SEANCE DU 18 DECEMBRE 2000


M. le président. « Art. 1er. - I. - Le h du 1 de l'article 266 et l'article 273 ter du code général des impôts sont abrogés à compter du 1er janvier 2001.
« II. - A l'article 257 du code général des impôts, il est inséré un 7° ter ainsi rédigé :
« 7° ter Les livraisons à soi-même d'ouvrages de circulation routière donnant lieu à la perception de péages soumis à la taxe sur la valeur ajoutée ; »
« III. - L'article 266 du code général des impôts est complété par un 7 ainsi rédigé :
« 7. En ce qui concerne les livraisons à soi-même d'ouvrages de circulation routière visées au 7° ter de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est assise sur le prix de revient total des ouvrages. »
« IV. - L'article 269 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le 1 est complété par un e ainsi rédigé :
« e. pour les livraisons à soi-même mentionnées au 7° ter de l'article 257, au moment de la mise en service. » ;
« 2° Au a du 2, les mots : " b, c et d du 1" sont remplacés par les mots : " b, c, d et e du 1".
« V. - L'article 270 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Les dispositions actuelles deviennent le I de cet article ;
« 2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. - La liquidation de la taxe exigible au titre des livraisons à soi-même mentionnées au 7° ter de l'article 257 peut être effectuée jusqu'au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle au cours de laquelle est intervenue la mise en service des ouvrages concernés, lorsque les éléments constitutifs du prix de revient de ces ouvrages ne sont pas tous déterminés à la date de mise en service.
« La mise est service est, en tout état de cause, déclarée à l'administration dans un délai d'un mois. »
« VI. - Les dispositions des II, III, IV et V sont applicables aux ouvrages mis en service à compter du 12 septembre 2000.
« VII. - Les exploitants d'ouvrages de circulation routière dont les péages sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée peuvent formuler des réclamations contentieuses tendant à l'exercice du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant, le cas échéant, grevé à titre définitif les travaux de construction et de grosses réparations qu'ils ont réalisés à compter du 1er janvier 1996 au titre d'ouvrages mis en service avant le 12 septembre 2000.
« Le montant restitué est égal à l'excédent de la taxe sur la valeur ajoutée qui a ainsi grevé les travaux sur la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux péages qui n'a pas été acquittée du 1er janvier 1996 au 11 septembre 2000.
« VIII. - Chaque bien d'investissement ouvrant droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions prévues au VII est inscrit dans la comptabilité de l'entreprise pour son prix d'achat ou de revient diminué d'une quote-part du montant restitué. Cette quote-part est déterminée en appliquant au montant restitué le rapport entre le prix d'achat ou de revient du bien hors taxe sur la valeur ajoutée et le prix d'achat ou de revient hors taxe sur la valeur ajoutée de l'ensemble des biens retenus pour le calcul de cette restitution.
« La quote-part définie à l'alinéa précédent est limitée à la valeur nette comptable du bien auquel elle s'applique. L'excédent éventuel est compris dans les produits exceptionnels de l'exercice en cours à la date de la restitution.
« L'amortissement de chaque bien d'investissement est, pour l'assiette de l'impôt sur les bénéfices, calculé sur la base du prix de revienr diminué dans les conditions prévues au premier alinéa. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet article, particulièrement important, redéfinit le régime de TVA applicable aux exploitants d'ouvrages de circulation routière à péage, et notamment le régime fiscal applicable aux autoroutes à péage.
Il convient de rappeler que la France a été condamnée, le 12 septembre dernier, par la Cour de justice des Communautés européennes pour manquement à ses obligations communautaires. Nous aurions dû, en effet, appliquer la TVA sur les péages autoroutiers depuis l'entrée en vigueur de la sixième directive TVA, c'est-à-dire dès 1977.
La France a attendu d'être condamnée, puisque la procédure tendant à l'application de la directive avait été lancée par la Commission européenne dès 1984. Il faut donc à présent tirer toutes les conséquences de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, même si, bien sûr, nous ne pouvons que regretter rétrospectivement l'attentisme des gouvernements successifs sur ce difficile sujet.
Si, pour l'avenir, le dispositif qui nous est proposé paraît conforme au droit communautaire, en revanche, en ce qui concerne le passé, nous ne pouvons souscrire à ces propositions, qui ne semblent conformes ni au droit européen ni même aux principes généraux de notre droit interne.
Vos propositions, madame le secrétaire d'Etat, semblent dictées par le seul souci - que l'on peut comprendre - de limiter les incidences budgétaires de la condamnation de la France, alors que nous étions capables depuis longtemps de prendre des mesures susceptibles de limiter de telles incidences.
