compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures cinq.)

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PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

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DÉCision du conseil constitutionnel

M. le président. M. le président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel, par lettre en date du 30 mars 2006, le texte de la décision rendue par le Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi pour l'égalité des chances.

Acte est donné de cette communication.

Cette décision du Conseil constitutionnel a été publiée au Journal officiel, édition des lois et décrets.

3

Modification de l'ordre du jour

M. le président. M. le président a reçu de M. le ministre des relations avec le Parlement une lettre en date du 3 avril par laquelle le Gouvernement ajoute à l'ordre du jour prioritaire de la séance du jeudi 13 avril au matin, à la suite des sept conventions internationales déjà inscrites, la discussion d'une convention avec le Chili en vue d'éviter les doubles impositions et la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble.

L'ordre du jour de la séance du jeudi 13 avril s'établira donc comme suit :

À 9 heures 30 et l'après-midi après les questions d'actualité :

- huit conventions internationales ;

- lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble ;

- éventuellement, suite de la deuxième lecture du projet de loi portant engagement national pour le logement.

Acte est donné de cette communication.

4

Questions orales

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

problèmes liés aux droits à paiement unique

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 959, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur les problèmes liés aux droits à paiement unique, les DPU. Calculés sur les années de référence 2000, 2001 et 2002, ceux-ci font apparaître des distorsions, en particulier dans les petites exploitations en zone de montagne ; les transferts fonciers y sont nombreux, alors qu'ils sont peu fréquents pour les grosses exploitations céréalières.

Ces exploitations de petite taille sont en général assez pauvres et pratiquent un élevage extensif, alors que les DPU favorisent plutôt les exploitations d'élevage intensif, qui sont les plus fournies en bétail. Or, si la prime aux bovins mâles a été supprimée, les DPU n'en ont pas moins été calculés en tenant compte du nombre de primes. Ainsi, de gros éleveurs qui possédaient jusqu'à 90 broutards ou qui les avaient acquis ont obtenu un maximum de primes. Depuis, ils peuvent toucher des DPU même s'ils n'ont plus aucun broutard, et ceux qui ont acquis leur exploitation peuvent les toucher aussi même s'ils pratiquent un tout autre élevage ! Des exemples existent dans le Morvan.

En outre, autre souci, les DPU désolidarisés du foncier vont être l'objet de spéculations dommageables et pénalisantes pour les jeunes qui s'installent.

Pour pallier ces anomalies injustes, ne serait-il pas possible, monsieur le ministre, que soit mise en place pour les petits agriculteurs qui, pour les raisons précédemment expliquées, n'ont pas ou qui ont peu de DPU une compensation sous une forme qui reste à définir ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, je vous remercie de m'interroger sur cette question des DPU, qui, ainsi que vous l'avez souligné, est compliquée.

Je me permettrai, si vous le voulez bien, de vous apporter aujourd'hui une réponse générale sur les DPU et de vous faire parvenir par écrit des éléments plus précis sur les points spécifiques que vous soulevez, notamment au sujet des broutards.

S'agissant des DPU, la France a négocié la réforme de la politique agricole commune, la PAC, en en acceptant le système. Certains pays, notamment l'Allemagne, ont choisi de les gérer à l'échelon régional. Quand je suis arrivé à la tête du ministère, il était prévu une gestion nationale par une caisse centrale, ce qui m'a paru être une belle « usine à gaz ». J'ai donc souhaité un système plus pratique, reposant sur des clauses, et nous avons beaucoup travaillé avec les organisations professionnelles pour parvenir au système actuel.

Vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, l'Europe a décidé que les DPU seraient les aides perçues au cours de la période de référence 2000-2002. C'est un facteur de complication dans la mesure où les exploitations ont entre-temps évolué. Le choix des références historiques présente cependant l'avantage de préserver le niveau des aides de l'ensemble des exploitants, ce qui permet une adaptation progressive aux mécanismes de la PAC. Mais le principe de cette réforme - il pose d'ailleurs problème, et c'est tout le débat européen - consiste à rompre le lien entre l'acte de production et le versement d'une aide, puisque c'est en réalité une aide découplée constituant une aide au revenu.

