Articles additionnels après l'article 2
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 76 rectifié, présenté par MM. Hoeffel, Ostermann, Richert, Eckenspieller et Bizet, est ainsi libellé :
« Après l'article 2 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le dernier alinéa de l'article 2 de la loi n° 82-1091 du 23 décembre 1982 relative à la formation professionnelle des artisans, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Avant son immatriculation au répertoire des métiers ou, pour les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, au registre des entreprises, le chef d'entreprise suit un stage d'approfondissement professionnel et d'aptitude à la gestion d'entreprise organisé par les chambres de métiers en liaison avec les organisations professionnelles de l'artisanat représentatives, dans les six mois précédant la demande d'immatriculation. Les conditions de validation du stage préalable à l'installation seront précisées par un décret d'application après concertation professionnelle. »
L'amendement n° 148, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant le dernier alinéa de l'article 2 de la loi n° 82-1091 du 23 décembre 1982 relative à la formation professionnelle des artisans, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Après son immatriculation au répertoire des métiers ou, pour les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, au registre des entreprises, le chef d'entreprise suit un stage d'approfondissement professionnel organisé par les chambres de métiers en liaison avec les organisations professionnelles de l'artisanat représentatives, dans les six mois à compter de son installation. »
La parole est à M. Joseph Ostermann, pour présenter l'amendement n° 76 rectifié.
M. Joseph Ostermann. Il s'agit ici d'une disposition de droit local. Cet amendement répond à la même logique que celui que j'ai précédemment exposé, mais il concerne essentiellement l'Alsace et la Moselle.
M. le président. La parole est à M. Christian Gaudin, pour présenter l'amendement n° 148.
M. Christian Gaudin. Je ne souhaite évidemment pas, par cet amendement, alourdir encore le processus de la création d'entreprise. Cependant, force est de reconnaître que le taux d'échec est élevé dans les premières années qui suivent celle-ci, d'où l'idée de permettre au nouveau chef d'entreprise de suivre un stage, de façon à mieux l'accompagner lors du démarrage de son activité.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Sur le fond, ces deux amendements sont presque identiques ; ils diffèrent en ce que l'amendement n° 76 rectifié prévoit que le chef d'entreprise suivra un stage avant son immatriculation au répertoire des métiers, alors que l'amendement n° 148 prévoit que ce stage interviendra après l'immatriculation.
Quoi qu'il en soit, monsieur Ostermann, il ne s'agit pas d'une disposition de droit local, puisqu'elle s'appliquerait, si les amendements étaient adoptés, à l'ensemble des artisans, sur tout le territoire national. Il ne peut d'ailleurs y avoir de nouvelle disposition de droit local dans ce domaine, sauf à ouvrir un vaste débat !
L'article 2 de la loi du 23 décembre 1982 relative à la formation professionnelle des artisans dispose déjà que, avant l'immatriculation de son entreprise au répertoire des métiers, le futur chef d'entreprise suit un stage d'initiation à la gestion organisé par les chambres de métiers.
La loi ne prévoit d'ailleurs aucune sanction en cas de non-accomplissement de ce stage, mais il semble implicite que l'inscription au répertoire des métiers peut alors être refusée, ce qui paraît critiquable, du point de vue constitutionnel, au regard du principe de la liberté du commerce et de l'industrie. Il faut donc considérer la disposition visée comme une incitation et non comme une obligation, car cela pourrait conduire certains à s'interroger sur sa constitutionnalité.
L'amendement n° 76 rectifié tend à ajouter une nouvelle exigence en matière de formation préalable du chef d'entreprise dans les six mois précédant l'immatriculation, ce qui ne semble pas de nature à simplifier et à encourager la création d'entreprise. A cet égard, on peut noter que, en 2002, le nombre d'immatriculations au répertoire des métiers a chuté de 10,5 %, même si cela tient à de nombreux facteurs. A mon sens, la transmission des entreprises est aujourd'hui le problème crucial dans notre pays.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur les deux amendements. Si toutefois le Sénat ne suivait pas cet avis, je déposerais un sous-amendement tendant à préciser que le stage est gratuit !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements, mais il partage le souci de leurs auteurs, à savoir permettre à des créateurs d'entreprise de se former.
