !
M. le président. L'amendement n° 167, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par cet article pour l'article 432 du code civil, insérer un article rédigé comme suit :
« Art. ... - Lorsqu'un majeur faisant l'objet à l'étranger d'une mesure de protection prévue par la loi du pays de résidence transfère son domicile en France, le juge des tutelles, saisi par le procureur de la République, par tout parent ou allié ou toute personne intéressée, statue d'urgence sur la loi applicable.
« Lorsque la loi étrangère est compétente, le juge statue d'urgence sur la validité en France des mesures de protection dont bénéficiait la personne protégée dans l'État de résidence et sur les modalités selon lesquelles elle sera exercée.
« Le juge des tutelles peut être saisi avant l'arrivée sur le territoire français de la personne à protéger dans les conditions prévues par le code de procédure civile.
La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. Monsieur le président, cet amendement a pour but de résoudre les difficultés que peuvent rencontrer des majeurs qui devraient bénéficier d'une mesure de protection pour leur retour en France.
Plusieurs cas de figure se présentent.
D'abord, ce majeur peut déjà faire l'objet d'une mesure de protection à l'étranger. Or, comme vous le savez, les lois étrangères ne sont pas toutes compatibles avec les lois françaises. Il est donc important de statuer sur la loi qui s'appliquera alors, d'autant que cela n'est pas évident du fait que beaucoup de Français établis hors de France - environ la moitié - sont des binationaux. Le juge doit donc pouvoir statuer sur cette question.
Ensuite, le majeur peut ne pas être couvert par une mesure de protection à l'étranger. Il est alors important de savoir ce qui se passera lorsqu'il arrivera en France. Il convient dans ce cas de prendre des mesures par anticipation.
Enfin, si le majeur est couvert par une loi étrangère et que le juge a statué, encore faut-il savoir quelles seront les modalités d'application des dispositions de protection sur le sol français.
Vous voyez qu'il s'agit d'un ensemble de problèmes extrêmement complexes. C'est la raison pour laquelle il importe que le texte que nous discutons puisse les résoudre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. J'ai bien compris l'argumentation développée par M. Cointat en ce qui concerne la nécessité d'organiser la protection des majeurs devant venir en France avant leur arrivée et je vois qu'il s'agit d'un véritable problème. Je m'en remets donc à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Cet amendement vise à introduire dans le code civil des règles spécifiques pour l'ouverture de mesures de protection juridique lorsqu'une personne protégée à l'étranger transfère son domicile en France.
Je comprends tout à fait l'inquiétude de M. Cointat et les motifs de son amendement. Toutefois, j'aimerais le convaincre que celui-ci n'est pas utile.
Lorsqu'une personne qui bénéficie à l'étranger d'une mesure de protection s'installe en France, il n'est pas nécessaire, pour assurer la continuité de la mesure prononcée à l'étranger, que le juge français statue. En effet, la mesure de protection continue à produire ses effets sans qu'une décision judiciaire française soit nécessaire. L'intervention systématique du juge français n'apporte rien de plus.
En outre, en application de l'article 3 du code civil, lorsque le juge des tutelles est saisi d'une demande de protection, il doit d'office vérifier quelle est la loi applicable en fonction de la nationalité de la personne.
Il s'agit d'une matière délicate, qui nécessite parfois des recherches de droit comparé et pour laquelle le recours à une procédure d'urgence, comme le prévoit l'amendement, n'est pas adapté.
Enfin, s'agissant de la possibilité de saisir le juge avant l'arrivée sur le territoire français de la personne à protéger, il convient de préciser que les Français résidant à l'étranger peuvent déjà, conformément aux dispositions de l'article 15 du code civil, saisir le juge des tutelles alors même qu'ils ne résident pas en France. Il n'est pas opportun d'élargir cette possibilité aux étrangers résidant à l'étranger avant même leur installation effective sur notre territoire.
Pour toutes ces raisons, monsieur Cointat, je vous demande de retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Cointat, l'amendement n° 167 est-il maintenu ?
M. Christian Cointat. Monsieur le garde des sceaux, j'ai beaucoup apprécié votre réponse, qui était excellente car précise et complète. Elle me satisfait pleinement et je retire donc mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 167 est retiré.
L'amendement n° 273, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
À la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 433 du code civil, supprimer les mots :
ou si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Effectivement, c'est un amendement de coordination. J'émets un avis favorable, à condition qu'il soit rectifié en fonction de ce que nous avons voté tout à l'heure, c'est-à-dire en remplaçant les mots indiqués par ceux-ci : « ou si elle est hors d'état d'exprimer sa volonté ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Gautier, acceptez-vous de rectifier l'amendement n° 273 dans le sens suggéré par M. le rapporteur ?
