Article 11
Au troisième alinéa de l'article L. 213-7 du code du travail, après les mots : « de la boulangerie, » sont insérés les mots : « de la pâtisserie, des courses hippiques ».
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 94 est présenté par M. Godefroy, Mmes San Vicente, Schillinger, Printz et Alquier, MM. Desessard, Raoul, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 152 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° 94.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 11 a pour objet d'étendre à deux nouveaux secteurs professionnels, avant que ce ne soit à trois ou quatre, voire plus, le champ des dérogations au principe d'interdiction du travail de nuit pour les apprentis mineurs.
L'évolution du texte est, à cet égard, éclairante.
En effet, le projet de loi, dans sa rédaction initiale, ne visait que le seul secteur de la pâtisserie. Puis, l'Assemblée nationale a ajouté celui des courses hippiques, tout en insérant un nouvel article 11 bis tendant à prévoir des dérogations au principe d'interdiction du travail des apprentis mineurs le dimanche et les jours fériés « dans les secteurs pour lesquels les caractéristiques particulières de l'activité le justifient et dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat » !
On voit donc clairement quelle tendance se dessine : après avoir généralisé le travail des apprentis mineurs le dimanche et les jours fériés par le biais du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises -j'y reviendrai tout à l'heure à propos de l'article 11 bis -, on nous propose, s'agissant des mêmes professions ou presque, de généraliser le travail de nuit. Nous ne pouvons l'accepter.
Tout d'abord, ces dispositions sont en contradiction avec la réglementation internationale concernant le travail de nuit.
En effet, conformément aux directives européennes, le travail de nuit est défini, dans notre droit du travail, comme le travail effectué entre 21 heures et 6 heures du matin. Conformément en outre aux conventions de l'Organisation internationale du travail, dont la France est signataire, le travail de nuit est interdit aux mineurs de moins de dix-huit ans, pour des raisons de sécurité et de santé.
N'oublions pas en effet que nous parlons d'enfants, de jeunes de moins de dix-huit ans. Il appartient au législateur de veiller avec un soin particulier à la protection des personnes les plus vulnérables, et les mineurs en font partie à bien des égards. Nous ne devons pas accepter des dispositions qui conduiraient à ce que, dès leur entrée dans la vie active, il soit porté atteinte, en faisant peser sur eux une charge trop lourde, à leur santé, à leur développement, à leur sécurité, ainsi qu'à l'image qu'ils se font de la société qui va les accueillir.
En ce qui concerne plus spécifiquement la boulangerie et la pâtisserie, les techniques de fabrication ont évolué et permettent désormais la préparation diurne des produits. De manière générale, pour toutes les professions visées, on ne saurait nous faire croire que l'absence d'apprentis empêcherait l'activité de l'entreprise.
Je signale d'ailleurs que, s'agissant de la boulangerie, il est bien précisé, à l'article R. 117 bis-2 du code du travail, que « seuls les établissements où toutes les phases de la fabrication du pain ne sont pas assurées entre 6 heures et 22 heures » peuvent bénéficier d'une dérogation au principe d'interdiction du travail de nuit pour les apprentis mineurs. J'aimerais savoir si cette disposition s'applique aussi aux secteurs de la pâtisserie et de la viennoiserie. J'ai quelques doutes à cet égard.
Quoi qu'il en soit, pensez-vous réellement, monsieur le ministre, que c'est en autorisant le travail de nuit que vous allez améliorer l'attractivité de l'apprentissage, surtout dans ces métiers de bouche qui sont délaissés par des jeunes effrayés par les bas salaires, les horaires déjà excessifs et les dures conditions de travail proposés ?
Par ailleurs, comment concilier le travail la nuit, le dimanche et les jours fériés avec le nécessaire repos des apprentis ? Quelles sont les dispositions prévues en termes de repos compensateur si un apprenti doit travailler toute la semaine dans l'entreprise qui l'accueille, y compris le dimanche dès quatre heures du matin, comme vous le proposez, et doit être présent le lundi matin suivant dans son centre de formation d'apprentis pour suivre la partie générale de sa formation ? Doit-on aménager ou réduire le temps de présence au CFA pour permettre aux jeunes de récupérer de leur semaine de travail ? Je suppose que vous n'avez tout de même pas l'intention de revenir sur le principe des deux jours de repos hebdomadaire obligatoires ! Pourtant, c'est déjà sur ce point que les boulangers, en particulier, vous interpellent, en demandant que leurs apprentis puissent travailler le dimanche.
Je voudrais d'ailleurs vous rappeler, monsieur le ministre, que faire travailler des mineurs entre minuit et quatre heures du matin est en principe formellement interdit, à moins que vous n'ayez l'intention de revenir sur cette disposition.
