SEANCE DU 21 FEVRIER 2002
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ma question concerne EDF, dont le statut
d'entreprise publique est remis en cause par certains.
A en juger par le projet électoral de la droite, il ne fait aucun doute que
l'ouverture du capital de l'entreprise serait acquise si les forces libérales
revenaient au pouvoir.
Face à la volonté de Bruxelles d'accélérer la libéralisation du marché
intérieur européen de l'énergie, on aurait pu s'attendre,
a contrario
, à
ce que la gauche mette un frein à la déréglementation, en s'opposant à toute
ouverture du capital d'une entreprise de service public aussi performante
qu'EDF.
Hélas ! je constate à quel point les idées libérales sont prégnantes pour que,
sur cette question, une certaine confusion règne à gauche !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Strauss-Kahn !
Mme Odette Terrade.
Or c'est précisément grâce au statut public, assis sur une vision à long
terme, qu'EDF a permis à la France d'accéder à l'indépendance énergétique.
M. Hilaire Flandre.
Dont acte !
Mme Odette Terrade.
Aux performances techniques, incontestables aujourd'hui, s'est ajouté le rôle
fondamental que cette entreprise a joué en matière d'aménagement du territoire,
d'électrification des zones rurales, d'obligation de desserte, ou encore de
péréquation tarifaire.
Ceux qui croient nécessaire un large transfert des droits de propriété aux
intérêts privés parce que « le libéralisme serait le retour à l'économie qui
fonctionne » n'ont pas tiré les leçons des dysfonctionnements du marché à
l'heure où l'on parle, pourtant, de renationaliser le secteur énergétique
californien ou le chemin de fer anglais !
Ne nous leurrons pas, l'ouverture du capital d'EDF, même partielle et
minoritaire, compromettra inconstestablement l'accomplissement de ses missions
de service public.
Les pressions qu'exercent le libéralisme, les actionnaires, sur les choix
économiques des entreprises ne laisseront guère à l'Etat la possibilité
d'orienter le développement de la politique énergétique à long terme.
Le risque existe que les secteurs rentables d'EDF ne soient livrés au secteur
privé, comme le laisse présager la réorganisation actuelle d'EDF visant à faire
émerger des centres de profits !
Une question aussi importante que celle de la privatisation partielle d'EDF
exige l'organisation d'un large débat public.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous dire si l'ouverture du
capital d'EDF est, pour le Gouvernement, une hypothèse envisagée ou si, au
contraire, des engagements fermes seront pris à la fois pour éviter une
privatisation partielle et pour mettre un frein à la déréglementation du marché
énergétique européen qui l'accompagne ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Je serai extrêmement clair avec vous,
mesdames, messieurs les sénateurs : EDF est une entreprise publique performante
- c'est le premier électricien mondial - une entreprise publique qui fonctionne
bien.
M. Gérard Larcher.
Très bien !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Dès lors, pourquoi vouloir changer le statut
d'entreprise publique d'EDF ? C'est clair, ce n'est pas envisagé par le
Gouvernement, et je suis prêt à mettre les points sur les « i » pour vous
rassurer, madame la sénatrice, ainsi que votre groupe, comme pour rassurer
d'autres groupes : je pense au groupe socialiste du Sénat.
En effet, nous sommes tout à fait hostile à ce qu'a pu dire M. Sarkozy voilà
quelques jours lorsqu'il a évoqué non seulement l'ouverture du capital d'EDF,
mais la privatisation de l'entreprise.
(Vives protestations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. Jean-Pierre Raffarin.
Sarkozy, Fabius, c'est la France d'en haut !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement dit non à cette perspective, comme il
tient à réaffirmer ici le caractère imprescriptible et très important des
missions de service public d'EDF destinées, en particulier depuis la loi de
février 2000, au service des plus démunis et de ceux pour qui la fourniture
d'électricité doit être considérée comme un bien normal accessible à tous.
Le Gouvernement profite de votre question pour rappeler que le statut du
personnel d'EDF ne doit pas non plus évoluer : le statut des IEG, les
industries électriques et gazières, doit être garanti, c'est clair et net !
C'est, depuis cinq ans, la politique constante du gouvernement de Lionel
Jospin.
M. Pierre Hérisson.
Hélas !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Pourquoi voulez-vous que nous en changions ?
En tout état de cause, je redis ici qu'il n'est nullement question d'une
privatisation de cette entreprise.
M. Dominique Braye.
C'est votre gouvernement qui a le plus privatisé !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Nous sommes, ainsi que l'ensemble des Français - de
toutes opinions, d'ailleurs : vous devriez être plus prudents, messieurs de la
majorité sénatoriale ! - attachés aux missions de service public dévolues à
EDF. Ce formidable outil de compétitivité que représente EDF pour les
entreprises françaises et pour les particuliers, ce formidable outil de
compétitivité que représente le parc nucléaire d'EDF...
M. Dominique Braye.
C'est bien de le reconnaître ! Merci au général de Gaulle !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... revêt des enjeux de puissance publique qui ne
peuvent être abandonnés aux marchés financiers.
(Applaudissements sur les
travées socialistes.)
Voilà la réalité, voilà notre politique. Elle est ferme dans sa clarté, elle
est décidée dans son horizon : EDF est une magnifique entreprise publique.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
BILAN DE L'ALLOCATION PERSONNALISÉE D'AUTONOMIE