M. Charles Gautier. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 273 rectifié, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
À la fin du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 433 du code civil, remplacer les mots :
ou si son état ne lui permet pas d'en comprendre la portée
par les mots :
ou si elle est hors d'état d'exprimer sa volonté
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 191 est présenté par Mmes Mathon -Poinat, Borvo Cohen -Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 220 rectifié bis est présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly.
L'amendement n° 249 est présenté par M. Lecerf.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 433 du code civil, par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l'article 431, la mesure de sauvegarde de justice peut être prononcée par le juge des tutelles dans l'attente de l'établissement du certificat prévu à l'article 431, en cas d'urgence ou lorsque l'absence de production du certificat requis résulte d'un refus de la personne de se faire examiner et que son comportement atteste manifestement de l'altération de ses facultés mentales.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 191.
Mme Josiane Mathon-Poinat. La sauvegarde de justice a été maintenue dans ce texte. Elle est toutefois moins lourde qu'une mesure de curatelle ou de tutelle. Elle est destinée au majeur atteint d'une altération provisoire de ses facultés. Elle doit cesser dès que ce dernier a recouvré ses facultés ou si une mesure plus contraignante a été décidée.
En cela, en fait, elle correspond tout à fait à la volonté qui était la nôtre de réaffirmer les principes de nécessité et de proportionnalité. Néanmoins, nous vous proposons d'introduire une seule exception à ce principe de nécessité du certificat médical, qui reste la condition sine qua non pour mettre en place une mesure de sauvegarde de justice. Par exception, donc, à ce principe, et uniquement dans les situations d'extrême urgence, le juge pourrait prononcer une mesure de sauvegarde de justice.
Le texte, tel qu'il est rédigé, peut rendre difficile le traitement des situations d'urgence, notamment dans les cas où les délais découlant de l'attente soit d'une nouvelle requête accompagnée du certificat médical prévu par l'article 431, soit d'une requête formulée par le ministère public à la demande d'un tiers, sont manifestement préjudiciables à la personne qui a besoin d'être protégée immédiatement.
Cet amendement a pour objet de réintroduire la saisine d'office, mais seulement dans des situations d'urgence.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 220 rectifié bis.
M. Yves Détraigne. Cet amendement, identique au précédent, a pour objet d'établir, pour ce seul cas, une exception à la règle selon laquelle la demande d'ouverture de la mesure de protection judiciaire est accompagnée, à peine d'irrecevabilité, du certificat prévu à l'article 431.
M. le président. L'amendement n° 249 n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 191 et 220 rectifié bis ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Ce matin, en commission, nous avons eu un long débat sur ces amendements.
Madame Josiane Mathon-Poinat, l'amendement n° 191 va à l'encontre du principe de nécessité que la réforme veut imposer,...
M. Henri de Richemont, rapporteur. ... à savoir que toute mesure de protection est interdite sans présentation au juge d'un certificat médical et sans que toutes les autres solutions de remplacement aient été examinées.
J'attire votre attention sur le fait que, si une personne refuse d'être examinée par le médecin agréé, celui-ci établit alors un certificat de carence sur la base duquel le juge pourra alors se prononcer et ordonner la mesure qu'il estimera appropriée.
Enfin, je vous rappelle, car c'est un point important, que la loi prévoit une période suspecte de deux ans avant l'ouverture. Les actes faits ou les engagements pris au cours de cette période par le majeur pourront ainsi facilement faire l'objet d'une annulation ou d'une réduction.
En tout état de cause, nous pensons qu'il est très dangereux de remettre en cause ce principe qui est posé par la loi et selon lequel aucune mesure de sauvegarde de justice ne peut être prise sans que le juge se soit prononcé au vu d'un certificat médical.
L'amendement n° 220 rectifié bis de M. Détraigne a pour objet de réintroduire la saisine d'office du juge sans présentation d'un certificat médical, saisine supprimée par le texte. Cet amendement irait donc à l'encontre du principe établi et de l'objet même de ce texte de loi.
Par conséquent, la commission demande le retrait de ces deux amendements. Dans le cas contraire, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. J'avoue que je suis surpris par ces amendements, dont je ne vois pas l'utilité.
Placer une personne sous tutelle est un acte extrêmement grave, puisqu'on la prive de l'exercice de droits fondamentaux. Si l'on admet une exception au principe de nécessité du certificat médical en cas d'urgence, comment le juge se fera-t-il un avis ? Devra-t-il procéder lui-même à une espèce de consultation psychologique pour savoir si la personne est bien atteinte, par exemple, de la maladie d'Alzheimer ? Ce n'est pas le rôle du juge !