S'agissant maintenant du secteur des courses hippiques, en tant qu'élu d'une région pouvant faire valoir quelques références à cet égard, je me suis renseigné : certains propriétaires, entraîneurs, drivers ou palefreniers peuvent avoir besoin d'être aidés par des apprentis, mais l'activité hippique impose des déplacements, c'est-à-dire que l'on va demander à des jeunes de faire par exemple 200 kilomètres pour se rendre sur un champ de course où les épreuves se dérouleront en nocturne. Seront-ils rentrés à minuit ?
Comment ces heures seront-elles rémunérées ? Le temps de trajet sera-t-il inclus dans le temps de formation ?
Je considère que, si ouverture il devait y avoir, elle aurait due être beaucoup mieux « calibrée », au lieu d'être pratiquée à travers des d'amendements successifs rédigés à la va-vite.
Monsieur le ministre, vous le savez, il y a dans le département de la Manche des personnes qui sont très compétentes en matière hippique, et l'on m'a dit que, lorsqu'un cheval obtenait de bons résultats, on le faisait courir plusieurs fois par semaine. Alors, dans un pareil cas, comment les choses vont-elles se passer pour les apprentis ?
Vraiment, il me semble que ces dérogations successives, dont on ne sait pas quelles professions elles concerneront, ne vont pas dans le bon sens. Ce n'est pas rendre service à l'apprentissage que de faire cela. Ce n'est pas par des mesures dérogatoires que l'on incitera les jeunes à choisir la voie de l'apprentissage. Or nous souhaitons tous le voir se développer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 152.
M. Roland Muzeau. Par cet article, vous poursuivez votre politique de fragilisation des conditions de travail des apprentis. Après le travail le dimanche et les jours de fête, vous souhaitez leur imposer le travail de nuit.
Vous ne pouvez ignorer que, en l'état actuel du droit, l'article L. 213-1 du code du travail pose le principe général selon lequel le recours au travail de nuit doit être exceptionnel.
Le nouveau dispositif réglementaire consacre également le caractère dérogatoire du travail de nuit.
Pour l'ensemble des salariés, le recours au travail de nuit doit être exceptionnel et justifié par des impératifs économiques ou sociaux figurant dans un accord - convention, accord collectif de branche étendu ou accord d'entreprise ou d'établissement - conclu avant sa mise en place ou son extension à de nouvelles catégories de salariés.
Ces garanties se justifient par les conséquences du travail de nuit pour le salarié : des conditions de travail difficiles et l'implication d'un mode de vie parfois difficilement conciliable avec sa vie personnelle.
Il est important de rester vigilant sur ce sujet en limitant strictement les dérogations au principe et en apportant une contrepartie effective au salarié en cas de travail de nuit.
L'interdiction du travail de nuit est d'ailleurs maintenue pour les jeunes travailleurs ou stagiaires âgés de moins de dix-huit ans. Certes, des dérogations peuvent être accordées dans certains cas, mais seulement après contrôle de l'inspecteur du travail, comme il est précisé dans les articles L. 213-7 et L. 213-10 du code du travail.
Dans la circulaire DRT du 5 mai 2002, il est rappelé que tous les secteurs sont concernés par cette réglementation, à l'exception du personnel roulant et navigant du service des transports.
Nous le voyons bien, le droit du travail reste protecteur pour les jeunes travailleurs. On comprend mal, dès lors, pourquoi les apprentis, alors même qu'ils ne bénéficient pas des mêmes droits que les salariés, devraient en outre être soumis à des conditions de travail moins favorables.
Vous ne pouvez pas ignorer cette injustice ; peut-être avez-vous prévu de la supprimer par cohérence, comme nous l'avons vu il y a quelques minutes. D'ailleurs, vous avez choisi de permettre le travail de nuit pour les apprentis dans les secteurs de la pâtisserie et des courses hippiques, comme l'a rappelé Jean-Pierre Godefroy, laissant croire que vous vous limiteriez à ces deux secteurs, ce que personne ne croit. Nous avons d'ailleurs déjà constaté votre volonté en la matière et nous ne doutons pas que vous allez tenter d'en « remettre une louche » avec l'adoption de ce texte « en douce ». (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Vous ouvrez ainsi une brèche pour faire progressivement de la dérogation un principe.
Quelles que soient les justifications que vous avancez, aucune ne légitime une telle atteinte aux droits fondamentaux des travailleurs, surtout quand elle n'est assortie ni de garanties véritables ni de contrôles sérieux, et qu'elle s'adresse à de jeunes mineurs.
Vous rendez ainsi un très mauvais service à l'apprentissage, nous l'avons dit et répété hier et aujourd'hui. Quel parent aura envie de laisser son enfant entrer en apprentissage avec de telles conditions de travail ?