Le Gouvernement estime qu'il faut non pas contraindre par la loi les créateurs d'entreprise à suivre une formation, mais les y inciter par des dispositifs souples qui seront mis en place par les chambres de commerce et les chambres de métiers, avec lesquelles je suis d'ailleurs actuellement en discussion en vue d'améliorer l'offre de formation volontaire.
Cela étant, je le répète, nous partageons la volonté exprimée par les auteurs des amendements de mieux former les créateurs d'entreprise avant l'immatriculation et de mieux les accompagner ensuite.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement n° 76 rectifié est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. Je voudrais formuler une remarque complémentaire.
M. le rapporteur nous a indiqué que le nombre d'immatriculations d'entreprise avait chuté de 10,5 % en 2002 : certes, mais la circulaire que j'ai citée hier soir au cours de la discussion générale, qui date du mois d'avril 2002, n'encourage nullement nos concitoyens à créer leur propre affaire ! En effet, la procédure devient tellement complexe que l'on ne s'y retrouve plus.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui.
M. Joseph Ostermann. La formation est donc indispensable pour bien comprendre les contraintes qui sont imposées à l'entreprise.
Par conséquent, je maintiens cet amendement, en souhaitant, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'on puisse, au cours de la navette, trouver une formule satisfaisante.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Quand j'ai dit vouloir sous-amender votre amendement, monsieur Ostermann, il s'agissait bien entendu d'une boutade !
Franchement, mon cher collègue, vous abordez deux sujets différents : tout à l'heure, c'était la qualification, maintenant, c'est la qualification pour être chef d'entreprise. S'il suffisait de suivre un stage pour devenir chef d'entreprise, cela se saurait !
M. Joseph Ostermann. Cela ne veut rien dire !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je connais de grands chefs d'entreprise qui n'ont même pas le certificat d'études !
M. Joseph Ostermann. Cela n'a rien à voir !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ce n'est pas en effectuant un stage que l'on apprend le métier de chef d'entreprise ! On ne peut à la fois vouloir multiplier les stages pour les créateurs d'entreprise et prétendre faciliter la création d'entreprise. C'est contradictoire ! Il ne faut pas aller trop loin : mieux vaut, selon moi, inciter qu'imposer.
Pour les raisons que j'ai indiquées, la commission est défavorable à votre amendement, monsieur Ostermann, comme à celui de M. Christian Gaudin.
M. le président. Monsieur Gaudin, l'amendement n° 148 est-il maintenu ?
M. Christian Gaudin. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez dit hier que vous meniez une réflexion sur le statut de l'entrepreneur et qu'un projet de loi sur ce sujet nous serait soumis dans quelques mois. J'aimerais que, dans cette perspective, l'on réfléchisse à l'accompagnement du créateur d'entreprise au cours des premiers mois suivant son installation.
Ce voeu étant exprimé, je retire l'amendement. (M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, approuve.)
M. le président. L'amendement n° 148 est retiré.
La parole est à M. Philippe Arnaud, contre l'amendement n° 76 rectifié.
M. Philippe Arnaud. Je voterai contre cet amendement. En effet, s'il est certes important qu'un créateur d'entreprise dispose de qualifications professionnelles, je trouve très inquiétant qu'il faille mettre en place des formations pour lui permettre de mieux appréhender les contraintes administratives. Dans ces conditions, mieux vaut supprimer immédiatement celles-ci !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En effet ! Sinon, on n'y arrivera jamais !
