Séance du 10 novembre 1999
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Décision du Conseil constitutionnel
(p.
1
).
3.
Candidatures à une commission mixte paritaire
(p.
2
).
4.
Diverses professions relevant du ministère de la justice.
- Adoption d'une proposition de loi (p.
3
).
Discussion générale : Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la
justice ; MM. Nicolas About, rapporteur de la commission des lois ; Michel
Dreyfus-Schmidt.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er
(supprimé)
(p.
4
)
Article 2 (p.
5
)
M. Patrick Lassourd.
Adoption, par scrutin public, de l'article.
Articles 3 à 5. - Adoption (p.
6
)
Article 6 (p.
7
)
M. Patrick Gélard.
Adoption de l'article.
Article 7. - Adoption (p.
8
)
Vote sur l'ensemble (p.
9
)
M. Robert Bret.
Adoption de la proposition de loi.
5.
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
(p.
10
).
6.
Lutte contre la corruption.
- Discussion d'un projet de loi (p.
11
).
Discussion générale : Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la
justice ; M. José Balarello, rapporteur de la commission des lois ; Mme Dinah
Derycke, MM. Christian de La Malène, Jean-Jacques Hyest, Robert Bret.
Clôture de la discussion générale.
7.
Dépôt du rapport d'une commission d'enquête
(p.
12
).
8.
Lutte contre la corruption. -
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi. (p.
13
).
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.
Article 1er (p. 14 )
Article 435-1 du code pénal (p. 15 )
Amendement n° 1 de la commission. - M. José Balarello, rapporteur de la
commission des lois ; Mme le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 435-2 du code pénal (p. 16 )
Amendement n° 2 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux.
- Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 435-3 du code pénal (p. 17 )
Amendements n°s 3 et 4 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des
sceaux. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 435-4 du code pénal (p. 18 )
Amendement n° 5 de la commission et sous-amendements n°s 14, 15 du Gouvernement et 16 de M. Bret. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Robert Bret. - Retrait du sous-amendement n° 16 ; rejet des sous-amendements n°s 14 et 15 ; adoption de l'amendement n° 5 rédigeant l'article du code.
Article 435-5 du code pénal. - Adoption
(p.
19
)
Article 435-6 du code pénal
(p.
20
)
Amendement n° 6 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux.
- Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Adoption de l'article 1er modifié.
Article 2 (p. 21 )
Amendements n°s 7 et 8 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des
sceaux. - Adoption de deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (p. 22 )
Amendement n° 9 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux.
- Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 3 (p. 23 )
Amendement n° 10 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 4 (p. 24 )
Amendement n° 11 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde
des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 25 )
Amendement n° 12 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux.
- Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Vote sur l'ensemble (p. 26 )
M. Robert Bret, Mme Dinah Derycke.
Adoption du projet de loi.
9.
Dépôt d'une question orale avec débat
(p.
27
).
10.
Dépôt d'un projet de loi
(p.
28
).
11.
Texte soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
29
).
12.
Dépôt de rapports
(p.
30
).
13.
Dépôt d'un avis
(p.
31
).
14.
Ordre du jour
(p.
32
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à seize heures vingt.)
1
PROCE`S-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel, par
lettre en date du 9 novembre 1999, le texte de la décision rendue par le
Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi
relative au pacte civil de solidarité.
Acte est donné de cette communication.
Cette décision du Conseil constitutionnel sera publiée au
Journal officiel,
édition des lois et décrets.
3
CANDIDATURES A` UNE COMMISSION
MIXTE PARITAIRE
M. le président.
J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître
qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à la
commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions
restant en discussion du projet de loi relatif à la réduction négociée du temps
de travail.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission
mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
4
DIVERSES PROFESSIONS RELEVANT
DU MINISTÈRE DE LA JUSTICE
Adoption d'une proposition de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 416,
1998-1999), adoptée par l'Assemblée nationale, portant sur diverses professions
relevant du ministère de la justice, la procédure civile et le droit comptable.
[Rapport n° 57 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président, monsieur
le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, dans le cadre de l'examen de cette proposition de loi,
déposée à l'origine par M. Gérard Gouzes, je commencerai tout d'abord par vous
demander de soutenir l'article 2, qui vise à permettre, sous certaines
conditions, la perception par les huissiers de justice d'un droit proportionnel
à la charge du créancier pour le recouvrement forcé des créances.
Consciente que cette mesure est controversée, je voudrais vous faire part des
quelques éléments de contexte qui m'apparaissent indispensables au débat.
Je rappelle qu'il y a, au départ, un choix très clair de l'Etat : ne pas
exécuter lui-même les décisions de justice, mais confier l'exclusivité de cette
tâche à des professionnels libéraux, officiers publics et ministériels, les
huissiers de justice.
On peut évidemment contester ce choix. Je constate, pour ma part, que le
système qui est le nôtre depuis très longtemps se développe partout dans le
monde et en Europe - je pense notamment aux pays de l'ancien bloc de l'Est - et
qu'il fait, ainsi, largement preuve de son efficacité et de son pouvoir
d'attraction.
Ces professionnels doivent, bien entendu, être rémunérés pour les
recouvrements qu'ils effectuent.
L'article 32 de la loi du 9 juillet 1991 sur les procédures civiles
d'exécution a posé comme principe que, en matière d'exécution forcée,
l'ensemble des frais est à la charge du débiteur. Or, le décret tarifaire de
1996 prévoyait que les frais étaient partagés entre le débiteur et le
créancier. Ils sont entièrement tarifés, et l'huissier a interdiction de
prélever des honoraires libres sur les créanciers.
Dans un arrêt du 5 mai 1999, le Conseil d'Etat a annulé les dispositions qui
permettaient de prélever un droit sur le créancier.
Que se passera-t-il si la proposition de loi qui vous est soumise n'est pas
adoptée ? Les huissiers ne seront plus rémunérés que par le seul droit à la
charge du débiteur. Or, nous savons que c'est manifestement insuffisant.
Le Gouvernement a toujours eu le souci, que l'on peut comprendre, d'alléger la
charge des débiteurs et a donc fixé ce droit à un niveau très bas.
Si, faute de rémunération décente, les huissiers ne peuvent plus faire leur
travail, je crains qu'ils ne laissent le marché du recouvrement, dans le
meilleur des cas, à des sociétés de recouvrement, incontestablement plus chères
et, dans le pire des cas, à la pure force privée : on sait que cela existe, et
que trop souvent déjà on fait intervenir des « gros bras » pour les expulsions
ou les recouvrements de créances, au mépris du respect du droit et de la
dignité humaine.
Je sais, bien sûr, qu'aucun d'entre vous ne souhaite que l'on en arrive à de
telles extrémités. Quelles peuvent-être, alors, les solutions ?
Je crois que nous devons tout d'abord exclure d'augmenter les droits pesant
sur les débiteurs : ce serait contraire aux orientations prises par le
Parlement, qui a voté, dans la loi relative à l'exclusion, une réduction de
moitié du tarif des huissiers au profit des débiteurs surendettés. Mais ce
serait aussi socialement injuste, dans la mesure où la majorité des débiteurs
sont non pas de mauvaise foi mais confrontés à de réelles difficultés
économiques et financières. Il ne faut donc pas les accabler davantage.