J'ai tenté de simplifier autant que possible la gestion de la période transitoire de 2000 à 2006. Cela se traduit par le recours privilégié aux clauses contractuelles permettant à l'exploitant présent en 2006, à la suite des transferts fonciers réalisés entre 2000 et le 15 mai 2006, de récupérer les DPU attachés aux terres exploitées. À ce jour, grâce à l'effort de nos fonctionnaires comme des exploitants et de leurs organisations professionnelles, nous avons dépassé le taux de 93 % de dossiers retournés dans les directions départementales de l'agriculture et de la pêche, et 170 000 clauses ont été signées.

Nous avons également choisi de privilégier l'installation. Aussi, le principe général selon lequel les exploitants doivent récupérer les DPU par clause auprès de l'exploitant « historique » a été complété, pour les nouveaux installés, par des mécanismes de dotation permettant aux jeunes, par le biais de la réserve nationale, d'avoir des droits. Une solution adaptée est mise en place pour chaque type de situation.

À partir de 2007, nous aurons également la possibilité, y compris, bien entendu, dans votre département, de revaloriser grâce à la réserve départementale les DPU jugés trop faibles pour un exploitant. Il appartiendra à chaque département de concevoir des programmes spécifiques en fonction des priorités qu'il aura identifiées, et je vois bien que, dans un département comme le vôtre, monsieur Signé, elles iront à la prime à la montagne et à la prime herbagère. Mais, pour être franc, nous ne connaîtrons les disponibilités budgétaires de ces réserves départementales qu'en 2007, c'est-à-dire après qu'auront été octroyées les dotations obligatoires liées à l'installation ainsi que certaines dotations sectorielles attribuées dans le cadre de programmes nationaux de soutien ; l'agriculture biologique, par exemple, fera l'objet d'un tel programme.

Ce double niveau de réserve, départemental et national, nous donne donc la possibilité de nous adapter. Nous le ferons en concertation avec les organisations professionnelles agricoles. Il est indispensable de contrôler le niveau du prélèvement servant à alimenter la réserve nationale de droits : ce prélèvement étant déduit de la somme que perçoit chaque agriculteur au titre de ses DPU, il faut que nous restions raisonnables dans la fixation de son montant.

Telles sont les règles générales. J'ai bien compris les problèmes spécifiques de votre département, monsieur le sénateur. Ne pouvant ici entrer dans le détail, comme je l'indiquais au début de mon propos, je vous apporterai par écrit les éléments très précis sur les situations d'entreprises agricoles que vous avez décrites dans votre question, en particulier concernant l'élevage.

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.

M. René-Pierre Signé. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse et du fait que vous ayez pris en compte ma demande au point de bien vouloir la réétudier et me donner des réponses spécifiques plus précises.

Je me permettrai cependant d'insister sur deux points.

Les DPU sont considérés aujourd'hui par leurs détenteurs non plus comme un support de compensation économique, mais comme un élément de patrimoine qu'ils cherchent désormais à monnayer, si bien que l'on peut être propriétaire du foncier sans l'être des DPU, ou des DPU sans l'être du foncier. Vous vous représentez les difficultés qui découlent de ces anomalies, que nous rencontrons tous les jours !

J'en viens à la réserve. J'ai cru comprendre que les DPU qui, pour des raisons diverses, ne seraient pas activés pendant une période de trois ans seraient versés dans une réserve dont la gestion sera nationale ; il me semble, monsieur le ministre, et sans doute nous le confirmerez-vous, qu'elle devrait être départementale à partir de 2007. Il appartiendra, nous le souhaitons, à la commission départementale d'orientation agricole de proposer des critères locaux de répartition de façon que le pourcentage le plus élevé possible revienne aux réserves départementales qui abondent les taux de DPU dans les zones de montagne. (M. le ministre approuve.) Cela rejoint ce que vous avez expliqué, et je vous en remercie. Une possibilité serait peut-être de créer des DPU à l'hectare par le biais des unités de main-d'oeuvre, les UMO, qui pourraient favoriser les entreprises familiales.

Bref, il y aurait beaucoup à dire sur ces DPU. La règle actuelle de leur octroi mérite d'être affinée et précisée.

Situation des communes placées en fusion association

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 983, adressée à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Louis Souvet. Monsieur le ministre, avec cette question, j'entends me situer dans la tradition des débats au Sénat et privilégier l'aspect technique des dossiers, tout en conservant un certain recul par rapport aux questions passionnelles du moment. J'ai d'ailleurs déposé des questions écrites visant, par exemple, le traitement tant social qu'économique, voire médiatique, des violences urbaines.

