Séance du 4 avril 2000
Dispositions relatives aux demandes de révision
M. le président.
Par amendement n° 170, le Gouvernement propose de rédiger comme suit
l'intitulé du chapitre III
quinquies
: « Dispositions relatives au
réexamen d'une décision pénale consécutif au prononcé d'un arrêt de la Cour
européenne des droits de l'homme ».
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux,
Monsieur le président, dans la mesure où j'ai déposé
un amendement à l'article 21
terdecies,
qui constitue le corps de ce
chapitre, je demande la réserve de l'amendement n° 170, jusqu'après l'examen de
cet article.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur cette demande de réserve ?
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
La réserve est ordonnée.
Article 21 terdecies
M. le président.
« Art. 21
terdecies
. - L'article 622 du code de procédure pénale est
complété par un 5° ainsi rédigé :
«
5°
Après un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme
constatant une violation de la Convention européenne des droits de l'homme et
des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ou de ses protocoles, lorsque la
condamnation continue de produire ses effets et qu'une réparation équitable du
préjudice causé par cette violation ne peut être obtenue que par la voie de la
révision. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 171, le Gouvernement propose de rédiger comme suit cet
article :
« I. - Il est inséré, après l'article 626 du code de procédure pénale, un
titre III ainsi rédigé :
TITRE III
DU RÉEXAMEN D'UNE DÉCISION PÉNALE
CONSÉCUTIF AU PRONONCÉ D'UN ARRÊT
DE LA COUR EUROPÉENNE
DES DROITS DE L'HOMME
«
Art. 626-1.
- Le réexamen d'une décision pénale définitive peut être
demandé au bénéfice de toute personne reconnue coupable d'une infraction
lorsqu'il résulte d'un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme
que la condamnation a été prononcée en violation des dispositions de la
convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou
de ses protocoles additionnels, dès lors que, par sa nature et sa gravité, la
violation constatée entraîne pour le condamné des conséquences dommageables
auxquelles la "satisfaction équitable" allouée sur le fondement de l'article 41
de la convention ne pourrait mettre un terme.
«
Art. 626-2
. - Le réexamen peut être demandé par :
« - le ministre de la justice ;
« - le procureur général près la Cour de cassation ;
« - le condamné ou, en cas d'incapacité, son représentant légal ;
« - les ayants droit du condamné, en cas de décès de ce dernier.
«
Art. 626-3
. - La demande en réexamen est adressée à une commission
composée de sept magistrats de la Cour de cassation, désignés par l'assemblée
générale de cette juridiction ; chacune des chambres est représentée par un de
ses membres, à l'exception de la chambre criminelle qui est représentée par
deux magistrats, l'un d'entre eux assurant la présidence de la commission. Les
fonctions du ministère public sont exercées par le parquet général de la Cour
de cassation.
« La demande en réexamen doit être formée dans un délai de six mois à compter
de la décision de la Cour européenne des droits de l'homme.
« La décision de la commission est prononcée à l'issue d'une audience publique
au cours de laquelle sont recueillies les observations orales ou écrites du
requérant ou de son avocat, ainsi que celles du ministère public ; cette
décision n'est pas susceptible de recours.
«
Art. 626-4
. - Si elle estime la demande justifiée, la commission
procède conformément aux dispositions ci-après :
« - si le réexamen du pourvoi du condamné, dans des conditions conformes aux
dispositions de la convention, est de nature à remédier à la violation
constatée par la Cour européenne des droits de l'homme, la commission, qui
statue alors comme Cour de cassation, réexamine elle-même le pourvoi ;
« - dans les autres cas, la commission renvoie l'affaire devant une
juridiction de même ordre et de même degré que celle qui a rendu la décision
litigieuse, sous réserve de l'application des dispositions du troisième alinéa
de l'article 625.
«
Art. 626-5
. - La suspension de l'exécution de la condamnation peut
être prononcée, à tout moment, par la commission.