Je ne conçois pas que l'on puisse déroger au principe de nécessité du certificat médical, même dans les cas que vous évoquez. Dans ce domaine, il ne peut y avoir d'urgence, ce n'est pas possible !
Et si la personne refuse de se faire examiner, c'est le médecin qui établit un certificat de carence prouvant qu'il est dans l'incapacité d'examiner la personne et le certificat médical enregistre le fait que la personne refuse d'être examinée.
Dans les deux cas, il ne faut pas faire d'exception. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 191 et 220 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 111 rectifié, présenté par Mme B. Dupont, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 436 du code civil, remplacer les mots :
soit révoqué
par les mots :
ne soit révoqué ou suspendu
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement de coordination entre l'article 436 et l'article 483 du code civil.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 274, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
À la fin de la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 436 du code civil, remplacer les mots :
tant de leur urgence que de l'ouverture de la mesure de sauvegarde
par les mots :
de leur urgence ou du péril susceptible de résulter de leur inaction
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. L'article 436 du code civil, dans la rédaction du projet de loi, organise l'administration des biens du majeur sous sauvegarde de justice.
Il prévoit qu'à défaut de disposition conventionnelle prise par le majeur les règles de la gestion d'affaires s'appliquent. Ceux qui ont qualité pour demander l'ouverture d'une tutelle ou d'une curatelle et, le cas échéant, la personne ou l'établissement hébergeant le majeur continuent d'être tenus de faire les actes conservatoires nécessaires à la gestion du patrimoine du majeur, dès qu'ils ont connaissance de l'urgence de ces actes et de l'ouverture de la sauvegarde.
Il ne paraît pas nécessaire d'exiger qu'ils aient connaissance de l'ouverture de la mesure de sauvegarde pour prendre les mesures conservatoires indispensables à la préservation du patrimoine. Il est bon qu'ils puissent agir rapidement en toute hypothèse.
Cet amendement s'inscrit dans une démarche de protection générale en visant à imposer à toute personne demandant l'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle de prendre des actes conservatoires. Il convient, dans cet esprit, de ne pas limiter cette obligation aux seuls cas de sauvegarde de justice.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Lorsqu'une personne est sous sauvegarde de justice, l'article 436 fait obligation à tous les membres de la famille ou aux proches de prendre les mesures conservatoires nécessaires à la préservation de son patrimoine. Mais, pour être soumis à cette obligation, encore faut-il savoir que la personne est placée sous sauvegarde de justice. Or l'amendement déposé par notre collègue Charles Gautier ne reprend pas cette condition.
Imposer une telle obligation même si la famille ou les proches ignorent que la personne est sous sauvegarde de justice signifierait qu'ils sont tous tenus en permanence d'accomplir tous les actes conservatoires pour préserver le patrimoine des personnes de leur entourage !
Le législateur ne peut bien évidemment pas avoir non plus la prétention d'imposer une obligation de surveillance aux membres de la famille ou aux proches de la personne, car chacun est libre de disposer de ses biens !
La question déterminante est donc bien celle de la connaissance du placement sous sauvegarde de justice avant que l'on puisse faire peser une telle obligation sur la famille ou sur les proches.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. J'ai du mal à comprendre l'intérêt d'un tel amendement !
Comment voulez-vous prendre des mesures conservatoires alors que le juge ne s'est pas encore prononcé sur une mesure de protection ? Le feriez-vous pour n'importe quel membre de votre famille aux premiers signes de faiblesse ou de perte de mémoire ? Imaginez le climat qui régnerait dans la famille !
Je ne comprends pas que l'on envisage de prendre une telle disposition. En revanche, j'imagine très bien le danger de cet amendement. Comment peut-on envisager une mesure aussi attentatoire que l'anticipation d'une mise sous tutelle ? Sans compter qu'il faut être soi-même au moins médecin ou psychiatre !
Êtes-vous bien sûr de vouloir conserver cet amendement ? Je crois plutôt qu'il serait préférable de le retirer.
M. le président. Monsieur Charles Gautier, l'amendement est-il maintenu ?
M. Charles Gautier. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour l'article 438 du code civil, remplacer la référence :
458
par la référence :
457-1
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 439 du code civil, après les mots :
dans les conditions
insérer les mots :
fixées au quatrième alinéa
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 439 du code civil par les mots :
ou par radiation de la déclaration médicale sur décision du procureur de la République
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement a pour objet de prévoir, conformément au droit en vigueur, que le procureur de la République peut, si le besoin de protection temporaire cesse, faire cesser une mesure de sauvegarde ouverte par déclaration médicale faite devant lui.
