sommaire
présidence de M. Philippe Richert
2. Candidatures à un organisme extraparlementaire
3. Dépôt d'un rapport du Gouvernement
4. Modernisation du dialogue social. - Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
Discussion générale : M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes ; Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Alain Gournac, Philippe Nogrix, Bernard Seillier, Guy Fischer, Mme Raymonde Le Texier, M. Serge Dassault, Mme Gisèle Printz, M. Roger Madec.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre délégué.
5. Nomination de membres d'un organisme extraparlementaire
6. Modernisation du dialogue social. - Suite de la discussion et adoption définitive d'un projet de loi déclaré d'urgence
Articles additionnels avant l'article 1er
Amendements nos 6 de Mme Raymonde Le Texier, 16 rectifié, 15 de M. Roland Muzeau et 30 de M. Jean Desessard. - Mme Raymonde Le Texier, MM. Guy Fischer, Jean Desessard, Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales ; M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. - Rejet des quatre amendements.
Amendements nos 7 rectifié, 8 de Mme Raymonde Le Texier et 17 de M. Roland Muzeau. - Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet des trois amendements.
Article additionnel avant l'article 1er ou après l'article 1er
Amendements nos 9 de Mme Raymonde Le Texier, 18 et 23 de M. Roland Muzeau. - Mme Raymonde Le Texier, M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet des trois amendements.
Articles additionnels avant l'article 1er
Amendements nos 10 et 11 de Mme Raymonde Le Texier. - Mmes Gisèle Printz, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Article additionnel avant l'article 1er ou après l'article 1er
Amendements nos 12 de Mme Raymonde Le Texier et 22 de M. Roland Muzeau. - Mme Annie Jarraud-Vergnolle, M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet des deux amendements.
Articles additionnels avant l'article 1er
Amendement no 31 de M. Jean Desessard. - M. Jean Desessard, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 32 de M. Jean Desessard. - M. Jean Desessard, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 36 de M. Jean Desessard. - M. Jean Desessard, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Suspension et reprise de la séance
Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Amendement no 33 de M. Jean Desessard. - M. Jean Desessard, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 34 de M. Jean Desessard. - M. Jean Desessard, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 4 de M. Michel Mercier. - M. Claude Biwer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait.
Amendement no 19 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 20 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendements identiques nos 1 de M. Michel Mercier et 27 de M. Roland Muzeau ; amendement no 2 de M. Michel Mercier. - MM. Claude Biwer, Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait des amendements nos 1 et 2 ; rejet, par scrutin public, de l'amendement no 27.
Amendements nos 3 de M. Michel Mercier et 13 de Mme Raymonde Le Texier. - M. Claude Biwer, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait de l'amendement no 3 ; rejet de l'amendement no 13.
Amendement no 28 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 35 de M. Jean Desessard. - M. Jean Desessard, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 1er
Amendement no 5 de M. Michel Mercier. - M. Claude Biwer. - Retrait.
Amendement no 21 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 24 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 25 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 26 de M. Roland Muzeau. - M. Guy Fischer, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Rejet.
Amendement no 29 rectifié de M. Serge Dassault. - M. Serge Dassault, Mme le rapporteur, M. le ministre délégué. - Retrait.
Mme Raymonde Le Texier, MM. Guy Fischer, Bernard Seillier, Jean Desessard.
Adoption définitive du projet de loi.
8. Dépôt d'une question orale avec débat
10. Transmission d'un projet de loi constitutionnelle
11. Dépôt d'une proposition de loi organique
12. Dépôt d'une proposition de loi
13. Transmission d'une proposition de loi
14. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
16. Dépôt d'un avis
17. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
CANDIDATURES À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation des sénateurs appelés à siéger au sein du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose les candidatures de MM. Alain Vasselle et Bernard Cazeau pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.
Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition, à l'expiration du délai d'une heure.
3
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre, en application de l'article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2006-436 du 14 avril 2006, relative aux parcs nationaux, aux parcs naturels marins et aux parcs naturels régionaux.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera disponible au bureau de la distribution.
4
Modernisation du dialogue social
Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de modernisation du dialogue social, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence (nos 117 et 152.)
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre, que nous avons toujours beaucoup de plaisir à retrouver en cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Je vous remercie, monsieur le président, de vos mots de bienvenue.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la mondialisation et la construction du marché unique européen sont à l'origine d'une reconfiguration de l'économie française.
Notre pays a fait le pari - pouvait-il en être autrement ? - de l'ouverture au commerce international, et il s'est inséré dans les flux des échanges mondiaux.
La compétitivité de nos entreprises se mesure désormais à l'échelle planétaire. Pour continuer à faire face à la concurrence mondiale et conquérir de plus vastes marchés, elles doivent faire preuve de réactivité et d'audace. Cela n'exclut pas, toutefois, que les conditions du marché soient équilibrées, et que ni le dumping social ni le dumping financier ne viennent perturber les règles de loyauté.
Le besoin de souplesse des entreprises doit se concilier avec la préservation et le renforcement de la cohésion sociale. La modernisation de notre modèle social impose une démarche collective, avec un principe qui se nomme concertation. Les réformes nécessaires ne peuvent s'accomplir que dans un climat de confiance, dans lequel chacun prend et prendra ses responsabilités.
Tel est le défi auquel nous devons répondre.
C'est pour ces raisons que la modernisation du dialogue social est, aux yeux du Gouvernement, un enjeu essentiel. C'est pour ces raisons que le projet de loi dont nous commençons aujourd'hui la discussion au sein de votre assemblée vise à introduire dans le code du travail un chapitre préliminaire qui associe les partenaires sociaux à l'élaboration des normes et des réformes sociales. Il reprend ainsi les principes exposés par le Président de la République devant le Conseil économique et social, le 10 octobre dernier.
C'est une rénovation profonde de notre démocratie sociale que nous engageons avec ce texte. En fixant une nouvelle méthode de travail, en appelant à un pacte de confiance, en faisant du dialogue social la pierre angulaire de notre modèle social, nous nous donnons les moyens de relever le pari de la modernisation de notre pays, en préservant la valeur et la richesse de sa cohésion sociale.
Ce projet s'inscrit dans la continuité des actions menées par le Gouvernement depuis 2002
Si ce projet « marque une avancée historique », pour reprendre les termes d'une organisation syndicale auditionnée par la commission des affaires sociales du Sénat, il s'inscrit dans la continuité des actions législatives menées par le Gouvernement, qui ont visé à développer le dialogue social et la négociation collective.
Cette évolution s'est concrétisée, en premier lieu, par une extension du champ de la négociation collective en ce qui concerne la plupart des textes intéressant le champ des relations du travail. Citons, par exemple, les récentes lois sur le temps de travail, ou les dispositions de la loi de programmation pour la cohésion sociale de janvier 2005 relatives aux mutations économiques et à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Les textes qui ont été adoptés ces dernières années dans le champ du droit du travail organisent, selon des modalités diverses, un renvoi à la négociation collective, le plus souvent au niveau de l'entreprise, tout en préservant les exigences de l'ordre public social.
À ceux qui viendraient à en douter, les résultats de 2005 et, bientôt, de 2006 démontreront que l'activité conventionnelle a été soutenue : rappelons-le, en 2005, 44 accords interprofessionnels sont intervenus, 1 144 accords de branches ont été passés, et 20 000 accords d'entreprise au moins ont été signés, selon le bilan de la négociation collective.
La loi du 4 mai 2004 a représenté la deuxième étape de cette évolution. Il s'agit là d'un texte essentiel quant au droit de la négociation collective.
Dans la ligne de la « position commune », signée par la plupart des partenaires sociaux en 2001, ce texte a introduit un principe majoritaire dans la signature des accords et donne davantage de place et d'autonomie aux accords d'entreprise, les plus proches des réalités et des contraintes concrètes de l'entreprise et de ses salariés.
Pour franchir une troisième étape, il nous était impératif d'associer étroitement les partenaires sociaux. Nous avons donc choisi d'élaborer ce projet de loi en concertation avec eux. Nous avons fait le choix d'avancer ensemble, progressivement, en nous appliquant la méthode que nous souhaitions organiser par ce projet de loi.
Inspiré des préconisations du rapport de Dominique-Jean Chertier, annoncé le 12 décembre 2005 devant la Commission nationale de la négociation collective, la CNNC, et remis au Premier ministre en avril 2006, ce projet a fait l'objet d'une large concertation avec les partenaires sociaux.
Les rencontres bilatérales se sont d'abord déroulées sur la base de fiches présentant plusieurs scénarios d'évolution, ce qui était nouveau, puis sur la base d'un avant-projet, susceptible d'évolutions.
À la fin du mois de septembre, accompagné d'une délégation des partenaires sociaux, je me suis rendu aux Pays-Bas et en Espagne, deux pays qui ont su moderniser leurs relations sociales, de manière différente. L'expérience de ces deux pays nous a permis de comprendre qu'un dialogue social nourri et plus apaisé reposait d'abord sur une relation de confiance entre les partenaires sociaux et l'État, permettant la recherche de convergences et, parfois, d'un consensus.
La concertation s'est achevée le 6 novembre 2006, devant la Commission nationale de la négociation collective. Cette réunion a permis de procéder aux derniers ajustements, aux amendements, pourrait-on dire, que souhaitaient certaines organisations syndicales et professionnelles.
Pour illustrer le souci de convergence, l'option initialement envisagée, qui consistait à modifier au travers de ce texte l'architecture de nos instances de consultation, comme le préconisait le rapport de M. Dominique-Jean Chertier, n'a pas finalement été retenue. Non que la question ne se pose pas, mais les remarques des partenaires sociaux ont montré que c'était un exercice différent. La priorité était bien, ici, de poser les principes de nouveaux rapports entre les partenaires sociaux et l'État. Cette rationalisation des instances n'en reste pas moins nécessaire, me semble-t-il, et elle devra se réaliser en concertation avec les partenaires sociaux.
Sans pouvoir prétendre à un caractère totalement consensuel, ce projet de loi constitue un point de convergence fort avec les organisations représentatives. Même si certaines organisations auraient souhaité que le projet traite aussi de la représentativité syndicale, toutes ont reconnu qu'un pas important avait été franchi au profit de la rénovation des relations sociales.
Quels sont les objectifs et le contenu du projet de loi ?
Comme je l'ai indiqué, ce texte vise à modifier la pratique qui s'est instaurée dans les rapports entre les gouvernements et les partenaires sociaux.
Alors que les pouvoirs publics ont très souvent le sentiment que les textes sociaux sont élaborés en concertation avec eux, qu'ils sont consultés sur ces textes, les partenaires sociaux ont le sentiment inverse : ils se sentent écartés de l'élaboration des textes essentiels qui régissent notamment les relations du travail. Cette situation n'est pas nouvelle.
Il fallait donc inventer de nouvelles règles du jeu, en partie inspirées de celles qui s'appliquent au niveau de l'Union européenne, de façon à donner un cadre clair et organisé au dialogue social.
Ces nouvelles règles résident en trois principes : la concertation, la consultation, l'information.
Premier principe : la concertation. Lorsque le Gouvernement envisage une réforme concernant les règles générales du droit du travail, à savoir les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle, il doit, dans un premier temps, se concerter avec les organisations syndicales et professionnelles représentatives au niveau national et interprofessionnel.
Cette concertation se fait sur la base d'un document d'orientation, adressé aux organisations syndicales et professionnelles représentatives au niveau national et interprofessionnel, à charge pour ces dernières de dire si elles envisagent ou non de négocier un accord, dans un délai qu'elles indiquent.
Deuxième principe : la consultation. Les textes législatifs et réglementaires élaborés par le Gouvernement au vu des résultats de la concertation et de la négociation devront être présentés devant les instances habituelles du dialogue social que sont la Commission nationale de la négociation collective, pour tout ce qui concerne les relations du travail, le Comité supérieur de l'emploi, en matière d'emploi, et le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, pour ce qui touche la formation professionnelle.
À cette occasion, je précise que nous comblons un vide de notre droit du travail, qui ne prévoyait aucune consultation préalable obligatoire en cas de réforme portant, notamment, sur le contrat de travail. La compétence de la Commission nationale de la négociation collective n'est donc plus cantonnée aux règles de la négociation, mais elle est étendue aux relations individuelles du travail. Par ailleurs, la compétence consultative du Conseil supérieur de l'emploi, qui était jusqu'alors facultative, devient obligatoire.
Troisième principe : l'information. Est prévu un rendez-vous annuel entre le Gouvernement, au niveau du Premier ministre - le texte est très clair sur ce point -, et les partenaires sociaux devant la Commission nationale de la négociation collective, au cours duquel les pouvoirs publics et les organisations représentatives feront part de leur calendrier de réformes et de négociations. C'est l'expérience très positive de la Fondation du travail aux Pays-Bas qui a inspiré l'instauration de cette rencontre annuelle.
L'Assemblée nationale a souhaité garantir la publicité des échanges qui auront lieu à cette occasion et a prévu que soit publié le compte rendu des débats. Il s'agit d'un complément qui me paraît utile.
Nous avons eu des échanges approfondis avec Mme le rapporteur, qui a réalisé un travail dont je souhaite saluer la qualité : elle a, notamment, soulevé des questionnements qui n'avaient pas été abordés par l'Assemblée nationale, même si certains l'avaient été devant le Conseil d'État.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Quel talent !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Les échanges avec votre commission des affaires sociales, le 9 janvier, n'ont pas été moins intéressants. C'est pourquoi je voudrais plus particulièrement insister devant votre assemblée sur les équilibres auxquels répond le projet de loi qui vous est soumis, et tout d'abord sur les équilibres sociaux.
Sur ce point, comme m'y ont invité Mme le rapporteur et la commission, j'apporterai pour commencer plusieurs précisions qui me paraissent s'imposer pour répondre à certaines interrogations.
Ainsi que je l'ai fait devant la commission des affaires sociales pour éclairer un amendement déposé par M. Alain Gournac, je souhaite rappeler quelles sont les organisations concernées par le projet de loi. Celui-ci concerne les organisations représentatives au niveau national et interprofessionnel, à savoir, aujourd'hui, les cinq confédérations syndicales : CGT, CFDT, FO, CFTC, CGC, et les trois organisations interprofessionnelles représentant les employeurs qui sont en mesure de négocier un accord interprofessionnel : MEDEF, CGPME, UPA. Naturellement, cette liste peut changer en fonction de l'évolution des règles de la représentativité ; j'y reviendrai dans un instant.
J'insiste sur le fait que l'équilibre du dispositif repose sur le caractère interprofessionnel - et ce mot a un sens particulier - de la concertation. En effet, la nouvelle procédure est réservée aux projets de réforme présentant un caractère général et ayant à ce titre vocation à s'appliquer à l'ensemble des entreprises du secteur privé. Seules les organisations reconnues comme étant représentatives au niveau interprofessionnel sont donc concernées.
Lors des débats de l'Assemblée nationale, des inquiétudes légitimes sont apparues quant à la place de certains secteurs essentiels d'activité : je pense notamment à l'agriculture, avec la FNSEA, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, mais le raisonnement doit être étendu aux professions libérales, avec l'UNAPL, l'Union nationale des associations de professions libérales. (M. Alain Gournac approuve.)
J'ai eu l'occasion d'échanger sur ce point avec les organisations concernées, et je l'ai dit devant votre commission, mais, à la tribune du Sénat, cela prend un sens particulier : il va de soi, et je m'y engage solennellement, que des projets de réforme relatifs au droit du travail qui concerneraient spécifiquement ces secteurs d'activité impliqueraient des procédures de concertation, sur l'initiative des pouvoirs publics, avec les organisations représentatives de ces secteurs, donc, par exemple, avec la FNSEA et l'UNAPL. C'est là une évidence, mais il est essentiel de le répéter pour éviter tout malentendu.
À titre d'exemple, et nous l'avions évoqué devant la commission, il n'est pas imaginable que des dispositions spécifiques concernant les salaires ou les contrats de travail dans l'agriculture puissent être prises sans concertation avec l'organisation professionnelle représentative du secteur.
Cependant, le projet de loi qui vous est soumis, je le répète, ne vise pas ce cas de figure. Il porte sur les réformes à caractère général et sur le seul niveau interprofessionnel. Il reste donc volontairement neutre quant à la question du dialogue social et de la négociation collective au sein des secteurs d'activité, et ne modifie en rien l'équilibre existant, dans lequel la FNSEA et l'UNAPL occupent une place particulière qui doit être préservée.
Le souci du Gouvernement a par ailleurs été d'organiser une concertation effective. Cela s'est traduit par la volonté d'engager le dialogue sur la base d'un document d'orientation qui pose un diagnostic et des objectifs, mais qui ne préjuge en rien le contenu de la négociation. Il est en effet essentiel que le Gouvernement ne présente pas aux partenaires sociaux un projet de loi précis qui préjugerait des résultats de la négociation éventuelle.
Dans le même esprit, et pour répondre à une interrogation de Mme le rapporteur, les délais de négociation ne sont pas prédéfinis par la loi : ils dépendront de l'objet de la négociation et seront proposés par les partenaires sociaux eux-mêmes.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et arrêtés par le ministre !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Naturellement !
À l'issue des concertations avec les partenaires sociaux, il est apparu nécessaire, à l'image des exemples espagnol et néerlandais, de conserver de la souplesse et de ne pas prévoir de délais trop rigides. La réponse des organisations devra donc intervenir dans un délai « raisonnable », permettant à la négociation de se dérouler dans des conditions satisfaisantes pour l'ensemble des parties et d'éviter des manoeuvres dilatoires, notamment.
Enfin, je dirai un mot des règles d'engagement de la négociation.
Afin qu'une telle négociation s'engage dans de bonnes conditions et aboutisse, il conviendra que le plus grand nombre d'organisations syndicales de salariés et d'organisations représentant les employeurs s'impliquent dans ce processus. Au minimum, il faudra qu'un nombre suffisant d'organisations pour pouvoir conclure éventuellement un accord donnent une réponse positive.
C'est aujourd'hui la règle de la validité des accords. Si demain elle vient à changer - c'est d'ailleurs l'un des points qu'aborde le Conseil économique et social dans son avis -, nous appliquerons naturellement, par automatisme, la nouvelle règle de validité des accords.
Au demeurant, je rappelle qu'un bilan de la loi du 4 mai 2004 devra être établi à la fin de cette année - naturellement, le Parlement y sera associé - pour nous permettre de décider si nous allons plus loin en direction de l'accord majoritaire. Sur ce point, l'avis du Conseil économique et social est assez balancé, puisqu'il passe par la phase intermédiaire de la majorité relative avant d'envisager le passage à la majorité d'engagement, sachant que le dialogue social, c'est aussi un apprentissage.
J'en viens aux équilibres institutionnels.
Il était nécessaire de sortir du domaine de la seule déclaration sans portée normative telle qu'elle était contenue dans l'exposé des motifs de la loi du 4 mai 2004.
En même temps, si l'on ne voulait pas bouleverser les équilibres constitutionnels, il fallait s'en tenir au champ des procédures instituées très en amont des projets de loi, sans affecter les attributions constitutionnelles du Gouvernement ni du Parlement en matière d'initiative des lois et de procédure législative. De fait, la procédure prévue par le projet de loi s'arrête là où commence l'article 39 de la Constitution sur le dépôt des projets et propositions de lois.
S'agissant du Parlement, et je sais combien le Sénat y est attaché, la procédure législative n'est pas englobée et le texte ne vise pas le dépôt des projets et propositions de loi ni les actes qui leur sont postérieurs. En effet, la réforme proposée concerne les seuls rapports entre le Gouvernement et les partenaires sociaux et ne peut s'étendre à la procédure législative ni au droit d'amendement. Cela aurait nécessité une modification de la Constitution que je n'ai pas vue inscrite au programme du rendez-vous de février à Versailles.
Pour autant, l'esprit de la réforme modifiera sans aucun doute les pratiques et devrait empêcher toute dérive permettant des contournements de la procédure de concertation. C'est en tout cas l'exemple que nous montrent un certain nombre de pays où ni les règles constitutionnelles ni les règles parlementaires n'ont été bouleversées, et où un nouvel état d'esprit s'est progressivement institué. Les Pays-Bas sont de ce point de vue particulièrement intéressants : ayant connu d'importantes tensions sociales avant 1982, ils ont vu la signature d'un accord, l'accord de Wassenaar - le texte n'est guère plus long que le présent projet de loi -, dont on constate vingt-cinq ans après qu'il a donné naissance à des pratiques de dialogue social qui, encore au printemps dernier, ont permis à ce pays de traverser une crise sociale dans la concertation et la recherche de convergences. Voilà pourquoi la pratique de certains de nos voisins européens est très éclairante : même sans modification législative ou constitutionnelle, la procédure de consultation des partenaires sociaux est désormais, de fait, respectée.
Je voudrais aussi apporter une précision sur un point important qui n'avait pas été abordé à l'Assemblée nationale mais qu'a soulevé à juste titre votre rapporteur : la transposition des directives européennes par le législateur. Soit la directive laisse au Gouvernement, puis au Parlement un large pouvoir d'appréciation dans la définition du contenu de la transposition : le texte assurant la transposition sera alors constitutif d'une « réforme » au sens du projet de loi, et la procédure de concertation préalable sera applicable. Soit la directive enserre les autorités nationales dans un cadre très précisément défini qui, en droit et en fait, prive d'objet et d'utilité la procédure de concertation : ce sera donc non plus une « réforme » au sens du projet de loi, mais une simple transposition de directive adaptant le droit national au droit communautaire, et la procédure de concertation préalable ne sera pas applicable. Cette question a été étudiée par le Gouvernement, dont les réflexions ont été éclairées par le Conseil d'État dans la phase d'élaboration du projet de loi. Il me semblait important de répondre au questionnement de fond de Mme le rapporteur sur ce sujet.
S'agissant du Gouvernement, le projet de loi prévoit une réserve en cas d'urgence. Je sais que ce point a suscité des interrogations, mais les améliorations apportées par l'Assemblée nationale devraient permettre de les dissiper.
Si personne ne contestait le principe du recours à l'urgence prévu dans la plupart des procédures administratives, budgétaires, juridictionnelles, la crainte existait que ce recours ne puisse être abusif, permettant, là encore, de contourner la procédure. Pour cette raison, l'Assemblée nationale a souhaité préciser que, avant de prendre toute mesure nécessitée par l'urgence, le Gouvernement devra faire connaître sa décision aux partenaires sociaux et la motiver dans un document qu'il transmettra à ces derniers. Une chose est sûre : l'urgence décidée par le Gouvernement, motivée et expliquée aux partenaires sociaux, devra être réservée à des situations exceptionnelles tenant, notamment, à des motifs d'ordre public ou de santé publique. C'est là, je crois, un point de juste équilibre.
Toujours sur l'urgence, j'ajouterai que, si nous ne pouvons pas, en droit, faire de lien automatique entre l'urgence pour la procédure avec les partenaires sociaux et l'urgence dans la procédure législative, en fait, elles devraient, à terme, être le plus souvent convergentes.
Enfin, se pose la question du sort réservé à l'accord, fruit de la négociation interprofessionnelle. Si, à l'issue de la phase de concertation, un accord interprofessionnel est conclu, et si son application implique des dispositions législatives ou réglementaires - ce qui ne sera pas nécessairement toujours le cas -, il constituera la colonne vertébrale du futur projet de loi - sur lequel vous garderez une entière liberté d'appréciation et d'amendement - ou du futur décret.
Parlons des équilibres dans le temps.
Je voudrais enfin rappeler que le dialogue social est par nature dynamique et vivant, et que ce projet de loi n'a pas la prétention d'être un texte exhaustif.
D'autres questions devront être traitées dans un avenir proche. Je pense aux sujets soulevés par le rapport du président Hadas-Lebel, à propos desquels le Conseil économique et social a rendu son avis le 29 novembre dernier.
Cet avis du Conseil économique et social donne des orientations sur les évolutions qui devront intervenir sur les règles existantes en matière de représentativité des organisations syndicales, de validité des accords collectifs, de négociation collective dans les PME et de financement des organisations syndicales. Il constitue une étape importante afin de poursuivre la recherche de compromis sur le choix des solutions à mettre en oeuvre.
Si le Gouvernement est conscient que ces questions devront faire l'objet de réformes, il n'est pas paru opportun de les traiter dans le texte qui organise les rapports entre les partenaires sociaux et les pouvoirs publics.
Du point de vue de la méthode, il aurait été en effet paradoxal de faire figurer dans un texte organisant un nouveau mode de dialogue social entre partenaires sociaux et pouvoirs publics des dispositions qui sont essentielles pour les partenaires sociaux et qui n'auraient pas été examinées et discutées de manière suffisamment approfondie avec eux et avec la commission !
Sur le fond, les propositions du Conseil économique et social ne sont pas simplement techniques. Elles impliquent une transformation profonde du paysage syndical. Pour autant, elles se limitent à fixer des orientations qui sont à l'heure actuelle trop générales pour faire, en l'état, l'objet d'une transposition législative.
Nous devons donc procéder par étapes.
C'est la raison pour laquelle, à la demande du Premier ministre, Jean-Louis Borloo et moi-même allons rencontrer dès la fin du mois de janvier, après l'examen de ce texte, l'ensemble des organisations syndicales et professionnelles, pour aborder les questions qui restent ouvertes. Le critère de l'élection doit-il être exclusif ou être couplé avec d'autres critères ? Sur quelles élections fonder la représentativité ? Quel seuil faut-il retenir ? Quelle organisation et quel financement ? (Mme Gisèle Printz s'exclame.) Ce sont des interrogations majeures, qui doivent être approfondies et sur lesquelles nous devons encore rapprocher les points de vue.
En conclusion, je voudrais insister sur le fait que le projet de loi que nous vous proposons aujourd'hui pose un socle indispensable à la modernisation du dialogue social dans notre pays. Il a été conçu pour être « adaptable » aux réformes futures. Il constitue un levier pour de nouvelles réformes,...
Mme Gisèle Printz. Tu parles !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...que nous aborderons sans doute avec plus de sérénité.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de m'excuser d'avoir été un peu long, mais je tenais aussi à vous faire part des échanges fructueux que nous avons eus avec la commission des affaires sociales du Sénat et Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de modernisation du dialogue social que nous examinons cet après-midi marque, en dépit de sa brièveté - deux articles seulement -, une étape importante dans l'histoire des relations sociales dans notre pays, puisque dorénavant, après le vote de ce texte, elles devraient être profondément modifiées, en tout cas, nous le souhaitons.
Ce texte a parfois été présenté, et le sera sans doute encore cet après-midi, comme une réponse à la crise ouverte par le contrat première embauche, le CPE. Pour ma part, je considère qu'il s'agit d'une lecture erronée et réductrice car la réalité est bien différente.
Comme M. le ministre l'a rappelé, ce texte s'inscrit dans la continuité d'une action qui a déjà été entamée depuis décembre 2005 avec le rapport demandé à M. Dominique-Jean Chertier, ancien conseiller social de M. Jean-Pierre Raffarin. Ce rapport a servi à des entretiens bilatéraux avec les organisations syndicales et professionnelles qui ont abouti à l'élaboration d'un avant-projet de loi, soumis à la Commission nationale de la négociation collective en novembre 2006. Le texte qui est présenté aujourd'hui au Sénat a été enrichi par un certain nombre d'amendements adoptés par l'Assemblée nationale.
Il devrait permettre une réelle amélioration du dialogue entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. Cette réforme a un objectif très clair : sortir de la logique du conflit « à la française » et faire évoluer les pratiques.
Aujourd'hui peu organisée, la concertation préalable à l'adoption des réformes est de qualité et de portée très variables selon les dossiers. Cela a été rappelé par les partenaires sociaux que nous avons auditionnés en commission.
Il arrive que ces derniers soient étroitement associés à la conception des réformes : dans ce cas, le législateur renvoie même parfois à la négociation collective le soin de définir les contours d'une réforme avant de reprendre les termes de l'accord ainsi conclu dans la loi. C'est, par exemple, la procédure qui a été suivie pour la convention de reclassement personnalisé de 2005 ou le plan pour l'emploi des seniors de 2006. Mais, malheureusement, il arrive aussi que les pouvoirs publics, dans un souci de rapidité, choisissent d'agir seuls et négligent quasi complètement la phase de concertation. Chacun a en mémoire un ou plusieurs exemples...
Ce projet de loi vise donc à généraliser de meilleures pratiques : il prévoit de formaliser davantage et de systématiser la concertation avec les partenaires sociaux.
Il repose sur un triptyque que l'on peut résumer ainsi : concertation, consultation et information.
Concertation, tout d'abord : le texte prévoit que toute réforme touchant aux relations du travail, à l'emploi ou à la formation professionnelle fera obligatoirement l'objet d'une concertation avec les organisations syndicales et patronales, en vue de l'ouverture d'une négociation nationale interprofessionnelle.
Les partenaires sociaux, s'ils le souhaitent, pourront informer le Gouvernement de leur intention d'engager une négociation, en indiquant le délai qu'ils jugent nécessaire pour la mener à bien.
En revanche, le Gouvernement pourra se dispenser d'appliquer cette procédure en cas d'urgence. Pour mieux encadrer cette dérogation, l'Assemblée nationale a adopté un amendement qui impose, à notre avis, utilement au Gouvernement de motiver sa décision de déclarer l'urgence et d'en informer les partenaires sociaux. L'urgence ne devrait être utilisée que dans des cas exceptionnels, qui ont été précisés sur notre demande en commission par M. le ministre, une crise sanitaire par exemple.
Consultation, ensuite : le projet de loi prévoit que le Gouvernement devra soumettre aux différentes instances du dialogue social les projets de loi et de décret, élaborés au vu des résultats de la concertation et de la négociation entrant dans le champ de la compétence. Ces instances sont la Commission nationale de la négociation collective, le Comité supérieur de l'emploi et le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie.
Les partenaires sociaux, qui siègent dans ces structures et qui ne sont pas les seules organisations dites « représentatives », comme l'a rappelé M. le ministre en les citant nominativement tout à l'heure, auront ainsi l'occasion d'exprimer leur point de vue. Ils pourront notamment faire part de leur désapprobation si le texte présenté par le Gouvernement s'éloigne sensiblement de l'accord qu'ils auront préalablement conclu.
Information, enfin : le projet de loi institue un rendez-vous annuel d'échanges entre le Gouvernement et les partenaires sociaux, dans le cadre de la Commission nationale de la négociation collective, inspiré de l'idée, qui m'avait beaucoup plu dans le rapport de Dominique-Jean Chertier, d'« agenda partagé ».
Un rapport sera remis chaque année au Parlement pour l'informer des procédures de concertation. Bien qu'aucun d'entre nous ne soit traditionnellement favorable à la remise de rapports, pour une fois, nous avons pensé que ce document pourrait avoir son utilité, en tout cas dans les premières années, pour voir si l'expérience mérite ou non d'être confirmée.
La réforme du dialogue social ne sera cependant couronnée de succès que si elle s'accompagne d'un changement des pratiques. C'est bien au-delà des termes l'objectif de ce texte.
Il faut souligner, en premier lieu, que le texte ne modifie en rien les prérogatives constitutionnelles du Gouvernement et du Parlement : le Gouvernement n'est pas tenu de reprendre intégralement le contenu de l'accord des partenaires sociaux, et les parlementaires conservent la plénitude de leur pouvoir d'amendement. J'y suis, comme vous je présume, particulièrement attachée.
M. Philippe Nogrix. Très bien !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Lors des auditions, il nous a été rappelé que la démocratie sociale complétait la démocratie représentative sans la concurrencer, et c'est bien ainsi que nous entendons exercer notre pouvoir d'amendement.
Dans ces conditions, un équilibre devra être trouvé entre la nécessité de respecter le compromis négocié, sans quoi le renvoi à la négociation aurait peu d'utilité, et le respect de la volonté du Gouvernement et du Parlement, dont l'approche est complémentaire.
Il faut reconnaître, ensuite, qu'il sera juridiquement relativement simple de « contourner » la nouvelle procédure de concertation. Dans la mesure où elle ne s'applique pas aux propositions d'origine parlementaire, le Gouvernement - quelle que soit sa couleur politique - pourrait être tenté de gagner du temps en demandant à un parlementaire de déposer une proposition de loi reprenant le contenu d'une réforme qu'il aurait lui-même élaborée.
Mme Raymonde Le Texier. Pas possible !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Toutefois, la commission est persuadée que la volonté de l'ensemble des acteurs que nous avons entendus au début du mois est de respecter l'esprit de la réforme et que nous serons donc prémunis contre de telles dérives, qui porteraient atteinte à la confiance indispensable entre le Gouvernement et les partenaires sociaux.
Les travaux que nous avons menés ont permis à M. le ministre de préciser devant la commission, et aujourd'hui devant la Haute Assemblée, le sort des transpositions des directives européennes. Je ne reviendrai pas sur les deux cas qui s'appliqueront en matière de directives européennes, puisque M. le ministre les a précisés. Je tiens simplement à dire que le rapport annuel pourra nous permettre d'analyser le sort de ces transpositions et la validité de cette approche.
Enfin, on observe que le projet de loi n'encadre la négociation des partenaires sociaux par aucun délai. On ne peut donc écarter le risque de manoeuvres dilatoires qui pourraient ralentir les discussions dans l'espoir d'« enterrer » une réforme.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. L'expérience montre que certaines négociations sont parfois longues : la loi portant réforme des retraites avait invité les partenaires sociaux à négocier sur la pénibilité du travail ; trois ans et demi plus tard, la négociation n'a toujours pas abouti, pour ne pas dire qu'elle est enlisée.
Notre commission s'est interrogée sur l'opportunité d'enserrer la procédure dans des délais plus stricts, mais a finalement préféré renoncer à cette idée, dans la mesure où, après les différentes auditions, il nous est apparu difficile sinon impossible de déterminer a priori ce que doit être la durée maximale d'une négociation. Il convient donc de s'en remettre, sur ce point, à l'esprit de responsabilité de l'ensemble des acteurs, lesquels, me semble-t-il, ont à coeur de négocier de bonne foi, ne serait-ce que pour éviter que le nouveau rôle qui leur est reconnu dans l'élaboration des normes ne leur soit par la suite retiré.
Par ailleurs, le Gouvernement conservera in fine la maîtrise du calendrier, puisqu'il pourra toujours couper court à une négociation qui s'éterniserait en présentant un projet de loi devant le Parlement.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Pour conclure, je voudrais souligner que l'adoption de la réforme du dialogue social devrait nous conduire à réfléchir, dans les mois et les années qui viennent, à plusieurs sujets intimement liés.
Tout d'abord, renforcer le dialogue social pose la question de la légitimité et de la représentativité de ses acteurs. S'il est prématuré de trancher aujourd'hui ce débat, notre commission considère que cette question doit constituer l'une des premières applications de la loi de modernisation du dialogue social.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. C'est une demande que, en qualité de rapporteur, j'ai présenté à M. le ministre, lequel s'est engagé, voilà quelques instants, à ouvrir la concertation à la fin de ce mois, avant de légiférer sur la représentativité syndicale.
C'est la raison pour laquelle notre commission a émis un avis défavorable sur tous les amendements allant dans ce sens.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est logique ! Il faut respecter l'esprit de la loi.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Ensuite, le rapport Chertier préconise de rationaliser les nombreuses instances de consultation et d'expertise qui se sont multipliées dans le domaine social. Nous sommes très favorables à cette proposition, qui suppose cependant au préalable un examen approfondi des activités et du rôle de chacune de ces structures. Je me réjouis que vous partagiez notre avis sur ce point, monsieur le ministre.
Enfin, la réforme du dialogue social nous invite à réfléchir sur notre propre mode de fonctionnement pour l'examen des réformes touchant au code du travail.
Si les parlementaires veulent être en mesure de consulter les partenaires sociaux, il importe que les commissions des affaires sociales des deux assemblées disposent d'un délai suffisant avant la discussion des textes en séance publique.
On pourrait également imaginer qu'un délai minimal soit prévu entre le dépôt des amendements extérieurs et leur examen en commission, afin que les rapporteurs puissent consulter les organisations représentatives et connaître leur point de vue autrement que par téléphone, en supposant qu'on puisse les joindre immédiatement.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il faut plus de vingt-quatre heures !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Tout à fait ! S'agissant du présent texte, le délai limite pour le dépôt des amendements était fixé à hier, en fin de matinée. La commission s'est réunie ce matin. Elle avait donc vingt-quatre heures pour travailler, en comptant la nuit. Je présume que les partenaires sociaux n'auraient pas été enchantés qu'on leur téléphonât au milieu de la nuit pour connaître leur avis.