«
Art. 626-6
. - Pour l'application des dispositions du présent titre,
le requérant peut être représenté ou assisté par un avocat au Conseil d'Etat ou
à la Cour de cassation ou par un avocat régulièrement inscrit à un barreau.
«
Art. 626-7
. - Si, à l'issue de la procédure, le condamné est reconnu
innocent, les dispositions de l'article 626 sont applicables.
« II. - A titre transitoire, les demandes de réexamen présentées en
application des articles 626-1 et suivants du code de procédure pénale et
motivées par une décision rendue par la Cour européenne des droits de l'homme
rendue avant la publication de la présente loi au
Journal officiel
de la
République française peuvent être formées dans un délai de six mois à compter
de cette publication. Pour l'application des dispositions de ces articles, les
décisions du comité des ministres du Conseil de l'Europe sont assimilées aux
décisions de la Cour européenne des droits de l'homme. »
Cet amendement est assorti de trois sous-amendements.
Le sous-amendement n° 176, présenté par M. Jolibois, au nom de la commission,
a pour objet :
I. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 171 pour
l'article 626-3 du code de procédure pénale, de remplacer les mots : « de six
mois » par les mots : « d'un an ».
II. - En conséquence, de procéder au même remplacement dans le paragraphe II
de cet amendement.
Le sous-amendement n° 182, déposé par M. Badinter et les membres du groupe
socialiste et apparentés, tend, à la fin du deuxième alinéa du texte présenté
par l'amendement n° 171 pour l'article 626-4 du code de procédure pénale, à
remplacer les mots : « la commission qui statue alors comme Cour de cassation
réexamine elle-même le pourvoi. » par les mots : « la commission renvoie
l'affaire devant la Cour de cassation qui statue en assemblée plénière. »
Le sous-amendement n° 178, présenté par M. Jolibois, au nom de la commission,
vise à supprimer la dernière phrase du paragraphe II de l'amendement n° 171.
Par amendement n° 116, MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe
socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit l'article 21
terdecies
:
« I. - L'article 622 du code de procédure pénale est complété par un 5° ainsi
rédigé :
«
5°
Après un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme
constatant une violation de la Convention européenne de sauvegarde des droits
de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ou de ses
protocoles, lorsque la condamnation continue de produire ses effets et qu'une
réparation équitable du préjudice causé par cette violation ne peut être obtenu
que par la voie de la révision. Lorsque la décision de la Cour européenne porte
sur les conditions dans lesquelles a été jugé le pourvoi en cassation la
révision ne concerne que l'instance de cassation. »
« II. - Le troisième alinéa de l'article 623 du code de procédure pénale est
complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Dans l'hypothèse où la demande fondée sur le 5° de l'article 622 met en
cause un arrêt rendu par la Cour de cassation, la commission ne peut comprendre
de magistrat membre de la chambre criminelle et sa présidence est assurée par
le premier président de la Cour de cassation. L'assemblée plénière est alors
compétente comme cour de révision. »
Par amendement n° 65, M. Jolibois, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le texte présenté par l'article 21
terdecies
pour le 5° de
l'article 622 du code de procédure pénale.
«
5°
Après un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme
constatant une violation de la Convention européenne de sauvegarde des droits
de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ou de ses
protocoles, lorsque la violation de la convention a été de nature à modifier la
décision devenue définitive dans un sens défavorable au condamné. Lorsque la
condamnation par la Cour européenne porte sur les conditions dans lesquelles a
été examiné le pourvoi en cassation, le condamné ne peut demander qu'un
réexamen de son pourvoi. La demande en révision doit être déposée dans le délai
d'un an suivant l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme. »
La parole est à Mme le garde des sceaux, pour présenter l'amendement n°
171.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Cet amendement porte sur une question très importante,
à savoir la révision des condamnations pénales dans l'hypothèse d'une
condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme.
L'Assemblée nationale a adopté, par le biais d'un amendement, sur lequel
j'avais émis un avis favorable, déposé par M. Jack Lang, une disposition
prévoyant qu'une telle condamnation ouvrirait désormais un nouveau cas de
révision.
