SEANCE DU 3 DECEMBRE 2001


M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'équipement, les transports et le logement : V. - Tourisme.
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le secrétaire d'Etat au tourisme, la commission des finances et l'ensemble des sénateurs, et des sénatrices, sont heureux de vous souhaiter la bienvenue au Sénat.
Nous vous connaissons et nous savons que vous mettrez autant de dévouement et de détermination en faveur d'une bonne politique du tourisme que vous en avez manifesté pour défendre les populations d'Ile-de-France, les finances communales et une politique de progrès au Parlement.
Nous voudrions également saluer, pour son travail, notre amie Michèle Demessine qui, avec esprit conquérant et même enthousiasme, a contribué à faire de notre tourisme le premier du monde. Michèle Demessine retrouve sa place ici. Nous lui souhaitons également un bon retour parmi nous.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne voudrais pas consacrer le temps qui m'est imparti à un simple résumé oral d'un rapport écrit dont tous ceux qui le souhaitent peuvent prendre connaissance. Permettez-moi plutôt de vous alerter et de vous interroger sur quelques sujets qui sont également susceptibles de vous fournir l'occasion de préciser vos crédits pour 2002 et de nous éclairer sur les positions du Gouvernement.
Ma première question est simple. L'année 2001 a été, sur les huit premiers mois, tout au moins, une bonne année pour le tourisme en France, la maintenant toujours, et de très loin, au rang de première nation destinataire mondiale.
Les récents événements internationaux ont une influence sur le tourisme. C'est un constat.
Dans le monde, tout d'abord, avant septembre, la baisse de l'activité était de 3 % à 4 %. Une prévision supplémentaire de baisse de 2 % est envisagée. Confirmez-vous cette analyse, monsieur le secrétaire d'Etat ? Pouvez-vous nous expliquer pourquoi la France, qui n'a pas connu le premier choc, connaîtra le second ?
La commission des finances estime que cette nouvelle baisse sera comprise entre 5 % et 10 %, surtout en raison des liaisons entre la France et les Etats-Unis. Le taux de remplissage du Concorde, qui vient d'être remis en service, est là pour nous le démontrer, lui qui est aujourd'hui compris entre 20 % et 30 %.
Nous sommes étonnés du refus de la Commission européenne de prendre des mesures immédiates et spécifiques pour aider les pays européens à résister à la baisse d'activité.
La Commission européenne travaille, dit-elle, en faveur d'une reprise d'activité pour le second semestre de 2002. Nous nous en félicitons, mais cette action ne passe-t-elle pas par des initiatives et des mesures immédiates ? A défaut, si de telles mesures ne sont pas prises rapidement, on peut s'attendre au déclenchement de licenciements au début de l'année 2002.
Pour l'instant, ce sont les offres d'emplois qui diminuent. C'est donc maintenant qu'il faut intervenir pour que la phase des licenciements ne s'inscrive pas dans la suite logique de la baisse des offres. Nous constatons une situation de récession dans les agences de voyages, chez les tour-opérateurs et les autocaristes. Nous assistons également à des rapprochements qui risquent d'entraîner des restructurations et des rachats, dont on sait, par expérience, qu'ils se traduisent trop souvent par un recul de l'emploi.
Nous préférons les mesures prises par le Gouvernement et annoncées par le Premier ministre, le 17 octobre, lors d'un discours de clôture prononcé devant l'assemblée générale du Conseil national du tourisme.
Les entreprises touchées par une baisse d'activité pourront déposer des dossiers auprès des services de l'Etat pour un examen bienveillant, notamment pour ceux qui illustreront des cas de difficultés financières immédiates.
Un crédit supplémentaire de 30 millions de francs a été alloué à Maison de la France, dont on connaît les potentialités pour inciter les touristes étrangers à venir plus nombreux dans notre pays.
Ne faut-il pas également constituer un observatoire pour se donner les moyens de maîtriser les évolutions de l'emploi en matière de tourisme ? Des actions en amont permettraient d'intervenir rapidement et de ne pas laisser se dégrader la situation quelle qu'elle soit.
Ma deuxième question porte sur le fait que, malgré les nombreuses mesures prises en faveur du secteur du tourisme social, 40 % de nos compatriotes ne partent toujours pas en vacances. Les jeunes sont particulièrement concernés.
Cette année, l'assemblée générale du Conseil national du tourisme, à laquelle vous participiez, monsieur le secrétaire d'Etat, a consacré une partie de ses travaux à ce problème. Le débat a été très riche, mais l'attente est grande.
Les crédits du secrétariat d'Etat au tourisme ont permis, ces trois dernières années, quelques avancées.
Depuis 1999, il existe une coordination. Cette année, le soutien prévu sera en augmentation de 12 %, soit 2,8 millions d'euros, contre 2,5 millions d'euros en 2001.
Le budget de la bourse solidarité vacances devrait permettre à 20 000 personnes de partir en vacances.
Les aides à la personne sont complétées par une aide à un programme de consolidation des équipements de tourisme social qui prendra le relais du plan « patrimoine ».
Une mesure nouvelle et extrêmement positive élargit le bénéfice des chèques-vacances aux salariés des PME-PMI, donc de moins de cinquante salariés. Elle peut se révéler très efficace pour gommer une discrimination désormais inadaptée à une pratique sociale. Ne pensez-vous pas qu'il faille aller plus vite et plus fort pour favoriser un nouveau recul du non-respect du droit aux vacances ?
Ma troisième question portera sur la nécessité de mieux répartir les touristes sur l'ensemble du territoire puisque, à l'heure actuelle, 80 % des activités sont concentrées sur 20 % du territoire.
Cette inégalité, cette inefficacité sont à corriger.
La diversification des aides n'est-elle pas la première série de mesures à prendre ? Tourisme littoral, tourisme rural, tourisme de montagne, mais aussi tourisme culturel, thermal, fluvial, sportif, tourisme d'affaires doivent faire l'objet de crédits, mais à partir d'analyses spécifiques.
Le contrat de plan 2001-2006 prévoit 203 millions d'euros, soit quatre fois plus que les 52 millions d'euros du contrat de plan précédent. Il s'agit d'une décision très positive, tout comme le sont les thèmes, par ailleurs intéressants et innovants, concernant la qualité des hébergements touristiques, la mise en valeur du patrimoine culturel et national, l'observatoire des régions et l'adaptation des entreprises au marché.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ne faudrait-il pas de nouveaux textes pour aider davantage ces villes et ces villages de la France profonde qui attendent des appuis plus concrets ?
Je voudrais également vous interroger sur les suites que vous entendez donner à la mise en place du programme adopté à la suite du rapport Le Pors consacré à la situation des travailleurs saisonniers du tourisme.
Sur la question du logement, je crois que nous avons avancé, mais il en reste bien d'autres, qui concernent tous les droits des salariés ; je pense à la pérennisation des contrats de travail, à la représentation des personnels, à l'accès à la médecine, à la formation et à l'information.
Le budget qui nous est soumis est-il assez audacieux en la matière ?
Je voudrais, pour conclure, faire une observation au nom de la commission des finances à propos du retard pris dans la consommation des crédits, quand il n'y a pas absence totale de consommation.
Pour les dépenses ordinaires, le taux de consommation est de 83,70 % en 2000, contre 94,99 % en 1999.
Pour les dépenses en capital, plus difficiles à apprécier, le taux est nettement inférieur encore.
Le budget que vous nous proposez, monsieur le secrétaire d'Etat, peut se révéler efficace, à condition que nous surmontions les conséquences des événements internationaux qui affectent la venue des touristes étrangers.
Il doit se montrer encore plus efficace pour permettre de franchir le seuil de 40 % que je citais tout à l'heure, afin que tous nos compatriotes, les jeunes surtout, puissent réellement jouir du droit aux vacances.
Comme les années précédentes, la commission des finances du Sénat, rejetant les crédits de votre département ministériel de tutelle, le ministère de l'équipement des transports et du logement, n'a pas adopté vos crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis. M. Charles Ginésy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi tout d'abord d'avoir une pensée cordiale pour votre prédécesseur, Mme Demessine, et de vous souhaiter, au nom de la commission des affaires économiques, la bienvenue.
L'examen attentif du budget du tourisme permet d'en retirer quelques motifs de satisfaction.
Je salue ainsi bien volontiers le succès de nombre de vos actions qui s'inscrivent dans la mise en oeuvre du droit aux vacances pour tous.
Parmi les réalisations, il faut citer le succès toujours aussi grand du groupement d'intérêt public Bourse solidarité vacances, qui a permis, en 2001, de collecter près de 20 000 offres de séjour en faveur de populations très défavorisées.
Il faut également se féliciter du lancement, en mai dernier, du label « Tourisme et handicap ». L'intérêt de cette opération résulte du partenariat effectif entre les associations représentant les personnes handicapées et les professionnels du tourisme.
Il faut encore souligner l'effet très positif du programme de consolidation de l'équipement du tourisme social, arrêté par le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire du 9 juillet 2001, qui succède au programme de rénovation du parc immobilier du tourisme social mené de 1990 à 2001. Ce nouveau programme devrait permettre la rénovation de trois cent cinquante établissements pour un montant total de 182,93 millions d'euros, mais les crédits de paiement pour 2002 ne s'élèvent qu'à 2,15 millions d'euros, ce qui peut paraître faible.
A propos d'aménagement du territoire, je relève avec satisfaction que le cadre réglementaire pour la rénovation de l'immobilier de tourisme est enfin achevé. Des opérations pilotes vont être menées par le secrétariat d'Etat au tourisme, la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale - DATAR -, et la Caisse des dépôts et consignations, sur une dizaine de sites en 2001.
Enfin, il convient de se féliciter de la décision du Gouvernement de proroger jusqu'en 2004 l'aide fiscale à l'investissement en faveur des résidences de tourisme situées en milieu rural.
