SEANCE DU 25 OCTOBRE 2000


M. le président. « Art. 1er. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre, par ordonnances, les dispositions législatives nécessaires à la transposition des directives ou parties de directives suivantes, ainsi que les mesures d'adaptation de la législation qui lui sont liées :
« I. - 1° Directive 81/851/CEE du Conseil du 28 septembre 1981 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires ;
« 2° Directive 81/852/CEE du Conseil du 28 septembre 1981 relative au rapprochement des législations des Etats membres concernant les normes et protocoles analytiques, toxico-pharmacologiques et cliniques en matière d'essais de médicaments vétérinaires ;
« 3° Directive 89/48/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans ;
« 4° Directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail ;
« 5° Directive 90/167/CEE du Conseil du 26 mars 1990 établissant les conditions de préparation, de mise sur le marché et d'utilisation des aliments médicamenteux pour animaux dans la Communauté ;
« 6° Directive 90/313/CEE du Conseil du 7 juin 1990 concernant la liberté d'accès à l'information en matière d'environnement ;
« 7° Directive 90/641/Euratom du Conseil du 4 décembre 1990 concernant la protection opérationnelle des travailleurs extérieurs exposés à un risque de rayonnements ionisants au cours de leur intervention en zone contrôlée ;
« 8° Directive 90/676/CEE du Conseil du 13 décembre 1990 modifiant la directive 81/851/CEE concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires ;
« 9° Directive 92/32/CEE du Conseil du 30 avril 1992 portant septième modification de la directive 67/548/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à la classification, l'emballage et l'étiquetage des substances dangereuses ;
« 10° Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages et article 4 de la directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ;
« 11° Directive 92/49/CEE du Conseil du 18 juin 1992 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie et modifiant les directives 73/239/CEE et 88/357/CEE (troisième directive "assurance non vie") ;
« 12° Directive 92/51/CEE du Conseil du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des formations professionnelles, qui complète la directive 89/48/CEE ;
« 13° Directive 92/74/CEE du Conseil du 22 septembre 1992 élargissant le champ d'application de la directive 81/851/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments vétérinaires et fixant des dispositions complémentaires pour les médicaments homéopathiques vétérinaires ;
« 14° Directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l'article 16 paragraphe 1 de la directive 89/391/CEE), à l'exception de son article 7 relatif au travail de nuit ;
« 15° Directive 92/96/CEE du Conseil du 10 novembre 1992 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'assurance directe sur la vie, et modifiant les directives 79/267/CEE et 90/619/CEE (troisième directive "assurance vie") ;
« 16° Directive 93/40/CEE du Conseil du 14 juin 1993 modifiant les directives 81/851/CEE et 81/852/CEE concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux médicaments vétérinaires ;
« 17° Directive 94/33/CE du Conseil du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail ;
« 18° Directive 96/29/Euratom du Conseil du 13 mai 1996 fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire de la population et des travailleurs contre les dangers résultant des rayonnements ionisants ;
« 19° Directive 96/82/CE du Conseil du 9 décembre 1996 concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses ;
« 20° Directive 96/97/CE du Conseil du 20 décembre 1996 modifiant la directive 86/378/CEE relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes dans les régimes professionnels de sécurité sociale ;
« 21° Directive 97/43/Euratom du Conseil du 30 juin 1997 relative à la protection sanitaire des personnes contre les dangers des rayonnements ionisants lors d'expositions à des fins médicales, remplaçant la directive 84/466/Euratom ;
« 22° Directive 97/74/CE du Conseil du 15 décembre 1997 étendant au Royaume-Uni la directive 94/45/CE concernant l'institution d'un Comité d'entreprise européen ou d'une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire en vue d'informer et de consulter les travailleurs ;
« 23° Directive 98/8/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 février 1998 concernant la mise sur le marché des produits biocides ;
« 24° Directive 98/49/CE du Conseil du 29 juin 1998 relative à la sauvegarde des droits à pension complémentaire des travailleurs salariés et non salariés qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté ;
« 25° Directive 98/79/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1998 relative aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro ;
« 26° Directive 1999/62/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 1999 relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures ;
« II. - 1° Directive 89/104/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques ;
« 2° Directive 89/397/CEE du Conseil du 14 juin 1989 relative au contrôle officiel des denrées alimentaires ;
« 3° Directive 90/388/CEE de la Commission européenne du 28 juin 1990 relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunication ;
« 4° Directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992 relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise ;
« 5° Directive 92/83/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques ;
« 6° Directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ;
« 7° Directive 95/53/CE du Conseil du 25 octobre 1995 fixant les principes relatifs à l'organisation des contrôles officiels dans le domaine de l'alimentation animale ;
« 8° Directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne la réalisation de la pleine concurrence sur le marché des télécommunications ;
« 9° Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance ;
« 10° Directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications ;
« 11° Directive 97/33/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1997 relative à l'interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes de fourniture d'un réseau ouvert (ONP) ;
« 12° Directive 97/51/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifiant les directives 90/387/CEE et 92/44/CEE en vue de les adapter à un environnement concurrentiel dans le secteur des télécommunications ;
« 13° Directive 97/55/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 octobre 1997 modifiant la directive 84/450/CEE sur la publicité trompeuse afin d'y inclure la publicité comparative ;
« 14° Directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications ;
« 15° Directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service ;
« 16° Directive 98/10/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 1998 concernant l'application de la fourniture d'un réseau ouvert (ONP) à la téléphonie vocale et l'établissement d'un service universel des télécommunications dans un environnement concurrentiel ;
« 17° Directive 98/26/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres ;
« 18° Directive 98/27/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 1998 relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs ;
« 19° Directive 98/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 1998 sur la protection juridique des dessins ou modèles ;
« 20° Directive 98/78/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 1998 sur la surveillance complémentaire des entreprises d'assurance faisant partie d'un groupe d'assurance ;
« 21° Directive 1999/2/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 février 1999 relative au rapprochement des législations des Etats membres sur les denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation ;
« 22° Directive 1999/3/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 février 1999 établissant une liste communautaire de denrées et ingrédients alimentaires traités par ionisation ;
« 23° Directive 1999/5/CE du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 1999 concernant les équipements hertziens et les équipements terminaux de télécommunications et la reconnaissance mutuelle de leur conformité ;
« 24° Directive 1999/64/CE de la Commission du 23 juin 1999 modifiant la directive 90/388/CEE en vue de garantir que les réseaux de télécommunications et les réseaux câblés de télévision appartenant à un seul et même opérateur constituent des entités juridiques distinctes. »
Par amendement n° 1, M. Hoeffel, au nom de la commission des lois, propose, après les mots : « ainsi que », de rédiger comme suit la fin du premier alinéa de cet article : « les mesures d'adaptation de la législation liées à cette transposition : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. C'est un amendement de clarification purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?...