Cette mise au point est destinée, non point au Sénat, mes chers collègues, mais à la presse locale. Chacun sait que, depuis, des violences autres qu'urbaines sont intervenues.

Monsieur le ministre, les communes en situation de fusion-association, situation inconfortable s'il en est, situation transitoire par essence, qui toutefois dure depuis des années pour certaines communes de l'hexagone, nous posent un problème.

La fusion-association, une étape dans le processus de la fusion, ne permet pas une gestion sur le long terme des intérêts patrimoniaux communaux. Les communes de taille modeste doivent déjà surmonter de multiples problèmes, vous ne l'ignorez pas, monsieur le ministre, celles d'entre elles qui sont plus particulièrement concernées pourraient faire l'économie d'un problème structurel, soit le non-aboutissement du processus de fusion.

Si l'on se place dans une logique arithmétique de comptabilisation globale des communes associées dans le cadre du statut de fusion-association, ce sont environ 250 000 habitants représentant 744 communes associées qui sont à prendre en compte avec une ventilation plus fine, à savoir 659 communes associées de moins de 500 habitants, soit 94 394 habitants, 47 communes de 500 à 1 000 habitants, soit 33 402 habitants et enfin 38 communes de plus de 1 000 habitants, soit 119 755 habitants.

Ces statistiques laissent entrevoir la nature de la problématique, à savoir la nécessité d'une approche pragmatique fondée essentiellement sur le bon sens et les potentialités tant économiques que financières.

Une utilisation à la lettre des articles L. 2112-2, L. 2113-2, L. 2122-3, L. 2334-12 du code général des collectivités locales dans sa partie législative et D. 2113-1 et D. 2113-3 dans sa partie réglementaire permet de pérenniser ad vitam aeternam une telle situation.

Il est temps, dans une logique d'aménagement du territoire la plus adéquate possible avec les réalités et les besoins des populations, de mettre fin à ces montages provisoires. Ce particularisme à la française constitue non pas un atout pour les collectivités locales, mais un handicap certain, tant pour ces dernières que pour les populations concernées.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, si vous entendez, grâce à des mesures adaptées, remédier à un tel attentisme.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, votre question sur l'évolution du statut des communes associées relève d'un débat très technique, mais qui n'en est pas moins important, car ce statut est à la fois original et généralement méconnu du grand public.

Il s'agit de la conséquence d'une loi bien connue de 1971, la loi dite « Marcellin », qui a tenté de répondre au défi du morcellement communal caractérisant le paysage institutionnel français par la mise en place autoritaire de fusions de communes, intervenues d'ailleurs pour la plupart d'entre elles au cours des années soixante-dix. La situation n'a pas évolué depuis.

Trente ans plus tard, nous en sommes à la situation que vous venez de décrire très précisément, nous avons les mêmes chiffres concernant ces communes associées et la même ventilation sur la base de la population.

Il existe toujours 744 communes associées, qui représentent près de 250 000 habitants. Parmi ces 744 communes, 659 comptent moins de 500 habitants, 47 se situent entre 500 et 1 000 habitants et 38 au-dessus de 1 000 habitants.

Cette photographie ne peut apporter plus : elle rend compte de la réalité, mais elle ne l'explique pas.

Une analyse juridique plus poussée montre que le statut des communes associées a récemment été modifié puisque, à la demande de plusieurs parlementaires, un amendement permettant aux communes associées de disposer de droits et, à titre consultatif, d'un délégué au sein des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, a été accepté par le Gouvernement lors de l'examen du projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales au printemps 2004.

Dans ces conditions, monsieur Souvet, faut-il, comme vous le suggérez, faire machine arrière et décider d'un remaniement législatif destiné à relancer un processus de fusions simples ?

Je crois, comme vous, qu'une clarification est souhaitable, mais elle doit intervenir dans le cadre légal actuel qui offre d'ores et déjà l'occasion de supprimer une commune associée.

L'article L. 2113-6 du code général des collectivités territoriales permet de supprimer le statut de commune associée attribué lors d'une fusion et non de revenir sur la fusion elle-même.

Le retour au régime de la fusion simple que vous appelez de vos voeux est donc concrètement possible.

Permettez-moi d'en rappeler brièvement les quatre principales étapes : il faut d'abord que la demande de suppression émane du conseil municipal ; il faut ensuite consulter la population de la commune associée ; il faut également que cette dernière se prononce à la majorité absolue des suffrages exprimés correspondant à un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits en faveur de la suppression ; il faut enfin, au vu de ce résultat, que le préfet très logiquement prononce la suppression de la commune associée.

Au total, il me semble que ces dispositions régissent dans des conditions non pas optimales, mais globalement satisfaisantes, le passage de la fusion-association à la fusion simple.

Telles sont les précisions que je voulais apporter en vous indiquant que je reste ouvert sur ce sujet et prêt à examiner toute proposition de votre part alliant la souplesse, qui est indispensable, et le respect de la volonté des électeurs.

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Monsieur le ministre, je vous remercie de m'avoir apporté ces précisions qui sont pour beaucoup inconnues des maires concernés et dont ils pourront avec intérêt s'inspirer.

La situation ne sera pas forcément meilleure. Bien que l'on fasse mieux à deux mille qu'à deux cents, les hommes sont les hommes et c'est un domaine dans lequel les passions s'exacerbent. Même si le remède n'est pas toujours de se séparer, dans certains cas, quand le mariage n'est plus possible, il faut en tirer les conséquences.

Intempéries dans la vallée du Thoré les 28 et 29 janvier 2006

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier, auteur de la question n° 957, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Mme Jacqueline Alquier. Monsieur le ministre, la vallée du Thoré, dans le sud du Tarn, a connu les 28 et 29 janvier derniers un événement météorologique exceptionnel qui a entraîné de nombreux et très importants dégâts.

Une pluie abondante se transformant en une couche de 30 millimètres de verglas est tombée sur 35 centimètres de neige, le tout équivalent à une charge de 60 kilogrammes de matériel.

Cela a entraîné le fracassement des branches d'arbres en cascade et de nombreux dégâts sur les réseaux électrique et téléphonique ainsi que sur le réseau routier, les chemins et les clôtures des exploitations agricoles.

Les industries ont subi aussi d'importantes pertes d'exploitation du fait de l'absence d'électricité pendant plusieurs jours.

L'ensemble des dégâts hors réseaux électrique et téléphonique serait estimé à 19 millions d'euros.

Une vingtaine de communes aux environs de Mazamet sont concernées.

Une part importante des dégâts se situe en forêt et dans les rivières. Près de 15 000 hectares de forêt sont endommagés ou détruits.

Une première rencontre, à laquelle j'étais présente, s'est tenue à la préfecture du Tarn le 15 février 2006 en vue de la constitution d'un dossier de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Cette reconnaissance est nécessaire, mais elle n'est pas suffisante.

La situation des forêts et des rivières apparaît très préoccupante pour l'avenir. Il est urgent de dégager sur le linéaire de rivière et sur toutes les pentes à risques du Thoré, de l'Arnette, de l'Arn, de la Durenque et de leurs ruisseaux, tous les arbres enchevêtrés, arrachés et cassés, et ce rapidement car le printemps est une période de fortes pluies.

Cet événement météorologique crée un risque majeur dans cette vallée déjà sujette à des inondations de par son exposition à des crues rapides de type cévenol et où les arbres, en temps normal, freinent l'érosion vers la rivière.

Des moyens financiers exceptionnels devront être dégagés. L'Office national des forêts vient d'estimer à 11 millions d'euros le seul coût des interventions nécessaires pour pallier le risque d'inondations, remettre en état les pistes forestières et protéger les sources d'eau potable.

Les collectivités locales vont aussi devoir faire face à des dépenses exceptionnelles et très lourdes pour remettre en état la voirie et surtout les bordures de routes, les chemins et sécuriser leur territoire.

Les collectivités locales, l'Agence de l'eau Adour-Garonne, s'y préparent. Mais les Tarnais attendent que la solidarité nationale s'exerce pleinement dans cette situation. Nous savons que cela a pu être fait voilà quelques années dans le territoire de Belfort.

Votre collègue M. Thierry Breton, en visite dans le Tarn, a incité les communes concernées « à faire remonter les dossiers ».

D'après ce que nous savons, le préfet a rencontré les ministres concernés pour savoir quels moyens pourront être dégagés.

Monsieur le ministre, les Tarnais souhaitent savoir si un arrêté de classement portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle dans la vallée du Thoré et de la Durenque est en cours d'élaboration. Par ailleurs, si les dossiers sont bien remontés, où sont-ils ?

Il est urgent, deux mois après cet événement, que des moyens financiers, matériels, mais aussi humains, soient dégagés pour éviter des conséquences qui pourraient se révéler catastrophiques, surtout en ce début de printemps.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Madame la sénatrice, M. le ministre de l'intérieur, malheureusement empêché, m'a demandé de vous répondre sur les conséquences pour la vallée du Thoré, située dans le sud du département du Tarn, des chutes de neige et des formations de glace survenues dans la nuit du 28 au 29 janvier 2006.

Je tiens à préciser que le préfet du Tarn, dès la survenance de ces intempéries, a mobilisé dans l'urgence tous les services de l'État pour venir en aide à la population.

Il a d'abord sollicité la direction départementale de l'équipement, la DDE, qui a rassemblé, dès le samedi 26 janvier, tous les moyens humains et matériels disponibles à l'échelle du département, qui ont été renforcés dès le lundi et le mardi suivants par les équipes de l'Hérault, ainsi que par des moyens militaires départementaux et zonaux.

Il a ensuite immédiatement mobilisé les forces de l'ordre et les sapeurs-pompiers pour la sécurité routière et la gestion des urgences vitales, au niveau aussi bien des établissements hospitaliers et médico-sociaux que des habitats diffus des communes les plus sévèrement touchées, dont vous vous préoccupez.

Enfin, EDF a joué un rôle important, qui est monté en puissance au fur et à mesure de l'aggravation des événements climatologiques et naturels, en envoyant sur le terrain cent agents, puis trois cents agents par jour, en liaison avec la préfecture du Tarn, qui coordonnait toute l'opération.

Pour ce qui concerne la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, le préfet du Tarn a procédé au recueil des dossiers qui ont été préparés par les quarante-trois communes intéressées et qui seront présentés à la commission interministérielle lors de sa prochaine réunion, le 13 avril prochain. Celle-ci vérifiera si cet événement naturel et les dommages matériels directs entrent bien dans le cadre fixé par l'article L. 125-1 et suivants du code des assurances.

Par ailleurs, les services de l'État viennent d'achever l'évaluation financière de l'ensemble des dégâts occasionnés par ces intempéries aux équipements communaux, aux forêts, aux cours d'eau et aux exploitations agricoles, de même qu'aux entreprises industrielles, commerciales et artisanales.

Ce recensement est indispensable, puisqu'il permettra à chacun des départements ministériels concernés d'étudier les décisions qui pourront être prises pour témoigner de la solidarité nationale aux populations sinistrées par ces graves intempéries.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Mme Jacqueline Alquier. Monsieur le ministre, je vous remercie d'ores et déjà des efforts qui ont été faits et de ceux que vous allez faire pour aider l'ensemble des communes sinistrées à la suite de ces intempéries.

Par ailleurs, la venue d'une équipe de la protection civile a été annoncée. C'est un signe, mais il est bien loin de répondre aux besoins.

Le vote des budgets dans toutes les collectivités concernées, y compris les départements, a donné lieu à des interrogations sur les moyens financiers qu'il convient de dégager pour les routes, la suppression des embâcles et la remise en état des chemins.

Permettez-moi de rappeler que treize kilomètres de linéaires de rivière sont touchés et que, sur trente kilomètres, les bassins versants devront être sécurisés.

Quant aux routes, en plus de l'énorme travail qui devra être fait sur les voiries communales, je me dois de mentionner que la principale route touchée est la nationale 112, devenue récemment départementale et dont la remise en état, à quelques jours près, incombera au département.

Les Tarnais, qui se sont déjà fortement mobilisés - notamment les agriculteurs pour réparer les dégâts subis par leurs collègues dans le sud du département - ne comprendraient pas que la solidarité nationale ne s'exprime pas pleinement.

applications de l'article L. 2122-22 4° du code général des collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras, auteur de la question n° 976, adressée à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Bernard Piras. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur une question de nature technique.