Mais, au-delà de ces points positifs, qu'il convenait de relever, la commission des affaires économiques s'est montrée très inquiète de l'absence de réponse structurée et globale, pourtant indispensable pour renforcer voire développer notre offre touristique.
En effet, malgré les résultats très flatteurs de l'activité touristique en France, quelques chiffres et certaines évolutions témoignent d'une relative fragilité de la croissance de ce secteur, fragilité qu'il convient de ne pas perdre de vue à l'heure où la concurrence internationale s'amplifie avec un succès certain.
Ainsi, en termes de recettes, la France se classe toujours en troisième position derrière les Etats-Unis et l'Espagne.
En 2000, et contrairement à ce qui a été constaté en 1999, la croissance du nombre de séjours effectués en France est presque deux fois inférieure à celle qui est enregistrée au niveau mondial ou européen.
Enfin, la vague d'attentats du 11 septembre dernier a et aura un effet certain sur l'activité touristique, effet dont il faut tenir compte pour proposer des mesures compensatoires éventuelles.
Il est à craindre que les seules mesures ponctuelles annoncées par le Gouvernement ne suffisent pas à éviter des licenciements, notamment dans le secteur des agences de voyage.
Face à cela, la réponse des pouvoirs publics manque de pespectives à moyen terme.
Ainsi, les crédits de l'Agence française de l'ingénierie touristique sont simplement reconduits par rapport à 2001, ce qui bride le développement de cet organisme. C'est regrettable, car les élus et les acteurs de terrain ressentent le besoin de son assistance et de ses conseils.
En ce qui concerne la promotion de la France à l'étranger, il faut, certes, se féliciter de l'important effort de réorganisation mené par le GIE Maison de la France, notamment dans l'emploi des nouvelles technologies, mais les crédits budgétaires sont simplement reconduits et il n'y a pas de réflexion prospective sur la recherche de nouveaux partenariats ou la mise en place de conventions pluriannuelles permettant de définir des objectifs de développement à moyen terme.
En outre, sur la mise en oeuvre du volet « tourisme » des contrats de plan, les dotations budgétaires sont, sur les trois années écoulées, largement inférieures aux montants annuels qui permettraient de respecter les engagements de l'Etat.
Plus généralement, et c'est ce qui a retenu toute l'attention de la commission des affaires économiques, monsieur le secrétaire d'Etat, on ne peut qu'être très réservé sur les conditions de mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans le secteur de l'hôtellerie.
Le refus unanime de l'interprofession, en juillet 2001 puis en octobre dernier, de l'extension de l'accord conclu en juin 2001 entre seulement deux organisations professionnelles et deux syndicats illustre la très grande difficulté à mettre en place un mécanisme concerté de réduction du temps de travail.
Cet accord est rejeté pour ce qu'il méconnaît la fragilité économique de la petite et moyenne hôtellerie. L'ensemble de la profession considère comme impossible d'imposer, étalée sur quatre ou cinq ans, une réduction de huit heures du temps de travail hebdomadaire. En outre, elle est très réservée sur la réalité des engagements pris par le Gouvernement pour accompagner la réduction du temps de travail en cas d'extension de l'accord.
Comme l'ont souligné mes collègues, la mise en place « à marche forcée » de la réduction du temps de travail risque de désorganiser, à moyen terme, le secteur de l'hôtellerie et de la restauration, et donc l'offre touristique, qui ne pourra plus répondre correctement à la croissance attendue de la demande. On aurait pu ainsi imaginer qu'un plan global de formation accompagne une démarche adaptée de réduction du temps de travail.
Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d'Etat, la commission des affaires économiques a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés au budget du tourisme dans le projet de loi de finances pour 2002.
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 15 minutes ;
Groupe socialiste, 13 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 8 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 6 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Dubrule.
M. Paul Dubrule. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, deux lectures sont possibles du budget du tourisme. La première est de considérer ce budget comme ridiculement faible, avec moins de 0,5 milliard de francs, soit 0,03 % du budget de l'Etat. La seconde lecture est de tenir ce budget pour exemplaire : avec moins de 0,5 milliard de francs, il rapporte en effet à la France près de 100 milliards de francs de balance positive. C'est énorme ! Le secteur du tourisme, avec ces 100 milliards de francs, rapporte plus que l'agroalimentaire - 50 milliards de francs - ou l'automobile - 61 milliards de francs.
Mais revenons à ce « petit » budget.
Si l'on voulait s'accrocher aux chiffres, je ferais constater que ce budget est officiellement en augmentation de 2,3 % par rapport à l'an dernier ; mais il est en fait en diminution de 0,5 % par rapport à la loi de finances pour 2001, si l'on prend en compte des crédits non reconductibles de cette dernière année. Comme le souligne fort justement le rapporteur spécial Mme Beaudeau : « Convenons que dans le contexte qui s'annonce difficile pour le tourisme, aujourd'hui et à moyen terme, cette baisse apparaît préoccupante. » J'ajouterai que si un petit budget efficace me convient fort bien, sa modestie doit avoir pour corollaire la capacité de faire un effort substantiel en cas d'événement majeur comme celui dont nous vivons les conséquences depuis le 11 septembre. Dès lors, 150 millions, voire 200 millions de francs supplémentaires pour sauver 100 milliards de francs seraient un investissement pertinent, et non pas les 30 millions de francs dont il est question et dont je reparlerai.
Mais ce qui me semble préoccupant, c'est que ce budget est révélateur des dysfonctionnements et de l'inertie de l'Etat.
Tout d'abord, il faut noter la sophistication des textes, ou, pour le dire autrement, comment les bonnes intentions de politique sociale ont produit l'effet inverse de celui qui était recherché.
J'évoquerai à ce propos le cas des chèques-vacances. Malgré la mise en garde des parlementaires, le Gouvernement a tellement compliqué la réforme des conditions d'attribution des chèques-vacances que le résultat de cette année est probant : alors que 66,7 % des Français partaient en 1997, ils n'étaient que 65,1 % en 2000. On peut se demander s'il s'agit là de l'effet conjugué des 35 heures et de l'extension des chèques-vacances ! Compte tenu des résultats obtenus par un « émetteur à caractère public » détenant le monopole des émissions de chèques-vacances, on peut s'interroger aussi sur la pertinence du maintien de ce monopole.
Il faut ensuite souligner les effets d'annonce, qui sont souvent des hypothèques sur l'avenir. Il en est ainsi, toujours dans le domaine social, du nouveau programme de consolidation des hébergements du tourisme social, qui a pour ambition de rénover 350 établissements avant 2006, avec une participation de 180 millions de francs du secrétariat d'Etat. En réalité, seulement 14 millions de francs sont inscrits cette année, ce qui laisse à une autre législature le soin de répartir les 166 millions de francs manquants sur quatre ans, soit 41,5 millions de francs en moyenne par année.
Les 30 millions de francs annoncés par le Premier ministre pour relancer le tourisme ne figurent pas dans ce budget. Il faut souhaiter que ces crédits ne résultent pas d'un redéploiement des moyens de Maison de la France, qui devrait alors renoncer de nouveau à des opérations déjà programmées et bien nécessaires.
Il faut également observer l'autosatisfaction qui se manifeste. La façade touristique est belle, mais l'intérieur nécessite des travaux d'urgence. Certes, nous sommes toujours le premier pays par le nombre de visiteurs accueillis, mais nous ne nous classons qu'au troisième rang au regard des recettes. Voilà dix ans, l'Espagne et l'Italie se situaient derrière nous ; aujourd'hui, l'Espagne nous a devancés, et l'Italie nous rattrape.
La progression du nombre de touristes étrangers, qui était de 4,3 % en 1999, a chuté à 3,5 % en 2000, alors même que l'effet du 11 septembre ne se faisait pas encore sentir. Ce n'est plus : « Nous sommes les meilleurs », mais : « Il y a urgence à corriger certains de nos défauts ! »
Je soulignerai par exemple la carence de l'Etat dans ses missions essentielles, comme la sécurité.
Le succès du tourisme, c'est aussi l'addition de détails, de sensations et de réputation. Dans ce domaine, nous sommes sur la mauvaise pente. Des touristes qui se sentent en insécurité ; des pays concurrents qui se servent de cet argument pour mettre en garde les voyageurs contre l'insécurité en France, en s'appuyant sur des chiffres fournis par leurs ambassades et consulats : c'est un lent et pernicieux travail de sape qui fera sentir ses effets quand il sera trop tard.
C'est maintenant qu'il faut réagir, et c'est à l'Etat de le faire. Comme l'a écrit justement un journaliste dans un quotidien économique, Les Echos, « on éprouve de la honte d'apprendre qu'à leur arrivée les touristes japonais en France reçoivent désormais de leur ambassade un dépliant pour les mettre en garde, les femmes en particulier, contre les multiples agressions, escroqueries, larcins, vols à la tire, filouteries en tout genre auxquels ils sont exposés. En 2000, les délits dont ils ont fait l'objet ont augmenté de 65 % ».
La carence de l'Etat dans son rôle de patron et de fournisseur se traduit par l'absence de résultats des négociations, voire l'absence de négociations. Ainsi, l'Etat « fournisseur de sites à visiter » est défaillant. Le contrat n'a pas été rempli pour des millions de touristes qui n'ont pu accéder, pendant quasiment un mois, au Louvre, à Versailles, à Orsay, au centre Pompidou, aux tours de La Rochelle, à de nombreux sites en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, tels Glanum, près d'Arles, et Le Thoronet, dans le Var, bien que ces mêmes touristes aient acquitté avant leur arrivée dans notre pays leurs forfaits de voyage « clé en main » et qu'ils aient maintenu leur séjour malgré la psychose des attentats.
L'Etat pourra investir dans des campagnes coûteuses pour tenter d'effacer des milliers de témoignages d'étrangers qui ont raconté comment une poignée de personnes - à peine 19 sur 1 800 -, au Louvre, le 24 octobre dernier, ont gâché leur séjour.