En choisissant la voie d'une compensation entre la TVA à déduire sur les travaux de construction et la TVA qui aurait dû être collectée, le Gouvernement entend faire payer aux sociétés d'autoroutes un manquement dont il est seul responsable. Et, quand je dis le Gouvernement, c'est le Gouvernement dans tous ses avatars successifs !
Les sociétés d'autoroutes réclament l'application du régime dit des crédits de départ, qui est conforme à l'article 20 de la sixième directive communautaire.
Le Gouvernement refuse cette position, sous prétexte que les sociétés ne seraient pas nouvellement assujetties à la TVA. Ce point est très discutable !
Qu'en résulte-t-il ?
Un dispositif de déduction de TVA pour les ouvrages mis en service avant le 12 septembre 2000, qui ne concernerait que deux sociétés d'autoroute, pour un montant global d'un peu moins de 1 milliard de francs, alors même que ce sont bien toutes les sociétés d'autoroutes qui vont devoir appliquer à partir du 1er janvier 2001 la TVA sur leurs ouvrages.
D'un côté, il y aura application de la TVA, et, de l'autre, quasiment pas de droit à déduction sur l'immense majorité des travaux de construction.
Dans ces conditions, je pose la question : quelle est la logique d'un tel système qui compense, sur une même période, la TVA déductible sur les travaux et la TVA collectée sur des péages pour des ouvrages dont les travaux n'ont pas donné lieu à déduction ?
Selon la commission, les risques sont grands de voir se créer des inégalités entre les sociétés d'autoroutes selon la date de mise en service de leur ouvrage !
Par ailleurs, le Gouvernement a pris une initiative unilatérale : les tarifs pratiqués pour les véhicules légers n'augmenteront pas en 2001, malgré l'application de la TVA à 19,6 % sur les péages.
Pour certaines sociétés, dont le trafic est majoritairement, voire exclusivement constitué de véhicules légers - nous en reparlerons tout à l'heure - cette mesure est particulièrement catastrophique.
Madame le secrétaire d'Etat, que compte faire le Gouvernement ? Quelles sont les mesures de compensation envisagées ?
Le Parlement, dans cette affaire, se trouve dans une position bien minorée par rapport, mes chers collègues, à ce que devrait être son rôle. Hier, on nous a demandé d'autoriser, par voie d'ordonnance, l'allongement des durées de concession des sociétés d'autoroutes pour améliorer leurs perspectives financières, en particulier leurs perspectives de désendettement. Aujourd'hui, on prend des mesures, au détour du collectif budgétaire, qui vont structurellement dégrader leurs comptes.
Madame le secrétaire d'Etat, où est la logique de ces positions successives ? On nous avait annoncé que la réforme des sociétés d'autoroute leur permettrait de dégager des excédents pour alimenter les subventions nécessaires aux nouvelles concessions. Or, d'après nos informations, une des premières conséquences de la réforme qui nous est proposée serait de faire payer à une société d'autoroute l'équivalent de 90 % de son chiffre d'affaires en impôt sur les sociétés dès 2001, ce qui l'obligerait à des emprunts considérables.
Sur ces trois questions - la déduction de la TVA sur les travaux de construction, la compensation pour la stabilité des tarifs en 2001, et les intentions du Gouvernement quant à un réel désendettement des concessionnaires - il faut absolument que le Gouvernement nous donne des explications.
Je rappelle que notre commission des finances a adopté un amendement à l'article 1er, visant à supprimer les modalités proposées par le Gouvernement pour l'apurement du passé. Dans quelques instants, mes chers collègues, je vous inviterai à bien vouloir l'adopter !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous allons inévitablement consacrer un peu de temps à cette question puisque, depuis de nombreuses années, les gouvernements successifs - celui-ci autant que les autres, et même parfois plus, à entendre M. Gayssot - se plaignent de ce que les sociétés autoroutières n'ont pas les moyens de réaliser les infrastructures autoroutières que les Français attendent.
Et voilà qu'aujourd'hui nous apprenons - non : nous constatons - les raisons pour lesquelles les sociétés autoroutières n'ont pas les moyens d'agir : c'est tout simplement parce que le Gouvernement les ponctionne. Hélas ! madame le secrétaire d'Etat, vous n'êtes pas la première, d'autres gouvernements, d'autres sensibilités, ont dû subir de la part de la commission des finances du Sénat les mêmes reproches.
Ce que le gouvernement de la France fait à l'endroit de son dispositif autoroutier est intolérable. Il s'agit là d'une forme de laxisme qui pourrait s'apparenter à une forme de scandale, parce qu'on utilise des instruments financiers créés par l'Etat, c'est-à-dire des sociétés d'économie mixte, pour réaliser des opérations essentielles pour notre pays, à savoir des infrastructures de développement économique - des autoroutes en l'occurrence - et on en profite pour les ponctionner fiscalement dans des conditions que n'importe quel contribuable de droit commun n'accepterait jamais.