De telles garanties amélioreraient le fonctionnement de nos assemblées, mais leur mise en oeuvre suppose une révision de la Constitution et une réforme du règlement des assemblées. (M. le président de la commission des affaires sociales applaudit.) Messieurs les présidents et vice-présidents, j'espère que vous aurez à coeur de les mener à terme puisqu'elles permettront à chacun d'entre nous de mieux accomplir notre tâche de parlementaire.
La réforme du dialogue social qui nous est proposée ne constitue donc que la première étape d'une transformation beaucoup plus vaste de notre système de relations sociales.
Le projet de loi présente un équilibre satisfaisant. Il a fait l'objet d'un large dialogue, d'un consensus certain et il a été enrichi des amendements adoptés par l'Assemblée nationale. C'est pourquoi notre commission vous propose de l'adopter dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
En conclusion, je remercie le ministre, ainsi que ses collaborateurs, de sa participation. Il a répondu, avant même mon intervention, à toutes les requêtes et questions qui ont été soulevées en commission. Il convenait en effet que nos collègues qui ne sont pas membres de la commission des affaires sociales disposent des éléments de réponse que M. le ministre nous avait apportés.
Enfin, à titre personnel, je remercie également M. le ministre des engagements de concertation qu'il a pris du haut de cette tribune voilà quelques instants, aussi bien envers la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, la FNSEA, qu'envers les professions libérales. En tant que salariée agricole et ancien rapporteur pour avis du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, j'y suis, vous vous en doutez, particulièrement attachée. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 48 minutes ;
Groupe socialiste, 31 minutes ;
Groupe Union centriste-UDF, 14 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 9 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de remercier mon ami M. Philippe Nogrix de m'avoir permis de m'exprimer à cet instant, ce qui me permettra de participer à une réunion sur la formation professionnelle.
L'État a trop longtemps hésité entre deux attitudes : favoriser la négociation collective nationale ou régler par la voie législative les grandes questions sociales.
Aussi, le renforcement de la négociation collective constitue-t-il aujourd'hui autant une exigence démocratique qu'un facteur de compétitivité favorable à la croissance et à l'emploi.
Pour cela, l'action des pouvoirs publics et celle des organisations patronales et syndicales doivent aller dans le sens de la complémentarité.
Faisons un rapide état des lieux.
En France, l'État ne détient pas officiellement le monopole de la production des normes sociales. En effet, le préambule de la Constitution de 1946 affirme que tout salarié « participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ».
Ce principe est confirmé par l'article L. 131-1 du code du travail, qui reconnaît « le droit des salariés à la négociation collective de l'ensemble de leurs conditions d'emploi, de formation professionnelle et de travail, et de leurs garanties sociales ».
Or, si la négociation collective est reconnue comme source du droit, elle apparaît cependant dans les faits largement régie par la loi.
Le cadre législatif de la négociation collective est en effet très précis. La loi établit une distinction entre la convention collective, qui détermine l'ensemble des conditions de travail et des garanties sociales, et l'accord collectif, qui ne porte que sur quelques-uns de ces sujets.
Elle définit également la qualité des signataires des conventions et des accords collectifs.
La loi détermine aussi la valeur juridique des conventions et des accords.
Deux procédures, à savoir l'extension et l'élargissement, qui supposent toutes deux l'intervention du ministre du travail, permettent d'appliquer une convention ou un accord au-delà de leur champ initial.
Par ailleurs, la loi du 13 novembre 1982 oblige à mener des négociations périodiques, sans toutefois imposer d'obligation de conclure.
De plus, et de façon traditionnelle, il arrive que la loi française impose aux partenaires sociaux de négocier sur un point donné dans un délai déterminé, sous peine de voir le législateur intervenir.
La loi du 4 mai 2004, en affichant la volonté du gouvernement de promouvoir le dialogue social, constitue une étape décisive.
Elle a su, avec succès, procéder à la transposition de l'accord national interprofessionnel du 20 septembre 2003, relatif à l'accès des salariés à la formation tout au long de la vie professionnelle.
Mais il est vrai qu'elle n'a pas transcrit sous forme normative l'affirmation d'un dialogue social préalable systématique.
Dans la pratique, cependant, la négociation collective progresse. Une étude récente de la direction de la recherche, des études et des statistiques du ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a mis en évidence le dynamisme de la négociation collective en France. Celle-ci a progressé entre décembre 1997 et décembre 2004, passant de 93,7 % à 97,7 % des salariés du secteur concurrentiel non agricole.
Désormais, seuls 2,3 % des salariés, soit un peu plus de 350 000 personnes, ne sont toujours pas couverts par un texte conventionnel ou statutaire.
Le rapport de notre excellente et compétente collègue Catherine Procaccia rappelle que « à côté des négociations traditionnelles sous la forme d'avenants, en matière de retraite complémentaire et d'assurance chômage, les années 2003 et 2004 ont été particulièrement marquées par la signature de l'accord national interprofessionnel sur la formation professionnelle du 20 septembre 2003 et de l'accord national interprofessionnel relatif à la mixité et à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes du 1er mars 2004 ».
Quant à l'année 2005, elle a été également une année de négociations interprofessionnelles particulièrement riches autour de thèmes innovants : l'emploi des seniors, le télétravail et la convention de reclassement personnalisé.
L'articulation entre la loi et la négociation collective demeure cependant perfectible.
Nous avons un engagement ancien en faveur de la négociation collective et du paritarisme. Ce dernier, instauré en 1967, est un acquis de notre démocratie sociale.
Pour autant, les relations entre l'État et les partenaires sociaux, en France, demeurent complexes, alors que de nombreux exemples européens - vous en avez fait état, monsieur le ministre, et nous nous sommes rendus dans les pays concernés avec M. le président de la commission des affaires sociales - nous démontrent qu'il est possible d'oeuvrer différemment et de façon plus efficace.
Notre mode de fonctionnement, ou plus exactement de non-fonctionnement, présente de nombreux inconvénients.
Tout d'abord, il fait pâtir les entreprises de conflits parfois durs qui réduisent leurs performances et ainsi les pénalisent. Ensuite, il porte préjudice aux usagers, victimes des conflits sociaux. Enfin, il ternit l'image de l'État et des syndicats, qui apparaissent incapables de dialoguer.
Or il n'y a pas de fatalité. Les réformes sont acceptées quand elles reposent sur un diagnostic partagé et que les modalités en sont négociées au préalable. (M. Philippe Nogrix applaudit.) Cela demande du temps mais, à terme, c'est bien plus constructif, bien plus profitable à tous.
M. Philippe Nogrix. Bravo !
M. Alain Gournac. On ne dira jamais assez que l'État et les partenaires sociaux ont des rôles complémentaires. Il appartient à l'État de fixer les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale. Il revient aux acteurs sociaux de définir et de mettre en oeuvre la norme sociale qui doit permettre de concilier progrès social et développement économique.
Les rapports des partenaires sociaux avec l'État doivent cesser d'être conflictuels, car ils n'ont pas à être concurrents.
Bien entendu, il faudra que les partenaires saisissent cette opportunité et acceptent de se mettre autour de la table.
Face à ce constat, le Gouvernement agit en présentant le texte qui nous est proposé et qui inscrit dans la loi un nouveau principe. Désormais, le partage des compétences entre le législateur et les partenaires sociaux est éclairci.
Le Gouvernement a d'abord commandé un rapport, en décembre 2005, à Dominique-Jean Chertier, c'est-à-dire bien avant les événements du printemps 2006 autour du contrat première embauche.
Ce rapport, remis au Premier ministre, souligne que « la question du domaine réservé aux partenaires sociaux n'est pas tant une question juridique qu'une question pratique de juxtaposition des temps de la délibération sociale et de la délibération parlementaire ».
Devant le Conseil économique et social, le Président de la République a souhaité, voilà quatre mois, que cette juxtaposition soit en quelque sorte déterminée par la loi et que soit ainsi franchie « une nouvelle étape».
C'est non plus dans l'exposé des motifs, cette fois, mais dans le corps de la loi que se trouveront gravées les règles que le Gouvernement nous propose d'adopter.
Désormais, un gouvernement ne pourra plus procéder à une réforme touchant au marché du travail ou à l'emploi sans avoir auparavant proposé aux partenaires sociaux d'engager une négociation sur le sujet.
Libre à eux de s'emparer de cette possibilité s'ils pensent pouvoir parvenir à un accord, ou de laisser le gouvernement travailler seul s'ils redoutent de ne pouvoir s'entendre.
Bien entendu, une fois la négociation aboutie, le Parlement sera saisi des dispositions d'ordre législatif et gardera toute latitude pour les examiner.
Le texte instaure également une rencontre annuelle entre les organisations syndicales et patronales, d'un côté, et le Gouvernement, de l'autre. Les organisations syndicales et patronales « présentent l'état d'avancement des négociations interprofessionnelles en cours ainsi que le calendrier de celles qu'elles entendent mener ou lancer dans l'année à venir ». Le gouvernement, lui, présente les orientations de sa politique sociale ainsi que « le calendrier envisagé pour leur mise en oeuvre ».
Les partenaires sociaux se voient donc confier une lourde responsabilité et nous ne doutons pas qu'ils s'en saisiront avec détermination et succès.
Cela ne signifie nullement que le Gouvernement, s'il veut efficacement jouer son rôle de garant et préserver sa capacité d'impulsion, doive s'effacer. Il demeure l'inspirateur des réformes, mais leur mise en oeuvre appartient aux partenaires sociaux.
Quant à la possibilité de recourir à l'urgence, elle ne doit pas être mal interprétée. Il est en effet tout à fait normal de prévoir pareille possibilité afin de pouvoir réagir à une situation grave.
Ce recours a d'ailleurs été encadré par les députés, puisque le gouvernement, dans le respect des principes constitutionnels, ne pourra se dispenser de la concertation qu'après avoir justifié cette décision.
Monsieur le ministre, le groupe UMP votera ce texte sans aucune réserve, avec la conviction qu'il marque une étape importante dans l'instauration d'un dialogue, riche et renouvelé, du Gouvernement avec les partenaires sociaux, et des partenaires sociaux entre eux.
Un dernier mot, si vous me le permettez. La prochaine étape sera l'engagement des partenaires sociaux dans la réforme de leur représentativité.
Ce sujet n'est pas sans susciter quelques réticences, certains craignant de se voir retirer des prérogatives auxquelles ils tiennent. Le rapport Hadas-Lebel et l'avis que vient de rendre le Conseil économique et social contiennent de nombreuses pistes de réflexion fort intéressantes pour apprécier la représentativité des syndicats : prise en compte des résultats des élections, de l'importance des effectifs, de l'implantation territoriale, de la présence dans les secteurs public et privé, de la diffusion dans les branches professionnelles.
Soyez assuré, monsieur le ministre délégué, de notre soutien dans cette future étape en faveur d'un dialogue social apaisé à même de bâtir une nouvelle démocratie sociale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l'année dernière, si les partenaires sociaux avaient été consultés, la plus grave crise sociale de la législature, celle du CPE, aurait pu être évitée. Un tel constat donne le vertige.
Mais, à l'époque, le Gouvernement a voulu passer en force, par le biais d'un simple amendement déposé sur le projet de loi sur l'égalité des chances. Et ce, c'est ce qui est sans doute le plus grave, après s'être engagé, dans l'exposé des motifs du projet de loi du 4 mai 2004 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, à « renvoyer à la négociation nationale interprofessionnelle toute réforme de nature législative relative au droit du travail ».
Aujourd'hui, le Gouvernement semble prendre acte de son échec. Trop tard, diront les esprits chagrins. Mais nous ne sommes pas chagrins et nous pensons que mieux vaut tard que jamais. À condition, toutefois, que la réforme qui nous est soumise soit à la hauteur de l'enjeu. Hélas, ce n'est pas tout à fait le cas !
Le présent projet de loi va, certes, dans le bon sens, mais il demeure toujours très en deçà de ce que l'on pourrait attendre d'une modernisation du dialogue social digne de ce nom.
Nous demandions depuis longtemps que le principe d'une négociation préalable avec les partenaires sociaux, au moins avant toute réforme touchant au droit du travail, devienne contraignant. Un engagement dans l'exposé des motifs d'un projet de loi, si solennel fût-il, ne suffisait pas. Les faits l'ont prouvé, hélas !
Le présent texte donne valeur législative à ce principe. C'est une étape importante, mais, à notre avis, insuffisante. En effet, c'est bien connu, ce que fait une loi, une autre loi peut le défaire. Le principe d'une concertation avec les partenaires sociaux préalable aux réformes du droit du travail devrait être inscrit dans la Constitution. Notre socle constitutionnel consacre déjà l'existence du dialogue social, en reconnaissant le droit à la négociation collective, qui fait partie des principes particulièrement nécessaires à notre temps inscrits dans le préambule de la Constitution de 1946.
En intégrant dans notre loi fondamentale le principe défendu dans le présent projet de loi, nous donnerions corps au droit constitutionnel que je viens d'évoquer. Prochainement, le Congrès devrait se réunir. N'y a-t-il pas là une occasion à saisir ? À cet égard, nous déplorons que, aux dernières nouvelles, il n'en soit pas question.
Que ce principe ne soit inscrit qu'au niveau législatif n'est pas la seule chose que nous regrettons. Il y a en effet plus grave. L'exception d'urgence prévue par le projet de loi risque très fortement de le vider de sa substance. Selon nous, ce texte pourrait contenir en lui-même le germe de son inefficacité.
En effet, si l'on se fie à la pratique législative récente, prévoir que la procédure de concertation, de consultation et d'information n'est pas applicable en cas d'urgence, c'est la condamner à rester lettre morte la plupart du temps. Pratiquement tous les textes sociaux de cette législature, en tout cas tous ceux qui ont réformé le code du travail, ont fait l'objet, comme d'ailleurs - ironie du sort ! - le présent projet de loi, d'une déclaration d'urgence de la part du Gouvernement. Cela signifie que, selon les termes du texte que nous allons examiner, ils n'auraient pas donné lieu à négociation avec les partenaires sociaux !
À cet égard, le CPE a battu tous les records : après avoir été créé par voie d'amendement, il a été supprimé par l'adoption d'une proposition de loi émanant du groupe de l'UMP. Avec de telles pratiques, et en l'absence de réels garde-fous juridiques, le dialogue social a bien lieu, mais dans la rue, hélas !
Sur ce point, l'Assemblée nationale a notablement amélioré le présent texte, en précisant que le Gouvernement sera tenu de justifier auprès des partenaires sociaux sa décision lorsqu'il invoquera l'urgence.
Mais ce n'est pas suffisant ! Nous vous présenterons un amendement tendant à supprimer, purement et simplement, cette exception d'urgence. A minima, il nous semble nécessaire que le Gouvernement, s'il invoque l'urgence, réunisse les partenaires sociaux. Les syndicats devront en effet pouvoir s'exprimer sur le recours à cette procédure.
Par ailleurs, pour un projet de loi de « modernisation du dialogue social », on nous présente un texte singulièrement léger ! Or beaucoup doit être fait pour redynamiser, donner corps à la démocratie sociale dans notre pays. Apparemment, telle n'est pas du tout l'ambition du projet de loi dont nous entamons l'examen.
Ce projet de loi traite des textes d'origine gouvernementale. Les propositions de loi, donc d'origine parlementaire, sont, elles, comme d'habitude, passées sous silence. Elles sont pourtant apparues, au cours de la législature - j'y ai fait allusion tout à l'heure -, comme des moyens commodes, pour le Gouvernement, de se tirer de mauvais pas. Avec le texte qui nous est proposé aujourd'hui, ce genre d'arrangement, par-dessus les partenaires sociaux, sera toujours possible. Quelles leçons avons-nous donc tirées du CPE ? (Mme Gisèle Printz s'exclame.)
Toujours au chapitre des questions institutionnelles, ce texte n'apporte aucune réponse à la question pourtant fondamentale de la répartition des compétences entre les domaines législatif et réglementaire, d'une part, et le domaine de la négociation collective, d'autre part.
La rénovation du dialogue social, c'est aussi la double question de la représentativité des organisations syndicales et de leur financement. Sur ces deux thèmes, le Conseil économique et social et M. Hadas-Lebel, dont vous avez évoqué le rapport, monsieur le ministre délégué, ont émis des propositions très intéressantes, dont rien ne transparaît ici, mais que nous serions bien inspirés de prendre en compte plutôt que d'attendre un nouveau projet de loi. Pourquoi donc toujours attendre et remettre à plus tard ?
Pourtant, il faudra bien reconnaître l'émergence de nouveaux acteurs syndicaux. Pour ce faire, le critère de l'élection sera déterminant, mais il ne devra pas être le seul. Il conviendra aussi de prendre en compte l'importance des effectifs de chaque organisation, leur implantation territoriale et leur présence dans les secteurs public et privé et dans les branches.
Monsieur le ministre délégué, nous savons que, sur la base de toutes les propositions qui ont été faites, vous avez été chargé d'élaborer un avant-projet de loi destiné à modifier les règles de la représentativité. Croyez bien que nous serons très attentifs à son contenu.
Il est un autre serpent de mer, sans doute le plus important de tous, la désaffection des syndicats, autrement dit l'essoufflement de l'engagement syndical, engagement que nous avons le devoir de revaloriser si nous voulons faire vivre le dialogue social. Or des solutions existent. Notre collègue député Francis Vercamer propose un système dans lequel les résultats de la négociation ne s'appliqueraient qu'aux adhérents des syndicats. À première vue, c'est vrai, une telle proposition semble iconoclaste. Mais ne faut-il pas y réfléchir ? Avec un tel système, les salariés bénéficiant d'accords d'entreprise seraient incités à adhérer et aucun syndicat ne serait plus tenté de ne pas participer à un accord avantageux, sachant que ses adhérents ne pourraient pas, dès lors, en profiter. C'en serait fini des comportements de passager clandestin !
D'autres solutions, moins radicales, peuvent être envisagées, comme celle qui consisterait à faire profiter, au titre de leur cotisation, les adhérents non imposables d'un crédit d'impôt, ou à valider les acquis de l'expérience acquise dans le cadre de fonctions syndicales.
Pour rénover le dialogue social, les instances de négociation doivent aussi être simplifiées, monsieur le ministre délégué, comme le recommande M. Chertier dans son rapport. Mais aujourd'hui, il n'est nullement question de tout cela. La frilosité de votre texte est, à notre avis, révélatrice de quelque chose de très profond et de très grave. Dans le fond, en France, on ne veut pas croire aux vertus d'une démocratie sociale vraiment consensuelle ; on ne veut pas croire aux vertus d'un dialogue constructif qui ferait avancer les choses. La démocratie sociale souffre du même mal que la démocratie politique. C'est un mal, hélas, bien français, dont nous devrons un jour nous guérir, et cela demandera du courage.
Démocratie sociale et démocratie politique sont aujourd'hui paralysées par des clivages d'un autre temps, des affrontements idéologiques surannés : d'un côté, c'est le patronat contre les salariés ; de l'autre, la droite contre la gauche. Tout cela est dépassé ! Nos électeurs, les citoyens, le disent, mais nous ne voulons pas l'admettre.
En matière de dialogue social, la France est véritablement en retard, ce qui n'est pas étonnant. De même que nous sommes incapables de dépasser les vieux clivages idéologiques gouvernementaux, nous ne parvenons pas à considérer salariés et employeurs comme de vrais partenaires sociaux, des partenaires qui se respectent, se comprennent et parlent pour construire. Aujourd'hui, les pays européens gouvernés par des coalitions centristes sont aussi ceux où la démocratie sociale est la plus dynamique et ceux qui s'en sortent le mieux dans la compétition économique internationale. C'est un tout !
À cette culture poussiéreuse et bipolaire de l'affrontement, l'UDF souhaite voir se substituer une véritable culture du consensus, du débat et de la construction. C'est pourquoi nous croyons en la démocratie sociale et pensons qu'il est urgent de miser sur son dynamisme. La France, nous le savons tous, nous le répétons tous, a besoin de réformes. Or seules des réformes préparées avec ceux auxquels elles s'appliqueront et ceux qui seront chargés de les mettre en oeuvre, pourront être acceptées.
Nous-mêmes, parlementaires, n'acceptons pas que des textes nous soient imposés et voulons donner notre point de vue, pour enrichir les propositions qui nous sont faites. Car il n'existe pas un point de vue unique dans une démocratie ! Telle est la raison pour laquelle nous ne pourrons jamais réformer structurellement notre pays sans rénover véritablement la démocratie sociale. Sur cette voie, le présent projet de loi permet de faire un pas, mais un pas minuscule. Nous le ferons ensemble, monsieur le ministre délégué, car le groupe de l'UC-UDF votera ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.- Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Seillier.
M. Bernard Seillier. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui constitue une étape décisive dans l'histoire des relations sociales en France. Il s'agit d'instaurer et de développer une pratique dynamique de la négociation et de la coopération.
Il faut en effet éviter les impasses du conflit telles que nous avons pu les connaître dans le passé. Il est certes arrivé que la loi reprenne intégralement le contenu d'un accord collectif. Tel fut notamment le cas avec la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social. À l'inverse, il faut avoir l'honnêteté de reconnaître le coût social d'un affrontement et d'un blocage conduisant à l'éviction totale des propositions de l'une des parties en présence, quelle qu'elle soit.
Conformément au discours du Président de la République prononcé devant le Conseil économique et social le 10 octobre 2006, nous devons aider les syndicats à se libérer d'une tradition protestataire, qui débouche trop souvent sur l'affrontement et, au bout du compte, sur le conservatisme, faute d'un itinéraire de progrès balisé. Il convient, de même, d'aider les organisations patronales à lutter contre la tentation de se réfugier, faute, là encore, d'une perspective de développement suffisamment assurée, dans une vision trop étroite des intérêts de l'entreprise.
Cette dynamique nouvelle devrait permettre d'appréhender l'ensemble des enjeux sociaux, notamment ceux que les relations sociales ont trop souvent occultés ces dernières années : la mondialisation des échanges, les nouvelles formes de relations de travail, la sous-traitance et les contraintes de mobilité pour les entreprises et les salariés.
Nous sentons tous que nous engageons ici une évolution décisive en ce qui concerne le dialogue social et que nous sommes à l'aube de changements importants.
Ainsi, il ne doit plus être possible de modifier le code du travail sans que les partenaires sociaux aient été mis en mesure de négocier le contenu de la réforme proposée. De même, aucun projet de loi ne doit être présenté au Parlement sans que les partenaires sociaux soient consultés sur son contenu. Rien n'interdisait jusqu'ici une telle démarche pour l'élaboration des normes dans les relations du travail. Mais les conditions de son avènement n'étaient peut-être pas réunies, sa dimension éthique n'étant pas suffisamment perçue comme une exigence. Les syndicats sont également conscients que de vastes réformes concernant la représentativité devront, dans leur propre intérêt, être engagées.
Ce projet de loi de modernisation du dialogue social est d'abord le fruit d'une réflexion bâtie à partir du rapport de Dominique-Jean Chertier, à qui le Premier ministre avait demandé de formuler des propositions sur les moyens d'améliorer le dialogue entre le Gouvernement et les partenaires sociaux.
Ces propositions étaient de trois ordres.
Tout d'abord, il s'agissait d'établir une formalisation du programme de réformes d'initiative gouvernementale axée à la fois sur un calendrier et un partage des rôles entre pouvoirs publics et partenaires sociaux.
Ensuite, il était proposé d'instaurer un temps réservé à la concertation pour l'ensemble des réformes, c'est-à-dire d'exiger le respect d'un délai minimal entre l'annonce d'un projet de réforme et l'adoption du texte correspondant en conseil des ministres.
Enfin, il s'agissait de restructurer les lieux du dialogue social. À cet égard, le rapport contient de nombreuses pistes, en particulier la réforme du Conseil économique et social, qui deviendrait ainsi un lieu central et privilégié de consultation, mais aussi l'examen de l'utilité et de la composition des instances de concertation existantes et la réduction de leur nombre, ou encore la révision des dispositifs de consultation obligatoire. Les problèmes de la réduction du nombre d'instances de consultation sociale et de la clarification de leurs attributions restent un chantier pour l'avenir.
Suite à ce rapport, le Premier ministre a entamé la discussion avec les partenaires sociaux et la Commission nationale de la négociation collective s'est réunie pour examiner l'avant-projet de loi. La procédure suivie est donc un modèle en termes de concertation ; elle a donné naissance à ce texte, lequel repose sur trois axes.
Premier axe, tout projet de réforme portant sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle fera l'objet d'une procédure de concertation préalable avec les partenaires sociaux qui leur permettra, s'ils le souhaitent, d'ouvrir une négociation nationale et interprofessionnelle.
Le deuxième axe est la consultation. Des instances de consultation existent et certaines sont très récentes, à l'image du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie. Par une extension des domaines couverts par de telles instances de consultation et une systématisation de leur intervention avant la mise en oeuvre de tout projet de nature législative ou réglementaire en matière de relations individuelles et collectives du travail, d'emploi et de formation professionnelle, le présent projet de loi transforme de manière radicale les pratiques de consultation en matière de droit du travail.
Le troisième axe est l'information. Un grand rendez-vous annuel permettra un véritable échange, un réel dialogue entre le Gouvernement et les organisations syndicales, de manière que puissent être présentés à la fois les grandes orientations du Gouvernement en matière de relations individuelles et collectives du travail, d'emploi et de formation professionnelle avec un calendrier de mise en oeuvre, et l'état d'avancement des négociations interprofessionnelles conduites par les partenaires sociaux en cours ainsi que le calendrier de celles qui sont encore à venir.
Cette clarification des différentes étapes et des champs du dialogue social est essentielle, car elle institue un itinéraire dans la progressivité des enjeux et elle « phase » les étapes du dialogue. Elle est indispensable pour donner à la négociation le maximum de chances de fécondité.
Par ailleurs, on ne peut aborder la question du dialogue social sans traiter de la faiblesse de la représentativité syndicale dans notre pays. Le rapport de M. Raphaël Hadas-Lebel nous a considérablement aidés dans cette réflexion : seuls 4 % des salariés du secteur privé sont en effet syndiqués. Nous nous trouvons là dans un cercle vicieux. L'insuffisance de la responsabilité reconnue aux partenaires sociaux dans le processus d'élaboration des normes n'est pas favorable aux taux de syndicalisation ; elle n'incite pas à l'adhésion syndicale. Au contraire, elle incite à une surenchère dans la protestation, puisque l'habileté et le savoir-faire dans la négociation ne sont pas valorisés, faute de cadre d'application.
Nombre de syndicats souhaitent la réforme des règles de la représentativité syndicale afin d'améliorer la démocratie sociale. Aujourd'hui, un accord peut être signé par une seule organisation syndicale ; chaque organisation se voit reconnaître le même poids. La représentativité syndicale doit être mesurée à partir du résultat des élections professionnelles sur le lieu de travail. Celle-ci implique l'abandon de la présomption irréfragable de représentativité accordée à cinq syndicats. Je salue le sens des responsabilités des syndicats qui acceptent cette révision.
Dans son rapport, le Conseil économique et social reconnaît majoritairement le principe selon lequel le choix par les salariés des organisations appelées à les représenter dans les négociations doit se fonder, entre autres, mais principalement, sur des élections ; il importe de définir les clauses qui doivent figurer expressément au cahier des charges de cette mesure de la représentativité des organisations.
De plus, le Conseil considère que la représentativité des organisations devrait résulter de consultations permettant aux salariés d'élire leurs délégués.
La question de la représentativité patronale ne se pose pas dans les mêmes termes que celle de la représentativité syndicale. Le système a su évoluer, comme le montre la reconnaissance de la représentativité de l'Union professionnelle artisanale, l'UPA, mais les critères de représentativité doivent être encore réformés en conservant une place importante au critère du nombre d'adhérents.
La faiblesse de la représentativité syndicale en France fait que, jusqu'ici, le contrat n'a pas suffi à réguler le champ social ; il ne le pourra jamais complètement, mais sa place peut être substantiellement élargie. La loi conservera son utilité, en tout état de cause comme garant de la cohérence nationale, si le rapport de force entre les partenaires sociaux est trop inégal pour aboutir à un accord satisfaisant. Mais on pourra concrètement mesurer la corrélation directe entre le taux de syndicalisation et la reconnaissance de la compétence syndicale.
Quoi qu'il en soit, le débat de la représentativité syndicale devrait constituer l'une des premières applications de la loi de modernisation du dialogue social.
De plus, si les parlementaires veulent être en mesure de consulter les partenaires sociaux, il est indispensable que les commissions des affaires sociales de l'Assemblée nationale et du Sénat disposent d'un délai suffisant avant l'examen des textes en séance publique.
Enfin, ce projet de loi ne modifie pas les prérogatives constitutionnelles du Gouvernement et du Parlement. Dans ces conditions, un équilibre devra être trouvé entre le respect du compromis négocié par les partenaires sociaux et le respect de la souveraineté nationale.
Mes chers collègues, avec ce texte, notre objectif fondamental est d'aller vers une paix sociale dynamique, facteur de compétitivité et d'efficacité, un syndicalisme puissant et responsable et des relations contractuelles fortes en vue de remplacer la protestation sociale par la coopération conciliatrice entre intérêts ou points de vue différents ; c'est essentiel. Il s'agit donc d'une méthodologie concrète et pratique pour que le bien commun ne reste pas dans le domaine des essences, mais puisse être actualisé à chaque étape historique de la vie politique, économique et sociale.
Je ne saurais terminer sans saluer et remercier notre rapporteur de nous avoir aidés dans la clarification et l'analyse de ce texte essentiel. Je suis certain que cette démarche de progrès que nous engageons aujourd'hui aura d'heureux effets sur le climat dans notre pays et même sur le dynamisme et la compétitivité de son économie. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, tout d'abord je vous prie d'excuser l'absence de mon collègue Roland Muzeau, souffrant, qui a été la cheville ouvrière de la réflexion du groupe CRC sur ce texte. Je vais donc me faire son interprète.
Aspiration largement partagée, s'il en est, le renforcement de la négociation collective s'est imposé, depuis la création du ministère du travail, comme une exigence à satisfaire afin de favoriser et de concilier le progrès social et les conditions d'emploi des salariés avec la croissance économique.
Depuis une dizaine d'années déjà, tout le monde semble se plaindre de la faiblesse des protagonistes sociaux, de la place étroite de la politique contractuelle dans la sphère sociale et du déclin du syndicalisme...
Bien que ce soit pour des raisons différentes, pour ne pas dire opposées, leaders syndicaux et politiques en appellent à la modernisation du dialogue social. Cette question est devenue un vrai enjeu politique.
Or, comme n'a pas manqué de le relever le Conseil économique et social dans l'introduction de son avis intitulé Consolider le dialogue social, « La notion de ?dialogue social? est aujourd'hui couramment utilisée mais rarement définie avec précision, les différents acteurs pouvant dès lors lui donner des significations éminemment variables : dans la mesure où elle ne désigne, a priori, ni une forme identifiée, ni un niveau précis -information, consultation, concertation, négociation -, chacun peut y mettre le contenu qu'il souhaite, avec les questions de méthode et tous les risques de malentendus que cela induit quant au degré d'implication des interlocuteurs dans la décision. »
Ainsi, le 14 juillet dernier, Jacques Chirac, redécouvrant les mérites du dialogue social et défendant un syndicalisme de compromis, s'est fort opportunément servi de ce thème de la modernisation du dialogue social pour tenter de redorer son blason après l'échec cuisant de son gouvernement sur le CPE.
En posant le principe qu'« il ne soit plus possible de toucher au code du travail sans avoir, préalablement, eu une concertation entre les organisations syndicales et professionnelles », le président de la République a ni plus ni moins réitéré, trois ans après, un de ses anciens engagements, celui de renvoyer à la négociation nationale interprofessionnelle les réformes de nature législative relatives au droit du travail. Cet engagement, je vous le rappelle, mes chers collègues, était déjà inscrit dans l'exposé des motifs du projet de loi Fillon relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, mais il « n'a pas depuis formellement donné lieu à une mise en oeuvre concrète », ainsi que l'a justement constaté M. Dominique-Jean Chertier dans son rapport.
Annonçant la présente réforme en octobre dernier devant le Conseil économique et social, le chef de l'État a plaidé en faveur de la construction « d'une nouvelle architecture de la responsabilité » entre l'État, les syndicats et le patronat, en faveur « de plus de contrat et moins de loi ».
Avant lui, dans la Position commune du 16 juillet 2001 et le rapport de M. Michel de Virville, notamment, avait déjà été abordé dans cet esprit le thème de la place respective et des relations entre la législation et la négociation en prenant le parti « du contrat libérateur dont les excès et les illusions ont été maintes fois décrits », comme le rappelle Marie-Armelle Souriac, professeur à l'Université de Paris-X dans un article de doctrine publié dans le numéro de la Revue de droit du travail d'octobre dernier.
Dans le même ordre d'idées, le MEDEF, sous la présidence d'Ernest-Antoine Seillière, a développé son projet de « refondation sociale » instrumentalisant la relance du dialogue social et de la négociation pour consacrer la prééminence du contrat sur la loi.
Début 2004, le même patron des patrons se satisfaisait des résultats obtenus. Je le cite : « Nous avons obtenu une première étape essentielle dans la modernisation de notre système de négociations collectives en privilégiant l'accord d'entreprise dans la négociation... ».
Il est vrai que la loi de M. Fillon réformant le dialogue social était passée par là, balayant l'ordonnancement juridique en vigueur et le principe de faveur afin de permettre qu'il soit dérogé, par accord d'entreprise, dans un sens moins favorable aux salariés, aux droits consacrés dans les conventions collectives et à l'ordre public social.
Toujours pour illustrer cette approche singulière de la réforme du dialogue social et ses grands enjeux, voyons maintenant les intentions de la nouvelle patronne du MEDEF.
Laurence Parisot a choisi le moment où Jacques Chirac montait en première ligne afin de défendre sa réforme pour lancer « la délibération sociale ». Cette modalité nouvelle de dialogue social dans la forme n'en poursuit pas moins les mêmes objectifs.
« Revoir les règles du droit du travail pour permettre l'adaptation des entreprises et de la société aux évolutions du contexte économique, réduire l'insécurité juridique, corriger les dérives jurisprudentielles, revoir les sanctions... » Bref, mettre tout en oeuvre afin que, surtout, rien de conséquent ne change s'agissant de la légitimité des acteurs syndicaux, tout en s'assurant du caractère bienveillant, moins contraignant de la réglementation. Il s'agit aussi d'empêcher l'ingérence du politique dans la sphère économique.
Je partage le sentiment de Rémi Baroux, journaliste au journal Le Monde, qui voit également dans cette démarche « la volonté affichée par le MEDEF d'éviter notamment que l'État et le gouvernement - l'actuel comme celui qui sera issu de l'élection présidentielle de 2007 - n'interviennent trop dans les affaires sociales ».
Nous ne partageons évidemment pas cette approche de la démocratie sociale et encore moins l'articulation proposée avec la démocratie politique. Comme nombre de syndicats auditionnés, nous tenons avec force à la souveraineté du législateur et pensons que démocratie politique et démocratie sociale doivent se compléter, la seconde n'ayant pas vocation à supplanter la première.
À ce titre notamment, le rapport Chertier est intéressant dans la mesure où l'on n'y propose pas, à la différence de la Position commune, de séparer les domaines de compétence du Gouvernement, du Parlement et des partenaires sociaux. On y fait même la démonstration, à l'appui d'exemples étrangers - notamment allemands - que cette séparation, qui n'est pas sans incertitudes, fait débat.
Cela n'empêche aucunement le MEDEF de continuer à peser pour qu'une révision constitutionnelle vienne compléter le projet de loi que nous examinons, lequel se contente d'inscrire dans la loi une répartition des temps plus que des domaines. M. Jacques Creyssel, directeur général du MEDEF, l'a encore rappelé lors de son audition par la commission des affaires sociales.
Outre cette exigence de réforme constitutionnelle, il a beaucoup insisté sur la transcription législative des accords, sur la nécessité de respecter l'équilibre issu des négociations.
Il s'est élevé contre la pratique des amendements d'appel dont l'initiative revient à certains partenaires ayant, dans la négociation, échoué à faire aboutir leur position, feignant d'oublier que le MEDEF ne se privait pas de gentiment transmettre aux parlementaires des amendements remettant en cause un accord signé. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Je pourrais rappeler cela à M. Gournac !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et la CGT ? Et la CFDT ? Nous verrons leur amendement tout à l'heure !
M. Guy Fischer. Sur la question de la légitimité des acteurs, je peux, sans trop la trahir, résumer la pensée de M. Creyssel en disant que, pour lui, il est surtout urgent d'attendre. Cette position n'a pas manqué de susciter des réactions, tant la légitimité des accords dépend de la représentativité des organisations syndicales.