Pour toutes ces raisons, et parce que nous sommes très inquiets de cette succession de reculs des protections accordées aux apprentis, nous demandons la suppression de l'article 11.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
La seconde phrase du troisième alinéa de l'article L. 213-7 du code du travail est ainsi rédigée :
Un décret en Conseil d'Etat détermine la liste des secteurs pour lesquels les caractéristiques particulières de l'activité justifient une dérogation, ainsi que les conditions dans lesquelles celle-ci est accordée.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La modification proposée vise à harmoniser les dispositions du présent article avec celles prévues à l'article 11 bis, relatif aux dérogations au principe d'interdiction du travail des apprentis mineurs les dimanches et les jours fériés. Il paraît en effet opportun d'adopter une rédaction similaire s'agissant des dispositions dérogatoires relatives au travail de nuit.
La commission propose de renvoyer à un décret en Conseil d'Etat l'établissement de la liste des secteurs concernés ainsi que la détermination des conditions dans lesquelles ces dérogations peuvent être accordées.
En encadrant ainsi le dispositif, nous rassurerons, je pense, nos collègues communistes et socialistes.
M. Guy Fischer. Pas du tout !
M. le président. L'amendement n° 95, présenté par M. Godefroy, Mmes San Vicente, Schillinger, Printz et Alquier, MM. Desessard, Raoul, Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant le premier alinéa de cet article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
Au début de la deuxième phrase du troisième alinéa de l'article L. 213-7 du code du travail, avant les mots : « En ce qui concerne », sont ajoutés les mots : « Sous réserve de la signature d'un accord de branche étendu, ».
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement est un amendement de repli visant - c'est évidemment un minimum, mais je ne doute pas que vous allez donner satisfaction à notre premier amendement (Sourires) - à renvoyer à la signature d'accords de branche étendus la mise en oeuvre de cette disposition sur le travail de nuit des apprentis mineurs.
Il est au moins nécessaire, si ce dispositif dérogatoire devait être adopté, de renvoyer à la concertation entre partenaires sociaux la question des secteurs visés par l'article L. 213-7 du code du travail. Les organisations professionnelles et syndicales sont suffisamment structurées pour pouvoir mener rapidement et efficacement des discussions sur ce sujet. La signature d'accords de branche permettrait au moins d'appréhender les questions induites par ce travail de nuit, telle celle des repos compensateurs.
Mieux vaut conclure des accords de branche plutôt que d'attendre un décret, comme le propose la commission.
Pendant trois ans, le gouvernement de M. Raffarin a beaucoup glosé sur la concertation avec la partenaires sociaux, la mettant finalement assez peu en pratique. Faites-le au moins sur ces questions si sensibles.
Je rappelle qu'il s'agit d'un amendement de repli, car notre position de principe consiste à refuser purement et simplement le travail de nuit, comme nous aurons l'occasion de le réaffirmer lors de l'examen de l'article 11 bis.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Nous ne pouvons pas être favorables aux amendements nos 94 et 152, qui tendent à supprimer cet article.
En effet, nous avons suffisamment dit que la prise en compte de la spécificité de certaines activités peut amener à accorder des dérogations au principe d'interdiction du travail de nuit pour les apprentis mineurs. Ces dérogations, accordées à titre exceptionnel, sont encadrées par les nouvelles dispositions et par l'amendement n° 17 que je vous ai présenté tout à l'heure.
Je l'ai dit lors de la discussion générale : on peut souhaiter qu'il y ait des discussions préalables à la rédaction des décrets en Conseil d'Etat. Toutefois, il semble que la conclusion d'un accord de branche étendu présente un caractère trop contraignant et peu adapté à la réalité de chaque profession.
C'est pourquoi, la commission est défavorable à l'amendement n° 95.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Le principe de l'interdiction du travail de nuit pour les apprentis mineurs est et restera posé dans le code du travail.
Simplement, nous faisons en sorte de nous conformer à la vérité, car, je le rappelle, avant la décision de la Cour, on prenait des circulaires successives et chacun fermait tranquillement les yeux !
Nous prévoyons des dérogations, mais dans des conditions strictement encadrées sur le plan réglementaire. C'était déjà le cas pour les apprentis boulangers ; ce sera demain le cas pour les pâtissiers, si la disposition qui a été votée à l'Assemblée nationale est adoptée par le Sénat. Car il faut savoir que la fabrication de croissants ou d'autres viennoiseries considérées comme spécialités pâtissières n'est pas régie par la même réglementation que la fabrication de produits de la boulangerie !
Monsieur Godefroy, vous avez évoqué le problème de la présence au CFA. Eh bien, les CFA, qu'il s'agisse de la boulangerie ou d'autres métiers, doivent adapter le rythme des cours qu'ils organisent dans le cadre de l'alternance.
M. Jean-Pierre Godefroy. C'est l'apprenti qui va devoir s'adapter, monsieur le ministre !
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Enfin, vous ne les citez pas, mais les métiers du spectacle sont concernés par les dérogations.