On l'a fait depuis tant d'années que la Commission européenne, depuis 1984, a rappelé à l'ordre le gouvernement de la France.
Ce gouvernement est-il pire que les autres ? Je n'oserai même pas le dire, mais c'est lui qui, pour l'instant, tient les comptes de notre pays. Or il a accepté d'être condamné par la Cour de justice des Communautés européennes.
La commission des finances, qui est dotée en la matière des prérogatives d'une commission d'enquête, l'a rappelé à l'ancien directeur du Trésor, M. Jean Lemierre, comme au nouveau directeur, M. Jean-Pierre Jouyet : « Ce que vous faites et ce que vous laissez faire à l'égard des autoroutes n'est pas acceptable ; vous allez être condamné, le 12 septembre prochain, par la Cour de justice des Commissions européennes ; que faites-vous ? » Nous étions alors au mois de juillet. Mais rien ne s'est passé !
Madame le secrétaire d'Etat, ce n'est pas le Gouvernement que vous avez laissé condamner, c'est la France ! Ce n'est pas le Gouvernement que vous avez fait condamner, ce sont les Français !
M. Michel Charasse. La Cour de cassation s'en moque !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Nous parlons de la Cour de justice des Communautés européennes, pour l'instant !
Quoi qu'il en soit, madame le secrétaire d'Etat, si vous utilisez les décisions de la Cour de justice des Communautés européennes pour gérer les relations fiscales entre l'Etat et les sociétés autoroutières, ne comptez pas sur le Sénat pour vous prêter la main ! Ce que vous proposez là vise à tordre le droit pour que, lorsque les sociétés autoroutières - comme elles le feront, comme je souhaite qu'elles le fassent -, vous traîneront à nouveau devant la Cour de justice, la décision du Parlement français puisse, éventuellement, réduire leurs droits de justiciables.
Ne le faisons surtout pas ! Laissons à ces sociétés autoroutières tous les éléments de leur défense afin qu'elles puissent à nouveau faire condamner le gouvernement français pour les pratiques qui sont les siennes, parce qu'elles sont inacceptables.
M. Michel Charasse. Ce sont les Français qui sont condamnés !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Monsieur Charasse, vous avez la chance de représenter ici un département qui a été doté de nombreuses infrastructures autoroutières.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'autoroute des présidents !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Mais ce n'est pas le cas du mien, et les habitants de l'Orne, que je représente ici, sont fatigués, lassés, indignés d'entendre les ministres de l'équipement successifs venir leur dire qu'ils ont trouvé que la situation financière des sociétés autoroutières était intenable, alors que le Gouvernement, aujourd'hui, continue à aggraver leur situation. Mais quand cesserons-nous ce ballet insupportable ?
Madame le secrétaire d'Etat, nous nous exprimons pour l'instant sur l'article 1er et nous n'avons pas encore commencé la discussion des amendements ; mais vous n'allez pas passer un bon moment sur cet article...
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Nous essayerons quand même !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. ... car l'exécutif - ce gouvernement comme les précédents gouvernements - s'est moqué du monde, de ce point de vue : il s'est moqué des Français, il s'est moqué de tous ceux qui attendent des infrastructures autoroutières dans leur département.
En tout cas, je recommanderai au Sénat de ne pas introduire dans la norme fiscale française des dispositions empêchant les sociétés autoroutières de se défendre ; non pas que nous souhaitions avantager ces dernières ; mais nous voulons qu'elles puissent réaliser des infrastructures autoroutières sur le territoire de la France, en particulier là où l'équilibre financier des tronçons autoroutiers n'est pas garanti.
Que s'est-il passé ? Vous avez, avec des méthodes que nous n'avons d'ailleurs pas appréciées - Denis Badré, ici présent, peut en témoigner -, tordu le bras du Parlement pour transposer la directive européenne par voie d'ordonnance.
M. Denis Badré. Triste souvenir !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Effectivement ! La réforme proposée nous a été présentée comme permettant aux sociétés autoroutières d'obtenir des résultats pour verser des dividendes et de l'impôt sur les sociétés à l'Etat, et pour permettre ainsi à ce dernier, en contrepartie, de verser des subventions en vue de réalisation de nouvelles liaisons autoroutières.
Mais si les sociétés autoroutières sont pénalisées, comme M. le rapporteur général vient de nous l'expliquer, elles n'auront plus de résultats leur permettant de financer les investissements à venir. Et puis le ministre de l'équipement succédera au ministre du budget...
M. Michel Charasse. Ça, ce n'est pas possible !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. ... et viendra nous dire, à ce banc, que nos demandes ne peuvent être satisfaites.