Une autre voie, qui consisterait à rétablir le système des honoraires libres,
pourrait également être envisagée.
Je n'y suis pas, pour ma part, très favorable - et la profession d'huissier
pas davantage - parce que l'expérience a montré à quelles dérives et inégalités
pouvait conduire une liberté mal maîtrisée dans un domaine aussi sensible.
C'est la raison pour laquelle je crois indispensable de soutenir la
modification prévue à l'article 2 de la proposition de loi. D'abord, comme je
l'ai déjà dit, parce que les solutions alternatives ne sont pas satisfaisantes,
mais aussi et surtout parce que l'impact de cette mesure doit être
relativisé.
Il s'agit d'une mesure dont l'application ne coûtera pas très cher aux
créanciers, qui sont pour la plupart, nous le savons, des créanciers
institutionnels. A titre d'exemple, ceux-ci devront payer 338 francs pour faire
recouvrer une créance de 3 000 francs. Je rappelle que les tarifs des sociétés
de recouvrement sont de l'ordre de 25 % de la somme due, soit, pour reprendre
le même exemple, 750 francs !
Par ailleurs, la modification proposée ne nous interdira pas de réfléchir très
concrètement aux problèmes de l'exécution des décisions de justice, qui, je le
sais, vous préoccupent. C'est un thème que l'on ne peut, à mon sens, aborder de
manière dispersée, et l'article proposé ici est essentiel pour maintenir une
exécution professionnelle et efficace des décisions de justice.
Enfin - et je crois que cela devrait pleinement vous rassurer, du moins je
l'espère - un projet de décret a déjà été préparé, qui a reçu, avant l'été, sur
ses points essentiels, l'accord des trois organismes représentatifs de la
profession d'avocat et de la profession d'huissier. Ce texte est très
important, car il prévoit l'exonération totale des créanciers prud'homaux, des
créanciers d'aliments et des organismes publics et sociaux. Il maintient, par
ailleurs, l'interdiction pour les huissiers de percevoir des honoraires
libres.
Cependant, il ne pourra être soumis au Conseil d'Etat que si cette proposition
de loi est adoptée. Voilà pourquoi je vous demande, mesdames, messieurs les
sénateurs, de bien vouloir voter ce texte, qui me paraît constituer une
solution équilibrée à l'ensemble des problèmes que je viens d'évoquer.
Je souhaite également que les autres mesures proposées, qui concernent les
autres professions judiciaires et juridiques dont j'ai la charge ainsi que la
procédure civile, puissent être adoptées.
Par la loi du 6 avril 1998, vous avez créé le comité de la réglementation
comptable, chargé d'établir des prescriptions comptables, et notamment
d'adapter certaines règles aux normes internationales.
Je crois utile, dans un souci de coordination, de donner à ce comité le
pouvoir d'établir certaines prescriptions en matière de comptes consolidés des
sociétés commerciales, celles-ci relevant jusqu'à présent d'un décret en
Conseil d'Etat.
La mesure prévue par l'article 3 de la loi permettra de conforter le comité de
la réglementation comptable, tout en donnant aux sociétés des moyens modernes
d'établissement de leurs comptes consolidés dans un contexte international.
L'article 4 prévoit, quant à lui, d'introduire une modification concernant la
procédure disciplinaire applicable aux avocats. Le législateur de 1990,
soucieux d'améliorer le fonctionnement des ordres, a instauré la possibilité,
pour les conseils de l'ordre des barreaux d'au moins 500 avocats, de siéger
comme conseil de discipline en une ou plusieurs formations de neuf membres,
présidées par le bâtonnier ou un ancien bâtonnier.
En l'état, cette procédure ne permet pas, dans les grands barreaux, de traiter
les dossiers disciplinaires dans de bonnes conditions. En effet, le conseil de
l'ordre statuant en assemblée plénière constitue l'organe disciplinaire de
premier degré. Dans les barreaux regroupant un nombre important d'avocats, dont
celui de Paris, qui en compte plus de 13 000, la réunion en assemblée plénière
du conseil de l'ordre pose d'importants problèmes, notamment pour atteindre le
quorum
requis pour chaque procédure disciplinaire, soit plus de la
moitié des membres du conseil.
Aussi convient-il, pour assurer dans les grands barreaux un traitement
efficace de ces procédures, de réduire de neuf à cinq le nombre des membres
composant les formations disciplinaires et d'élargir aux anciens membres du
conseil de l'ordre la possibilité de siéger dans ces formations.
A la suite d'une erreur de transcription, le texte transmis par l'Assemblée
nationale évoque « les membres ou anciens membres du conseil de l'ordre ayant
quitté leurs fonctions depuis au moins huit ans », au lieu de : « depuis moins
de huit ans » dans la rédaction proposée.
Je vous demande toutefois d'adopter cet article qui, je vous l'assure, fera
prochainement l'objet d'une correction.
(M. Dreyfus-Schmidt
s'esclaffe.)
De même, je vous demande de bien vouloir adopter l'article 5, qui concerne la
procédure civile. J'ai en effet tout particulièrement à coeur de rénover en
profondeur la justice civile, justice du quotidien dont les dysfonctionnements
affectent profondément la vie de nos concitoyens. Je pense, par exemple, ici,
aux lenteurs qui viennent retarder un divorce ou le recouvrement d'une créance
alimentaire.
Cette ambition d'une justice civile rénovée, vous l'avez soutenue en adoptant
la loi du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit. Le pouvoir
réglementaire a bien évidemment joué pleinement son rôle en cette matière pour
permettre de réaliser ces ambitions.
Ainsi, le décret du 28 décembre 1998 relatif à la procédure civile est
intervenu pour améliorer et accélérer le traitement des contentieux civils,
ainsi que pour favoriser les modes de règlement amiable des litiges.
Ce décret prévoit notamment que, lorsque les parties ont transigé et sont
parvenues à un accord, elles ont désormais la faculté de demander au président
du tribunal de grande instance de conférer force exécutoire à leur accord. Il
s'agit d'une disposition essentielle qui s'inscrit pleinement dans la politique
de mise en oeuvre concrète et pragmatique des modes alternatifs de solution des
contentieux.
En effet, le texte permet désormais de donner une valeur juridique nouvelle à
l'accord intervenu, identique à celle d'un jugement. Dès lors, et dans
l'hypothèse où l'une des parties serait tentée de reprendre sa parole et de se
soustraire aux obligations qu'elle avait librement contractées, son adversaire
pourra en poursuivre l'exécution forcée.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Avec droit de recouvrement de la créance ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Vous comprenez, j'en suis sûre, l'intérêt d'un tel
dispositif, gage de sécurité juridique, qui a recueilli l'assentiment tant de
la profession d'avocat, toujours soucieuse de favoriser l'émergence du
compromis - n'est-ce pas monsieur Dreyfus-Schmidt ? -...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Pas sur l'article 2, madame la ministre !
(Sourires.)
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
..., fidèle en cela à l'adage selon lequel « un accord
est toujours préférable à un procès », que de la profession d'huissier de
justice, chargée de l'exécution.