M. Philippe Arnaud. Ce que nous voulons, c'est simplifier la création d'entreprise. Par conséquent, il serait aberrant de prévoir des stages et des formations visant à permettre aux porteurs de projets de mieux connaître les contraintes administratives !
Je suis donc, je le répète, opposé à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Hilaire Flandre, pour explication de vote.
M. Hilaire Flandre. La volonté d'accroître le nombre d'entreprises privées dans notre pays ne doit pas nous conduire à faire tout et n'importe quoi !
On ne peut être responsable d'une entreprise, si petite soit-elle, sans posséder une qualification minimale en matière de gestion. Je viens d'un secteur professionnel, l'agriculture, où, chacun le sait, on a multiplié les obligations en matière de formation professionnelle avant l'installation. Cela me paraît une bonne chose, et l'agriculture est sans doute le secteur où l'on constate le taux d'échec le moins élevé.
A l'heure actuelle, beaucoup d'entreprises petites ou très petites disparaissent dans les deux ou trois années qui suivent leur création, parce que leurs responsables ne disposaient pas d'une compréhension suffisante des mécanismes économiques.
Par conséquent, je voterai l'amendement n° 76 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Bernard Angels, pour explication de vote.
M. Bernard Angels. Je suis assez surpris de ce débat.
En effet, on affirme souvent, en particulier sur les travées de droite de cet hémicycle, qu'il faut alléger les procédures ; or, en l'occurrence, on adopte un point de vue très réducteur.
Sur le fond, je suis d'accord : il faut aider les entrepreneurs et les accompagner. Cependant, vouloir inscrire une nouvelle obligation dans la loi me semble incompréhensible. Autant je souhaite que l'on dégage des moyens pour accompagner, à leur demande, les créateurs d'entreprise, autant je ne vois pas pourquoi l'on introduirait dans la loi une obligation supplémentaire.
L'expérience nous montre d'ailleurs que des autodidactes réussissent très bien là où de brillants énarques échouent complètement ! (Sourires.)
Par conséquent, la création d'entreprise n'est pas seulement une affaire de connaissances. Je crois qu'il faut mettre en place des dispositifs souples et, surtout, prévoir des moyens pour accompagner les gens et les aider à réussir.
M. Philippe Arnaud. Absolument !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je rappelle que le projet de loi comporte un dispositif relatif à l'accompagnement. Il faut encourager la création d'entreprise. D'ailleurs, les chambres de commerce, les chambres de métiers et d'autres organismes professionnels le font. Mais, c'est vrai, il n'y a pas assez d'incitation.
Le projet de loi prévoit un certain nombre de dispositions incitatives fortes, qui sont financées. On ne peut imposer des mesures strictes, avec une obligation de résultat. En l'occurrence, il s'agit surtout d'accompagnement. Le créateur doit être accompagné d'un bon comptable. C'est tout cela, l'entreprise ! En effet, si on a suivi un petit stage de comptabilité, on ne connaît pas pour autant la comptabilité. Il sera toujours nécessaire de faire appel à un professionnel. S'agissant des questions juridiques, ce n'est pas une chambre de métiers qui fournira les éléments pour créer une SARL en cinq minutes. Si c'est cela que vous appelez l'approfondissement de la connaissance administrative du statut de l'entreprise, ce n'est pas très réaliste.
Certes, M. Ostermann a maintenu son amendement, mais je demande à mes collègues de considérer l'ensemble du projet de loi dont un certain nombre de dispositions me paraissent beaucoup plus incitatives que contraignantes.
M. le président. Monsieur Ostermann, l'amendement n° 76 rectifié est-il maintenu ?
M. Joseph Ostermann. J'ai mis le doigt sur une véritable nécessité. Tous les intervenants considèrent que, avant la création d'une entreprise, l'entrepreneur doit bénéficier d'une formation, qu'il s'agisse du tutorat, d'une formation directe ou de toute autre formation. Il convient donc, selon moi, de trouver une solution...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Bien sûr !