Madame la secrétaire d'Etat, votre copie n'est pas bonne. Pis, elle se moque des Français ; certains d'entre eux commencent d'ailleurs à comprendre que, une fois les bornes franchies, il n'y a plus de limite ! Se moquer du monde, comme le Gouvernement le fait, ne peut plus être acceptable ! En tout cas, vous ne tirerez pas du Sénat le moindre dispositif empêchant les sociétés autoroutières de se défendre devant la Cour de justice des Communautés européennes, où elles vous traîneront, je le souhaite.
Monsieur le rapporteur général, je vous adresse une supplique : si, véritablement, après que le Sénat, comme je le souhaite, aura rejeté ce dispositif, nous ne percevions pas, de la part de nos collègues de l'Assemblée nationale, une écoute attentive sur ce sujet, cela justifierait, à mon avis, que nous procédions à une lecture nouvelle approfondie de ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je savais que cet article intéresserait beaucoup le Sénat, et je n'ai jamais eu le sentiment, monsieur le président de la commission, de passer de mauvais moments dans cette assemblée. (Sourires.) Je tiens à vous le dire, mais ce n'est pas une incitation à ce que vous m'en fassiez passer de moins bons que précédemment ! (Nouveaux sourires.)
Vous avez dit que nous avons fait condamner la France. Vous comprenez bien qu'une phrase pareille ne puisse me laisser indifférente. Toutefois, nous avons été condamnés avec la Grande-Bretagne, avec l'Irlande, avec les Pays-Bas, avec la Grèce. Malheureusement, dirais-je, nous ne sommes pas les seuls à avoir été condamnés, et ceux qui ne l'ont pas été sont susceptibles de l'être bientôt - disant cela, je pense à l'Italie et à l'Espagne, pays vis-à-vis desquels une procédure a également été engagée.
La Cour de justice n'a fait que partiellement droit aux prétentions de la Commission, et elle l'a blâmée notamment pour les délais qu'elle avait mis à conduire sa procédure à notre encontre. En ces domaines, je ne crois donc pas pouvoir recevoir la critique que vous venez de formuler à l'endroit du Gouvernement sur la façon de ce dernier de défendre les intérêts du pays.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Nous avons des procès-verbaux qui jouent pour nous !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. En ce qui concerne la question générale qui nous est posée, vous avez dit que les décisions prises par le Gouvernement ne respectent pas le droit en matière de mise en oeuvre du nouveau régime de TVA.
Je voudrais d'abord préciser que non seulement ces décisions respectent le droit, mais que, de plus, elles ont été longuement concertées avec les sociétés intéressées.
Ensuite, revenons un instant sur l'origine de tout cela : nous sommes en train de débattre aujourd'hui des questions de TVA. Ce point s'inscrit dans un cadre plus général, celui de la condamnation de l'ensemble de notre système de financement autoroutier, et notamment de sa caractéristique principale qui était celle de l'adossement - contrepartie du financement extrabudgétaire - des durées de concessions, qui étaient allongées en conséquence.
N'oublions pas que notre débat d'aujourd'hui trouve sa cause dans la condamnation tant par la Commission que par le Conseil d'Etat du système de l'adossement.
N'oublions pas non plus que notre objectif est de faire en sorte que ce système de financement autoroutier soit désormais conforme au droit et, surtout, n'implique pas l'arrêt des programmes d'investissements en cours ni des programmes d'investissements futurs.
Je disais à l'instant que ce nouveau régime de TVA est respectueux du droit. Ce dispositif a également pour caractéristiques d'être neutre pour les usagers et de rechercher l'équilibre économique et financier des concessions, ce qui veut dire que, par a contrario, nous souhaitons éviter que les concessionnaires ne bénéficient d'un enrichissement sans cause.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, et M. Philippe Marini, rapporteur général. Ah ! ça...
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Comment avons-nous appliqué ces principes ? Je vais tâcher de vous l'expliquer.
Tout d'abord, la TVA de droit commun a un impact sur le chiffre d'affaires hors taxes des sociétés, et cet impact évolue dans le temps. Si cet impact est, il est vrai, négatif à court terme, il ne l'est pas dans le long terme.
Les utilisateurs de véhicules légers paieront, après le 1er janvier 2001, le même montant pour le même service que précédemment. Il en résulte donc une perte de chiffre d'affaires pour les sociétés concessionnaires sur ces catégories et donc, à l'inverse, un gain pour les assujettis qui sont utilisateurs de véhicules légers.
Pour les poids lourds, le principe de la neutralité a été retenu puisque l'augmentation des péages au 1er janvier se fait à hauteur du taux de TVA, laquelle est ensuite récupérée. L'opération est donc neutre pour l'usager, et représente un gain pour les sociétés concessionnaires.
