SEANCE DU 27 MARS 2001
M. le président.
La parole est à M. Hoeffel, auteur de la question n° 1006, adressée à M. le
ministre des affaires étrangères.
M. Daniel Hoeffel.
Dans le contexte de la construction de l'Union européenne, les relations et la
coopération franco-allemandes doivent aujourd'hui garder un caractère
prioritaire, et elles ne sauraient se réduire aux aspects politiques et
économiques.
La coopération franco-allemande sur les plans linguistique, culturel,
scientifique et universitaire revêt en effet une importance accrue dans la
mesure où ces domaines constituent les fondements de relations solides entre
nos deux pays.
Or des rumeurs persistantes font état de projets de fermeture de centres et
d'instituts culturels français en Allemagne, au moment même, d'ailleurs, où
certains projets évoquent la fermeture des instituts Goethe en France, ce qui
serait évidemment préjudiciable à la consolidation des relations
culturelles.
Je comprends que des réorganisations des réseaux culturels soient nécessaires
pour que ceux-ci puissent s'adapter aux besoins d'aujourd'hui. Cependant, la
présence culturelle française en Allemagne et la présence allemande en France
ainsi que leur renforcement sont de plus en plus essentiels si nous voulons
donner au dialogue franco-allemand un contenu concret, vivant, stimulant.
Voilà pourquoi, monsieur le ministre, nous serions heureux que vous puissiez
dissiper nos appréhensions et nous dire que la relation culturelle
franco-allemande reste un élément majeur de la politique conduite par la
France. Il faut que cette politique tienne compte du caractère fédéral de
l'Allemagne et que la présence culturelle se manifeste dans chacun des
Lander
: chacun d'eux ayant sa spécificité, notre présence doit se
manifester de manière adaptée à chacun d'eux.
Je voudrais, pour terminer, évoquer une autre préoccupation. La politique
culturelle de la France à l'étranger est une compétence de l'Etat. Il ne faut
pas que, sur ce plan comme sur d'autres, l'Etat se décharge de certaines de ses
compétences naturelles sur les collectivités territoriales en leur demandant
d'assumer tout ou partie d'une responsabilité qui continue de lui incomber.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin,
ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Monsieur le
sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de M.
Védrine, qui se trouve actuellement aux Etats-Unis pour rencontrer les membres
du nouveau gouvernement américain.
En concertation avec les autorités allemandes, le Gouvernement a décidé de
procéder à une reconfiguration du réseau culturel français en Allemagne.
La France entretient en Allemagne un réseau culturel qui représente, à lui
seul, plus de 12 % du nombre des établissements culturels à autonomie
financière placés sous la tutelle directe du ministère des affaires
étrangères.
Il était composé, au 1er janvier 2000, de dix-neuf établissements - instituts
français ou centres culturels français -, de trois antennes du service culturel
et de deux établissements franco-allemands ayant le statut d'association de
droit local.
Il est normal, dans un souci d'efficacité et de meilleure utilisation des
compétences humaines comme des fonds publics, que ce réseau soit constamment
modernisé et adapté à la nouvelle situation allemande ainsi qu'aux évolutions
de la relation franco-allemande. La coopération entre nos deux pays demeure en
effet une des priorités de la diplomatie culturelle de la France.
Au cours des dernières années, la France et l'Allemagne ont déjà engagé une
première modernisation en profondeur de cette relation culturelle en se dotant
de nouveaux instruments, auxquels elles consacrent des moyens importants. Il
s'agit du centre Marc-Bloch à Berlin - centre de recherche en sciences sociales
-, de la chaîne franco-allemande Arte, de l'université franco-allemande, de
l'Académie franco-allemande du cinéma ou encore du Forum franco-allemand pour
l'emploi.
Les crédits d'intervention alloués à notre poste en Allemagne ont par ailleurs
été augmentés, alors que, vous le savez, le contexte budgétaire pour ce type
d'actions est très contraint. La contribution française à l'Office
franco-allemand pour la jeunesse est passé de 64 millions de francs à 70
millions de francs en trois ans, celle qui est consacrée à l'université
franco-allemande, créée le 1er janvier 2000, se monte à 23,5 millions de francs
et devrait atteindre, à terme, 25 millions de francs.