J'ai totalement fait miens les objectifs de l'auteur de cette disposition -
vous connaissez mon engagement européen - et, après avoir notamment consulté la
Cour de cassation sur cette question, j'ai déposé l'amendement n° 171, qui
prévoit une procédure spécifique de réexamen des décisions pénales, mieux
adaptée au traitement du problème considéré que la procédure de révision.
Les adaptations proposées rejoignent d'ailleurs en partie, j'y reviendrai,
certaines suggestions de la commission des lois du Sénat ou de M. Badinter.
Outre la différence de terminologie, qui paraît opportune pour distinguer la
révision fondée sur des raisons de fait et le réexamen fondé sur des raisons de
droit, cette nouvelle procédure permettra à une commission chargée de se
prononcer sur les demandes de réexamen soit d'examiner elle-même le pourvoi,
dans le cas où c'est la décision de la chambre criminelle elle-même qui a été
critiquée, comme dans l'affaire Kalfaoui, soit de renvoyer directement
l'affaire devant la juridiction du fond, si c'est la décision rendue par la
juridiction du fond qui a été jugée contraire à la convention européenne, comme
dans l'affaire Hakkar.
Dans les deux hypothèses, il ne sera donc pas nécessaire que la chambre
criminelle examine elle-même de nouveau l'affaire, comme c'est le cas en
matière de révision. Cette solution, qui évite à la chambre criminelle de se
déjuger et assure l'impartialité de la décision, rejoint ainsi les propositions
avancées par la commission par son amendement n° 65 et par M. Badinter au
travers de son amendement n° 116, c'est-à-dire que nous adaptons la procédure,
mais que nous acceptons qu'il puisse y avoir une procédure de réexamen du
procès en raison d'une condamnation, fût-ce pour vice de forme, comme c'est le
cas dans l'affaire Hakkar, par la Cour européenne des droits de l'homme.
La composition de la commission chargée de statuer sur la demande de réexamen,
qui a été suggérée par le premier président de la Cour de cassation, se
rapproche de celle de l'assemblée plénière, puisque chacune des chambres de la
Cour de cassation est représentée. Cette solution recoupe également en partie
le dispositif que proposait M. Badinter par l'amendement n° 116.
Par ailleurs, la demande en réexamen devra être formulée dans un certain délai
à compter de la décision de la Cour de Strasbourg : il est proposé un délai de
six mois, identique à celui qui est prévu pour la saisine de la Cour européenne
par l'article 35 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales. A titre transitoire, pour les décisions
rendues avant la publication de la présente loi, un délai de six mois à compter
de cette publication est également prévu. Je suis ouverte à la discussion pour
une modification éventuelle de ce délai.
J'insiste sur le caractère capital des dispositions transitoires. Celles-ci
ont pour objet de permettre à des personnes faisant l'objet de condamnations
définitives de bénéficier de la nouvelle procédure qui vous est proposée.
Autrement dit, une personne se trouvant, par exemple, dans la situation de M.
Hakkar, ainsi que M. Hakkar lui-même, bien entendu, pourra introduire un
recours dans le délai de six mois après la publication de la présente loi
renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des
victimes.
C'est la raison pour laquelle j'estime que nous avons trouvé là le dispositif
qui permettra de réexaminer des affaires jugées, suite à des décisions de la
Cour européenne des droits de l'homme, qui, de surcroît, ouvre le bénéfice de
dispositions transitoires à des personnes qui, depuis 1981, auraient fait
l'objet de décisions favorables de la Cour européenne des droits de l'homme et,
par conséquent, qui permet de régler le problème, comme je m'y étais engagée
devant l'Assemblée nationale. En effet, contrairement à une position
traditionnelle, depuis 1981 justement, de la chancellerie sur ces questions, il
n'était plus possible d'ignorer les recours formés devant la Cour européenne
des droits de l'homme et les arrêts auxquels ils ont donné lieu.