Au total, le chiffre d'affaires hors taxes de la majorité des groupes autoroutiers devrait, dès 2002, retrouver le niveau observé en 2000. Cela signifie que, à long terme, les sociétés réaliseront un gain, même si, à court terme, elles pourront subir une perte liée à l'effet que je décrivais tout à l'heure concernant les utilisateurs de véhicules légers.
En second lieu, les concessionnaires récupèrent de la TVA sur les dépenses de construction, et cet impact pour les sociétés est systématiquement positif.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais il est très inégal !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Cette récupération porte, selon les modalités qui sont détaillées dans le projet de loi de finances rectificative, sur les dépenses passées, mais aussi, naturellement, sur les dépenses de construction à compter du 1er janvier 2001. En 2001, ces récupérations dépasseront 1,5 milliard de francs.
J'analyse ce changement de régime fiscal comme l'application d'un traitement équilibré pour les sociétés concessionnaires. En effet, elles subiront, en 2001, non pas plusieurs milliards de francs de pertes mais tout au plus quelques dizaines de millions de francs, qui seront très largement compensés sur le moyen terme.
La réforme autoroutière a fait l'objet d'une négociation pied à pied avec la Commission européenne, et vous avez longuement débattu de ce point avec M. Gayssot. Je sais que le Sénat s'interroge - vous venez encore de le faire à l'instant - sur les intentions du Gouvernement en matière d'impôt sur les sociétés et d'impôt sur les dividendes.
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, la situation de chaque société est particulière en raison du montant des charges différées qui leur est propre et qui est assez différent d'une société à l'autre, et en fonction du montant des déficits, reportables, qu'elles connaissent. Une ou plusieurs sociétés pourront se retrouver en situation de devoir acquitter l'impôt sur les sociétés en 2001 au titre du résultat exceptionnel lié au retraitement comptable.
Comme vous, monsieur le président de la commission, le Gouvernement est soucieux de préserver, selon les mêmes principes d'équilibre, la capacité d'investissement et le potentiel d'endettement des sociétés. Ainsi, chaque situation sera analysée au regard de ces principes, quitte à prévoir, selon les possibilités générales prévues par la loi, des modalités particulières de paiement de l'impôt.
En ce qui concerne les dividendes, et pour répondre aux interrogations de M. le rapporteur général, je ne peux que répéter les termes du ministre de l'équipement : oui, les dividendes versés par les SEMCA à leurs actionnaires, au premier rang desquels l'Etat, pourront être utilisés pour le développement des infrastructures, notamment pour le développement des nouvelles concessions autoroutières telles que l'A 28, chère au président de la commission des finances, et d'autres.
Oui - et cet exemple le prouve - il demeure des projets à conduire en matière d'investissements, notamment d'investissements autoroutiers. Je crois sincèrement que l'ensemble de la réforme permettra de satisfaire à ces besoins.
L'article 1er du projet de loi de finances rectificative ne remet donc pas en cause les engagements que mes collègues, en particulier le ministre de l'équipement, ont pris à votre endroit.
M. le président. Par amendement n° 69, MM. Gaudin, Vallet et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent :
A. - De rédiger ainsi les paragraphes I à VI de l'article 1er :
« I. - Le h du 1 de l'article 266 et l'article 273 ter du code général des impôts sont abrogés à compter du 1er janvier 2001 en tant qu'ils concernent les concessionnaires de voiries routières concédées par l'Etat.
« II. - A l'article 257 du code général des impôts, il est inséré un 7° ter ainsi rédigé :
« 7° ter les livraisons à soi-même de voiries routières concédées par l'Etat donnant lieu à la perception de péages soumis à la taxe à la valeur ajoutée ; »
« III. - L'article 266 du code général des impôts est complété par un 7 ainsi rédigé :
« 7. En ce qui concerne les livraisons à soi-même de voiries routières concédées par l'Etat visées au 7° ter de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est assise sur le prix de revient total des ouvrages. »
« IV. - L'article 269 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le I est complété par un e ainsi rédigé :
« e. Pour les livraisons à soi-même mentionnées au 7° ter de l'article 257, au moment de la mise en service » ;
« 2° Au a du 2, les mots : " b, c et d du 1" sont remplacés par les mots : " b, c, d, et e du 1" ».
« V. - L'article 270 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Les dispositions actuelles deviennent le I de cet article ;
« 2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. - La liquidation de la taxe exigible au titre des livraisons à soi-même mentionnées au 7° ter de l'article 257 peut être effectuée jusqu'au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle au cours de laquelle est intervenue la mise en service des voiries routières concédées par l'Etat concernées, lorsque les éléments constitutifs du prix de revient de ces voiries routières concédées par l'Etat ne sont pas tous déterminés à la date de mise en service.
« La mise en service est, en tout état de cause, déclarée à l'administration dans un délai d'un mois. »
« VI. - Les dispositions des II, III, IV et V sont applicables aux voiries routières mises en service à compter du 12 septembre 2000.