Comme vous, monsieur le président de la commission, je suis d'avis « que le pouvoir politique peut ne pas sentir tenu de respecter un accord si celui-ci ne jouit pas d'une profonde légitimité. »
C'est pourquoi, mes chers collègues, nous ne pouvons que déplorer la frilosité du Gouvernement...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oh !
M. Guy Fischer. ...qui, à quelques mois d'échéances électorales, a enterré la véritable réforme, à savoir celle de la représentativité.
Il ne suffit pas de se déclarer personnellement favorable à la consolidation du dialogue social ; encore faut-il ne pas être politiquement hostile à sa mise en oeuvre immédiate !
Dialogue social et représentativité syndicale sont étroitement liés. Le Gouvernement a tenté de disjoindre ces deux questions. L'actualité l'a heureusement rattrapé puisque le Conseil économique et social a remis son avis au moment même où s'ouvrait à l'Assemblée nationale le débat sur le projet de loi de modernisation du dialogue social.
Malgré les demandes conjointes de la CGT et de la CFDT, le Gouvernement a refusé d'intégrer les deux principaux axes de cet avis, à savoir la refondation de la légitimité syndicale sur le vote de tous les salariés - y compris ceux des petites entreprises - et l'affirmation du principe majoritaire comme condition de validité des accords.
Une fois de plus, tout en sachant que cette question a fait l'objet d'une concertation et que les blocages sont tels que seule l'intervention du législateur s'impose, le Gouvernement a choisi de botter en touche. Pour les tenants de la rupture, même tranquille, cette peur des bouleversements ô combien nécessaires de notre paysage syndical et de ses pratiques pose question.
Il est vrai que, à l'instar du MEDEF, le Gouvernement préfère sûrement des signataires dociles et minoritaires.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oh !
M. Guy Fischer. Au final, tant de l'avis du Conseil économique et social que des rapports Hadas-Lebel et Chertier, il ne reste plus grand-chose, comme en témoignent les deux articles du texte dont nous entamons l'examen. Nous regrettons qu'il en soit ainsi, messieurs les ministres.
C'est pourquoi, tout en reconnaissant l'importance des dispositions législatives visant à définir de nouvelles pratiques en termes de concertation, de consultation et d'information des partenaires sociaux sur les réformes touchant au coeur du code du travail, nous tenons, par le biais de nos amendements, à défendre notamment la position portée par la CGT, la CFDT et l'UNSA, et ce avec d'autant plus de conviction que cette position, qui vise à améliorer le fonctionnement de la démocratie sociale, est la nôtre depuis 1982.
Nous proposerons de préciser certaines dispositions de ce texte pour éviter des pratiques dilatoires, qu'il s'agisse de certaines organisations patronales, qui pourraient être tentées de négocier pour mieux enterrer les réformes, ou du Gouvernement, qui pourra toujours contourner les partenaires sociaux en cas d'urgence.
L'exemple récent des négociations sur la pénibilité implique justement que l'on définisse mieux les modalités de la procédure de concertation et de négociation.
Là encore, et bien que le discours actuel soit à la promotion officielle du dialogue social, nous entendons prendre un maximum de précautions contre les passages en force de l'exécutif. Il est vrai que nous avons toutes les raisons de craindre la notion d'urgence, laquelle a permis de justifier au cours de cette législature nombre d'entorses à la démocratie sociale et aux droits du Parlement.
La liste est longue, mais je me dois tout de même d'illustrer mon propos de quelques exemples dans la mesure où vos mauvaises pratiques des rapports sociaux expliquent en partie notre prudence vis-à-vis du présent texte.
Ainsi, dans le passé, cette majorité, sous le gouvernement de M. Raffarin, a profité de la transcription d'un accord national sur la formation professionnelle signé à l'unanimité des partenaires sociaux pour donner à l'accord d'entreprise sa pleine autonomie par rapport à l'accord de branche, chamboulant ainsi la hiérarchie des normes en droit social.
La loi Fillon, dont il est question, a préféré la majorité d'opposition à la majorité d'engagement.
Toujours en 2004, vous vous êtes cachés derrière la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, examinée selon la procédure d'urgence, pour satisfaire le MEDEF dans sa demande de modification des règles en matière de licenciements économiques.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y a aussi des syndicats qui ne signent jamais aucun accord !
M. Guy Fischer. Manipulant le Parlement et contournant les organisations syndicales, vous avez accepté les amendements livrés clés en main par le MEDEF mettant à mal des jurisprudences constantes de la Cour de Cassation, affaiblissant substantiellement le rôle et les pouvoirs d'intervention des comités d'entreprise et verrouillant l'action collective des salariés.
Pas moins de treize amendements sur les vingt-deux estampillés « MEDEF » ont été finalement retenus. M. Dassault a réussi à cette occasion à changer les règles régissant le travail de nuit dans la presse.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'était M. de Broissia !
M. Guy Fischer. Certes, mais il était l'employé de M. Dassault ! (Sourires.)
En 2005, faute de courage politique, c'est par le biais d'une proposition de loi, c'est-à-dire sans l'information préalable des instances habilitées et sans l'obtention de l'aval des syndicats, que la législation sur le temps de travail a été assouplie.
Vous avez accepté, par la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, de porter de deux à quatre ans la durée du mandat des membres du comité d'entreprise, témoignant ainsi de votre volonté de distendre le lien entre les salariés et leurs élus.
La même année, à l'exigence de respect, de plus démocratie et de moins d'insécurité sociale exprimée par le « non » au référendum, vous avez répondu par le changement dans la continuité et par le passage en force. C'est par ordonnance, et en raison de l'urgence de la situation de l'emploi, que M. de Villepin a décidé de prescrire la précarité généralisée en instituant le CNE, le contrat nouvelles embauches.
L'année suivante, en miroir à la crise des banlieues, le Gouvernement a tenté de faire passer au forceps le CPE, le contrat première embauche, par le biais de la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances.
Après avoir déclaré l'urgence, bousculé le calendrier parlementaire et introduit par la voie d'un amendement une disposition majeure, le CPE, le Gouvernement, pour finir, a eu recours à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Dans un passé encore plus proche, et alors que le présent texte était déjà dans les tuyaux, un important volet a été ajouté à la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social. Gênés par la multiplication de mesures modifiant le code du travail sans lien avec l'objet du texte, certains parlementaires de droite ont tenté de sortir du rang, pour mieux le réintégrer en acceptant ces pratiques, par « pragmatisme ».
Au titre de ces amendements, qui étaient autant de cavaliers, de multiples questions ont été traitées. Je pense au temps de travail dans les transports, au temps de déplacement des salariés agricoles, au calcul de l'effectif des entreprises, à l'information dont disposent les comités d'entreprise et à la rémunération des activités prud'homales.
Enfin, que dire de la validation par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 des dispositions de l'accord de 2004 sur le temps de travail dans les hôtels, cafés et restaurants, dispositions annulées par le Conseil d'État, si ce n'est qu'elles traduisent la négation du dialogue social par le Gouvernement ?
Je ne peux terminer cette énumération, qui est loin d'être exhaustive, sans ajouter que l'accord du 12 décembre 2001 relatif au développement du dialogue social dans l'artisanat, signé par toutes les organisations syndicales de salariés, reste à ce jour encore lettre morte, faute d'avoir obtenu l'aval du Gouvernement.
Monsieur Borloo, quand allez-vous signer cet accord ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Nous y travaillons !
M. Guy Fischer. Décidément, les solutions de nature à relancer et à enrichir effectivement le dialogue social restent suspendues à la bonne - mauvaise, en l'occurrence - volonté du MEDEF et de cette majorité.
Chers collègues de l'UMP, l'autoritarisme de votre candidat à la présidentielle, qui annonce une loi sur le service minimum et sur les relations de travail, laquelle porterait atteinte au droit de grève, liberté fondamentale des salariés, renforce encore davantage nos doutes sur votre capacité à tenir les engagements inscrits dans le présent projet de loi.
Nous croyons à l'utilité et à la qualité du dialogue social. C'est la raison pour laquelle, à l'issue de nos débats, nous nous abstiendrons sur ce texte, que j'aurais pu qualifier d'hypocrite, ...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non !
M. Guy Fischer. ...dans la mesure où il évacue, pour avoir toutes les chances d'être adopté avant la fin de la session, les vraies solutions.
Jean-Christophe Chanut, dans La Tribune, a bien résumé notre sentiment sur le projet de loi, en ces termes : « L'efficacité et la rapidité en lieu et place de l'ambition. » (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la modernisation du dialogue social est une préoccupation toute récente au regard de la pratique de cette législature. Jusqu'à présent, messieurs les ministres, ce gouvernement préférait en effet faire passer les textes touchant au travail, à l'emploi et à la formation en ignorant complètement les représentants des salariés. Mais, quand on a comme bilan social le passage en force du CNE par voie d'ordonnance, l'imposition du CPE par amendements du Gouvernement dans la loi pour l'égalité des chances, l'apprentissage dès 14 ans ou encore l'élargissement du travail de nuit, on comprend que la perspective d'échéances électorales fasse redécouvrir les vertus du dialogue.
Sans doute le revers subi par le chef du Gouvernement sur le CPE l'a-t-il conduit à ouvrir les yeux sur une évidence : le changement ne se décrète pas et la réforme ne s'impose pas.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai ! Moi aussi, je l'avais dit !
Mme Raymonde Le Texier. La rue lui a ainsi appris le mode d'emploi du dialogue social : utile pendant, nécessaire après, mais surtout indispensable avant ! À moins que, une fois encore, cette loi ne serve qu'à afficher des intentions que vos actes démentiront par la suite.
Il faut dire que vous nous avez prouvé ce que valent vos garanties avec la loi Fillon du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.
Dans son exposé des motifs, le Gouvernement écrivait ceci : « Le Gouvernement prend l'engagement solennel de renvoyer à la négociation nationale interprofessionnelle toute réforme de nature législative relative au droit du travail. Par conséquent, il saisira officiellement les partenaires sociaux, avant l'élaboration de tout projet de loi portant réforme du droit du travail (...) »
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme Raymonde Le Texier. À peine avait-il été pris que cet engagement, pourtant solennel, a été démenti dans les faits. À la demande du MEDEF, et par voie d'amendements de dernière minute, cette loi a permis d'imposer aux partenaires sociaux deux changements majeurs dans notre droit du travail : la remise en cause du principe de faveur et celle de la hiérarchie des normes.
C'est ainsi qu'aujourd'hui un accord de rang inférieur peut fixer des dispositions moins favorables aux salariés qu'un accord de rang supérieur.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
Mme Raymonde Le Texier. Cette mise à mal de la hiérarchie des normes s'est ainsi faite au détriment de la protection et de la sécurité juridique des salariés.
Messieurs les ministres, cet épisode de triste mémoire suffirait à expliquer notre manque de confiance en ce projet de loi.
Nos réticences ne viennent pas du soupçon, mais de l'expérience. Nos doutes ne naissent pas d'une posture idéologique, mais de la connaissance de vos méthodes. Si, en 2004, vous étiez convaincus qu'il était indispensable de réserver du temps à la négociation, pourquoi alors l'avoir systématiquement bafouée ?
Nos réserves sont d'autant plus fondées qu'en examinant ce texte il n'est pas difficile d'y retrouver les outils qui vous permettent de vous soustraire aux obligations qu'il semble poser.
D'abord, on observe que cette procédure ne concerne pas les textes d'origine parlementaire. Cela permet au Gouvernement de contourner l'obstacle, par exemple en faisant présenter une proposition de loi par des amis politiques. Certes, le procédé n'est pas élégant, mais gageons qu'il sera efficace.
Selon le rapport de Mme Procaccia, le ministre a indiqué « ne pas craindre de telles dérives ». Ce sont là les seules assurances que nous aurons. Quand on voit la façon dont vous avez fait passer le CPE et le CNE, la simplicité de contournement de cette nouvelle procédure de concertation apparaît comme une véritable aubaine.
Ensuite, ce texte n'est pas applicable en cas d'urgence. Bien sûr, nul ne conteste la possibilité de circonstances exceptionnelles. Mais, ce qui est en cause ici, c'est le choix d'une procédure qui vous est devenue habituelle : l'urgence sans urgence.
Une fois de plus, nous parlons d'expérience. Depuis le début de la législature, à l'exception de la loi du 23 mars 2006 relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, tous les textes ayant trait au dialogue social ont fait l'objet d'une déclaration d'urgence afin que soit réduit le temps accordé aux débats. Le texte que nous examinons aujourd'hui n'échappe pas à cette règle.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il est urgent !
Mme Raymonde Le Texier. D'ailleurs, consciente de cette manipulation, l'Assemblée nationale a voté un amendement afin que la notion d'urgence soit motivée et ne soit plus l'excuse facile du passage en force.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai !
Mme Raymonde Le Texier. Vous ne vous êtes jamais privés d'utiliser cette excuse. Ainsi, vous avez instrumentalisé les violences urbaines pour tenter d'imposer le CPE ou les chiffres du chômage pour mettre en place le CNE.
Avec vous, l'urgence est seulement l'alibi de la pratique discrétionnaire du pouvoir exécutif. À trop l'avoir employée, vous l'avez vidée de toute substance.
Or la démocratie sociale mérite mieux qu'un texte fade et sans ambition.
En voulant substituer le contrat à la loi, ce n'est pas un hommage à la responsabilité des syndicats que rend le Gouvernement, ce sont les intérêts du MEDEF qu'il a choisi de servir, une fois de plus.
Je ferai plusieurs observations.
Alors que le terme de « négociation collective » est contraignant et identifié, celui de « dialogue social » n'est pas encadré par les textes, et sa définition est floue. C'est une pratique et non une notion juridique. Sa mise en avant par le Gouvernement fait craindre que, sous couvert d'ouverture et d'échange, l'on ne tende à évacuer le formalisme de la négociation au profit de la souplesse du dialogue.
Le flou entoure également les conditions dans lesquelles les organisations syndicales de salariés et d'employeurs feront connaître leur intention d'engager une négociation. Qui décide ? comment ? avec quelle majorité ? Quel sénateur, après avoir examiné ce texte, peut répondre à ces questions ? Or le dialogue social suppose non seulement des syndicats forts et légitimes mais aussi des procédures claires et opposables. En préconisant un nouvel équilibre entre la loi et le contrat sans remettre à plat la représentativité syndicale, sans vous poser la question de la réalité du rapport des forces des partenaires sociaux, vous avez, pour le moins, monsieur le ministre délégué, mis la charrue devant les boeufs !
Vous ne cessez de vous référer aux expériences allemandes, danoises, voire espagnoles. Mais si vous savez y puiser les exemples qui vous servent, vous oubliez le contexte particulier qui est le nôtre.
La France affiche le taux de syndicalisation le plus faible de tous les pays développés, puisqu'il est de 8 %. Au Danemark, ce taux atteint 87,5 % ; il est de 52 % en Belgique, et de 26 % aux Pays-Bas.
Or, comme le montrent les exemples étrangers, c'est essentiellement la reconnaissance mutuelle que les organisations syndicales et patronales s'accordent qui détermine leur capacité à trouver des accords. Cette reconnaissance passe par la capacité de poser, en cas de besoin, un rapport de force.
En France, avec des taux de syndicalisation aussi faibles, il n'est pas étonnant que de nombreux conflits trouvent leur issue dans la rue.
Comment parler de démocratie sociale et continuer dans le même temps à appliquer un système où la représentativité repose sur des critères administratifs, puisqu'un arrêté datant de 1966 accorde une présomption de représentativité à cinq organisations syndicales ?
À ces questions cruciales, ce projet de loi se garde bien de répondre. Or, faute d'avoir abordé ces problèmes, de lourdes interrogations portent sur le résultat de la mise en oeuvre d'une telle loi.
Aujourd'hui, il suffit de trois syndicats sur cinq parmi les organisations représentatives au niveau national pour valider un accord, même si celui-ci est minoritaire parmi les salariés. Comment aborder sereinement la question de la place de la loi et du contrat dans de telles conditions ? Tant que la possibilité d'accords minoritaires demeurera, la démocratie sociale aura du mal à trouver son souffle.
C'est pourquoi le groupe socialiste vous proposera une série d'amendements pour que cette loi de modernisation du dialogue social soit le point de départ d'un véritable essor de la démocratie sociale.
Nous vous proposerons notamment d'appuyer la représentativité des syndicats sur le vote des salariés. Toutes les organisations syndicales légalement constituées pourront ainsi y concourir.
Nous proposerons également le respect de la règle de l'accord majoritaire. Tout accord, pour être valide, devra avoir obtenu la majorité des suffrages exprimés lors du scrutin de représentativité le plus récent.
Ces propositions sont conformes aux recommandations du Conseil économique et social. Elles sont surtout indispensables si vous voulez donner à ce projet de loi l'envergure que son sujet mérite.
La loi protège souvent le plus faible, quand le contrat affermit la position du plus fort, si le rapport est inégal. Or, entre employeurs et employés, il existe une inégalité de fait. Si nos syndicats ne gagnent pas en représentativité et en force, cette inégalité de fait risque de se traduire en une inégalité de droit.
Cela est d'autant plus inquiétant que, dans les petites entreprises, c'est la question même de la présence syndicale qui se pose. Pour dialoguer, encore faut-il avoir un interlocuteur.
Comment vous faire confiance, monsieur le ministre délégué, alors que, depuis 2002, votre majorité s'est opposée à l'extension, donc à l'application d'un accord remarquable sur la présence syndicale dans les très petites entreprises, accord signé par tous les syndicats de salariés et l'Union professionnelle artisanale, représentant 800 000 entreprises ? Lorsque ces partenaires sociaux arrivent à un tel accord pour donner une réalité au dialogue social, ils trouvent, pour leur barrer la route, le MEDEF, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, la CGPME, et la complicité active du gouvernement UMP.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
Mme Raymonde Le Texier. Pour vous, le dialogue social tend surtout à substituer le contrat à la loi. Dans un paysage syndical faible et morcelé, c'est une aubaine pour les organisations patronales. Il n'y avait qu'à voir leur mine gourmande lors des auditions, à l'idée que, peut-être demain, le législateur n'interférerait plus du tout dans ce qu'ils considèrent comme leur pré carré... Un avenir qui rendrait impossible les lois Auroux, les 35 heures et tant d'autres avancées. Un rêve, vous dis-je !
Heureusement, nous n'en sommes pas là, et le projet de loi que nous examinons est bien trop restreint pour changer réellement la donne.
Pour les organisations de salariés, ce texte, qui donne du temps à la négociation, est tout de même une avancée. Il faut dire qu'elles ont été habituées à pire...
Ce texte aurait pu être l'occasion d'engager un véritable débat sur les exigences de la démocratie sociale. Ne reste pour nous, parlementaires, que la déception face à un rendez-vous manqué. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce projet de loi privilégie le dialogue social entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. Mais pourquoi oublie-t-il le dialogue au sein de l'entreprise, qui est loin d'être négligeable si l'on veut sortir de la logique des conflits ?
Je voudrais à cet égard formuler une observation, qui n'a pas encore été faite, sur la qualité des personnes que l'on appelle les partenaires sociaux. Qui sont-ils ? Ce sont ceux qui ont été désignés en vertu de la loi du 23 décembre 1946 et qualifiés alors de « représentatifs ». Mais le sont-ils encore aujourd'hui ? En réalité, ils le sont de moins en moins dans la mesure où le nombre de salariés syndiqués est de plus en plus faible.
Il faudra donc revenir sur la qualité de ceux que l'on appelle les partenaires sociaux et faciliter, comme certains le proposent, l'élection de représentants des salariés n'appartenant à aucun de ces syndicats dès le premier tour. Ces mesures favoriseraient la démocratie et le contact direct au sein des entreprises. À ce propos, je tiens à rappeler que les partenaires sociaux ne représentent pas uniquement les syndicats, mais qu'ils expriment aussi la voix des salariés, qui sont directement impliqués dans le fonctionnement de l'entreprise.
Il est nécessaire qu'un dialogue social direct puisse s'instaurer entre les salariés et les responsables de l'entreprise, avec ou sans les syndicats. En effet, la paix sociale dans l'entreprise dépend beaucoup plus des salariés que des syndicats, puisque les premiers participent directement à la vie de l'entreprise, qui est leur travail, leur emploi, contrairement aux seconds.
C'est la raison pour laquelle je souhaite que les salariés soient plus largement et directement informés par le chef d'entreprise de tout ce qui concerne cette dernière, notamment sa situation financière, l'état de ses outils industriels et technologiques, la position de ses concurrents et les difficultés qu'elle rencontre.
Chaque année, le chef d'entreprise ou son représentant devrait réunir l'ensemble de son personnel pour lui fournir les mêmes informations que celles qu'il adresse aux actionnaires lors des assemblées générales. C'est précisément ce que j'ai fait lorsque j'étais président de Dassault Électronique, et tout se passait très bien ! Plusieurs centaines de salariés étaient présents qui écoutaient, posaient des questions et étaient informés de la réalité de l'entreprise : le bilan, le compte d'exploitation, le plan de charges, les commandes obtenues, car tout cela intéresse les salariés.
Il faudrait aussi expliquer les raisons pour lesquelles l'entreprise a échoué dans la négociation de certains contrats ou dans l'exécution de commandes spécifiques, qu'il s'agisse d'un manque de compétitivité, de performances insuffisantes ou de coûts trop élevés.
Cette pratique montre aussi la considération dont fait preuve le chef d'entreprise à l'égard des salariés, qui constatent qu'il se déplace lui-même dans le but de leur expliquer directement la situation exacte de l'entreprise et les mesures à prendre pour l'améliorer.
Mais, pour cela, il faudrait aussi que les salariés soient formés, comme les syndicats, au fonctionnement des entreprises et qu'ils en connaissent les objectifs. Ils devraient être initiés à la gestion financière et à la promotion commerciale. Surtout, ils devraient comprendre que l'entreprise travaille pour satisfaire des clients et pas uniquement pour les actionnaires, les salariés ou les syndicats. En effet, ce sont en fait les clients qui dirigent l'entreprise, puisque ce sont eux qui décident ou non d'acheter les produits mis sur le marché.
Ainsi, tout doit être fait, dans l'entreprise, pour que les salariés, les syndicats et la direction travaillent ensemble à la satisfaction des besoins des clients. En cas d'échec, les salariés perdent leur emploi et se retrouvent au chômage, et, à terme, l'entreprise disparaît.
Je vous proposerai en ce sens un amendement visant à rendre obligatoires, d'une part, l'information directe des salariés sur la situation financière de l'entreprise par les responsables de l'entreprise au moins une fois par an, comme cela se fait dans les assemblées générales pour les actionnaires, et, d'autre part, une formation économique suffisante pour que les salariés comprennent les données qui leur sont communiquées ainsi que le fonctionnement de l'entreprise. Il faut donc informer les employés, mais également les former, pour qu'ils soient encore mieux informés ! (Sourires.)
Telles sont les réflexions, messieurs les ministres, mes chers collègues, que m'inspire la présentation de ce projet de loi, dont l'esprit me semble généreux. Encore faut-il savoir avec qui l'on discute... (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui vise à accorder aux partenaires sociaux un temps de négociation avant tout examen parlementaire d'un texte portant sur le travail, l'emploi et la formation professionnelle. Ce projet de loi arrive en fin de législature, après que des changements importants ont été apportés au code du travail - remise en question des 35 heures, plus de flexibilité et moins de sécurité - et après que les relations sociales ont été régulièrement malmenées - les exemples sont nombreux.
Ainsi, en 2004, le projet de loi relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social nous proposait un volet « dialogue social » qui était la traduction pure et simple des voeux du MEDEF. Ce texte revenait sur des acquis fondamentaux en permettant que des négociations en entreprises puissent aboutir à un résultat moins favorable que les conventions collectives de branche. Ce texte s'inscrivait tout à fait dans l'air du temps du gouvernement Raffarin, quand les licenciements étaient légion, quand les droits sociaux se trouvaient en régression permanente et quand commençait à poindre la nouvelle tendance : celle du salarié serviable et corvéable à merci, traité comme quantité négligeable.
A-t-on progressé sur le plan du dialogue social sous le gouvernement Villepin ? Pas vraiment, si l'on considère les mesures prises depuis juin 2005. Il y a eu, d'abord, le contrat nouvelles embauches, imposé par voie d'ordonnance alors qu'il réformait en profondeur le droit du travail. Il y a eu, ensuite, le contrat première embauche, adopté grâce au recours à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, puis abandonné face à la mobilisation des syndicats et de la jeunesse.
N'oublions pas non plus le récent tour de passe-passe visant à revoir la définition des critères qui établissent la représentativité des syndicats médicaux. Le Gouvernement a tout simplement changé les règles peu de temps après des élections syndicales dont les résultats lui ont été défavorables.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
Mme Gisèle Printz. Grâce à un artifice, il a fait en sorte que les gagnants ne soient plus représentatifs. Grosso modo, il s'est réservé le droit de choisir ses interlocuteurs, car ceux qui ont été élus démocratiquement ne lui plaisaient pas.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme Gisèle Printz. Enfin, alors que le Président de la République avait vanté les mérites du dialogue social devant le Conseil économique et social, le 10 octobre dernier, le Gouvernement nous soumettait, quelques jours plus tard, le projet de loi pour le développement et la participation de l'actionnariat salarié, dont le titre III intitulé « Dispositions relatives au droit du travail » visait, une fois encore et sans aucune concertation, à remettre en cause les droits collectifs des salariés et à fragiliser le contrat de travail.
Le présent projet de loi se veut donc celui du rachat, de la réconciliation avec les partenaires sociaux, après les avoir ignorés systématiquement. Mais avec un bilan aussi peu flatteur, on ne pouvait que douter de la capacité de ce gouvernement à rétablir le déséquilibre qui s'est instauré entre la loi et la négociation depuis le début de la législature. Les doutes ont été rapidement confirmés, car le texte qui nous est soumis est incomplet et insuffisant.
Il est incomplet, car il ne porte que sur les mécanismes du dialogue social, laissant de côté la question de la représentativité des partenaires sociaux. Pourtant, le Conseil économique et social vient de rendre un avis qui retient le principe d'une modification des règles de représentativité et de validation des accords. Les règles actuelles sont manifestement obsolètes !
Nous ne pouvons continuer d'appliquer un système qui repose sur une présomption de représentativité établie au profit de cinq organisations syndicales par un arrêté de 1966 selon lequel la validité d'un accord repose sur la seule signature d'une de ces cinq organisations. On ne peut plus parler de démocratie sociale, alors que les dispositions actuelles du code du travail privent un salarié sur deux du secteur privé du droit de participer à la désignation de représentants.
L'arrêté de 1966 répondait à des circonstances historiques particulières, mais le monde du travail a profondément changé depuis quarante ans. Cet arrêté doit donc être abrogé et remplacé par un dispositif aux termes duquel la représentativité des syndicats est démocratiquement vérifiée - et non plus administrativement octroyée - et fondée sur des élections professionnelles généralisées à tous les salariés.
Concernant la validation des accords, depuis la réforme « Fillon » du 4 mai 2004, un accord est considéré comme majoritaire s'il est signé par la majorité des syndicats en nombre, qu'ils représentent ou non la majorité des salariés. On peut ainsi se trouver en présence d'accords dits « majoritaires », mais qui ne sont approuvés que par une minorité de salariés. Cela n'est pas très démocratique !
Il serait donc préférable que tout accord, pour être valide, soit conclu par une ou plusieurs organisations syndicales ayant obtenu la majorité des suffrages exprimés lors du scrutin de représentativité le plus récent.
Mais le texte qui nous est soumis est également insuffisant. Tout d'abord, il ne comprend aucune précision s'agissant des modalités selon lesquelles les partenaires sociaux feront connaître leur intention d'engager une concertation. Comment cette dernière sera-t-elle formalisée ? Tout reste flou à cet égard.
Ensuite, cette procédure ne concerne pas les textes d'origine parlementaire, ce qui maintient intact le droit d'initiative parlementaire, mais permet ainsi au Gouvernement de « contourner l'obstacle » en faisant éventuellement présenter une proposition de loi par des amis politiques.
Par ailleurs, les questions essentielles de la protection sociale sont sorties du champ de la consultation annuelle, ce qui est regrettable.
Enfin, l'article 1er précise que ce texte n'est pas applicable en cas d'urgence. Or la déclaration d'urgence est une procédure précise, qui a été mise en oeuvre pour la totalité des textes concernant le droit du travail depuis 2002, à l'exception du texte relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes. Il aurait donc suffi de saisir le Parlement en urgence d'un projet de loi, comme ce fut le cas pour le contrat première embauche, pour ne pas avoir à consulter préalablement les partenaires sociaux. On ne progresse pas vraiment !
Aujourd'hui, tout salarié doit se voir reconnaître un droit effectif à la représentation syndicale et à la négociation collective. Ce principe, inscrit dans le préambule de la Constitution de 1946, doit devenir une réalité. L'ambition d'une démocratie sociale forte et renouvelée doit concerner tous les salariés, notamment ceux des petites entreprises, qui restent trop souvent exclus du dialogue social.
Votre texte, messieurs les ministres, ne répond pas à cette ambition. Faute de traiter de l'indispensable rénovation de notre démocratie sociale, il n'est pas à la hauteur des enjeux. Il ne s'agit que d'une démarche d'affichage, car le Gouvernement a beaucoup à se faire pardonner en matière de dialogue social...
M. Guy Fischer. C'est le moins que l'on puisse dire !
Mme Gisèle Printz. ... et il essaie d'effacer, par ce petit coup de publicité, tout le mal occasionné.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Eh bien !
Mme Gisèle Printz. Pour ma part, ayant été déléguée du personnel dans le secteur de la sidérurgie durant de nombreuses années, je sais l'importance des syndicats, de leur représentativité et le rôle primordial qu'ils jouent dans le monde du travail. Je connais aussi leurs difficultés à se faire entendre du patronat.
Je peux vous dire qu'un texte sur le dialogue social était très attendu. Malheureusement, celui qui nous est soumis aujourd'hui ne manifeste que des intentions vagues. Il devra donc être reconsidéré pour que nous ayons un outil de concertation digne de ce nom.
Pour conclure, messieurs les ministres, c'est avec étonnement que j'ai lu dans le journal Les Échos en date du 15 janvier que le Gouvernement avait décidé d'anticiper l'adoption de ce projet de loi, en réformant les règles de consultation des syndicats et en leur accordant un droit de saisine avant toute modification du code du travail. Honnêtement, on est en droit de se poser la question, à quoi sert le Parlement ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Guy Fischer. À quoi sert le débat ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous ne serez pas contournée, madame Printz ! Vous serez consultée et vous trancherez !
M. le président. La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le développement du dialogue social constitue l'un des principaux leviers de modernisation de notre pays.
Il est l'un des fondements d'une nouvelle démocratie sociale. Cette démocratie renouvelée suppose la mise en mouvement de toute la société, la participation de tous ses acteurs à l'élaboration des règles qui organisent la vie collective.
Encourager la confrontation réglée des différents intérêts, valoriser la négociation collective, assumer les conflits en les dépassant par des compromis, trouver un équilibre entre le contrat et la loi, délimiter les rôles respectifs de l'État et des partenaires sociaux, voilà quelques-uns des enjeux du dialogue social.
Appliqué aux relations individuelles et collectives du travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, le dialogue social peut être un puissant moteur de progrès. Il permet l'affirmation de nouveaux droits pour les travailleurs en les accordant à l'efficacité économique. À travers le dialogue social, l'intérêt collectif peut se construire au plus près de la réalité des situations et des besoins.
Dès lors, comment ne pas proposer une modernisation du dialogue social ? Comment ne pas faire de la concertation, de la consultation et de l'information - auxquelles j'ajoute volontairement la négociation -, autant de principes s'imposant à l'État lorsqu'il s'agit de légiférer sur le code du travail ?
Alors je dis « oui », bien sûr, à la modernisation du dialogue social !
Mais pourquoi si peu et si tard ?
Quel crédit pouvons-nous vous accorder ? Comment concilier la pratique souvent autoritaire de votre gouvernement et de votre majorité avec la modeste volonté aujourd'hui affichée ?
Il y a les mots, d'un côté, et la pratique, de l'autre.
Les mots, nous les avons déjà entendus : la loi Fillon de 2004 portait réforme du dialogue social. L'engagement était pris, d'une part, de renvoyer à la négociation interprofessionnelle tout projet de réforme du droit du travail et, d'autre part, de demander aux partenaires sociaux s'ils souhaitaient engager une négociation sur les projets de réforme envisagés.
Votre pratique, nous l'avons éprouvée : les travailleurs en ont subi les conséquences ! Qu'il s'agisse de la remise en cause du principe de faveur et de la hiérarchie des normes par le biais d'amendements, de l'institution du contrat nouvelles embauches par ordonnance, ou encore du contrat première embauche déposé sans concertation, vous avez démontré, avec une remarquable constance, le peu d'attention que vous accordiez à la délibération collective et, singulièrement, à la concertation avec les partenaires sociaux.
La politique par la preuve commence en rapportant les mots aux actes. Une bien étrange schizophrénie politique vous a conduits à entrer systématiquement en contradiction avec vous-mêmes. Cinq années où vous aviez tous les pouvoirs, à défaut de toutes les audaces, pour en arriver là !
Trop tard, donc ! Et aussi trop peu !
D'abord, le recours à une loi ordinaire ne paraît pas à la mesure des ambitions. Une loi organique serait plus à même de pérenniser l'obligation du dialogue social. D'autant qu'il s'agit de délimiter le champ d'action des pouvoirs publics, de préciser les relations entre l'État et les partenaires sociaux.
Ensuite, la possibilité de déroger à l'obligation légale par le biais d'une procédure d'urgence soulève bien des questions.
Certes, une telle procédure est un principe de notre droit public et elle se trouve désormais encadrée par une utile obligation d'information et de motivation. Mais ce qui est en cause en l'occurrence est non pas la lettre ni même l'esprit, mais bien votre pratique, constante et récurrente.
Depuis cinq ans, tous les textes réformant le code du travail, sauf un, ont fait l'objet d'une déclaration d'urgence. Dans ces conditions, votre texte s'annule lui-même, à moins qu'un nouveau gouvernement ne se montre demain plus respectueux des prérogatives du Parlement et des partenaires sociaux.
Il en va de même pour le recours à des textes d'origine parlementaire, ou encore à l'introduction de dispositions relatives au droit du travail par le biais d'amendements gouvernementaux.
À ce titre, l'épisode du contrat première embauche, introduit par un amendement cavalier, puis supprimé par une proposition de loi du groupe UMP, constitue l'archétype du détournement de procédure et du mépris du dialogue, qu'il soit parlementaire ou social.
Après le rappel de ces faits, vous comprendrez mieux, monsieur le ministre délégué, notre scepticisme et notre méfiance à l'égard des principes affichés aujourd'hui.
Par ailleurs, les modalités pratiques du dialogue social, tel que vous le préconisez, demeurent très floues dans votre texte. À commencer par les délais de saisine et de consultation des partenaires sociaux.
Au-delà, la concertation préalable avec les partenaires sociaux, puis leur déclaration d'intention en vue d'ouvrir une négociation, posent l'évident problème de leur représentativité.
Vous présentez comme un fait que la concertation préalable se déroulera avec « les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ». Mais justement, ni les premières et encore moins les secondes ne disposent aujourd'hui d'une vraie et pleine légitimité.
Comment se formera la décision majoritaire nécessaire à l'engagement de la négociation en ce qui concerne les organisations syndicales de salariés ? Quelle sera la légitimité de pseudo-accords majoritaires passés par des organisations qui ne représentent pas la majorité réelle des salariés ?
Moderniser le dialogue social ne consiste pas à en répéter indéfiniment la nécessité : il s'agit de le rendre possible, d'en améliorer concrètement la pratique. Tel aurait dû être l'objectif de ce texte. Aidés par de nombreux rapports et avis, vous aviez cinq ans pour être à la hauteur de cette tâche.
D'autant que, en ce qui concerne la représentativité, le financement des organisations syndicales et, plus largement, l'architecture des instances de consultation, les pistes de réforme sont déjà là.
La présomption de représentativité accordée par un arrêté de 1966 au profit de cinq organisations syndicales est désormais caduque.
L'idée même d'une représentativité présumée est aujourd'hui illégitime. D'autant que l'égalité de traitement est constamment bafouée, puisqu'il est demandé aux nouvelles organisations de prouver leur représentativité en répondant à un ensemble de critères contraignants.