Une difficulté a toutefois été soulevée par la doctrine.
En effet, la loi de 1991 relative aux procédures civiles d'exécution énumère
limitativement les actes qualifiés de titres exécutoires et comme tels
susceptibles de donner lieu à une exécution forcée par huissier. Le législateur
de 1991 n'avait pu, à l'époque, prévoir les développements de la transaction.
Aussi l'article 3 de cette loi ne prévoit-il pas expressément de faire figurer
la transaction au rang des titres exécutoires.
C'est pourquoi il est nécessaire, pour éviter les contestations éventuelles,
de prendre en compte cette innovation et d'inscrire la transaction homologuée
par le juge au côté des décisions de justice. En visant expressément la
transaction, l'article 3 de la loi de 1991, une fois modifié, permettra que les
mesures nouvelles, voulues par le Gouvernement et le Parlement, deviennent
pleinement efficaces.
Enfin, je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, de bien vouloir
adopter l'article 6, qui a pour objet la validation de diverses mesures
intéressant la carrière de quatre-vingt-un personnels de l'administration
pénitentiaire.
En effet, les promotions au grade de premier surveillant prenant
respectivement effet au 16 février et au 14 septembre 1998 et faisant suite à
la session du concours interne organisée au titre de l'année 1997 font
actuellement l'objet d'un recours pour excès de pouvoir formé auprès du
tribunal administratif de Paris.
Ce recours est notamment fondé sur les moyens procédant du défaut de base
légale tels que la désignation d'examinateurs en dehors des membres du jury et
l'absence de péréquation des notes entre les différents groupes
d'examinateurs.
Sans vouloir influer de quelque manière que ce soit sur le cours de la justice
régulièrement saisie, je puis vous indiquer qu'il est juridiquement permis de
penser que le second moyen sera écarté, dès lors que l'absence alléguée de
péréquation est infirmée par le procès-verbal en ce qui concerne les épreuves
d'admissibilité et formellement justifiée par les faibles écarts de notes
existant entre les différents groupes d'examinateurs.
En revanche, la désignation d'examinateurs en dehors des membres du jury, qui
est contraire aux dispositions du statut général de la fonction publique,
notamment à l'article 20 de la loi du 11 janvier 1984, est de nature à
justifier l'annulation des promotions de 1998.
Dans ces conditions, sans attendre une décision définitive du juge
administratif, j'ai estimé devoir faire régulariser les promotions litigieuses
en saisissant le Parlement d'un projet de validation législative.
Dans le présent cas, le recours au processus de validation législative ne
contrevient pas au principe de séparation des pouvoirs, puisqu'il ne concerne
que des décisions individuelles sur lesquelles la justice ne s'est pas encore
prononcée. Dans ces conditions, il ne va en aucun point à l'encontre de la
jurisprudence constante du Conseil constitutionnel. Ainsi, la sécurité
juridique des fonctionnaires, dont la carrière s'est poursuivie après qu'ils
eurent bénéficié de l'acte dont la légalité est actuellement mise en cause,
sera assurée.
C'est sous le bénéfice de ces observations que j'ai l'honneur de vous demander
de bien vouloir valider par la voie législative les promotions au grade de
premier surveillant des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire
résultant du concours organisé en 1997.
Lors du discours que j'ai prononcé à Lyon, le 22 octobre dernier, devant la
convention des avocats, j'ai annoncé le dépôt d'amendements à la proposition de
loi soumise aujourd'hui à votre examen. Il s'agissait de tirer les leçons du
rapport que M. Nallet a remis, à ma demande, au Premier ministre sur les
réseaux pluridisciplinaires. Une consultation sur le texte de cet amendement
est en cours avec les trois organisations professionnelles, à savoir le conseil
national des barreaux, la conférence des bâtonniers et le barreau de Paris.
Sitôt la réponse de ces organismes connue, je soumettrai ce texte à la
représentation nationale.
Les avocats sont en effet confrontés à une concurrence nationale et
internationale de plus en plus vive. Ils doivent, par conséquent, disposer des
outils juridiques susceptibles d'assurer la pérennité et le développement de
leur activité. A cet effet, le texte prévoira de modifier sous trois aspects la
loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des
professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire dont le
titre est protégé.
L'évolution de la consultation sur ce projet de modifications de la loi de
1990 ne fait donc pas obstacle à l'adoption conforme de la proposition de loi
dont nous débattons aujourd'hui.
Pour conclure, je tiens à remercier M. Nicolas About, rapporteur, la
commission des lois du Sénat et son président, M. Jacques Larché, pour le vote
conforme qu'ils ont émis hier sur cette proposition de loi.
Je souhaite que le Sénat permette maintenant l'adoption définitive de ce texte
que les différents professionnels concernés attendent, vous le comprendrez,
avec une grande impatience.
(Applaudissements sur les travées socialistes et
sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, madame le ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est
soumis n'a plus rien à voir avec la proposition de loi de M. Gouzes, qui ne
comportait qu'un article unique. Celui-ci a été supprimé par l'Assemblée
nationale, les dispositions qu'il contenait ayant été intégrées à la loi du 23
juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale.
Mais cette proposition de loi a tout de même permis à l'Assemblée nationale
d'insérer d'importantes dispositions relatives aux émoluments perçus par les
huissiers en matière de recouvrement de créances, ainsi que diverses autres
mesures de nature quelque peu hétéroclite.
En ce qui concerne les dispositions relatives aux émoluments perçus par les
huissiers de justice, par exception au principe général selon lequel les frais
de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, la disposition prévue à
l'article 2 a pour objet de permettre le rétablissement de la perception par
les huissiers d'un droit proportionnel de recouvrement à la charge des
créanciers.
Ce droit avait été instauré par les articles 10 à 12 du décret du 12 décembre
1996 portant fixation du tarif des huissiers. Or, ces articles ont été annulés
par un arrêt du Conseil d'Etat en date du 5 mai 1999.
En effet, la légalité du décret de 1996 a rapidement été contestée par les
organismes professionnels représentant les avocats, qui ont saisi la
juridiction administrative de recours pour excès de pouvoir.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Pas seulement eux ! Il y a eu également la CFDT, la CGT, etc. !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Le Conseil d'Etat a annulé les articles 10 à 12 du décret,
après avoir constaté que ceux-ci étaient contraires au principe posé par
l'article 32 de la loi du 9 juillet 1991, aux termes duquel « les frais de
l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s'il est manifeste qu'ils
n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés ».
Cette annulation a deux effets importants.
Tout d'abord, elle nécessite la validation de l'application du décret dans le
passé pour éviter un abondant contentieux. A défaut, chaque créancier serait en
effet fondé à réclamer le remboursement des droits perçus par les huissiers
entre l'entrée en vigueur du décret et son annulation. On ne peut imaginer
laisser un tel contentieux s'engager, et la validation sera donc proposée à
l'article 7.