M. Joseph Ostermann. ... permettant de mieux accompagner celui qui crée une entreprise afin que celle-ci ne disparaisse pas dans les trois premières années.
Sous le bénéfice de ces observations, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 76 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 75 rectifié est présenté par MM. Hoeffel, Ostermann, Richert, Eckenspieller et Bizet.
L'amendement n° 147 est présenté par M. Christian Gaudin et les membres du groupe de l'Union centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 16 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Il appartient à chaque chambre consulaire départementale, chambre de commerce et d'industrie ou de métiers, lors de la demande d'immatriculation d'une personne physique ou morale au répertoire des métiers ou au registre du commerce et des sociétés, de vérifier qu'une qualification ou une expérience minimale est possédée par l'entreprise créatrice.
« La constatation à l'occasion de l'immatriculation du non-respect des éléments ci-dessus entraîne le rejet de la demande d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers. »
La parole est à M. Joseph Ostermann, pour défendre l'amendement n° 75 rectifié.
M. Joseph Ostermann. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 75 rectifié est retiré.
La parole est à M. Christian Gaudin, pour présenter l'amendement n° 147.
M. Christian Gaudin. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 147 est retiré.
Article 2 bis
M. le président. « Art. 2 bis. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 143-20 du code de commerce, après les mots : "acte authentique", sont insérés les mots : "ou sous seing privé dûment enregistré". » - (Adopté.)
M. le président. « Art. 3. - Le III de l'article 4 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle est ainsi rédigé :
« III. - Par exception au I, lorsqu'elles sont transmises par voie électronique, les déclarations relatives à la création de l'entreprise, à la modification de sa situation ou à la cessation de son activité sont faites dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. » - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le dernier alinéa du I de l'article 19 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat est complété par les mots :
« et la nature des informations que leur président peut adresser au préfet lorsqu'il estime, lors de l'immatriculation ou en toute autre occasion, que l'activité déclarée est exercée en méconnaissance des dispositions des I et II de l'article 16. »
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s'agit de l'amendement que j'ai évoqué tout à l'heure à propos du contrôle de la qualification des métiers.
En vertu de l'article 16 de la loi du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, certains activités artisanales limitativement énumérées dont l'exercice comporte des risques pour la sécurité ou la santé des consommateurs font l'objet d'une exigence de qualification professionnelle. Ainsi, quels que soient le statut juridique et les caractéristiques de l'entreprise, ces activités ne peuvent être exercées « que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent de celle-ci ». Aux termes de l'article 24 de la même loi, l'exercice desdites activités en méconnaissance de ces exigences légales est constitutif d'un délit puni de 7 500 euros d'amende.
Il apparaît que le contrôle du respect de ces dispositions, dont la mise en oeuvre appartient aux services déconcentrés de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, est diversement mis en oeuvre et que les exigences légales sont insuffisamment respectées. Des contrôles systématiques nécessitent, pour être efficaces, des moyens importants, qui ne sont pas toujours disponibles.
Aussi est-il apparu à la commission spéciale que les chambres de métiers pourraient exercer une mission d'alerte de l'autorité publique lorsqu'elles estiment que l'activité considérée est exercée sans la qualification requise.
Tel est l'objet de cet amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 3.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Cette mesure me semble utile car il est important que les contrôles prévus par la loi puissent être effectivement exercés par les services compétents. J'ai d'ailleurs moi-même donné une instruction très précise aux services de la DGCCRF pour qu'ils puissent effectuer ces contrôles.
Il doit être souligné cependant, et clair dans l'esprit de chacun, que cette possibilité ne doit, en aucune manière, conduire les chambres de métiers à refuser l'immatriculation à des entreprises qui ne sont pas en mesure d'apporter les justificatifs de qualification. En effet, ce serait contraire aux termes de la loi de 1996 qui ne porte que sur l'exercice de l'activité, et plus généralement contraire à la liberté d'entreprendre.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Francis Grignon, président de la commission spéciale. Originaire du Bas-Rhin, donc de l'Alsace, je m'intéresse aux questions de qualification et de formation. Aussi, je me réjouis de cet amendement.