B. - En conséquence, de compléter in fine l'article 1er par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... La perte de recettes résultant pour l'Etat de la limitation du champ de la TVA aux seules voiries routières concédées par l'Etat est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Clouet.
M. Jean Clouet. L'article 1er, selon l'exposé des motifs du projet de loi, a pour objet de mettre en conformité avec la sixième directive du Conseil le régime de TVA applicable aux exploitants d'ouvrages de circulation routière à péages.
Le Gouvernement prétend ainsi tirer les conséquences de l'arrêt rendu par la Cour de justice des communautés européennes le 12 septembre 2000.
Or, contrairement à l'objectif affiché dans cette présentation, l'article 1er du projet de loi en discussion ne s'en tient pas aux termes mêmes de l'arrêt rendu par la Cour de justice. En effet, la Cour de justice considère que la République française a enfreint la sixième directive du 17 mai 1977 en ne soumettant pas à la taxe sur la valeur ajoutée les péages d'autoroutes perçus en contrepartie du service rendu aux usagers, en cas de concession par l'Etat.
C'est en interprétant strictement la règle du non-assujettissement des organismes de droit public à la TVA que la Cour de justice a jugé que l'activité ou les opérations en cause exercées dans le cadre d'un régime de concessions conférées par l'Etat doivent être soumises à la TVA. Ne sont pas, en revanche, assujetties à la TVA l'activité ou les opérations considérées accomplies par les organismes agissant en tant qu'autorités publiques.
En conséquence, et aux fins de conformer strictement l'article 1er à l'arrêt de la Cour de justice, il convient, d'une part, de préciser la portée de la mesure d'abrogation prévue au I de l'article et, d'autre part, de substituer à l'expression « ouvrages de circulation routière » celle de « voiries routières concédées par l'Etat » dans le libellé et le corps de l'article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement pose un problème extrêmement important, à savoir l'incidence des nouvelles dispositions sur le fonctionnement de certaines grandes infrastructures urbaines qui ont été financées en partenariat avec le secteur privé et dont la gestion ne peut s'équilibrer que par la perception d'un péage.
Je crois savoir, monsieur le président, que c'est notamment le cas...
M. le président. A Marseille !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... du tunnel du Prado-Carénage, à Marseille, ouvrage qui a marqué la ville que vous administrez.
M. Michel Charasse. Eh bien ! On en apprend de belles...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le trafic sous ce tunnel est exclusivement constitué de véhicules légers, et la difficulté tient à la décision du Gouvernement, tout à fait compréhensible au demeurant, de ne pas relever les tarifs s'appliquant aux usagers, alors que, dans le même temps, les sociétés concessionnaires ne recevront aucune compensation au titre de la TVA dont elles sont dorénavant redevables.
Madame le secrétaire d'Etat, il est donc indispensable que des remèdes adaptés soient trouvés afin d'éviter que cet effet de ciseaux ne soit trop défavorable à l'exploitation et à la gestion de tels ouvrages, dont les plans de financement ont été établis sur de longues durées et eu égard à un certain contexte économique, fiscal et financier que les dispositions concernant l'assujettissement à la TVA pourraient gravement perturber.
Cela étant, j'ai cru comprendre, monsieur le président, que cet amendement représentait, dans un premier temps et surtout, un appel lancé au Gouvernement pour que celui-ci nous apporte des éléments d'analyse et, je l'espère, des assurances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je reconnais bien volontiers que cet amendement pose une question intéressante.
Cependant, je ne crois pas qu'il puisse être adopté dans sa rédaction actuelle, car celle-ci semble tirer pour conséquence de la décision de la Cour de justice en date du 12 septembre 2000 que son application doit être limitée aux seuls ouvrages qui seraient concédés par d'autres personnes publiques que l'Etat. Or, la rédaction est claire : il s'agit de toutes les concessions, sans qu'il soit fait de distinction entre les collectivités publiques.
Par conséquent, s'agissant du tunnel du Prado-Carénage, soyez assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement connaît les difficultés particulières liées à ce changement de régime de la TVA et qu'il étudie les conséquences que celui-ci est susceptible d'entraîner, tant pour la société que pour l'autorité concédante, en l'occurrence la ville de Marseille.
Je crois, monsieur le maire - s'il m'est permis de vous appeler ainsi dans cette enceinte, monsieur le président ! - que vous avez reçu deux courriers en provenance de Bercy rappelant les engagements que je viens d'énoncer ici même, selon lesquels nous examinerons de manière très précise les conséquences du nouveau dispositif et les moyens de remédier aux difficultés que son application pourrait engendrer.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Compte tenu des explications qui viennent d'être données et de l'engagement qui a été pris par le Gouvernement de rechercher une solution équitable, peut-être les auteurs de l'amendement estimeront-ils opportun de retirer celui-ci ?
