SEANCE DU 13 DECEMBRE 2001
M. le président.
La parole est à M. Masseret.
M. Jean-Pierre Masseret.
Ma question s'adresse à M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à
l'industrie.
Dans ce pays, quand quelque chose ne va pas, même les libéraux se tournent
vers l'Etat. On observe fréquemment des exemples de cette attitude ici même,
dans cet hémicycle !
Pourquoi en est-il ainsi ? Parce que la gestion libérale de l'économie de
marché ne correspond pas aux aspirations de ce pays, au génie propre de la
France, où l'on recherche plutôt la cohésion sociale.
(Murmures sur les
travées du RPR.)
Or l'Etat employeur prend toujours ses responsabilités !
M. Alain Gournac.
Les 35 heures !
M. Jean-Pierre Masseret.
De plus, il vient souvent à la rescousse, dans des conditions difficiles, en
cas de défaillance de l'initiative et de l'entreprise privées.
(M. Gournac
s'exclame.)
M. Dominique Braye.
Et l'Europe, qu'est-ce que c'est ?
M. Jean-Pierre Masseret.
Maints exemples le démontrent. A cet égard, je voudrais évoquer celui,
emblématique, de l'entreprise Bata, en Moselle.
Cette entreprise constitue un exemple emblématique, s'il en est, de la gestion
libérale, car on y exploite pendant des décennies des hommes et des femmes qui
perçoivent à peine le SMIC au bout de trente ans d'activité.
(M. Chérioux
proteste.)
Venez avec moi chez Bata, monsieur Chérioux ! Vous verrez que, au bout de
trente ans d'activité, les salariés n'y perçoivent pas 6 500 francs nets par
mois, je vous le garantis !
(Brouhaha sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye.
C'est faux !
M. le président.
Messieurs, je vous en prie ! Le sujet est grave !
M. Jean-Pierre Masseret.
Et puis, quand cela ne va plus, circulez ! Il n'y a plus rien à voir ! On met
les gens à la rue !
Monsieur le secrétaire d'Etat, devant le désespoir de ces travailleurs et
étant donné que le plan social élaboré par Bata est insuffisant, que peut faire
le Gouvernement pour rappeler à cette entreprise...
M. Dominique Braye.
Arrêtez les violons !
M. Jean-Pierre Masseret.
... les obligations légales qui s'imposent à elle,...
M. Dominique Braye.
C'est n'importe quoi !
M. Jean-Pierre Masseret.
... pour soutenir les salariés qui réclament simplement le respect de leur
dignité,...
M. Dominique Braye.
La démagogie, ça suffit !
M. Jean-Pierre Masseret.
... Après trente ou quarante ans d'activité ?
Quelles initiatives comptez-vous prendre pour faciliter la réindustrialisation
de ce secteur ?
M. Dominique Braye.
Démago !
M. Jean-Pierre Masseret.
Vous me traitez de « démago », monsieur Braye ? Mais venez en Moselle,
monsieur ! Vous verrez !
M. le président.
Pas de dialogue, mes chers collègues !
M. Jean-Pierre Masseret.
Mais il m'interrompt, monsieur le président ! J'ai bien le droit de répondre
aux invectives...
M. le président.
Non, monsieur Masseret, adressez-vous à M. le secrétaire d'Etat !
M. Jean-Pierre Masseret.
... des plus libéraux d'entre nous, qui réclament pourtant toujours plus de
gendarmes, plus d'instituteurs, plus d'écoles, plus de routes !
(Bravo ! et
applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, en termes de réindustrialisation,...
M. Dominique Braye.
Démago !
M. Jean-Pierre Raffarin.
Il était au gouvernement ! C'est un ancien ministre !
M. Jean-Pierre Masseret.
... quelles décisions pouvez-vous prendre pour soutenir les collectivités
territoriales, départements et régions, qui se sont engagées à faire quelque
chose ?
M. Dominique Braye.
Arrêtez ! Démago !
M. Jean-Pierre Masseret.
Ces collectivités territoriales ont perçu pendant des années les impôts
engendrés par l'activité économique, il est donc normal qu'elles soient
sollicitées pour assurer la réindustrialisation.
(Très bien ! et
applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat à l'industrie.
Monsieur Masseret, en 1994, en effet,
Bata n'a pas su élaborer à temps une véritable stratégie d'avenir. Depuis cette
époque, qui remonte à presque dix ans, les plans sociaux, les déficits et les
licenciements se succèdent.
Le bilan a été déposé en juillet et, comme vous le savez, les services de
l'Etat dans votre région se sont tous mobilisés, sans exception, pour éviter la
liquidation. J'ai reçu personnellement les représentants des salariés au
ministère, à Bercy, à l'occasion d'une réunion de travail longue, fructueuse et
sérieuse. Au-delà de cette concertation et de cette écoute des salariés, qui
font partie de la méthode fondamentale du Gouvernement, j'ai dû rappeler, très
fermement, hélas ! à la direction de Bata ses responsabilités à l'égard des
salariés, dont vous avez décrit la situation, et de la région de Moussey, où
l'entreprise était présente depuis 1930.
J'ai demandé au président-directeur général de Bata SA, M. Dupont, d'engager
sans tarder des négociations en vue de la conclusion d'un véritable plan
social, de la définition de mesures effectives, adéquates et réelles de
reclassement
(Exclamations sur les travées du RPR)
et de l'instauration
d'un dispositif de réindustrialisation, auquel l'entreprise doit participer
sans réticences, parce qu'elle est responsable vis-à-vis des territoires où
sont implantés ses établissements.
M. Christian Demuynck.
Ça, c'est sûr !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
Nous ne parviendrons à une solution viable qu'à la
condition d'associer au processus l'ensemble des acteurs : l'entreprise, les
salariés, les collectivités locales et les pouvoirs publics. Bien évidemment,
l'Etat apportera alors largement sa contribution. C'est ainsi que, le mois
dernier, j'ai nommé une mission spécifique...
M. Dominique Braye.
Encore une mission !
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... présidée par Mme Imbert-Mulas et placée sous le
signe de la transparence et de la concertation. Elle devra coordonner les
efforts, ...
M. Dominique Braye.
Quels efforts ?
M. Christian Pierret,
secrétaire d'Etat.
... en particulier en matière de réindustrialisation
et de recréation d'emplois en nombre suffisant sur le site et dans la région,
associer les partenaires sociaux à sa démarche et veiller à l'examen précis et
humain de la situation individuelle de chacun des travailleurs, car il faut à
chaque fois trouver une solution.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
Plusieurs sénateurs du RPR.
Baratin !
RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL
DANS LA FONCTION PUBLIQUE