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 33, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, M. Fischer, M. Foucaud, M. Le Cam, M. Lefebvre, Mme Luc, M. Muzeau, M. Ralite, M. Renar, Mme Terrade, M. Vergès proposent de supprimer le troisième alinéa (3e) du I de l'article 1er.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. La directive 89/48 CEE relative à un système de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans a pour conséquence essentielle de niveler par le bas la formation des psychologues en ramenant celle-ci de cinq ans à trois ans. Vous comprendrez, mes chers collègues, le caractère symbolique de cette disposition qui, pour la France, ne marque pas un progrès.
Par ailleurs, nous souhaitons obtenir des précisions sur les mesures compensatoires prévues précisément pour compenser ces déficits de formation.
Nous souhaitons, je le répète, de telles dispositions fassent l'objet d'un débat parlementaire dans des conditions normales. C'est la raison pour laquelle nous demandons le retrait de cette directive.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, le retrait de la directive sur la reconnaissance des diplômes n'étant pas demandé par la commission saisie pour avis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. En effet, nous sommes actuellement assignés devant la Cour de justice des Communautés européennes pour non-transposition de cette directive à la profession de psychologue. Or, dans le mémoire en défense présenté par le Gouvernement français, il a été fait mention du projet de loi d'habilitation comme véhicule législatif qui permettrait cette transposition.
Je dois ajouter que le système de reconnaissance mis en place pour ces trois professions n'est pas nouveau. Il est calé sur celui qui existe pour les autres professions ayant fait l'objet de mesures de transposition.
Si cette directive est retirée du projet de loi d'habilitation, la France risque d'être à nouveau condamnée pour manquement dans les mois à venir.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 21 rectifié est déposé par M. Pintat, Mme Bardou, MM. César, Cazalet, Cornu, de Richemont, Fournier, Mme Heinis, MM. Hérisson, Leclerc, Martin, de Montesquiou, Mouly, Murat, Valade et Vasselle.
Tous deux tendent à supprimer le dixième alinéa (10°) du I de l'article 1er.
La parole est à M. Poniatowski, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Je ne répéterai pas tout ce que j'ai dit cet après-midi sur notre proposition de retirer de la liste la directive « Natura 2000 ». Je rappellerai simplement les trois raisons principales pour lesquelles j'ai déposé cet amendement.
La première raison, sur laquelle vous avez été plusieurs à insister cet après-midi, est l'existence d'un précédent. En effet, les sénateurs ont en quelque sorte pris les devants en adoptant une proposition de loi visant à la transposition, peut-être pas totale, mais de la plus grande partie, de cette directive.
Le Gouvernement, bien sûr, avait refusé le débat. Il avait même refusé tout dialogue.
Je vous rappelle, monsieur le ministre, après plusieurs de mes collègues cet après-midi, que vous pouvez très bien rattraper le temps perdu. Il suffit pour ce faire de sauter l'étape sénatoriale et d'aller directement à l'Assemblée nationale. Récupérez ce texte qui a déjà été adopté ici et vous gagnerez du temps ! Je dis cela puisque vous n'avez cessé de rappeler que nous n'avions pas le temps de travailler pour adopter ces différentes mesures législatives nécessaires à la transposition des directives.
La deuxième raison est beaucoup plus technique : il s'agit de la validation rétroactive de certains sites désignés comme les zones de protection spéciale, les ZPS.
L'une des principales lacunes du texte de transposition concerne la désignation de ces fameuses ZPS. Le choix de ces ZPS a été opéré à partir d'un inventaire d'identification scientifique, validé à l'échelon régional, des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique, les ZNIEFF. Ce choix se voit reconnaître par la jurisprudence administrative une valeur juridique indirecte, opposable aux autorités administratives chargées de la gestion de l'espace.
La commission des affaires économiques considère qu'il est inacceptable d'envisager qu'un arrêté du seul ministre de l'environnement légalise de manière rétroactive des ZPS déjà désignées, même si elles ont fait l'objet d'une transmission à la Commission européenne.
La troisième raison tient aux lacunes intéressant les modalités de gestion des espaces intégrés dans le réseau écologique européen. Je l'ai dit tout à l'heure, dans les mesures envisagées, l'exercice du droit de propriété pourrait être affecté. Un tel élément est suffisamment important et grave pour faire l'objet d'un débat parlementaire : une affaire de ce genre ne saurait être traitée par voie d'ordonnance.
M. le président. La parole est à M. de Montesquiou, pour défendre l'amendement identique n° 21 rectifié.
M. Aymeri de Montesquiou. Mes arguments seront très proches de ceux que vient d'énoncer M. Poniatowski.
En fait, le Gouvernerment ne sait pas comment se dépêtrer des contradictions inhérentes à sa majorité plurielle. C'est ainsi qu'il se retrouve parfois en panne, notamment en panne de dialogue, et en particulier avec notre ruralité française. Que penser d'autre face au recours à la procédure de l'ordonnance pour transposer en droit interne la directive « Natura 2000 » ?
Que sont devenues les promesses de concertation avec les acteurs locaux ? A en croire l'exposé des motifs, le dossier « Natura 2000 » ne présenterait pas un caractère politique. Voilà qui est des plus arbitraires, car la mise en oeuvre de ce réseau est loin de faire l'unanimité ; elle suscite même une forte opposition. Sauf à tenir pour négligeable l'avis des acteurs locaux !
Il faut le répéter, plus de 80 % du territoire national sont à la charge de moins de 10 % de la population : agriculteurs, propriétaires fonciers, élus locaux. Ce sont eux qui entretiennent nos espaces et permettent à notre pays de multiplier des activités agricoles et touristiques souvent très performantes.
Avec « Natura 2000 », on devine qu'il est question de les déposséder de cette gestion. Ce texte touche en effet de façon substantielle à de multiples intérêts économiques et « récréationnels ». Le droit de propriété y est remis en cause. Autre certitude : les interdictions vont pleuvoir.
Procéder par ordonnance est donc inacceptable, car « Natura 2000 » intéresse des pans entiers de la ruralité déjà touchés par les zones d'intérêt pour la conservation des oiseaux, les ZICO, les zones de protection spéciale, les ZPS, et autres zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique, ou ZNIEFF.
« Natura 2000 » mérite mieux qu'un débat à la sauvette. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s 11 et 21 rectifié ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. La commission est favorable à ces deux amendements, eu égard aux arguments qu'a fort bien exposés notre collègue M. Poniatowski.
Et qu'on ne fasse pas au Sénat le reproche d'être responsable du retard ! Le Sénat avait, en 1998, pris une initiative allant dans le sens d'une transposition. Quel dommage que cette initiative n'ait pas, alors, été retenue par le ministre compétent !