Cette annulation pose aussi le problème d'une baisse annoncée de la
rémunération des huissiers estimée de 10 % à 20 % selon les études, selon les
régions, selon, surtout, les dires de la chambre nationale des huissiers de
justice. Je dis : « estimée », car, à ce jour, je n'ai pas, en tant que
rapporteur, de chiffres précis sur lesquels me fonder.
L'article 2 de la proposition de loi vise donc à donner un fondement légal à
la perception par les huissiers d'un droit proportionnel de recouvrement à la
charge des créanciers et, à cette fin, il tend à modifier l'article 32 de la
loi du 9 juillet 1991 en ce sens, permettant un nouveau décret.
Selon les informations qui me sont parvenues, le projet de décret préparé par
le Gouvernement prévoit le rétablissement du droit proportionnel à la charge du
créancier, mais comporte trois importantes modifications par rapport au décret
de 1996.
Tout d'abord, la perception de ce droit serait expressément limitée - vous
l'avez confirmé, madame le garde des sceaux - aux hypothèses où l'huissier est
effectivement mandaté aux fins d'effectuer un recouvrement ou un
encaissement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Encore heureux !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Ensuite, le plafond serait abaissé de moitié, passant de 21
000 francs, ce qui correspond à 2 000 fois le taux de base, à 10 500 francs,
soit 1 000 fois le taux de base, le barème général restant inchangé. Pour
l'instant, rien ne nous dit qu'il pourrait être modifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Eh oui !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Enfin, des exonérations seraient prévues au profit de
nouvelles catégories de créanciers. Seraient exonérés de droits proportionnels
à la charge du créancier les personnes morales de droit public - cette
disposition existait déjà dans le premier décret - mais aussi, après l'adoption
de ce texte, les organismes de droit privé habilités à délivrer des titres
exécutoires, en particulier les organismes d'assurance sociale, ainsi que les
personnes agissant en vertu d'un titre exécutoire relatif soit à un litige
prud'homal soit à une créance alimentaire.
A ce propos, madame le garde des sceaux, ces exonérations me semblent
anormales ; comme s'il existait de mauvais créanciers et de bons créanciers,
des créanciers de qui on pourrait exiger des droits proportionnels de
recouvrement et d'autres qui en seraient exonérés ! Qu'ils soient riches ou
pauvres, on ne fait pas de différence.
L'abaissement du plafond, même s'il était peut-être souhaitable, ainsi que de
nouvelles exonérations contribuent peut-être aussi à réduire l'efficacité du
dispositif. L'abaissement immédiat des moyens qui seront tirés du dispositif
constitue-t-il une bonne solution ? Je ne veux pas exagérer la portée du
dispositif proposé.
La commission des lois a rappelé les problèmes de principe que pose en matière
d'exécution forcée la perception systématique d'un droit proportionnel de
recouvrement pesant sur le créancier. Cependant, consciente des difficultés
auxquelles sont confrontés les huissiers, soucieuse qu'ils puissent exercer
leur mission dans de bonnes conditions pour éviter, comme vous l'avez rappelé,
madame le garde des sceaux, le développement du recours à des sociétés de
recouvrement privées qui n'offrent pas les mêmes garanties que celles qui
résultent du statut d'officier ministériel des huissiers de justice, la
commission des loi propose au Sénat d'adopter sans modification les articles 2
et 7 du texte.
Les autres dispositions de cette proposition de loi sont de nature très
diverse. Mais vous les avez remarquablement exposées, madame le garde des
sceaux, et je ne reviendrai pas sur leur contenu.
La commission a, bien sûr, émis un avis favorable sur les articles 3, 4 et
5.
L'article 6, qui tend à valider les promotions au grade de premier surveillant
des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire consécutives au
concours interne organisé en 1997, soulève des interrogations.
Il faudrait, enfin, cesser de recourir à cette procédure de la validation, qui
est véritablement détestable. Si la commission propose d'adopter l'article 6
sans modification, le rapporteur se permet tout de même d'attirer l'attention
de chacun sur ce type de procédé, qui devrait disparaître ; on imagine dans
quel état d'esprit se trouvent ceux qui ont intenté un recours contre un
concours et qui voient, avant même le prononcé du jugement, le Parlement
valider ce concours !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ils en sont pour leurs frais !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Absolument !
M. Jean-Jacques Hyest.
Quelquefois, ils font des recours pour des questions de forme tout à fait
secondaires !
M. Nicolas About,
rapporteur.
Oui, mais là, il y avait peut-être matière !
Je n'insisterai pas non plus sur l'article 7, puisque j'ai déjà indiqué tout à
l'heure qu'il était nécessaire de valider les droits perçus pendant la période
comprise entre l'entrée en vigueur du décret et son annulation.
Mes chers collègues, sous le bénéfice de ces observations, la commission des
lois vous propose d'adopter sans modification la présente proposition de loi.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, Platon
est mon ami - Mme la garde des sceaux aussi, les huissiers aussi ! - mais la
réalité l'est plus encore.
J'ai eu mon attention attirée sur ce texte par une lettre que j'ai reçue, en
date du 22 septembre 1999, d'un professeur qui se trouve être domicilié dans le
territoire de Belfort. Cette lettre est la suivante :
« Un décret du 12 décembre 1996 autorisait les huissiers requis pour recouvrer
des dettes à prélever des frais auprès des créanciers. C'est original !
Heureusement, un arrêt du Conseil d'Etat du 5 mai 1999 annulait trois articles
de ce décret au motif qu'ils contrevenaient à la loi du 9 juillet 1991, selon
laquelle les frais de recouvrement forcé sont, par principe, à la charge du
débiteur article 32.
« Après une intervention pressante des huissiers auprès des députés pour
empêcher tout recours des créanciers sur le prélèvement de ces frais illégaux,
l'Assemblée nationale, dès le 9 juin, votait un texte allant dans ce sens, et
les huissiers l'opposent désormais à toute demande de remboursement.
« Pourtant ce texte n'est pas définitif, puisqu'il doit encore passer devant
le Sénat en octobre prochain.
« Et je m'adresse à vous sur ce sujet d'une façon un peu intéressée. J'ai en
effet été escroqué naguère par un marchand de meubles que la justice a condamné
en première instance à Belfort, puis en appel à Besançon. Pour recouvrer mon
argent, j'ai dû faire appel à un cabinet d'huissiers de Mulhouse. J'ai obtenu
réparation. Mais il m'en a coûté 780 francs pour une créance de 5 000 francs.
En bref, j'ai payé pour avoir été escroqué.
« Mon cas est, hélas ! loin d'être isolé, non seulement dans cette affaire,
mais dans quantité d'autres du même genre. Je comprends mal l'attitude des
huissiers. Je comprendrais encore plus mal qu'il leur soit donné raison... »
Les termes de cette lettre me paraissent poser le problème de manière claire
et n'appeler qu'une réponse : il est impossible d'accepter le texte qui nous
est proposé.
Est mis à mal par ce texte un principe de la République qui est plus que
fondamental : « qui casse les verres les paie ».
Il est tout à fait normal que celui qui est obligé d'intenter un procès pour
recouvrer son dû, excepté, bien sûr, si l'huissier n'arrive pas à recouvrer sur
le débiteur - à ce moment-là, il est légitime en effet qu'il défraie l'huissier
pour les travaux qu'il a effectués - n'ait rien à payer.
