SEANCE DU 25 OCTOBRE 2000
M. le président.
« Art. 4. - Outre les mesures législatives nécessaires à la transposition de
la directive 1999/62/CE du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds
pour l'utilisation de certaines infrastructures mentionnée à l'article 1er, et
afin de faciliter, notamment, la mise en oeuvre des dispositions du droit
communautaire relatives aux marchés publics de travaux, le Gouvernement est
autorisé à prendre, par ordonnances, les mesures législatives requises pour
:
« 1° Supprimer la garantie de reprise de passif accordée par l'Etat aux
sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroutes, prolonger les durées
actuelles des concessions et prévoir les conditions dans lesquelles ces
modifications seront appliquées dans les comptes des sociétés, au titre de
l'exercice ouvert au 1er janvier 2000 ;
« 2° Redéfinir les règles, notamment en les unifiant et les simplifiant,
relatives à l'institution de péages pour l'usage d'infrastructures routières et
de certains ouvrages d'art compris dans la voirie nationale, départementale et
communale, y compris lorsque la gestion de ces ouvrages d'art est assurée par
un établissement public de coopération intercommunale. »
Avant de donner la parole à M. le ministre sur l'article, je vous rappelle,
mes chers collègues, les contraintes horaires que j'ai fixées eu égard à la
séance de demain, consacrée à l'ordre du jour réservé.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je me souviens,
monsieur le président, des contraintes que vous avez fixées. Mais je ne
voudrais pas que l'on escamote le débat...
M. le président.
Monsieur le ministre, il n'y aura pas d'escamotage. Le débat se poursuivra...
mais plus tard !
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Sachez en tout
cas, monsieur le président, que je suis prêt à continuer ce débat quand le
Sénat le voudra.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avant d'aborder avec vous la question de la
réforme des autoroutes, je voudrais vous indiquer que ma volonté a toujours été
de ne pas escamoter, justement, le débat. A votre demande, de nombreuses
discussions ont d'ailleurs eu lieu ici même, en de nombreuses occasions, en
commission ou en séance publique.
J'ai indiqué aux rapporteurs que le Gouvernement s'engageait à déposer le
projet de loi de ratification avant la fin de l'actuelle session, c'est-à-dire
avant la fin du mois de juin 2001, et à l'inscrire à l'ordre du jour du
Parlement avant la fin de la législature.
Sans attendre, le Gouvernement s'engage à ce qu'il y ait un débat au Sénat
avant la fin du mois de janvier prochain, soit sous la forme d'une déclaration
du Gouvernement suivie d'un débat, soit par l'inscription à l'ordre du jour
prioritaire du Sénat d'une question orale avec débat durant la deuxième
quinzaine de janvier 2001.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je voulais vous indiquer pour
contribuer à la sérénité du débat d'aujourd'hui.
J'en viens maintenant à la question de la réforme des autoroutes.
Comme vous le savez, le Gouvernement a entrepris de modifier les conditions
d'attribution et de fonctionnement des concessions d'autoroutes pour rendre
celles-ci compatibles avec les nouvelles exigences juridiques et pour
pousuivre, dans le cadre de la politique de rééquilibrage intermodal des
transports, un développement maîtrisé du réseau routier.
L'évolution du droit communautaire et du droit national invitait, en effet, à
procéder à cette réforme et, en particulier, à rompre avec la technique de
l'adossement, qui consiste à financer la construction de nouvelles sections
d'autoroutes au moyen des péages provenant des sections déjà en service.
Juridiquement, cet adossement n'était plus compatible avec les principes de
transparence et d'égalité de traitement qui gouvernent désormais les procédures
de choix des concessionnaires, car il offrait un avantage aux candidats
disposant déjà d'un réseau par rapport à d'éventuels nouveaux entrants. Le
Conseil d'Etat nous l'avait indiqué à deux reprises au moins, d'une part, en
cassant la décision d'attribution de la concession de l'A 86 ouest, d'autre
part, par un avis faisant suite à une question du Gouvernement, qui a été
communiqué aux rapporteurs.
Ces principes nous conduisent à faire évoluer le régime d'exploitation des
sociétés d'économie mixte concessionnaires d'autoroute, les SEMCA. Pour pouvoir
participer aux consultations à venir, ces sociétés doivent être mises sur un
pied d'égalité avec les sociétés concurrentes à capitaux privés, qu'elles
soient nationales ou européennes.
Economiquement, l'adossement avait également montré ses limites : nous étions
arrivés à un stade de développement du réseau autoroutier où, après avoir
réalisé les axes les plus nécessaires, le risque existait que nous nous
lancions dans de nouveaux projets à l'utilité incertaine, tout simplement en
raison du caractère indolore de l'adossement pour les finances publiques.
Pour autant, il y a et il y aura encore des autoroutes à construire pour des
raisons de sécurité, d'aménagement du territoire, pour améliorer certaines
liaisons.
La suppression de l'adossement a, par ailleurs, une conséquence très
importante : la ressource financière implicite permise par l'adossement
disparaît. L'équilibre financier devra donc être réalisé, pour chaque nouvelle
section d'autoroute, en faisant appel à une durée plus longue de la concession,
mais aussi, si nécessaire, à une subvention publique financée de la même
manière que les volets routiers des contrats de plan Etat-région.