L'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales dispose que « le maire peut, [...] par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : 4° De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés de travaux, de fournitures et de services qui peuvent être passés sans formalités préalables en raison de leur montant, lorsque les crédits sont inscrits au budget ».

En outre, l'article L. 2131-2 du même code précise que sont soumises à l'obligation de transmission au représentant de l'État : « 1° Les délibérations du conseil municipal ou les décisions prises par délégation du conseil municipal en application de l'article L. 2122-22 ». Cette transmission, conformément aux dispositions de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, permet à ces délibérations et décisions d'acquérir leur caractère exécutoire.

Par ailleurs, depuis l'adoption en décembre 2001 de la loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite loi MURCEF, l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales prévoit au 4°que sont soumises à cette obligation de transmission « les conventions relatives aux marchés à l'exception des marchés passés sans formalité préalable en raison de leur montant ».

Dès lors, la question s'est posée de savoir si, compte tenu du fait que les « marchés passés sans formalité préalable en raison de leur montant » ne sont pas transmissibles, les décisions du maire prises par délégation du conseil municipal, concernant ces marchés, sont elles-mêmes exemptes de transmission. Force est de constater que cette question, qui a été adressée au Gouvernement à plusieurs reprises, a fait l'objet de réponses ministérielles qui semblent se contredire.

Cependant, dès lors que, dans une réponse récente à une députée du Rhône, il est reconnu que toutes les décisions prises en application de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales sont soumises à transmission, il semble opportun de saisir pour avis le Conseil d'État sur le point de savoir si les conventions de marchés passés sans formalité préalable - en raison de leur montant, non transmissibles en eux-mêmes - sont transmissibles au titre de l'article L. 2131-2 1° du code général des collectivités territoriales lorsqu'ils contiennent la décision de les passer formalisée par leur signature.

M. le président. Cher collègue, je préfère vous entendre défendre les truffes. (Sourires.)

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, votre question porte sur le caractère transmissible de la décision prise par un exécutif local qui a reçu délégation pour signer certains types de marchés.

S'agissant de l'obligation de transmission au contrôle de légalité, je veux affirmer à nouveau, de manière à dissiper toute incertitude juridique, que la position du ministère de l'intérieur est constante depuis 2003, contrairement à ce que votre question pourrait laisser supposer.

Pour être précis, la doctrine du ministère a été établie dans une réponse à une question écrite de M. Richard Dell'Agnola, député du Val-de-Marne.

Le principe en est simple. L'article L. 2131-2, 1°, du code général des collectivités territoriales prévoit que les décisions prises dans le cadre des délégations susceptibles d'être consenties à l'exécutif local en application de l'article L. 2122-22 sont soumises à l'obligation de transmission au titre du contrôle de légalité pour être exécutoires.

Toutefois, par exception, à la suite de la loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, à laquelle vous avez d'ailleurs fait allusion, monsieur le sénateur, et conformément à l'article L. 2131-2, 4°, du code précité, les contrats relatifs aux marchés passés sans formalité préalable en raison de leur montant sont exonérés de cette obligation de transmission.

À ce titre, le ministère de l'intérieur a rappelé, dans une circulaire du 10 août 2004, que, lorsque la décision de signer le marché n'est pas distincte formellement de la signature proprement dite de ce marché, l'obligation de transmission n'a pas lieu de s'appliquer.

À l'inverse, et conformément à la réponse apportée le 8 novembre 2005 à la question posée par Mme Martine David, il y a obligation de transmission au contrôle de légalité lorsque la décision de signer consiste en un acte formalisé distinct de la signature du marché elle-même.

Les solutions dégagées par les jurisprudences que vous citez sont, quant à elles, relatives soit à des contrats autres que des marchés publics, soit à la situation antérieure à la loi MURCEF. Elles ne sauraient donc s'appliquer aujourd'hui et en l'espèce.

Monsieur le sénateur, la position du ministère de l'intérieur étant constante et cohérente depuis 2003, la saisine du Conseil d'État ne me paraît donc pas justifiée.

M. le président. La parole est à M. Bernard Piras.

M. Bernard Piras. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui lève certaines ambiguïtés.

Je souhaite que la jurisprudence s'applique. Vous estimez que l'avis du Conseil d'État n'est pas nécessaire, je m'en réjouis et j'espère qu'il n'y aura pas d'autres litiges qui entraîneront une nouvelle jurisprudence.