Ce principe, vieux comme le monde - en France, en tout cas - a été de nouveau
posé par l'article 32 de la loi du 9 juillet 1991, que vous connaissez : « Les
frais de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s'il est
manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés.
Les contestations sont tranchées par le juge de l'exécution. »
Lorsque nous avons discuté de ce texte au Sénat, le 15 mai 1990, sept
amendements ont été déposés, mais aucun d'entre eux ne portait sur les premiers
alinéas de cet article 32. Nous avons longuement débattu pour savoir comment il
fallait légiférer en ce qui concerne les recours amiables, en particulier par
les officines de recouvrement, mais, sur le principe même, il ne s'est pas
trouvé un sénateur ou un membre du Gouvernement pour proposer que le créancier
ait un droit de recouvrement à payer ; je tenais à le rappeler.
Un créancier, un débiteur, c'est quoi ?
Le créancier n'est pas
a priori
quelqu'un de riche et le débiteur n'est
pas forcément quelqu'un de pauvre. Nous avons un demandeur et un défendeur ;
nous en avons un qui a raison et l'autre qui a tort. Le demandeur est obligé
d'engager des frais pour récupérer ce qui lui est dû. Ainsi, une victime
d'escroquerie, d'accident ou de toute autre infraction devient un créancier.
Par ailleurs, sont des titres exécutoires, vous l'avez rappelé, madame le
garde des sceaux, les décisions des juridictions, le titre délivré par
l'huissier en cas de non-paiement d'un chèque, les procès-verbaux de
conciliation signés par les juges et parties. Et, comme vous l'avez annoncé,
vous allez nous proposer tout à l'heure un article 5 aux termes duquel devront
également être considérées comme des titres exécutoires les transactions
homologuées par le juge.
Autrement dit : vous avez reçu un chèque en bois ; vous voulez qu'il vous soit
crédité ; vous le donnez à l'huisser qui vous délivre un titre, et celui-ci est
un titre exécutoire. Or, vous allez devoir payer un droit de recouvrement sur
ce chèque !
Est-ce juste ? Est-ce normal ? Est-ce moral ? Vraiment, je ne le pense pas et
je suis sûr que bien peu nombreux sont ceux qui, sur ces travées, sont d'un
autre avis.
Que deviennent les principes ? D'abord, la justice gratuite. Ah ! nous l'avons
longtemps réclamée et nous l'avions presque obtenue puisqu'il n'y avait plus de
frais à payer. Et voilà que la TVA est arrivée, mettant un terme à cette
situation de gratuité, et il faudrait maitenant, en plus, que le créancier paie
un droit de recouvrement !
Et puis, il est un autre principe, le droit à la réparation intégrale -
intégrale ! - du préjudice, c'est-à-dire sans subir la diminution d'un droit de
recouvrement. La réparation intégrale du préjudice n'existerait plus ?
La loi a progressivement mis en place en matière civile l'article 700, avec
ses équivalents en matière pénale, avec ses équivalents en matière
administrative, en vertu desquels le juge a le droit de condamner le perdant à
une indemnité au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Va-t-il falloir maintenant, pour récupérer l'indemnité prévue à l'article 700,
payer un droit de recouvrement ? Ce n'est pas possible !
Pour quelle raison le serait-ce ? Lorsqu'un tribunal condamne le perdant à
verser une indemnité au titre de l'article 700, il ne sait pas si le défendeur
s'exécutera volontairement ou non. Il ne peut donc être question d'intégrer
dans les dommages et intérêts les droits de recouvrement qui seraient demandés
au créancier obligé d'avoir recours à un recouvrement forcé parce que le
débiteur ne veut plus payer.
Je ne parle pas, bien sûr, du cas du débiteur qui ne peut pas payer. On ne
peut pas raser un oeuf ! Dans ce cas, il est effectivement normal que le
créancier qui voudra essayer de recouvrer sa créance désintéresse l'huissier.
Mais, dans les autres cas, il n'y a aucune raison qu'il le fasse.
A déjà été rappelée la teneur du décret du 12 décembre 1996 - M. Toubon était
alors garde des sceaux - qui était manifestement contraire à la loi et qui
mettait en place un droit proportionnel de recouvrement ou d'encaissement à la
charge du débiteur, en matière d'exécution forcée, et un droit proportionnel de
recouvrement ou d'encaissement à la charge du créancier en matière de
recouvrement amiable ou forcé, ce droit étant d'un montant plus élevé, 21 000
francs au maximum, et les tranches du barème dégressif étant elles aussi plus
élevées.
Par ailleurs, ce décret prévoyait une exception : les personnes morales de
droit public délivrant des titres qualifiés d'exécutoires en étaient exonérées.
En effet, ce qui est bon pour le tout-venant n'est pas bon pour l'Etat, qui ne
s'applique pas certaines règles à lui-même !
Ce décret a, évidemment, été annulé.
Il est important de relever, à cet égard, que le Conseil d'Etat avait été
saisi, d'abord, par un certain M. Morin, puis par les barreaux de Paris, de
Marseille, par le conseil national des barreaux, par la conférence des
bâtonniers, puis, sur intervention, par les barreaux de Toulouse, de
Versailles, de Seine-Saint-Denis, de Lyon, d'Aix-en-Provence, de Grenoble, de
Nice, de Lille et de Strasbourg, la confédération des avocats, le syndicat des
avocats de France. Mais il n'y avait pas qu'eux !
En effet, comme je me suis permis, tout à l'heure, de vous le faire remarquer
lorsque vous parliez d'organismes d'avocats, madame le garde des sceaux, il y
avait également - excusez du peu ! - la Confédération française démocratique du
travail, la CFDT, et la Confédération générale du travail, la GCT.
Je constate, en outre, que des organismes de consommateurs continuent à nous
demander d'empêcher que les dispositions de ce décret puissent de nouveau être
appliquées. Cela fait donc beaucoup de monde !
J'ignore pourquoi on parle essentiellement des avocats. Ils constitueraient un
lobby, peut-être ! Quel intérêt ont-ils dans cette affaire ? Aucun ! Plus
exactement, ils défendent le même intérêt que la CGT, la CFDT ou n'importe qui
d'autre, à savoir l'intérêt du justiciable, de ceux dont le procès était fondé,
de ceux qui sont dans leur bon droit.
Permettez-moi de rappeler aussi, madame le garde des sceaux - mais vous vous
en souviendrez très bien - que, lorsque j'estime personnellement que les
organismes professionnels ont tort, par exemple en décrétant des droits
d'inscription, quel qu'en soit le montant, pour les étudiants des centres de
formation des avocats, je combats leur position. Je ne suis personnellement,
vous le savez, inconditionnel de personne ! Ce que je recherche, c'est la
vérité.
Cela étant, comme je l'ai dit en commençant mon propos, nous n'avons rien,
bien entendu, contre les huissiers, qui doivent, c'est bien normal, gagner leur
vie.
Cette profession, dit-on, serait sinistrée. J'ai cherché dans l'excellent
rapport de notre collègue M. Nicolas About des éléments quelconques me
permettant de me faire une opinion à ce sujet ; je n'ai rien trouvé !
