SEANCE DU 18 DECEMBRE 2000
M. le président.
« Art. 17 A. - I. - L'article 199
quindecies
du code général des impôts
est ainsi modifié :
« 1° Dans le premier alinéa :
«
a)
Le mot : "mariés" et les mots : "d'un des conjoints" sont
supprimés ;
«
b)
Cet alinéa est complété par les mots : "par personne hébergée".
« 2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« La réduction d'impôt prévue à l'alinéa précédent s'applique dans les mêmes
conditions aux dépenses afférentes à la dépendance effectivement supportées à
raison de l'accueil dans un établissement ayant conclu la convention
pluriannuelle visée à l'article 5-1 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975
relative aux institutions sociales et médico-sociales. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent à compter de l'imposition des
revenus de 2000. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet
d'une discussion commune.
Par amendement n° 63, MM. Angels, Dreyfus-Schmidt, Mme Bergé-Lavigne, MM.
Charasse, Demerliat, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les
membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - Après le 1° du I de cet article, d'insérer deux alinéas ainsi rédigés
:
« Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, pour le cas des personnes invalides séjournant dans des
établissements de long séjour et médicalisés, le taux de la réduction d'impôt
visée au premier alinéa est porté à 50 %, dans une limite de 30 000 F des
sommes versées. »
B. - Afin de compenser les pertes de ressources résultant du A ci-dessus, de
compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant du relèvement à 50 % pour les personnes
invalides du taux de la réduction d'impôt au titre des frais de séjour dans les
établissements médicalisés de long séjour est compensée à due concurrence par
la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A
du code général des impôts. »
Par amendement n° 19, M. Marini, au nom de la commission, propose :
A. - Avant le 2° du I de cet article, d'insérer un 1°
bis
ainsi rédigé
:
« 1°
bis.
A la fin du premier alinéa, la somme : "15 000 F" est
remplacée par la somme : "45 000 F". »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du A
ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de la modification du
plafond des sommes ouvrant droit à réduction d'impôt sont compensées à due
concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux
articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Angels, pour présenter l'amendement n° 63.
M. Bernard Angels.
Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2001, le Gouvernement
s'est engagé à réfléchir à la mise en place d'un dispositif cohérent permettant
de mieux prendre en compte les frais de séjour des personnes handicapées ou
dépendantes dans les établissements médicalisés, qui sont particulièrement
onéreux. Il devenait en effet urgent de modifier un dispositif fiscal
déséquilibré.
Je ne reviendrai pas sur les arguments que j'ai présentés lors de ce débat et
je dois constater, madame la secrétaire d'Etat, que vous avez tenu parole,
puisque le gage a été levé sur un amendement allant en ce sens et adopté par
l'Assemblée nationale, voilà quelques jours, lors de la discussion du projet de
loi de finances rectificative.
Je dois vous féliciter d'avoir tenu cet engagement et d'avoir ainsi montré la
volonté du Gouvernement d'améliorer sensiblement la situation souvent difficile
des personnes handicapées ou dépendantes dans notre pays.
Ainsi, le dispositif qui nous est soumis a le mérite de traiter de manière
plus équitable les couples, dans la mesure où la réduction s'appréciera en
fonction du nombre de personnes hébergées et non plus du foyer fiscal.
Le groupe socialiste souhaite néanmoins, par cet amendement n° 63, aller un
peu plus loin. En effet, le plafond actuel de 15 000 francs nous paraît être
souvent trop en décalage avec la situation sociale et financière réelle des
personnes concernées. Les coûts d'hébergement et l'ensemble des dépenses
annexes, notamment en Ile-de-France, représentent un montant bien supérieur.
C'est pourquoi nous proposons de porter le plafond de réduction d'impôt à 50 %
dans la limite de 30 000 francs des sommes versées. Cette évolution nous paraît
répondre de manière responsable à une nécessité sociale élémentaire sans pour
autant être excessive.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 19 et
donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 63.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Mes chers collègues, ces deux amendements vont dans
le même sens, mais pas tout à fait au même rythme.