M. Alain Lambert. Hélas ! « Compétent » est peut-être de trop !
M. Jean Delaneau C'est peut-être le problème !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Mesdames, messieurs les sénateurs, il est souhaitable et même indispensable que la France soit en mesure de répondre rapidement à ses obligations communautaires.
En effet. nous avons une responsabilité particulière dans la constitution du réseau « Natura 2000 », compte tenu de notre exceptionnelle diversité biologique, laquelle constitue plus un atout qu'une contrainte pour notre pays.
Dans son arrêt du 6 avril 2000, la Cour de justice des Communautés européennes a condamné la France pour défaut de transposition des articles 6.3 et 6.4 de la directive. Or une telle condamnation peut impliquer, pour notre pays, des astreintes financières journalières importantes.
Une procédure est également engagée par la Commission contre la France pour transmission insuffisante des sites. L'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes sur ce point est attendu.
J'ajoute que le retard pris par la France en matière de transposition et de transmission des sites « Natura 2000 » peut conditionner - cela nous a été notifié par la Commission - l'attribution de fonds structurels européens dans le cadre des DOCUP - documents uniques de programmation - et du FEOGA garantie, ainsi que des aides liées au réseau des transports européens, ce qui signifie que nos régions risquent de subir d'importants retards en matière de financements européens.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Ce n'est pas correct de dire ça !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur Poniatowski, cette mise en garde a été signée par un commissaire européen, qui se trouve d'ailleurs être de nationalité française.
Le projet d'ordonnance pour la transposition de « Natura 2000 » a été transmis aux rapporteurs du Sénat. Vous avez donc pu en prendre connaissance, monsieur Poniatowski.
Il peut se résumer en trois points : donner une existence juridique aux zones spéciales de conservation et aux zones de protection spéciale, de façon qu'un régime de protection contractuel ou réglementaire puisse s'appliquer dans tous les cas ; consacrer l'option d'un régime de protection par voie contractuelle de façon privilégiée ; instaurer un régime d'évaluation et d'autorisation des plans et des projets susceptibles d'affecter de façon significative un site.
La seule marge de transposition est donc le choix des outils de protection des zones « Natura 2000 » et, sur ce plan, le Gouvernement a entrepris une démarche contractuelle dans le cadre du Comité national de suivi « Natura 2000 », qui regroupe les acteurs concernés, c'est-à-dire les représentants des collectivités locales, les agriculteurs, les chasseurs, les associations de protection de la nature.
Cette concertation explique le retard qui a été pris.
Monsieur Poniatowski, vous avez évoqué, comme d'autres, la proposition de loi de M. Le Grand qui a été débattue au Sénat au mois de juin 1998. Mais ce n'était pas une proposition de loi de transposition puisqu'elle traitait uniquement des modalités de gestion des sites, qui sont de nature réglementaire. Elles feront d'ailleurs l'objet d'un décret, qui est en préparation et donne lieu à une concertation au sein du Comité national de suivi « Natura 2000 ».
Le projet d'ordonnance sur « Natura 2000 » vous a donc été transmis. Il est à la base du vote que vous allez émettre. Vous avez pu constater qu'il ne remet pas en cause la dynamique de la concertation engagée sur le terrain et qui fait qu'à ce jour 1 029 propositions de sites, représentant un peu moins de 5 % du territoire, ont été transmises à la Commission européenne. Toutes ont fait l'objet d'une concertation. Il s'agit, par cette ordonnance, non de valider des sites, mais simplement de valider une procédure. D'ailleurs, trois cents de ces sites sont dotés d'un comité de pilotage et d'un opérateur - une chambre d'agriculture, un parc naturel régional, l'Office national des forêts - qui sont chargés d'élaborer un document d'objectif. Je précise que cent documents doivent être finalisés d'ici à la fin de cette année.
Telle est la démarche qu'a choisie le Gouvernement sur un dossier à propos duquel le Gouvernement de M. Juppé avait rencontré, souvenez-vous, un certain nombre de difficultés. C'est une démarche d'explication, de concertation qui a été entreprise progressivement.
« Natura 2000 » commence à se mettre en place sur le terrain, mais il faut maintenant transposer les dispositions manquantes pour donner un statut juridique aux zones créées et pour répondre aux obligations européennes.
C'est pourquoi le Gouvernement demande le rejet de ces deux amendements.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Monsieur le minsitre, j'ai été très surpris par certains de vos propos, d'autant qu'ils ne vous ressemblaient pas. Mais vous avez sans doute lu une note préparée par un autre ministère !
En effet, il n'est vraiment pas correct de faire du chantage - et je pèse mes mots ! - au versement de fonds européens à différentes régions pour tenter de convaincre notre assemblée de ne pas adopter l'amendement que nous proposons.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 11 et 21 rectifié.
Mme Anne Heinis. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis. Je ne peux pas acquiescer à certains des propos que vient de tenir M. le ministre.
Dans mon département, dans ma région de Basse-Normandie, il n'y a pas eu de concertation. En fait, cela a été même bien pis. Lorsqu'il a commencé à être question de toute cette affaire, il a été rigoureusement impossible de rencontrer quelque responsable que ce soit et même d'obtenir le moindre document pour savoir quels étaient les sites que je ne sais qui avait bien voulu inclure dans les zones protégées.
Vous avez sans doute été mal informé, monsieur le ministre.
Vous le comprendrez, rien ne peut marcher dans ces conditions. Comment cela n'aurait-il pas suscité une extraordinaire défiance vis-à-vis de ce texte ? Croyez-moi, la concertation n'a pas été menée comme elle aurait dû l'être.
Par conséquent, je voterai ces deux amendements.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le ministre, j'ai déjà eu l'occasion, la semaine dernière, de faire une observation à un membre du Gouvernement sur la concertation telle que celui-ci la pratique. Vous venez de démontrer qu'il y a bien une sorte de court-circuit dans la manière dont est organisée la concertation. Je pense là, en particulier, au Parlement. La Gouvernement agit comme si le Parlement n'existait pas ! Comme vos collègues, vous oubliez que le Parlement doit, à un moment ou à un autre, être consulté.
On assiste de plus en plus à des négociations entre le ministre concerné, les membres du cabinet et des interlocuteurs désignés ; peut-être aurons-nous l'occasion d'y revenir au sujet de La Poste.
S'agissant de « Natura 2000 », toutes les associations de protection de la nature ont, certes, été consultées les unes après les autres, de préférence celles qui y sont favorables... Il n'en demeure pas moins que nous allons manifestement vers un système dans lequel le Parlement national n'aura plus véritablement son utilité, puisqu'il n'aura pas son mot à dire.
Il suffit de consulter la carte d'application de « Natura 2000 » sur Internet pour se convaincre qu'il n'y a plus grand-chose à dire et plus guère d'observations à formuler.