Il paraît que cette affirmation provient de la chambre nationale des
huissiers. Malgré tout le respect que j'ai pour cette institution, cela ne me
suffit pas et j'aimerais savoir ce qu'il en est exactement.
Quelle autre solution y aurait-il si c'était vrai ? Si c'était vrai, car je
n'ai pas encore vu d'huissiers qui aient déposé leur bilan et je connais le
prix des charges, qui reste encore assez élevé !
Cela dit, vous prétendez que leurs tarifs, madame la ministre, ne peuvent être
augmentés compte tenu du nombre de surendettés. Cela n'a aucun rapport ! Les
surendettés ne pouvant pas payer, n'en parlons pas ! Ne parlons que de ceux qui
peuvent et doivent payer. Et envers ces derniers, il n'y a aucune raison
d'avoir quelque scrupule que ce soit.
Si les tarifs ne sont pas suffisants, ils augmenteront, mais ne touchons pas
au principe selon lequel il appartient au perdant, à celui qui a obligé à un
recours, de payer.
Madame le garde des sceaux, la proposition de loi n'a d'autre but que de
valider rétroactivement et pour l'avenir ce décret.
Je n'ai jamais voté une validation et n'en voterai jamais.
A cet égard, s'agissant d'un autre article de la proposition de loi tendant à
valider un concours sur le point d'être annulé, madame le garde des sceaux,
vous dites que les quatre-vingt-un fonctionnaires pénitentiaires qui ont été
reçus ne doivent pas être sanctionnés. Mais il y a aussi ceux qui n'ont pas été
reçus ou ceux qui auraient pu l'être s'il n'y avait pas eu d'irrégularité et,
parmi eux, ceux qui ont engagé les frais d'un procès parce qu'ils croyaient en
la justice de leur pays, qui ont obtenu une décision, mais pour qui cela ne
sert à rien puisqu'il y aurait validation du concours vicié. Cela me paraît
tout à fait choquant.
Il en est de même pour le texte principal dont nous parlons et qui est visé
par l'article 2.
Madame le garde des sceaux, vous aviez proposé au Sénat, peu de jours après
l'arrêt du Conseil d'Etat du 5 mai 1999 annulant le décret de 1996, dès le 11
mai, dans le texte relatif à l'efficacité de la procédure pénale, un amendement
qui ressemblait comme un frère jumeau à la proposition de loi de notre collègue
M. Gouzes, qui, lui-même, l'avait fait adopter par la commission des lois de
l'Assemblée nationale dès le 3 février 1999, c'est-à-dire avant même que
l'arrêt ne soit rendu.
J'ai sous les yeux les protestations de M. Pierre Fauchon, ici présent, qui
déclarait : « Il se peut que les huissiers connaissent des difficultés » - il
disait « il se peut », car il n'avait pas plus d'éléments que nous aujourd'hui
- « mais ce n'est pas une raison pour imposer de manière générale et
automatique, qu'une fraction des frais de recouvrement sera mise à la charge
des créanciers. » Il ajoutait : « On ne saurait en faire une règle. »
Notre collègue M. Bret, lui aussi ici présent, déclarait le même jour : « Je
m'interroge, comme les avocats du barreau de Marseille, qui dénoncent, dans un
courrier signé de M. le bâtonnier qu'ils m'ont adressé aujourd'hui, la
non-conformité de cet amendement à l'intérêt du justiciable et le fait qu'il
est la reprise partielle du texte annulé par le Conseil d'Etat. »
C'est dans ces conditions que le Sénat n'a pas accepté l'amendement que vous
proposiez, mais que M. Gouzes a repris devant l'Assemblée nationale - qui l'a
adopté, non sans opposition - le 9 mai 1999 !
On a, par exemple, entendu M. Mariani - je crois qu'il appartient au groupe du
RPR - dire : « Ainsi que cela a été souligné au Sénat, il peut arriver que l'on
doive faire assumer une partie des émoluments des huissiers aux créanciers,
mais on ne peut transformer cette possibilité en règle générale. Il appartient
au juge d'apprécier, cas par cas, en fonction des situations concrètes et du
dossier qu'il doit traiter, s'il convient ou non de faire peser ces frais sur
le créancier et sur le débiteur. »
On a par ailleurs entendu M. Blessig, membre de l'UDF, dire : « Une décision
de justice doit pouvoir être exécutée sans pénaliser une partie de la
population constituée de créanciers modestes qu'un alourdissement du coût des
procédures risque de dissuader de recourir à la procédure d'exécution. »
On a aussi entendu M. Gantier, du groupe Démocratie libérale, demander : «
Pourquoi les créanciers devraient-ils payer pour récupérer leurs biens
légitimes ? Estimez-vous moral de pénaliser les créanciers en butte à un
mauvais débiteur, d'autant que, souvent, ces créanciers sont des gens modestes
qu'il n'est pas admissible de faire participer aux droits de recouvrement ?
»
Le moins que l'on puisse dire - et vous le savez, madame le garde des sceaux,
vos propos l'ont démontré - c'est que, s'il y a une opinion unanime sur le fond
de cette affaire : en conscience, c'est bien pour condamner un tel texte.
Quels sont les arguments avancés pour légitimer cette injustice, pour traiter
différemment, on l'a dit et c'est vrai, les justiciables, en violant ce qui me
paraît être un principe fondamental de la République ?
Malheureusement, c'est vrai, le Sénat, en particulier le président de la
commission des lois, s'est opposé jadis à cette réforme constitutionnelle
proposée par le Président de la République de l'époque, qui prévoyait qu'à tout
moment, et pas seulement avant qu'elle ne soit définitive, on puisse mettre en
cause la constitutionnalité d'une loi.
Je constate que M. le président Jacques Larché, dont je sais de quel poids il
a pesé devant la commisison pour faire adopter un texte conforme, est logique
avec lui-même. C'est une manière d'abuser de la situation quand on sait, et
pour cause, qu'il n'y aura pas de recours devant le Conseil constitutionnel ni
aujourd'hui, ni donc demain.
Je répète la question : quels sont les arguments ? S'agissant de la situation
des huissiers, j'ai dit que nous n'avions aucune donnée.
On ne veut pas augmenter le tarif, qui pourtant n'a subi aucune modification
depuis 1993, je tiens tout de même à le signaler !
Ensuite, le décret à venir serait modifié. M. le rapporteur l'a indiqué. Un
décret est ce qu'il sera demain et ce qu'il sera après-demain !
Vous n'aurez pas besoin, madame le garde des sceaux, ni vous ni vos
successeurs, de revenir devant le Sénat pour modifier un décret qui ne sera
plus contraire à la loi.
Donc, le contenu du décret, finalement, n'a pas beaucoup d'importance et dire
que les dispositions devraient être améliorées par rapport à celles du
précédent, même si c'est vrai, n'est pas de nature à nous convaincre.
On nous dit également - vous l'avez dit, vous aussi, madame le ministre - que
la perception serait expressément limitée aux hypothèses où l'huissier est
effectivement mandaté. Heureusement ! Pourquoi payer des honoraires à un
huissier qui irait faire exécuter un jugement qu'on ne lui aurait pas demandé
de faire exécuter ?