Vous qui êtes l'élu d'un département qui a vu Ephrem Houel créer les courses de trot, vous connaissez la réalité des courses d'apprentis en nocturne. Elles représentent environ 15° % de l'activité des courses : elles constituent un élément important dans la formation de l'apprenti driver ou de l'apprenti jockey quand il fait une course au trot monté. En effet, l'essentiel des courses nocturnes, à l'exception de celles de Cagnes-sur-Mer, sont des courses de trot pour des raisons de luminosité, mais je ne vais pas entrer dans un débat qui me renvoie, non pas à la fédération hospitalière, mais à une vie antérieure auprès des haras nationaux. (Sourires.)
Nous devons aussi placer les apprentis dans la situation courante du métier auquel ils se destinent. L'apprentissage d'un métier, c'est aussi l'apprentissage de situations. Naturellement, nous ne devons pas le faire n'importe comment, mais dans des conditions strictement encadrées. C'est l'état d'esprit du Gouvernement sur ce dossier.
Dans le cas des enfants participant à des spectacles, les inspecteurs du travail fixent les conditions dans lesquelles les choristes ou les danseurs, par exemple, peuvent travailler, et à quelle fréquence ils peuvent le faire. C'est une réalité qu'il faut strictement encadrer.
Voilà pourquoi, monsieur le président, nous sommes défavorables aux amendements nos 94, 152 et 95.
En ce qui concerne l'amendement n° 17 de la commission, nous nous en remettons à la sagesse du Sénat.
Nous souhaitons néanmoins que la rédaction de la commission mixte paritaire puisse respecter le principe de l'encadrement strict que nous souhaitons instaurer.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 94 et 152.
M. Jean-Pierre Godefroy. Loin de moi l'intention de faire s'éterniser le débat sur ce sujet.
S'agissant des boulangers, la fabrication du pain s'échelonne de six heures du matin à vingt-deux heures. Aucun boulanger ne fait qu'une seule fournée de croissants le dimanche matin ; sinon, il ne ferait pas ses affaires.
Je ne suis donc pas convaincu qu'il faille faire venir l'apprenti dès quatre heures du matin pour préparer la première fournée. A seize ans, il suffit qu'il vienne pour la deuxième seulement et il apprendra la pratique de son métier.
Dans un autre débat, j'ai entendu qu'il fallait leur apprendre le stress du travail.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Godefroy. Moi, je ne suis pas d'accord ; l'apprenti en fera l'expérience à son rythme.
Vos arguments ne m'ont pas convaincu, car tous les boulangers que je connais font plusieurs fournées. Ils y ont tout intérêt d'ailleurs s'ils veulent servir leur clientèle !
En ce qui concerne le sport, vous n'avez pas répondu à ma question, monsieur le ministre.
J'entends bien que l'on peut accorder une dérogation à des jeunes. Mais, s'ils sont des sportifs confirmés parce qu'ils étudient dans des centres de formation ou dans des filières sport-études et si vous les autorisez à participer à une course ou à un match de football tous les soirs, ils iront. Cependant, notre responsabilité est de ne pas accepter cela.
Dans le domaine des courses hippiques, il en va à peu près de même. On peut prévoir une dérogation à des jeunes pour une course, mais pas pour des courses à répétition et qui plus est à 150 kilomètres ou 200 kilomètres de leur haras.
Vous le savez, certains chevaux courent deux fois la semaine, si une opportunité se présente, mais ce ne serait pas une bonne chose pour les apprentis.
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous le savez bien, ne me dites pas le contraire ! Quand un cheval est en forme, on le fait courir. Je rappelle que la Société des courses de chevaux de Cherbourg est la plus ancienne société de courses de trot. C'est pour cela que nous disposons de quelques informations.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 94 et 152.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 11 est ainsi rédigé, et l'amendement n° 95 n'a plus d'objet.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt-deux heures quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
Nous en sommes parvenus à l'article 11 bis.
Article 11 bis
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 221-3 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « en aucun cas » sont supprimés ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables aux apprentis âgés de moins de dix-huit ans employés dans les secteurs pour lesquels les caractéristiques particulières de l'activité le justifient et dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. » ;
2° L'article L. 222-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables aux jeunes travailleurs âgés de moins de dix-huit ans employés dans les secteurs pour lesquels les caractéristiques particulières de l'activité le justifient et dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. » ;
3° L'article L. 222-4 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « en aucun cas » sont supprimés ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables aux apprentis âgés de moins de dix-huit ans employés dans les secteurs pour lesquels les caractéristiques particulières de l'activité le justifient et dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune. Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 96 est présenté par M. Godefroy, Mmes San Vicente, Schillinger, Printz et Alquier, MM. Desessard, Raoul, Repentin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 153 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° 96.
M. Jean-Pierre Godefroy. Nous en revenons, comme avant la suspension de la séance, au problème du travail des apprentis, non plus la nuit, mais le dimanche et les jours fériés.
Nous proposons la suppression de l'article 11 bis, car il prévoit que la liste des secteurs qui pourront déroger à l'interdiction de faire travailler les apprentis mineurs les dimanches et les jours fériés sera fixée dans un décret en Conseil d'Etat.
A l'occasion de l'examen du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, nous avons auditionné de nombreux interlocuteurs, tant des organisations professionnelles que des organisations syndicales.
A notre plus grande surprise, les représentants des commerçants et des artisans sont apparus partagés sur la question du travail des apprentis le dimanche, voire les jours fériés.
M. Roland Muzeau. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Godefroy. Il est clair que si certaines professions souhaitent cette autorisation, d'autres n'en voient absolument pas l'utilité.
Le nombre de secteurs concernés, et non de professions, monsieur le ministre, est en fait très limité. En discutant avec nos interlocuteurs employeurs, nous en avons déterminé trois, même si cela peut faire l'objet d'une discussion : la fabrication de produits alimentaires destinés à la consommation immédiate, notamment les traiteurs et les boulangers-pâtissiers, la restauration et les magasins de vente de fleurs naturelles. En clair, tous trois sont des secteurs où l'on manie des denrées périssables. La présence d'apprentis le dimanche pourrait éventuellement se justifier dans ces seuls secteurs.
Quelles professions seront concernées par ces dérogations ? Nous l'avons vu lors de l'examen des différents amendements sur le projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, l'article L. 223-1 du code du travail couvre un large champ. Il concerne en effet près de quatre-vingts métiers. Il aurait pu en concerner encore plus si certains amendements de la majorité avaient été adoptés. Quelles sont donc vos intentions en la matière, monsieur le ministre ?
Il serait très intéressant, monsieur le ministre, que vous nous disiez...
M. Roland Muzeau et Mme Gisèle Printz. La vérité !
M. Jean-Pierre Godefroy. ... précisément quels métiers seront concernés par le travail des apprentis le dimanche et les jours fériés.
Nous demandons la suppression de l'article 11 bis, car les différents amendements sur le projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, comme ceux qui ont été déposés sur le présent texte visent à ouvrir une brèche dans notre droit du travail. La généralisation du travail des apprentis mineurs le dimanche et les jours fériés ne connaît, pour l'instant et à notre connaissance, aucune limitation.
Comme je l'ai déjà dit, nous étions prêts, monsieur le ministre, à ouvrir la discussion sur le travail le dimanche et à autoriser celui-ci de manière plus restrictive et à des fins éducatives. Nous avions d'ailleurs, lors de l'examen du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises, déposé un amendement en ce sens, que M. Dutreil avait rejeté.
Cet amendement visait tout d'abord à limiter à trois secteurs précis l'autorisation pour les apprentis de travailler le dimanche : le commerce de détail de produits alimentaires destinés à la consommation immédiate, la restauration et les magasins de vente de fleurs naturelles. Des besoins ont en effet été identifiés dans ces trois secteurs.
Cet amendement visait ensuite à interdire le travail dominical au cours de la première année d'apprentissage - cette disposition pourrait d'ailleurs être adoptée aujourd'hui -, l'idée étant la progressivité de l'enseignement. En effet, un jeune en première année d'apprentissage ne peut pas, d'entrée - dès la première semaine ! - travailler le dimanche ou les jours fériés.
Cet amendement tendait par ailleurs, preuve que nous ne nous contentons pas de critiquer, mais que nous faisons également des propositions, à limiter par année le nombre de dimanches travaillés, ces journées travaillées devant, bien évidemment, s'inscrire dans le cadre d'un parcours de formation. Les apprentis ne doivent pas, en effet, servir de main-d'oeuvre d'appoint. Bien sûr, il n'était pas question de travail les jours fériés. Cette proposition permettrait de faire face aux grandes fêtes annuelles, telle la fête des mères.
Cet amendement tendait enfin à prévoir la signature préalable d'accords de branches étendus. Il s'agit de s'en remettre, en dernier ressort, à la négociation entre les partenaires sociaux.
Cet amendement visait à tenir compte à la fois des nécessités et des réalités du travail dans certains secteurs d'activité - j'indique d'ailleurs que ces dispositions pourraient être étendues au secteur des courses hippiques -, tout en préservant le caractère pédagogique et l'attractivité de l'apprentissage.
Or, c'est la solution la plus libérale et la moins protectrice pour les jeunes âgés de seize à dix-huit qui a été retenue. Il s'agit d'une vision strictement économique, les apprentis mineurs ne constituant qu'une main-d'oeuvre d'appoint à bon marché. Aucune contrainte n'est en effet fixée.
