SEANCE DU 7 NOVEMBRE 2000
M. le président.
La parole est à M. Leclerc, auteur de la question n° 896, adressée à M. le
secrétaire d'Etat à l'industrie.
M. Dominique Leclerc.
Monsieur le secrétaire d'Etat, depuis le 1er janvier 2000, un supercarburant
est distribué en lieu et place de l'essence plombée. Il contient donc, pour
faire fonction d'antidétonant, non plus le fameux plomb tétraéthyle, mais du
potassium.
On n'a pas manqué, à l'époque, de me faire part des inquiétudes suscitées par
cette nouvelle composition, plus particulièrement par les incidences de
l'addition du potassium dans le supercarburant en termes d'environnement et de
santé publique.
J'avoue partager ces préoccupations.
En effet, le potassium contient un isotope radioactif naturel, qui émet un
rayonnement bêta et gamma lors de sa désintégration et dont on ne connaît pas
l'impact réel à long terme sur la santé de nos concitoyens.
C'est pourquoi j'avais interrogé la direction générale de l'énergie et des
matières premières à ce sujet.
Il m'a été récemment répondu que ce produit a fait l'objet de nombreux tests
et études en Autriche et en Suède et que son utilisation ne pose pas de
problème dans ces pays.
Cette réponse ne m'a pas satisfait, et c'est pourquoi je vous interroge
aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat.
D'une part, pour reprendre l'exemple suédois, on sait la préoccupation des
Suédois pour les centrales, mais je dois avouer, pour l'avoir constaté sur
place, que la radioactivité au quotidien n'est pas leur principale
préoccupation !
D'autre part, la réponse reçue ne dit rien d'études menées par des
scientifiques français qui démenteraient formellement la radioactivité
potentielle du potassium, ce que je ne m'explique pas.
En effet, la France dispose d'experts en radiation hautement qualifiés dont la
qualité des travaux est reconnue dans le monde entier, et je crois qu'il serait
facile de leur demander d'effectuer des calculs, non seulement pour déterminer
d'éventuels dommages sur l'appareil respiratoire, mais aussi pour savoir si les
résidus restent peu de temps dans l'organisme a, au contraitre, s'ils sont
susceptibles de s'y accumuler.
Ces calculs n'ont pas été effectués et vous comprendrez que je m'étonne, à
l'heure où l'on fait de la protection de la santé une priorité, que vous n'ayez
pas fait réaliser cette étude d'impact de l'utilisation du potassium, afin
d'obtenir l'absolue assurance de son innocuité.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous serais reconnaissant de
bien vouloir me rassurer, ainsi que l'ensemble de nos concitoyens, en
fournissant de véritables résultats sur les effets de ce produit, ou bien en
nous confirmant que vous envisagiez de faire procéder à des expertises en ce
sens.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat et à la consommation.
Monsieur le sénateur, vous avez rappelé
le problème posé par la toxicité des carburants et de leurs additifs destinés
aussi bien à augmenter l'indice d'octane qu'à assurer la protection des sièges
des soupapes des moteurs anciens.
Chacun s'accorde à reconnaître que le plomb est toxique, et l'on pense en
général aux effets du saturnisme sur les enfants, notamment.
Le plomb a, en effet, des propriétés neurotoxiques connues pour affecter le
développement du système nerveux des jeunes enfants. Il est par ailleurs un
poison non réversible des catalyseurs installés dans les pots catalytiques des
véhicules modernes.
La France a décidé de s'appuyer sur d'autres connaissances pour trouver un
nouvel additif qui ne présente plus la dangerosité de l'oxyde de plomb. C'est
ce dérivé du potassium, ayant les mêmes effets sur l'anti-récession des
soupapes, mais n'ayant pas d'incidences sur l'environnement, que nous pouvons
inclure dans les nouveaux carburants.
Je vous rappelle l'expérience internationale en la matière, non sans avoir
souligné que, si la recherche française n'a pas été au-delà, c'est que notre
gouvernement a suivi les recommandations faites dans le cadre européen par des
organismes dont on peut difficilement contester aujourd'hui à la fois le niveau
de recherche et la fiabilité.
Aujourd'hui, cette expérience internationale - vous avez rappelé celle de
l'Autriche, mais il y a aussi celles de la Thaïlande et de l'Allemagne -
reconnaît un avantage certain à l'utilisation d'additifs contenant du
potassium, sans effet secondaire parasite néfaste sur la santé, l'environnement
ou les équipements des moteurs. Ce type d'additif est actuellement en usage,
depuis 1990, en Autriche, depuis 1992, en Suède et en Norvège et, depuis plus
de cinq ans, dans d'autres pays.
Ces additifs ont fait l'objet de programmes de tests en Autriche et en Suède,
pays connus pour leur sensibilité et leur rigueur environnementales. En
particulier, des tests ont été conduits en Suède par le
motortescenter
selon la procédure standard reconnue par le
National Swedish Environmental
Protection Board
sur le niveau des émissions et des particules, sur la
consommation, sur la composition chimique des particules et des émissions, sur
l'activité biologique des particules et des émissions concernant la mutagénéité
ainsi que sur l'impact au regard de la production de dioxines.
C'est ce qui a conduit la France, monsieur le sénateur, à retenir cette
solution.
Le nouveau supercarburant destiné aux véhicules anciens est ainsi constitué de
carburant sans plomb d'indice d'octane minimal 97 et d'un additif à base de
potassium.
A la fin de votre question, vous me demandez si le Gouvernement est prêt à
utiliser les connaissances actuelles en matière de radioactivité pour obtenir
des réponses qui nous manquaient jusqu'à présent. Je peux répondre par
l'affirmative. Aujourd'hui, le Gouvernement est en effet prêt à poursuivre les
études sur des effets non indiqués dans la première partie de ma réponse, mais
qui feraient courir un risque réel pour la population.
M. Dominique Leclerc.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de ces derniers propos, mais
permettez-moi d'insister. Aujourd'hui, toute recherche de gisement de minerai
d'uranium est caractérisée par une attention particulière portée au rayonnement
naturel d'éléments radioactifs que sont évidemment l'uranium mais aussi le
strontium et le potassium.
Or, compte tenu de la densité de la circulation dans nos grandes villes, que
l'on ne peut comparer à celle de la Suède ou de l'Autriche, mais aussi compte
tenu de l'état des véhicules, il serait intéressant que nos scientifiques nous
indiquent sous quelle forme le potassium, notamment, est inhalé et ensuite
rejeté par les urines, afin de pouvoir dire à nos concitoyens, dans un souci de
transparence, que le potassium additif, avec tous les avantages qu'il offre par
rapport au plomb, ne présente aucun risque, dans l'avenir, pour leur santé.
M. le président.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons
suspendre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures, est reprise à seize heures, sous la
présidence de M. Jean Faure.)