L'Etat est encore défaillant quand, pour les mêmes raisons de mauvais dialogue social ou d'obscures manoeuvres politico-syndicales incompréhensibles pour des étrangers, les touristes sont privés des moyens de se déplacer librement dans notre pays. On peut investir pour construire et promouvoir des TGV et des avions performants, si toutes ces merveilles sont inutilisables dès qu'un week-end prolongé ou un départ en vacances arrive !
La carence de l'Etat en matière de formation est, me semble-t-il, la plus grave. En effet, elle hypothèque l'avenir de la profession et prive les jeunes d'un accès à une profession qui est un véritable escalier social. Deux BTS en tourisme ont été créés mais les formations supérieures n'ont pas été réadaptées à l'évolution. Ces formations sont « noyées » dans l'énorme budget de l'éducation nationale sans que l'on puisse les évaluer clairement.
Ce déficit de formation a une incidence importante sur les difficultés d'application des 35 heures, qui sont, pour de nombreuses entreprises hôtelières à caractère familial, la complication de trop qui va les contraindre à jeter l'éponge. Le refus de la profession d'instaurer les 35 heures est l'illustration de la grande difficulté que l'on éprouve à mettre en place la réduction du temps de travail « à marche forcée » et sans concertation préalable.
Ensuite, l'Etat se dérobe devant les sujets qui fâchent, comme l'harmonisation des taux de TVA dans la restauration traditionnelle. Il maintient une TVA injuste en s'abritant derrière l'Europe, alors même que c'est en comparaison avec nos partenaires européens que se font les distorsions de concurrence ! C'est un manque de volonté.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous l'aurez compris, plus qu'un budget, plus que des chiffres à aligner, le tourisme relève d'un état d'esprit, et le secrétaire d'Etat au tourisme doit être un véritable coordonnateur interministériel. C'est pourquoi mes critiques ne sont pas destinées à notre collègue Mme Demessine, qui a occupé cette fonction brillamment et avec compétence. La seule divergence que j'aie eue avec elle avait porté sur la réduction du temps de travail, mais elle n'a pas obtenu, malgré son engagement et son talent, la réduction de la TVA sur la restauration.
Si la France envisage d'accueillir deux fois plus de touristes d'ici à vingt ans, si nous voulons rester les premiers dans ce domaine, nous devons aujourd'hui développer une politique ambitieuse pour le tourisme en France. Cette politique doit avoir pour socle le développement durable, qui prend en compte à la fois la protection de l'environnement et le développement des ressources humaines, dont la formation est la clef ; sans oublier l'aménagement du territoire, la culture, les transports, la fiscalité. Sur chacun de ces points, le secrétaire d'Etat au tourisme doit peser de tout son poids, et ce n'est pas parce que le budget de votre département est petit que le Gouvernement ne doit pas vous écouter. La démarche suivie n'est pas satisfaisante, et c'est pourquoi notre groupe votera contre les crédits proposés pour ce budget. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Biwer.
M. Claude Biwer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les tragiques événements du 11 septembre 2001 ne manqueront sans doute pas d'avoir des répercussions défavorables sur l'industrie touristique de notre pays.
Je ne suis pas certain que, compte tenu de sa grande faiblesse, le budget que vous nous présentez, monsieur le secrétaire d'Etat, soit en mesure de faire face aux conséquences, hélas ! tout à fait prévisibles, de ces événements : d'ores et déjà, l'on constate une importante baisse de l'activité des transporteurs aériens, des voyagistes, des hôteliers. Rappelons qu'en 2000 ce secteur contribuait pour 92 milliards de francs à l'excédent de notre balance des paiements.
Permettez-moi en tout premier lieu, monsieur le secrétaire d'Etat, de vous interroger sur les suites que vous comptez réserver au rapport présenté par notre collègue Marie-Claude Beaudeau, relatif au fonctionnement de Maison de la France. Il apparaît notamment que celle-ci est très largement sous-dotée, comparée aux structures similaires existant dans les pays concurrents.
Par ailleurs, je souhaiterais attirer votre attention sur un certain nombre de sujets qui me préoccupent, notamment les chèques-vacances, les emplois-jeunes et les 35 heures, ainsi que sur l'aspect touristique tel que le connaît mon département.
En ce qui concerne les chèques-vacances, le Gouvernement a fait adopter un texte qui visait à étendre ce dispositif aux salariés des PME. Le Sénat avait, de son côté, marqué sa préférence pour la généralisation des systèmes à l'ensemble des salariés.
Or le conseil d'administration de l'Agence nationale pour les chèques-vacances, tirant les enseignements d'une année d'application de cette réforme, a, en quelque sorte, tiré la sonnette d'alarme :
« Vis-à-vis de la clientèle ciblée, la loi paraît trop limitative et complexe. Pour les entreprises de moins de cinquante salariés, ce sont plus de 50 % des salariés qui n'ont pu bénéficier du chèque-vacances.
« L'effet d'éviction est important : dans les entreprises de plus de cinquante salariés, 20 % de ceux qui en bénéficiaient en ont été exclus, notamment les foyers avec enfants et les foyers monoparentaux. »
Voilà une réforme, monsieur le secrétaire d'Etat, dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'a pas véritablement répondu à l'attente des salariés. Dans la vie, chacun doit savoir reconnaître ses erreurs, et le Gouvernement serait bien inspiré de nous présenter dans les meilleurs délais un projet de loi visant à « réformer la réforme », de manière que le plus grand nombre possible de salariés puisse bénéficier de ces avantages.
J'évoquerai maintenant les emplois-jeunes et les 35 heures.
Les associations et les collectivités qui ont engagé des emplois-jeunes dans le secteur touristique sont dans une grave incertitude quant à la pérennité du financement de ces postes pour les années à venir, le caractère souvent insuffisamment formateur et trop peu qualifiant de ces contrats les rendant, malheureusement, précaires.
Les entreprises de l'industrie touristique ont, de leur côté, créé jusqu'à 30 000 emplois nouveaux par an au cours des dernières années, grâce à la reprise économique ; des créations massives d'emplois se sont également produites dans de nombreux autres secteurs du privé.
Le caractère très particulier des entreprises à vocation touristique aurait dû conduire le Gouvernement à dégager des moyens, non pas pour financer de nouveaux emplois publics, mais pour soutenir ces entreprises, seules à même de créer de véritables emplois durables.
J'ajoute que l'application des 35 heures pose déjà, en règle générale, de graves problèmes, notamment aux PME, mais, s'agissant du secteur touristique, elle risque de conduire certains établissements à fermer plusieurs jours dans la semaine ou, à tout le moins, à ne pas pouvoir fonctionner de façon optimale, ce qui, vous en conviendrez, n'est guère encourageant.
Or le marché n'est pas suffisamment porteur pour permettre des embauches supplémentaires. De plus, il ne faut pas perdre de vue que le touriste attache beaucoup d'importance au contact humain direct et continu avec les mêmes équipes, ce qui s'avère impossible avec les 35 heures.
S'agissant de la restauration traditionnelle, je souhaite moi aussi attirer votre attention sur les conséquences désastreuses du choix, fait par le Gouvernement, de ne pas baisser le taux de la TVA s'appliquant à ce secteur d'activité : outre les distorsions de concurrence que chacun s'accorde à reconnaître, ce choix a pour effet de décourager les restaurateurs d'investir et de créer des emplois, ce qui est fort regrettable.
Il m'apparaît donc urgent que le Gouvernement reconsidère ses positions sur la TVA, le taux réduit ne devant pas encourager les seules entreprises bas de gamme et la restauration rapide. Certains restaurateurs du milieu rural, dont la clientèle est peu dense, ont de plus en plus recours à l'achat de plats cuisinés, ce qui est dommageable, car la restauration traditionnelle se perd.
Le département de la Meuse dispose quant à lui de grandes ressources environnementales qu'il tente de mettre en valeur, telles les bases de loisirs de Madine et de Marville. Ces plans d'eau sont un complément utile à nos rivières dont la qualité contribue au plaisir de la pêche, dans un environnement généreux, où la nature garde tous ses droits. Promeneurs et chasseurs savent l'apprécier.
Le tourisme à vocation militaire, ce tourisme de mémoire dont on parle depuis un certain temps, doit pouvoir se développer dans les secteurs de Bar-le-Duc, de Montmédy et de Verdun, qui ont payé un lourd tribut dans les conflits du siècle dernier. En particulier à Verdun, siège du centre mondial de la paix, une action politique volontariste exceptionnelle s'impose pour améliorer encore l'image d'exemplarité de cette ville tournée vers la réconciliation des peuples.
Notre secteur rural dispose par ailleurs de richesses archéologiques que les collectivités entretiennent à grands frais. Mais la multiplication des exigences administratives et architecturales, souvent sans contrepartie financière, décourage les élus les plus actifs et les plus dynamiques. Les normes d'hygiène et de sécurité qui se superposent imposent aux centres d'accueil, aux collectivités comme aux enteprises privées du secteur des activités de loisir des charges considérables souvent difficiles à supporter. Aussi m'apparaît-il utile de reconsidérer ces exigences qui perturbent tout esprit d'initiative.
Par ailleurs, il serait tout à fait souhaitable de rétablir la qualification de communes touristiques, à laquelle les villes de Bar-le-Duc, de Verdun et de Montmédy, comme d'autres, pourraient assurément prétendre. Cette qualification encouragerait les élus à redoubler d'efforts afin de développer des actions qualitatives mais elle devrait s'accompagner du versement aux communes d'une véritable dotation touristique, indépendante, si nécessaire, de la dotation globale de fonctionnement.
Telles sont, monsieur le secrétaire d'Etat, les observations que je voulais formuler à l'occasion de l'examen de votre projet de budget, lequel n'est malheureusement pas de nature à rassurer les professionnels d'un secteur d'activité pourtant dynamique mais très fragilisé par les événements.