La représentativité devrait désormais être mesurée à l'aune d'élections professionnelles généralisées à tous les salariés. Ces élections organisées dans les entreprises et à travers des structures territoriales de branches permettraient une mesure légitime de la représentativité réelle, et non pas supposée. La représentativité des syndicats serait ainsi démocratiquement vérifiée, et non plus administrativement décrétée.
À cette condition, le principe de l'accord majoritaire prend enfin tout son sens.
Pour qu'un accord collectif soit validé, il doit être ratifié par des organisations représentant ensemble la majorité des salariés, ou ne rassemblant pas contre elles une majorité. Une telle règle pourrait s'appliquer à tous les niveaux : à l'échelon interprofessionnel, dans la branche professionnelle et dans l'entreprise.
Concernant le financement de l'activité syndicale, pourquoi ne pas envisager un plan de financement public transitoire et modulable ? Sans remettre en cause le principe de la cotisation, fondement de l'indépendance des organisations, la ventilation des moyens alloués pourrait être fonction des résultats obtenus aux élections de représentativité et du nombre d'adhérents. Par ailleurs, la rémunération des représentants syndicaux ainsi que leurs parcours professionnels doivent être garantis.
Mais il convient d'aller plus loin encore, car le dialogue social ne se décrète pas : il s'organise. Il repose largement sur l'existence d'un syndicalisme de masse, représentatif et acteur de négociations permanentes et étendues.
Afin de ne pas continuer à exclure l'essentiel des salariés des très petites entreprises, des logiques territoriales devraient s'imposer : non seulement au niveau d'une branche, mais aussi - pourquoi pas ? - à l'échelle d'un site, lorsque l'éclatement des activités le justifie.
Pour favoriser les adhésions, et au-delà des incitations fiscales, nous devrions évoluer vers un syndicalisme dans lequel l'appartenance à une organisation syndicale permet aux salariés, ou aux demandeurs d'emploi, de bénéficier de droits et de services spécifiques, comme c'est déjà le cas en Belgique ou en Allemagne.
Enfin, les processus de codécision gagneraient à être développés et institutionnalisés dans les conseils de surveillance des entreprises, avec une codification accrue des conditions de négociation collective et une délimitation responsable du droit de grève.
Par ailleurs, pourquoi ne pas reprendre à votre compte la proposition de création d'un conseil du dialogue social donnant davantage de lisibilité au fonctionnement des processus de consultation et de négociation ?
Dans le même esprit, la répartition entre les domaines législatif et réglementaire et celui de la négociation collective n'est toujours pas clairement précisée. La Position commune sur les voies et moyens de l'approfondissement de la négociation, signée en 2001, avec les partenaires sociaux, aurait mérité un utile prolongement dans le présent texte.
Ce sont là les ingrédients d'un nouveau contrat de démocratie sociale, d'un échange « gagnant-gagnant », qui réconcilierait la recherche de l'efficacité, la production des richesses avec le partage de nouveaux droits et de solidarités accrues.
Tels sont les éléments qui auraient dû être aujourd'hui au centre de nos débats !
Votre projet de loi ne fait qu'entamer ce processus : il pose une première pierre, mais sans aller assez loin. Nous ne nous y opposerons pas, mais nous nous abstiendrons.
Cependant, quel dommage, monsieur le ministre délégué, de ne pas être allé au-delà de l'incantation, de la pétition de principe ! Quel dommage de ne pas être allé plus avant dans la construction et dans l'organisation effective du dialogue social !
Si les mots n'avaient pas pris le pas sur la pratique, votre gouvernement et vous-même seriez aujourd'hui au rendez-vous !
Mais la politique par la preuve est encore à venir ... (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avant de répondre aux orateurs, je souhaite compléter mes échanges avec Mme le rapporteur.
Madame le rapporteur, une fois encore, je vous remercie sincèrement de la qualité de vos travaux et des échanges que nous avons eus, qui nous ont permis de répondre à un certain nombre d'interrogations.
Je vous remercie également d'avoir bien compris les équilibres constitutionnels dont ce texte, qui est délicat, doit tenir compte. Il s'agit de modifier les pratiques du Gouvernement sans affecter les prérogatives constitutionnelles du Parlement et du Gouvernement, telles qu'elles sont prévues par l'article 39 de la Constitution, singulièrement les prérogatives du Parlement en matière d'amendement et de transposition des accords collectifs, qui doivent être respectées.
L'essentiel est qu'il existe un dialogue entre le Parlement et les partenaires sociaux, mais tel n'est pas l'objet du présent texte. Ce dialogue relève de la responsabilité de la Haute Assemblée, et du Parlement en général.
Madame le rapporteur, la notion d'agenda partagé, formule utilisée par Dominique-Jean Chertier dans son rapport, est inspirée de la pratique sociale constatée en Europe, plus particulièrement aux Pays-Bas.
Même si nous connaissons les limites des rapports dont le Parlement est demandeur et si nous savons qu'ils sont souvent lourds pour le Gouvernement, le rapport sur les concertations et les consultations effectuées au cours de l'année ne me paraît pas être une simple formalité. Il est en effet important pour la transparence du dialogue social que les échanges soient rendus publics. Cela est conforme aux principes qui ont été posés lors de la préparation du projet de loi et au cours des échanges que nous avons eus avec les partenaires sociaux.
J'ai bien entendu, madame le rapporteur, vos préoccupations concernant la procédure parlementaire et le respect d'un certain nombre de temps. Certains éléments relèvent toutefois du règlement des assemblées. En préparant le texte, j'ai eu l'occasion d'en discuter avec le président du Sénat et celui de l'Assemblée nationale, mais ce sujet relève de la seule décision de chacune des assemblées.
M. Gournac a rappelé, et il était important de le faire, le fondement constitutionnel de la négociation collective, à savoir le préambule de la Constitution de 1946, ainsi que la place de la loi et du contrat.
Ce texte s'inscrit dans une longue histoire. Brièvement, il est le fruit d'un dialogue social. Ainsi, l'accord sur les seniors et les dispositifs en matière de suivi salarial sont le résultat d'un dialogue social approfondi.
Je tiens à dire à M. Gournac que la couverture conventionnelle globale a beaucoup progressé entre 1997 et 2005, passant de 93,7 % à 98 % des salariés non agricoles. Vous le voyez, nous n'avons pas été en panne d'accords et de dialogue social !
M. Nogrix s'est exprimé avec le tempérament que nous lui connaissons. Je rappelle simplement que la CFDT et le MEDEF souhaitaient une réforme constitutionnelle. Il nous a semblé, aux uns et aux autres, y compris en définitive à ces deux organisations, qu'une telle réforme n'était sans doute pas nécessaire. Je rappelle le principe posé dans le préambule de la Constitution de 1946.
Les relations du travail seront profondément modifiées. Un décret devra être pris après un temps de concertation et de consultation devant la Commission nationale de la négociation collective. Cela va changer la donne, j'en prends le pari, et ce quel que soit le gouvernement.
Ce pari, je l'ai déjà en partie gagné ce matin. J'ai en effet eu à opposer à l'un de mes collègues venu me trouver le texte qui impose que la Commission nationale de la négociation collective soit saisie de tout avant-projet de loi et puisse en discuter. Nous allons assister à une évolution des mentalités et nous nous rendrons compte dans vingt-cinq ans, à la manière des Pays-Bas, que ce texte aura changé la donne dans le domaine des rapports sociaux.
M. Nogrix ayant évoqué la loi pour l'égalité des chances, j'informe la Haute Assemblée que, entre les mois de septembre et de décembre 2006, nous avons permis à 22 000 jeunes sans aucune qualification d'entrer dans la vie active, dans une entreprise, et de bénéficier d'une formation, à la suite de l'adoption de la loi sur l'accès des jeunes à la vie active en entreprise qui est elle-même due à une initiative du président du groupe UMP à l'Assemblée nationale.
Vous le voyez, les dispositions que vous avez votées au printemps - les décrets d'application ont été publiés au mois de septembre - ont des effets concrets. Je tenais à vous donner cette information, car les statistiques du mois de décembre viennent de nous être communiquées.
M. Bernard Seillier a évoqué le coût social de l'absence de dialogue social, et il a raison, mais il ne faut pas oublier son coût économique. Nous devons, les uns et les autres, le mesurer. Il a par ailleurs abordé la question de l'architecture du dialogue social. Je l'ai dit tout à l'heure, une simplification est nécessaire. Ce sera une deuxième pierre, monsieur Madec, sur laquelle il faudra continuer de construire.
Par ailleurs, la question de la représentativité a été évoquée. En revanche, celle de la validité des accords n'a pas été abordée, sauf par vous, monsieur Fischer. Le Conseil économique et social mène une réflexion sur ce sujet. Entre la majorité relative qu'il propose et l'accord majoritaire et le droit d'opposition, il y a sans doute une voie à trouver, en même temps que le dialogue social se construira.
Un autre point très important a été abordé : le financement de la vie syndicale. En la matière, à l'instar de ce qui a été fait voilà un peu plus d'une quinzaine d'années pour les partis politiques, il est nécessaire de se pencher sur la transparence des financements des organisations, qu'elles soient professionnelles ou syndicales, d'ailleurs.
Monsieur Fischer, je peux vous le garantir, il s'agit non pas d'instrumentaliser le dialogue social, mais tout simplement d'apporter une souplesse à la négociation collective. Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des textes que vous avez évoqués.
S'agissant des dispositions relatives aux mutations économiques, les partenaires sociaux ont négocié pendant plus d'un an avant de constater qu'ils étaient en désaccord. Ces dispositions ont été soumises à la Commission nationale de la négociation collective. Le processus s'est poursuivi, car, constitutionnellement, le Gouvernement et le Parlement conservent naturellement leurs capacités d'initiative. Il s'agit là d'un exemple typique de négociations engagées, mais sans aboutir. Le Gouvernement s'en est néanmoins largement inspiré pour son texte sur les mutations économiques.
Il suffit de voir combien d'accords de méthode et d'accords de gestion prévisionnelle des emplois et compétences sont aujourd'hui signés par toutes les organisations.
Certes les négociations n'aboutiront pas toutes, parce que certains sujets sont très difficiles, mais nous poussons pour que cela soit le cas.
Ainsi, s'agissant d'un sujet d'actualité, la pénibilité au travail, nous disons que les partenaires sociaux doivent reprendre leurs négociations. Hier soir, nous leur avons proposé qu'un groupe d'appui interadministratif, piloté par l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, les aide, comme nous l'avons fait pour l'accord sur les seniors ou dans le cadre de la négociation de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, non pas pour négocier à leur place, mais simplement parce que cela peut avoir un effet catalyseur qui leur permettra d'avancer. Toutefois, il appartient aux partenaires sociaux de faire avancer les négociations. Voilà pourquoi nous leur avons proposé de les reprendre sur ce sujet important.
Enfin, sur l'articulation entre la modernisation du dialogue social et la réforme de la représentativité, si l'avis du Conseil économique et social est important, il n'a pas pour autant réglé les problèmes. Concernant les seuils de représentativité, quels sont les critères ? Certains ont évoqué le nombre d'adhérents, ainsi que la question de la transparence concernant ce nombre. Il s'agit là de sujets importants, que nous aborderons dans quelques jours.
Madame Le Texier, la loi du 4 mai 2004 ne remet pas en cause le principe de faveur. (Mme Raymonde Le Texier s'exclame.) Je tiens à le dire devant la Haute Assemblée. L'accord collectif ne peut pas déroger à la loi, sauf s'il est plus favorable que la loi.
Vous évoquiez le CPE ; j'ai déjà mentionné les concertations sur l'emploi des seniors ou sur les salaires. Je pourrais également parler du travail qui a été fait s'agissant de la loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social
Monsieur Dassault, vous avez évoqué, ainsi que Mme Le Texier, la question du nombre de salariés adhérant à une organisation syndicale.
Je crois qu'on ne peut pas comparer la France au Danemark. Il n'est pas non plus possible de la comparer à la Belgique, car les organisations y sont distributrices. Or, s'agissant de la possibilité évoquée par M. Nogrix que l'adhésion ait pour contrepartie des bénéfices, ou plutôt des dividendes, versés à l'adhérent, une telle conception n'appartient pas, me semble-t-il, à notre culture.
Je rappelle par ailleurs qu'il existe au Danemark une procédure de sauvegarde pour les 13 % de salariés n'adhérant pas à une organisation syndicale. Vous m'accorderez toutefois que cette procédure constitue une sorte de principe de « défaveur ».
Je ne suis pas non plus certain que la proposition de Mme Royal de rendre obligatoire l'adhésion à un syndicat soit réellement compatible avec la liberté syndicale, ni qu'elle constitue une avancée de la démocratie sociale ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et si les salariés sont récalcitrants, on les enverra à l'armée !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je crois d'ailleurs que cette proposition est contraire à la Constitution (Nouvelles protestations sur les travées du groupe socialiste.) ...
M. Patrice Gélard. En effet !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. ...et je vois avec satisfaction que le doyen Gélard semble m'approuver sur ce point.
En ce qui concerne le rôle du chef d'entreprise, monsieur Dassault, celui-ci est naturellement essentiel, mais je rappelle que, dans le cadre des accords de gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, les GPEEC, le chef d'entreprise a le devoir d'informer ses salariés.
Madame Printz, monsieur Madec, je tiens à vous dire qu'il ne s'agit vraiment pas ici d'un texte du MEDEF ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Voilà !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je vois que cette précision soulage M. le président de la commission des affaires sociales. (Sourires.)
Le texte que souhaitait au départ le MEDEF était d'une nature différente.
Mme Raymonde Le Texier. Il était pire !
M. Guy Fischer. Vous avez déjà fait tellement de cadeaux aux patrons qu'ils n'ont pas de raison de se plaindre !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Quant à la question du dialogue social dans l'entreprise, je voudrais simplement rappeler à Mme Printz qu'en 2004 des négociations collectives ont eu lieu dans 87 % des établissements comptant au moins vingt salariés. Voilà qui témoigne de la vitalité du dialogue social.
Monsieur Madec, vous parliez d'une « première pierre »... D'autres pierres doivent naturellement être posées. Le prochain sujet traité concernera certainement les questions de la représentativité des syndicats et de la validité des accords. Je crois que nous nous dirigeons dans ce domaine vers une transformation profonde.
En effet, personne jusqu'à présent n'avait osé remettre en cause l'arrêté de 1966, pas plus sous la précédente législature que sous les autres. Or le Gouvernement, à travers les missions qu'il a confiées à Raphaël Hadas-Lebel et à Dominique-Jean Chertier, a montré qu'il acceptait l'idée que l'on revoie en la matière toutes les « règles du jeu ».
Je pense que l'on peut reconnaître à notre gouvernement d'avoir eu le courage d'aborder ce sujet, ce que personne jusqu'ici n'avait fait, et ce qui nous conduit à avoir aujourd'hui ce débat sur le dialogue social ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
5
Nomination de membres d'un organisme extraparlementaire
M. le président. Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé deux candidatures pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Alain Vasselle et Bernard Cazeau membres du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie.
6
Modernisation du dialogue social
Suite de la discussion et adoption définitive d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de modernisation du dialogue social, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence.
Nous passons à la discussion des articles.
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 6, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud-Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 131-1 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« La représentativité au niveau national des organisations syndicales de salariés légalement constituées et des organisations représentant les employeurs est appréciée en retenant les résultats d'une élection de représentativité organisée tous les cinq ans dans l'ensemble des entreprises de chacune des branches professionnelles et permettant à tous les salariés et à tous les employeurs d'y participer.
« La consultation électorale respecte les principes généraux du droit électoral. Elle se déroule dans chaque entreprise sur les lieux de travail et pendant le temps de travail. »
La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, notre amendement a pour objet de donner une nouvelle impulsion au dialogue social dans notre pays.
Le projet de loi qui nous est présenté est en effet loin d'épuiser le sujet et de satisfaire la nécessité de réforme que nul ne peut plus nier aujourd'hui.
Il en résulte une ambiguïté qui a d'ailleurs lourdement marqué le débat à l'Assemblée nationale. En effet, le Gouvernement a fait en sorte que le rapport du Conseil économique et social sur le dialogue social soit remis au moment où avait lieu la discussion du projet de loi en séance publique.
Or le Conseil économique et social, qui traite dans son avis du dialogue social, a fort logiquement abordé aussi de front la question de la représentativité, l'un et l'autre étant en effet inséparables.
Les faiblesses du dialogue social en France trouvent leur source dans le fait que la représentativité des partenaires sociaux est contestée. En effet, cette représentativité n'est pas aujourd'hui mesurable, ce qui entretient la faiblesse du dialogue social et contribue à alourdir le climat social.
Il est regrettable que le Gouvernement ait voulu attendre les dernières semaines de la législature pour nous présenter ce projet de loi. Il est vrai que cette course de lenteur aura permis de faire passer sans aucune concertation nombre de dispositions préjudiciables aux intérêts des salariés...
Nous en avons eu l'illustration encore récemment avec la limitation du temps réservé au travail des conseillers prud'hommes. Cette disposition ne surprend guère quand on sait que les prud'hommes rendent souvent des jugements favorables aux salariés et que ces jugements sont à 70 % confirmés en appel. Il faut aussi se rappeler que plusieurs conseils de prud'hommes ont souligné en 2006 la non-conformité du contrat nouvelles embauches au droit international.
Une autre illustration se trouve, dans le même projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, dans l'article relatif aux modalités d'information et de consultation dans les entreprises de plus de trois cents salariés.
Toutefois, vous avez atteint le comble du cynisme en utilisant comme véhicule législatif pour neutraliser le principe de faveur le projet de loi résultant de l'accord unanime des partenaires sociaux sur la formation tout au long de la vie et le droit individuel à la formation.
Après avoir ainsi mis en place, tout au long de cette législature, les mesures souhaitées par le MEDEF, vous nous présentez aujourd'hui ce « demi-projet de loi », par lequel vous feignez d'obliger à la concertation avant toute réforme, alors qu'en réalité ce texte n'oblige à rien. Il faudrait être d'une grande naïveté pour y croire, ce que nous avons déjà amplement démontré.
Nul ne défend la pérennisation de l'arrêté de 1966, qui fixe la représentativité des syndicats en fonction de ce qu'était la situation dans les années soixante. Le tissu des entreprises s'est évidemment modifié, l'implantation syndicale a évolué et de nouveaux syndicats sont apparus, notamment l'Union nationale des syndicats autonomes - l'UNSA -, la Fédération syndicale unitaire - ou FSU - ou encore Solidaires.
Dans les entreprises, les situations sont extrêmement hétérogènes. La plupart des petites entreprises sont non seulement dépourvues de délégués syndicaux, mais aussi de représentants du personnel, tandis que des pressions sont exercées contre les délégués et contre les salariés voulant se syndiquer.
La représentativité des organisations patronales n'est d'ailleurs pas mieux assurée.
M. Jean Desessard. C'est exact !
Mme Raymonde Le Texier. Si le MEDEF s'arroge le droit de parler au nom de tous les employeurs, il ne représente guère en fait que les entreprises du CAC 40. Sa représentativité a ainsi été contestée dans plusieurs branches où il a été déclaré non représentatif, notamment celle du caoutchouc.
Alors que l'Union professionnelle artisanale, l'UPA, cherche à développer le dialogue dans les entreprises artisanales, est-il normal que le MEDEF puisse bloquer l'application de l'accord de 2001 sur ce sujet ?
Une telle situation n'est pas démocratique. Elle n'est pas saine. Tous les salariés et les employeurs, quelle que soit la taille de l'entreprise, doivent pouvoir désigner leurs représentants.
Notre amendement ne vise pas à indiquer en détail quelle doit être la procédure à suivre pour de telles élections. Nous souhaitons simplement poser le principe d'élections de représentativité, qui pourra être mis en oeuvre soit par des élections spécifiques, soit à l'occasion des élections prud'homales.
Il s'agit là précisément d'un type de question qui doit faire l'objet d'un débat avec les partenaires sociaux, qu'ils bénéficient aujourd'hui de la présomption irréfragable de représentativité ou qu'ils soient légalement constitués.
Le principe d'élections de représentativité permettant de mesurer exactement l'audience des syndicats devrait être posé dès maintenant. Il est regrettable que le Gouvernement n'ait pas saisi l'opportunité de ce débat public pour le faire.
M. le président. L'amendement n° 16 rectifié, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le titre III du livre Ier du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Une consultation des salariés, dénommée « élection professionnelle de représentativité », est organisée tous les cinq ans, le même jour dans l'ensemble des entreprises de chacune des branches professionnelles afin d'apprécier la représentativité au niveau national des organisations syndicales légalement constituées.
« Cette consultation à laquelle participent tous les salariés, quels que soient leur contrat de travail et leur statut satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 433-4 et L. 423-7 respecte les principes généraux du droit électoral. »
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, mes explications vaudront également pour l'amendement n° 17. Ce n'est pas que nous manquions de temps : la majorité sénatoriale reste quasiment muette et n'amende pas le texte, de façon à ce qu'il soit adopté conforme.
M. Jean Desessard. Ce n'est pas le cas de M. Dassault !
M. Guy Fischer. En fait, les dispositions de ces deux amendements se complètent : il s'agit de deux pièces maîtresses devant permettre le renforcement du rôle des partenaires sociaux.
Nous livrons donc au débat ces deux questions étrangement absentes d'un texte dont l'objet est pourtant la réforme du dialogue social. L'une a trait à l'exigence d'une véritable représentativité de ses acteurs, l'autre tend à l'affirmation du principe majoritaire.
Nous défendons depuis de nombreuses années l'idée que la revalorisation de la négociation collective et du dialogue social est conditionnée notamment par l'existence d'organisations syndicales fortes.
Pour renforcer ces organisations, il convient d'abord de consolider la légitimité des acteurs et des accords qu'ils signent. Or - je cite les propos de Jean-Dominique Simonpoli, directeur de l'association Dialogues - « si démocratie politique et démocratie sociale n'ont pas la même signification, il n'en demeure pas moins que seul le fait majoritaire confère à un accord la légitimité nécessaire. »
On ne peut donc à la fois vouloir conférer aux partenaires sociaux un rôle plus grand dans le processus de production des normes sociales - ce qui conduit certains à souhaiter une stricte transcription législative des accords - et refuser de s'assurer de la profonde légitimité des partenaires sociaux.
C'est pourquoi, avec beaucoup de constance, nous déposons régulièrement ces deux amendements qui visent, d'une part, à refonder la représentativité syndicale sur le vote de toutes les catégories de salariés, y compris ceux des petites et moyennes entreprises, et, d'autre part, à retenir le principe de l'accord majoritaire comme règle de validité des accords, quel que soit le niveau de négociation.
Comme vous n'aurez pas manqué de le remarquer, ces deux amendements déclinent la proposition faite par la Confédération générale du travail, la CGT, et la Confédération française démocratique du travail, la CFDT, qui a fait suite à l'avis du Conseil économique et social. Nous avons repris à la lettre cette proposition dans l'amendement n° 15. Je regrette d'ailleurs que ce dernier n'ait pas été appelé avant celui-ci, ce qui aurait mis en évidence la cohérence de notre démarche...
Quoi qu'il en soit, nos amendements ont pour conséquence indirecte d'abroger l'arrêté de 1966. Le rapport du Conseil économique et social indique à cet égard : « Dès lors, la reconnaissance de "représentativité nationale" devient plus "incontestable" qu'"irréfragable". Elle ne pourrait être revue qu'en fonction des choix exprimés par les salariés lors de consultations électorales dont la périodicité et les modalités restent à définir. »
Nous prévoyons ainsi que soit organisée tous les cinq ans une consultation des salariés dénommée « élection professionnelle de représentativité » servant à apprécier la représentativité au niveau national des organisations syndicales légalement constituées.
Cela suppose évidemment que l'on trouve les moyens de permettre à tous les salariés, quelle que soit la taille de leur entreprise, de désigner leurs délégués. Cela suppose aussi que l'on s'entende sur le choix de l'indicateur de représentativité à retenir : élections prud'homales ou non.
Il ne s'agit pas là d'obstacles insurmontables qui nous empêcheraient de nous entendre sur le principe d'un test national de représentativité.
S'agissant des règles de négociation collective, largement bouleversées par la réforme Fillon de 2004, qui a donné sa pleine autonomie à l'accord d'entreprise par rapport à l'accord de branche, y compris lorsque l'accord d'entreprise est moins-disant socialement, et qui a préféré l'opposition à une adhésion à la négociation, nous faisons quant à nous le choix inverse. Nous souhaitons adopter le principe selon lequel, à chaque niveau de négociation, un accord serait valide à condition d'avoir été signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentant une majorité de salariés en voix, et non pas une majorité d'organisations en nombre.
Voilà, mes chers collègues, les principales observations que je souhaitais faire à l'appui des amendements nos 16 rectifié et 17.
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Avant le titre Ier du livre Ier, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 100-1. - La représentativité nationale des organisations syndicales de salariés est appréciée en retenant les résultats d'une élection de représentativité organisée tous les cinq ans au niveau des branches professionnelles. Cette élection à laquelle participe l'ensemble de la population active respecte les principes généraux du droit électoral. Ne peuvent se présenter à l'élection de représentativité que des organisations syndicales, constituées conformément aux articles L. 411-1 et suivants du présent code et respectant les valeurs républicaines.
« Un décret en Conseil d'État fixe des conditions à la présentation des organisations syndicales en fonction de leur nombre d'adhérents, les modalités d'organisation du scrutin, ainsi que les modalités de participation au scrutin de la population active non concernée par les articles L. 433-4 ou L. 423-7. » ;
2° Dans l'article L. 132-2, la référence : « L. 133-2 » est remplacée par la référence : « L. 100-1 ».
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, mes chers collègues, je voudrais d'abord faire une remarque sur les propos de M. le ministre délégué. Quel fantastique orateur ! (Sourires.)
Quel talent, monsieur le ministre délégué ! Certains parviennent à vendre des réalisations. D'autres vendent des promesses. Quant à vous, c'est encore mieux : vous vendez le contraire de ce que vous avez fait au cours de la législature ! (Rires sur les travées du groupe socialiste et sourires sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
N'est-ce pas formidable ? votre action de ces dernières années contredit totalement votre argumentation !
Pour en venir à l'amendement n° 30, il ressemble fortement aux amendements défendus par Mme Le Texier et par M. Fischer, sauf qu'il élargit le corps électoral à l'ensemble de la population active, en particulier aux chômeurs et aux emplois précaires.
Le dialogue social ne peut avoir d'autre vertu que d'instaurer la démocratie sociale.
Cela suppose, d'une part, que la représentativité de tous les acteurs concernés par le contrat social, je dis bien « tous », soit garantie par leur vote et, d'autre part, qu'une seule organisation même représentative ne puisse engager par son accord l'ensemble du corps des votants si elle est minoritaire.
Mes collègues ici présents et, avant eux, ceux de l'Assemblée nationale ayant déjà argumenté en faveur d'une élection de représentativité au niveau d'une branche professionnelle, je m'en tiendrai à relever que ce texte exclut du pacte social toute une partie de la population active.
Permettez-moi de m'insurger contre le fait que, dans une démocratie, la représentation et l'expression d'une population particulière ne soient pas mieux assurées : je veux parler des chômeurs et des travailleurs précaires.
Ainsi, par le simple fait de perdre son emploi ou d'avoir un emploi précaire, un actif deviendrait tout à coup passif, simple usager, sujet plus qu'acteur, isolé, sans mandataire ni médiateur. Bref, statistique et invisible.
Je parle ici des 2,172 millions de personnes que comptabilise le ministère de l'emploi au titre des chiffres officiels du chômage, et aussi des 2,276 millions de personnes non comptabilisées mais néanmoins au chômage dans les départements d'outre-mer, demandeurs d'emploi temporaire ou à temps partiel, ou « dispensées de recherche d'emploi », ou cherchant un emploi mais ayant travaillé plus de soixante-dix-huit heures dans le mois, ou « demandeurs d'emploi non immédiatement disponibles ». Sans oublier tous les autres précaires du travail qui, comme ces 4,4 millions, sont privés des possibilités d'expression et des moyens de pression dont disposent les travailleurs en activité, et donc privés de place dans l'échange social.
J'attendais de ce projet de loi de modernisation du dialogue social la prise en compte de la précarité croissante de notre société. Or, pas de dialogue social sans démocratie sociale, pas de démocratie sociale sans existence sociale, pas d'existence sociale sans mandataire ni médiateur.
Le droit d'exister des chômeurs et des travailleurs précaires, c'est le droit d'être représentés partout où leurs intérêts sont en jeu. Déjà exclus du marché du travail une fois, ils ne veulent pas non plus être exclus de la citoyenneté. Liés par une réalité collective au-delà de leur situation et problématique individuelles, ils doivent, comme tout un chacun, pouvoir faire entendre leur voix et faire valoir leurs droits.
Sauf à vouloir instaurer cette « double peine », c'est donc bien la population active dans son ensemble qui doit être concernée par le dispositif de dialogue social que vous proposez et par l'élection de représentativité des organisations syndicales que nous vous demandons.
Permettre aux demandeurs d'emploi de prendre part à l'élection des organisations syndicales favoriserait en outre une action réconciliant la défense des salariés en place et celle des demandeurs d'emploi.
M. le président. L'amendement n° 15, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
La représentativité doit, en particulier, être fondée sur les élections professionnelles généralisées à tous les salariés. À cette fin, il est proposé aux organisations d'employeurs et de salariés de définir par accords collectifs les modalités des élections professionnelles d'entreprise et des dispositifs de représentation territoriale de branche là où ces élections d'entreprises ne peuvent avoir lieu. La mise en oeuvre de ce processus devra permettre de disposer d'une mesure de représentativité au niveau territorial et des branches professionnelles au plus tard le 1er janvier 2010. Sur la base de ces représentativités mesurées, le principe de l'accord majoritaire sera appliqué aux différents niveaux de la négociation collective.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Mon collègue Roland Muzeau l'avait annoncé dès le stade de nos travaux en commission, nous avons tenu à reprendre et à défendre la proposition d'amendement commune à la CFDT et à la CGT.
Symboliquement donc, mais aussi parce que, au fond, et ce depuis longtemps déjà, nous partageons l'idée que l'on ne peut traiter de la rénovation de notre démocratie sociale sans refonder la légitimité de ses acteurs et sans leur donner les moyens juridiques et financiers pour faire vivre cette dernière, nous portons cet amendement devant le Sénat.
Comme l'explicite son objet, en intégrant deux des points principaux des conclusions de l'avis rendu par le Conseil économique et social à la fin du mois de novembre dernier, dont le vote, je tiens à le préciser, a été acquis à une large majorité - 132 voix pour, 58 contre -, et ce malgré de vraies divergences, le présent amendement donne une véritable ambition à la réforme de la démocratie sociale en proposant de fonder la représentativité syndicale sur l'élection des salariés, y compris ceux des petites entreprises, et en avançant vers la mise en place des accords majoritaires.
Dominique Olivier, secrétaire confédéral de la CFDT, nous a rappelé lors de son audition qu'un accord peut être valablement signé aujourd'hui par une seule organisation syndicale si les autres s'abstiennent d'exercer leur droit d'opposition, et que chaque organisation se voit reconnaître le même poids.
Nous nous accordons à peu près tous sur la nécessité de redonner de la crédibilité au dialogue social et à ses acteurs.
Nous savons tous pertinemment que le contexte syndical dans lequel a été pris l'arrêté du 31 mars 1966 posant le caractère irréfragable de la représentativité des cinq confédérations existantes alors a évolué. Le nombre de syndiqués a chuté et de nouveaux syndicats sont apparus.
Reconnaissons ensemble que cette situation est aujourd'hui dépassée. Voyons, comme le souligne le rapport Hadas-Lebel, que la jurisprudence s'est éloignée de la lettre des critères posés en termes de représentativité pour les infléchir et les compléter dans le sens d'une adaptation plus fine aux réalités d'un syndicalisme de représentation plus que d'adhésion.
Mettons sur un pied d'égalité toutes les organisations syndicales dès lors qu'elles sont légalement constituées, et tirons-en les conséquences qui s'imposent, comme l'a fait le Conseil économique et social. Abrogeons l'arrêté de 1966, fondons la représentativité sur le vote de tous les salariés et, en ce qui concerne les accords, allons jusqu'au bout du principe majoritaire.
J'ai bien entendu M. le ministre délégué dire aux défenseurs d'une telle position qu'il jugeait inopportun d'aborder ce sujet dans le cadre du présent texte. Madame le rapporteur, ce matin, a plaidé dans le même sens en donnant un avis défavorable sur cet amendement.
Je ne partage évidemment pas cette analyse, qui peine à cacher un manque de courage que la presse dans son ensemble n'a pas manqué de relever. Voici, pour preuve, quelques titres relevés : « Villepin botte en touche », « Le Premier ministre enterre la réforme », « Le Gouvernement tergiverse ».
Je ne partage pas plus les arguments développés pour tenter de justifier qu'il faudrait ne pas poser les grands principes de la réforme dès aujourd'hui - l'amendement fait référence à 2010 - pour laisser ensuite aux partenaires sociaux le soin de lui donner tous les prolongements nécessaires.
Vous nous dites, monsieur le ministre délégué, qu'il vous paraît indispensable de rapprocher les points de vue des organisations syndicales et patronales et, dans le même temps, que le fait d'accélérer la réforme de la représentativité irait à l'encontre de la procédure de concertation initiée par le présent texte. Nous n'y comprenons plus rien, c'est contradictoire !
Je remarque simplement que votre désir de ne pas vous heurter à l'opposition de certains syndicats est bien soudain, variable selon les sujets, en particulier lorsqu'une partie de l'UMP et du MEDEF hésite. Mais, surtout, je me dois de vous dire ce que vous savez déjà et qu'il convient de lire entre les lignes de ce projet de loi : le pouvoir politique doit pouvoir trancher, essentiellement lorsque les positions des uns et des autres sont éloignées, sinon aucune réforme ne pourrait plus avoir lieu.
S'agissant de la question de la représentativité, les points de vue des organisations syndicales et patronales sont divergents, les lignes de fracture dépassant les clivages habituels.
Après le rapport Hadas-Lebel, le Conseil économique et social a été saisi, à la demande du Premier ministre ; son président a piloté le groupe de travail ; il y a eu débat, échanges, concertation ; un avis consensuel a été rendu. Le Président de la République s'est engagé, le pouvoir politique devait en tirer les conséquences et acter, dès maintenant, des principes guidant la réforme du dialogue social.
Nous regrettons vivement que vous n'ayez pas eu ce courage politique. Ce texte, de facto minimaliste, insuffisant, ne permet pas aux sénateurs communistes de s'engager, à ce stade du débat, en faveur de son adoption.
Nous nous abstiendrons donc, nous l'avons dit, mais nous tenions, au cours de ce débat, à souligner les problèmes incontournables que ce gouvernement ou un autre, quel qu'il soit, devra affronter.
En guise de conclusion, je veux souligner la grande importance que le groupe communiste républicain et citoyen attache à ces amendements. Nous tenions vraiment à avoir ce débat ce soir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur de la commission des affaires sociales. Avec ces quatre amendements, nous abordons un vrai sujet, celui de la représentativité syndicale. Peut-il y avoir un dialogue social avec des organisations dont la représentativité est mise en doute ? Tel est bien le problème de fond.
Je vous l'avoue, je ne me sens pas capable, à l'occasion de l'examen de ce texte, de décider que telle ou telle organisation syndicale représentative depuis quarante ou cinquante ans ne l'est plus, ou que telle autre l'est dorénavant.
Il convient effectivement de revoir les critères de la représentativité syndicale, voire celle des organisations professionnelles, mais est-ce à nous, parlementaires, d'en décider ?
M. Jean Desessard. À qui, sinon ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Est-ce à nous de décider aujourd'hui d'organiser des élections dans cinq ans, certes sur la foi d'un rapport ? Au demeurant, ce ne serait pas la première fois que le Parlement ne suivrait pas les préconisations d'un rapport !
Il n'y a pas de consensus sur cette question de la représentation syndicale. Vous avez eu l'honnêteté d'indiquer, monsieur Fischer, que vous défendiez des amendements CGT-CFDT, c'est dire que ces amendements n'ont pas reçu l'accord des autres organisations syndicales. (Mme Raymonde Le Texier s'exclame.)
Par ailleurs, quels sont les critères de la représentativité syndicale ? Les résultats aux élections professionnelles, générales, aux prud'hommes ? À partir de quel taux de participation ces élections peuvent-elles être considérées comme réellement représentatives ?
M. Desessard a évoqué la population active. La question mérite peut-être d'être posée, mais pouvons-nous en décider comme cela ?