M. Robert Bret. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Le projet « Natura 2000 » a, dès sa création, soulevé beaucoup d'inquiétudes auprès de l'ensemble des élus de notre pays, qui se voyaient sommer de manière arbitraire d'accepter des formes de sanctuarisation des territoires qu'ils administrent.
L'impasse sur la réflexion quant au devenir économique des territoires concernés restait un des maillons faibles du projet, au point qu'en 1996, face aux difficultés, le gouvernement Juppé décidait de suspendre la procédure de désignation des sites relevant de la directive « Natura 2000 ».
Le travail conduit dans la dernière période a fait progresser la réflexion et permis d'avancer sur l'application de cette directive. Mais bien des interrogations demeurent, notamment en ce qui concerne l'utilisation des territoires concernés.
Aussi, sur cette question fondamentale, le débat mériterait d'être conduit sous une autre forme que celle qui nous est proposée aujourd'hui.
En conséquence, notre groupe s'abstiendra sur les amendements en discussion.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 11 et 21 rectifié, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?... Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 10:

Nombre de votants 320
Nombre de suffrages exprimés 226
Majorité absolue des suffrages 114
Pour l'adoption 226

M. Jean Delaneau. Vous êtes très soutenu, monsieur le ministre ! (Sourires.)
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 15 est présenté par M. Jourdain, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 34 est déposé par Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès.
Tous deux tendent à supprimer le quatorzième alinéa (14°) du I de l'article 1er.
La parole est à M. Jourdain, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 15.
M. André Jourdain, rapporteur pour avis. Par l'amendement n° 15, la commission des affaires sociales, en vous proposant de supprimer le 14° du I de l'article 1er, vous demande de retirer du champ d'habilitation la directive du 19 octobre 1992 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, directive qui devait être transposée avant novembre 1994.
Or, si le code du travail et le décret du 30 avril 1996 assurent actuellement largement la transposition de la directive, le droit français ne prévoit pour l'heure aucune possibilité de suspension du contrat de travail de la salariée exposée à des risques pour sa santé et sa sécurité si un reclassement temporaire n'est pas possible. Ce manque est contraire à la directive, aussi la commission européenne a-t-elle transmis, en juillet 1999, un avis motivé pour non-transposition de cette directive.
Les articles 60 et 61 du projet de loi de modernisation sociale, déposé en mai dernier sur le bureau de l'Assemblée nationale, visent à mettre en conformité le droit français avec cette directive européenne. Selon les informations que j'ai pu recueillir, ces deux articles devraient constituer la trame du texte de la future ordonnance.
A cet égard, je tiens à formuler trois observations.
En premier lieu, il est nécessaire d'étendre le champ d'application de ces mesures non seulement aux femmes en état de grossesse médicalement constaté, mais aussi aux femmes allaitant, pour être en exacte conformité avec la directive.
En deuxième lieu, les salariées agricoles doivent également bénéficier de ce nouveau régime, ce qui exige une modification du code rural, les salariées agricoles étant également visées par la directive.
En troisième lieu, par souci de cohérence, l'ordonnance devra prendre en compte l'éventuelle nouvelle législation sur le travail de nuit des femmes, notamment les dispositions relatives au reclassement temporaire ou à la suspension temporaire du contrat de travail des femmes enceintes ou ayant accouché et travaillant la nuit.
Ces incertitudes me paraissent suffisamment importantes pour ne pas autoriser la transposition de cette directive par voie d'ordonnance. La commission des affaires sociales souhaiterait donc, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, obtenir des éclaircissements sur ces trois points.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° 34.
Mme Marie-Claude Beaudeau. La volonté de transposer en droit interne par le biais d'une ordonnance la directive du 19 octobre 1992 marque, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, une certaine incohérence dans la manière d'aborder au Parlement l'importante question du travail de nuit, plus particulièrement du travail de nuit des femmes et, plus particulièrement encore, du travail de nuit des femmes enceintes.
Je voudrais rappeler le vote intervenu, ici même, le premier jour de la session sur le travail de nuit des femmes : une majorité a repoussé la levée de l'interdiction qui était proposée dans un amendement du Gouvernement. J'espère d'ailleurs que l'Assemblée nationale fera de même. Cette mesure, si elle était adoptée, permettrait aux employeurs de demander aux femmes de prendre de nuit le chemin du bureau ou de l'usine sans aucune faiblesse, puisque même les femmes enceintes seraient concernées. Et tout cela au nom d'une directive européenne et sans aucun souci de notre culture !
C'est d'ailleurs une utilisation abusive de la notion d'« égalité », puisqu'une directive précise que les mesures en la matière doivent représenter un progrès social. Le travail de nuit des femmes est l'antithèse du progrès social, comme d'ailleurs l'abaissement de l'âge pour le travail des enfants, même dans des circonstances limitées, mais nous y reviendrons tout à l'heure.
La directive visée au 14° du I de l'article 1er concerne bien le travail de nuit des femmes enceintes, comme le confirme l'un de ses considérants : « considérant qu'il convient de prévoir des dispositions pour que les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes ne soient pas tenues d'accomplir un travail de nuit, lorsque ceci est nécessaire du point de vue de leur sécurité ou de leur santé ».
Le fait d'être enceinte ne suffira donc pas à lui seul à justifier l'arrêt du travail de nuit. Encore faudra-t-il prouver que celui-ci est est nuisible à la sécurité ou à la santé de la femme enceinte. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'adopter l'amendement n° 34.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. La commission des lois se rallie à la proposition de la commission des affaires sociales et souhaite connaître la position du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Cette directive, relative à la santé et à la sécurité du travail des femmes enceintes, accouchées ou allaitantes aurait dû être transposée depuis plusieurs années.
La Commission européenne a lancé des procédures pour transposition incorrecte à l'encontre de plusieurs pays : la Suède, le Luxembourg, l'Italie, l'Irlande et la France.
En ce qui concerne notre pays, la transposition a été effectuée dans un premier temps par une circulaire, comme l'indiquait M. Jourdain. Or, la Commission européenne a jugé que le niveau juridique de transposition par circulaire ministérielle était insuffisant et elle a donc conclu, par avis motivé du 6 août 1999, que la France contrevenait à la directive.
Une base législative s'impose donc, d'autant qu'elle renforcera la protection des femmes concernées. Concernant les points litigieux soulevés par la commission des affaires sociales, je veux d'abord indiquer que l'article 5 de la directive, qui impose l'examen de solutions alternatives pour mettre à la charge de l'employeur un changement de poste ou une dispense de travail, s'applique bien à la femme enceinte et à la femme allaitante. En conséquence, votre observation, monsieur le rapporteur, est bien prise en compte à travers l'article 5 et les transpositions qui seront faites dans le code du travail.