Dans ce nouvel environnement, les instituts français et centres culturels ne
sont plus les seuls vecteurs de l'influence de la France en Allemagne : ils
doivent s'intégrer dans un dispositif restructuré de coopération, de grande
envergure, encore plus innovant et performant.
Je rappelle que les autorités britanniques ou allemandes se sont, elles aussi,
engagées dans un programme de révision substantielle de leur dispositif
culturel à l'étranger. S'agissant de la présence allemande en France, cela
concerne, notamment, les instituts Goethe de Marseille, Toulouse et Lille, où
l'implication des collectivités territoriales françaises et des milieux
économiques est recherchée.
Pour ce qui est de la réforme de notre dispositif, elle aboutira, en 2002, à
l'installation sur tout le territoire allemand d'une représentation française
dans chaque
Land,
grâce, en particulier, à la création d'un nouveau type
d'agents, à savoir des attachés de coopération culturelle ou de coopération
universitaire, dotés d'un budget d'intervention, affectés auprès de
chancelleries, de municipalités ou d'institutions universitaires. Ils seront
chargés de monter en partenariat, dans un cadre à la fois bilatéral et
multilatéral, des projets d'envergure dépassant le strict environnement
local.
Nous développerons ainsi la capacité d'impulsion et d'action de nos agents,
qui seront moins accaparés par les tâches de gestion et d'administration. Cette
réforme ne conduira donc aucunement à réduire notre présence en Allemagne ou à
en diminuer le coût. Elle vise en revanche à la rendre plus moderne, plus
efficace, plus visible et mieux intégrée aux institutions allemandes.
Le dispositif sera notamment renforcé dans la partie orientale de l'Allemagne,
là où la France ne disposait jusqu'à présent d'aucun relais. A cet effet, il
est prévu de créer des postes d'attaché, notamment dans trois capitales de
région : à Magdeburg, à Schwerin et à Postdam.
Les établissements culturels proprement dits seront au nombre de douze,
demeurant localisés à Berlin, Brême, Cologne, Dresde, Düsseldorf, Francfort,
Hambourg, Leipzig, Mayence, Munich, Sarrebruck et Stuttgart. Leurs moyens
seront renforcés. Les établissements franco-allemands à Aix-la-Chapelle, Essen
et Tübingen seront maintenus, à statut inchangé.
Le dispositif sera complété par des antennes culturelles du service culturel
avec un poste d'attaché, localisées à Bonn, Erfurt, Hanovre, Heidelberg, Kiel
et Rostock.
Au terme de la réforme, le dispositif comprendra donc vingt-sept sites
travaillant en réseau, au lieu de vingt-quatre actuellement.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, la reconfiguration du réseau culturel
français en Allemagne ne saurait en aucun cas être interprétée comme une
volonté de la France de réduire sa présence dans ce pays qui demeure son
premier partenaire en Europe. L'objectif est au contraire de renforcer
l'efficacité de ce réseau en l'adaptant aux nouvelles formes d'échanges
culturels et artistiques qui prévalent aujourd'hui entre les pays membres de
l'Union européenne et en l'articulant mieux avec le dispositif institutionnel
rénové de la coopération franco-allemande.
M. Daniel Hoeffel.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse très complète et
précise. Permettez-moi simplement, en conclusion, d'exprimer le souhait que la
reconfiguration que vous évoquiez, que la diversification de la présence
culturelle française en Allemagne ne signifie en aucun cas ni désengagement ni
allégement de notre présence, mais qu'elle se traduise par la recherche d'une
meilleure efficacité et par l'expression d'une volonté forte consistant à faire
de la culture un vecteur essentiel de notre présence en Allemagne. Je souhaite
également que l'Allemagne assure, dans le même esprit, sa présence culturelle
en France.
M. Michel Sapin,
ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
C'est bien
le cas !
INSTRUCTION DES PERMIS DE CONSTRUIRE