M. Jean Desessard. Eh oui !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Comme je l'ai dit en commission et encore tout à l'heure à la tribune, nous aurons à trancher ce sujet après les échéances électorales. Lorsque le dialogue social aura été mis en oeuvre par le ministre délégué, qu'il aura pu faire des propositions, nous serons de nouveau saisis du problème de la représentativité syndicale, nous entendrons l'ensemble des partenaires, actuels et futurs, et nous déterminerons des règles.
Pour l'instant, en tant que rapporteur, je souhaite attendre que le dialogue annoncé par le ministre soit engagé. C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
M. Charles Revet. Très bien, madame le rapporteur !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes. Mme le rapporteur vient de résumer parfaitement nos échanges.
Je voudrais simplement rappeler à M. Desessard, qui est sans doute encore un peu « vert » (Sourires), que les textes sur les 35 heures et sur la modernisation sociale ne sont pas particulièrement des références en matière de consultation des partenaires sociaux et des parlementaires. Donc, méfions-nous de la paille et de la poutre quand on veut donner des leçons !
Sur le sujet majeur de la représentativité, je rappelle qu'aucun gouvernement depuis 1966 n'avait mis le sujet sur la table. Nous l'avons fait : donnez-nous-en acte ! Si nous débattons aujourd'hui de la représentativité, c'est parce que, le 12 décembre 2005, devant la Commission nationale de la négociation collective, le Premier ministre a annoncé à l'ensemble des partenaires sociaux qu'il commandait deux rapports - le rapport Hadas-Lebel a d'ailleurs été présenté devant cette même commission au mois de mai - puis qu'il demandait l'avis du Conseil économique et social.
Nous sommes entrés dans un processus de concertation, de consultation et de construction. Or un tel processus de construction, monsieur Fischer, implique de savoir sur quoi nous étayons la modification des règles de représentativité - la présomption irréfragable, les critères anciens ?
Il apparaît dans l'avis du Conseil économique et social, sans que la majorité des partenaires sociaux, au sens de l'accord, ait partagé ce sentiment, que l'élection est un critère tout à fait essentiel.
Le rapport du Conseil économique et social - on a tendance à l'oublier - ne prend pas uniquement en compte l'élection, il fait également référence à l'adhésion aux valeurs de la République ; ce n'est pas un sujet mineur ! Souvenons-nous, il y a quelques années, des tentatives de certains de s'introduire dans la démocratie sociale au nom de valeurs qui n'étaient pas celles de la République.
M. Guy Fischer. Chez Citroën, notamment !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je ne parle pas uniquement de cela ; je fais également allusion au plan d'organisation !
Comme l'a dit Mme le rapporteur, il s'agit de déterminer les critères, par exemple le nombre d'adhérents. Tout à l'heure, Mme Le Texier faisait allusion à la faiblesse du nombre de syndiqués ; Serge Dassault l'a également évoquée dans son intervention. Attention à un syndicalisme sans adhérent à partir du moment où l'on n'est pas distributeur !
Le critère de la transparence a été abordé. Mais quel seuil de représentativité, quel type d'élection retenir ? En effet, je ne crois pas que l'on puisse résumer à deux pôles la vie syndicale, comme certains l'ont imaginé. Il nous faut donc poursuivre le dialogue avec les partenaires sociaux afin de savoir comment nous pouvons faire converger les points de vue.
Madame le rapporteur, le calendrier des réunions bilatérales officielles est le suivant : du 31 janvier au 7 février, je rencontrerai les premières organisations professionnelles et syndicales. Je recevrai également les organisations qui n'appartiennent pas aux huit organisations bénéficiaires de la présomption de représentativité ; je pense à l'UNSA, à la FSU ou à l'Union syndicale Solidaires ; la FNSEA et l'UNAPL sont représentées à la Commission nationale de la négociation collective.
Le dialogue social, c'est aussi se donner du temps ! Par respect pour la Haute Assemblée, il me semblait préférable d'entamer ces échanges une fois que le Sénat aura examiné le projet de loi de modernisation du dialogue social afin que nous puissions construire ce qui sera sans doute demain une orientation pour les partenaires sociaux. Car ce sont bien les partenaires sociaux qui nous diront si, oui ou non, ils souhaitent aller dans cette direction. En fonction de cette décision, il appartiendra ensuite au Gouvernement de poursuivre la modification des règles de représentativité.
Ce sujet n'a pas été abordé depuis quarante ans et ce Gouvernement a le mérite de l'évoquer.
Quant à la série d'amendements, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 6.
M. Jean Desessard. Je voudrais reprendre quelques points qui ont été abordés par M. le ministre et Mme la rapporteur.
S'agissant tout d'abord de la faiblesse du nombre de syndiqués en France, quelques mois après la grève de décembre 1995, j'ai participé à une chaîne de solidarité en Allemagne, dans la Sarre, réunissant 100 000 personnes dans le cadre d'un combat syndical. On sait que l'Allemagne compte beaucoup plus de syndiqués que la France. J'ai applaudi l'organisation des syndicats allemands. Mais il m'a alors été répondu que ceux-ci n'étaient rien à côté des salariés français, qui sont capables de faire grève pendant trois semaines, de tout bloquer et d'obtenir satisfaction.
Pourquoi y a-t-il moins de syndiqués en France et pourquoi les grèves sont-elles si dures ? En fait, c'est à cause non pas des salariés,...
Mme Gisèle Printz. Absolument !
M. Jean Desessard.... mais du patronat, qui ne respecte pas le pacte social et qui ne sait pas négocier. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mme Gisèle Printz. C'est vrai !
M. Jean Desessard. On demande aux salariés de faire des efforts lorsque l'entreprise va mal. On leur annonce que les salaires n'augmenteront pas parce que la situation est difficile. Mais, lorsque celle-ci s'améliore, on n'augmente pas pour autant les salaires. Il faudrait quand même que la négociation fonctionne dans les deux sens !
Nous avons le patronat le plus conservateur d'Europe.
Mme Gisèle Printz. C'est vrai !
M. Jean Desessard. C'est ce comportement qui explique la faiblesse syndicale en France. Le combat, la grève sont en effet plus efficaces que la négociation entre le patronat et les salariés.
Ensuite, Mme la rapporteur nous dit qu'il ne faut pas se décider maintenant. Alors, pourquoi avoir présenté ce projet de loi ? Mes chers collègues, je vous ai connus plus rapides, notamment lors de la fusion entre Suez et GDF ; j'ai même entendu certains orateurs dire ici qu'il ne fallait surtout pas perdre de temps.
Sachez que si l'on adoptait le même système de représentativité dans le domaine politique, ne pourraient se présenter aujourd'hui aux élections que les partis qui existaient après la guerre, à savoir le parti communiste et les radicaux. Et, pour ces derniers, il resterait à déterminer s'il s'agit des radicaux de gauche ou des radicaux valoisiens. Autrement dit, la majorité d'entre nous ne siégeraient pas sur ces travées. Pour ma part, j'aurais tenté de m'inscrire chez les radicaux. (Rires.)
On nous dit qu'il faut un projet de loi de modernisation du dialogue social. Admettez que l'on puisse réformer et penser qu'il y a d'autres organisations syndicales que celles qui existaient après-guerre !
Madame la rapporteur, vous ne disposeriez pas aujourd'hui des éléments vous permettant de définir la représentativité syndicale. À l'évidence, le nombre d'adhérents ne peut pas être un critère, car, grâce à Internet, tout le monde peut être adhérent. On a pu le constater, l'adhésion peut aujourd'hui être très rapide et ne coûter que 1 euro.
C'est donc le critère du vote qu'il faut prendre en compte, à moins que vous ne mettiez en place une réforme institutionnelle et que la représentativité politique dépende désormais du nombre d'adhérents d'un parti. Mais, vous le voyez bien, cet argument est absurde. Seul le vote peut mesurer la représentativité syndicale.
Vous dites également, madame la rapporteur, et je vous en remercie, que je soulève un vrai problème en estimant que les chômeurs et les travailleurs précaires doivent être représentés. La modernisation sociale, c'est justement le fait de tenir compte de la précarité et d'élargir le champ social à l'ensemble des personnes qui souffrent de la précarité !
Mme Gisèle Printz. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud - Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente - Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article premier, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 132-2-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 132-2-2. - La validité d'un accord interprofessionnel ou d'un accord de branche est subordonnée à sa signature, d'une part, par une ou plusieurs organisations syndicales représentant la majorité des salariés, d'autre part, par une ou plusieurs organisations représentatives d'employeurs dans le champ d'application de l'accord. Ces majorités sont appréciées en retenant les résultats des élections de représentativité organisées tous les cinq ans. »
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Monsieur le président, je défendrai en même temps l'amendement n° 7 rectifié et l'amendement n° 8. Ces amendements sont un peu la conséquence de l'amendement n° 6.
L'existence des accords minoritaires met en cause la qualité du dialogue social et sa compréhension par les salariés. Nous sommes dans le seul cas de figure où une minorité officiellement déclarée comme telle peut signer un accord et lui conférer ainsi sa validité.
La législation prévoit actuellement la possibilité d'un accord majoritaire en nombre d'organisations au niveau de la branche et d'un accord majoritaire en voix dans les entreprises si l'accord de branche l'a prévu.
Le droit d'opposition est une procédure complexe et fort mal comprise des salariés. De plus, il n'engendre pas la clarté dans les positions des partenaires sociaux. En réalité, plus personne n'y comprend rien, et cela entrave le fonctionnement de la démocratie sociale.
Nous proposons de revenir sur ces dispositions de la loi de 2004 et de saisir cette occasion pour mettre en place une règle claire de validité des accords. Pour cela, ceux-ci devraient être signés par des organisations syndicales de salariés ou d'employeurs représentatives, dont la représentativité serait régulièrement mesurée afin que la validité des accords soit cette fois indiscutable.
Nous sommes, là aussi, en phase avec le rapport du Conseil économique et social, qui préconise clairement d'aller vers des accords majoritaires, c'est-à-dire vers une majorité d'engagement fondée elle-même sur une représentativité assurée des signataires des accords.
La revitalisation du dialogue social passe, à notre avis, par cette deuxième condition.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article premier, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 132-2-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 132-2-2. - I. - La validité d'un accord interprofessionnel est subordonnée à la signature d'une ou des organisations syndicales représentant une majorité de salariés dans le champ d'application de l'accord, appréciée en retenant les résultats de l'élection de représentativité.
« II. - La validité d'une convention de branche ou d'un accord professionnel étendu, est subordonnée à la signature par un ou des organisations syndicales représentant une majorité de salariés, appréciée en retenant les résultats de l'élection de représentativité.
« III. - La validité des conventions ou accords d'entreprise ou d'établissement, est subordonnée à la signature par une ou des organisations syndicales de salariés représentant une majorité de salariés, appréciée en retenant les résultats de l'élection de représentativité.
« Lorsque la convention ou l'accord n'intéresse qu'une catégorie professionnelle déterminée relevant d'un collège électoral défini à l'article L. 433-2, sa validité est subordonnée à la signature d'organisations syndicales de salariés représentatives ayant obtenu au moins la moitié des suffrages exprimés dans ce collège.
« IV. - La partie la plus diligente des organisations signataires d'une convention ou d'un accord collectif en notifie le texte à l'ensemble des organisations représentatives à l'issue de la procédure de signature. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Ces amendements visent les accords collectifs. À mes yeux, ils remettent surtout en cause la loi du 4 mai 2004, qui a été votée récemment. Or si une loi peut défaire une autre loi, il n'est pas opportun de modifier ladite loi immédiatement, d'autant qu'une évaluation est prévue à la fin de l'année 2007.
Ces mesures sont donc prématurées, sans compter que les organisations syndicales que nous avons auditionnées nous ont toutes fait part de leur souhait de connaître le résultat de l'évaluation prévue en 2007.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je me suis déjà exprimé tout à l'heure sur l'importante question de la validité des accords. Cette réforme doit également être étudiée dans le cadre de la concertation que le projet de loi tend précisément à mettre en place.
En matière de validité des accords, nombre de partenaires sociaux ont le sentiment, même parmi ceux qui défendent l'accord majoritaire, qu'une phase de transition sera nécessaire pour éviter de bloquer le dialogue social dans ce pays. Si nous avions appliqué brutalement le principe majoritaire, il y aurait moitié moins d'accords d'entreprise.
Il faut donc que nous réfléchissions à la responsabilité de ceux qui prennent le risque de s'engager et que nous leur rendions hommage. Car ne pas signer, c'est parfois toucher des dividendes sans encourir une forme d'impopularité liée à certains engagements nécessaires. Nous devons en discuter avec les partenaires sociaux et déterminer la façon dont nous pouvons avancer.
La loi du 4 mai 2004, issue de la position commune, est déjà un formidable changement qui appelle à la responsabilité. Cette dernière doit concerner aussi bien les salariés que les organisations professionnelles. Un accord résulte en effet d'une convergence, d'un compromis, et non d'un consensus. D'ailleurs, je crois plus à la vertu du compromis et de la convergence que du consensus. C'est ainsi que se construit un vrai dialogue social : il est fait des préoccupations des uns et des autres.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud - Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente - Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article premier, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 132-19 du code du travail est ainsi rédigé :
« La validité d'un accord d'entreprise est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales représentant la majorité des salariés. »
Cet amendement a déjà été défendu.
La commission et le Gouvernement ont donné leur avis.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 1er ou après l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 9, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud - Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente - Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article premier, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 41, 42 et 43 de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social sont abrogés.
La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Cet amendement vise à rétablir la hiérarchie des normes en droit du travail, autrement appelée principe de faveur, telle qu'elle existait avant la loi de 2004.
En faisant disparaître ce principe, en vigueur depuis 1936, du droit du travail, le Gouvernement a mis fin à toute l'architecture des accords collectifs. Il s'est contenté de prévoir quelques exceptions, fort limitées, concernant par exemple les salaires minimums. Il est vrai qu'il vous est difficile, monsieur le ministre, de faire autrement, puisque le SMIC est en principe obligatoire. Vous avez même fait grand bruit autour de l'augmentation indispensable des minima conventionnels inférieurs au SMIC, mais sans que des résultats soient réellement obtenus.
De plus, selon le système que vous avez mis en place, les accords de niveau supérieur peuvent résulter d'une simple absence d'opposition.
Il est intéressant de comparer les demandes du MEDEF et de la CGPME concernant le besoin des entreprises d'avoir une sécurité juridique et la fin de la hiérarchie des normes en droit du travail.
La sécurité juridique, cela veut manifestement dire que l'on souhaite limiter au minimum les recours des salariés contre les décisions des employeurs.
M. Guy Fischer. C'est évident !
Mme Raymonde Le Texier. Et vous êtes allé dans ce sens en libéralisant le droit du licenciement sous couvert de gestion prévisionnelle des emplois.
En revanche, pour les salariés, collectivement et individuellement, la sécurité juridique est devenue une notion abstraite.
Ces dispositions participent de votre volonté d' « atomiser » le droit du travail et de donner progressivement la même valeur au contrat qu'à la loi. Vous avez commencé avec la fin du principe de faveur grâce auquel un accord de branche était une sorte de loi butoir pour toute une branche.
Quelle est la valeur du dialogue social dans une telle situation ? Elle est véritablement fictive tant que la hiérarchie des normes n'aura pas été rétablie.
Les partenaires sociaux, selon le système actuel de représentativité - ou un autre, d'ailleurs -, peuvent toujours signer des accords interprofessionnels ou de branche. Ceux-ci n'ont qu'une portée toute relative dans la mesure où les règles issues de la négociation collective ne s'imposent plus dans les entreprises.
C'est un double jeu que vous menez. Vous prétendez vouloir moderniser et revitaliser le dialogue social, mais vous oubliez de dire que vous avez tout fait d'abord pour que ce dialogue social soit sans conséquence pour les salariés.
Je ne doute pas qu'afin de vous mettre en conformité avec votre actuelle volonté de dialogue vous voterez tous en faveur de cet amendement relatif à l'abrogation d'articles qui ont été élaborés à une époque maintenant révolue.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 132-13 du code du travail est ainsi modifié :
1° Après les mots : « plus large », la fin du premier alinéa est supprimée ;
2° Après les mots : « moins favorables aux salariés », la fin du second alinéa est supprimée.
II. - Les deux derniers alinéas de l'article L. 132-23 du même code sont supprimés.
L'amendement n° 23, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 43 de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social est abrogé.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Ces amendements portent sur le même sujet : les accords d'entreprises dérogatoires aux accords de branche, voire à la loi, dont l'existence et le développement, en modifiant en profondeur les règles de la négociation collective, viennent heurter l'objectif de qualité du dialogue social visé au travers du présent texte.
Nous assistons à un « détricotage » du code du travail et à une volonté de déréglementer. La principale conséquence, bien entendu, sera un amenuisement des droits des salariés dans tous les domaines.
Des règles de validité des accords, mais aussi de l'ordonnancement des normes sociales produites par la négociation, dépend largement le renforcement de la négociation collective.
C'est pourquoi, par ces deux amendements, nous entendons réaffirmer avec force l'importance des principes intangibles de hiérarchie des normes et de faveur.
Nous voulons rappeler à chacun, et en particulier au Gouvernement, sa part de responsabilité dans le « détricotage » du code du travail qui conduit à banaliser ce dernier ainsi que le non-respect de l'ordre public social.
C'est une attitude pyromane qui rend extrêmement difficile sur le terrain l'action des inspecteurs et des contrôleurs du travail. C'est une attitude qui enferme les syndicats dans une culture de conflit et renforce la défiance des salariés à l'égard de la négociation d'entreprise, laquelle n'est plus obligatoirement synonyme de progrès.
Ainsi, depuis la loi Fillon de 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, a été offerte aux employeurs la possibilité de négocier au plus près du terrain pour adapter le droit du travail ainsi que les garanties individuelles et collectives aux besoins de leur entreprise.
L'apparition de dérogations au détriment des salariés ne s'est pas fait attendre.
Des sujets jusque-là réservés à la négociation de branche, laquelle ne pouvait déroger à la loi que dans un sens plus favorable au salarié, ont été ouverts aux accords d'entreprises désormais pleinement autonomes.
C'est une vérité, notamment pour la fixation du taux de majoration des heures supplémentaires - nous pourrions en parler longuement -, pour la réduction du délai de prévenance, mais aussi pour la détermination des conditions de formation des membres des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les CHSCT.
Vous nous dites vouloir simplifier le droit du travail, mais vous participez à sa complexification et à son « atomisation » en acceptant que perdurent ces accords dérogatoires.
Nous tenions à vous rappeler cette réalité qui nuit à l'engagement du dialogue social et à sa formalisation par des accords collectifs, facteurs de progrès social.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Les amendements nos 9 et 18 visent à supprimer des articles de la loi du 4 mai 2004 qui autorisent les accords d'entreprises à déroger à des accords de branche et les accords de branche aux accords interprofessionnels.
La commission ne souhaite pas revenir sur cet élément essentiel d'une loi récente qui dynamise la négociation collective dans le pays. Les accords doivent être négociés au plus près du terrain.
C'est la raison pour laquelle la commission, très attachée à la décentralisation de la négociation collective, est également défavorable à l'amendement n° 23.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Je veux néanmoins revenir sur le principe de faveur.
Tout d'abord, contrairement à ce qu'indique l'exposé des motifs de l'amendement n° 9, l'article 41 de la loi du 4 mai 2004 ne remet pas en cause, je le redis solennellement, le principe de faveur. L'accord ou le contrat de travail peut toujours déroger dans un sens favorable au salarié à la norme supérieure.
Par ailleurs, aucune disposition n'est prévue dans les rapports entre la loi et l'accord collectif. En aucun cas, l'accord ne peut déroger à la loi.
Ensuite, l'article 42 de la loi du 4 mai 2004 permet d'aménager des rapports d'autonomie entre les différents niveaux de négociations, et plus particulièrement dans les rapports entre accord de branche et accord d'entreprise.
Ce rapport d'autonomie est encadré, car la loi définit les cas où il ne s'applique pas : les salaires, les classifications et la prévoyance.
En outre, c'est à l'accord de branche lui-même de préciser si ce rapport d'autonomie s'applique ou non. Voilà l'équilibre !
Enfin, l'article 43 de la loi du 4 mai 2004 vise à ouvrir le champ de la négociation collective, avec les garanties nouvelles que constitue l'accord majoritaire.
En ce qui concerne l'ordre public social, c'est ce gouvernement qui a décidé du plan santé au travail, et qui le met en oeuvre ! Ce plan santé au travail, qui a des traductions concrètes sur le terrain, fait d'ailleurs l'objet d'une mobilisation, y compris de la presse spécialisée dans le domaine de la santé au travail. En effet, dans le cadre de la prévoyance, la revue Santé et travail passera d'une diffusion de 2 500 exemplaires à une diffusion de 30 000 exemplaires, avec notamment une mobilisation des réseaux de la mutualité. Car la santé au travail sera effective d'abord grâce aux partenaires sociaux dans les entreprises.
Ce gouvernement a également engagé le plan de modernisation de l'inspection du travail. Jamais aucun gouvernement depuis trente ans n'avait engagé, en politique du travail, un plan aussi important de réorganisation.
Quant au code du travail, je veux profiter de l'occasion qui m'est offerte par M. Fischer pour dire à la Haute Assemblée où nous en sommes au sujet de sa recodification.
Le projet d'ordonnance et le projet de code sont prêts ; la qualité du travail a fait l'objet, d'ailleurs, d'une mention explicite dans le rapport de la Commission supérieure de la codification et elle a été jugée exemplaire.
Je tiens à saluer le travail que le directeur général du travail a conduit avec l'ensemble des partenaires sociaux, grâce au soutien de la chambre sociale de la Cour de cassation, des membres du Conseil d'État et des fonctionnaires.
Les textes sont actuellement examinés par la section sociale du Conseil d'État et ils seront ensuite étudiés par l'assemblée générale. Je rappelle qu'il s'agit d'une recodification à droit constant.
Le projet d'ordonnance pourra être examiné lors d'un conseil des ministres au cours du mois de mars.
Nous aurons donc respecté le calendrier, que le Parlement a bien voulu prolonger eu égard aux procédures et à la nécessité de procéder à une concertation approfondie.
Le code du travail ne doit pas être réservé à quelques spécialistes ! La recodification, je tiens à le rappeler en cet instant, a pour objet de rendre plus lisible, plus compréhensible, plus abordable ce code qui régit les rapports entre salariés et employeurs, en allant dans le sens de l'équilibre.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud - Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente - Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
La seconde phrase du dernier alinéa de l'article L. 132-30 du code du travail est ainsi rédigée :
« Ces salariés bénéficient de la protection prévue par les dispositions de l'article L. 412-18. »
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Cet amendement vise à contribuer modestement à la modernisation du dialogue social, ou plutôt à sa préservation.
La loi de 2004, sur laquelle il faudra décidément revenir, a modifié les modalités du dialogue territorial avec les commissions paritaires locales, départementales ou régionales, qui peuvent être professionnelles ou interprofessionnelles.
Des salariés sont donc membres de ces commissions et ont pour mission, confiée par la loi, de négocier et de conclure des accords d'intérêt local. Ils ont au sein de ces commissions une mission de délégués des salariés des entreprises qu'ils représentent. Dès lors, pourquoi ne pas leur appliquer la même protection que celle qui est prévue pour les délégués syndicaux à l'article L. 412-18 du code du travail ?
Là aussi, la loi de 2004, par le biais de ces commissions paritaires territoriales, ouvre une brèche discrète. Ainsi, à l'instar de la digue, l'eau s'écoulera silencieusement avant de tout envahir.
Nous savons parfaitement que le MEDEF et la CGPME ont la ferme intention de remettre en cause les heures de délégation et la protection des représentants du personnel.
Dire, comme le font les auteurs de la loi de 2004, que ces points doivent être fixés par l'accord lui-même est pour nous inacceptable. Ce nouvel éclatement des règles législatives est comme une épée de Damoclès pour les représentants salariaux qui ne seraient pas assez conciliants.
Les règles de protection des délégués sont d'ordre public social, et il ne peut y être dérogé. Elles ne peuvent être adaptées en fonction des pressions des représentants patronaux et devenir différentes suivant les bassins d'emploi. Le droit du travail n'est pas régionalisable.
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud - Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente - Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 432-4-3 du code du travail est abrogé.
La parole est à Mme Gisèle Printz.
Mme Gisèle Printz. Nous passons maintenant aux dispositions que vous avez glissées dans une autre loi, la loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, que nous avons récemment examinée.
Il faut décidément, avec ce gouvernement, se méfier des grands projets de loi annoncés au clairon et reposant sur de grands principes. Des articles viennent y faire leur nid, comme le coucou, mais ils n'ont rien de chants d'oiseau.
L'article L. 432-4-3 du code du travail remet en cause des règles importantes relatives à l'information et au dialogue social dans les entreprises de plus de trois cents salariés. Il prévoit qu'un accord de branche, d'entreprise ou de groupe pourra substituer aux informations et documents à caractère social, économique et financier actuellement prévus par le code du travail un rapport annuel synthétisant l'ensemble de ces données. La synthèse est parfois ennemie de la précision.
Par exemple, s'agissant de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, il y a une différence notable entre la mention de la situation comparée des conditions générales d'emploi et de formation des femmes et des hommes, qui peut être une simple photographie, et le rapport précis, sur la base d'indicateurs pertinents, recensant les mesures prises et les objectifs annuels, aujourd'hui exigé par l'article L. 432-3-1 du code du travail.
Si je choisis cet exemple, ce n'est pas, vous vous en doutez, tout à fait au hasard. Le Parlement a examiné récemment la loi relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, seul texte social sur lequel l'urgence n'a pas été déclarée au cours de cette législature. Nous y avons donc consacré tout notre temps. C'était d'ailleurs un sujet prioritaire, selon le Président de la République.
Ce texte n'apporte pas d'amélioration sensible en la matière. Il prévoit en effet des délais considérables et n'est assorti d'aucune sanction pour les employeurs qui ne se mettront pas en conformité avec la loi. Et nous avons le sentiment que même cela n'a servi à rien, puisque le Gouvernement a fait adopter dans la loi sur la participation cette disposition qui remet en cause les lois Roudy et Génisson.
De plus, cet article 29 a été introduit dans la loi par voie d'amendement, c'est-à-dire sans aucune concertation préalable.
Voilà, monsieur le ministre, plusieurs contradictions internes à votre démarche, contradictions qui ne sont qu'apparentes. Nous avons l'habitude des effets d'annonce, immédiatement contredits par les faits. En effet, les véritables mesures, celles qui restreignent la portée de la négociation collective et les droits des salariés, sont prises en toute discrétion, alors que les effets d'annonce sans lendemain sont largement médiatisés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. L'amendement n° 10 remet en cause certaines dispositions de la loi du 4 mai 2004. Je me suis déjà exprimée sur cette loi et sur le rendez-vous qui est prévu à la fin de l'année. L'avis de la commission est donc défavorable.
Quant à l'amendement n° 11, j'ai calculé que la loi du 30 décembre 2006 avait été adoptée voilà exactement vingt et un jours. On battrait donc tous les records de mise en cause d'une loi en votant aujourd'hui des dispositions contraires à ce texte. La commission est donc également défavorable à cet amendement.
M. Guy Fischer. Notre objectif est précisément de remettre en cause les lois que nous n'approuvons pas !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'article de la loi du 4 mai 2004 auquel vous faites allusion, madame Printz, a eu pour objet, en développant la vocation à la négociation collective des commissions paritaires locales, de favoriser l'émergence d'une couverture conventionnelle adaptée aux réalités locales. Compte tenu de la spécificité du mandat, le statut des membres de ces commissions ne peut être assimilé à celui de délégués syndicaux d'entreprise.
Faire vivre le dialogue social, ce n'est pas inventer de nouvelles extensions. Le statut des délégués syndicaux d'entreprise existe, il faut en assurer le respect. C'est l'une des préoccupations du ministère du travail puisque je rends maintenant publique la situation de ces délégués syndicaux.
J'émets donc un avis défavorable sur l'amendement n° 10.
Quant à l'amendement n° 11, qui tend à remettre en cause un texte dont les décrets d'application ne sont pas encore parus, je ne puis évidemment qu'y être défavorable.
M. Jean Desessard. Il vaut mieux le faire maintenant qu'après !
Mme Gisèle Printz. On l'a bien fait pour le CPE !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article additionnel avant l'article 1er ou après l'article 1er
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 12, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud - Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente - Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 3 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise est abrogé.
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. L'article 3 de la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise vise à introduire dans le droit du travail l'accord individuel entre le salarié et l'employeur au sujet des heures dites choisies, c'est-à-dire des heures supplémentaires supérieures au contingent que le salarié effectuerait.
La rédaction de l'article est évidemment ambiguë, puisqu'il est dit que ces heures sont réalisées par accord entre le salarié et l'employeur. On ne sait qui souhaite l'accord.
Ce que l'on sait, en revanche, c'est que des heures supplémentaires ne sont jamais effectuées sur simple demande du salarié et qu'il faut à cela un cahier des charges. On sait par ailleurs que la loi précise que les heures supplémentaires sont réalisées selon la volonté de l'employeur, et qu'il est périlleux pour qui veut conserver son emploi de les refuser. On sait enfin que les heures complémentaires des salariés à temps partiel contraint ne sont pas majorées, alors que ce sont eux qui ont le plus besoin de travailler davantage pour gagner plus.
Il est dommage que le Gouvernement n'ait pas fait sien le slogan du candidat de l'UMP aux présidentielles. Il y a, encore une fois, loin de l'effet d'annonce à la réalité.
Ce qui pose problème au regard du dialogue social, c'est que l'on fait entrer dans le droit du travail, toujours par la petite porte et sans avoir l'air d'y toucher, la notion d'accord individuel entre le salarié et l'employeur. Il y a une différence majeure entre la notion de contrat de travail, par définition individuel, et la notion d'accord, jusqu'à présent toujours collectif. Cette différence ne peut avoir échappé aux juristes du MEDEF.
C'est bien une démolition de la collectivité de travail qui est à l'oeuvre et une individualisation à marche forcée de la relation de travail.
Les salariés sont progressivement invités à créer leur propre entreprise, c'est-à-dire à se transformer en prestataires de services individuels. Les contrats précaires deviennent la règle, et la gestion prévisionnelle des emplois est transformée pour débarrasser l'employeur de toute responsabilité à l'égard du salarié qu'il veut licencier.
Bientôt, ce sera à l'intérieur de l'exécution de chaque contrat de travail que devra se tenir une négociation individuelle entre deux partenaires fictivement égaux.
Nous revenons progressivement à la préhistoire des relations sociales. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 3 de la loi n°2005-296 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise est abrogé.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Le présent amendement prévoit de revenir sur la possibilité ouverte au chef d'entreprise, par la loi de 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise, de déroger aux règles du code du travail et aux pratiques de la négociation collective, afin de permettre aux salariés d'effectuer des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel.
Tout en sachant que nous n'avons aucune chance d'être entendus et satisfaits sur ce point - pas plus que sur les autres, d'ailleurs -, nous avons néanmoins tenu à déposer cet amendement. Cela nous permet de dénoncer une fois encore l'hypocrisie et la perversité de votre mesure de « temps choisi ».
M. René Garrec. Le mot est dur !
M. Jean Desessard. Plus que de la perversité, c'est de la « perversitude » ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Vous êtes les seuls à croire qu'un salarié seul face à son employeur est en mesure de consentir librement à effectuer des heures supplémentaires. C'est sous la contrainte d'un pouvoir d'achat sans cesse en baisse et sous le poids des pressions sur l'emploi et les salaires que le salarié effectuera les heures supplémentaires et dépassera ainsi la durée maximale hebdomadaire de travail fixée par la loi et relevant de l'ordre public social. Il le fera sans forcement être rémunéré en proportion de ses efforts puisque les heures supplémentaires peuvent être payées au rabais et en prenant des risques pour sa santé. D'ailleurs, dans le cadre du contrat nouvelles embauches, nous avons des exemples très précis de personnes licenciées parce qu'elles ont refusé de faire des heures supplémentaires, et cela sans tambour ni trompette.
Cet amendement a également le mérite d'illustrer, si besoin en était encore, l'attitude passée du Gouvernement qui, pour des raisons étroitement idéologiques, a tenu à s'attaquer à la loi sur la réduction du temps de travail, accusée par le MEDEF, notamment, de tous les maux, sans en assumer ouvertement la responsabilité. Le texte en question était d'initiative parlementaire et a donc pu ainsi être déposé sans que les organisations syndicales soient consultées. Voilà comment le Gouvernement utilise certains stratagèmes.
Dans la mesure où le texte que nous examinons n'affecte pas la procédure de dépôt des propositions de loi et ne porte pas atteinte au droit d'amendement, il est à craindre que, demain, ce gouvernement, ou le suivant, soit encore tenté par de telles dérives préjudiciables à l'esprit de la réforme présentement initiée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Madame Jarraud-Vergnolle, je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que les heures choisies sont une innovation. C'est effectivement une innovation qui nous paraît intéressante et sur laquelle nous ne souhaitons pas revenir.
Selon M. Fischer, nous serions les seuls à croire qu'un salarié peut effectuer sans contrainte des heures supplémentaires. Non, nous ne sommes pas les seuls !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vu le niveau des rémunérations, les salariés sont de plus en plus nombreux à le faire !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Permettez-moi de citer Mme Ségolène Royal s'exprimant sur les trente-cinq heures : « Des assouplissements ont déjà été apportés. Peut-être faut-il aller au-delà pour que ceux qui veulent travailler plus puissent le faire. »
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas notre candidate !
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Effectivement, mais cela montre que nous ne sommes pas les seuls à penser que l'on peut travailler plus pour gagner plus.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 12 et 22.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Plus les salaires sont bas, plus les salariés font des heures supplémentaires !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je ne sais pas s'il y a une transmission de pensée entre le parti socialiste et le parti travailliste britannique, mais nous serions effectivement revenus à la préhistoire si nous avions suivi la proposition de M. Blair à M. Gordon Brown, qui voulait, au mois de décembre dernier, par le système dérogatoire de l'opting out, que puissent être portées à soixante-cinq heures les possibilités de déroger à la loi par un accord individuel.
En s'en tenant, à l'instar du Luxembourg, de la Belgique, de l'Italie, de l'Espagne et de la Grèce à une position de refus de l'opting out, la France n'est pas retournée à la préhistoire. Elle a au contraire permis l'instauration de règles du travail qui, en Europe, ne permettent pas que s'exerce une forme de dumping social.
Je n'aurai pas la cruauté de rappeler qu'un certain nombre de gouvernements appartenant à l'Internationale socialiste étaient tout à fait sur la même ligne que les Britanniques. Alors, que ceux qui s'en défendent prennent garde de ne pas être précisément les instigateurs d'un retour à la préhistoire !
Par ailleurs, s'agissant du temps choisi, je rappelle qu'un double accord est nécessaire : l'accord collectif et l'accord individuel. C'est d'ailleurs ce qui distingue ce système de celui de l'opting out. La notion d'accord collectif est importante, car c'est autour de l'accord collectif que s'articule le dialogue social.
Je souhaite que l'on ne caricature pas l'action du Gouvernement, qui a la volonté de permettre aux salariés qui le souhaiteront de travailler plus dans le cadre d'accords collectifs.
Un certain nombre de réalités s'imposent - souvenez-vous de l'époque où l'on parlait d'entreprises qui passaient de trente-cinq heures à trente-six heures trente - qu'il faut avoir le courage de regarder en face, mais il faut agir dans le cadre du dialogue social. Nous serons appelés, les uns et les autres, à un certain nombre de rendez-vous, mais c'est en tenant un langage de vérité que nous pourrons à la fois mener une politique sociale forte et faire preuve de dynamisme économique.
Je suis donc défavorable aux amendements nos 12 et 22.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le titre Ier du livre Ier du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 100-2. - Un décret en Conseil d'État fixe les conditions de la représentativité des organisations de chômeurs et précaires ainsi que les modalités d'organisation du scrutin. ».
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. J'ai précédemment défendu un amendement de même inspiration en réclamant l'élargissement de la procédure de concertation aux organisations de chômeurs et de travailleurs précaires afin d'assurer la citoyenneté et la représentation qui leur sont dues.
Passer du silence à la parole suppose que cette parole soit portée par les intéressés par le biais d'un relais, d'une forme de globalisation de l'expression, bref au travers d'un ou de plusieurs mécanismes appropriés de représentation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Cet amendement pose le problème de la représentativité des associations de chômeurs et des travailleurs précaires, sujet que nous avons déjà évoqué.