M. le président. La parole est à Mme Didier.
Mme Evelyne Didier. Monsieur le président, mes chers collègues, je me permets de souhaiter, à mon tour, la bienvenue à M. le secrétaire d'Etat au tourisme, M. Jacques Brunhes, dans notre Haute Assemblée.
Il n'est pas possible d'examiner les crédits du secrétariat d'Etat au tourisme sans avoir présent à l'esprit le chemin accompli depuis le début de la présente législature : sous l'impulsion de mon amie Michelle Demessine, une action volontaire et décisive a permis de dégager les orientations d'une nouvelle politique du tourisme, porteuse d'avenir pour notre pays et ses habitants.
Avant tout, rappelons l'attractivité de notre pays, qui confirme sa place de première destination touristique au monde. L'industrie touristique représente actuellement 7 % du produit intérieur brut de la France et deux millions d'emplois, directs ou indirects. Ses perspectives d'évolution pour l'avenir sont très favorables.
Toutefois, un troisième rang mondial au niveau des recettes devrait nous conduire à tempérer notre optimisme. Nous avons encore des progrès à accomplir afin de retenir davantage les visiteurs, dont certains ne font que passer.
Les attentats et le naufrage de l' Erika doivent par ailleurs nous rappeler que nous vivons dans un monde fait d'incertitudes et que le rôle des pouvoirs publics est d'aider la filière touristique à faire face aux conséquences de ces événements dramatiques. C'est d'ailleurs ce qui a été fait, dans la mesure du possible, notamment après la marée noire et les tempêtes de 1999.
Par ailleurs, si le tourisme est une industrie, il est aussi un facteur essentiel de l'aménagement du territoire, car il s'appuie nécessairement sur les richesses environnementales et patrimoniales de notre pays. C'est la raison pour laquelle l'Etat devra respecter ses engagements dans le cadre des contrats de plan, engagements qui ont été multipliés par quatre dans les contrats 2000-2006.
A ces crédits, il faut ajouter ceux qui sont dévolus aux massifs montagneux et les fonds prévus par le dernier comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire, le CIADT, qui concernent la rénovation des hébergements de tourisme social.
Comme l'a très bien dit le rapporteur spécial de la commission des finances, Mme Marie-Claude Beaudeau, les vacances sont un droit fondamental qui doit être effectif pour tous. Pourtant, nous savons que quatre personnes sur dix ne partent pas en vacances. C'est pourquoi nous devons saluer l'inscription de ce droit fondamental dans la loi relative à la lutte contre les exclusions comme une avancée sociale déterminante.
Le soutien au tourisme social et associatif, ajouté à la modernisation des équipements touristiques à vocation sociale et familiale, la création du groupement d'intérêt public Bourse solidarité vacances, l'élargissement des conditions d'attribution des chèques-vacances - même si les nouvelles règles posent des problèmes qu'il faudra résoudre - la création du label « tourisme et handicap » sont autant de mesures importantes allant dans le bon sens.
Enfin, il n'est pas d'industrie digne de ce nom qui ne s'intéresse à ses salariés. Développement de la formation initiale et de la formation continue, embauches d'emplois-jeunes, actions en faveur de l'insertion, amélioration de la situation des travailleurs saisonniers du tourisme, tout cela contribue à une plus grande professionnalisation des personnels et à l'amélioration de leurs conditions de travail.
Nous savons cependant qu'il faut continuer à progresser, car il s'agit d'un domaine où des conditions de travail difficiles, des salaires souvent peu élevés et la précarité des emplois sont cause de sérieuses difficultés de recrutement.
Je terminerai mon propos en évoquant l'augmentation des moyens de l'administration centrale et le maintien des crédits consacrés à la capacité d'expertise publique. Quant aux moyens de promotion touristique, il semble que le groupement d'intérêt public Maison de France se trouve confronté à des choix stratégiques difficiles pour assurer la promotion de la destination France, dans un cadre budgétaire restreint qui ne lui permet pas d'assumer pleinement ses missions.
Pour conclure, au vu des éléments que j'ai relevés, et malgré les restrictions que j'ai avancées, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront les crédits du tourisme.
M. le président. La parole est à M. Besson.
M. Jean Besson. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mesdames, messieurs, permettez-moi, avant de présenter l'avis du groupe socialiste sur le projet de budget du tourisme, de rendre hommage au travail substantiel et à la pugnacité dont Mme Demessine, aujourd'hui à nouveau notre collègue, a fait preuve durant trois années, à la tête du secrétariat d'Etat au tourisme.
Je salue la politique volontariste que, sur le plan financier et en liaison étroite avec les régions et les pays, elle a su impulser, politique dont le présent projet de budget est encore fortement imprégné.
Pour la quatrième année consécutive, celui-ci est en augmentation, même si la hausse est moins marquée que les trois années précédentes : les moyens d'engagement, soit 80,9 millions d'euros, augmentent de 2,51 % par rapport à 2001, et les moyens de paiement, soit 73,9 millions d'euros, de 2,35 %.
Il faut rappeler qu'entre 1988 et 2002 la progression constatée des crédits de l'Etat aura été de 52,18 %, taux sans précédent. Une telle progression était cependant indispensable pour rattraper le retard accumulé du fait de l'abandon de ce secteur par les pouvoirs publics durant les années antérieures.
Même si des signes de stabilisation se font depuis peu sentir, il faut donc bien recadrer le poids de l'« industrie » touristique, sur le plan national comme sur le plan international.
Représentant 7 % du produit intérieur brut français, ce secteur économique concerne deux millions d'emplois directs et indirects. Plus de 215 000 entreprises, dont 94 % comptent moins de dix salariés, participent ainsi à l'excédent de la balance commerciale française. J'insiste sur le rôle économique et social qu'elles remplissent sur l'ensemble de notre territoire, par exemple en moyenne montagne et dans nos campagnes.
Chaque année, 75 millions de touristes étrangers sont accueillis dans l'hexagone, qui, contrairement à ce qu'a dit M. Dubrule, reste la première destination touristique internationale, devant les Etats-Unis et l'Espagne.
Cette énumération d'éléments chiffrés, peut-être un peu fastidieuse, démontre l'importance des enjeux et la nécessité pour l'Etat de soutenir cette branche d'activité : l'exigence de la qualité, l'accueil dans nos régions, l'anticipation, l'ouverture au plus grand nombre du droit aux vacances lui imposent d'accompagner les professionnels dans la promotion et la commercialisation du secteur pour préserver cette place internationale de tout premier rang.
Je développerai mon intervention autour de trois thèmes.
Le projet de budget pour 2002 maintient d'importants moyens d'intervention pour accompagner les régions et les collectivités locales à travers les contrats de plan Etat-région, qui jouent un rôle déterminant quant à la diversification et à l'adaptation de l'offre touristique, et donc quant à la qualité de l'accueil et à son authenticité.
Plus de 200 millions d'euros, dont 19 millions d'euros au titre de la loi de finances pour 2002, soit une dotation égale à celle de 2001, y sont consacrés.
Je me fais là l'écho de notre collègue Bernard Dussaut, qui n'a pu être présent ce matin et m'a demandé d'insister sur l'importance de l'apport du tourisme à la politique d'aménagement du territoire.
Le développement touristique local est en effet créateur de dynamiques économiques et d'emplois. Il serait donc souhaitable d'encourager une meilleure répartition des flux touristiques, car, aujourd'hui, 80 % de la clientèle se concentrent sur 20 % seulement du territoire !
Le renforcement de l'attractivité des zones rurales, grâce, notamment, à l'optimisation de l'échelle intercommunale, constitue donc une priorité pour favoriser une économie touristique durable et améliorer l'organisation de l'offre. Les pays d'accueil touristiques expérimentent ainsi sur le terrain, depuis de nombreuses années, des partenariats à l'échelle de territoires intercommunaux rassemblant élus, professionnels du tourisme et acteurs du monde associatif autour d'un projet.
Bernard Dussaut souhaitait intervenir en faveur de ces pays d'accueil touristiques, qui constituent les outils les mieux à même d'accompagner le développement des potentialités touristiques de nos régions.
Le présent projet de budget traduit par ailleurs la forte volonté de promouvoir un droit aux vacances pour tous, alors que 40 % de la population française ne part pas en congés. Comme notre collègue du groupe communiste républicain et citoyen, j'estime que cette exclusion est intolérable.
Conscientes de cette situation, les associations du tourisme social et associatif se sont regroupées au sein d'une coordination nationale, à laquelle le projet de budget du tourisme prévoit de consacrer 2,8 millions d'euros en 2002, soit une hausse de 12 % par rapport à 2001.
Ces crédits sont destinés à confirmer la mission du groupement d'intérêt public « Bourses solidarité vacances ». Ce dernier doit mobiliser des moyens d'accueil et de transport au profit des populations défavorisées dans l'optique de la lutte contre l'exclusion. Une dotation de 4,1 millions d'euros en autorisations de programme et de 2,1 millions d'euros en crédits de paiement sera affectée, d'une part, à la poursuite de l'exécution du programme de rénovation du parc immobilier des organismes associatifs de tourisme à vocation sociale et familiale et, d'autre part, à la remise aux normes et à la satisfaction des exigences des publics concernés.
C'est dans cette perspective que le comité interministériel d'aménagement du territoire du 9 juillet 2001 a validé le programme de consolidation des équipements de tourisme social, qui prendra le relais du plan patrimoine. A ce titre, les autorisations de programme et les crédits de paiement sont en progression de 11 % et de 5 % respectivement par rapport à 2001, les aides à la personne complétant bien les aides à la pierre.
En dernier lieu, je souhaite attirer l'attention du Sénat sur le soutien à la promotion de l'image touristique de la France, au réseau dont dispose notre pays à l'étranger et, enfin, à l'utilisation des outils d'anticipation qui ont été mis en place.