Compte tenu de ce que je viens de vous dire et qui a été décidé, en vérité,
depuis la deuxième lecture de ce projet de loi à l'Assemblée nationale, puisque
je m'étais engagée devant celle-ci, en dehors de l'accord de principe que
j'avais donné à l'amendement de M. Jack Lang relatif à l'affaire Hakkar, à
présenter au Sénat un système nous permettant de mettre en place des procédures
de réexamen qui soient tout à fait comparables à celles de nos partenaires
européens et qui respectent, bien entendu, nos institutions, j'ai lu avec un
grand étonnement les déclarations, rapportées ce soir par une dépêche de
l'AFP,...
M. Michel Charasse.
En volapuk !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux
... d'un parlementaire néerlandais, membre du Conseil de
l'Europe, assemblée non élue au suffrage universel, c'est-à-dire émanation des
parlements nationaux. Ce parlementaire néerlandais a cru devoir mettre en
cause, dans des termes inadmissibles, l'attitude de notre pays à la suite de la
décision rendue par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire
Hakkar.
M. Hakkar, chacun ici s'en souvient, a été condamné en 1989 à la réclusion
criminelle à perpétuité par une cour d'assises pour l'assassinat d'un policier,
commis en France en 1984. Plus tard, la Cour européenne des droits de l'homme a
condamné la France pour violation des droits de la défense : M. Hakkar avait
récusé tous ses défenseurs, et le procès s'est donc tenu sans défenseur, ce qui
certes est sans doute très regrettable. Telles sont les raisons de la
condamnation de la France.
Les déclarations de ce parlementaire sont d'autant plus déplacées qu'elles
surviennent la veille du jour où il devait être reçu, à sa demande, à la
chancellerie, et ce non pas par n'importe qui, mais par le directeur de mon
cabinet, c'est-à-dire par mon représentant personnel. Or ce parlementaire s'est
indigné de ce que je ne le reçoive pas moi-même. Mais je vous le demande,
mesdames, messieurs les sénateurs : ai-je reçu personnellement chacun des 898
parlementaires nationaux élus à l'Assemblée nationale ou au Sénat ? Les
parlementaires nationaux que je n'ai pas reçus personnellement ont-ils eu
l'outrecuidance de s'en plaindre, et ce publiquement ?
M. Josselin de Rohan.
Très bien !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Voilà ! Par le biais d'une dépêche de l'AFP, on se
permet de donner des leçons à la France à travers son Gouvernement, et ce dans
des termes évidemment inadmissibles.
M. Josselin de Rohan.
Ne vous laissez pas troubler, les Néerlandais sont coutumiers du fait !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Je ne veux pas généraliser, mais j'ai décidé de ne pas
laisser passer cela, d'autant que chacun connaît mon engagement européen et que
je suis en passe de résoudre le problème qui a alerté ce parlementaire, ce que
personne n'avait fait avant moi.
M. Michel Charasse.
La bière et l'aquavit !...
(Sourires.)
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
J'ajoute que, compte tenu de ces déclarations, le
rendez-vous qui avait été accordé à ma demande par le directeur de mon cabinet
à ce parlementaire n'a évidemment plus lieu d'être.
(Applaudissements.)
M. Josselin de Rohan.
Vous avez raison !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Si ce parlementaire avait rencontré le directeur de mon
cabinet, il lui aurait été rappelé que la France, en dehors de toute injonction
de tel ou tel parlementaire, tient le plus grand compte des décisions de la
Cour européenne des droits de l'homme. Par ailleurs, je signale que j'ai
autorisé la visite de ce parlementaire au détenu Hakkar sur le lieu de la
détention de celui-ci, le 14 février dernier, alors que rien ne m'y obligeait,
et que j'avais accepté de le faire recevoir à mon cabinet. Je rappelle enfin
que nous sommes dans un Etat de droit ; hormis par le biais de la grâce
présidentielle, monsieur le président du groupe du RPR, laquelle ne relève que
du seul Président de la République, on ne fait pas sortir de prison une
personne condamnée en dehors des règles du code de procédure pénale. Surtout,
en liaison avec le Parlement, notamment avec M. Jack Lang, qui était alors
député, le Gouvernement a, depuis quelques mois, entendu travailler à
introduire dans notre législation les outils juridiques nécessaires à la prise
en compte sans délai des conséquences des décisions de la Cour européenne des
droits de l'homme.
Les dispositions prévues par l'amendement n° 171 seront, si celui-ci est
adopté, applicables au cas Hakkar. Ainsi, la France aura rendu possible la
révision, y compris pour des affaires jugées avant la promulgation de la loi
dont nous débattons en ce moment. Les critiques du membre de l'assemblée
parlementaire du Conseil de l'Europe sont donc particulièrement irrecevables ce
soir. Il est inutile de vous préciser, mesdames, messieurs les sénateurs, que,
en dehors de l'écho qui sera forcément donné à cette déclaration que je
prononce devant vous, mes paroles seront naturellement transmises
personnellement par le directeur de mon cabinet à M. l'ambassadeur des Pays-Bas
en France.
(Applaudissements.)
MM. Michel Charasse et Jacques Pelletier.
Très bien !
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 176.
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
J'ai compris tout à l'heure, en écoutant son exposé, que Mme
la ministre était tout à fait disposée à envisager un allongement du délai dans
lequel la demande en réexamen doit être formée.
Précisément, prévoir un délai d'un an nous semble préférable. En effet, un
délai de six mois est vraiment trop court. Tel est l'objet du sous-amendement
n° 176.
M. le président.
La parole est à M. Charasse, pour présenter le sous-amendement n° 182.
M. Michel Charasse.
Il s'agit d'apporter une précision à l'amendement n° 171 du Gouvernement,
s'agissant de l'article 626-4 du code de procédure pénale, en prévoyant que
c'est non pas la commission qui statue alors comme Cour de cassation, mais la
commission qui renvoie l'affaire devant la Cour de cassation qui statue en
assemblée plénière.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 178.
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Cet amendement tend à supprimer la dernière phrase du
paragraphe II de l'amendement n° 171.
En effet, la commission estime que l'on peut admettre le réexamen d'une
procédure pénale à la suite d'une décision juridictionnelle de la Cour
européenne des droits de l'homme, mais que cela paraît beaucoup plus
contestable lorsque la décision émane du comité des ministres, même si cette
possibilité n'était ouverte qu'à titre transitoire.
M. le président.
La parole est à M. Charasse, pour présenter l'amendement n° 116.
M. Michel Charasse.
Monsieur le président, pour gagner du temps, comme il a été commenté tout à
l'heure, allusivement en tout cas, à deux ou trois reprises par Mme le garde
des sceaux dans son commentaire d'ensemble sur l'amendement n° 171, je
considère qu'il est défendu.
J'ai cru comprendre qu'une partie de l'amendement n° 116 rejoignait les
préoccupations du garde des sceaux.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 65.
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Par cet amendement, nous avions rédigé à nouveau le texte
relatif à la révision après un arrêt de la Cour européenne des droits de
l'homme. Cet amendement devient sans objet, puisqu'il se trouve satisfait par
celui du Gouvernement, qui nous semble plus complet et plus précis.
Par conséquent, la commission retire l'amendement n° 65.
M. le président.
L'amendement n° 65 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 171, le sous-amendement
n° 182 et l'amendement n° 116 ?
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
La commission a émis un avis favorable sur l'amendement n°
171, sous réserve de l'adoption des sous-amendements n°s 176 et 178 qu'elle a
déposés.
Je rappelle pour mémoire que le sous-amendement n° 176 a pour objet de
remplacer les mots « de six mois » par les mots « d'un an ».
Quant au sous-amendement n° 182, la commission n'a pas pu l'examiner.
Cependant, M. Badinter l'avait évoqué lors de la réunion de la commission. Au
fond, il paraît assez normal que la commission renvoie une affaire aussi grave
devant la Cour de cassation qui statue en assemblée plénière. Je suis donc
favorable au sous-amendement n° 182.
Le sous-amendement n° 178 de la commission vise à supprimer la dernière phrase
du II de l'amendement n° 171 du Gouvernement afin de retirer des cas de
révision les décisions qui émanent non pas de la Cour européenne des droits de
l'homme mais du comité des ministres.
Quant à l'amendement n° 116, il est satisfait par l'amendement n° 171 du
Gouvernement. Je pense donc que M. Charasse pourrait le retirer.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements n°s 176, 182 et 178,
ainsi que sur l'amendement n° 116 ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 176, qui vise
à porter à un an le délai pour saisir la commission de réexamen, je m'en remets
à la sagesse du Sénat.
L'amendement n° 116 est effectivement satisfait par celui qu'a présenté le
Gouvernement.
M. Michel Charasse.
Retiré !
M. le président.
L'amendement n° 116 est retiré.
Veuillez poursuivre, madame le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Je ne suis pas favorable au sous-amendement n° 178, car
il tend à supprimer la référence aux décisions du comité des ministres du
Conseil de l'Europe. Il me semble qu'il existe un malentendu, que je vais
essayer de dissiper.
Avant le 1er novembre 1998, date de l'entrée en vigueur du protocole n° 11 qui
a supprimé la Commission européenne des droits de l'homme, le mécanisme de
recours prévu par la convention était le suivant : le requérant saisissait la
Commission européenne, qui rendait un avis sous forme de rapport concluant à la
violation ou non de la convention. Si, dans un délai de trois mois, ni la
commission ni l'Etat intéressé ne saisissait la Cour européenne, le comité des
ministres, en tant qu'organe juridictionnel, jugeait lui-même l'affaire, en
application de l'article 32. C'est ce qui s'est passé dans l'affaire Hakkar.
Depuis l'entrée en vigueur du protocole n° 11, la Commission et le pouvoir
juridictionnel du comité des ministres ont été supprimés, sauf à titre
transitoire pour des affaires pendantes devant le comité à la suite des
décisions déjà rendues par l'ancienne commission. C'est l'article 5, paragraphe
6, du protocole.
Il est donc indispensable de faire référence aux décisions du comité des
ministres, sinon aucun réexamen ne sera possible dans ces affaires, notamment
dans l'affaire Hakkar qui, je le rappelle, concerne une personne condamnée en
cour d'assises sans l'assistance d'un avocat.
Pour éviter toute ambiguïté, le Gouvernement propose toutefois de rectifier
son amendement afin de montrer clairement dans quelles circonstances
exceptionnelles le comité des ministres a pu avoir ou pourra avoir un rôle
juridictionnel. Vous connaissez les dispositions de l'amendement n° 171. Je
souhaiterais simplement vous donner lecture de la rédaction que nous
proposerions pour la dernière phrase du paragraphe II : « Pour l'application
des dispositions de ces articles, les décisions du Comité des ministres du
Conseil de l'Europe, après une décision de la commission européenne des droits
de l'homme, en application de l'article 32 (ancien) de la convention de
sauvegarde des droits de l'homme ou de l'article 5 (paragraphe 6) de son
protocole n° 11, sont assimilées aux décisions de la Cour européenne des droits
de l'homme. »
Compte tenu de ces précisions et cette rectification, le sous-amendement n°
178, qui aura eu le mérite de permettre une clarification opportune d'un texte
important, pourrait, me semble-t-il, être retiré, monsieur le rapporteur. Je
suis donc prête à déposer la rectification à l'amendement n° 171 du
Gouvernement si vous retirez votre sous-amendement. Nous aurons ainsi la
clarification sans ambiguïté que vous souhaitez.
Par ailleurs, je ne suis pas favorable au sous-amendement n° 182. Il me semble
que le texte proposé par le Gouvernement présente, au regard de l'objectif, les
garanties nécessaires.