À mon sens, cette question doit être soulevée dans le cadre du débat sur la représentativité syndicale. En tout cas, il me paraîtrait logique de consulter les organisations syndicales pour connaître leur point de vue. En effet, le chômage ou la précarité ne sont que des situations temporaires : celui qui était auparavant membre d'un syndicat en tant que salarié le sera de nouveau dès qu'il aura retrouvé un emploi.
Par conséquent, le dispositif que cet amendement tend à instituer est, pour le moment, prématuré. L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je n'entrerai pas dans le fond du débat. Je le dis clairement, l'objectif du Gouvernement pour les années à venir est le retour au plein-emploi, au sens du Bureau international du travail. Par conséquent, c'est bien dans une logique de mobilisation et de bataille pour l'emploi que nous nous inscrivons.
Cependant, ce qui est en cause dans cet amendement, c'est la représentativité des associations. Je ne nie ni l'importance ni le rôle des associations, mais c'est un autre sujet que celui dont nous débattons en ce moment, c'est-à-dire la représentativité des organisations professionnelles et syndicales.
Cette question pourra sans doute être abordée ultérieurement dans l'étude qui a été commandée au Conseil économique et social.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
D'abord, je l'ai dit, cet amendement s'éloigne de notre sujet, la représentativité syndicale.
Ensuite, la représentativité des associations est un vaste débat. Dans un certain nombre de secteurs, des associations, même agréées, n'ont pas organisé d'assemblée générale depuis longtemps, n'ont pas un mode d'élection transparent et suscitent des interrogations quant à leur financement. Certes, la vie associative est un élément important dans notre pays, tous les élus locaux le savent. Mais encore faut-il ne pas tout mélanger.
Naturellement, nous sommes attentifs à la situation des personnes en situation de précarité ou de chômage. Cela fait également partie des préoccupations quotidiennes du pôle de cohésion sociale.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Tout d'abord, M. le ministre évoque l'objectif d'un retour au plein-emploi. Nous pourrions tous y souscrire. Malheureusement, je crains fort qu'il ne s'agisse d'un mythe et que nous nous dirigions au contraire vers une société de précarité, même si je ne le souhaite pas. À mon sens, pendant les dix ou les vingt prochaines années, la précarité s'aggravera et le nombre de sans-emploi augmentera.
Ensuite, faut-il que les travailleurs précaires et les chômeurs ne soient pas représentés ? Certains estiment que les organisations syndicales les représentent. C'est faux ! Nous le voyons d'ailleurs très bien : la section « chômeurs » de la CFDT ou la CGT-chômeurs ont peu d'adhérents et il leur est difficile d'en recruter, d'autant qu'elles sont encadrées par des syndicalistes salariés.
Ainsi, il existe un véritable problème de représentation des personnes en situation de précarité, des travailleurs intérimaires et des chômeurs. Ceux qui sont sans-emploi doivent-ils, pour autant, être privés de citoyenneté syndicale ? Est-ce cela, aujourd'hui, la modernisation sociale ?
En réalité, seuls les salariés de la fonction publique, que vous dénoncez par ailleurs - vous trouvez qu'ils font trop souvent grève -, bénéficient d'une réelle représentation syndicale. Tous les autres, c'est-à-dire les travailleurs occasionnels ou les personnes qui ne parviennent pas à trouver un emploi, ne mériteraient pas d'être représentés : comme ils ne travaillent pas et ne sont pas des agents économiques, doivent-ils être des citoyens ?
La modernisation sociale consiste précisément à tenir compte de la situation des salariés contraints de travailler peu et des demandeurs d'emploi.
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le titre Ier du livre Ier du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 100-3. - La représentativité nationale des organisations d'employeurs doit prendre en compte le secteur de l'économie sociale. Un décret en conseil d'État crée un collège représentant les associations, les mutuelles, les sociétés coopératives ouvrières de production, tous les employeurs faisant partie du secteur de l'économie sociale. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Ce projet de loi pose évidemment aussi la question de la représentativité des organisations patronales.
D'une part, le MEDEF s'arroge une « supra représentativité », exorbitante dans les faits. D'autre part, la procédure de concertation ne concerne que les organisations représentatives au niveau interprofessionnel. C'est donc tout un ensemble de réformes du droit du travail concernant des secteurs spécifiques qui échappe à la concertation des organisations représentatives sectorielles.
M. le ministre s'est engagé à ce que de telles réformes puissent également faire l'objet d'une concertation. Il visait notamment la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles et l'Union nationale des professions libérales.
Il conviendrait aussi de prendre en compte « le tiers secteur » dans la représentativité des organisations d'employeurs et de l'associer à la procédure de concertation. En effet, celui-ci regroupe l'ensemble des initiatives économiques à finalité sociale exercées principalement par des associations, mutuelles et coopératives. En outre, il représente une proportion de plus en plus importante des entreprises et des emplois en France comme dans l'Union européenne. Ainsi, plus de 30 % de la population européenne serait membre d'une organisation ou d'une entreprise de l'économie sociale.
La modernisation du dialogue social ne peut pas avoir de sens si elle se passe des représentants d'une économie ancrée dans la gestion du quotidien. Les mutuelles de santé et de prévoyance couvrent 30 millions de personnes et les mutuelles d'assurances couvrent une automobile sur deux et deux habitations sur trois.
Qui ne connaît les coopératives agricoles, viticoles, laitières, de pêche, de transport ou de distribution, par exemple les centres Leclerc, le Système U et les magasins Intersport ? Qui ne connaît les banques coopératives, notamment les Banques populaires, le Crédit agricole, le Crédit coopératif, le Crédit mutuel ou les Caisses d'Epargne ?
Quant aux associations, elles sont présentes partout, dans les domaines tant sportif que culturel, éducatif, familial, sanitaire et social ou environnemental.
L'économie sociale, c'est également plus de 1 000 milliards d'euros de ressources, plus de 1,7 million d'emplois. Au travers de 760 000 entreprises, c'est l'un des gisements les plus fertiles en créations d'emplois. Comment le dialogue social peut-il passer à côté de ce poids lourd de l'économie, qui sera très certainement appelé à l'avenir à créer la majorité des emplois ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Cet amendement porte sur la question la représentativité. Je me suis déjà exprimée sur le sujet.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Pour les organisations professionnelles, il n'existe pas de présomption de représentativité sur le modèle du dispositif institué par l'arrêté de 1966. Je ne rappellerai pas comment l'UPA est devenue représentative à la suite de décisions judiciaires, dont certaines sont encore récentes.
Ainsi, cet amendement ne s'inscrit pas du tout dans le cadre du dialogue social ou des futurs échanges bilatéraux que nous aurons à propos de la représentativité. D'ailleurs, la question posée par l'auteur de cet amendement n'a pas été soulevée par le Conseil économique et social.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le titre Ier du livre Ier du code du travail, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 100-4. - Il est créé un chèque associatif ou syndical pour chaque personne au chômage. Lorsqu'une personne se retrouve au chômage, elle peut choisir une adhésion syndicale ou à une association de chômeurs sous la forme d'un chèque associatif ou syndical. Ce chèque permet le règlement de l'adhésion au syndicat ou à l'organisation de chômeurs choisi et le paiement est pris en charge par l'État ».
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement concerne le financement des associations de chômeurs, qu'elles soient indépendantes ou affiliées à un syndicat.
Le droit d'exister des demandeurs d'emploi partout où leurs intérêts sont en jeu suppose que chaque personne inscrite à l'ANPE puisse adhérer à une association de chômeurs ou à un syndicat de son choix, afin de défendre ses droits et sa dignité. C'est là une évidence !
Le poids du coût de la vie et la situation financière des chômeurs et travailleurs précaires n'étant pas non plus à démontrer, ce droit d'exister entraîne également pour l'État, les collectivités locales, régions, départements et communes, et les établissements publics l'obligation de leur procurer des financements et des locaux.
Cet amendement a donc pour objet de créer un chèque associatif ou syndical. Celui-ci serait financé par l'État selon des modalités à définir et remis au demandeur d'emploi, afin de lui permettre de cotiser à une structure d'accueil choisie en toute liberté.
En outre, les associations et les syndicats de chômeurs pourraient ainsi obtenir le soutien financier direct et régulier de l'État qui leur manque pour mener à bien leurs missions auprès des demandeurs d'emploi, pour poursuivre leur expérience et pour s'entourer des expertises nécessaires.
Le mouvement syndical des salariés bénéficiant déjà d'aides importantes, une telle stabilité de financement des associations et syndicats de chômeurs, qui n'entrent aujourd'hui dans aucune des formules de financement automatique, corrigerait encore un peu plus le déséquilibre démocratique. En effet, qui dit rééquilibrage des moyens d'expression dit également rééquilibrage des moyens financiers de la représentation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Monsieur Desessard, vous évoquez le financement des organisations syndicales, sujet qui ne figure pas, me semble-t-il, dans le présent projet de loi.
En outre, le dispositif que cet amendement tend à instituer augmenterait les charges publiques. Il est donc irrecevable en vertu de l'article 40 de la Constitution.
Par ailleurs, les syndicats peuvent proposer d'eux-mêmes la gratuité de l'adhésion pour leurs membres salariés qui perdraient leur emploi et pour les chômeurs désirant s'affilier. Une telle démarche me semble tellement naturelle de la part des organisations syndicales que je serais surprise que l'une d'entre elles vous ait demandé de formuler une telle proposition.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous avons déjà évoqué le financement du dialogue social et la transparence du financement des organisations syndicales. Ce sujet est abordé dans le rapport de M. Hadas-Lebel.
Le Gouvernement a pris plusieurs mesures pour favoriser l'adhésion syndicale. Tout d'abord, la déduction de la cotisation syndicale de l'impôt sur le revenu a été portée à 66 % ; cette déduction était limitée à 50 % précédemment. Ensuite, les crédits consacrés au financement de la formation syndicale ont augmenté de près de 7 % en 2005, avec une planification dans le cadre de conventions triennales. Enfin, le décret du 25 juillet 2005 autorise les collectivités territoriales à verser, si elles le souhaitent, des subventions de fonctionnement aux organisations syndicales représentatives.
Dans le rapport Hadas-Lebel, un certain nombre d'autres sujets sont abordés, notamment la possibilité d'introduire dans le code du travail une disposition permettant aux entreprises et aux branches de conclure un accord précisant et encadrant le recours aux mécanismes de financement du dialogue social. D'autres éléments en sont encore à l'étape de la réflexion et feront l'objet de discussions avec les partenaires sociaux. Tous ces sujets font partie de l'étude demandée par le Gouvernement.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement. Il respecte en effet la logique tendant à engager le dialogue sur des sujets que même le rapport Hadas-Lebel et l'avis du Conseil économique et social sont loin d'avoir épuisés.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J'ai l'impression que Mme la rapporteur et M. le ministre m'ont répondu à côté de la question. Ils ont expliqué que les syndicats avaient déjà les moyens de fonctionner. Mais mon amendement tend non pas uniquement à créer un chèque syndical, mais également à permettre aux demandeurs d'emploi de s'affilier soit à une association de chômeurs, soit à un syndicat.
Les demandeurs d'emploi vivent très mal la séparation de l'entreprise et les revendications des syndicats sur l'amélioration des retraites, l'accès aux loisirs, la défense du pouvoir d'achat, et même la réduction du temps de travail. Ils ont d'autres préoccupations, notamment la réinsertion professionnelle, et ont le sentiment d'être exclus du monde du travail.
Certains continuent à se syndiquer mais, très souvent, ils rejoignent une association de chômeurs. Même les anciens salariés de MetalEurope ont quitté la CGT pour adhérer à une association de chômeurs.
Ce qui leur manque, c'est le financement pour s'organiser ; ils veulent poursuivre leur action syndicale au sein d'une association de chômeurs. Il existe aujourd'hui un hiatus entre les revendications syndicales et les revendications des travailleurs précaires et des chômeurs.
Pour favoriser la citoyenneté des demandeurs d'emploi, nous devons encourager leur affiliation à une association de chômeurs. Le financement peut être envisagé selon deux modalités : soit le Gouvernement choisit la « bonne » association de chômeurs qui bénéficiera de la subvention, et les gens ne peuvent pas s'affilier librement ; soit c'est le demandeur d'emploi qui désigne l'association ou le syndicat par lequel il s'estime le mieux représenté et auquel la cotisation sera versée.
Je constate, madame la rapporteur, monsieur le ministre, que vous refusez la citoyenneté aux travailleurs précaires et aux demandeurs d'emploi.
M. le président. Mes chers collègues, à la demande du Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à dix-neuf heures quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
Article 1er
Avant le titre Ier du livre Ier du code du travail, il est inséré un titre préliminaire ainsi rédigé :
« TITRE PRÉLIMINAIRE
« DIALOGUE SOCIAL
« CHAPITRE UNIQUE
« Procédures de concertation, de consultation et d'information
« Art. L. 101-1. - Tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi et la formation professionnelle et qui relève du champ de la négociation nationale et interprofessionnelle fait l'objet d'une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel en vue de l'ouverture éventuelle d'une telle négociation.
« À cet effet, le Gouvernement leur communique un document d'orientation présentant des éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options.
« Lorsqu'elles font connaître leur intention d'engager une telle négociation, les organisations indiquent également au Gouvernement le délai qu'elles estiment nécessaire pour conduire la négociation.
« Le présent article n'est pas applicable en cas d'urgence. Lorsque le Gouvernement décide de mettre en oeuvre un projet de réforme en l'absence de procédure de concertation, il fait connaître cette décision aux organisations mentionnées ci-dessus en la motivant dans un document qu'il transmet à ces organisations avant de prendre toute mesure nécessitée par l'urgence.
« Art. L. 101-2. - Le Gouvernement soumet les projets de textes législatifs et réglementaires élaborés dans le champ défini par l'article L. 101-1, au vu des résultats de la procédure de concertation et de négociation, selon le cas à la Commission nationale de la négociation collective, au Comité supérieur de l'emploi ou au Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, dans les conditions prévues respectivement aux articles L. 136-2, L. 322-2 et L. 910-1.
« Art. L. 101-3. - Chaque année, les orientations de la politique du Gouvernement dans les domaines des relations individuelles et collectives du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, ainsi que le calendrier envisagé pour leur mise en oeuvre sont présentés pour l'année à venir devant la Commission nationale de la négociation collective. Les organisations mentionnées à l'article L. 101-1 présentent, pour leur part, l'état d'avancement des négociations interprofessionnelles en cours ainsi que le calendrier de celles qu'elles entendent mener ou engager dans l'année à venir. Le compte rendu des débats est publié.
« Chaque année, le Gouvernement remet au Parlement un rapport faisant état de toutes les procédures de concertation et de consultation mises en oeuvre pendant l'année écoulée en application des articles L. 101-1 et L. 101-2, des différents domaines dans lesquels ces procédures sont intervenues et des différentes phases de ces procédures. »
M. le président. La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle, sur l'article.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Ce projet de loi de modernisation du dialogue social a pour objet d'accorder aux partenaires sociaux un temps de négociation avant tout examen par le Parlement d'un projet de loi portant sur les relations individuelles et collectives du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.
D'ores et déjà, ce projet de loi, très court, puisqu'il ne comporte que deux articles, et présenté bien tardivement, suscite un certain nombre de questionnements.
Ma première remarque porte sur le titre préliminaire intitulé « Dialogue social ». Le dialogue social n'a ni la même signification ni la même portée juridique que la négociation collective inscrite dans le code du travail à l'article L. 131-1.
La négociation collective s'exerce entre des interlocuteurs précis, suivant des règles fixées par la loi, en vue d'aboutir à des accords collectifs de branche, d'entreprise ou d'établissement.
La Commission nationale de la négociation collective, instituée par les articles L. 136-1 à L. 136-4 du code du travail, a un rôle primordial pour proposer au ministre des améliorations en matière de négociation collective, pour émettre un avis sur les projets de loi et décrets, pour donner un avis motivé sur l'extension et l'élargissement des conventions et accords collectifs.
Le dialogue social est davantage une pratique qu'une notion juridique, comme l'indique le rapport de M. Chertier remis au Premier ministre au début de l'année 2006. Sa définition est donc plus vague et permet de revêtir des formes plus opportunes en fonction des interlocuteurs et du moment.
Le dialogue social a fait son apparition dans la législation avec l'intitulé de la loi Fillon du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social.
Un accord unanime des partenaires sociaux sur le droit individuel à la formation devait être transposé dans la loi. Mais, à la demande du MEDEF, un titre intitulé « Du dialogue social » a été ajouté dans l'objectif de mettre fin à l'obligation de respecter le principe de faveur.
La loi de 2004 a procédé à une recomposition des modalités et des résultats de la négociation collective. Celle-ci est sectorisée par branches et par entreprises, et permet toutes les dérogations en tous sens. Elle est aussi vaste que peut être vague le dialogue social.
Pourtant, si notre pays a besoin d'une redynamisation de sa démocratie sociale, c'est sur la base de règles claires. D'ailleurs, Mme Procaccia l'a souligné tout à l'heure.
Rappelons également l'idée déjà ancienne du MEDEF de faire prévaloir, en matière sociale, l'accord ou le contrat sur la loi. Cette expression n'a pas été reprise dans le projet de loi transmis au Sénat, et l'ensemble des partenaires sociaux auditionnés a particulièrement insisté sur le fait que l'initiative et le droit d'amendement des parlementaires doivent demeurer intacts. Il semble cependant évident que l'objectif fondamental n'est perdu de vue ni par le MEDEF ni par le Gouvernement, qui tient à faire passer ce texte, après déclaration d'urgence, avant les prochaines élections.
Les constats du rapport Chertier - rétrécissement du champ de compétences de l'État par le jeu des transferts à l'Union européenne, aux collectivités territoriales ou à des agences indépendantes - et la volonté du Gouvernement de réduire le budget de l'État, donc sa capacité d'intervention, signent le dessaisissement de l'État et le démembrement des politiques nationales.
Aujourd'hui, il est proposé de franchir une nouvelle étape dans l'élaboration du droit du travail. On comprend mieux, dans ces conditions, le sens des déclarations de M. Chirac au Conseil économique et social du 10 octobre 2006 : « Il faut franchir une étape décisive : placer les partenaires sociaux au coeur de l'élaboration des normes et des réformes sociales. [...] Il faut plus de contrat et moins de loi. » Par la fabrication de nouvelles normes, une architecture institutionnelle se met en place subrepticement.
Dans ce cadre, les syndicats doivent retrouver une représentativité pour assurer un aspect démocratique à l'élaboration de règles de droit.
Ce rôle attribué aux syndicats doit-il s'exercer aux détriments des prérogatives du Parlement ? Certes, l'intervention du Parlement, ne serait-ce que par la voie de l'habilitation, reste indispensable, sauf à réviser préalablement la Constitution.
Dans ce contexte, on peut cependant s'interroger sur le rôle du Parlement. Si le Sénat demeure un lieu de représentation et d'expression auquel les collectivités territoriales sont attachées et que le Conseil économique et social devient un lieu de démocratie sociale, comment évoluera le fonctionnement des autres institutions, particulièrement dans le contexte européen ?
J'en viens à ma deuxième remarque. Vous avez intitulé le chapitre unique du présent projet de loi « Procédures de concertation, de consultation et d'information ». Le rapport Chertier avait rajouté à ces trois procédures la négociation. Le terme est cité dans ce projet de loi, mais la procédure de négociation a disparu, ce qui n'est pas neutre.
Ma troisième et dernière remarque porte sur le fait que la représentativité et le financement des organisations syndicales sont absents du projet de loi.
En mai dernier, M. Hadas-Lebel a remis au Premier ministre un rapport sur la représentativité et le financement des organisations syndicales, qui prévoit des scénarios d'adaptation ou de transformation.
Le rapport du Conseil économique et social « Consolider le dialogue social » a été adopté le 29 novembre 2006. Il est notamment proposé une refonte des règles de la représentativité. Or nous pouvons regretter que la question de la représentativité syndicale ne soit pas réglée par ce projet de loi dans la mesure où elle conditionne l'efficacité de la réforme.
On continue d'appliquer un système qui repose sur une présomption de représentativité accordée par un arrêté de 1966 au profit de cinq organisations syndicales. Dès lors, comment seront aménagées les conditions du dialogue social dans les petites entreprises, sachant que 53 % des entreprises comptent moins de cinquante salariés et 37 % moins de vingt salariés ?
Concernant les règles de validité des accords collectifs, il est primordial de défendre le principe de l'accord majoritaire signé par des organisations représentant la majorité des salariés.
En conclusion, l'actuelle majorité a déjà voté un texte quasiment identique dans la loi Fillon de mai 2004. Or, dans le même texte, le Gouvernement a fait adopter, par voie d'amendement, deux réformes majeures de notre droit du travail, et ce sans consultation préalable des partenaires sociaux.
Vous avez poursuivi par la réforme du contrat de travail en faisant adopter, par voie d'ordonnance cette fois, le contrat nouvelles embauches. Puis vous avez récidivé en tentant la même méthode, peu probante, avec le contrat première embauche.
Votre démarche s'est poursuivie dans le cadre du projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié.
Aussi, ce projet d'engagement vers un dialogue social ne manque pas d'apparaître comme un texte de circonstance.
Il est regrettable que cette modernisation du dialogue social arrive si tard. Vous présentez un texte dans des conditions d'examen tout à fait douteuses et dans un contexte dont on ne peut s'empêcher de penser qu'il a une toute autre vocation que celle que vous prétendez. L'urgence n'est pas soeur de la sagesse. Comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre, il faut du temps !
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Le dialogue social, ne vous en déplaise, nécessite un temps incompressible qui n'est pas celui des campagnes électorales.
Vous aurez beau tenter de passer en force - ici, nous avons coutume de dire en urgence - et user de méthodes peu orthodoxes, comme nous l'avons découvert hier dans la presse à propos des feuilles de route pour les complémentaires santé adressées hâtivement aux partenaires sociaux, votre conception du dialogue social modernisé n'est pas encore acquise ; vous auriez tort de croire le contraire !
Le dialogue, quel qu'il soit, implique un minimum de considération pour l'interlocuteur. Vous avez une fâcheuse tendance à négliger cet aspect.
M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail, après le mot :
emploi
insérer les mots :
, les garanties sociales
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Je citerai ici une phrase prononcée par Jacques Chirac devant le Conseil économique et social en octobre dernier : « Il ne sera plus possible de modifier le code du travail sans que les partenaires sociaux aient été mis en mesure de négocier sur le contenu de la réforme engagée. Et aucun projet de loi ne sera présenté au Parlement sans que les partenaires sociaux soient consultés sur son contenu ».
Pourtant, les domaines visés par le projet de loi étant limités aux relations individuelles et collectives du travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, ils ne correspondent donc que partiellement au champ actuel de la négociation collective tel qu'il est défini par l'article L. 131-1 du code du travail, à savoir l'ensemble des conditions d'emploi, de formation professionnelle et de travail et des garanties sociales.
La Commission nationale de la négociation collective pourra d'ailleurs désormais émettre un avis sur ces sujets, conformément à l'article 2 du projet de loi.
N'est-il pas étrange que cette commission puisse se saisir de questions ayant trait aux garanties sociales, mais que les « procédures de concertation, de consultation et d'information » ne puissent s'appliquer aux projets de réforme intéressant les garanties sociales ? Il conviendrait donc que l'ensemble des partenaires sociaux puissent être consultés sur de tels sujets.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Monsieur Desessard, vous avez dit que le champ du projet de loi était limité. Je trouve, au contraire, qu'il est très étendu : les relations de travail et la formation professionnelle concernent une bonne partie des textes que nous étudions.
Puisque votre amendement tend à modifier l'esprit de la loi, j'émets un avis défavorable.
Il faut laisser vivre le dialogue social, examiner son application aux relations du travail et, pourquoi pas ? revenir sur le sujet dans un ou deux ans. Ce dispositif pourra alors être étendu aux relations sociales si les modalités du dialogue social ont effectivement changé dans notre pays.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Tout d'abord, s'agissant de la définition du dialogue social, madame Jarraud-Vergnolle, l'Assemblée nationale a précisé qu'il s'agissait des procédures de concertation, de consultation et d'information. Nous avons repris ces termes avec Mme le rapporteur lors de la discussion générale. Désormais, le dialogue social a donc bien une définition. Je voulais répondre à votre interrogation, car ce sujet a fait l'objet de nombreux échanges avec les partenaires sociaux.
Monsieur Desessard, l'objet de cet article est de viser les relations individuelles et collectives du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Le sujet est déjà vaste ! Les questions économiques et financières, de protection sociale ou de politique fiscale relèvent, quant à elles, du code général des impôts ou du code de la sécurité sociale ; ce sont d'autres procédures de consultation et de concertation qui s'appliquent.
Mme le rapporteur a bien expliqué l'utilisation de la méthode expérimentale. Le champ du domaine social visé dans ce projet de loi est déjà extrêmement important. Apporter cette réponse représente un élément de profond changement.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 33.
Lors des discussions que nous avons eues avec différents partenaires, ces questions ont été soulevées. En Commission nationale de la négociation collective, l'ensemble des partenaires- je prends les plus réservés - a bien convenu qu'il était important d'être déjà « au milieu du gué », selon l'expression utilisée par Maryse Dumas. Lorsqu'on s'engage dans le gué, c'est avec l'idée de le passer !
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail, après les mots :
et d'employeurs
insérer les mots :
, et les organisations de chômeurs et précaires,
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Le droit d'exister des chômeurs et des travailleurs précaires, qui sont unis par une situation commune - au-delà de leurs différences et de leur dispersion -, passe également par le droit de se regrouper dans des structures qui prennent en compte l'hétérogénéité des situations de chômage, des trajectoires individuelles et des difficultés personnelles, et par le droit de disposer de mécanismes propres de représentation.
Le droit des chômeurs et des travailleurs précaires de s'associer et d'être représentés partout où leurs intérêts sont en jeu implique qu'il ne puisse y avoir de dialogue social sans partenariat actif avec ces organisations. Le monde agricole a bien prouvé que la dispersion géographique et l'hétérogénéité des structures, voire des intérêts, n'empêchent nullement de se doter de structures ou institutions représentatives, aidées par l'État, destinées à organiser une cogestion de la politique agricole.
Il doit en être de même dans le domaine du chômage et de la politique de l'emploi. Les organisations de chômeurs et de travailleurs précaires, qui seront déclarées représentatives selon des modalités qu'il conviendra de fixer par décret, doivent pouvoir accéder au statut de partenaire social et être associées à la procédure de concertation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
En effet, il ne lui semble pas indispensable, pour l'instant, de multiplier les parties prenantes à la concertation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Nous avons déjà abordé ce sujet à l'occasion d'un autre amendement de M. Desessard.
S'agissant de la représentation de la société, je vous rappelle que l'ensemble de la société civile, y compris l'économie solidaire, est représentée au sein du Conseil économique et social.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 4, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail, remplacer les mots :
représentatives au niveau national et interprofessionnel
par les mots :
les plus représentatives
La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
En l'état actuel des textes, les syndicats qui seront consultés avant la réforme du droit du travail sont désignés par l'expression : « les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ».
Or cette désignation ne nous semble pas excellente. Nous souhaiterions la remplacer par l'expression : « les organisations syndicales de salariés et d'employeurs les plus représentatives ». Du reste, cette dernière expression est déjà utilisée dans différents articles du code du travail.
Dans la mesure où le champ de la négociation est précisément défini par les termes de « négociation nationale et interprofessionnelle », prévoir que les organisations syndicales de salariés et d'employeurs doivent être représentatives au niveau national et interprofessionnel serait superfétatoire. En effet, en application des principes de la négociation collective, seules sont appelées à participer à une négociation les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives.
M. le président. L'amendement n° 37, présenté par M. Gournac, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail, remplacer les mots :
représentatives au niveau national et interprofessionnel
par le mot suivant :
concernées
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 4 ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La précision apportée par cet amendement ne nous paraît pas indispensable dans la mesure où la procédure de concertation s'applique aux réformes qui relèvent du champ de la négociation nationale interprofessionnelle. Les organisations qui y participent doivent donc être représentatives au niveau national et interprofessionnel.
Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. J'ai eu l'occasion, tout à l'heure, de faire le point sur les travaux de recodification qui ont lieu sous l'égide de la Commission supérieure de codification.
Si l'on examine l'ensemble des sédimentations qui ont formé le code du travail, on voit que sont indifféremment appliquées aux organisations syndicales les expressions « représentatives » ou « les plus représentatives ».
Selon l'analyse de la Commission, cette dernière expression est, en fait, dénuée de portée juridique réelle. Il est aujourd'hui convenu de s'en tenir à la notion d'organisations « représentatives ».
Cette précision me semble répondre à la préoccupation des auteurs de l'amendement. Je vous donne, en quelque sorte, une réponse anticipée, par l'intermédiaire de la Direction du travail.
Naturellement, à l'occasion de textes adoptés à des époques différentes, le débat pouvait porter sur le choix entre les deux expressions. Aujourd'hui, on considère que les termes « les plus représentatives » n'ont pas de portée juridique.
Nous aborderons ultérieurement la notion de représentativité ; elle a été définie par décret, elle pourrait l'être par une autre voie.
Quant aux préoccupations sectorielles que le terme « interprofessionnel » peut évoquer, j'y suis sensible, mais il s'agit là d'un autre sujet.
À la lumière de cet élément nouveau, le Gouvernement souhaite le retrait de l'amendement.
M. le président. Monsieur Biwer, l'amendement n° 4 est-il maintenu ?
M. Claude Biwer. Monsieur le ministre, nous voulions attirer votre attention sur des éléments de détail qui nous semblaient importants. Toutefois, compte tenu de vos explications, nous retirons cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 4 est retiré.
L'amendement n° 14, présenté par M. Gournac, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail, après les mots :
les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel
insérer les mots suivants :
, ainsi qu'avec les organisations syndicales d'employeurs représentatives au niveau national et intersectoriel des professions agricoles et libérales,
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 19, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail par les mots :
assorties d'une étude de leur impact sur le code du travail.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Retouché à de multiples reprises, vidé de ses mesures les moins consensuelles, telles que la fusion des quatre instances de concertation existantes en une seule, l'agenda partagé, ou les précisions sur les suites à donner à un accord, le projet de loi que nous examinons est passé de neuf à deux articles, afin de lui donner toutes les chances d'être adopté avant la fin de la session.
« Force est donc de constater que le projet de loi a perdu de son ambition par rapport aux intentions initiales du Gouvernement ou aux annonces du Président de la République. » : il s'agit là non pas de mes propres paroles, même si je partage pleinement cette appréciation, mais, textuellement, des réflexions transmises par l'UPA.
Au delà de ces regrets sur ce que le texte aurait dû contenir, il convient d'examiner un peu plus en détail le dispositif proposé à l'article 1er.
En ce qui concerne plus particulièrement la procédure de concertation préalable des partenaires sociaux sur tout projet de réforme envisagé par le Gouvernement qui porte sur les relations individuelles et collectives du travail, l'emploi ou la formation professionnelle, je ne reviendrai pas sur le champ des projets.
Il me semble en revanche utile de débattre de la manière dont est mise en oeuvre cette procédure.
Afin de permettre aux partenaires sociaux de disposer des éléments nécessaires relatifs à l'initiative du Gouvernement, l'article 1er fait obligation à ce dernier de transmettre « un document d'orientation présentant des éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options ».
Dans un souci de promotion d'un dialogue social de qualité, nous proposons que ce document d'orientation, qui fait état des principales options de la réforme envisagée, soit assorti d'une étude de leur impact sur le code du travail. Tel est l'objet de l'amendement n° 19.
Cette exigence a été portée par nos collègues à l'Assemblée nationale. Elle a été comprise par d'autres membres de l'opposition, mais mal interprétée par le ministre et sa majorité.
Nous n'entendons pas, au travers de ce dispositif, corseter la négociation, réduire son champ, et encore moins réintroduire les pratiques de consultation formelle sur des textes déjà adoptés. Nous veillons simplement à ce que les partenaires sociaux disposent de tous les éléments d'information nécessaires quant aux implications des solutions possibles, afin d'engager une concertation efficace.
Les études d'impact accompagnent bien les textes législatifs ; elles sont un outil précieux. Pourquoi n'accompagneraient-elles pas le document d'orientation ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Vous reprenez ici, monsieur Fischer, un amendement que M. Gremetz avait déjà présenté devant l'Assemblée nationale.
Vous dites ne pas vouloir corseter la négociation. Or l'étude d'impact que vous proposez briderait la créativité des organisations syndicales. À partir du moment où le Gouvernement remettrait une étude d'impact sur un projet avant même qu'aucune négociation ait été ouverte, les organisations syndicales se sentiraient muselées et ne pourraient émettre de propositions intéressantes.
Si de telles dispositions étaient adoptées, l'étude d'impact ne serait plus d'aucune utilité : elle devrait intervenir après que les négociations auraient abouti à un accord.
C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Mme Procaccia, dans sa conclusion, a résumé tout le principe de la négociation : il convient de ne pas préjuger de l'issue de celle-ci. Si étude d'impact il devait y avoir, elle relèverait de la responsabilité du Gouvernement, au moment où l'accord serait transposé. Il s'agirait alors d'examiner si les conditions d'application de l'accord sont conformes aux attentes des parties prenantes.
Les partenaires sociaux ne souhaitent pas entamer une négociation alors que le point d'arrivée en est prédéterminé. Un certain nombre d'entre eux, représentants de salariés notamment, nous ont d'ailleurs dit ne pas souhaiter ce type d'étude d'impact.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail, après les mots :
nécessaire pour
insérer les mots :
ouvrir et
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Toujours en ce qui concerne la procédure de consultation préalable des partenaires sociaux, il est à regretter que le projet de loi n'apporte pas plus de précisions quant aux conditions et aux modalités de négociation ; je ne suis pas le premier à le dire, et je ne serai pas le dernier.
Nous ne savons pas, par exemple, si un nombre maximal d'organisations patronales et syndicales sera requis pour l'ouverture de la négociation.
Il ne faudrait pas que perdure la situation actuelle et que les organisations syndicales restent dépendantes de la volonté des organisations patronales de convoquer ou non une négociation.
Mme Michèle Biaggi, que nous avons auditionnée, a insisté sur cet aspect : elle note que « la position commune de 2001 prévoyait un droit de saisine des organisations syndicales, mais que ce principe était resté lettre morte. » Le projet de loi règle-t-il ce problème ?
Nous ne savons pas davantage si le texte permettra de lever les blocages entravant des négociations qui s'éternisent, qui s'enlisent, parce qu'aucun accord ne paraît possible ou que les parties n'ont pas la volonté de conclure.
Vous faites confiance à la responsabilité de chacun des acteurs. Nous privilégions aussi cette voie, dans la mesure du possible. Nous pouvons cependant citer des cas de négociations où les volontés semblent manquer, sur la pénibilité du travail par exemple. Des accords relatifs aux PME et PMI ont été adoptés par toutes les organisations syndicales, mais le MEDEF et le Gouvernement s'y opposent, et les décrets ne paraissent pas !
Certes, il paraît difficile de fixer un délai unique, qui serait applicable à toutes les négociations. Toutefois, et là encore la réalité nous rattrape, certaines négociations peuvent durer des années, comme en témoignent celles qui concernent la pénibilité du travail.
Prenant précisément appui sur ce cas, deux des organisations syndicales auditionnées se sont montrées ouvertes à la fixation de dates butoirs sur certains sujets, ou à la prise éventuelle de sanctions, lorsque le comportement et les manoeuvres dilatoires des partenaires font perdre un certain temps à la négociation et, in fine, à l'évolution de la législation.
Monsieur le ministre, la balle est dans votre camp, si je puis m'exprimer ainsi. Cet amendement n'a pas pour objet d'encadrer strictement la négociation dans de brefs délais : il vise simplement à garantir que le Gouvernement sera informé dans des délais raisonnables de la volonté ou de l'absence de volonté des partenaires sociaux d'ouvrir la négociation.
Il s'agit d'une réflexion de bon sens, qui a toute sa place dans le débat que nous avons.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La nuance entre « ouvrir » et « conduire » des négociations me paraît subtile, monsieur Fischer. Vous n'avez pas convaincu la commission : contrairement à ce que vous affirmez, votre proposition alourdit à la fois le texte et le processus.
J'émets donc un avis défavorable.
M. Guy Fischer. C'est du parti pris !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. L'objet de cet amendement est satisfait par la rédaction actuelle du projet de loi, qui permet aux organisations syndicales et professionnelles de préciser à quel moment elles souhaitent ouvrir et mener la négociation ; elles demandent au Gouvernement le temps qui leur paraît nécessaire.