En effet, l'Assemblée nationale a rétabli la possibilité, que le projet de loi tendait à supprimer, de mettre fin à une mesure de sauvegarde ouverte par déclaration médicale au moyen d'une nouvelle déclaration faite au procureur de la République.
Toutefois, elle ne lui a pas permis d'obtenir la radiation de la déclaration médicale. Il convient de réparer cette omission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 275, présenté par MM. Michel, Cazeau, C. Gautier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 442 du code civil, remplacer le mot :
indéterminée
par les mots :
plus longue qu'il détermine
La parole est à M. Charles Gautier.
M. Charles Gautier. L'article 442 du code civil dans la rédaction du projet de loi encadre les conditions de renouvellement de la tutelle et de la curatelle.
Contrairement au droit en vigueur, qui dispose que la tutelle et la curatelle sont prononcées pour une durée indéterminée, le projet de loi impose désormais une limitation de la durée de la mesure, fixée à cinq ans. Toutefois, il est précisé - c'est l'objet du nouvel article 442 du code civil - qu'en cas d'improbabilité d'amélioration de l'état de la personne à protéger, dûment constatée par le médecin chargé d'établir le certificat accompagnant la requête, le juge pourra, par décision spécialement motivée, prononcer une mesure à durée indéterminée.
Cette rédaction est trop catégorique. Aucune mesure de protection ne doit être instaurée à l'égard d'un majeur incapable, à moins que celle-ci ne soit nécessaire compte tenu des circonstances particulières et des besoins de l'intéressé. L'une des avancées de la réforme consiste justement à prévoir l'obligation d'un rapport médical préalable et le réexamen régulier de la mesure, afin que le juge puisse s'assurer qu'elle est bien toujours nécessaire et qu'elle ne prive pas inutilement de leur liberté d'agir les personnes concernées.
En prévoyant que, à titre dérogatoire, certaines mesures puissent être prononcées pour une durée indéterminée, cette possibilité contredit l'approche globale du projet de loi et le principe de la limitation de la durée de la mesure à cinq ans. On ne peut que se féliciter des améliorations qui ont été introduites par l'Assemblée nationale, car elles vont dans le bon sens.
En effet, l'Assemblée nationale a soumis l'ouverture d'une mesure à durée indéterminée à une révision préalable par le juge, afin d'imposer à ce dernier l'obligation de revoir au moins une fois la personne concernée avant de donner à la mesure un caractère indéterminé. Elle a également précisé qu'en cas de renouvellement d'une mesure sa durée ne pourrait excéder cinq ans.
Cependant, nous pensons que, si certaines pathologies laissent peu d'espoir de rémission, l'évolution de la science est susceptible d'offrir chaque jour de nouvelles perspectives qui ne doivent pas venir buter contre une décision judiciaire irrémédiable. Il faut donc veiller à ce que le dispositif bénéficie de suffisamment de souplesse, afin de permettre au juge de réexaminer le dossier de manière régulière.
Notre amendement vous invite à faire confiance au juge, à rester fidèle à l'esprit de la réforme et à respecter la personne à protéger.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je rappelle au Sénat que le texte initialement soumis par le Gouvernement à l'Assemblée nationale prévoyait que le juge pouvait dès la première visite, et dans certaines conditions, ouvrir la mesure de protection pour une durée indéterminée.
On ne peut pas ne pas penser au problème de la maladie d'Alzheimer, qui devient prégnant. Imaginez, à titre d'exemple, que la mesure de protection concerne une personne grabataire. Le juge ne renouvellera pas la mesure pour vingt ans ; il la reconduira pour cinq ans. Par conséquent, la personne, par hypothèse grabataire, sera contrainte de se présenter tous les cinq ans devant le juge, alors qu'elle est sans doute totalement inconsciente.
Honnêtement, ce n'est pas comprendre la situation dans laquelle se trouvent les personnes dont nous parlons.
Tout risque est écarté puisque, quoi qu'il arrive, la durée de la première mesure de protection sera de cinq ans. Fatalement, le juge, s'il est saisi à cette fin, la renouvellera pour une même durée, et non pour vingt ans.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout à fait !
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Encore une fois, cet amendement ne procède pas d'une bonne idée et le Gouvernement n'y est pas favorable.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 192, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 442 du code civil :
« Il statue d'office ou à la requête d'une des personnes mentionnées à l'article 430 ou de la personne en charge de la protection d'un majeur, au vu d'un certificat médical et dans les conditions prévues à l'article 432. Il ne peut toutefois renforcer le régime de protection de l'intéressé que s'il est saisi en outre d'une requête en ce sens conforme aux dispositions de l'article 431. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. La rédaction proposée pour l'article 442 du code civil n'est pas totalement satisfaisante.