En effet, la commission de réexamen prévue par l'amendement du Gouvernement
est composée d'un membre de chacune des chambres de la Cour de cassation. C'est
donc une forme d'assemblée plénière. Exiger que la commission renvoie l'affaire
à l'assemblée plénière alourdirait, me semble-t-il, la procédure sans raison
véritable. En pratique, la commission statuera elle-même sur le pourvoi dans
les cas où la France a été condamnée pour avoir refusé d'examiner le pourvoi au
fond ; c'est l'affaire Kalfaoui. Ce qui est critiqué, ce n'est donc pas le fond
de la décision de la Cour de cassation, c'est plutôt l'absence de décision.
Dans ces conditions, pourquoi vouloir demander à la commission de dire que le
pourvoi doit être examiné et demander ensuite à l'assemblée plénière de
l'examiner elle-même ? Je crois que cela ne ferait que retarder encore l'examen
du fond du pourvoi par la commission, ce qui nuirait aux intérêts du requérant.
Nous sommes là sur des questions de procédure. Je crois que nous avons
exactement le même résultat.
M. le président.
Monsieur le rapporteur, le sous-amendement n° 178 est-il maintenu ?
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Madame le garde des sceaux, vous avez bien voulu proposer de
préciser - ce qui allonge effectivement l'article - le caractère exceptionnel
et purement temporaire de l'application de la révision dans le cas d'une
décision qui émanerait du Comité des ministres. Ainsi, la phrase qui pouvait
nous irriter ne nous irriterait que quelque temps, l'espace d'un instant. Je
pense donc, à titre personnel, que l'on pourrait accepter cette irritation
temporaire.
M. le président.
Je vais mettre aux voix le sous-amendements n° 176.
M. Patrice Gélard.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Monsieur le président, je crois que M. le rapporteur a fait un oubli.
C'est la raison pour laquelle je lui suggère une rectification. En effet, le
délai de six mois apparaît à deux reprises dans l'amendement du Gouvernement :
dans le texte proposé pour l'article 626-3 du code de procédure pénale et dans
celui qui est présenté pour l'article 626-7 du même code, qui concerne les
mesures transitoires. Ne serait-il pas souhaitable d'étendre le sous-amendement
n° 176 à l'article 626-7 ?
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
M. Gélard me rappelle un oubli... qui n'en est pas un.
M. Patrice Gélard.
Ah ?
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
En effet, dans le texte même du sous-amendement n° 176, un
paragraphe II vise à corriger la deuxième mention du délai.
M. Patrice Gélard.
D'accord ! J'ai lu trop vite !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 176, pour lequel le Gouvernement s'en
remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 182, accepté par la commission et
repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je viens d'être saisi de la rectification à l'amendement n° 171 du
Gouvernement, qui tend à écrire comme suit la dernière phrase du II :
« Pour l'application des dispositions de ces articles, les décisions du Comité
des ministres du Conseil de l'Europe rendues, après une décision de la
commission européenne des droits de l'homme, en application de l'article 32
(ancien) de la convention de sauvegarde des droits de l'homme ou de l'article 5
(paragraphe 6) de son protocole n° 11, sont assimilées aux décisions de la Cour
européenne des droits de l'homme. »
Il s'agit donc de l'amendement n° 171 rectifié, et le sous-amendement n° 178
est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 171 rectifié, accepté par la
commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 21
terdecies
est ainsi rédigé.
Nous en revenons à l'amendement n° 170, qui a été précédemment réservé et qui
tend à rédiger comme suit l'intitulé du chapitre III
quinquies :
« Dispositions relatives au réexamen d'une décision pénale consécutif au
prononcé d'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme. »
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Jolibois,
rapporteur.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 170, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du chapitre III
quinquies
est ainsi
rédigé.
Chapitre IV
Dispositions relatives à la communication
Articles additionnels avant l'article 22 A
ou après l'article 27