Nous avons déjà évoqué ce point en commission, vous le savez, monsieur Fischer, puisque vous êtes membre de la commission des affaires sociales. Nous l'avons également abordé lors de la discussion générale, ainsi que dans le cadre de la réponse aux orateurs.
Nous avions d'abord envisagé de fixer des délais, mais les concertations bilatérales que nous avons menées avec les partenaires sociaux nous ont montré que c'est en fait un changement d'état d'esprit qu'il faut susciter.
Voilà pourquoi nous ne sommes pas favorables à votre amendement, monsieur Fischer, d'autant que nous considérons que la pratique répondra, à terme, à vos préoccupations.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF.
L'amendement n° 27 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail.
La parole est à M. Claude Biwer, pour présenter l'amendement n° 1.
M. Claude Biwer. Cet amendement a pour objet de supprimer la possibilité, pour le Gouvernement, de ne pas procéder, en cas d'urgence, à une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives.
Nous tenons énormément à cet amendement, parce que l'exception d'urgence prévue dans le texte pourrait entièrement vider celui-ci de sa substance.
En effet, la notion d'urgence déclarée est peu contraignante et permettrait au Gouvernement de se soustraire à l'obligation de concertation qui est l'objet même de ce projet de loi de modernisation du dialogue social.
Au cours de cette législature, le Gouvernement a très souvent invoqué l'urgence pour les principaux textes sociaux. Au regard de la pratique gouvernementale récente, il est donc fort à craindre que la règle, posée par la loi, d'une concertation préalable avant toute réforme du droit du travail ne devienne, en fait, l'exception.
Conscients de ce risque, les députés ont amélioré l'article 1er en prévoyant l'obligation, pour le Gouvernement, de faire connaître aux syndicats sa décision motivée par un document écrit lorsqu'il mettra en oeuvre une réforme sans procédure de concertation.
C'est bien, mais c'est peut-être insuffisant. Si l'on veut que le présent texte ait une quelconque portée effective, si l'on veut donner à la démocratie sociale de notre pays une chance de se régénérer, il faut purement et simplement supprimer l'exception d'urgence.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 27.
M. Guy Fischer. Le projet de loi prévoit une exception à la procédure de concertation préalable des partenaires sociaux : en cas d'urgence déclarée par le Gouvernement, celui-ci pourra passer outre cette étape préliminaire.
Un amendement du rapporteur de l'Assemblée nationale, adopté à l'unanimité, est venu utilement encadrer le recours à l'urgence. Le Gouvernement devra faire connaître sa décision aux partenaires sociaux et sera tenu de la motiver. C'est là une garantie nécessaire, mais peut être insuffisante, même si les partenaires sociaux pourront toujours contester en justice la motivation avancée.
Bien que l'exposé des motifs dessine les contours du contenu de cette notion d'urgence déclarée - il s'agirait de cas exceptionnels, justifiés par exemple par des raisons touchant à l'ordre ou à la santé publics - et que l'adoption rapide d'un texte soit imposée, nous restons, malgré les gages donnés par le Gouvernement, extrêmement circonspects, sinon inquiets.
Notre amendement n° 27 visant à supprimer l'exception d'urgence doit être compris comme un témoignage de cette méfiance à l'égard du Gouvernement, lequel nous a habitués, ces cinq dernières années, à recourir sans limites et sans véritables raisons, sauf de convenance, à recourir à tout va à la procédure d'urgence parlementaire.
M. Jean Desessard. Absolument !
M. Guy Fischer. Au lendemain du « non » au référendum sur le traité visant à instituer une constitution européenne, il y avait urgence à légiférer par ordonnances pour résoudre le problème du chômage des jeunes, lequel s'enracinait et s'aggravait depuis trois ans, sans que le Gouvernement ait cru bon d'intervenir avec l'aide des partenaires sociaux !
Cet amendement doit aussi être compris comme un appel au futur gouvernement pour que cette procédure d'urgence, bien distincte de la procédure d'urgence parlementaire, conserve réellement son caractère exceptionnel.
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail, après les mots :
en l'absence de procédure de concertation, il
insérer les mots :
réunit et
La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. L'objet de cet amendement est de prévoir que, lorsqu'il recourra à la procédure d'urgence, le Gouvernement sera tenu de réunir les syndicats pour leur exposer ses motivations.
J'ai cru comprendre, monsieur Fischer, que nous menions le même combat. Nous allons peut-être retirer ensemble nos amendements identiques, par lesquels nous demandions la suppression de l'exception d'urgence.
M. Guy Fischer. Moi ? Jamais ! Je veux laisser des traces ! (Sourires.)
M. Claude Biwer. C'est pourquoi mon groupe a prévu cet amendement de repli par rapport à l'amendement n° 1.
A minima, il est fondamental d'aménager cette exception d'urgence, qui pourrait vider le projet de loi de sa substance s'il en était fait un usage abusif. Les députés se sont déjà engagés dans cette voie en précisant, je l'ai indiqué tout à l'heure, que le Gouvernement devra communiquer aux syndicats les motivations du recours à cette procédure.
À nos yeux, toutefois, cela n'est pas suffisant. Non seulement le Gouvernement doit communiquer les motivations aux syndicats par écrit, mais il doit aussi réunir ceux-ci pour leur permettre de se prononcer sur l'invocation de l'urgence. Il est élémentaire de procéder ainsi pour que soit respecté le principe du contradictoire et pour que la démocratie sociale ne soit pas totalement vidée de son contenu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 1 et 27, ainsi que sur l'amendement n° 2 ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Les amendements identiques nos 1 et 27 remettent en cause l'exception d'urgence. Or celle-ci apporte une souplesse qui nous paraît importante et qui pourrait s'avérer utile, en particulier en cas de crise sanitaire. L'avis de la commission est donc défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 2, qui me laisse très dubitative, je souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Je répondrai d'abord à votre interrogation, madame le rapporteur, à propos de l'amendement n° 2.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale pour le quatrième alinéa de l'article L. 101-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Le présent article n'est pas applicable en cas d'urgence. Lorsque le Gouvernement décide de mettre en oeuvre un projet de réforme en l'absence de procédure de concertation, il fait connaître cette décision aux organisations mentionnées ci-dessus en la motivant dans un document qu'il transmet à ces organisations avant de prendre toute mesure nécessitée par l'urgence. »
Cette rédaction me paraît correspondre à un équilibre satisfaisant entre le respect de l'exigence de transparence et le souci de prendre en compte la réalité, qui veut qu'il existe des situations d'urgence, évoquées par Mme le rapporteur, dans lesquelles, conformément aux usages de notre droit public, il ne serait pas raisonnable d'imposer aux pouvoirs publics des procédures qui retarderaient la mise en oeuvre d'un texte.
Je souhaite donc, monsieur Biwer, que vous retiriez cet amendement, au bénéfice du texte issu des travaux de l'Assemblée nationale. Mme le rapporteur et moi-même avons eu l'occasion, lors de la discussion générale, d'insister tout particulièrement sur ce sujet. Naturellement, le recours à la procédure d'urgence ne doit pas permettre un détournement d'objet : en ce cas, d'ailleurs, le Conseil d'État nous rappellerait très rapidement à l'ordre !
La communication aux organisations syndicales des motivations du recours à la procédure d'urgence me paraît être un garde-fou, monsieur Biwer. Le débat que vous ouvrez sur ce point rejoint celui qui a eu lieu à l'Assemblée nationale et qui a permis d'aboutir à un équilibre, la rédaction actuelle répondant, à mon sens, à vos préoccupations. Voilà pourquoi je souhaite que vous retiriez l'amendement n° 2.
Quant aux amendements identiques nos 1 et 27, le Gouvernement y est défavorable.
M. le président. Monsieur Biwer, les amendements nos 1 et 2 sont-ils maintenus ?
M. Claude Biwer. Je voulais faire cause commune avec M. Fischer, mais il m'a donné à comprendre qu'il n'était pas d'accord pour retirer son amendement !
Je retirerai cependant les deux amendements qu'a déposés le groupe Union centriste-UDF, à la suite des précisions que vous venez de nous apporter, monsieur le ministre. Cela étant, il convient parfois de rappeler que l'urgence ne doit pas être invoquée trop fréquemment !
M. le président. Les amendements nos 1 et 2 sont retirés.
La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote sur l'amendement n° 27.
M. Guy Fischer. Pour donner à M. Biwer et au groupe Union centriste-UDF une chance de poursuivre notre chemin commun, je demande un scrutin public sur l'amendement n° 27 !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 92 :
Nombre de votants | 322 |
Nombre de suffrages exprimés | 314 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 158 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 194 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 3, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le début du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-2 du code du travail :
Au vu des résultats de la procédure de concertation et de négociation, lorsqu'il y a lieu de légiférer, le Gouvernement prépare dans un délai de six mois les projets de textes législatifs et réglementaires élaborés dans le champ défini par l'article L. 101-1, et les soumet selon le cas...
La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. Cet amendement vise à préciser que, d'une part, tous les accords ne doivent pas nécessairement faire l'objet d'une transposition législative, mais que, d'autre part, lorsque c'est le cas, le Gouvernement doit élaborer les projets de textes législatifs et réglementaires dans un délai déterminé, afin de garantir que les procédures de concertation soient suivies d'effet dans un délai raisonnable.
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par Mmes Le Texier, Printz et Jarraud-Vergnolle, MM. Madec et Desessard, Mmes Demontès, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Godefroy, Domeizel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 101-1 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé :
« Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Il s'agit d'un amendement de précision, au sens littéral du terme.
La rédaction du projet de loi demeure floue s'agissant du déroulement de la procédure de consultation et de concertation. Le Gouvernement peut-il nous éclairer sur la manière dont les partenaires sociaux lui feront connaître leur intention d'engager une négociation ? Devront-ils se prononcer à l'unanimité ou à la majorité qualifiée, par exemple deux organisations sur trois pour le patronat ou trois syndicats sur cinq pour les salariés ? Cette étape fera-t-elle l'objet d'une négociation informelle ?
Quel sera le poids du document d'orientation remis par le Gouvernement ? Les options proposées seront-elles limitatives ou pourront-elles être laissées de côté ? Les partenaires sociaux pourront-ils définir de nouveaux objectifs ? Le Gouvernement sera-t-il lié par le résultat de la négociation, et si oui dans quelle mesure ? Que se passera-t-il si trois syndicats sur cinq parviennent à un accord ? Considérera-t-on alors que la négociation a réussi, selon les règles fixées par la loi de 2004 ?
On voit bien qu'il est nécessaire, pour donner une portée réelle à ce texte, de régler d'abord la question de la représentativité et de revenir sur les modalités de conclusion des accords, ainsi que sur la question de leur validité.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a heureusement mis un terme au quiproquo concernant la déclaration d'urgence.
Il n'en demeure pas moins que l'urgence est une notion floue. On nous cite l'exemple de l'urgence sanitaire. C'est, en effet, un aspect indiscutable, mais pourquoi n'évoque-t-on pas l'urgence sociale ?
Pourrait-on imaginer, par exemple, une grève importante et longue qui nécessiterait, selon le Gouvernement, de prendre des mesures d'urgence, comme l'interdiction du droit de grève dans un secteur d'activité ?
Cela étant, nous avons appris par la presse que le Gouvernement a déjà appliqué ce texte avant qu'il ne soit voté par le Parlement. C'est dire en quelle estime le Gouvernement tient les parlementaires !
Toutefois, à quelque chose malheur est bon : nous disposons ainsi d'une sorte de prototype, d'essai grandeur nature, qui mettra en lumière ce qui ne nous est pas dit clairement dans le projet de loi. Mais est-ce vraiment de bonne méthode ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 3 et 13 ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 13, la commission considère que le projet de loi est déjà complet en l'état et qu'il peut être appliqué immédiatement.
Lors de mon intervention dans la discussion générale, j'ai parlé de manoeuvres dilatoires. Je n'ose penser que tel est le cas en l'occurrence, mais il faut que le texte s'applique le plus rapidement possible. La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 13.
S'agissant de l'amendement n° 3, si la procédure de concertation révèle une opposition franche des partenaires sociaux à la réforme proposée par le Gouvernement, ce dernier doit être en mesure de renoncer à son projet. En tout état de cause, il serait absurde de lui imposer d'élaborer un texte par décret. La commission émet donc un avis franchement défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le président du Conseil constitutionnel, en présentant ses voeux pour l'année 2005, avait souhaité des textes courts, d'application immédiate... (M. Henri de Raincourt sourit.)
Le présent texte, qui a en outre été préparé pendant plus d'une année, après l'élaboration d'un rapport préalable, la consultation de la Commission nationale de la négociation collective puis la conduite d'une vaste concertation, éclairée par un second rapport, répond typiquement à ces critères.
Par conséquent, retenir la disposition présentée à l'amendement n° 13 n'aurait aucun sens au regard de ce que nous avons souhaité faire. Ce texte vise à instaurer de nouveaux rapports entre les acteurs du dialogue social, sans les enfermer dans des contraintes trop rigides. S'il est voté dans cette rédaction, il sera applicable dès sa promulgation, ce qui amènera le Gouvernement, dans les semaines à venir, à se montrer extrêmement attentif, car les propositions qu'il fera devront répondre aux conditions du dialogue social ainsi posées.
Telles sont les raisons pour lesquelles j'ai indiqué tout à l'heure que ce dispositif était de nature à faire évoluer certains modes d'action : on veut parfois aller très vite en court-circuitant le dialogue social, tentation à laquelle ont pu céder tous les gouvernements au long de ces vingt dernières années.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 13.
En ce qui concerne l'amendement n° 3, monsieur Biwer, la volonté du Gouvernement est de veiller à ce que les procédures de concertation permettent l'élaboration des textes législatifs et réglementaires de transposition des accords.
Il faut cependant que cela soit réalisé dans le respect des étapes de consultation prévues par les textes, mettant en jeu la Commission nationale de la négociation collective, le Comité supérieur de l'emploi ou le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie. Tout dépendra donc du contenu du texte et de son degré de complexité.
Or encadrer l'action du Gouvernement par des délais trop contraignants limiterait la souplesse qu'exige la procédure de consultation. En effet, il faudra parfois consulter à deux reprises la Commission nationale de la négociation collective, afin de prendre en compte les modifications suggérées par celle-ci. Le pouvoir d'initiative du Gouvernement se trouverait également limité, ce qui poserait un problème constitutionnel.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Biwer, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Jean Desessard. Retrait, monsieur Biwer !
M. Claude Biwer. Monsieur le ministre, si vous aviez pu donner dès maintenant l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 5, que je n'ai pas encore présenté, j'aurais retiré mes deux amendements en même temps ! (Rires.)
M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 13.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 101-3 du code du travail, insérer une phrase ainsi rédigée :
Au cours de cette réunion, le Gouvernement présente une information concernant les réformes envisagées dans les autres domaines sociaux où interviennent les partenaires sociaux, notamment celles concernant les garanties sociales.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Nos collègues députés du groupe communiste et républicain ont demandé l'élargissement du champ de la procédure de consultation préalable des partenaires sociaux aux textes ayant trait à la protection sociale.
Comprenant l'argument avancé par M. le ministre, qui considère que la sphère d'intervention des partenaires sociaux doit correspondre à celle des réformes accompagnées traditionnellement par le ministère chargé du travail, nous n'avons pas repris cette proposition.
Nous n'abandonnons pas, pour autant, l'idée qu'une certaine cohérence doit être garantie avec l'ensemble des réformes envisagées par les pouvoirs publics, même si les questions traitées font l'objet de procédures de concertation avec les partenaires sociaux dans le cadre d'instances spécifiques compétentes en la matière.
Si l'on admet - ce qui est la réalité - que les réformes concernant l'assurance chômage ou le domaine de la santé au travail ont une incidence sur le quotidien des salariés, l'emploi et les conditions de travail, il faut s'assurer de leur mise en perspective avec les réformes en cours ou à venir touchant directement aux matières relevant de la négociation collective.
A minima, donc, nous envisageons, comme le propose d'ailleurs la CFE-CGC dans sa contribution au présent débat, que, à l'occasion de la présentation annuelle à la Commission nationale de la négociation collective des orientations de sa politique dans le domaine des relations individuelles et collectives du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, le Gouvernement informe les partenaires sociaux des réformes envisagées en matière de garanties sociales.
Nous couvrirons ainsi, par exemple, les questions relatives à la retraite, à la santé au travail, à la garantie des salaires, à l'assurance chômage et à la prévoyance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Mon cher collègue, vous prévoyez d'élargir le champ de la procédure visée à d'autres domaines sociaux : une telle proposition nous semble étrangère à l'objet du projet de loi qui nous est soumis.
Certes, la commission est très favorable à une concertation approfondie sur toutes les questions relatives à la protection sociale, mais ce projet de loi constitue un ensemble, dont l'adoption de cet amendement remettrait en cause la cohérence.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Cette question a déjà été abordée lors de l'examen d'un autre amendement, émanant du groupe socialiste.
Le Gouvernement ne peut être favorable à une extension du champ de la procédure de consultation préalable des partenaires sociaux. Si d'autres domaines devaient un jour être concernés, ce serait dans un autre cadre.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 35, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 101-3 du code du travail, ajouter un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Tout projet de réforme qui porte sur le régime de l'assurance chômage fait l'objet d'une concertation préalable avec les organisations de chômeurs et précaires déclarées représentatives au sens de l'article L. 100-2. »
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Pour les demandeurs d'emploi et les travailleurs précaires, le droit d'exister, j'y insiste, c'est le droit de s'associer et d'être représentés partout où leurs intérêts sont en jeu.
Ils doivent donc, comme tout un chacun, pouvoir faire valoir leurs droits aussi en matière d'assurance chômage, notamment faire entendre leur voix dans les structures responsables de la gestion et de l'administration de ce régime, l'UNEDIC et l'ANPE, desquelles ils sont pour le moment totalement exclus.
Que l'on n'invoque pas l'idée fausse selon laquelle les syndicats représenteraient les demandeurs d'emploi et qu'il n'y aurait pas d'opposition d'intérêts entre ceux-ci et les salariés en place !
Je prendrai un exemple à cet égard.
Pour que les chômeurs retrouvent un emploi, nous dit-on, il faut leur accorder dans un premier temps une indemnité dégressive, puis plus rien du tout, afin de les pousser à retrouver un travail.
Or ce raisonnement est faux, puisqu'il y a toujours autant de chômeurs. Certains d'entre eux bénéficient d'abord d'indemnités dégressives, puis perçoivent l'allocation spécifique de solidarité, l'ASS, le RMI, et finissent par ne plus avoir les moyens de se loger ou de se vêtir, ce qui rend encore plus difficile la recherche d'un emploi. Leur réinsertion coûte alors très cher à la société.
Or, dans les années soixante-dix, à une époque où ce raisonnement aurait pu être juste car il y avait peu de chômage, on versait des indemnités représentant 90 % de l'ancien salaire brut. Cela durait au minimum un an, et ensuite la dégressivité était faible. Pourtant, on aurait pu estimer qu'il ne fallait pas indemniser autant les chômeurs, puisque le marché du travail était beaucoup moins tendu.
Le problème central, on le voit bien, tient donc non pas au niveau de l'indemnisation, mais au fait que les demandeurs d'emploi sont très nombreux et que l'argent manque.
En effet, cet argent provient soit des cotisations sociales des salariés, soit de celles des employeurs. Or, pour maintenir le pouvoir d'achat des salariés et les profits des entreprises, employeurs et syndicats de salariés ont objectivement accepté la dégressivité de l'indemnisation des demandeurs d'emploi et entériné le fait que l'assurance chômage soit une protection provisoire.
Faute de représentation significative des chômeurs dans les syndicats de salariés permettant de mener une action prenant en compte leurs intérêts, il convient de combler le vide social en associant les organisations de chômeurs aux réformes de l'assurance chômage et à la gestion du service public qui les concerne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Monsieur Desessard, il n'existe pas d'organisation représentative des chômeurs et des personnes en situation précaire. Dans ces conditions, je ne vois pas comment la commission pourrait émettre un avis favorable sur votre amendement.
De plus, le régime d'assurance chômage est géré de façon conventionnelle par les organisations patronales et les syndicats de salariés. Il leur revient donc, éventuellement, de décider d'associer des représentants des demandeurs d'emploi à cette gestion. Un texte n'est nullement nécessaire à cette fin, ils pourraient le faire dès maintenant s'ils le souhaitaient.
M. Jean Desessard. Justement ! Ils ne le veulent pas !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. La Haute Assemblée s'est déjà exprimée sur ce sujet en suivant la commission et le Gouvernement.
La gestion de l'assurance chômage est paritaire, et il revient donc aux partenaires sociaux d'en définir les conditions, s'agissant notamment du soutien aux chômeurs et de l'aide au retour à l'emploi.
Ainsi, dans cette optique, les partenaires sociaux se sont mis d'accord par voie conventionnelle sur la mise en place des contrats de professionnalisation, notamment pour permettre à ceux qui recherchent un emploi de se former, et sur le soutien à la création d'emploi pour les chômeurs, qui concerne 30 % de ceux-ci.
Voilà des aspects extrêmement positifs, mais c'est aux partenaires sociaux de décider. L'État n'intervient qu'en cas d'absence d'accord entre eux. C'est un domaine qui relève de leur responsabilité.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de trois mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement élabore un document d'orientation sur la réforme des règles de représentativité des organisations professionnelles et syndicales ainsi que sur les mesures législatives et réglementaires envisagées selon la procédure de l'article L. 101-1 du code du travail.
La parole est à M. Claude Biwer.
M. Claude Biwer. J'ai cru comprendre que Mme le rapporteur et M. le ministre souhaitent le retrait cet amendement. Je le retire donc, sans attendre qu'ils m'y invitent ! (Rires.)
M. le président. L'amendement n° 5 est retiré.
L'amendement n° 21, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 96 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises est abrogé.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Il nous paraît particulièrement opportun, en cette occasion, d'abroger l'article 96 de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises.
En effet, sur la forme, les dispositions de cet article, portant de deux à quatre ans la durée du mandat des délégués du personnel, ne répondent nullement aux exigences que l'on se propose d'inscrire maintenant dans la loi.
L'article 96 ne figurait d'ailleurs pas dans le projet de loi initial ; il y a été introduit en catimini, en pleine période des congés d'été.
La pratique consistant à modifier profondément des dispositions essentielles du droit du travail dans de telles conditions et de manière unilatérale nous apparaît particulièrement inadaptée.
En effet, le Gouvernement doit se montrer cohérent dans sa volonté de moderniser le dialogue social. Par conséquent, les dispositions que j'ai évoquées, adoptées en dehors de toute concertation pendant l'été 2005, doivent maintenant être abrogées.
À cet égard, nous souhaitons rappeler ici l'opposition totale des principaux syndicats au passage de deux à quatre ans de la durée du mandat des délégués du personnel.
En outre, les effets de cette disposition nous paraissent tout à fait préjudiciables au bon fonctionnement de l'entreprise. La représentativité des syndicats n'a plus à être démontrée devant les électeurs au travers des actes quotidiens, puisque le candidat élu a la certitude de garder son mandat pendant au moins quatre ans, sans avoir de compte à rendre à personne. Or ni les syndicats, ni les employés, ni même les chefs d'entreprise n'ont intérêt à ce que le lien se distende entre les délégués du personnel et ceux qui les ont élus.
À l'occasion de l'examen du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, nous avions déjà manifesté notre franche hostilité à cette disposition, largement inspirée du rapport de M. Virville, visant, pour rendre le code du travail plus efficace, à affaiblir les comités d'entreprise.
Nous tenions, dans le cadre du présent débat, à revenir sur cette mesure qui, on en conviendra, est largement préjudiciable au développement de vraies relations sociales, puisqu'elle tend à remettre en cause les espaces de démocratie au sein de l'entreprise.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, qui vise à abroger une disposition que le Sénat avait adoptée lors de la discussion d'un projet de loi dont j'étais le rapporteur pour avis au nom de la commission des affaires sociales. Je n'ai pas changé de conviction.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Sans reprendre le titre d'une chanson célèbre, je dirai que moi non plus, je n'ai pas changé ! (Sourires.) Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 15 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 est abrogé.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Depuis 2002, le Gouvernement s'est particulièrement distingué par son mépris de toute concertation sociale préalable à ses décisions.
L'épisode du cavalier relatif au secteur des hôtels, cafés et restaurants, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, fut à cet égard tout à fait exemplaire.
En effet, en 2004, des partenaires sociaux de ce secteur avaient conclu un accord, qui fut invalidé par le Conseil d'État en octobre 2006, car il dérogeait à la loi sur les 35 heures. On pouvait, dès lors, s'attendre à ce que le Gouvernement laisse les syndicats et les patrons négocier à nouveau. Or pas du tout ! La majorité s'est empressée de voter un amendement rétablissant l'accord défait par le Conseil d'État ! C'est un véritable défi à la justice !
En outre, si l'accord signé par les partenaires sociaux ne satisfaisait pas à la loi sur les 35 heures, c'est un nouvel accord, plus progressiste, conclu dans le respect du dialogue social, qui aurait dû intervenir.
Or, au lieu de laisser le temps à la concertation de s'instaurer, vous avez choisi le passage en force, en décidant de nouvelles exonérations de cotisations et aides spécifiques à l'emploi, sans aucune contrepartie en termes de créations d'emplois : et allons-y, nous sommes en période préélectorale !
Trois mois plus tard, vous prétendez, avec le présent projet de loi, défendre les vertus du dialogue social. C'est un spectaculaire revirement au regard de vos pratiques !
Et ce n'est pas tout ! Vous avez inscrit, à l'article 15 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, la date butoir du 31 janvier 2007 pour la conclusion d'un nouvel accord entre les partenaires sociaux. Cette démarche est parfaitement étrangère à la notion de dialogue social : il s'agit, ni plus ni moins, d'un ultimatum ! Reconnaissez cette évidence et, au nom de la modernisation du dialogue social, abrogez cet article ! Mais vous n'en ferez rien...
M. Jean Desessard. Pessimiste !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Jamais un gouvernement n'a consacré autant d'efforts à la relance de la négociation collective dans ce secteur d'activité.
Après une première réunion, le 3 janvier dernier, au cours de laquelle des propositions concrètes ont été présentées, les partenaires sociaux se retrouveront le 22 janvier. Le dialogue social est donc vivant, même s'il est en l'occurrence sectoriel, et non interprofessionnel.
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 51 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social est abrogé.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement tend à dénoncer, lui aussi, les mauvaises pratiques du Gouvernement, les dérives en tout genre allant à l'encontre de l'esprit de la présente réforme du dialogue social.
Nous avons tous en mémoire les mesures de la loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social. Certaines de ces mesures, en particulier, sans aucun lien avec l'objet de la loi, ont modifié substantiellement le code du travail.
Le Gouvernement, une fois encore, alors qu'il s'était engagé à consulter les partenaires sociaux sur ses projets de réforme ayant des conséquences sur le code du travail, était passé en force en imposant, via des cavaliers, que des mesures supprimées par un vote unanime des députés soient réintroduites par le Sénat. Vous ne pouvez pas me démentir sur ce point, monsieur le ministre !
L'urgence ayant été déclarée pour ce projet de loi et la commission mixte paritaire s'étant réunie rapidement, nous n'avions plus aucun moyen d'amender le texte.
Toutefois, considérant que l'article modifiant le dispositif applicable à la justice prud'homale méritait mieux qu'un tel traitement, dans la mesure où était engagée une information des partenaires sociaux sur le contenu des évolutions envisagées et où l'ensemble des organisations syndicales s'opposaient vivement au nouveau dispositif d'indemnisation pour l'exercice des fonctions de conseiller au tribunal des prud'hommes, notre collègue Roland Muzeau vous avait demandé par courrier, monsieur le ministre, de déclarer recevable un amendement de suppression de cet article, qui vous permet de publier sans délai le décret forfaitisant les rémunérations des magistrats.
Vous n'avez même pas pris la peine de lui répondre, ni de vous expliquer ! Peut-être le ferez-vous ce soir ? En tout cas, nous revenons à la charge ! Non seulement ces pratiques sont discutables sur la forme, mais nous craignons qu'elles ne soient sources de conflits sur le fond.
La délégation intersyndicale que nous avons reçue a déploré ce semblant de concertation et l'autoritarisme du Gouvernement, notamment du ministre chargé de ce dossier. Vous devez entendre leur inquiétude de ne plus disposer de moyens leur permettant de motiver correctement leurs décisions.
Vous devez prendre la mesure des risques que votre réforme fait courir aux salariés et à la fonction de magistrat prud'homal, monsieur le ministre. Je suis persuadé que vous ne voulez pas d'une justice prud'homale au rabais, ni d'un conflit la paralysant.
Par conséquent, consentez à suspendre la parution du décret et acceptez que les termes de ce dernier soient redéfinis dans la concertation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Ce sujet n'entre pas dans le champ du présent texte, mais il est néanmoins important. C'est pourquoi je tiens à apporter quelques éléments d'information à la Haute Assemblée.
Les règles relatives à l'indemnisation des conseillers prud'homaux ont été élaborées en 1982, voilà maintenant bientôt vingt-cinq ans, et, de l'avis général, elles ne correspondent plus à la réalité du fonctionnement des juridictions.
En septembre 2004, le procureur général Henri Desclaux s'est donc vu confier une mission sur le régime d'indemnisation des conseillers prud'homaux. Il a travaillé en concertation avec ces derniers, ainsi qu'avec les partenaires sociaux et l'ensemble de ceux qui concourent au fonctionnement de cette juridiction.
Le 5 octobre 2005, M. Desclaux remettait son rapport. Le ministère chargé du travail et celui de la justice ont alors préparé, dans la ligne des préconisations de ce rapport, des mesures législatives et réglementaires visant à réformer le dispositif actuel. Ces textes ont fait l'objet d'un double examen par le Conseil supérieur de la prud'homie, en mai et en octobre 2006.
Les dispositions concernant le régime d'indemnisation des conseillers prud'hommes ont ensuite été insérées dans la loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, qui a été promulguée après validation de ces mesures par le Conseil constitutionnel.
Il appartient donc au Gouvernement de définir, par la voie d'un décret en Conseil d'État et d'un décret simple, les modalités d'application de ces dispositions.
Le Gouvernement considère que l'élaboration de ces décrets doit s'inscrire dans une démarche de dialogue et de concertation. Chacun doit comprendre l'enjeu que représente cette réforme, du point de vue tant des exigences de la justice prud'homale que de la nécessaire maîtrise des coûts budgétaires.
J'ai donc pris la décision, en concertation avec la direction des services judiciaires du ministère de la justice, de mettre en place, sur la base des projets présentés et sous l'autorité du directeur général du travail et du directeur des services judiciaires, un dialogue avec les différents acteurs, notamment les chefs de juridiction et les organisations syndicales et professionnelles concernées.
Un rapport visant à faire la synthèse de cette concertation et à proposer des mesures de nature à permettre une mise en oeuvre efficace de la réforme doit m'être remis.
Dans ces conditions, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 25. Je tenais à apporter ces éléments d'information, car des sénateurs siégeant sur toutes les travées de la Haute Assemblée s'étaient fait l'écho des préoccupations de différentes organisations.
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Je remercie M. le ministre des informations qu'il vient de nous donner. J'espère que les discussions qui vont s'engager et les rapports qui en découleront permettront de trouver une solution. Cette solution devra faire l'objet de véritables négociations avec les organisations syndicales, car, monsieur le ministre, cette réforme n'était pas comprise. Il faudra donc faire un gros effort d'explication.
Cela étant, instruit par vos pratiques de ces cinq dernières années, je ne me fais pas d'illusions. Néanmoins, je prends acte de votre réponse et du premier pas qui vient d'être fait. Je voudrais pouvoir être plus optimiste, mais c'est, malheureusement, le seul rayon de soleil que nous aurons vu poindre dans ce débat, en dépit des nombreuses propositions que nous avons formulées, qui ont toutes été repoussées, avec la même dureté, par Mme le rapporteur et par M. le ministre. (Sourires.)
M. Jean Desessard. Un rayon de soleil à vingt heures trente, c'est précieux !
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 213-1-1 du code du travail est supprimé.
II. - Le troisième alinéa de l'article L. 213-4 du même code est supprimé.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement très important, sur lequel Roland Muzeau et moi-même avons beaucoup travaillé, est dédié à M. Dassault ! (Rires.)
Nous proposons de revenir sur les dispositions dérogatoires au droit commun concernant le travail de nuit dans le secteur de la presse, lesquelles ont été introduites, sans concertation, par voie d'amendement, lors d'une séance de nuit, à une heure très avancée, sur l'initiative de M. de Broissia, qui était très certainement missionné pour appliquer les consignes de M. Dassault.
M. Guy Fischer. Je ne me fais pas d'illusions sur le sort qui sera réservé à cet amendement, mais je souhaitais, en conclusion de la discussion des articles de ce projet de loi, vous adresser ce clin d'oeil, monsieur Dassault, de la part de mon ami Roland Muzeau ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui est sans lien avec l'objet du texte. C'est presque un cavalier !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Fischer, les nuits sont sans soleil !
Le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à cet amendement. Je rappelle que des négociations sont en cours dans le secteur visé.
M. le président. L'amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 15° de l'article L. 934-2 du code du travail, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° La formation obligatoire, chaque année, durant le temps de travail, de l'ensemble des salariés d'une entreprise, employant plus de 10 personnes, relatives aux conditions de fonctionnement de la micro et de la macro-économie ;
« ...° L'information sur la situation de l'entreprise face aux conditions du marché, à la concurrence, à la hausse des prix, à l'évolution du carnet de commandes et à l'affectation des résultats ; ».
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Nicolas About, président de la commission. C'est un clin d'oeil à M. Muzeau ! (Sourires.)
M. Serge Dassault. Je ne me souviens pas avoir assisté ici, à une heure très tardive, à un débat sur le travail de nuit dans la presse ! J'aimerais que l'on m'en présente le compte rendu, car je ne suis pas souvent présent dans cet hémicycle la nuit, heureusement ! Par ailleurs, j'avoue que le travail de nuit dans la presse ne m'est pas un sujet très familier.
Monsieur le ministre, dialoguer signifie parler ensemble. Pour ce faire, il faut pratiquer une même langue, qui doit être apprise. Or les difficultés des relations entre les entreprises, les syndicats de salariés et le Gouvernement viennent du fait que tous ces acteurs ne parlent pas la même langue et ne disposent pas des mêmes informations.
C'est pour cette raison que la formation, d'abord, et l'information, ensuite, sont si importantes pour améliorer les rapports entre les uns et les autres. Chacun doit disposer à la fois de la même formation économique et des mêmes informations sur l'entreprise.
Cependant, on ne parviendra à un résultat que si les actions de formation et d'information des salariés sont rendues obligatoires, comme je l'avais déjà demandé lors de la discussion du projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié. Si elles sont facultatives, elles ne seront pas mises en oeuvre et le dispositif restera sans effet, or il est indispensable que les salariés et leurs délégués syndicaux puissent comprendre la vie de l'entreprise.
Je rappellerai en outre que le dialogue social ne concerne pas uniquement les syndicats. En effet, tous les salariés, prétendument protégés par les syndicats auxquels ils font confiance, y sont intéressés. Si j'utilise le terme « prétendument », c'est parce que, malheureusement, dans certains cas, qui sont assez nombreux, l'intransigeance des syndicats peut condamner une entreprise à disparaître et réduire tous les salariés au chômage.
Il importe donc au plus haut point de former et d'informer les salariés, afin que ces derniers puissent juger par eux-mêmes de la situation de l'entreprise, sans laisser les syndicats prendre à leur place des décisions qui ne leur seraient pas favorables.
Telle est la raison pour laquelle j'insiste, monsieur le ministre, pour que soit inscrite, dans ce projet de loi ou dans un autre texte, l'obligation, pour tous les chefs d'entreprise, de dispenser une formation économique et une information à tout le personnel - y compris aux délégués syndicaux, qui eux aussi ont bien besoin, à l'instar, peut-être, de certains sénateurs, de mieux connaître le fonctionnement et l'utilité de l'entreprise.
Le défaut de formation et d'information engendre en effet bien souvent des problèmes difficiles, voire des grèves. À l'heure actuelle, certains chefs d'entreprise assurent de leur propre initiative des formations à destination de leur personnel, mais il n'existe aucune contrainte légale. Je suis donc favorable à ce que l'on oblige tous les chefs d'entreprise à donner à leur personnel les mêmes informations que celles qu'ils communiquent à leurs actionnaires lors de l'assemblée générale. Les salariés doivent être informés directement, par leur chef d'entreprise, de tout ce qui se passe, sans que leurs syndicats servent forcément d'intermédiaires. De véritables réunions d'information du personnel doivent être organisées.