Je veux également indiquer que les salariées agricoles relèvent bien du champ d'application de l'ordonnance puisque le code rural renvoie aux dispositions du code de la sécurité sociale. Les salariées agricoles entrent donc dans le champ d'application.
Enfin, s'agissant du dispositif de protection contre les risques pour la sécurité et la santé des femmes enceintes ainsi que du dispositif relatif au travail de nuit des femmes enceintes, si des textes différents sont concernés, leur champ d'application n'est pas contradictoire.
Je pense avoir répondu aux préoccupations : au bénéfice de ces observations, le 14° du I de l'article 1er devrait pouvoir être maintenu.
M. André Jourdain, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Jourdain, rapporteur pour avis.
M. André Jourdain, rapporteur pour avis. Monsieur le ministre, vous avez effectivement répondu aux préoccupations de la commission des affaires sociales. Par conséquent, je retire l'amendement n° 15.
M. le président. L'amendement n° 15 est retiré.
L'amendement n° 34 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Oui, nous, nous le maintenons !
M. Paul Girod. Comme c'est curieux !
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 35, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le dix-septième alinéa (17°) du I de l'article 1er.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Mes réflexions sur la directive relative à la protection des jeunes au travail rejoindront pour une grande part celles que j'ai exprimées à l'occasion de l'examen de notre amendement précédent.
Les dispositions concernant le travail de nuit des jeunes sont étonnantes tant par leur ambiguïté que par leur complexité.
Après le travail de nuit des femmes, le travail de nuit des jeunes et des enfants ! S'il n'appartient pas au pouvoir législatif de débattre de sujets qui touchent ainsi à l'essence même de notre société, de quoi le Parlement débattra-t-il à l'avenir ?
Nous considérons pour notre part que le travail de nuit des jeunes et des enfants doit être interdit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 36, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Lefebvre, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le vingtième alinéa (20°) du I de l'article 1er.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Comme je l'ai déjà dit dans la discussion générale, il s'agit ici, sous prétexte de promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes, de procéder à un alignement vers le bas du système de protection dont bénéficient ces dernières aujourd'hui. L'application de la directive conduira, de fait, à supprimer certains droits particuliers qui leur sont consentis, ainsi que la possibilité de prendre des mesures de protection en leur faveur.
La Cour de justice de l'Union européenne a montré qu'elle avait souvent une interprétation rigide du principe d'égalité entre les hommes et les femmes. Il y a donc un risque important de voir remises en cause les possibilités de prendre, par dérogation, des mesures positives pour atténuer les inégalités dont sont trop souvent victimes les femmes aujourd'hui. Si l'égalité était une réalité, ce serait concevable, mais, comme chacun sait, nous en sommes loin !
S'il est nécessaire, comme nous le pensons, de promouvoir l'égalité, cela doit se faire au profit des femmes, qui subissent encore beaucoup trop de discriminations.
Compte tenu du risque qui a été évoqué, nous demandons que cette directive soit retirée du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 16, M. Jourdain, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer le 24e alinéa (24°) du I de l'article 1er.
La parole est à M. Jourdain, rapporteur pour avis.
M. André Jourdain, rapporteur pour avis. Le Gouvernement invoque la surcharge du calendrier législatif pour procéder à la transposition par voie d'ordonnance de la directive du 29 juin 1998 relative à la sauvegarde des droits à pension complémentaire des travailleurs salariés et non salariés qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté.
Contrairement à toutes les autres directives examinées par la commission des affaires sociales, les délais d'incorporation en droit interne - 1er juillet 2001 - ne sont pas expirés, et ne le seront pas avant la fin de la session. La transposition en droit interne peut donc être différée et un débat devant le Parlement organisé.
De plus, le Gouvernement dispose d'un support législatif pour effectuer cette transposition : le projet de loi de modernisation sociale, qui doit être discuté en première lecture à l'Assemblée nationale en janvier 2001.
En conséquence, la commission des affaires sociales propose, par cet amendement, de supprimer l'habilitation à procéder par voie d'ordonnance à la transposition de cette directive.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Le Gouvernement est sensible aux arguments développés par M. Jourdain. En effet, c'est la seule directive dont le délai de transposition n'est pas expiré, puisqu'il a été fixé au 1er juillet 2001, et le projet de loi sur la modernisation sociale permettra d'avoir ce débat. Aussi, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement. Il accepte donc la suppression de l'alinéa qui concerne cette directive.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 37, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le troisième alinéa (3°) du II de l'article 1er.
La parole est à M. Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Si vous me le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements n°s 38, 39, 40, 41, 44 rectifié, 45 et 46, car ils concernent, eux aussi, les télécommunications.
M. le président. Je vous en prie, monsieur Lefebvre.
M. Pierre Lefebvre. Dès le début des années quatre-vingt-dix, la Commission de Bruxelles, à travers de nombreuses directives, décidait l'ouverture à la concurrence des télécommunications et des services de télévision par câble. De manière récurrente, et comme un mirage, la baisse du coût des communications téléphoniques était invoquée pour justifier l'abandon progressif du secteur public des télécommunications au profit du secteur privé.
En 1998, l'ouverture à la concurrence est devenue effective dans notre pays. Il convient de noter que la concurrence n'a pas eu les effets escomptés en matière de réduction des tarifs, puisque la présence d'opérateurs privés a réduit la facture téléphonique de nos concitoyens d'environ 10 %. Notons, toutefois, que la part de l'abonnement ne cesse de croître.
Il va sans dire que l'absence d'orientation politique précise quant aux missions particulières de l'opération public France Télécom a laissé le champ libre au principe de la libéralisation. Le dernier maillon du monopole public de France Télécom restait la boucle locale, et le décret de dégroupage de la boucle a été publié le 13 septembre dernier. Autant dire que notre pays est, il faut bien en convenir, bon élève en matière de libéralisation du secteur des télécommunications.
Aujourd'hui, ne pas associer le Parlement aux décisions nationales relevant des télécommunications, c'est faire l'impasse sur le débat relatif au rôle de l'opérateur en matière de télécommunications et, d'une certaine façon, faire sienne la position dominante de la Commission de Bruxelles, qui a pour seul credo de réduire coûte que coûte le secteur public dans son ensemble.
Aussi, notre préoccupation est-elle grande, à plus d'un titre.
En effet, le développement des nouvelles technologies est à présent un enjeu économique majeur, mais aussi un enjeu culturel, et même un enjeu de citoyenneté. Il convient d'ailleurs de rappeler que la liberté de communication est un droit constitutionnel.
A quelques mois d'un débat parlementaire sur la société de l'information, légiférer par ordonnance en matière de télécommunications revient à amputer le débat à venir de son essence, ce que nous déplorons.
Déréglementer dans le secteur des télécommunications revient, de fait, à déréglementer dans le champ de la nouvelle économie, dans celui de la culture et dans celui de l'accès de l'ensemble de nos concitoyens aux nouvelles technologies.
Aussi, les amendements que nous vous proposons d'adopter visent à soustraire du champ des ordonnances l'ensemble des directives « Télécommunications » afin qu'un débat national s'instaure sur les enjeux fondamentaux des télécommunications aujourd'hui.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 37, 38, 39, 40, 41, 44 rectifié, 45 et 46 ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. J'ai écouté avec attention l'intervention de notre collègue M. Lefebvre.
Nous ne sous-estimons pas, bien sûr, l'importance des problèmes auxquels est confronté, dans la période actuelle, le secteur des télécommunications. Cependant, fidèle à la logique qui l'a inspirée, la commission saisie au fond émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Poniatowski, rapporteur pour avis.
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. S'agissant de l'amendement n° 44 rectifié, je ne comprends absolument pas la proposition qui est faite. Cet amendement concerne l'annuaire universel.
Il faut tenir compte de la situation actuelle dans notre pays. Si quelque 33 millions de foyers français sont raccordés au téléphone fixe, le téléphone mobile est en train de le rattraper puisque près de 25 millions de Français sont abonnés au téléphone mobile. Dès lors, quoi de plus naturel et logique que de disposer d'un annuaire universel comprenant tous les abonnés ?
Je suis donc encore plus défavorable à l'amendement n° 44 rectifié. Le groupe communiste républicain et citoyen serait bien inspiré en le retirant.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 37, 38, 39, 40, 41, 44 rectifié, 45 et 46 ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Le Gouvernement est contre la suppression de ces dispositions puisque, là encore, la Commission a décidé de saisir la Cour de justice des Communautés européennes pour mauvaise transposition ou non-transposition d'un certain nombre de directives. Nous avons six saisines au total.
J'ajouterai que l'annuaire universel comprendra les abonnés de tous les opérateurs, y compris les abonnés au téléphone mobile qui le souhaiteront. C'est une mesure qui, vous en conviendrez, renforcera le service public des télécommunications puisque France Télécom aura, dans le cadre de ses missions de service public, l'obligation de fournir un tel annuaire à la fois sous la forme papier et sous la forme électronique.
A mon avis, ces différents amendements visent à supprimer des dispositions qui, au contraire, vont dans le sens du service public des télécommunications.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 37.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Je crois qu'on ne peut pas prétendre à tout et à son contraire !
Je voudrais tout de même rappeler qu'une loi, votée à une large majorité, a permis de résoudre l'essentiel des problèmes concernant les télécommunications dans notre pays. La France n'a nullement à rougir de la façon dont a évolué ce qui était à l'origine un grand service public, qui est devenu une entreprise publique et qui, aujourd'hui, est une entreprise dotée d'un capital social et tout à fait performante sur le plan mondial.
Il suffit de regarder comment s'est développé l'ancien opérateur public dans notre pays pour se convaincre que la loi de 1996, une bonne loi, qui, je le répète, a permis de régler l'essentiel des problèmes.
Enfin, sur un point particulier, celui de l'annuaire universel, il ne s'agit pas aujourd'hui de savoir si l'on transpose la directive par voie d'ordonnance ou par une autre procédure. Depuis trois ans, nous essayons désespérément de trouver une solution pratique pour déterminer qui sera chargé de mettre en oeuvre l'annuaire universel, qui sera chargé de le diffuser, à quel coût, dans quelles conditions et comment on atteindra la sécurité qui convient à la fois pour que tous puissent y avoir accès et que ceux qui le souhaitent puissent bénéficier de protections nécessaires.
Excusez-moi, monsieur Lefebvre, mais la Seconde Guerre mondiale est terminée sur ce sujet. (Sourires.)
M. Patrice Gélard. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 38, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renard, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le huitième alinéa (8°) du II de l'article 1er.
Cet amendement a déjà été présenté et la commission comme le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 39, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le dixième alinéa (10°) du II de l'article 1er.
Cet amendement a déjà été présenté et la commission comme le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 40, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le onzième alinéa (11°) du II de l'article 1er.
Cet amendement a déjà été présenté et la commission comme le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 41, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le douzième alinéa (12°) du II de l'article 1er.
Cet amendement a déjà été présenté et la commission comme le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 44 rectifié, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le seizième alinéa (16°) du II de l'article 1er.
Cet amendement a déjà été présenté et la commission comme le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 45, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer l'avant-dernier alinéa (23°) du II de l'article 1er.
Cet amendement a déjà été présenté et la commission comme le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 45, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 46, M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès proposent de supprimer le dernier alinéa (24°) du II de l'article 1er.
Cet amendement a déjà été présenté et la commission comme le Gouvernement se sont déjà exprimés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 46, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques.
L'amendement n° 43 est proposé par M. Lefebvre, Mme Borvo, M. Bret, Mme Beaudeau, M. Bécart, Mme Bidard-Reydet, MM. Fischer, Foucaud, Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite, Renar, Mme Terrade et M. Vergès.
Tous deux tendent à supprimer le quinzième alinéa (15°) du II de l'article 1er.
La parole est à M. Poniatowski, rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 12. M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à supprimer la directive de décembre 1997 sur les services postaux de la liste des textes que le Gouvernement pourrait transposer par voie d'ordonnances.
Sans refaire le débat de cet après-midi, sans me répéter, sans répéter ce que vous-même, monsieur le président, avez dit sur ces travées tout à l'heure - M. Pierre Hérisson a également particulièrement insisté sur ce volet - je voudrais tout de même rappeler trois motifs de fond pour lesquels nous proposons ce retrait.
Premier motif - et je me tourne vers vous, monsieur le ministre - le Gouvernement s'est engagé, à plusieurs reprises, devant la représentation nationale, à soumettre au Parlement un projet de loi sur les activités postales. Cet engagement avait été formulé, d'abord, par une lettre de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, à la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications en janvier 1999. Il a ensuite été confirmé en séance publique le 2 février 1999 à l'Assemblée nationale, et je ne répéterai pas les propos que j'ai cités cet après-midi.
Or, malgré cela et en dépit d'un dernier rappel en séance publique au Sénat le 25 mars 1999, par la voix de Mme Dominique Voynet, le projet de loi n'est jamais venu en discussion, et ce qui nous est soumis, c'est la proposition d'aujourd'hui.
J'en viens au deuxième motif. Nous considérons que la réforme d'un service public ne doit pas intervenir par voie d'ordonnance. Il y va non seulement de la considération que nous avons pour La Poste et les postiers, comme l'a très bien dit M. Gérard Larcher cet après-midi, mais aussi pour le service public.
Pour sa part, M. le rapporteur avait bien insisté sur l'exposé des motifs du projet de loi, aux termes duquel « l'habilitation n'est pas demandée pour des directives dont l'objet et la portée politiques justifient un débat par la représentation nationale ».
Monsieur le ministre, avoir fait figurer cette directive dans le projet de loi donne à penser que, aux yeux du Gouvernement, le service public postal n'a pas d'objet et de portée politiques qui justifient un débat par la représentation nationale. Pour notre part, nous pensons le contraire. Voilà pourquoi nous proposons de retirer du champ d'habilitation cette directive.
J'en viens au dernier motif : nous considérons qu'un débat législatif donnera seul l'occasion de discuter des questions d'avenir à un moment où de grands choix politiques s'imposent à La Poste. Alors que les autres postes européennes - n'est-ce pas, monsieur le président ? - se préparent à cette concurrence, il serait maladroit que la poste française ne fasse pas de même.
Je vous rappellerai également, mes chers collègues, que Bruxelles travaille déjà à une révision de la directive. Or la proposition de la Commission européenne ferait basculer plusieurs milliards de francs supplémentaires de chiffre d'affaire de notre poste vers la concurrence.
Vers le 20 ou 22 décembre prochain, une échéance essentielle, à savoir le conseil des ministres européens, se tiendra sous la présidence de M. Christian Pierret. Or, un débat sur ce sujet ne pourrait, à mon avis, qu'aider notre ministre à se préparer à cette échéance.
J'indiquerai, en conclusion, que supprimer la directive postale du champ d'habilitation ne présenterait absolument pas d'inconvénient juridique majeur dans la mesure où l'essentiel de la directive de 1997 a déjà été transposé en 1999.
M. le président. La parole est à M. Lefebvre, pour défendre l'amendement n° 43.
M. Pierre Lefebvre. La directive 97/67/CE aurait dû, selon nous, faire l'objet d'un projet de loi de transposition autonome. Il n'est pas acceptable que le Gouvernement fasse l'économie d'un véritable débat parlementaire sur les évolutions concernant un secteur clef pour l'ensemble des citoyens.
La Poste a toujours joué dans notre société un rôle majeur en tant que service public de proximité garant d'un développement harmonieux du territoire. C'est un élément structurant, au contact direct de la population.
En 1997, la directive élaborée par la Commission européenne, prônant une forte ouverture à la concurrence dans ce secteur, a été nettement rejetée par le Parlement européen, qui a limité cette ouverture à 3 %. C'est la transposition de cette directive de 1997 qui nous est proposée ici.
Mais, outre le fait qu'elle ouvre pour la première fois le secteur postal à la concurrence, cette directive prévoit aussi la poursuite de la libéralisation « progressive et contrôlée ». C'est ce qui se passe actuellement à Bruxelles, où la Commission européenne a déjà rédigé un projet de directive qui va très loin dans le processus de libéralisation de la poste à l'échelon européen. Devrons-nous, dans quelque temps, voir la transposition de cette nouvelle directive proposée par voie d'ordonnance ? Nous ne le souhaitons pas et, dans tous les cas, nous nous y opposerons.
Nous rejetons cette ouverture à la concurrence qui met en péril le service public postal, dont les spécificités en termes de péréquation tarifaire, de présence de qualité sur tout le territoire et d'offre d'accès à tous aux nouveaux modes de transmission de l'information sont essentiels pour la cohésion sociale. Pour être efficaces et continuer à remplir leurs missions de service public, les services postaux ne doivent pas être soumis aux seuls critères de rentabilité financière. Au contraire de ce que nous propose Bruxelles, il faudrait assurer et développer le service public postal dans l'optique de l'intérêt collectif.
Vous l'aurez compris, en ce qui nous concerne, nous nous opposons donc, sur le fond, aux arguments présentés par la commission des affaires économiques et par son rapporteur, même si nous demandons, comme elle, le retrait de cette directive du projet de loi.
Un débat sur ce sujet est indispensable, d'autant plus que l'évolution qui se poursuit aujourd'hui au niveau de la Commission de Bruxelles est lourde de dangers pour l'avenir de ce secteur si cher aux citoyens français.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s 12 et 43 ?
M. Daniel Hoeffel, rapporteur. La commission émet un avis favorable à l'argumentation présentée par M. Poniatowski, rapporteur pour avis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Je voudrais d'abord revenir sur le contenu de cette directive et sur l'intérêt qu'elle représente pour le service postal.
En effet, il vous est proposé d'achever la transposition d'une directive qui est protectrice du service public postal en ce qu'elle définit un service universel et qu'elle permet de réserver à l'opérateur en charge du service public tous les envois d'un poids inférieur à 350 grammes. C'est ainsi que seuls 3 % du marché ont été ouverts à la concurrence.
La plus grande partie des dispositions ont été adoptées dans le cadre de l'article 19 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999, puisque La Poste a été désignée comme opérateur du service universel, et donc les envois d'un poids inférieur à 350 grammes lui ont été réservés.
Il est donc proposé, à travers la transposition de cette directive, des compléments techniques qui sont nécessaires au regard des choix politiques effectués dans le cadre de la loi du 25 juin 1999 précitée. Il s'agit de renforcer les pouvoirs de contrôle du monopole postal, de prévoir la procédure d'autorisation pour les opérateurs qui souhaiteraient fournir des prestations de service universel, de confirmer le choix de ne pas mettre en place une régulation du secteur par le biais d'une autorité administrative indépendante.
Les dernières dispositions de la directive, celles qui concernent notamment la séparation comptable des différentes activités de La Poste, seront prises par décret. L'ensemble de ces dispositions a été soumis à la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications, présidée par M. Guyard, dans lequel siègent un certain nombre de sénateurs ici présents. Je vous rappelle que la Commission supérieure, considérant l'objectif initial visé par le Gouvernement, a émis, le 9 février 2000, un avis favorable à l'adoption par le Parlement de ces dispositions.
M. Pierre Hérisson. Par le Parlement !
M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis. Un avis favorable à l'adoption de ces dispositions sous la forme d'un projet de loi, monsieur le ministre ! Pas sous la forme d'une ordonnance !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. A cette occasion, elle a renouvelé son souhait d'un grand débat public sur le secteur postal pour donner plus de visibilité sur l'avenir de ce secteur. Ce débat est en cours. En effet, le 8 novembre prochain, les résultats de la concertation menée par la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications seront présentés, et vous en aurez donc connaissance à travers votre participation à la Commission. L'ensemble des organismes qui sont consultés par la Commission supérieure pourront ainsi y participer.
L'adoption de cette directive permettrait d'assurer le développement du service public postal et constituerait un signal clair, attendu par les postiers et par leurs organisations syndicales, sur la volonté de la France de réduire au minimum les modifications apportées à la directive de 1997 que propose la Commission européenne. C'est pourquoi le Gouvernement n'est pas favorable à la suppression de cet alinéa.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 12 et 43.