En conclusion, monsieur le ministre, je vous poserai une question fort importante. Dans cette assemblée, la majorité et le Gouvernement s'étaient mis d'accord sur le travail le dimanche, mais pas les jours fériés. M. Dutreil y était en effet défavorable. Est-ce toujours le cas ou le Gouvernement a-t-il, en quinze jours, évolué au point d'être favorable au travail des apprentis les jours fériés ? A-t-il changé de philosophie sur ce point ?
M. Roland Muzeau. Ce ne serait pas la première fois !
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 153.
M. Roland Muzeau. Cet amendement vise à protéger les apprentis en supprimant la possibilité de les faire travailler le dimanche.
Il y a un an déjà, le gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre, insistait sur la nécessité de développer l'apprentissage et de lui rendre ses lettres de noblesse, rien de moins ! Pourtant, les textes soumis au Parlement, le vôtre en particulier, monsieur le ministre, nous font douter de ses intentions.
Les amendements proposés et adoptés par votre majorité sont particulièrement régressifs et préfigurent une fuite en avant dans le domaine de l'apprentissage. Ils visent en effet à instaurer nombre de mesures dérogatoires au droit du travail.
Je ne reviendrai pas sur la proposition qu'a faite M. Dassault, en octobre dernier, d'abaisser à quatorze ans l'âge d'entrée en apprentissage. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) C'est un véritable scandale, que nous avons d'ailleurs tous dénoncé.
Le texte et les amendements que vous nous proposez aujourd'hui fragilisent les apprentis mineurs. Or, comment revaloriser l'apprentissage en déréglementant complètement le travail des apprentis ?
Voilà quinze jours déjà, étaient introduites dans le projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises des mesures dérogatoires concernant les apprentis mineurs et visant à leur permettre, dans certains secteurs d'activité, de travailler le dimanche et les jours de fête. Vous revenez aujourd'hui à la charge, monsieur le ministre, fort des amendements de votre majorité, et souhaitez étendre ces mesures dérogatoires à des secteurs dont la liste sera fixée par décret en Conseil d'Etat. Cette mesure est évidemment inacceptable, car elle ne s'accompagne d'aucun garde-fou.
Monsieur le ministre, nous parlons aujourd'hui d'enfants, à une période importante, critique même, de leur développement ! C'est en effet au cours de ces années que l'on apprend, que l'on se développe physiquement et intellectuellement, que l'on devient un citoyen à part entière, bientôt apte à être citoyen et à voter.
Quelle image de la société nos jeunes auront-ils ? Alors qu'on leur promet une formation, on en fait des variables d'ajustement ! Avez-vous songé aux conséquences du travail le dimanche et les jours fériés sur la santé des apprentis, dont beaucoup sont encore en période de croissance ?
J'ajoute que les métiers concernés par l'apprentissage sont, en général, particulièrement pénibles et délaissés.
M. Paul Blanc. Vous préférez que ces jeunes fument un joint !
M. Roland Muzeau. Cela se fait peut-être chez les carabins, mais pas chez les enfants !
Souhaitez-vous réellement accroître la pénibilité de ces métiers et faire reposer ce poids sur les épaules des plus jeunes et des plus faibles ? Ces métiers ne seront attractifs que le jour où nous améliorerons les conditions de travail.
Mme Gisèle Printz. Et les salaires !
M. Roland Muzeau. Vous rétorquerez, monsieur le ministre, que les jeunes doivent travailler selon les horaires en vigueur dans les métiers auxquels ils se préparent. Bien sûr, l'apprenti doit être présent dans l'entreprise lorsque celle-ci est en fonctionnement, mais, et vous le savez, les fleuristes et les boulangers, pour ne prendre que ces exemples, ne travaillent pas uniquement le dimanche !
En outre, qu'en sera-t-il du parcours scolaire de ces apprentis ? Pensez-vous sérieusement, monsieur le ministre, que celui-ci sera compatible avec les horaires et les cadences que vous souhaitez imposer en autorisant le travail le dimanche ?
Pour leur épanouissement, les jeunes doivent apprendre le goût du travail. Ils ne doivent pas, dès leur apprentissage, n'en voir que les côtés les plus rudes et les plus rebutants. Il s'agit non pas de leur mentir, mais bien de les former et de leur apprendre leur métier de manière progressive.
A l'instar de tout étudiant de première année dans n'importe quelle discipline, qui va graduellement apprendre et faire face à des difficultés de manière croissante, les jeunes apprentis doivent être préservés. Ils ne doivent pas être injustement surchargés de travail. Leur repos et leurs rythmes scolaires doivent être respectés.
Les apprentis, je le rappelle, sont des jeunes en formation, non une main-d'oeuvre d'appoint, une variable d'ajustement. Nous entendons parler avec vous de formation, non de dérégulation du marché du travail.
Telles sont les raisons, monsieur le ministre, pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l'article 11 bis, qui prévoit la dérégulation de la présence des apprentis mineurs dans l'entreprise.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le b) du 1° de cet article pour ajouter un alinéa à l'article L. 221-3 du code du travail par la phrase :
Ce décret détermine les conditions dans lesquelles ces dérogations peuvent être accordées.