Je rappelle que la France représente 11 % du marché mondial et 20 % du marché européen. L'action du Gouvernement s'est fortement appuyée, ces dernières années, sur Maison de la France, qui dispose, aujourd'hui, d'un réseau de services français du tourisme à l'étranger permettant de promouvoir l'image de notre pays auprès des professionnels et du grand public.
La dotation pour 2002 est équivalente à celle qui avait été allouée pour 2001, à savoir 27,4 millions d'euros. Depuis 1998, le taux d'aide de l'Etat s'est accru de 45,2 % et vient en complément des partenariats financiers avec les professionnels membres du groupement d'intérêt économique.
Sans revenir sur les principales observations formulées dans le cadre du contrôle du mode de financement de Maison de la France et indépendamment de la nécessité de clarifier certains points, je tiens à saluer l'excellent travail accompli par ce groupement qui promeut l'image touristique de notre pays en dépit des événements majeurs qui l'ont altérée : je veux parler de la marée noire sur les côtes de l'Ouest et des intempéries de décembre 1999.
La dotation pour les études a, quant à elle, fortement augmenté et permis la réalisation d'une « enquête aux frontières ». Cette enquête a été rendue indispensable par la mise en circulation de l'euro, qui bouleverse et continuera de bouleverser les conditions du recensement des flux de voyageurs en termes de balance des paiements.
En conclusion, je tiens à vous exprimer, monsieur le secrétaire d'Etat, mon soutien et ma reconnaissance s'agissant de l'effort budgétaire réalisé au cours de ces dernières années et de la continuité affichée pour l'exercice 2002. La politique du tourisme est un levier économique essentiel pour l'ensemble de notre territoire. Les outils d'aménagement, d'observation, d'évaluation, de prospection et de recherche d'équité sociale sont aujourd'hui en place.
Votre attention doit maintenant se porter sur l'ajustement des moyens et des missions, afin que l'augmentation massive des crédits d'intervention décidée ces dernières années participe à la démarche de qualité et de mise en valeur de nos territoires.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe socialiste votera ce projet de budget avec satisfaction et en vous prodiguant ses encouragements. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec 75,6 millions de visiteurs en l'an 2000, soit 10,8 % du marché mondial, la France confirme sa position de première destination touristique internationale, loin devant les Etats-Unis, l'Espagne et l'Italie. Notre pays se maintient également au troisième rang mondial pour les recettes touristiques.
Cependant, comme le faisait observer le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, notre excellent collègue Charles Ginésy, la situation s'avère moins favorable que les années précédentes, le développement de la clientèle étrangère en France étant, pour la première fois, inférieur à celui du tourisme mondial : c'est un signal d'alarme.
Dans ces conditions, il faut se soucier de la relative fragilité des performances françaises, qui sont, comme toujours, très sensibles aux événements internationaux et de plus en plus tributaires d'une concurrence internationale toujours plus vive, plus conquérante, plus imaginative, plus professionnelle et dotée de moyens de promotion sans cesse accrus.
C'est dire, monsieur le secrétaire d'Etat, que la France ne peut se payer le luxe de s'endormir sur ses lauriers, surtout après la tragédie du 11 septembre !
A cet égard, je dois avouer ma vive inquiétude quant aux conséquences directes de ces événements sur l'économie touristique nationale. En effet, après avoir enregistré une activité estivale élevée, les entreprises du secteur du tourisme ont été frappées de plein fouet par cette crise internationale. Selon une enquête du Syndicat national des agents de voyages, le SNAV, la France a enregistré à l'automne de 35 % à 40 % d'annulations de séjours de touristes étrangers ; ce taux a atteint 60 % pour les grands hôtels parisiens.
Par conséquent, nous le savons déjà, les résultats du dernier trimestre de cette année ne seront pas bons. Bien évidemment, nous espérons tous que l'activité repartira fortement l'année prochaine, mais l'horizon reste très incertain.
Aussi souhaiterais-je savoir, monsieur le secrétaire d'Etat, quelles mesures concrètes, notamment fiscales et sociales, le Gouvernement entend prendre pour aider les entreprises du secteur à surmonter cette crise, et surtout dans quel délai. Certes, j'ai bien noté qu'une mission avait été confiée en la matière à l'inspection générale du tourisme, mais les acteurs concernés ne peuvent patienter trop longtemps avant de procéder aux ajustements structurels nécessaires à leur survie. Plus vous attendrez, plus les licenciements seront nombreux dans ce secteur économique.
L'une des premières mesures de bon sens devrait d'ailleurs consister à reporter l'application des 35 heures dans les entreprises du secteur touristique, notamment dans celles de l'hôtellerie-restauration. En agissant ainsi, vous indiqueriez clairement, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous comprenez les professionnels et que vous êtes à leurs côtés.
Dans le même esprit, tout devrait être entrepris pour aboutir à l'application d'un taux réduit de TVA à l'ensemble de la restauration, permettant un alignement sur le taux pratiqué pour la restauration rapide. Or, malheureusement, rien dans votre projet de budget ni dans vos déclarations n'indique que vous suiviez cette orientation, pourtant indispensable.
Avec 484,7 millions de francs en crédits de paiement, le projet de budget de votre département ministériel pour 2002 progresse, certes, de 2,76 % : dont acte. Toutefois, au-delà de l'ampleur des moyens dégagés, il faut surtout considérer l'utilisation qui sera faite de ces derniers.
Le secteur touristique est prospère, sans doute parce que l'Etat y intervient peu et que les initiatives privées y foisonnent pour mettre en valeur les mille facettes d'un pays doué aussi bien pour ses cathédrales que pour ses mayonnaises, comme disait Giraudoux. (Sourires.)
Cependant, je crois nécessaires des interventions stratégiques et des incitations, ne serait-ce que pour mettre nos professionnels à égalité de chances avec leurs concurrents internationaux.
En d'autres termes, le « saupoudrage » ne sert pas à grand-chose. Mieux vaut concentrer les moyens selon quelques grands axes définis en concertation avec les professionnels.
A cet égard, le Gouvernement a retenu comme priorité pour sa politique touristique le développement du tourisme social. Soit : c'est effectivement une orientation louable, que traduit encore votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat, avec un effort sensible en faveur de la rénovation du parc immobilier à caractère social et familial. Que 40 % de nos concitoyens ne partent pas en vacances, en particulier pour des raisons financières, ne peut nous laisser indifférents.
Vous élargissez ainsi l'accès aux vacances pour tous, et c'est tout le sens de la mise en place de la Bourse solidarité vacances ou de l'extension du dispositif des chèques-vacances aux salariés des PME-PMI. Sur ce point, je m'associe pleinement aux propos de notre rapporteur sur les effets pénalisants du seuil fiscal de référence retenu, qui exclut du bénéfice des chèques-vacances un trop grand nombre de familles aux revenus moyens.
Cependant, dans le climat actuel de grande incertitude s'agissant de l'avenir du secteur touristique national, je considère qu'un effort massif aurait dû être consenti, dans ce projet de budget, en faveur des moyens de promotion de la France sur les marchés étrangers.
Pour ce faire, nous disposons de ce remarquable instrument qu'est le GIE Maison de la France. J'ai lu avec grand intérêt le rapport que lui a consacré notre éminente collègue Marie-Claude Beaudeau. J'avoue que si je ne fais pas miennes toutes ses conclusions, je l'approuve pour l'essentiel.
Maison de la France a amorcé sa réorganisation, mais il reste du chemin à parcourir pour retrouver l'esprit d'authentique partenariat qu'avait su insuffler M. Jean-Jacques Descamps, son fondateur. C'est sans doute le moyen le plus sûr pour que ce bel outil atteigne à la sécurité financière et acquière un esprit de conquête permettant de fédérer toutes les énergies, publiques et privées, autour de ce magnifique objectif qu'est la promotion de la « destination France ».
Monsieur le secrétaire d'Etat, je crois qu'il aurait été très utile que l'Etat accroisse fortement les crédits de Maison de la France pour 2002. En effet, les attentats du 11 septembre vont imposer la réorientation et le développement des actions de promotion à l'étranger, et la France ne pourra maintenir ses positions qu'en accentuant ses efforts, en particulier sur les marchés de proximité européens.
Je regrette donc vivement, monsieur le secrétaire d'Etat, que votre projet de budget ne prenne pas en compte cette absolue nécessité. J'espère que nous n'aurons pas demain à payer au prix fort cette absence d'anticipation. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Pelletier.
M. Jacques Pelletier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, M. Bernard Joly, président national des comités départementaux de tourisme, ne pouvant, à son grand regret, être présent dans l'hémicycle ce matin, m'a demandé d'intervenir en son nom, ce que je fais bien volontiers, le tourisme étant un volet important de notre économie.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le secteur du tourisme accuse de plein fouet les conséquences des événements du 11 septembre, dont la nature même, totalement inédite, a créé une onde de choc. La soudaineté de l'agression, l'impossibilité apparente d'identifier un ennemi, l'absence de déclaration de conflit et l'ampleur du nombre des victimes ont frappé de stupeur la nation américaine, dont les ressortissants ont renoncé, pour nombre d'entre eux, à quitter le territoire.
Or il faut savoir que les Etats-Unis représentent le huitième marché de la France et que les Américains constituent 18 % de la clientèle hôtelière de l'Ile-de-France, ainsi qu'une part non négligeable de celle des établissements de la Côte d'Azur.
De plus - il est important de le souligner -, il s'agit de visiteurs à haut pouvoir d'achat. Plus généralement, on estime que le taux d'annulation des séjours de touristes étrangers est de 35 % à 40 % et que le recul des ventes de billets à l'étranger atteint 30 % pour le mois de septembre.
Les effets induits par ces attentats ont amené les touristes à reporter leur choix sur les Antilles, pour lesquelles une demande croissante est enregistrée. Il convient d'apporter une réponse satisfaisante afin d'ancrer cette destination dans les habitudes. Ainsi, l'offre en matière de transport aérien doit être suffisante en nombre de sièges et les prix doivent rester compétitifs. Le tourisme est un facteur économique substantiel pour ces territoires, ce qui appelle une politique soutenue d'adaptation de l'offre, de travail sur la qualité des services et sur la formation des personnels.