Le plafond serait modifié et il y aurait des exonérations au profit de
certaines catégories de créanciers. Mais c'est choquant !
Cela ne s'appliquerait pas à l'Etat, à la sécurité sociale - dont on ne
voudrait pas, bien sûr, aggraver le déficit ! - au litige prud'homal ou à une
créance alimentaire. Je ne comprends pas que ce qui n'est plus bon pour le
citoyen « lambda » continue à rester bon pour certains !
Le patron qui fera sanctionner la violation d'une clause d'un contrat de
travail - clause de non-concurrence, rupture brusque, etc. - devant le conseil
des prud'hommes n'aura pas à payer ? J'avoue ne pas comprendre cette
logique.
Vous dites également que vous voulez éviter les contentieux. Je ne comprends
pas cette manière de chercher la justice en disant à tout moment : il faut
éviter le contentieux. Pour ma part, j'avoue n'avoir jamais vu de justice sans
juge !
Il n'y a pas de justice sans juge !
M. Jean-Jacques Hyest.
Ni sans avocat !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Si l'on veut rendre la justice, il faut des juges.
Et y a-t-il eu beaucoup de contentieux depuis des lustres à cet égard ?
De 1991 à 1996, période où la loi permettait - sans conteste... et sans
qu'existât le décret annulé de 1996 - que le juge laisse à la charge du
créancier une partie des frais après un recours à tort au recouvrement forcé, y
a-t-il eu beaucoup de contentieux ? On ne trouve rien à ce sujet ni dans le
projet de loi, ni dans les débats, ni dans le rapport de la commission !
Enfin, du contentieux, il y en aura encore parce que l'article 1248 du code
civil continue à disposer que « les frais du paiement sont à la charge du
débiteur », et parce que l'article 696 du nouveau code de procédure civile
continue de prévoir que « la partie perdante est condamnée aux dépens à moins
que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la
charge d'une autre partie ».
Ces principes sont tellement consubstantiels à notre droit, au droit tout
court, qu'ils figurent dans quantité de textes. Pourtant, ceux-là, vous ne
proposez pas de les modifier. Il y aura donc sans doute, si cette proposition
de loi est adoptée, encore du contentieux.
Madame le garde des sceaux, j'avoue, à la lecture de l'article 4, qui dispose
qu'il faut avoir quitté le barreau depuis au moins huit ans pour faire partie
de la section disciplinaire du barreau, qu'il n'était pas possible qu'un vote
conforme puisse intervenir.
Vous nous avez dit : « C'est une erreur ». Heureusement que vous nous l'avez
dit ; encore que le barreau de Paris ait bien voulu nous la signaler, en tout
cas en ce qui me concerne, hier. Mais je n'ai pas l'impression que la
commission des lois l'ait vue.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Si !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Excusez-moi, je n'ai rien lu dans le rapport à cet égard. Je l'ai sans doute
mal lu. Il est vrai que la commission a délibéré hier matin.
M. Nicolas About,
rapporteur.
Cela ne figure pas dans le rapport, c'est vrai, mais l'erreur
a été vue.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Merci ! Donc, j'ai bien lu le rapport, bien que je ne l'aie trouvé qu'en
arrivant hier au soir.
Vous nous dites : « C'est vrai, c'est dans la loi, mais je vous promets que ce
sera corrigé très vite ». Est-il possible de demander au Sénat de voter, et
donc de mettre dans la loi une énormité comme celle-là ? Franchement ? Je ne le
crois pas. Et quand proposerez-vous la rectification ? Pourquoi ne la
proposez-vous pas maintenant ? Parce que vous voulez un vote conforme ! Le
Sénat n'est pas fait pour des votes conformes ; le Sénat est là pour faire son
travail et pour délibérer en son âme et conscience.
M. Jean-Jacques Hyest.
Bravo !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
En tout cas, en ce qui me concerne, c'est en mon âme et conscience que je
voterai contre cette proposition de loi.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
L'article 1er a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ Le début du premier alinéa de l'article 32 de la loi n° 91-650 du
9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution est ainsi
rédigé :
« A l'exception des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement
qui peuvent être mis partiellement à la charge des créanciers dans des
conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, les frais de l'exécution
forcée...
(Le reste sans changement.)
»
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd.
Veuillez me pardonner, madame le garde des sceaux, je vais sans doute être un
peu redondant compte tenu des propos que vient de tenir M. Dreyfus-Schmidt.
Je l'avoue, je ne suis pas juriste ; j'appartiens à une profession médicale.
Si j'interviens sur cet article 2, c'est parce que je suis choqué par le
non-respect du bon sens et de la morale.
L'article 32 de la loi du 9 juillet 1991 est très clair : en matière
d'exécution forcée, l'ensemble des frais est à la charge du débiteur. Remis en
cause par un décret du 12 décembre 1996, qui prévoit que des droits peuvent
être partiellement supportés par le créancier, ce principe a été réaffirmé par
une décision du Conseil d'Etat du 5 mai 1999. Reprenant le fondement de la loi
du 9 juillet 1991, le Conseil d'Etat renvoie ainsi définitivement les frais
d'exécution à la charge du débiteur.
L'article 2 de la proposition de loi qui nous est aujourd'hui soumise heurte
la raison puisqu'il ne respecte pas le droit en vigueur.
Je souhaite également formuler des objections liées à des questions de
principe, de morale, de justice et de bon sens.
S'agissant de la question de principe, il n'est pas normal que des droits
proportionnels de recouvrement et d'encaissement puissent être mis, même
partiellement, à la charge du créancier. Pourquoi les créanciers devraient-ils
payer pour récupérer leurs biens légitimes ? Un tel raisonnement va à
l'encontre des principes élémentaires d'équité et de morale.
S'agissant de la question de justice, j'estime essentiel - j'axerai mon propos
sur ce point - d'assurer la défense du justiciable. Une décision de justice
doit être exécutée sans pénaliser les créanciers, qui, il faut le rappeler,
sont souvent très modestes. Si nous votons cette proposition de loi, de
nombreux créanciers à peine solvables vont hésiter à financer une procédure
d'exécution et risquent de renoncer à faire valoir leur bon droit.
Est-il bon d'entraver ainsi la marche de la justice ? La question est grave.
Etes-vous consciente, madame le ministre, du nombre très important de
personnes, créanciers modestes, qui se trouvent pénalisées par ce texte ?
Quant à la question de bon sens, je souhaite dénoncer les exonérations, que
vous avez annoncées en commission des lois, concernant les personnes morales de
droit public, les organismes de droit privé, les litiges prud'-homaux et les
créances alimentaires.
Pourquoi la proposition de loi s'attaque-t-elle donc uniquement aux
particuliers, sans aucun souci de leur solvabilité ? Dans de nombreux cas de
loyers impayés ou de paiements non honorés lors d'une vente, vous savez bien
que nombre de créanciers ne disposent pas de moyens financiers importants.
Pourquoi faire ainsi deux poids deux mesures ? Cela me paraît injuste.