L'amendement n° 19, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour ajouter un alinéa à l'article L. 222-2 du code du travail par la phrase :
Ce décret détermine les conditions dans lesquelles ces dérogations peuvent être accordées.
L'amendement n° 20, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le b) du 3° de cet article pour ajouter un alinéa à l'article L. 222-4 du code du travail par la phrase :
Ce décret détermine les conditions dans lesquelles ces dérogations peuvent être accordées.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces trois amendements et donner l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 96 et 153.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Ces trois amendements, qui procèdent d'une même démarche, s'inscrivent dans la logique de l'amendement n° 17, que j'ai présenté sur l'article précédent.
La commission des affaires sociales, si elle n'est pas opposée à l'introduction de dérogations, souhaite que celles-ci soient strictement encadrées dans un dispositif réglementaire. Sans remettre en cause le principe tel qu'il est proposé, il lui semble indispensable que soient précisées certaines des conditions d'horaires et de rémunération dans lesquelles les activités concernées peuvent être exercées dans un cadre dérogatoire au droit commun.
Les amendements nos 18, 19 et 20 visent donc à préciser les conditions dans lesquelles seront accordées ces dérogations s'agissant du travail le dimanche et les jours fériés. Celles-ci, je l'ai dit tout à l'heure, seront définies dans un décret en Conseil d'Etat.
Bien sûr, il est essentiel que ce décret soit précédé d'une discussion avec les partenaires sociaux, afin que les spécificités et les réalités de l'exercice de chaque profession soient bien prises en compte.
Pour ce qui concerne les amendements nos 96 et 153 de suppression, la prise en compte de la spécificité de certaines activités peut amener à accorder des dérogations au principe d'interdiction du travail des apprentis mineurs le dimanche et les jours fériés. Ces dérogations sont données à titre exceptionnel, on ne le dira jamais assez. La commission souhaite qu'elles soient encadrées par un décret en Conseil d'Etat après une concertation préalable, car elle est bien consciente que chaque profession a ses contraintes, ses spécificités. C'est pourquoi elle émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Avant de donner l'avis du Gouvernement sur chacun de ces amendements, je veux revenir sur une question qui a été posée. Le Gouvernement aurait-il changé d'avis en quinze jours ? Je dirai qu'il y a eu deux dimanches, jours propices à la réflexion.
Je voudrais rappeler la liste des secteurs concernés par les dérogations prévues par l'article 11 bis et attirer votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur le fait que le Gouvernement a essayé de faire converger la position de l'Assemblée nationale et celle qu'avait adoptée le Sénat lors du débat sur le projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises.
Les secteurs concernés sont les métiers de bouche, de l'hôtellerie, de la restauration et des fleuristes, car la fête des mères par exemple ne tombe pas un jour de semaine.
Je rappelle que l'apprentissage est aussi une mise en situation et une approche des réalités de l'entreprise dans des conditions qui doivent être encadrées.
Le Gouvernement, qui a indiqué sa position devant la commission, souhaite que la liste soit élaborée après un décret en Conseil d'Etat.
Il émet une sagesse réservée sur les propositions de la commission, car des améliorations peuvent encore être apportées lors de la réunion de la commission mixte paritaire.
Il lui paraît important de ne pas en revenir à l'article R.221-4 du code du travail, qui est vieillot. Je le dis à une commission pour laquelle j'ai beaucoup d'affection et qui a eu l'occasion d'en débattre lors de l'examen du projet de loi en faveur des petites et moyennes entreprises. Il ne faut pas s'interdire de modifier le code du travail quand on constate que sont visées par exemple les fabriques de cyanure alcalin. Il faut être capable de faire évoluer la situation.
Cependant, je souhaite un renvoi non pas à cette liste mais aux secteurs que j'ai évoqués pour répondre à la question que vous m'avez posée, monsieur Godefroy.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement adopte une position identique à celle de la commission pour ce qui concerne les amendements nos 96 et 153.
Sur les amendements nos 18, 19 et 20, il émet une sagesse réservée, sachant qu'un cheminement devra encore être effectué lors des travaux de la commission mixte paritaire afin d'apporter les souplesses nécessaires. En fait, lorsque la décision était prise par circulaire, tout le monde fermait les yeux. Il a fallu la jurisprudence pour que nous en venions à débattre de ce sujet, ce qui est utile.