Si l'application de ces dispositions ne devient pas obligatoire, elles resteront lettre morte, et le dialogue social que vous souhaitez, monsieur le ministre, ne se mettra pas en place dans des conditions satisfaisantes, parce que ses différents acteurs ne parleront pas la même langue.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. Au cours de l'examen du projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, vous nous aviez déjà, monsieur Dassault, exposé cette proposition, dont nous avions débattu en commission. Je connais donc votre attachement sincère à ce projet, qui, malheureusement, n'entre pas dans le champ couvert par ce texte.
Au demeurant, même si une telle mesure n'est peut-être pas d'ordre législatif, je suis persuadée que l'économie devrait, effectivement, être davantage enseignée dans les entreprises. À cet égard, je me souviens que, dans le cadre de mon activité professionnelle, des syndicalistes venaient me voir pour me demander des explications sur ce qui avait été dit au comité d'entreprise.
La commission vous demande donc, monsieur Dassault, de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. À l'occasion de l'examen du projet de loi du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, vous étiez intervenu à plusieurs reprises, monsieur Dassault, pour évoquer l'importance de l'information et de la formation économique des salariés.
Or vos préoccupations ont déjà été prises en compte dans le code du travail, par le biais de certaines dispositions de la loi précitée, à l'élaboration de laquelle vous avez participé en tant que rapporteur pour avis.
Ainsi, aux termes de l'article 45 de la loi, qui complète l'article L. 902 du code du travail, entrent dans le champ de la formation professionnelle continue « les actions de formation relatives à l'économie de l'entreprise. Elles ont notamment pour objet la compréhension par les salariés du fonctionnement et des enjeux de l'entreprise. »
Par ailleurs, le 16° de l'article L. 934-2 du code du travail, que vous proposez de modifier, prévoit que la négociation de branche sur la formation professionnelle porte sur « la définition et les conditions de mise en oeuvre à titre facultatif d'actions de formation économique en vue de mieux comprendre la gestion et les objectifs de l'entreprise dans le cadre de la concurrence internationale ». Il s'agit donc de mieux faire appréhender les enjeux de la globalisation pour l'entreprise.
Le code du travail répond donc, monsieur le sénateur, à vos préoccupations concernant les points sur lesquels vous avez insisté.
En revanche, il nous faut introduire l'information sur le fonctionnement de l'entreprise, qui est, à l'heure actuelle, bien insuffisante, dans les programmes de formation professionnelle et de formation professionnelle continue, qui relèvent non pas de la loi, mais de la responsabilité, en quelque sorte, de mon département ministériel.
En vertu de cette assurance, je souhaite donc que vous retiriez l'amendement n° 29 rectifié. Je me ferai le héraut de la nécessité d'inscrire, dans les programmes de formation professionnelle, l'économie de l'entreprise, ainsi que la prise en compte de l'enjeu européen et de la mondialisation.
J'ai d'ailleurs commencé par évoquer ce point lors de mon intervention dans la discussion générale : nous ne pouvons plus considérer que notre univers se limite à l'Hexagone ; sa dimension est celle de l'Union européenne, et même du monde. Les entreprises doivent donc agir en fonction de cette réalité. Parallèlement, il nous faut préserver la cohésion sociale, en ne faisant pas du dumping social la règle de l'adaptation au monde.
Je m'engage donc à porter cette idée, qui me paraît tout à fait importante. Je demanderai à la DGEFP, la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, de retenir cette orientation. Quoi qu'il en soit, à l'heure actuelle, de nombreux textes du code du travail contiennent déjà des mesures similaires à celles que vous présentez, monsieur Dassault. C'est la mise en oeuvre effective de ces dispositions qui doit être notre objectif.
C'est pourquoi je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer l'amendement n° 29 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 29 rectifié est-il maintenu, monsieur Dassault ?
M. Serge Dassault. Monsieur le ministre, vous nous avez donné lecture de mesures inscrites dans la loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, mais je ne suis pas certain que leur application soit obligatoire. Or si tel n'est pas le cas, rien ne se fera.
Il est très facile d'organiser des cours de formation économique dans les entreprises, en faisant appel à des sociétés spécialisées extérieures, afin d'expliquer aux salariés les problèmes relatifs à la gestion d'entreprise. Cependant, je le répète, si aucune obligation n'est prévue, nous ne progresserons pas. La formation et l'information économiques des salariés et de leurs délégués syndicaux, qui participent au comité d'entreprise, doivent être rendues obligatoires par le code du travail ou par un autre texte.
Au demeurant, à la suite de vos explications, je retire l'amendement n° 29 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 29 rectifié est retiré.
Article 2
I. - Le 2° de l'article L. 136-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« 2° D'émettre un avis sur les projets de loi, d'ordonnance et de décret relatifs aux règles générales relatives aux relations individuelles et collectives du travail, notamment celles concernant la négociation collective ; ».
II. - Après le premier alinéa de l'article L. 322-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité est chargé d'émettre un avis sur les projets de loi, d'ordonnance et de décret relatifs à l'emploi. » - (Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte dont nous venons de débattre ne marquera pas les annales législatives. Ambigu et imprécis, il est le fruit d'un travail superficiel et d'un souci d'affichage social en période électorale.
Dans les faits, il ne changera pas grand-chose à l'existant, tant les procédures de contournement permettront de le vider de toute substance, au gré du Gouvernement. Il suffira que des parlementaires déposent une proposition de loi ou que le Gouvernement invoque le prétexte de l'urgence pour que l'exécutif puisse reprendre d'une main ce qu'il aura donné de l'autre.
Ce projet de loi ne crée pas d'obligation réelle. Pis encore, il institue une confusion entre la négociation collective, contraignante en droit, et la notion de dialogue social, en rien contraignante ! C'est ainsi se donner, à peu de frais et sans grand engagement, une bonne conscience sociale.
Si dialoguer pour éviter que les conflits ne se cristallisent en affrontements est louable, que ne l'avez-vous fait plus tôt, monsieur le ministre ? Aviez-vous besoin d'un projet de loi pour inciter les partenaires sociaux à s'emparer d'un thème qui les concerne ? Vous le savez bien, les syndicats répondent toujours présents quand on les sollicite, mais, durant cette législature, c'est vous qui les avez écartés de l'élaboration de toutes les lois les concernant.
En l'espèce, la commande qui vous a été passée par le MEDEF était claire : autonomiser le droit du travail pour faire prévaloir, à terme, le contrat sur la loi. Il faut reconnaître que vous vous êtes montrés, chers collègues de la majorité, les serviteurs zélés de votre clientèle électorale, comme en témoignent les coups portés, au travers du CPE et du CNE, à la notion de contrat de travail.
Même si vous êtes encore au milieu du gué, votre objectif est de plus en plus évident : distinguer ce qui relève de la loi de ce qui relève du dialogue entre les partenaires sociaux.
En soi, ce choix pourrait être intéressant. Cependant, en l'état actuel du rapport de force entre syndicats et patronat, il risque de se révéler nocif pour les droits et la sécurité juridique des salariés.
Si réellement vous vous étiez soucié de la revitalisation du dialogue social, monsieur le ministre, point n'aurait été besoin de ce projet de loi ; relancer les procédures de négociation collective eût suffi.
Si réellement vous aviez souhaité que les négociations entre partenaires sociaux puissent déboucher sur des accords viables et opposables en droit, il aurait fallu revenir aux fondamentaux. Oui, je persiste et je signe : seul le respect de la hiérarchie des normes peut garantir la portée effective et la validité de ces accords.
Si réellement vous aviez voulu développer la culture de l'échange et du compromis et faire du dialogue social autre chose que l'alibi de cinq années de casse du droit du travail, alors vous n'auriez pas choisi d'écarter toute proposition concernant la représentativité des syndicats.
Nul ne conteste que passer d'une culture du conflit à une culture de la négociation est souvent plus agréable et plus efficace pour opérer les réformes que toute société doit affronter. Mais, pour cela, il faut que le rapport de force entre syndicats et patronat soit équilibré.
Monsieur le ministre, la démocratie sociale méritait mieux que ce texte indigent. Néanmoins, nous comprenons que les syndicats, après avoir subi toute une législature votre toute-puissance et s'être vu écartés de toute consultation sur les sujets les concernant, apprécient ce temps de consultation que vous leur promettez.
Nous espérons que, contrairement à ce qui s'est passé pour la loi Fillon de 2004, qui portait déjà sur le dialogue social, vous respecterez cette fois-ci vos engagements. L'expérience nous a malheureusement appris que c'était rarement le cas.
Toutefois, parce que nous comprenons l'importance, pour les syndicats, de disposer de ce temps d'échange et de revendication, le groupe socialiste a choisi de s'abstenir sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame le rapporteur, monsieur le ministre, par le biais de la présentation de nos différents amendements, j'ai eu l'occasion d'exposer notre appréciation de la politique gouvernementale menée au cours des cinq années de cette législature : il est évident qu'elle mérite d'être sanctionnée ! J'en ai fait la démonstration s'agissant d'un sujet aussi important que celui de la représentativité syndicale.
Certes, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, vous êtes les premiers à avoir ouvert le dossier.
M. Guy Fischer. Cependant, combien de fois avez-vous bafoué la représentation syndicale en imposant vos points de vue ! Aujourd'hui, nous ne nous faisons aucune illusion quant à votre volonté de fonder la représentativité syndicale sur des élections, de respecter les accords majoritaires et de combattre les inégalités de fait et de droit !
Nous avons en effet pu constater, au long de ces cinq années, la collusion qui existe entre le Gouvernement et le MEDEF. Ainsi, dans le secteur des petites et moyennes entreprises, le Gouvernement n'a pas hésité, en se fondant sur la volonté exprimée par le MEDEF et la CGPME, à bloquer la mise en oeuvre d'un accord qui faisait l'unanimité parmi les syndicats.
Même s'il n'est plus temps de faire le point, on peut dire qu'une politique de « détricotage » du code du travail et de déréglementation forcenée a été conduite au cours de ces cinq ans ! Une mutation profonde a eu lieu, afin de faire prévaloir l'accord d'entreprise sur l'accord de branche ou sur l'accord interprofessionnel, avec la volonté de faire primer le contrat sur la loi.
Par conséquent, aujourd'hui, nous ne sommes pas convaincus par ce texte, qui comporte, notamment avec l'exception d'urgence, les outils de son contournement !
Certes, les organisations syndicales considèrent que ce texte est un premier pas, un tout petit pas. Nous avons constaté, lors des tables rondes qui ont été organisées, leur volonté de tenter l'expérience. Personnellement, je la juge illusoire, même si j'aimerais être démenti par les faits dans les prochaines semaines. Quoi qu'il en soit, nous saurons y revenir !
Beaucoup restera donc à faire après l'adoption d'un texte de circonstance, a minima, vide de substance. C'est la raison pour laquelle, comme je l'avais annoncé lors de la discussion générale, nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. Bernard Seillier, pour explication de vote.
M. Bernard Seillier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la genèse du progrès collectif ne repose sur aucune catégorie particulière d'acteurs qui bénéficierait, en quelque sorte, de l'exclusivité de l'initiative et du pouvoir.
Ce projet de loi de modernisation du dialogue social inscrit la coopération entre tous dans les procédures, et pas seulement dans les principes. C'est un progrès essentiel, car c'est, je crois, la seule méthode pour faire évoluer les mentalités, afin qu'elles soient non plus génératrices de conflits, comme elles peuvent l'être dans une approche manichéenne par catégories, mais génératrices de concorde, par l'habitude de la recherche de compromis pratiques entre les acteurs concernés.
Cette avancée est donc, en soi, importante. Je forme le voeu qu'elle marque le début d'une évolution de la définition et de l'élaboration de notre droit qui se poursuivra jusqu'à concerner, au-delà des personnes qui ont un emploi, tous les citoyens, même ceux qui sont, momentanément je l'espère, en situation d'exclusion.
C'est la raison pour laquelle les membres du groupe du RDSE ne s'opposeront pas à l'adoption de ce texte ; une moitié d'entre eux votera pour et l'autre s'abstiendra.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question reste posée : pourquoi, à l'approche d'échéances électorales aussi importantes, le Gouvernement présente-t-il, à la hâte, un projet de loi de modernisation du dialogue social au contenu on ne peut plus léger ?
Malgré le talent oratoire du ministre, malgré son éloquence, susceptible de faire naître un rayon de soleil à vingt heures trente en plein hiver (Sourires), de nous faire croire qu'une poignée de main avec un responsable syndical équivaut à de nouveaux accords de Grenelle, qu'une réunion syndicale permettrait des avancées dignes du Front populaire, je n'ai pas encore pu répondre à cette question ! Pourtant, quelle éloquence, quel talent, monsieur le ministre !
M. Jean Desessard. En réalité, pourquoi un tel projet de loi ? S'agirait-il de tenir en fin de course, mais sans rien réellement réformer, une promesse présidentielle jamais traduite dans la pratique durant cinq années de sabotage du code du travail et de passage en force ? S'agit-il d'un affichage en fin de mandat présidentiel ? S'agit-il, pour le Premier ministre, d'exprimer ses remords à la suite de la crise du CPE ? Le Premier ministre souffre-t-il d'une « troublitude » psychanalytique, ne sachant plus exactement où il en est ? Il ne sait pas s'il doit aller à Versailles, il ne sait pas s'il doit voter pour M. Sarkozy, il ne sait pas s'il a eu raison à propos du CPE, il ne sait pas s'il faut élaborer une loi de modernisation du dialogue social...
À moins que la vraie raison du dépôt de ce texte ne soit tout autre : craignez-vous que le candidat libéral que vous soutenez soit si impulsif que, s'agissant du code du travail, il faille freiner d'emblée ses ardeurs en faisant en sorte qu'aucune transformation sociale ne soit possible sans consultation des syndicats de salariés ?
En tout état de cause, je ne sais toujours pas pourquoi ce projet de loi nous est aujourd'hui présenté, d'autant qu'il ne contient vraiment pas grand-chose !
En dépit des nombreuses déclarations du président Chirac exprimant sa volonté de promouvoir le dialogue social et de l'engagement pris par M. Fillon de donner la priorité à la négociation collective avant toute réforme législative touchant aux relations du travail, ce projet de loi n'apportera pas le nouveau souffle annoncé et ne modernisera en rien le dialogue social.
En effet, ce projet de loi reporte la réforme tant attendue des règles de validité des accords collectifs et de représentativité des organisations patronales et des syndicats, aujourd'hui figées par l'arrêté de 1966. Le système actuel de représentation est non démocratique, monopolistique et immuable ; s'il était appliqué aux partis politiques, seuls les radicaux - de gauche ou valoisiens, je ne sais pas - et le Parti communiste français existeraient aujourd'hui. C'est grotesque !
Monsieur le ministre, pourquoi avoir sollicité l'avis du Conseil économique et social si l'on n'en retient rien ? Le Premier ministre lui-même s'est pourtant déclaré « personnellement favorable » à la proposition que lui a remise, à sa demande, le Conseil économique et social le 30 novembre dernier, et qui consiste à asseoir la représentativité des syndicats sur des choix exprimés par les salariés lors d'élections professionnelles et à mettre en place un système de validation majoritaire en voix pour la conclusion des accords collectifs.
Dans la logique des déclarations du Premier ministre, le projet de loi aurait dû engager cette réforme, que nous souhaitons. Nous sommes bien éloignés des objectifs de modernisation du dialogue social avec ce projet de loi qui maintient la désignation d'interlocuteurs institutionnalisés, issus d'un autre monde qui n'a pas pris en compte les mutations des formes d'organisation du travail, la diversification des relations de travail - au travers des CDD, de l'intérim, du temps partiel -, la modification de l'équilibre des rapports entre employeurs et salariés, pourtant au coeur même du dialogue social, qui s'en trouve bouleversé.
Comment peut-on prétendre moderniser le dialogue social quand on signifie, par ce texte, que la démocratie n'a pas sa place dans l'entreprise et qu'il n'est pas question de remettre en cause les rapports de force actuels en son sein ?
Enfin, comment peut-on raisonnablement parler de dialogue social quand une partie de la population dite active se trouve totalement écartée du processus ?
Anciens travailleurs à la recherche d'un emploi et travailleurs en situation de précarité n'ont en effet aujourd'hui aucun des moyens dont disposent les travailleurs en activité pour influer sur les décisions essentielles concernant l'organisation du travail.
Non salariés ou à moitié, ils ne peuvent être représentés dans les organisations syndicales, dont la vocation est de faire valoir les droits et les intérêts d'une population dite pleinement active. Quant aux associations ou organisations de chômeurs et de travailleurs en situation précaire, telles que le Mouvement national des chômeurs et précaires, le MNCP, Agir ensemble contre le chômage ou l'Association pour l'emploi, l'information et la solidarité des chômeurs et des précaires, l'APEIS, elles ne sont pas non plus considérées comme des partenaires sociaux et sont donc mises à l'écart de toute procédure de consultation, de concertation et de négociation en matière de travail.
Ces mêmes chômeurs et précaires sont tout aussi invisibles et inaudibles lorsqu'il s'agit de discuter de l'organisation du régime d'assurance chômage.
Pour que le chômeur ou le salarié en situation précaire se sente encore concerné par le monde du travail, il faudrait qu'on lui permette de s'impliquer dans l'organisation de celui-ci et que l'on ne se contente pas de lui reprocher, comme on peut le faire ici et là, de bénéficier du système sans y participer.
Sauf à les condamner à subir en silence les aléas des politiques successives de traitement du chômage, il serait donc tout à fait logique que les chômeurs soient eux aussi représentés au sein des structures compétentes.
C'est pourquoi j'ai proposé de faire participer, selon des modalités à définir, l'ensemble de la population active à l'élection des représentants syndicaux et d'élargir la concertation préalable, notamment pour toute réforme du régime d'assurance chômage, aux associations ou organisations de chômeurs, dont la représentativité pourrait être déterminée par décret.
Une autre proposition est de mettre à contribution l'État pour le financement d'un chèque associatif ou syndical d'adhésion, destiné à ne pas décourager ceux pour qui le coût de la vie est déjà exorbitant. Pour les demandeurs d'emploi et les travailleurs précaires, le droit d'exister, c'est le droit de s'associer et d'être représentés partout où leurs intérêts sont en jeu.
Monsieur le ministre, vous nous avez dit que ce texte était une première pierre, sur laquelle nous bâtirons ensuite le dialogue social. Pour ma part, je considère qu'il ne s'agit que d'un gros caillou, jeté n'importe comment dans le champ des relations du travail. La société d'aujourd'hui, la représentativité actuelle des syndicats, la précarité qui règne de nos jours ne sont aucunement prises en considération. En l'absence de tout projet de société cohérent, vous aurez beau apporter des pierres, cela ne mènera pas à l'édification d'un projet social.
En conclusion, je m'abstiendrai sur ce texte, bien que l'envie ne me manque pas de voter contre !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est définitivement adopté.)
7
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Jeudi 18 janvier 2007 :
À 10 heures et à 15 heures :
Ordre du jour prioritaire
1°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé (n° 108, 2006 2007) ;
(La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les délais limites pour les inscriptions de parole et le dépôt d'amendements sont expirés) ;
Ordre du jour complémentaire
2°) Conclusions de la commission des affaires économiques (n° 147, 2006 2007) sur la proposition de loi portant création d'un établissement public de gestion des équipements publics du quartier d'affaires dit de « La Défense », présentée par M. Roger Karoutchi (n° 140, 2006 2007) ;
(La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les délais limites pour les inscriptions de parole et le dépôt d'amendements sont expirés).
Mardi 23 janvier 2007 :
Ordre du jour réservé
À 10 heures, à 16 heures et le soir :
1°) Proposition de loi portant réforme des minima sociaux, présentée par Mme Valérie Létard, M. Nicolas About, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Anne-Marie Payet, MM. Michel Mercier et Bernard Seillier (n° 425, 2005-2006) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 22 janvier 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 22 janvier 2007) ;
2°) Proposition de loi relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur, présentée par M. Francis Giraud et plusieurs de ses collègues (n° 90, 2006 2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 22 janvier 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 22 janvier 2007) ;
3°) Conclusions de la commission des lois (n° 160, 2006-2007) sur :
- la proposition de loi relative aux contrats d'assurance de protection juridique, présentée par M. Pierre Jarlier et plusieurs de ses collègues (n° 85, 2006-2007) ;
- la proposition de loi visant à réformer l'assurance de protection juridique, présentée par M. François Zocchetto (n° 86, 2006 2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 22 janvier 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 22 janvier 2007) ;
4°) Question orale avec débat (n° 25) de Mme Gisèle Gautier relative au bilan d'application de la loi d'initiative sénatoriale n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre des mineurs ;
(La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 22 janvier 2007).
Mercredi 24 janvier 2007 :
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
1°) Projet de loi relatif à l'expérimentation du transfert de la gestion des fonds structurels européens (n° 31, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 23 janvier 2007, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 23 janvier 2007) ;
2°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament (n° 155, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 23 janvier 2007, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 23 janvier 2007).
Jeudi 25 janvier 2007 :
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire
1°) Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le gouvernement de la Fédération de Russie relatif à une coopération en matière de destruction des stocks d'armes chimiques en Fédération de Russie (n° 87, 2006-2007) ;
(Pour ce projet de loi, la conférence des présidents a décidé de recourir à la procédure simplifiée ;
Selon cette procédure simplifiée, le projet de loi est directement mis aux voix par le président de séance. Toutefois, un groupe politique peut demander, au plus tard le mardi 23 janvier 2007 à 17 heures que le projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle) ;
2°) Projet de loi autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention pénale sur la corruption (n° 450, 2004-2005) ;
3°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport (n° 153, 2006-2007) ;
4°) Suite du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament.
À 15 heures et le soir :
5°) Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire
6°) Suite de l'ordre du jour du matin ;
Ordre du jour complémentaire
7°) Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation (n° 22, 2005-2006) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 22 janvier 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 24 janvier 2007).
Mardi 30 janvier 2007 :
À 10 heures :
1°) Dix-huit questions orales :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 1107 de Mme Anne-Marie Payet à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales ;
(Seuils d'éligibilité au régime fiscal de la micro entreprise) ;
- n° 1184 de M. André Vallet à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Saturation de l'axe autoroutier Valence-Orange) ;
- n° 1193 de M. Bernard Murat à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Allègement de la redevance ANAEM pour les arboriculteurs) ;
- n° 1198 de M. Francis Grignon à M. le garde des sceaux, ministre de la justice ;
(Projet de réforme du système de nomination des notaires en Alsace-Moselle) ;
- n° 1199 de M. Bernard Piras à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Reconversion de certains types de bâtiments agricoles) ;
- n° 1201 de M. Henri de Richemont à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Évolution de la réglementation européenne dans le domaine des spiritueux) ;
- n° 1203 de M. Jean-Claude Peyronnet à M. le garde des sceaux, ministre de la justice ;
(Cité judiciaire de Limoges) ;
- n° 1204 de M. Claude Biwer à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales ;
(Financement des transferts de compétences aux collectivités territoriales) ;
- n° 1208 de Mme Marie-France Beaufils à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche ;
(Difficultés des établissements publics d'enseignement technique agricole) ;
- n° 1209 de Mme Bernadette Dupont à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Reprise de médicaments et matériels médicaux non utilisés) ;
- n° 1210 de M. Michel Billout à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Décentralisation des aérodromes civils et compensation des transferts de charges) ;
- n° 1212 de M. Philippe Richert à M. le ministre de la culture et de la communication ;
(Réforme du statut et du rôle des architectes en chef des monuments historiques) ;
- n° 1213 de M. Bernard Vera à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Conditions d'enseignement de l'éducation physique et sportive) ;
- n° 1214 de M. Thierry Repentin à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Instauration de diverses mesures en faveur du développement durable) ;
- n° 1219 de M. Alain Fouché à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable ;
(Élaboration des plans départementaux d'élimination des déchets ménagers et assimilés) ;
- n° 1222 de M. Simon Sutour à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
(Libéralisation du régime d'assurance des catastrophes naturelles) ;
- n° 1224 de M. Xavier Pintat à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Sécurité et surveillance du littoral aquitain) ;
- n° 1226 de M. Christian Cambon à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire ;
(Indemnisation des assesseurs appelés à composer les bureaux de vote lors des élections) ;
Ordre du jour prioritaire
À 16 heures et le soir :
2°) Projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale (n° 170, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 29 janvier 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 29 janvier 2007).
Mercredi 31 janvier 2007 :
Ordre du jour prioritaire
À 10 heures, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
Jeudi 1er février 2007
Ordre du jour prioritaire
À 11 heures :
1°) Éventuellement, suite du projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale ;
2°) Projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats (n° 125, 2006-2007) ;
3°) Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale (n° 133, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune ;
La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 29 janvier 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ces deux textes ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale commune, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 31 janvier 2007) ;
À 15 heures et le soir :
4°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament ;
5°) Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 6 février 2007 :
À 10 heures :
1°) Quatorze questions orales :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 1104 de M. Claude Biwer à M. le ministre délégué au tourisme ;
(Création d'un office de tourisme intercommunal) ;
- n° 1175 de M. Jean Boyer à M. le ministre de la culture et de la communication ;
(Mise en place de la télévision numérique terrestre en Haute-Loire) ;
- n° 1183 de M. André Vallet à M. le ministre de la fonction publique ;
(Effectifs des agents des communautés) ;
- n° 1196 de M. Gérard Delfau à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
(Établissements scolaires du second degré dans l'Hérault) ;
- n° 1202 de M. Alain Milon à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Situation des familles affectées par la perte d'une enfant) ;
- n° 1211 de M. Bruno Retailleau à M. le garde des sceaux, ministre de la justice ;
(Possibilité pour les collectivités territoriales de se constituer partie civile en cas de catastrophe environnementale intervenue sur leur territoire) ;
- n° 1215 de M. Georges Mouly à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ;
(Projet de création d'une ligne à grande vitesse entre Poitiers et Limoges) ;
- n° 1216 de Mme Muguette Dini à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ;
(Suspension de l'agrément des assistant(e)s maternel(le)s en cas de suspicion de maltraitance) ;
- n° 1217 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État ;
(Affectation du produit de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat) ;
- n° 1218 de Mme Marie-Thérèse Hermange à M. le ministre de la santé et des solidarités ;
(Interruption volontaire de grossesse et clause de conscience des personnels médicaux) ;
- n° 1221 de M. François Vendasi à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
(Cherté de la vie en Corse) ;
- n° 1223 de M. Nicolas About à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes ;
(Assurance chômage et pension d'invalidité) ;
- n° 1229 de M. Jean-Marc Todeschini à M. le ministre délégué à l'industrie ;
(Avenir de la pétrochimie en Moselle et devenir de la plateforme de Carling) ;
- n° 1231 de M. Bruno Sido à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement ;
(Non-gratuité des numéros verts des services publics pendant les temps d'attente) ;
Ordre du jour prioritaire
À 16 heures et le soir :
2°) Suite du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats et du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale.
Mercredi 7 février 2007 :
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
1°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi constitutionnelle relatif à l'interdiction de la peine de mort (A.N., n° 3596) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 6 février 2007, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 6 février 2007) ;
2°) Projet de loi constitutionnelle, adopté par l'Assemblée nationale, portant modification du titre IX de la Constitution (n° 162, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 6 février 2007, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 6 février 2007) ;
3°) Suite du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats et du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale.
Jeudi 8 février 2007 :
À 9 heures 30 :
1°) Dépôt par M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, du rapport annuel de la Cour des comptes ;
Ordre du jour prioritaire
2°) Suite du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats et du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale ;
3°) Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, réformant la protection de l'enfance (n° 154, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 6 février 2007, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à une heure trente la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 7 février 2007) ;
À 15 heures et le soir :
4°) Questions d'actualité au Gouvernement ;
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire
5°) Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 13 février 2007 :
Ordre du jour réservé
À 10 heures, à 16 heures et le soir :
1°) Question orale avec débat (n° 24) de M. Jean-Paul Emorine à M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire sur les pôles de compétitivité ;
(La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 février 2007) ;
2°) Proposition de loi de M. Philippe Richert tendant à modifier le régime des candidatures pour les élections municipales dans les communes de moins de 3 500 habitants (n° 310 rectifié, 2004-2005) et proposition de loi organique de M. Philippe Richert relative aux modalités de candidature aux élections municipales des citoyens de l'Union européenne résidant en France (n° 171, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 12 février 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ces deux textes ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale commune, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 février 2007) ;
3°) Proposition de loi de M. Nicolas Alfonsi tendant à modifier certaines dispositions relatives au fonctionnement de la collectivité territoriale de Corse (n° 156, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 12 février 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 février 2007) ;
4°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi relative à la création de l'établissement public Cultures France, présentée par M. Louis Duvernois (n° 126, 2006-2007) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 12 février 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 12 février 2007).
Mercredi 14 février 2007 :
À 10 heures 30 :
1°) Question orale avec débat (n° 26) de M. Jean-Paul Virapoullé à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur relative à la création d'un observatoire des pratiques du commerce international et de la modernisation ;
(La conférence des présidents a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 13 février 2007) ;
Ordre du jour prioritaire
À 15 heures et le soir :
2°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions des commissions mixtes paritaires sur les projets de lois organique et ordinaire portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer ;
3°) Suite éventuelle de la deuxième lecture du projet de loi réformant la protection de l'enfance ;
4°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi portant réforme de la protection juridique des majeurs (Urgence déclarée) (A.N., n° 3462) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 12 février 2007, à 16 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce texte ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 13 février 2007).
Jeudi 15 février 2007 :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
1°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur ;
2°) Suite du projet de loi portant réforme de la protection juridique des majeurs.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.
8
DÉPÔT D'UNE question orale avec débat
M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante :
N° 27 - Le 25 janvier 2007 - M. Gérard Cornu demande à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, de dresser le bilan de l'application de la loi n° 2005 882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, texte très attendu par le monde de l'artisanat et du commerce et qu'il avait lui-même rapporté pour la commission des affaires économiques. Il souhaiterait connaître la liste des mesures d'application prises à ce jour, ainsi que celles restant à prendre, étant précisé leur état d'avancement et leur calendrier prévisionnel de publication.
(Déposée le 17 janvier 2007 - annoncée en séance publique le 17 janvier 2007.)
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.
9
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi instituant le droit opposable au logement et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 171, distribué et renvoyé à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
10
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI constitutionnelle
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi constitutionnelle, adopté par l'Assemblée nationale, portant modification du titre IX de la Constitution.
Le projet de loi constitutionnelle sera imprimé sous le n° 162, distribué et renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
11
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI organique
M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Richert une proposition de loi organique relative aux modalités de candidature aux élections municipales des citoyens de l'Union européenne résidant en France.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 171, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
12
DÉPÔT D'unE PROPOSITION DE LOI
M. le président. J'ai reçu de Mme Hélène Luc, MM. Guy Fischer, Robert Bret, Robert Hue, Mmes Eliane Assassi, Nicole Borvo Cohen-Seat, Marie-France Beaufils, M. Michel Billout, Mmes Annie David, Michelle Demessine, Evelyne Didier, M. Thierry Foucaud, Mme Gélita Hoarau, M. Gérard Le Cam, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Roland Muzeau, Jack Ralite, Ivan Renar, Bernard Vera, Jean-François Voguet, François Autain et Pierre Biarnès une proposition de loi tendant à modifier certaines dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre sur le délai de présomption d'imputabilité applicable aux maladies radio-induites.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 168, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
13
TRANSMISSION D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président. J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions intéressant la Banque de France.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 169, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
14
TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Conseil relative à la signature d'un protocole entre la Communauté européenne, la Confédération suisse et la Principauté de Liechtenstein relatif à l'adhésion de la Principauté de Liechtenstein à l'accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse relatif aux critères et mécanismes de détermination de l'État responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans un État membre ou en Suisse. Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un protocole entre la Communauté européenne, la Confédération suisse et la Principauté de Liechtenstein relatif à l'adhésion de la Principauté de Liechtenstein à l'accord entre la Communauté européenne et la Confédération suisse relatif aux critères et mécanismes de détermination de l'État responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans un État membre ou en Suisse.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3392 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 93/109/CE du Conseil, du 6 décembre 1993, en ce qui concerne certaines modalités de l'exercice du droit de vote et d'éligibilité aux élections au Parlement européen pour les citoyens de l'Union résidant dans un État membre dont ils ne sont pas ressortissants.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3393 et distribué.
15
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président. J'ai reçu de M. Yves Détraigne un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur :
- la proposition de loi de MM. Pierre Jarlier, Laurent Béteille, François-Noël Buffet, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, René Garrec, Patrice Gélard, Charles Guené, Jean-René Lecerf, Hugues Portelli, Henri de Richemont, Bernard Saugey et Mme Catherine Troendle, relative aux contrats d'assurance de protection juridique (n° 85, 2006-2007) ;
- la proposition de loi de M. François Zocchetto, visant à réformer l'assurance de protection juridique (n° 86, 2006-2007).
Le rapport sera imprimé sous le n° 160 et distribué.
J'ai reçu de Mme Catherine Troendle un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi relatif à l'expérimentation du transfert de la gestion des fonds structurels européens (n° 31, 2006-2007).
Le rapport sera imprimé sous le n° 161 et distribué.
J'ai reçu de M. Gilbert Barbier un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament (n° 155, 2006-2007).
Le rapport sera imprimé sous le n° 163 et distribué.
J'ai reçu de Mme Hélène Luc un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport (n° 153, 2006-2007).
Le rapport sera imprimé sous le n° 164 et distribué.
J'ai reçu de M. Robert Del Picchia un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord de dialogue politique et de coopération entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et la Communauté andine et ses pays membres (Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou et Venezuela), d'autre part (n° 72, 2006-2007).
Le rapport sera imprimé sous le n° 165 et distribué.
J'ai reçu de M. Michel Guerry un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant la ratification de l'accord de dialogue politique et de coopération entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et les Républiques du Costa Rica, d'El Salvador, du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua et du Panama, d'autre part (n° 73, 2006-2007).
Le rapport sera imprimé sous le n° 166 et distribué.
16
DÉPÔT D'UN avis
M. le président. J'ai reçu de M. Alain Dufaut un avis présenté au nom de la commission des affaires culturelles sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport (n° 153, 2006-2007).
L'avis sera imprimé sous le n° 167 et distribué.
17
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 18 janvier 2007, à dix heures et à quinze heures :
1. Discussion du projet de loi (n° 108, 2006-2007) relatif à l'accès au crédit des personnes présentant un risque aggravé de santé, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence.
Rapport (n° 151, 2006-2007) de Mme Marie-Thérèse Hermange, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
2. Discussion des conclusions du rapport (n° 147, 2006-2007) de M. Dominique Braye, fait au nom de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi (n° 140, 2006-2007), présentée par M. Roger Karoutchi, portant création d'un établissement public de gestion des équipements publics du quartier d'affaires dit de « La Défense ».
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 159, 2006-2007) sur la proposition de loi relative à la préparation du système de santé à des menaces sanitaires de grande ampleur, présentée par M. Francis Giraud et plusieurs de ses collègues (n° 90, 2006-2007) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 22 janvier 2007, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 janvier 2007, à seize heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 158, 2006-2007) sur la proposition de loi portant réforme des minima sociaux, présentée par Mme Valérie Létard, M. Nicolas About, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Anne-Marie Payet, MM. Michel Mercier et Bernard Seillier (n° 425, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 22 janvier 2007, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 janvier 2007, à seize heures.
Conclusions de la commission des lois (n° 160, 2006-2007) sur :
- la proposition de loi relative aux contrats d'assurance de protection juridique, présentée par M. Pierre Jarlier et plusieurs de ses collègues (n° 85, 2006-2007) ;
- la proposition de loi visant à réformer l'assurance de protection juridique, présentée par M. François Zocchetto (n° 86, 2006 2007) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 22 janvier 2007, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 janvier 2007, à seize heures.
Question orale avec débat (n° 25) de Mme Gisèle Gautier relative à l'application de la loi d'origine sénatoriale du 4 avril 2006 renforçant la prévention de la violence au sein des couples ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 22 janvier 2007, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif à l'expérimentation du transfert de la gestion des fonds structurels européens (n° 31, 2006-2007) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 23 janvier 2007, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 janvier 2007, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, après déclaration d'urgence, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament (n° 155, 2006-2007) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 23 janvier 2007, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 23 janvier 2007, à onze heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation (n° 22, 2005-2006) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 24 janvier 2007, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 22 janvier 2007, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt et une heures cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD