SEANCE DU 19 DECEMBRE 2000


M. le président. La parole et à M. Legendre, auteur de la question n° 939, adressée à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.
M. Jacques Legendre. Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement a annoncé, le 11 octobre dernier, sa décision d'interdire l'utilisation de l'ensemble des intestins provenant de bovins, quel que soit leur âge, dans la fabrication de la charcuterie.
L'une des spécialités culinaires, parmi les plus célèbres, de la région de Cambrai est ainsi concernée au premier chef. En effet, l'andouillette qui y est fabriquée est composée à 95 % de fraise de veau, produit dont l'utilisation représente 700 tonnes environ par an pour la confection de 500 tonnes d'andouillettes.
La décision d'interdiction, qui n'a semble-t-il pour l'instant pas encore été confirmée par voie d'arrêté interministériel, est lourde de conséquences économiques et sociales pour le tissu artisanal local.
Le Cambrésis assure en effet plus de 25 % de la production nationale d'andouillettes à base de veau. Or, outre la dégradation de l'image des artisans charcutiers concernés, qui sont au nombre de quatre-vingt dix dans le Cambrésis, force est de constater que le chiffre d'affaires de ces professionnels a chuté dans les deux semaines qui ont suivi cette annonce de 15 % à 25 % selon les cas et que des mesures de chômage technique ont malheureusement d'ores et déjà dû être mises en oeuvre.
Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, que les choses soient bien claires. Je comprends tout à fait votre volonté de faire prévaloir le principe de précaution, car il n'est pas question de mettre en balance la santé du consommateur avec tel ou tel intérêt, mais il est souhaitable que vous nous précisiez les intentions du Gouvernement sur l'application annoncée ou envisagée d'une telle interdiction et les mesures qu'il entend prendre pour sauvegarder un produit artisanal traditionnel célèbre de la cuisine française et, surtout, aider la profession directement touchée par cette décision d'appliquer le principe de précaution, qui est sans doute nécessaire, mais qui serait un coup terrible, dont toutes les conséquences doivent être mesurées.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat. M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Monsieur Legendre, je comprends bien votre préoccupation d'ordre économique, et vous n'avez d'ailleurs, à juste titre, pas mis en balance dans votre question à l'impératif de sécurité sanitaire et l'impératif économique, dont le Gouvernement ne sous-estime pas les effets.
La décision de retirer de la chaîne alimentaire les intestins provenant de bovins a été prise sur la base d'un avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, a donné lieu - je vous donne la réponse aujourd'hui - à un arrêté en date du 10 novembre 2000 et fait suite à la décision de retirer de la chaîne alimentaire la rate, les ganglions, la moelle épinière et le thymus.
Pourquoi interdire aujourd'hui l'utilisation des intestins de bovins ? Parce qu'ils comportent une zone qu'il convient particulièrement de redouter, celle des plaques de Peyer, potentiellement chargée d'agents infectants dans la cas où l'animal est contaminé. Il va de soi que, devant un danger potentiel, non prouvé aujourd'hui, le principe de précaution doit être appliqué.
Le Gouvernement a suivi l'avis de l'AFSSA, comme il le fait pour l'ensemble des décisions prises à la suite d'une consultation et d'un avis scientifique indépendant, car personne aujourd'hui ne peut prendre le risque de mettre en danger la sécurité et la santé des consommateurs. Il le fait dans la transparence et en étant bien conscient des problèmes qu'une telle décision pose pour des produits spécifiques tels que celui que vous avez évoqué, auquel une région est très attachée et dont elle est très friande !
Les charcutiers doivent bien comprendre que le traitement de ce dossier est très important pour des raisons non seulement de sécurité, mais aussi d'image. En effet, si des décisions n'étaient pas prises à temps, les conséquences seraient encore beaucoup plus graves pour eux demain. Conscient de cela, le Gouvernement a mis en place un dispositif. J'invite tous les professionnels à en demander le détail à leur direction départementale de l'agriculture et de la forêt. Il comprend des mesures d'ordre social, concernant notamment le chômage partiel, des aides économiques et financières ; des mesures de solidarité pour accompagner les entreprises, l'objectif prioritaire étant de favoriser la reconversion de ces dernières ; enfin, des aides leur permettant de réfléchir à l'utilisation d'autres produits, afin que ces spécialités alimentaires de qualité, très prisées, puissent être maintenues.
Le Gouvernement, monsieur le sénateur, reste très attaché aux entreprises artisanales de métiers de bouche, qui font la valeur économique des territoires français, car la France des terroirs est la France de ces produits. Sachez qu'il tentera, avec les professionnels concernés, d'apporter des réponses aussi précises et aussi efficaces que possible.
M. Jacques Legendre. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Legendre.
M. Jacques Legendre. Je remercie M. le secrétaire d'Etat de sa réponse. Il a en particulier abordé un point sur lequel je souhaitais l'entendre et qui concerne la possibilité de recourir à d'autres produits ne présentant pas de dangers pour la santé, de manière à sauver cette production traditionnelle.
L'andouillette de Cambrai n'est qu'un exemple de ces produits des terroirs qui donnent sa saveur à la cuisine française et auxquels nous sommes tous attachés. On ne peut donc pas se résigner à les voir disparaître, même si, par ailleurs, chacun considère que la santé est une priorité absolue.
Les professionnels et le Gouvernement doivent par conséquent s'attacher à favoriser le recours à d'autres produits afin de sauver ces spécialités traditionnelles, dont fait partie l'andouillette de Cambrai.

MISE EN PLACE DU PROJET DE SOINS INFIRMIERS