M. le président. Monsieur Clouet, l'amendement n° 69 est-il maintenu ?
M. Jean Clouet. Nous le retirons, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 69 est retiré.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Quelle sagesse ! (Sourires.)
M. le président. Par amendement n° 9, M. Marini, au nom de la commission, propose de supprimer les paragraphes VII et VIII de l'article 1er.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances estime qu'il n'est pas opportun de prendre des mesures législatives spécifiques pour limiter les conditions de remboursement de crédits de TVA aux sociétés concessionnaires d'autoroutes. C'est pourquoi nous proposons, par cet amendement, la suppression des paragraphes VII et VIII de l'article 1er.
Selon nous, les modalités envisagées sont trop restrictives et visent, en particulier, à empêcher les sociétés d'autoroutes de bénéficier d'un régime déjà en vigueur et auquel elles me semblent devoir avoir accès, à savoir le régime dit des « crédits de départ ». Restreindre les droits à déduction des sociétés d'autoroutes nés de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes en date du 12 septembre 2000 nous semble contraire au droit communautaire, qui interdit explicitement de prendre des mesures législatives pour limiter les conséquences d'un arrêt de ladite Cour de justice.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. En principe, si l'on voulait tirer toutes les conséquences de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes en date du 12 septembre 2000, il faudrait replacer tous les concessionnaires dans la situation qui aurait dû être la leur, c'est-à-dire leur demander d'acquitter la totalité de la TVA afférente aux péages encaissés dans le passé et, en contrepartie, leur ouvrir un droit à déduction au titre des investissements qu'elles ont réalisés.
Toutefois, les concessionnaires n'ont fait qu'appliquer, en matière de TVA, les règles qui leur étaient fixées par le législateur, et le principe de sécurité juridique conduit donc à ne pas les obliger à reconstituer leur situation au regard de la TVA.
Dans ces conditions, le paragraphe VII du présent article a pour objet de laisser la faculté aux concessionnaires de reconstituer ou non leur situation passée. Bien entendu, il sera recouru à cette faculté en fonction des intérêts financiers correspondants : seules les sociétés qui y ont intérêt le feront. Pour ces dernières, le dispositif proposé par le Gouvernement consiste à remonter jusqu'au 1er janvier de la quatrième année précédant celle au cours de laquelle l'arrêt est intervenu, c'est-à-dire jusqu'au 1er janvier 1996. Ce délai est conforme au délai de droit commun applicable en France, lui-même conforme au droit communautaire. Le paragraphe VII de l'article 1er conforte la sécurité juridique des sociétés concessionnaires en précisant les modalités d'application, dans le cas particulier de ce litige inédit, des principes généraux relatifs à l'apurement du passé tels qu'ils sont posés tant par le droit interne que par le droit communautaire.
J'ajoute que l'ensemble du dispositif prévu à l'article 1er est particulièrement favorable aux sociétés concessionnaires et qu'il induit, pour l'Etat, un coût de plusieurs milliards de francs. Je souhaiterais donc, monsieur le rapporteur général, que, à la lumière de ces précisions, vous acceptiez de retirer l'amendement n° 9.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Chacun d'entre nous doit peser ses propos, afin que les justiciables puissent disposer d'éléments pour défendre leur juste droit.
Je rappellerai tout d'abord que, s'agissant du dispositif de l'adossement, la commission des finances n'a jamais accepté l'explication du Gouvernement. C'est la première fois que nous voyons un gouvernement s'incliner avec autant de déférence devant un avis formulé par le Conseil d'Etat alors que celui-ci siégeait en formation administrative et que la démarche engagée auprès des Communautés européennes et de la Commission et visant à la suppression de l'adossement était antérieure à l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat. Voilà une allégeance communautaire qui émeut, tant elle est empreinte d'une forte sincérité !
Je voudrais, en outre, rappeler à nos collègues qui souhaitent que des infrastructures soient réalisées dans leurs départements que Mme le secrétaire d'Etat vient de leur donner des encouragements, mais seulement des encouragements. Vous avez évoqué des dividendes qui seraient encaissés, madame le secrétaire d'Etat, mais M. Gayssot est passé avant vous,...
M. Michel Charasse. Quel pédagogue !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. ... et il nous a dit qu'il n'y a pas de liaison autoroutière à subventionner en 2001 et que, par conséquent, il n'est pas besoin d'inscrire de crédits en subventions !