Dans le contexte actuel déprimé que subit le secteur de l'activité touristique, les pouvoirs publics doivent redoubler d'attention.
En effet, la profession des agents de voyages et des tour-opérateurs est en grande difficulté. Des cessations d'activité sont enregistrées en nombre toujours plus grand, certains préférant anticiper la dégradation plutôt que d'agir dans l'urgence.
Deux mesures immédiates peuvent cependant permettre de freiner le mouvement et d'apporter une aide réelle à ces professionnels.
En premier lieu, il conviendrait de prévoir des reports d'imposition, en faisant en sorte que ceux-ci concernent l'ensemble des acteurs considérés et s'appliquent sur l'intégralité du territoire. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais que vous nous indiquiez quelles instructions ont été données pour que cet engagement, pris par le Premier ministre lors de la journée du Conseil national du tourisme, le 17 octobre dernier, se traduise dans les faits.
En second lieu, il paraît souhaitable de décider une réduction temporaire significative des charges, à hauteur par exemple de 50 %. En contrepartie de cet allégement, il ne serait procédé à aucun licenciement. Les effets bénéfiques d'une telle mesure seraient notables : elle permettrait de conserver des personnels compétents prêts à reprendre leur pleine activité dans six ou huit mois, quand un redémarrage se manifestera. Ainsi, les chiffres du chômage ne gonfleraient pas, la démobilisation dommageable due à l'absence d'activité serait évitée et le temps de réponse à une reprise éventuelle serait écourté.
Dans la perspective de la relance espérée, la campagne centrée sur la « destination France » dont a été chargée Maison de la France est une très bonne initiative. Je relève que 30 millions d'euros seront consacrés à cette structure, qui a montré, avec l'opération menée à la suite du naufrage de l' Erika, qu'elle savait agir de façon pertinente sur le marché intérieur. Cependant, il est souhaitable que cette campagne se fasse en concertation avec les institutionnels que sont les comités régionaux et les comités départementaux du tourisme.
L'efficacité de Maison de la France tient en grande partie aux moyens financiers qui lui seront accordés et qu'il est essentiel d'augmenter. Confirmer et préserver sa mission majeure d'intérêt général revient à veiller à ce que l'Etat ait une participation supérieure à 50 % dans son financement. Or, pour le budget de promotion, la France est seulement en dixième position, selon l'Organisation mondiale du tourisme.
Incontournable aujourd'hui, Internet est un outil de communication primordial pour conquérir de nouveaux marchés puis pour les fidéliser. Une adaptation du site de Maison de la France, portail national, aux enjeux marketing de la destination s'impose.
Seule l'observation du secteur du tourisme permet de connaître la clientèle potentielle et l'évolution de ses attentes, et ainsi de fixer des stratégies à court, moyen et long termes. Il faut déplorer qu'aucun crédit supplémentaire n'ait été accordé aux outils et aux moyens qui l'autorisent. Cette observation performante est pourtant essentielle.
Précéder l'évolution du comportement touristique appelle une harmonisation des méthodes, une définition des concepts comparable à l'intérieur du territoire comme en Europe. Mais il faut aussi évaluer, connaître, je dirai ne pas méconnaître, la force économique du tourisme sans cesse grandissante, génératrice d'emplois directs et induits, et atout pour les collectivités territoriales.
La diffusion de l'offre, qui est précisément souvent atomisée et qui se situe en milieu rural, justifiait une mise en marché accessible par tous. Le serveur national de réservation - RésinFrance - répond à ce besoin. Toutefois, il faut en soutenir le déploiement, accompagner son évolution technologique et en faire la promotion.
Dans un rapport réalisé pour le Conseil national du tourisme par notre collègue Bernard Joly figurent plusieurs propositions formulées pour un développement de ce secteur économique. Beaucoup d'entre elles me paraissent essentielles.
Partant de ce qui existe, il n'y a que des avantages à renforcer le rôle et les moyens des délégués régionaux au tourisme. Ils couvrent des entités cohérentes et significatives. En appui sur des unités territoriales, il y aurait tout bénéfice à décentraliser les compétences de l'Agence française d'ingénierie du tourisme sur les grandes régions et à développer de nouveaux champs d'investigation comme le tourisme d'affaires et de congrès, les nouvelles technologies et l'exportation des savoir-faire.
Deux outils nouveaux sont proposés pour cadrer, coordonner, labéliser une volonté de dynamisation et d'essor. Tout d'abord, la mise en place d'un schéma national du tourisme sur cinq ans, en amont des contrats de plan Etat-région, qui permettrait de définir des objectifs consensuels accompagnés des moyens nécessaires. Ensuite, la création d'un institut national du tourisme, qui serait tout à la fois un carrefour d'élaboration d'une politique concertée de formation, un lieu de réflexion sur la valorisation des métiers du secteur et un laboratoire d'évaluation et de promotion des expériences innovantes.
Le tourisme, selon l'organisation mondiale qui le couvre, est en passe de devenir le premier secteur d'activité. Il ne faudrait pas que la France rate ce rendez-vous. Nous comptons sur vous, monsieur le secrétaire d'Etat, pour y veiller. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées du RPR. - M. Besson applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le secrétaire d'Etat, il vous revient cette année de présenter à la fois votre premier budget en tant que secrétaire d'Etat au tourisme mais aussi le dernier budget de la législature, budget qui peut donc être considéré comme un bilan des cinq années du gouvernement au pouvoir.
Force est de constater que ce budget est loin d'être brillant. En effet, peu de réponses satisfaisantes ont été apportées aux différents enjeux auxquels est confrontée notre économie touristique depuis plusieurs années.
J'évoquerai trois enjeux principaux.
Le premier, c'est l'élargissement de l'accès aux vacances et le tourisme social.
Depuis cinq ans, il s'agit de la mesure phare de la politique du Gouvernement. Cette année encore, vous proposez d'accroître le soutien au secteur associatif, de 12 %. Par ailleurs, le programme de rénovation des hébergements touristiques à caractère associatif bénéficie d'une hausse de 11,1 % en autorisations de programme et de 5,2 % en crédits de paiement.
Malheureusement, malgré les moyens déployés, les résultats ne sont pas au rendez-vous. En effet, en dépit de l'amélioration de la situation économique, le nombre de Français partant en vacances est toujours en baisse, tant en été qu'en hiver. En 2000, le taux de départ s'est élevé à 65,1 %, en légère baisse par rapport à 1999, mais également vis-à-vis des deux années antérieures, au cours desquelles il s'était stabilisé à 66,7 %.
Il convient par conséquent de s'interroger sur l'adaptation des mesures proposées aux publics qui sont exclus du droit aux vacances. Ne sont-elles pas trop restrictives ?
Je prendrai l'exemple de l'extension du chèque-vacances aux petites entreprises, point qui a déjà été évoqué ce matin. Sur le principe, l'intention est louable, mais, lorsqu'on en étudie les modalités, cette mesure se révèle trop limitative et trop complexe. Le revenu fiscal de référence est trop bas, excluant bon nombre de salaires moyens du dispositif. On estime ainsi que dans les entreprises comptant moins de cinquante salariés, plus de la moitié d'entre eux ne peuvent pas en bénéficier.
Par ailleurs, certains chefs d'entreprise préfèrent s'abstenir de le mettre en place plutôt que de créer des inégalités, sources de tensions supplémentaires au sein du personnel.
Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. Ne conviendrait-il donc pas de revoir les critères retenus pour définir les publics visés. Une mauvaise loi peut être réformée.
Le deuxième enjeu de notre politique du tourisme réside dans la promotion de la destination France et dans le maintien de notre position de leader sur le plan international.
Là encore, il semble que les moyens déployés soient très insuffisants et que les mesures mises en oeuvre souffrent de lacunes importantes.
Permettez-moi de citer quelques chiffres. La France demeure, certes, la première destination touristique mondiale avec 75,5 millions d'arrivées en 2000 et ses recettes sont toujours en augmentation, mais certaines données sont alarmantes : la croissance du nombre de séjours effectués en France est presque deux fois inférieure en 2000 à la croissance globale dans le secteur. L'Espagne et l'Italie, nos principaux concurrents, réalisent à peu près le même chiffre d'affaires que la France mais avec un nombre d'arrivées inférieur.
Les deux leviers essentiels de promotion de notre destination sont Maison de la France et la politique de rénovation de l'immobilier touristique.
En ce qui concerne Maison de la France, la dotation qui lui est affectée pour 2002 est stable. Cette stabilité ne lui permettra malheureusement pas, cette année encore, d'assumer correctement ses missions et de maintenir la compétitivité de notre pays face à ses concurrents. J'ai été surpris d'apprendre récemment que la France ne consacre que 58 millions de dollars à la promotion, alors que l'Espagne affecte à celle-ci 147 millions.
En outre, plus qu'un manque de moyens, il s'agit surtout d'une instabilité des ressources, comme l'a souligné notre collègue rapporteur Marie-Claude Beaudeau dans son récent et très intéressant rapport d'information.
Cela fait plusieurs années que j'alerte le Gouvernement sur le danger qu'il y a à rester sur les acquis. Cinq ans plus tard, je constate que la situation ne cesse de se dégrader sans que rien ne soit véritablement entrepris.
Par ailleurs, outre un problème de promotion, la France souffre d'une défaillance dans la qualité de son hébergement, principalement en milieu rural, ce qui nuit à son image. Un effort a été engagé dans ce sens, mais le retard est manifestement trop long à combler. Ne conviendrait-il pas, monsieur le secrétaire d'Etat, de créer des mécanismes financiers plus incitatifs, sur le modèle du prêt à taux zéro, par exemple ? En Alsace, zone frontalière, nous constatons que, dans le domaine de l'équipement hôtelier, nos voisins de Forêt-Noire, grâce à des aides incitatives, disposent en moyenne d'équipements mieux structurés et toutefois compétitifs, compte tenu des prestations offertes.