M. Simon Sutour. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Sutour.
M. Simon Sutour. Il s'agit là d'un sujet important.
La droite sénatoriale réclame à cor et à cri « un grand débat national » pour discuter du « service public postal ». Elle prend ce prétexte pour s'opposer à la transposition par ordonnances de la directive postale de 1997.
M. Alain Lambert. C'est son devoir !
M. Simon Sutour. Il est vrai qu'il n'y a pas eu de projet de loi sur le service public postal. Néanmoins, on ne peut pas dire que le Parlement n'a pas eu à débattre du coeur même de l'activité postale. Ce débat a eu lieu lors de l'examen de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire : en effet, dans cette loi, ont été définis tout à la fois le contenu du service universel et le périmètre des services réservés à La Poste, le prestataire de service universel. Mais la droite sénatoriale a refusé de débattre au fond des amendements. Quand l'occasion se présente, quand la discussion peut avoir lieu, il ne faut pas l'esquiver. Il n'était pourtant pas anodin de traiter du service public de La Poste dans un texte relatif à l'aménagement du territoire.
Une loi d'orientation postale, mais pour quoi faire ? Pour augmenter le prix du timbre ? Pour modifier le statut de l'opérateur public, comme le suggère le rapport Sauver La Poste de M. Gérard Larcher ? Nous ne nous inscrivons pas dans cette démarche. Nous ne considérons pas que les exemples souvent cités par le Sénat - les postes allemande, suédoise ou hollandaise - sont des exemples à suivre, avec une hausse du prix du timbre qui est supportée par les usagers non professionnels mais aussi par les entreprises, une qualité du service non améliorée et une restriction du réseau.
L'essentiel de la transposition de la directive postale a déjà été débattu au Parlement : La Poste a été désignée comme opérateur du service universel et le périmètre des services qu'elle garde sous monopole a été fixé au mieux de ce que permet la directive. Il reste quelques dispositions à traduire en droit interne. Ces dispositions sont certes techniques, mais essentielles pour maintenir un haut niveau de qualité au service postal, puisqu'il s'agit de soumettre à autorisation les nouveaux opérateurs et de désigner le ministre en charge des postes comme autorité de réglementation nationale. Il est en effet important de mettre en place un système d'autorisation qui permette, d'une part, aux nouveaux opérateurs de disposer d'un cadre clair d'exercice de leur activité, qui soit fondé sur des procédures transparentes et des critères objectifs et, d'autre part, aux usagers d'être assurés de disposer d'un service de qualité assurant la sécurité des envois et la confidentialité, en particulier.
La droite sénatoriale pourfend l'immobilisme du Gouvernement. Mais où est l'immobilisme si ce n'est de son propre côté, elle qui refuse pour la seconde fois de transposer la directive postale de 1997 alors même - et ce point est important - que la Commission européenne propose à ce jour de réviser cette même directive ? Il serait plus judicieux que la droite sénatoriale se mobilise pour lutter contre les propositions de la Commission. Mais il est vrai que la droite française a du mal à se mobiliser pour défendre le service public postal, comme le démontrent les positions de parlementaires européens français de l'opposition.
Je rappellerai en particulier les positions qu'a prises, le jeudi 12 octobre 2000, M. Hervé Novelli, membre de Démocratie libérale, qui s'est vivement opposé, en commission de l'industrie, du commerce extérieur, de la recherche et de l'énergie du Parlement européen, au rapport défendu par son collègue français M. Gilles Savary, qui visait à limiter la libéralisation de La Poste, à garantir les missions du service public postal et à assurer la pérennité du réseau postal dans les quartiers et dans les campagnes.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le ministre, je dirai, à la suite de votre dernière intervention, qu'il y a deux cas de figure possibles : soit votre propos résulte de votre propre analyse de la situation et, comme nous sommes dans une démocratie, il m'appartient de m'y opposer, soit vous avez repris, dans votre intervention, la teneur d'une note préparée par le cabinet du ministre en charge de La Poste (M. le ministre fait un signe de dénégation), et c'est alors beaucoup plus grave !
M. Simon Sutour. C'est votre conception du Parlement !
M. Pierre Hérisson. C'est en effet plus grave dans la mesure où ce que vous avez dit ce soir ne correspond pas du tout aux débats que les sénateurs et députés, de gauche comme de droite, ont eu, depuis maintenant bientôt trois ans, avec le ministre en charge de La Poste. Vous avez, à travers ce document, fait la preuve, de votre méconnaissance du sujet.
Dans quelles conditions la Commission supérieure du service public des postes et des télécommunications a-t-elle été amenée à émettre à l'unanimité - y compris la droite sénatoriale, par conséquent - un avis favorable à la transposition partielle de la directive, alors, que, quarante-huit heures auparavant, elle avait donné un avis défavorable ? La Poste française n'ayant plus de service réservé à la suite du dépassement de l'échéance, nous avons accepté d'introduire par amendement, dans la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire, la première partie de la directive. Il y avait en effet urgence à mettre notre grand opétateur national en situation de sécurité et à le protéger de risques de réclamation ou d'installation de toute entreprise qui aurait pu se substituer au service public postal dans notre pays.
C'est l'unique raison pour laquelle la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications a accepté d'émettre à l'unanimité un avis favorable. Mais ce dernier était assorti d'une condition que nous avions posée et d'une promesse faite par le ministre : ce dernier s'était en effet engagé à ce que soit discuté au Parlement avant le 31 décembre 1999 un projet de loi devant aboutir à une grande loi sur La Poste.
Cet engagement, je l'ai dit dans la discussion générale, n'a pas été respecté. Et puisque vous présentez la droite sénatoriale comme étant, en quelque sorte, le défenseur d'un libéralisme excessif...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ça, c'est vrai !
M. Pierre Hérisson. Pas du tout ! Pour ce qui est du service public postal, la droite sénatoriale, en particulier en la personne de Gérard Larcher, dans le rapport qu'il a déposé il y a quelque temps, dans toutes les interventions qu'il a pu faire, a fait la démonstration qu'elle avait au moins autant que vous le souci de défendre ce qui peut être considéré quasiment comme une fonction régalienne dans notre pays, car tout le monde a le droit de voir passer le facteur tous les jours, d'avoir un égal accès au courrier, d'avoir les mêmes tarifs d'affranchissement sur la totalité du territoire national.
Sur un sujet d'une telle importance, à savoir la modernisation du service public postal à la française, que certains décrient, que certains soutiennent, qui n'a pas à être comparé de manière approfondie aux autres postes européennes, il n'est donc pas possible de faire autrement que d'ouvrir une discussion, un véritable débat au Parlement.
Voilà pourquoi, me rangeant à l'avis de la commis-sion, je soutiendrai l'amendement défendu par M. Poniatowski.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 12 et 43, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
M. Simon Sutour. Le groupe socialiste également.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2