SEANCE DU 29 JUILLET 2002


M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Alfonsi, est ainsi libellé :
« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est créé un fonds interministériel pour la mise en oeuvre du plan exceptionnel d'investissement pour la Corse sur quinze ans tel qu'il est prévu à l'article 53 de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse. Ce fonds regroupe l'ensemble des crédits destinés à financer la contribution de l'Etat à ce programme. »
La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. Je pourrais me dispenser d'intervenir, mes chers collègues, mais la visite du Premier ministre en Corse, samedi dernier, me commande de le faire, ne serait-ce que pour tenir notre assemblée informée.
Lors du vote de la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse, la mise en oeuvre d'un programme exceptionnel d'investissement a été prévue ; j'ai d'ailleurs eu l'occasion d'en parler avec le rapporteur général, M. Marini, et avec le ministre délégué. Toutefois, des procédures extrêmement complexes, qui faisaient l'objet de protestations de toutes parts, avaient été prévues. Face à cette évidence, M. le Premier ministre a rappelé, lors de sa déclaration de politique générale, que cette procédure de mise en oeuvre et de mobilisation des crédits devrait être allégée pour qu'elle soit plus efficace.
L'amendement n° 12 vise précisément à créer un fonds interministériel pour mettre en oeuvre ce plan. Toutefois, anticipant sans doute sur le sentiment de votre assemblée, dont je ne doute pas qu'elle aurait été favorable à cet amendement, M. Sarkozy a déclaré, samedi dernier, qu'une ligne budgétaire particulière du ministère de l'intérieur regrouperait l'ensemble des crédits.
Il s'agirait là d'une mesure révolutionnaire, d'une expérimentation en matière budgétaire. Quoi qu'il en soit, même cet amendement perd quelque peu de son intérêt, M. le Premier ministre ayant confirmé la position du Gouvernement.
Qu'il s'agisse d'une ligne budgétaire ou d'un fonds spécial d'investissement, cela m'est assez indifférent, il faut bien le dire, du moment que ces procédures sont mises en oeuvre en temps opportun. Je fais une totale confiance au Gouvernement.
En maintenant cet amendement, j'aurais l'illusion d'avoir apporté ma pierre dans cette affaire, le sentiment d'un privilège usurpé.
Cela dit, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 12 est retiré.
L'amendement n° 13, présenté par M. Delfau, est ainsi libellé :

« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est créé un fonds de financement des investissements d'EDF, de GDF et de La Poste en zone rurale et dans les zones urbaines sensibles. Ce fonds est alimenté par le produit de la suppression du mécanisme de modulation de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 22, présenté par MM. de Montesquiou et Goulet, est ainsi libellé :
« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 121-7 du code de l'urbanisme est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Ces frais d'étude, d'élaboration, de révision ou de modification des documents d'urbanisme peuvent être inscrits dans la section d'investissement des budgets communaux, prévue à l'article L. 2311-1 du code général des collectivités territoriales.
« Lorsqu'elles engagent de tels frais, les collectivités locales et leurs groupements peuvent prétendre à ce titre aux attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Cet amendement a été dicté par la volonté d'améliorer la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, et vise à attirer l'attention du Gouvernement sur le poids financier de la réalisation des documents d'urbanisme pour les budgets communaux, surtout pour ceux des plus petites communes.
D'une part, les frais de conception des documents augmentent, car les petites communes font appel à des acteurs économiques privés, les directions départementales de l'équipement étant confrontées à une surchage de travail et étant parfois, de leur propre aveu, au seuil de leurs compétences.
D'autre part, les frais de reproduction des documents prévus par la loi sont élevés, en tout cas pour les petites communes.
A ce jour, ces dépenses d'urbanisme sont inscrites en section de fonctionnement du budget communal. La réalisation de ces documents d'urbanisme constitue pourtant un réel investissement sur l'avenir.
Il s'agit de tenter de redonner aux collectivités locales le goût de l'urbanisme et de les inciter à engager des démarches prospectives et cohérentes pour l'aménagement du territoire. Il est donc proposé de permettre aux communes d'inscrire les dépenses entraînées par les études et l'établissement des documents d'urbanisme en section d'investissement du budget communal, afin qu'elles puissent bénéficier du fonds de compensation de la TVA.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est, en quelque sorte, partagée, car elle reconnaît que bien des petites communes rencontrent des problèmes de financement de leurs documents d'urbanisme et des études qui y conduisent.
Nous espérons tous que la loi dite SRU sera prochainement remise sur le métier et qu'elle deviendra plus « responsabilisante » - si j'ose m'exprimer ainsi - pour les communes, notamment pour les plus petites. Nous souhaitons qu'elle leur permettra de fixer le devenir de leur sol sans avoir à passer par tout un luxe d'études et d'analyses dont elles ne ressentent pas véritablement le besoin.
S'agissant de rendre éligibles au fonds de compensation pour la TVA, les dépenses d'élaboration des documents d'urbanisme, la commission ne peut souscrire à cette proposition pour des raisons techniques. Nous sommes très attachés - Aymeri de Montesquiou le sait - à une certaine rigueur dans la définition des dépenses d'investissement.
Une dépense d'investissement, c'est une dépense destinée à financer un bien amortissable. Les frais d'élaboration des documents d'urbanisme sont considérés comme des dépenses courantes et non comme des dépenses en capital. En tant que gardiens de la doctrine qui distingue les dépenses de fonctionnement des dépenses d'investissement, il nous est difficile de vous suivre sur ce terrain.
Mais peut-être y aurait-il une solution dans le cadre de l'assistance technique à la gestion communale, qui a été redéfinie par la récente loi dite MURCEF. Nous pourrions préparer ensemble un amendement afin de permettre une meilleure intervention des services des directions départementales de l'équipement aux côtés des plus petites communes qui auraient besoin d'un concours pour l'élaboration de leurs documents d'urbanisme.
Sous réserve des réponses ou des appréciations qui seront apportées par M. le ministre, la commission suggère à l'auteur de l'amendement de le retirer, pour le moment.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert ministre délégué. Monsieur le président, l'avis du Gouvernement rejoindra celui du rapporteur général. Je veux dire à Aymeri de Montesquiou et à Daniel Goulet, qui est cosignataire de cet amendement, que le Gouvernement, surtout quand il est incarné par un ancien sénateur d'un département très rural, est parfaitement conscient des problèmes évoqués.
Aymeri de Montesquiou a prononcé quelques mots qu'il nous faut méditer : les administrations elles-mêmes estiment qu'on approche du seuil de leurs compétences.
Mesdames, messieurs les sénateurs, lorsque les administrations estiment qu'on approche du seuil de leurs compétences, c'est que les règles sont trop compliquées. (Sourires.)
M. Eric Doligé. On est toujours à la limite !
M. Alain Lambert, ministre délégué. Si nous décidions de les simplifier, peut-être ferions-nous des économies. En revanche, si nous continuons à les compliquer, même si cela obéit à des préoccupations qui ne sont pas illégitimes, le coût des documents sera bientôt totalement insupportable. Il faut savoir trouver un équilibre en tout !
M. Hilaire Flandre. Il faut revenir au bon sens !
M. Alain Lambert, ministre délégué. Quelle que soit la collectivité qui en supporte le coût, c'est toujours le contribuable qui supporte ces dépenses.
Monsieur Aymeri de Montesquiou, je connais votre éloquence, j'ai d'ailleurs admiré la démonstration que vous nous avez faite et selon laquelle prévoir un bon plan d'urbanisme, c'est bien préparer l'avenir s'agissant de l'investissement. Toutefois, sur le plan comptable, il paraît difficile de lier une valeur ajoutée aux documents évoqués.
Monsieur le sénateur, je vous le dis tout à fait chaleureusement, quel que soit le souci qui est le mien d'apporter une réponse positive pour les petites communes, il vaut mieux chercher la solution du côté des concours particuliers au sein de la dotation générale de décentralisation, ou suivre la proposition du rapporteur général. Vous pourriez trouver là un apport financier qui serait précieux.
Il ne faut pas déplacer la ligne de partage entre les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'investissement. Sinon, nous risquerions de déséquilibrer le fonds de compensation pour la TVA.
C'est donc à regret que je suis conduit à vous demander de retirer votre amendement. A défaut, je demanderai à la majorité sénatoriale et au Sénat de bien vouloir le rejeter.
M. le président. Monsieur de Montesquiou, ces explications sont-elles de nature à susciter le retrait spontané de votre amendement ? (Sourires.)
M. Alain Vasselle. Spontané, non !
M. Aymeri de Montesquiou. Mon enthousiasme est assez modéré, comme vous devez l'imaginer.
M. le ministre a bien voulu souligner qu'il s'agissait de l'avenir. C'est exact, mais notre patrimoine paysager, qui est très important, risque d'être dénaturé si nous laissons construire n'importe quoi.
Pour le protéger, il faut un plan d'urbanisme. Mais l'élaboration de ce plan d'urbanisme coûte aujourd'hui trop cher aux petites communes.
Dans un premier temps, j'accompagnerai donc M. le rapporteur général dans sa réflexion. Si elle n'aboutit pas, je déposerai prochainement un nouvel amendement.
M. le président. L'amendement n° 22 est retiré.

Article 11