Enfin, pour terminer, j'évoquerai l'économie touristique en tant que telle, et plus particulièrement le potentiel de ce secteur en termes de création d'emplois. Au cours des dernières années, il a créé en moyenne 25 000 emplois par an et on pourrait en créer beaucoup plus. Ainsi, la seule hôtellerie-restauration connaît une grave pénurie de main-d'oeuvre. Ces difficultés de recrutement vont encore s'aggraver avec la réduction du temps de travail, difficile à mettre en oeuvre dans la petite et moyenne hôtellerie. Il faut incontestablement adapter cette réduction du temps de travail. Mais ce déficit de main-d'oeuvre s'explique, entre autres éléments, par les lacunes de notre système de formation professionnelle, souvent peu adapté aux besoins du marché et peu valorisé auprès des jeunes.
Une action forte en matière de formation permettrait, en outre, de faire sortir de nombreux jeunes saisonniers d'une partielle clandestinité.
Enfin, je regrette qu'aucune action n'ait été entreprise afin de faciliter et de favoriser la pluriactivité.
Celle-ci est, en effet, bien souvent la seule solution pour créer une activité touristique viable en milieu rural. Or la complexité administrative qu'implique ce statut peu reconnu par les pouvoirs publics décourage les meilleures volontés et favorise le travail illégal.
Permettez-moi de citer un exemple : pour un centre équestre, structure qui est créée essentiellement en zone rurale, il faut déclarer des bénéfices industriels et commerciaux au titre de l'activité d'hébergement, des bénéfices agricoles au titre de l'élevage de chevaux et des bénéfices non commerciaux au titre des cours d'équitation. C'est particulièrement simple, mais il faut le faire.
Le tourisme rural constitue un formidable gisement d'emplois. Tous les jours sont créés des métiers qui bousculent l'organisation traditionnelle et exigent de nouvelles règles. Il conviendrait, par conséquent, d'exploiter ce potentiel.
En conclusion, au regard de tous ces éléments, le bilan du secrétariat au tourisme est donc loin d'être satisfaisant. Cela n'a rien de rassurant dans le contexte actuel de crise du tourisme mondial à la suite des attentats du 11 septembre. C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, comme vient de l'indiquer notre collègue Paul Dubrule, le groupe du RPR et moi-même nous ne pourrons voter les crédits de votre secrétariat d'Etat. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Alors que vous allez présenter au Sénat votre premier budget, monsieur le secrétaire d'Etat, je m'associe aux souhaits de bienvenue qui vous ont été adressés. Je ne doute pas que le dialogue républicain entre notre assemblée et le secrétariat d'Etat au tourisme, qui fut la règle avec votre prédécesseur, Mme Demessine, redevenue notre collègue, se poursuivra.
Vous avez la parole, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Jacques Brunhes, secrétaire d'Etat au tourisme. Je vous remercie de vos propos, monsieur le président.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je commencerai par remercier Mme Beaudeau et M. Ginésy. Les rapports qui sont publiés depuis quatre ans forment une véritable somme et marquent, en définitive, le progrès réalisé dans ce secteur important. Ces travaux ont permis d'enrichir considérablement la réflexion du Gouvernement sur les enjeux du tourisme. Je voudrais aussi remercier l'ensemble des orateurs. Leurs remarques, leurs observations critiques amènent à la réflexion, laquelle est, vous le savez, le seul stimulant qui permette d'avancer. Enfin, j'ai été sensible aux témoignages de sympathie que vous avez exprimés à mon prédécesseur, Mme Demessine, et qui, au-delà de sa personne, concernent, en fin de compte, la politique qu'elle a conduite au nom du Gouvernement.
Je ne détaillerai pas le budget, les rapporteurs l'ont fait. Je vais simplement répondre aux principales questions qui m'ont été posées.
La première porte sur le montant même de ce budget. D'une manière habile, M. Dubrule a dit qu'il s'agissait d'un budget ridiculement faible ou d'un budget exemplaire. Ce n'est ni l'un ni l'autre. Je voudrais vous persuader que l'efficacité réelle d'un ministère ne se mesure pas au poids de son budget.
Pour ce faire, je ferai trois remarques. La première : le tourisme est le premier poste excédentaire de la balance commerciale ; c'est un secteur majeur de l'économie nationale ; il représente 7 % du produit intérieur brut.
Deuxième remarque : le tourisme est une activité transversale, qui concerne non seulement les collectivités territoriales - communes, départements et régions - mais aussi, vous l'avez dit les uns et les autres, des secteurs privés ainsi que les fonds européens, notamment les fonds structurels. Comment l'oublier ?
Troisième remarque : depuis 1997, le Gouvernement marque un intérêt particulier pour ce secteur d'activité. Le budget a doublé en cinq ans. J'ajouterai - mais n'y voyez pas malice - qu'il n'y a pas toujours eu, dans les gouvernements précédents, de ministre du tourisme. On a même connu un ministre du tourisme éphémère - six mois, je crois.
Puis le ministre du tourisme a été remplacé par un conseiller technique au ministère de l'équipement. Vous me permettrez de penser que ce n'est pas tout à fait la même chose ! Nommer un secrétaire d'Etat au tourisme, c'est reconnaître l'importance du tourisme, et c'est là un élément que l'on ne peut pas mettre de côté.
Vous avez tous, à mon avis à juste titre, exprimé des inquiétudes par rapport aux attentats du 11 septembre dernier. Quelle est notre analyse à cet égard ? La situation du tourisme, en France, après ces attentats est à la fois préoccupante et contrastée.
Elle est contrastée, car, si un certain nombre de secteurs du tourisme souffrent de cette situation, d'autres s'en sortent mieux : c'est notamment le cas du tourisme rural et des activités touristiques liées à la saison hivernale. M. Augier, président de France-Congrès et maire de Deauville, que j'ai rencontré récemment à l'occasion d'un voyage à New York, m'a expliqué que, en octobre, tous les records de fréquentation ont été battus dans sa ville.
Par ailleurs, la situation est préoccupante, car un certain nombre de secteurs sont directement touchés - les tours opérateurs, les agences de voyage, le tourisme de luxe, le tourisme d'affaires et, d'une certaine manière, le tourisme de congrès -, même s'ils le sont inégalement. Il faut donc que nous soyons attentifs à ces aspects qui risquent de fragiliser notamment l'emploi à travers les agences de voyages, dont nous savons bien qu'elles se financent sur les réservations pour les mois à venir. Il suffit donc que le nombre des réservations s'infléchisse pour que la trésorerie aille mal et que les agences se trouvent en difficulté.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement - et je réponds ainsi à M. Pelletier - a pris immédiatement des mesures fiscales et sociales, annoncées dès le 17 octobre par M. le Premier ministre. Douze jours après - c'est un délai très court, je me demande même si ce n'est pas une sorte de record... -, les instructions d'application de ces mesures étaient publiées et envoyées aux directions du travail et aux directions des services fiscaux.
L'application se fait d'une manière correcte, même si certains dysfonctionnements peuvent persister. Je participais la semaine dernière, à Marseille, à un congrès réunissant 750 agents de voyages. Je leur ai indiqué, à cette occasion, que ceux qui avaient encore des difficultés pour mettre en oeuvre ces mesures pouvaient s'adresser au secrétariat d'Etat au tourisme, qui les aiderait. Mais nous constatons, monsieur Pelletier, que, en règle générale, l'application se fait bien.
Ces mesures sont-elles toutefois suffisantes ? « Le cas échéant, nous prendrons des mesures complémentaires », avait dit le Premier ministre, le 17 octobre. Le problème de tous les professionnels du tourisme est que leur visibilité est courte. Face à cela, il est nécessaire de prendre le temps d'observer la situation avant de prendre des mesures. C'est la raison pour laquelle le secrétariat d'Etat au tourisme a mis en place une cellule d'observation qui est en contact permanent avec les professionnels du tourisme afin de faire régulièrement le point sur la situation.
Une enquête a également été demandée à l'Inspection générale du tourisme, qui devrait remettre un rapport d'ici à la fin décembre - le 20 décembre je crois.
La Commission de Bruxelles fait également procéder à une enquête. J'étais d'ailleurs lundi dernier à Bruxelles avec l'ensemble des ministres européens du tourisme pour évoquer les premiers points de cette enquête européenne.
Les premières conclusions d'étape font apparaître que des mesures supplémentaires devront sans doute être prises.
Quelques pistes se dégagent. Il en est ainsi, tout d'abord, du recours à des actions de formation quatifiante pour les personnels, ce qui répondrait aux demandes de certains professionnels, notamment les hôteliers. Les hôteliers ayant une clientèle « à haute contribution », comme l'on dit dans l'aéronautique, sont affectés par la situation actuelle et ils souhaitent donc des actions de formation qualifiante. Par ailleurs, le recours au crédit à taux bonifié ou à taux zéro, comme cela a été fait au moment des grandes tempêtes, la mise en place d'un fonds de garantie d'équipement pour les professionnels par l'intermédiaire de la SOFARIS, ou Société française pour l'assurance du capital-risque, le rééchelonnement des échéances, pour reconstituer la trésorerie, et des garanties, pour permettre de réinvestir, constituent d'autres pistes.
Certains professionnels ou certains syndicats de professionnels ont fait d'autres types de propositions, que nous sommes prêts à examiner. Il est évident qu'il nous faut prendre des mesures sans tarder - j'insiste à cet égard auprès de mes collègues du Gouvernement -, faute de quoi les agences risqueraient d'être en très grande difficulté.
D'autre part, le Premier ministre a annoncé le lancement de la campagne « Destination France », visant à promouvoir la destination vers notre pays, campagne qui sera conduite par mon ministère, mais sous l'égide de Maison de la France, qui bénéficiera à cette fin - j'y insiste - d'une enveloppe de 30 millions de francs supplémentaires, ainsi que l'a noté Mme Beaudeau dans son rapport.