Je rappelle, tout d'abord, que l'article 17 A améliore sensiblement les
avantages fiscaux dont bénéficient les personnes hébergées en établissement de
cure ou de long séjour en étendant le bénéfice de la réduction à chaque
personne hébergée, ce qui doit améliorer la situation des couples, et en
étendant par ailleurs le bénéfice de cette réduction aux personnes hébergées
dans les établissements agréés au titre de la prestation spécifique dépendance.
Cependant, l'article 17 A est muet sur le sujet qui avait préoccupé le Sénat le
24 novembre dernier lors de l'examen de la première partie du projet de loi de
finances pour 2001, c'est-à-dire le montant de cette réduction.
Notre collègue M. Jean Chérioux, rejoint lors de cette séance par MM. Jean
Arthuis et Philippe Nogrix ainsi que par M. Bernard Angels, avait interpellé le
Gouvernement sur l'insuffisance de l'avantage fiscal, 3 750 francs, comparé aux
frais très importants supportés par les personnes hébergées pendant une très
longue durée.
L'amendement n° 19 de la commission a donc pour objet de porter à 45 000
francs par personne le plafond de dépenses auquel pourrait s'appliquer la
réduction d'impôt pour frais d'hébergement et de cure médicale, ce qui
procurerait, je le souligne, un avantage fiscal maximum de 11 250 francs.
Il s'agit, mes chers collègues, de reprendre à un niveau qui nous semble
équitable et adapté aux problèmes effectivement rencontrés, notamment par les
classes moyennes, le vote qui avait été émis le 24 novembre par notre Haute
Assemblée.
S'agissant de l'amendement n° 63 de M. Bernard Angels, il prévoit un
dispositif qui repose sur le même esprit mais qui nous semble un peu court.
Cela dit, madame le secrétaire d'Etat, nous serons très attentifs à vos
réponses sur les amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 63 et n° 19 ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Lors de la discussion générale, j'ai salué la
mobilisation du Sénat, sur l'ensemble des bancs, à propos de cette question de
la fiscalité applicable aux personnes hébergées en établissements de long
séjour.
Comme l'ont rappelé M. Angels et M. le rapporteur général à l'instant, j'ai
tenu parole, au nom du Gouvernement, lors du débat à l'Assemblée nationale,
encouragée en quelque sorte par les propos qui avaient été échangés dans cet
hémicycle.
Le dispositif a deux conséquences principales. La première, c'est que, dès
l'imposition des revenus de l'année 2000, le plafond des dépenses qui ouvre
droit à la réduction d'impôts s'appréciera par personne hébergée et non plus
par foyer fiscal comme c'est le cas actuellement. Cela permettra de prendre en
compte de manière plus juste la situation des couples dans lesquels les deux
conjoints sont hébergés dans un établissement qui est éligible à l'avantage
fiscal. C'est donc une mesure de justice qui a été ainsi retenue.
La seconde conséquence, c'est que le bénéfice de la réduction d'impôt sera
accordé à tous les résidents qui sont accueillis dans un établissement
pratiquant la nouvelle tarification des prestations fournies dans les
établissements pour personnes âgées, conformément à une loi du 24 janvier 1997.
A terme, lorsque tous les établissements hébergeant des personnes âgées
dépendantes appliqueront ces nouvelles règles, ce sont environ 650 000
personnes dépendantes qui entreront dans le champ d'application de cet avantage
fiscal au lieu de moins de 200 000 actuellement.
Bien sûr, ce dispositif ne constitue qu'un élément de la prise en compte du
coût de la dépense qui, en effet, constitue un problème majeur de santé
publique et que la fiscalité ne saurait résoudre à elle seule. C'est pourquoi
ce dispositif s'insère dans le cadre d'une réforme beaucoup plus ambitieuse des
modalités de prise en charge des personnes dépendantes qui fera prochainement
l'objet d'un débat au Parlement puisque le Gouvernement, qui travaille en ce
moment même à cette réforme, vous soumettra un projet de loi au premier
semestre de l'année prochaine.
Pour toutes ces raisons, je souhaiterais le retrait de ces amendements que
j'entends comme des amendements d'appel en quelque sorte. Il me semble en effet
que, si la fiscalité peut beaucoup de choses, elle ne peut pas tout et que ce
qu'elle peut faire doit être considéré à l'intérieur d'un ensemble. Or cet
ensemble a vocation à évoluer dans les mois qui viennent.