En ne faisant référence qu'aux seuls requérants visés aux articles 430 et 431, l'article 442 ainsi rédigé priverait de fait le tuteur ou le curateur de la possibilité de demander la modification de la mesure. Or ces derniers sont a priori les mieux placés pour en apprécier la nécessité. Nous proposons par conséquent que les personnes qui sont chargées de la protection d'un majeur soient habilitées à saisir le juge afin de demander le renouvellement, la modification, voire la fin de la protection.
J'aimerais néanmoins que M. le rapporteur me confirme que la mesure de protection prend fin d'office au bout de cinq ans.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Oui, si elle n'est pas renouvelée !
Mme Josiane Mathon-Poinat. En outre, nous ne comprenons pas les raisons pour lesquelles la rédaction proposée pour l'article 442 tend à exclure la possibilité d'entendre le majeur protégé en cas de renforcement de la mesure de protection qui le vise.
Dans l'esprit du texte, nous considérons qu'il faut accorder à la personne protégée une plus grande place et lui permettre d'être entendue par le juge, surtout en cas de renouvellement ou de renforcement de la mesure qui la concerne.
M. le président. L'amendement n° 221 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme Férat et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly, est ainsi libellé :
À l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 442 du code civil, après les mots :
personnes mentionnées à l'article 430
insérer les mots :
ou de la personne en charge de la protection d'un majeur
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Cet amendement a le même objet que celui que vient de présenter notre collègue Josiane Mathon-Poinat.
Il nous paraît nécessaire que le tuteur ou le curateur d'une personne protégée puisse demander une modification de la mesure de protection, qu'il s'agisse d'une mainlevée, d'un allégement ou d'un renforcement, attendu que l'un et l'autre figurent parmi les personnes les mieux à même d'en apprécier l'opportunité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Je ne comprends pas pourquoi ces amendements ont été déposés. Ils sont satisfaits par les articles 430 et 442 du code civil, aux termes desquels la personne chargée d'une mesure de protection peut saisir à tout moment le juge des tutelles. Dès lors, ces deux amendements sont inutiles. C'est la raison pour laquelle je demande leur retrait. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Ces deux amendements étant satisfaits par le texte, le Gouvernement en demande lui aussi le retrait.
M. le président. Madame Josiane Mathon-Poinat, l'amendement n° 192 est-il maintenu ?
Mme Josiane Mathon-Poinat. Si M. le garde des sceaux me confirme bien que la personne chargée d'une mesure de protection peut saisir le juge des tutelles, j'accepterai de retirer mon amendement.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je vous le confirme, madame la sénatrice. Ce sont les termes de l'article 430 du code civil dans la rédaction proposée par l'article 5 du présent projet.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Dans ces conditions, je retire l'amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 192 est retiré.
Monsieur Détraigne, l'amendement n° 221 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 221 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 25, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Supprimer le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 442 du code civil.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il nous arrive aussi de supprimer des dispositions redondantes. C'est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 26, présenté par M. de Richemont, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 443 du code civil :
« Sans préjudice des articles 3 et 15, le juge peut également y mettre fin, lorsque la personne protégée réside hors du territoire national, si cet éloignement empêche le suivi et le contrôle de la mesure. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement est important.
Dans sa rédaction initiale, le projet de loi prévoyait la cessation automatique d'une mesure de protection lorsque le majeur établit sa résidence à l'étranger, tout en renvoyant à un décret en Conseil d'État le soin d'en fixer les conditions. Le Gouvernement faisait valoir qu'il n'était pas possible de confier aux tuteurs et aux juges la responsabilité de suivre une mesure qu'ils n'ont pas les pouvoirs de faire respecter.
Après un long débat, et à la suite du dépôt par sa commission des lois d'un amendement qui devait être rectifié en séance, l'Assemblée nationale a ménagé une exception à cette règle pour les majeurs hébergés et soignés dans des établissements situés en dehors du territoire national, à la condition que le juge en soit informé.
En effet, un grand nombre de nos compatriotes des départements frontaliers, faute de places en France, sont accueillis dans des établissements situés hors de nos frontières, spécialement en Belgique.