En 1996, lorsque l'article 16 de la loi Raffarin a été élaboré, nous avons tous compris que, pour les métiers comportant des risques pour le consommateur, il fallait un encadrement. Je songe au mécanicien qui répare un véhicule automobile ou à l'électricien qui installe l'électricité dans une maison.
Comme l'a dit M. le rapporteur, les corporations ont été supprimées après la Révolution de 1789 (Sourires), mais il faut maintenir un minimum de sécurité. Aussi, dans le prolongement de la loi de 1996, mes collègues d'Alsace et de Moselle et moi-même, nous nous réjouissons que l'on puisse contrôler la qualification.
Dans mes dossiers, j'ai une lettre d'un organisme d'un département français qui répond à la chambre de métiers qu'elle n'a pas les moyens de vérifier cette qualification. C'est tout de même inquiétant pour les consommateurs. C'est inquiétant aussi pour la pérennité des artisans. En effet, les gens qui exercent sans qualification font une concurrence déloyale à nos artisans qui ont pris la peine d'acquérir la formation nécessaire. Et je ne parle pas des problèmes que cela génère par la suite pour les personnes qui font appel, pour la construction, à des entreprises qui les laissent tomber. Je peux aussi citer l'exemple des mécaniciens qui ne savent pas réparer les véhicules automobiles.
Avec cet amendement - je m'adresse particulièrement à mon collègue Joseph Ostermann - nous avons trouvé le moyen de faire en sorte que les chambres de métiers veillent au grain. Ce n'est pas à elles d'appliquer les amendes puisque, pas plus que les chambres de commerce, elles n'ont le pouvoir de le faire. Au moins, elles ont, à travers ce texte, le pouvoir d'alerter le préfet - nous l'avons préféré au procureur de la République, dont la charge est suffisante. Les élus connaissent bien le préfet, et pourront le mobiliser au cas où les choses n'iraient pas assez vite.
M. le rapporteur et moi-même, nous nous réjouissons de cet amendement. J'espère qu'il répondra à notre souci à tous de protéger également le consommateur.
M. Joseph Ostermann. Le Seigneur vous entende !
M. le président. M. Ostermann l'a dit, on n'a pas aboli tous les privilèges, même après 1789 ! (Sourires.)
La parole est à M. Philippe Arnaud, pour explication de vote.
M. Philippe Arnaud. Il s'agit plutôt d'une demande d'explication.
Tout à l'heure, nous avons souhaité, monsieur le rapporteur, fiabiliser juridiquement l'inscription d'une entreprise nouvelle. La préoccupation de la fiabilité juridique a donc été clairement exprimée. Or, en l'occurrence, on laisse entendre que, lors de l'immatriculation, des activités pourraient être déclarées en méconnaissance des dispositions des I et II de l'article 16. Il pourrait donc y avoir des fausses déclarations, en tout cas un manque de fiabilité juridique.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. Nous sommes très favorables à cet amendement. Monsieur le rapporteur, je viens conforter l'analyse que vous avez faite tout à l'heure. Il ne suffit pas d'alerter le préfet. Encore faut-il que le préfet ait des moyens. Autrement dit, si j'ai bien compris ce que vous nous avez dit tout à l'heure, vous êtes favorable à l'augmentation des moyens de la DGCCRF. J'aimerais que l'on en prenne acte.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur Arnaud, quand vous êtes inscrit au registre des métiers, que vous travaillez seul et que vous exercez une des professions visées, il faut bien sûr que vous ayez la qualification requise. Mais on peut exercer son activité sous forme de société. Moi, demain, je peux, comme vous, être patron d'une entreprise de boulangerie et pourtant je ne suis pas boulanger. En revanche, il faut employer du personnel qualifié, c'est-à-dire des boulangers.