L'ordonnance que le Gouvernement souhaite pouvoir prendre grâce au présent
article 4, et dont j'ai communiqué le projet à vos commissions, a ainsi
essentiellement pour objet de supprimer les avantages dont bénéficient les
SEMCA - par exemple, la garantie de reprise de passif en fin de concession ou
des règles comptables particulières - et, en contrepartie, d'allonger la durée
de leurs concessions de douze à quinze ans, comme la Commission européenne l'a
accepté voilà quelques jours.
Un tel allongement, qui permet d'amortir sur une plus longue période les
charges financières des ouvrages, portera les durées des concessions des SEMCA
au niveau de celles qui sont demandées par les sociétés privées pour des
projets comparables.
Ces dispositions permettront également à l'Etat de disposer des ressources
nouvelles nécessaires au financement des subventions d'équilibre des nouvelles
concessions.
En effet, l'évolution du régime d'exploitation des SEMCA se traduira, en
raison notamment de l'allégement des charges annuelles d'amortissement
consécutives à l'allongement des durées de concession, par un résultat
d'exploitation positif, c'est-à-dire par le paiement de l'impôt sur les
sociétés et le versement de dividendes à l'actionnaire qu'est l'Etat. Ces
dividendes seront recyclés à due concurrence dans le budget du ministère de
l'équipement pour conduire une politique des transports équilibrée, en
particulier pour financer la part Etat des subventions publiques aux nouvelles
concessions autoroutières.
Le projet d'ordonnance prévoit que les modifications comptables résultant de
cette réforme seront applicables dès l'exercice 2000 des SEMCA, afin de pouvoir
disposer de cette nouvelle ressource dès 2001, dans des délais compatibles avec
l'attribution des concessions en cours de négociation comme l'A 28, ou en
préparation comme l'A 19 et l'A 41.
Au total, les aménagements auxquels le Gouvernement souhaite pouvoir procéder
rapidement sont autant de conditions nécessaires pour que les SEMCA puissent,
compte tenu de leur savoir-faire, continuer à jouer leur rôle dans
l'attribution des futures concessions.
A l'occasion de cette réforme, le Gouvernement souhaite également simplifier
et moderniser le code de la voirie routière et le mettre en conformité avec la
pratique en supprimant le principe consacré par la loi depuis 1955 de gratuité
de l'usage des autoroutes. Tout le monde peut constater que ce principe n'est,
en effet, pas appliqué !
Il est effectivement de notre responsabilité de traduire dans la loi le
principe selon lequel chaque mode de transport doit supporter les coûts tant
internes qu'externes qu'il entraîne. Le péage est ainsi l'un des moyens du
rééquilibrage modal que j'entends, avec l'ensemble du Gouvernement, favoriser
le plus largement possible.
Mais je voudrais vous rassurer, car je sais que des interrogations se font
jour : les autoroutes actuellement gratuites le resteront ; nous pourrons
toujours construire des autoroutes gratuites non concédées, en particulier des
autoroutes urbaines et péri-urbaines.
La suppression du principe de gratuité ne porte que sur les autoroutes
actuellement concédées, qui n'ont jamais été gratuites, et aucune route
nationale, départementale ou communale ne sera mise à péage.
L'habilitation demandée par le Gouvernement prend ainsi place dans un projet
de réforme ambitieux, permettant de pérenniser le système français des
concessions autoroutières tout en l'ouvrant à la concurrence et à la
compétition.
Cette réforme s'inscrit aussi dans une réflexion plus globale permettant au
transport routier de trouver toute sa place aux côtés des autres modes de
transport, dans une perspective de développement durable, et de répondre ainsi
de façon adaptée à la croissance des besoins de déplacement.
M. le président.
Mes chers collègues, à ce stade, je pense qu'il convient de faire le point.
Lors de la conférence des présidents de cette semaine, alors qu'il était prévu
que nos travaux d'aujourd'hui commencent à quinze heures, M. le ministre chargé
des relations avec le Parlement nous a dit ne pouvoir rejoindre le Sénat qu'à
seize heures.
L'importance des amendements qui ont été déposés nous conduirait à dépasser
très largement les trente minutes que la présidence, au titre de l'article 33
du réglement, était prête à octroyer pour l'examen de cet article,...
M. Pierre Fauchon,
vice-président de la commission des lois.
Et voilà !
M. le président.
... sur lequel nous venons de recevoir l'éclairage de M. le ministre.
Demain, nous devons nous réunir dès neuf heures trente pour la séance
mensuelle consacrée à l'ordre du jour réservé.
Voilà pourquoi il conviendra que les commissions, la présidence et le
Gouvernement trouvent une autre date pour poursuivre ce débat.
Je vais donc, maintenant, lever la séance.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Je me permettrai
d'abord de rappeler, monsieur le président, que la tenue de la séance des
questions d'actualité à l'Assemblée nationale suppose que les ministres
interrogés soient présents. Les parlementaires, qu'ils soient sénateurs ou
députés, ont le droit d'entendre les réponses aux questions qu'ils
formulent.
Par ailleurs, je crois me souvenir que vous aviez indiqué une heure précise
pour la fin de la séance. Moi, j'étais prêt à faire en sorte que, dans les
limites du délai ainsi fixé, le débat sur l'article 4 puisse être mené à son
terme. J'y reste prêt.
M. le président.
Monsieur le ministre, je me suis expliqué sur les conditions de ce débat, je
n'y reviens pas.
Je souhaite simplement que les ministres marquent, à l'égard du Sénat, la même
disponibilité qu'à l'égard de l'Assemblée nationale.
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