Regardons la réalité en face : pendant trente années, quels que soient les gouvernements, on a refusé de se saisir de ce sujet. Dans le cadre de la procédure législative, il me semble que la commission mixte paritaire pourrait utilement finir de ciseler le travail afin que les dérogations susvisées soient accordées aux secteurs que j'ai évoqués et que des garanties suffisantes soient apportées tant aux apprentis mineurs qu'aux entreprises qui font l'effort de former des jeunes, ne l'oublions pas. Aujourd'hui, nous leur demandons de prendre en charge 500 000 apprentis. Nous mobilisons l'ensemble des entreprises, quelle que soit leur taille. C'est aussi un enjeu pour l'emploi des jeunes et pour leur insertion dans la vie professionnelle.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur les amendements nos 96 et 153.
M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le ministre, je note que vous renvoyez cette question à la commission mixte paritaire. Il serait peut-être plus judicieux d'en parler dès maintenant.
Je vous rappelle que nous avons fait des propositions très concrètes tant à M. Dutreil qu'à vous-même aujourd'hui. Pour l'instant, nous n'avons pas obtenu de réponse.
J'attache beaucoup d'importance à l'idée de différencier la première année d'apprentissage et la seconde. Les adolescents concernés n'ont pas le même âge. Ils n'appréhendent pas la vie de la même façon.
Pour ce qui concerne le problème des jours fériés, je rappelle que nous avions soutenu le Gouvernement voilà quinze jours. Cependant, nous ne pourrons pas agir de même aujourd'hui puisque, sur ce sujet, le Gouvernement, pendant cette période de quinze jours, a revu sa copie : il est maintenant favorable au travail des apprentis les jours fériés. Ce changement de position ne va pas nous inciter à retirer l'amendement n° 96.
Monsieur le président, si vous me le permettez, je ferai une remarque. Je suis entré en apprentissage à l'âge de quinze ans et le propos que j'ai entendu me blesse énormément
Les personnes qui se dirigent vers l'apprentissage le font de gré ou de force, car parfois les conditions économiques ne leur donnent pas le choix. Dans certains cas, le choix est fait non par l'enfant, mais par la famille à son corps défendant, et cette remarque est toujours vraie aujourd'hui. Il ne faut pas montrer du doigt les apprentis.
Un jeune apprenti doit aussi disposer d'un temps de loisir avec ses amis. Le dimanche, il doit pouvoir aller à son match de football. Certes, si on lui demande de travailler un dimanche par mois, il peut se dispenser de ce match. Mais une telle obligation ne doit pas lui être imposée tous les dimanches. Il doit aussi pouvoir participer aux activités culturelles parce qu'il a le devoir de se cultiver. Tous ces aspects doivent être défendus et non seulement la formation. Pour toutes ces raisons, nous avons proposé une formation progressive.
L'apprentissage n'est pas un parcours professionnel. Il demeure un apprentissage ! C'est aussi une formation culturelle, sportive, sociale. Monsieur le ministre, nous n'en sommes pas encore là !
Une personne qui a suivi la voie de l'apprentissage doit franchir des passerelles très difficiles. Elles sont aisées à passer pour celui qui a reçu une bonne formation, qui a pris le temps de se cultiver, de suivre des cours du soir le cas échéant. Ce n'est pas en envoyant des apprentis travailler la nuit, le samedi, le dimanche, les jours fériés que vous arriverez à former des personnes capables de franchir ensuite des passerelles. Il ne faut pas enfermer le jeune dans un seul apprentissage. Il doit pouvoir s'ouvrir à plusieurs formes d'apprentissage et choisir une autre direction. C'est très important.
Je considère que l'on parle très mal de l'apprentissage. Il faut le vivre. Nous avions fait des propositions cohérentes et nous aurions aimé recevoir une écoute beaucoup plus positive de la part du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gérard Larcher, ministre délégué. Monsieur Godefroy, je veux vous citer un exemple pour éviter la caricature. Dans la convention d'objectifs et de moyens que j'ai signée lundi dernier avec la région Picardie, afin de bien montrer que l'apprentissage, la formation en alternance étaient des voies qui devaient être non pas subies mais choisies ou qui devaient en tout cas offrir un certain nombre de chances, ont été prévus un volet culturel, un volet linguistique et des échanges avec d'autres apprentis dans le cadre de l'Union européenne.
J'ai inauguré récemment un CFA du bâtiment, car je pense que la participation des jeunes à la gestion des entreprises est très importante. Cette compétence peut s'acquérir, mais c'est aussi un état d'esprit. A cet égard, un certain nombre d'apprentis seront demain les repreneurs d'entreprise dont nous avons besoin.
Monsieur Godefroy, la culture, les formations, les loisirs font bien partie des préoccupations du Gouvernement à tel point qu'il les intègre dans les conventions d'objectifs et de moyens et qu'il les cofinance à 50 %. Avec dix-huit régions, un tel cap a déjà été fixé.
Vous pouvez constater, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement se préoccupe d'offrir un apprentissage de qualité.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 96 et 153.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 189 :
Nombre de votants | 327 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 163 |
Pour l'adoption | 125 |
Contre | 199 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 18.
(L'amendement est adopté.)