Je rappelle que sont concernées les seules professions dont l'exercice comporte des risques pour la santé ou la sécurité des consommateurs. Ainsi, on ne peut pas être prothésiste dentaire si l'on n'a pas la qualification requise. Il en est de même pour les réparateurs automobile. Mais vous pouvez avoir un garage et ne pas avoir la formation de garagiste. Cependant, si tel est le cas, vous devez employer des personnes qualifiées dans votre entreprise. Et c'est ce que l'on doit vérifier, d'abord lors de l'immatriculation, puis périodiquement. En effet, la personne qualifiée que vous employez peut très bien par la suite quitter votre entreprise.
M. Philippe Arnaud. D'accord !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Voilà pourquoi un contrôle périodique est fait par les services de la DGCCRF. Nous voulons renforcer ce dispositif.
M. le président. Quant à notre rapporteur, il peut être plus rapidement ministre que boulanger ! (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 8.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
M. le président. « Art. 4. - La sous-section 3 de la section 1 du chapitre III du titre II du livre Ier du code de commerce est ainsi modifiée :
« 1° Il est inséré un paragraphe 1 intitulé "Dispositions applicables aux personnes physiques" et comprenant l'article L. 123-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 123-10. - Les personnes physiques demandant leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers doivent déclarer l'adresse de leur entreprise et en justifier la jouissance.
« Les personnes physiques peuvent déclarer l'adresse de leur local d'habitation et y exercer une activité, dès lors qu'aucune disposition législative ou stipulation contractuelle ne s'y oppose.
« Lorsqu'elles ne disposent pas d'un établissement fixe, les personnes physiques peuvent, à titre exclusif d'adresse de l'entreprise, déclarer celle de leur local d'habitation. Cette déclaration n'entraîne ni changement d'affectation des locaux ni application du statut des baux commerciaux. » ;
« 2° Il est inséré, après l'article L. 123-10, un paragraphe 2 intitulé "Dispositions applicables aux personnes morales" et comprenant les articles L. 123-11 et L. 123-11-1 ainsi rédigés :
« Art. L. 123-11. - Toute personne morale demandant son immatriculation au registre du commerce et des sociétés doit justifier de la jouissance du ou des locaux où elle installe, seule ou avec d'autres, le siège de l'entreprise, ou, lorsque celui-ci est situé à l'étranger, l'agence, la succursale ou la représentation établie sur le territoire français.
« La domiciliation d'une entreprise dans des locaux occupés en commun par plusieurs entreprises est autorisée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Ce décret précise, en outre, les équipements ou services requis pour justifier la réalité du siège de l'entreprise domiciliée.
« Art. L. 123-11-1. - La personne morale qui demande son immatriculation au registre du commerce et des sociétés est autorisée à installer son siège au domicile de son représentant légal et y exercer une activité, sauf dispositions législatives ou stipulations contractuelles contraires.
« Lorsque la personne morale est soumise à des dispositions législatives ou stipulations contractuelles mentionnées à l'alinéa précédent, son représentant légal peut en installer le siège à son domicile, pour une durée ne pouvant ni excéder cinq ans à compter de la création de celle-ci, ni dépasser le terme légal, contractuel ou judiciaire de l'occupation des locaux.
« Dans ce cas, elle doit, préalablement au dépôt de sa demande d'immatriculation, notifier par écrit au bailleur, au syndicat de la copropriété ou au représentant de l'ensemble immobilier son intention d'user de la faculté ainsi prévue.
« Avant l'expiration de la période mentionnée au deuxième alinéa, la personne doit, sous peine de radiation d'office, communiquer au greffe du tribunal les éléments justifiant son changement de situation, selon les modalités fixées par décret en Conseil d'Etat.