Je souhaiterais donc que nous puissions reconsidérer d'éventuelles avancées
supplémentaires en fonction de la manière dont le cadre global évoluera
lui-même.
M. le président.
Monsieur Angels, l'amendement n° 63 est-il maintenu ?
M. Bernard Angels.
Je vais retirer cet amendement, mais nous ferons le point dans quelques mois,
après que le Gouvernement, comme vous vous y êtes engagée, madame le secrétaire
d'Etat, aura présenté son projet. Je crains en effet que cette mesure ne soit
insuffisante pour remédier aux difficultés que nous rencontrons, au moins en
Ile-de-France, compte tenu des prix pratiqués.
M. le président.
L'amendement n° 63 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 19.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je suis étonné de la mauvaise volonté dont a fait preuve l'Assemblée nationale
à l'égard de cette proposition qui avait été votée par le Sénat sur mon
initiative. C'était une mesure d'équité.
Je sais bien qu'elle provenait des bancs de l'opposition nationale qui, par
définition, ne peut pas être généreuse et, en tout cas, pas aussi généreuse que
les membres de la majorité plurielle. Les personnes âgées apprécieront !
C'était une mesure d'équité car ce que j'avais proposé à l'époque, et que le
Sénat avait voté, c'était l'extension d'un système qui existe déjà pour les
personnes âgées à domicile. Ces dernières peuvent déduire de leurs impôts 50 %
des dépenses, à concurrence de 45 000 francs. La déduction que j'avais
proposée, qui était seulement de 25 %, car il faut tenir compte de
l'hébergement et des dépenses relevant de la dépendance, était cohérente.
Mme le secrétaire d'Etat dit que le Gouvernement a une vision beaucoup plus
ambitieuse et je voudrais bien savoir de quoi il s'agit. Je constate que, pour
le moment, on nous fait des promesses mais - un tiens vaut mieux que deux tu
l'auras - je préférerais de loin que, dès maintenant, on appliquât ce système,
parce que, indiscutablement, les personnes âgées concernées sont confrontées à
une situation financière très difficile.
Comme les dépenses ne sont déductibles que jusqu'à 3 750 francs et que le coût
journalier d'hébergement est de l'ordre d'au moins 300 francs, le conjoint qui
reste à son domicile n'a pratiquement plus rien pour vivre. Avec une retraite
de 25 000 à 30 000 francs par mois, c'est tout juste s'il reste le SMIC au
malheureux conjoint qui demeure seul !
(Exclamations sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées
socialistes.)
Je voudrais enfin poser une question pour le cas où Mme le secrétaire d'Etat
et sa majorité à l'Assemblée nationale ne suivraient pas le Sénat, ce en quoi
elles auraient tort. Madame le secrétaire d'Etat, pour le moment, on
n'appliquera les déductions qu'aux personnes hébergées dans les établissements
qui répondent à la loi de 1997, quelle sera donc la situation des personnes
âgées qui sont dans des établissements de long séjour à caractère hospitalier
?
J'aimerais connaître votre réponse quel que soit le sort réservé à notre
amendement. Mais on peut toujours espérer, en cette période de Noël, un peu de
générosité de la part de la majorité plurielle !
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bonne question !
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je voudrais dire à M. Chérioux que je comprends
parfaitement la passion qui l'anime sur un sujet aussi important que celui de
la prise en charge des personnes âgées dépendantes. Je regrette simplement
qu'il n'ait pas pu entendre, lors de la discussion générale, l'hommage que
j'avais rendu à l'initiative qui a été la sienne et qui a été fort utile. Elle
a permis notamment d'aboutir au résultat auquel nous aboutissons aujourd'hui,
qui est une étape, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, puisque le
Gouvernement est ambitieux s'agissant de ce problème de société et de santé
publique.
Je veux par ailleurs, pour répondre à votre question, confirmer que les
personnes qui sont hébergées dans des établissements à caractère hospitalier
entrent dans le champ de la mesure.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17 A, ainsi modifié.
(L'article 17 A est adopté.)
Article 17