A qui s'adresse cette campagne ? Sur ce point, il nous faut, là encore, réfléchir, et ce en concertation avec les professionnels. L'idée de départ est simple : chaque crise, notamment une crise comme celle que nous vivons, conduit à des modifications du paysage touristique et donc à des modifications de flux touristiques. C'est la raison pour laquelle la campagne « Destination France » visera les Français, les Européens, les pays anglo-saxons et scandinaves, qui constituent des gisements de touristes potentiels, comme on le constate actuellement. Par ailleurs, nous continuerons à oeuvrer pour attirer les touristes américains, voire les touristes japonais. C'est en ce sens que je me suis rendu la semaine dernière à New York. En effet, le tourisme étant fondé sur la confiance, et nos amis Américains ayant peur, actuellement, de voyager en avion, il fallait, en vue de rétablir la confiance, le vol du Concorde et la visite du secrétaire d'Etat français au tourisme ; il fallait que je rencontre, à New York, les autorités de l'Etat de New York, les spécialistes du tourisme et les responsables de l'office du tourisme.
Un problème a été peu évoqué, mais il me préoccupe : parmi les modifications du paysage touristique, que j'évoquais, certaines sont structurelles. On ne peut pas mettre de côté le fait que la société Nouvelles Frontières a été reprise par Preussag et que des concentrations nouvelles affectent, en Europe l'« industrie touristique », expression que je n'aime pas beaucoup. Pour tenir compte de ce fait, mais aussi pour veiller aux dangers de ce type de restructuration, dangers qu'avait déjà soulignés Mme Demessine, j'ai chargé d'une mission un homme très connu dans le milieu ; j'attends néanmoins d'obtenir sa réponse pour vous confier son nom ; spécialiste de ces questions, il devra rendre un rapport dès le mois de février afin non seulement de mesurer les conséquences de ces restructurations sur les plans européen et français, mais aussi de proposer les solutions que nous pourrions prendre.
Je veux maintenant aborder rapidement deux questions qui sont récurrentes.
Tout d'abord, en ce qui concerne la TVA - vous êtes presque tous intervenus sur ce sujet, mesdames, messieurs les sénateurs - notre position est simple et se situe dans la continuité de celle de Mme Demessine : ce problème doit être réglé au niveau européen. Rencontrant le commissaire Likanen et prenant connaissance de son rapport lundi dernier, j'ai été, comme vous, un peu étonné de constater que, selon lui et selon Bruxelles, ces problèmes étaitent considérés comme réglés. Telle n'est pas notre opinion.
Par ailleurs, le coût de la mesure n'est pas neutre pour le budget de l'Etat, et personne ne peut se désintéresser de cette question.
De plus, des mesures d'accompagnement autres que la baisse de la TVA sont à l'étude par Bercy, notamment pour favoriser l'embauche.
Je ne considère pas ce dossier comme clos. Je l'ai dit devant la commission des finances, et je le répète ici devant la Haute Assemblée. Ce dossier doit être approfondi ; nous devons procéder à d'autres chiffrages afin de nous appuyer sur des données objectives.
Mais j'ajoute que ce dossier n'est pas clos de facto. A la page 46 de votre rapport, monsieur Ginésy, je lis ceci : « une évaluation de la directive du 22 octobre 1999 sera effectuée en 2002, sur la base de rapports que devront présenter les Etats membres avant le 1er octobre 2002. A cette occasion, la question du taux de TVA appliqué à la restauration pourra éventuellement faire l'objet d'un examen. » Ce problème n'est donc pas, de facto , encore résolu définitivement. Je m'inscris dans la même philosophie que celle que Mme Demessine avait exprimée. Je souhaite qu'il soit réglé dans les meilleures conditions possible pour les professionnels.
Vous avez également évoqué le problème de la réduction du temps de travail. Nous constatons un double phénomène : d'une part, cette mesure profite aux secteurs du tourisme ; c'est une évidence. D'autre part, certains secteurs, comme l'hôtellerie-cafés-restaurants, éprouvent, disent-ils, des difficultés à mettre en oeuvre les 35 heures. Mais je dois bien reconnaître que les principales organisations syndicales - la CGT et la CFDT, et deux organisations patronales au moins - ont conclu, le 15 juin 2001, un accord sur ce point. Il reste donc à lever les procédures d'opposition à l'extension de cet accord. Le Gouvernement a nommé un médiateur, M. Boulanger, qui a remis son rapport le 23 novembre. Des discussions sont actuellement engagées. Les propositions du rapporteur et celles des organisations syndicales non signataires sont actuellement examinées. C'est pourquoi je suis favorable à l'extension, dans de bonnes conditions pour les professionnels et les salariés de cette branche, de cet accord qui engage une réelle démarche de progrès social.
Conformément aux dispositions prises par Mme Demessine, les chèques-vacances ont pour objectif de faciliter l'accès, par un dispositif adapté, aux 7,5 millions de salariés employés dans les PME et les PMI.
Les premiers résultats sont importants : en l'an 2000, 140 conventions ont été conclues entre l'ANCV, l'agence nationale pour les chèques-vacances, et les entreprises ; en 2001, 200 conventions supplémentaires ont été signées pour les six premiers mois ; des discussions sont en cours s'agissant des métiers de services afin de trouver un accord qui a d'ores et déjà été conclu avec l'Union des artisans.
Par ailleurs, comme je l'avais souhaité lors de la présentation de mon budget à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a annoncé le relèvement de 12 % du seuil du revenu fiscal de référence. C'est un acquis important.
Plusieurs d'entre vous ont évoqué les 40 % de nos concitoyens qui ne partent pas en vacances. Ce problème est cher à Mme Beaudeau, mais j'ai entendu plusieurs voix s'exprimer à ce sujet, et je comprends cette préoccupation.
Je rappellerai toutefois que, depuis quatre ans, un ensemble de dispositifs a été mis en place par mon département ministériel.
Tout d'abord, l'utilisation des chèques-vacances a été étendue aux PME-PMI, ainsi que je viens de le notifier.
Ensuite, la création et le développement du groupement d'intérêt public Bourse solidarité vacances a permis à plus de 20 000 de nos concitoyens d'accéder aux vacances dès 2001 et ils seront 30 000 l'année prochaine ; le budget alloué à cettre bourse sera donc doublé.
Enfin, dans le cadre de la politique familiale, avec Ségolène Royal, nous avons fait en sorte que les caisses d'allocations familiales développent les aides aux vacances.
Nous aussi, nous considérons que ce problème est d'importance majeure et qu'il procède de la politique sociale du ministère du tourisme.
Je vais maintenant aborder brièvement les autres questions qui m'ont été posées. Je ne répondrai pas intégralement aujourd'hui à leurs auteurs compte tenu du temps qui m'est imparti, me réservant de compléter ma réponse par écrit.
Les crédits affectés aux contrats de plan Etat-région dans le cadre du XIIe Plan ont pratiquement quadruplé. Dans l'optique de transversalité que j'évoquais tout à l'heure, ce n'est pas rien !
Je dois me rendre la semaine prochaine en région Provence-Alpes-Côte d'Azur pour vérifier sur place comment se mettent en place les contrats de plan Etat-région. Ce sont des éléments tout à fait essentiels de la politique du tourisme. Nous poursuivons la réhabilitation du patrimoine associatif et social en suivant un plan de consolidation de cet hébergement. Le tourisme, chacun le sait, est un élément structurant essentiel de l'aménagement du territoire.
Dans certains bassins de vie, les acteurs se sont unis dans une stratégie commune. Les pays d'accueil touristique, les parcs naturels régionaux, mais aussi les pays d'art, d'histoire, les pôles d'économie et du patrimoine préfigurent l'organisation territoriale du tourisme de demain.
Enfin, une question m'a été posée concernant les emplois-jeunes et plusieurs d'entre vous ont des inquiétudes à ce sujet.
L'arrivée des jeunes a permis de créer de nouvelles activités touristiques, de mieux répondre aux besoins des usagers, de professionnaliser les structures de petite taille. Deux tiers de ces jeunes ont au moins une formation initiale bac + 2. Dans les mois qui viennent, nous renouvellerons les conventions-cadres passées avec les quatorze organismes du secteur, et ce, bien évidemment, en liaison avec le ministère de l'emploi et de la solidarité.
Si le secteur du tourisme génère une activité qui permet l'insertion de nombreux jeunes, elle souffre d'un important taux de départ. C'est pour tenter d'y remédier que nous travaillerons, dans la période à venir, à rechercher une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi dans la perspective d'une fidélisation des salariés. Je suis convaincu, toutefois, qu'une des clés de cette fidélisation réside dans l'amélioration des conditions de travail et de rémunération des employés des branches concernées.
Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaiterais vous livrer une des mes réflexions.
Je ne considère pas le tourisme comme une activité uniquement marchande. Le tourisme - et je me fonde sur mon expérience d'élu local et sur celle que j'ai acquise depuis quelques semaines, en tant que secrétaire d'Etat - est une activité porteuse de valeurs : valeurs d'échange, valeurs d'échange des cultures, curiosité, valeurs de relations humaines et, si l'on met de côté les déviances inéluctables contre lesquelles il faut lutter, au bout du compte ce fond de valeurs humanistes demeure.
Qu'on le veuille ou non, nécessairement, après le 11 septembre, des difficultés sont apparues. Elles seront surmontées parce que ces valeurs restent, et je pense que l'on peut traduire l'attitude que doit avoir le Gouvernement face à ce secteur par la formule que j'ai employée à l'Assemblée nationale : vigilance extrême, mais en même temps confiance raisonnée et active. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du RPR.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant le tourisme inscrits à la ligne « Equipement, transports et logement » seront mis aux voix aujourd'hui même à la suite de l'examen des crédits affectés à la mer.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 41 004 185 euros. »