« Il ne peut résulter des dispositions du présent article, ni le changement de destination de l'immeuble, ni l'application du statut des baux commerciaux. »
L'amendement n° 9, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le 1° de cet article pour insérer un article L. 123-10 dans le code de commerce, après les mots : "d'un établissement" supprimer le mot : "fixe". »
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer un adjectif qui risque de prêter à confusion. Le fait de subordonner la possibilité, pour une personne physique, de domicilier son entreprise dans son local d'habitation à défaut de disposer d'un « établissement fixe » risque d'être interprété comme restreignant cette faculté aux seules activités ambulantes, alors qu'il s'agit de faire bénéficier de cette faculté de domiciliation tous les entrepreneurs individuels qui ne disposent pas d'un lieu où nouer des relations avec la clientèle, comme les artisans qui exercent leur activité chez leurs clients. Un réparateur ou un plombier peut domicilier son entreprise à son domicile car, par définition, il n'a pas d'établissement fixe puisque, pour exercer son activité, il se rend chez ses clients. Afin d'éviter toute ambiguïté, nous demandons au Sénat de supprimer cet adjectif.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 275 rectifié bis, présenté par MM. Fournier, Nachbar, Karoutchi, Besse, Gournac, Natali, Trucy, Hérisson, Vasselle et Amoudry, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le texte proposé par le 1° de cet article pour l'article L. 123-10 du code de commerce, par un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes physiques peuvent déclarer l'adresse de locaux occupés en commun par plusieurs entreprises dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat pour l'adresse de leur entreprise. Ce décret précise, en outre, les équipements ou services requis pour justifier la réalité du siège ou un établissement secondaire de l'entreprise domiciliée. »
La parole est à M. Bernard Fournier.
M. Bernard Fournier. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'article L. 123-11 du code de commerce.
Dans la mesure où les conditions de domiciliation des personnes morales sont fixées par un décret en Conseil d'Etat, il semble utile de veiller au parallélisme des formes s'agissant des conditions de domiciliation des personnes physiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cher collègue Fournier, il ne s'agit pas d'un amendement de coordination.
M. Bernard Fournier. Ah ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Sinon la commission n'aurait pu qu'émettre un avis favorable.
En vertu des dispositions figurant dans le projet de loi, la possibilité de domiciliation commune est désormais réservée aux personnes morales. En effet, les personnes physiques ne disposant pas d'un établissement pour domicilier leur entreprise peuvent désormais, et sans limitation de durée, la domicilier dans leur propre local d'habitation.
Les dispositions relatives à la domiciliation commune, qui n'étaient d'ailleurs jusqu'à présent que très rarement utilisées, n'ont plus d'utilité, ce qui explique que le Gouvernement ne les ait pas reprises pour les personnes physiques.
Monsieur Fournier, je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Comme vient de l'indiquer M. le rapporteur, le parallélisme des dispositions applicables aux personnes physiques et aux personnes morales n'est pas justifié sur le point précis de la domiciliation.
En effet, l'entrepreneur individuel ne dispose pas d'un siège social au sens juridique du terme, dans la mesure où il n'a pas à organiser le fonctionnement d'organes sociaux légalement définis pour animer son entreprise.
Dans le cas d'une personne morale, les choses sont différentes. La domiciliation consiste à déclarer l'adresse de l'activité et, dès lors, la direction juridique et la production marchande sont confondues sur le même site.
La possibilité existe toujours, pour les entreprises individuelles, de s'implanter dans des locaux collectifs d'activité tels que des centres commerciaux ou des hôtels industriels, dont la réglementation n'entre pas dans l'objet de ce projet de loi.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Fournier, l'amendement n° 275 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Bernard Fournier. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 275 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 276 rectifié bis, présenté par MM. Fournier, Nachbar, Karoutchi, Besse, Gournac, Natali, Trucy, Hérisson, Vasselle et Amoudry, est ainsi libellé :
« I. - Dans le texte proposé par le 2° de cet article pour le premier alinéa de l'article L. 123-11 du code de commerce, remplacer les mots : "le siège de l'entreprise, ou, lorsque celui-ci est situé à l'étranger" par les mots : "le siège ou un établissement secondaire de l'entreprise, ou, lorsque le siège est situé à l'étranger".