Madame le secrétaire d'Etat, nous avons le sens de l'humour dans cette maison, et beaucoup de respect pour le Gouvernement mais, franchement, soutenir devant la représentation nationale qu'il n'existe pas de besoins en matière d'infrastructures autoroutières en France,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un peu fort !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. ... c'est soit vouloir alléger nos travaux, soit faire preuve d'un humour qui dépasse notre entendement. En tout cas, pour ce qui me concerne, j'ai le sentiment que le Gouvernement se moque du monde. Puisque vous avez le souci de respecter les Français, nous allons vous aider à remédier à cet état de choses.
S'agissant de l'apurement du passé, puisque telle est votre préoccupation - c'est en tout cas celle de M. le rapporteur général - les dispositions que vous nous proposez visent à limiter la portée de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes. Or, dans l'état actuel du droit, il existe des dispositions réglementaires à nos yeux plus favorables pour les sociétés et concessionnaires d'autoroutes, dispositions auxquelles celles-ci doivent pouvoir se référer.
En effet, comme le disait M. le rapporteur général, un dispositif de crédits de départ existe pour des personnes qui deviennent redevables de la TVA. Ce dispositif serait, selon notre analyse, mais peut-être nous trompons-nous, plus favorable aux sociétés autoroutières. Il semblerait que votre analyse soit différente, madame le secrétaire d'Etat, et que vous ne souhaitiez pas l'application de l'article 226 de l'annexe II du code général des impôts. On pourrait même penser que vous craignez de vous voir opposer une sorte de jurisprudence défavorable qui permettrait l'application du régime des crédits de départ et que vous préférez de beaucoup l'adoption des dispositions législatives spécifiques qui nous sont soumises aujourd'hui.
Cependant, nous ne comprenons pas, pour notre part, ce droit à déduction dont l'application serait limitée dans le temps et serait restreinte, pour certains ouvrages, à la période allant du 1er janvier 1996 au 11 septembre 2000, avec une compensation par le biais de la TVA non collectée sur la période. Nous ne comprenons pas ce qui justifie ces limites, alors que le droit commun, en la matière, doit pouvoir s'appliquer. Le Gouvernement, en quelque sorte, redoute que les sociétés d'autoroutes n'obtiennent des compensations plus importantes si des mesures législatives spécifiques ne sont pas adoptées. Nous disposons même à cet égard de chiffres que vous n'avez pas cités tout à l'heure et qui pourraient, en effet, justifier la crainte du Gouvernement.
Cela étant, le dispositif que vous présentez au Parlement, madame le secrétaire d'Etat, n'a pas de cohérence fiscale. Il est, de surcroît, complètement contraire au droit européen. Je pourrais développer ce point, mais je vous renvoie au rapport de M. Marini. Je voudrais simplement insister sur le fait qu'il n'est pas opportun, pour le Sénat, de prendre des mesures législatives spécifiques qui auraient pour effet de limiter les conditions de remboursement des crédits de TVA des sociétés autoroutières. Nous avons donc intérêt à supprimer les paragraphes VII et VIII de l'article 1er, comme nous le propose le rapporteur général.
D'ailleurs, monsieur le rapporteur général, si l'interprétation du Gouvernement ou de l'administration fiscale est juste, la suppression que vous recommandez constituera un gain fiscal pour l'Etat.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. En revanche, si c'est notre interprétation qui est conforme au droit, alors l'Etat devra restituer aux sociétés autoroutières l'ensemble des crédits de TVA qui leur reviennent. Croyez-moi, mes chers collègues, c'est là le meilleur gage d'obtenir la réalisation des infrastructures que vous attendez depuis tant d'années ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 52, M. Charasse propose de compléter l'article 1er par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Aucun intérêt de retard ni aucune pénalité fiscale ne pourront être réclamés aux contribuables visés au présent article au titre de la taxe sur la valeur ajoutée due antérieurement à la promulgation de la présente loi. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Je me demande si, à la suite du vote qui vient d'intervenir, cet amendement a encore un objet. En effet, les paragraphes VI, VII et VIII de l'article 1er prévoyaient la rétroactivité, or j'indiquais qu'en ce cas il ne faut pas demander de pénalités de retard ni d'intérêts de retard.
Le Sénat venant de supprimer la rétroactivité, cet amendement tombe, à mon avis.
Cependant, Mme la secrétaire d'Etat peut aussi nous apporter une précision à ce sujet, dans l'hypothèse où, à l'Assemblée nationale, il se relèverait après être tombé ici. (Rires.)
Mme Danielle Bidard-Reydet. Lève-toi et marche !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Dans l'hypothèse où ces dispositions seraient rétablies à l'Assemblée nationale, je puis d'ores et déjà indiquer que, en effet, aucun intérêt de retard ni aucune pénalité ne s'appliqueront lors de la mise en oeuvre du mécanisme prévu au paragraphe VII de l'article 1er du projet de loi de finances rectificative.
M. Michel Charasse. Je vous remercie de cette précision.
M. le président. L'amendement n° 52 n'a donc plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2