Cet amendement permet de fonder juridiquement la décision de mainlevée d'une mesure de protection lorsque la personne quitte le territoire national pour s'établir à l'étranger, et ce dans des conditions telles que ni le tuteur ni le juge ne peuvent garantir le respect des dispositions résultant de la mesure de protection. Cet amendement permettra en particulier de lever les mesures ouvertes pour des personnes qui, étant retournées dans leur pays d'origine, n'ont conservé sur le territoire national aucun lien personnel ni patrimonial.
Toutefois, la réserve des articles 3 et 15 du code civil garantit le droit de tout ressortissant français résidant à l'étranger de demander à bénéficier de la protection que la loi française garantit à tous les ressortissants de notre pays, même si, en l'espèce, ils sont établis en dehors du territoire national.
M. le président. L'amendement n° 193, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 443 du code civil, remplacer le mot :
et
par le mot :
ou
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement procède du même esprit que celui de la commission.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 193 ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement deviendra sans objet si l'amendement de la commission est adopté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je remercie M. de Richemont et Mme Dupont du travail qu'ils ont accompli en commun pour permettre au Parlement de surmonter une difficulté. Monsieur le rapporteur, madame le rapporteur pour avis, vous avez trouvé une solution fort élégante qui satisfait tout le monde.
À l'Assemblée nationale, cette partie du projet de loi est celle qui a donné lieu à la plus longue discussion. Vos collègues députés ont largement évoqué le problème du nord de la France. Dieu sait qu'en Belgique nous avons de nombreux ressortissants.
Si l'amendement de la commission est adopté, celui de Mme Mathon-Poinat, qui lui est quasi identique, deviendra sans objet.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. Effectivement, nous avions évoqué ce problème en commission des affaires sociales. Nous sommes pleinement satisfaits de l'amendement de la commission des lois, qui réaffirme le principe selon lequel tout Français à droit à la protection de la loi nationale, où qu'il réside.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. L'exemple des frontaliers de départements français qui, ne trouvant pas d'établissements en France, vont à l'étranger n'est pas unique. On peut aussi citer le cas de personnes qui, habitant à l'étranger non loin de la France, préfèrent y faire revenir des personnes âgées, généralement atteintes de la maladie d'Alzheimer. Elles seraient très démunies si ces dernières perdaient leurs droits.
Je me félicite donc de cette avancée.
J'apprécie beaucoup que M. le rapporteur fasse progresser la législation applicable aux Français établis hors de France. Cela m'évite de le faire. (Sourires.) C'est donc avec une conviction empreinte d'une grande joie que je voterai cet amendement.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 193 n'a plus d'objet.
L'amendement n° 254 rectifié, présenté par MM. Vasselle, P. Blanc et Texier et Mme Hermange, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 445 du code civil, après les mots :
médicales et
insérer le mot :
paramédicales,
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement vise à compléter la liste des personnes ne pouvant pas exercer de charge curatélaire ou tutélaire.
L'Assemblée nationale y a inclus les professions médicales et les pharmaciens, mais a omis les professions paramédicales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Je comprends très bien les préoccupations de M. Vasselle, mais je lui demande de retirer son amendement, qui est satisfait.
En effet, le texte du projet de loi interdit non seulement aux membres des professions médicales et de la pharmacie d'exercer une charge curatélaire ou tutélaire, mais encore, mon cher collègue, aux auxiliaires médicaux. Et les membres des professions paramédicales sont des auxiliaires médicaux.
M. le président. Monsieur Vasselle, l'amendement n° 254 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 254 rectifié est retiré.
Je suis saisi des trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 168 rectifié, présenté par MM. J. Blanc et Vasselle, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 445 du code civil remplacer les mots :
ainsi que les auxiliaires médicaux
par les mots :
les auxiliaires médicaux, ainsi que les professionnels des établissements visés aux 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles
La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Cet amendement, d'une portée beaucoup plus générale, vise, dans un souci de protection juridique, à ce qu'il soit interdit aux professionnels des établissements ou des services sociaux et médico-sociaux d'exercer une charge curatélaire ou tutélaire à l'égard de leurs usagers.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 194 est présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 222 rectifié bis est présenté par M. Détraigne, Mme Férat et les membres du groupe Union centriste - UDF et M. Georges Mouly.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 445 du code civil par un alinéa ainsi rédigé :
« Les professionnels des établissements visés aux 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ne peuvent exercer une charge curatélaire ou tutélaire à l'égard des usagers de ces établissements. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 194.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Le projet de loi prévoit que les professionnels et auxiliaires médicaux ne pourront exercer une charge tutélaire ou curatélaire à l'égard de leurs patients. Cette prohibition doit être étendue aux professionnels des établissements sociaux et médico-sociaux à l'égard de leurs usagers.