« II. - Dans le texte proposé par le 2° de cet article pour la seconde phrase du second alinéa de l'article L. 123-11 du code de commerce, après les mots : "du siège" insérer les mots : "ou d'un établissement secondaire". »
La parole est à M. Bernard Fournier.
M. Bernard Fournier. Cet amendement vise à clarifier le régime juridique des établissements secondaires des entreprises qui ont souhaité se développer hors de leur siège social.
Il ressort de l'expérience que certains greffes de tribunaux de commerce refusent l'immatriculation d'un établissement secondaire dans les locaux occupés en commun avec d'autres entreprises, tandis que d'autres greffes l'acceptent.
Cet amendement a donc pour objet d'unifier le régime juridique applicable sur l'ensemble du territoire en facilitant l'inscription des établissements secondaires au registre du commerce, ce qui permettra, me semble-t-il, le développement des sociétés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement est loin de clarifier les choses.
M. le président. M. Fournier n'a pas de chance cet après-midi !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il y a des jours comme ça ! Mais cela viendra peut-être car le débat sera long.
Il n'y a pas lieu d'exiger que la personne morale, lors de son immatriculation, justifie de la jouissance de locaux et de l'installation d'un établissement secondaire. En effet, un établissement secondaire, comme l'établissement principal - d'ailleurs vous parlez d'établissement secondaire sans parler d'établissement principal -, abrite l'exercice de l'activité et ne concerne pas la question de la domiciliation.
Ce qui est important, c'est l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés. Si l'activité est exercée sous la forme individuelle, il y a souvent liaison entre l'exercice de l'activité et la domiciliation. Mais, on n'immatricule pas des établissements, on immatricule des sociétés. En revanche, si l'activité est exercée sous forme de sociétés autonomes, l'entreprise sera immatriculée car c'est une filiale. Quel que soit le nombre d'établissements, cela ne change rien en matière d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés.
La question méritait d'être posée. Certains greffes ont peut-être mal interprété les dispositions concernées. Mais, selon moi, cet amendement n'est pas vraiment utile.
Aussi, je vous demande de le retirer, sinon je devrai émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. M. le rapporteur a donné les éclaircissements nécessaires. Le Gouvernement partage son analyse et demande le retrait ou à défaut, le rejet de cet amendement.
M. le président. Monsieur Fournier, l'amendement n° 276 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Bernard Fournier. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 276 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 317, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« I. - Compléter l'article 4 par un alinéa ainsi rédigé :
« II. - Les articles L. 123-10 à L. 123-11-1 du code de commerce, dans leur rédaction issue du présent article, sont applicables aux entreprises immatriculées au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers à la date de promulgation de la présente loi. »
« II. En conséquence, faire précéder le premier alinéa du présent article du signe : "I". »
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur le ministre, les dispositions relatives à la domiciliation contenues dans le projet de loi représentent réellement une amélioration et une simplification : grâce à elles, nous encourageons la création d'entreprise.
Le présent amendement tend à préciser que les nouvelles dispositions relatives à la domiciliation de l'entreprise au domicile de l'entrepreneur bénéficieront aux entreprises existant à la date de promulgation de la présente loi, alors qu'une lecture restrictive du dispositif pourrait laisser penser qu'elles ne pourraient s'appliquer qu'aux entreprises en création.
En effet, ces dispositions doivent être d'application immédiate et concerner aussi les entreprises déjà créées. Sans cela, imaginez la situation d'un entrepreneur qui aura déclaré l'adresse de son local d'habitation depuis deux ans et à qui l'on refusera la possibilité de garder cette domiciliation, possibilité ouverte aux autres sans limite de temps !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 317.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)