Le rapporteur du Conseil économique et social, Mme Rose Boutaric, considère qu'il doit y avoir une nette distinction entre la fonction de préposé des établissements hébergeant des majeurs et celle de curateur ou de tuteur. Notre amendement vise donc à compléter l'article 445 du code civil en ce sens.
La commission, je le sais, a beaucoup travaillé sur ce sujet. Nous attendons donc les suggestions de M. le rapporteur concernant les préposés, pour peut-être arriver à une meilleure solution.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 222 rectifié bis.
M. Yves Détraigne. Le projet de loi prévoit que les professionnels et auxiliaires médicaux ne peuvent pas exercer une charge de curateur ou de tuteur à l'égard de leurs patients.
Dans cette logique, cet amendement tend à étendre cette interdiction aux professionnels des établissements sociaux et médico-sociaux vis-à-vis de leurs usagers. Cette mesure permettra, accessoirement, d'éviter des conflits d'intérêts.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Ces amendements ne visent que les établissements sociaux ou médico-sociaux. Or, compte tenu des inquiétudes sous-jacentes, ces mesures pourraient également concerner les établissements de santé en soin de long séjour ou en psychiatrie, par exemple.
En outre, j'attire votre attention sur le fait que la désignation des préposés d'établissements sociaux et médico-sociaux est non pas obligatoire mais facultative, le juge disposant de toute latitude pour apprécier si cette décision est opportune ou non. J'ai d'ailleurs déposé un amendement en ce sens.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Tout à fait !
M. Henri de Richemont, rapporteur. Enfin, les pouvoirs des préposés sont encadrés par de nombreuses dispositions, et notamment par le contrôle du juge sur les actes médicaux.
Si une telle disposition était adoptée, la protection des majeurs concernés serait impossible, puisqu'ils sont aujourd'hui 30 000 dans cette situation. Je doute que les gérants d'hôtels privés et les associations tutélaires, qui sont déjà débordés, puissent prendre en charge correctement ces nouvelles mesures.
Au surplus, si ces amendements identiques étaient retenus, cela induirait une charge financière de 63 millions d'euros.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oh !
M. Henri de Richemont, rapporteur. Plusieurs amendements de la commission des lois visent à renforcer l'indépendance desdits préposés.
Il est précisé dorénavant que le préposé assurant une fonction de gérance de tutelle n'aura à en rendre compte qu'au juge et non pas à son supérieur hiérarchique et qu'il agit en toute indépendance par rapport à cet établissement.
De surcroît, l'obligation de déclaration des préposés qui exerceront cette mission et devront figurer sur la liste des personnes compétentes établie par le préfet a été étendue.
Des sanctions administratives ou pénales sont également prévues en cas de manquement à ce devoir d'indépendance.
En résumé, l'indépendance des préposés d'établissements médico-sociaux est consacrée. Et si la possibilité de confier la tutelle à ces préposés ne peut être supprimée, il appartient au juge, en fonction des circonstances et des situations, de décider s'il s'agit ou non de la mesure la plus appropriée pour le majeur.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Bernadette Dupont, rapporteur pour avis. La commission des affaires sociales proposera ultérieurement un amendement n° 115 dont l'objet est presque identique, puisqu'il s'agit d'interdire la dévolution des mesures de protection juridique à un préposé d'établissement social ou médico-social. Nous en avions fait une affaire de principe.
Nous partageons donc entièrement la philosophie de ces amendements. Nous avons en effet considéré qu'il existe un conflit d'intérêts objectif qui s'oppose à la désignation d'un préposé d'établissement médico-social comme tuteur d'une personne hébergée dans cet établissement. Il est en effet impossible de garantir l'impartialité du préposé pour tout ce qui touche aux relations de la personne protégée avec l'établissement.
Ce conflit d'intérêts n'a d'ailleurs pas échappé au Gouvernement, qui a dû prévoir des règles extrêmement dérogatoires en matière de respect des droits des usagers dans ces situations particulières. Ainsi, la personne devra négocier et signer seule son contrat de séjour avec le directeur de l'établissement, là où toute autre personne pourrait être assistée par son représentant légal. Il existe donc un vrai paradoxe, puisque la personne sous tutelle qui se trouve dans cette situation - c'est notamment le cas si le directeur de l'établissement est le tuteur - sera dans une situation différente de celle qui est assistée par un représentant extérieur.
D'une façon plus générale, il importe de préserver un regard extérieur sur la prise en charge accordée par l'établissement à la personne protégée. C'était d'ailleurs l'une des conclusions fortes de la commission d'enquête sur la maltraitance des personnes handicapées accueillies en établissement. Cette commission soulignait en effet le rôle primordial des tuteurs en matière de vigilance contre la maltraitance institutionnelle - nous sommes obligés de reconnaître qu'elle existe, même si elle n'est pas volontaire -, mais elle soulignait en même temps que ces tuteurs ne pouvaient convenablement remplir ce rôle qu'en étant indépendants de l'établissement.
La suppression de la possibilité de désigner comme tuteur un préposé d'établissement médico-social s'inscrit également dans le combat que la commission des affaires sociales mène depuis plusieurs années pour une véritable séparation des rôles de gestionnaire d'établissement et de représentation des personnes handicapées. Sa position n'est donc pas dictée par une volonté de défendre telle ou telle catégorie de tuteur mais elle est nourrie par une réflexion approfondie et de longue haleine sur la façon la plus respectueuse d'assurer la protection des majeurs vulnérables en établissement.
Au-delà de ces questions de principe, la désignation d'un préposé d'établissement soulève des difficultés pratiques importantes : une personne handicapée, je vous le disais tout à l'heure, peut en effet être amenée à changer d'établissement au cours de sa vie. Faudra-t-il donc qu'à chaque fois elle change également de tuteur ? De même, le tuteur peut passer d'un établissement à l'autre, et la personne protégée risque d'en subir les conséquences.
Par ailleurs, les préposés d'établissement sont soumis à des contrôles nettement allégés par rapport aux autres catégories de mandataires judiciaires : ainsi, ils seront inscrits sur la liste départementale sur la base d'une simple déclaration, là où les autres tuteurs devront préalablement être autorisés ou agréés.
La commission des affaires sociales est toutefois consciente que 28 000 mesures sont aujourd'hui confiées à des préposés d'établissements médico-sociaux. Il ne saurait naturellement être question de mettre un terme du jour au lendemain à leurs missions. Les personnes qu'elles protègent en seraient les premières victimes.
Toutefois, ces contraintes matérielles et d'organisation ne doivent pas nous conduire à transiger avec un principe fondamental, celui de la nécessaire indépendance des tuteurs. C'est la raison pour laquelle nous proposons de prévoir un délai de cinq ans pour que le juge réaffecte les mesures aujourd'hui confiées à un préposé d'établissement à d'autres catégories de mandataires.
La commission des affaires sociales reconnaît également que, dans certains départements, la suppression des préposés d'établissement pourrait conduire à des situations de monopole au profit de certaines associations tutélaires. Cependant, le projet de loi prévoit d'ores et déjà les outils nécessaires pour remédier à ces situations : les mandataires judiciaires feront désormais l'objet d'un volet spécifique du schéma régional de l'organisation sociale et médico-sociale, qui vise à planifier la création des nouveaux services. Dans le délai de cinq ans prévu par notre commission, ces schémas permettront d'organiser le recrutement des mandataires nécessaires.
Pour toutes ces raisons, la commission des affaires sociales est favorable à tous les amendements traitant du sujet, qui nous tient particulièrement à coeur.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Compte tenu des dépenses induites - M. le rapporteur a évoqué un coût de 63 millions d'euros -, les amendements nos 168 rectifié, 194 et 222 rectifié bis, mais aussi les amendements nos 197, 248, 115 et 231 rectifié bis tombent sous le coup de l'article 40. S'ils sont déclarés irrecevables, alors, les amendements de conséquence nos 141 et 201 rectifié, identiques, l'amendement n° 202, les amendements identiques nos 153 et 213, l'amendement n° 158, le sous-amendement n° 164 rectifié et l'amendement n° 165 rectifié deviendront sans objet.
M. Pascal Clément, garde des sceaux. Je partage l'avis de M. le président de la commission des lois !
M. le président. Monsieur Doligé, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. Éric Doligé, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements nos 168 rectifié, 194 et 222 rectifié bis ne sont pas recevables.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je voudrais simplement attirer l'attention du Sénat sur le fait qu'il a adopté, à l'article 5, l'amendement n° 227 rectifié bis de M. Détraigne, tendant à ce que la prise en charge par la collectivité publique d'une mesure de protection concernant une personne qui ne peut intégralement en assumer la charge soit identique quelles que soient les sources de financement. J'invite la commission des finances à reconsidérer son avis, car je ne suis pas certain que l'article 40 s'applique, compte tenu donc des dispositions que nous avons adoptées précédemment. (M. le président de la commission des lois s'exclame.)
M. le président. Monsieur Vasselle, je vous donne acte de votre rappel au règlement.
Il semble que d'autres amendements deviennent également sans objet et que tous n'ont pas été cités par M. le président de la commission des lois. Tout cela méritera d'être précisé.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.