En ce qui concerne la question de droit, le Gouvernement, par le biais de
cette proposition de loi, qui est, avouez-le, un peu un texte « fourre-tout »,
s'empare d'une décision revêtue de l'autorité du Conseil d'Etat et cherche à la
contourner purement et simplement.
Outre la condamnation sur le fond de cette proposition de loi, le procédé,
pour le moins tortueux, qui a été suivi par le Gouvernement révèle, dans la
forme, un certain mépris pour la représentation nationale.
Cette mesure introduite dans le projet de loi relatif à la procédure pénale
présenté au Sénat, sous forme d'amendement, puis reprise sous forme de
proposition de loi à l'Assemblée nationale, charge de frais d'huissiers le
créancier, c'est-à-dire qu'elle reprend clairement le décret de 1996, pourtant
annulé. Elle nous est véritablement imposée dans le calendrier parlementaire
!
De plus, en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, il faut laisser
au juge, et au juge seul, un pouvoir d'appréciation sur la question, afin de
tenir compte des situations et des contextes au cas par cas. Il n'est pas
besoin d'édicter une règle contraignante et source d'injustice en matière
d'exécution forcée, où les situations sont très variables. Le souci de
préserver le débiteur et de faire respecter les droits du créancier doit
revenir au juge.
Pour toutes ces raisons, je ne voterai pas cet article 2. A mes yeux, cette
proposition est une coquille vide puisque son application est renvoyée à des
décrets dont nous ignorons officiellement la teneur. L'adopter, c'est donner un
blanc-seing au Gouvernement, sans aucune garantie que nos objections aient été
écoutées et prises en compte.
Dans ces conditions, madame le ministre, comprenez mon indignation et mon
inquiétude à l'égard de ces milliers de créanciers modestes qui seront
pénalisés par cette proposition de loi. Je vous serais reconnaissant de leur
apporter ici solennellement des précisions sur le décret que vous projetez de
publier, c'est-à-dire sur leur sort, et d'informer ainsi le Parlement, dont
vous avez, tout au long de l'itinéraire suivi par ce texte, quelque peu méprisé
l'avis et le rôle.
(M. Pierre Fauchon applaudit.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
On ne sait jamais !
M. le président.
... émanant...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
De qui ?
M. le président.
... de la commission des lois, par la voix de son président.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il fait la loi à lui tout seul !
M. le président.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne de demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
14:
Nombre de votants | 215 |
Nombre de suffrages exprimés | 213 |
Majorité absolue des suffrages | 108 |
Pour l'adoption | 209 |
Contre | 4 |
Articles 3 à 5
M. le président.
« Art. 3. _ Dans le premier alinéa de l'article 357-8 de la loi n° 66-537 du
24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, les mots : "par décret en
Conseil d'Etat" sont remplacés par les mots : "par règlement du Comité de la
réglementation comptable". »
- (Adopté.)
« Art. 4. _ Le quatrième alinéa de l'article 22 de la loi n° 71-1130 du
31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et
juridiques est ainsi rédigé :
« Lorsqu'un barreau comprend au moins cinq cents avocats disposant du droit de
vote mentionné au deuxième alinéa de l'article 15, le conseil de discipline
peut siéger en une ou plusieurs formations d'au moins cinq membres, présidé par
le bâtonnier ou un ancien bâtonnier. Les membres qui composent ces formations
disciplinaires peuvent être des membres du conseil de l'ordre ou des anciens
membres du conseil de l'ordre ayant quitté leur fonction depuis au moins huit
ans. Ces anciens membres sont choisis sur une liste arrêtée chaque année par le
conseil de l'ordre. Le président et les membres de chaque formation, ainsi que
des membres suppléants, sont désignés au début de chaque année, par
délibération du conseil de l'ordre. »
- (Adopté.)
« Art. 5. _ Dans le deuxième alinéa (1° ) de l'article 3 de la loi n°
91-650 du 9 juillet 1991 précitée, après le mot : " administratif ", sont
insérés les mots : " ainsi que les transactions soumises au président du
tribunal de grande instance". »
- (Adopté.)
Article 6
M. le président.
« Art. 6. _ Sont validées les promotions au grade de premier surveillant des
services déconcentrés de l'administration pénitentiaire prononcées par le
directeur de l'administration pénitentiaire à l'issue de la session 1997 du
concours professionnel organisé en application de l'arrêté interministériel du
22 septembre 1993 et suite à ses décisions des 23 janvier et 26 mai 1998. »
La parole est à M. Gélard.
M. Patrice Gélard.
Je souhaite faire une suggestion à propos de l'article 6.
C'est la deuxième fois qu'une régularisation comme celle qui figure dans cet
article vient en discussion devant nous ; il ne faudrait pas que nous soyons
saisis d'une troisième.
Pour éviter d'avoir à valider de nouveau un concours, il faudrait prévoir
systématiquement, quitte à prendre le décret nécessaire, le cas échéant, la
participation d'examinateurs extérieurs au jury.
C'est ce qui se pratique pour d'autres concours, tel le concours d'entrée à
l'ENA, quand on a besoin d'un spécialiste dans une matière. Ce n'est pas si
difficile à prévoir.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. _ Sous réserve des décisions de justice devenues définitives, les
émoluments proportionnels de recouvrement ou d'encaissement perçus jusqu'au 5
mai 1999, en application de l'article 10 du décret n° 96-1080 du 12 décembre
1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et
commerciale, en tant que la régularité de ces émoluments serait mise en cause à
raison de l'annulation du décret n° 96-1080 du 12 décembre 1996 précité sont
validés. »
- (Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Bret pour explication de vote.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les sénateurs
du groupe communiste républicain et citoyen voteront le texte qui nous est
proposé.
En effet, plusieurs des dispositions que nous avons examinées aujourd'hui, au
demeurant fort disparates, permettront de régler des questions en suspens.
Il en est ainsi des mesures relatives à la procédure disciplinaire des avocats
; dorénavant, dans les barreaux de plus de cinq cents avocats, les commissions
disciplinaires pourront se réunir à cinq et d'anciens membres de l'ordre
pourront y siéger.
Cette disposition permettra de faire face à l'important contentieux
disciplinaire que connaissent les grands barreaux, singulièrement celui de
Paris.
Il en est ainsi également des dispositions relatives aux transactions
homologuées par le juge, auxquelles l'article 1441-4 du code de procédure
civile, tel qu'il résulte du décret du 28 décembre 1998, donne force
exécutoire.
La loi du 9 juillet 1991 sur les procédures civiles d'exécution ne comprenait
pas, dans sa liste exhaustive des actes constituant des titres exécutoires, ce
type de transaction.
L'homologation par le juge devient ainsi sécurisée puisque le décret ne pourra
plus être contesté sur la base d'un recours pour excès de pouvoir.
Il en est encore ainsi de la disposition qui tend à transférer du Conseil
d'Etat au comité de la réglementation comptable, créé par la loi du 6 avril
1998, le pouvoir de fixer certaines règles d'évaluation dérogatoires
spécifiques aux comptes consolidés.
Deux des dispositions adoptées méritent qu'on s'y attarde.
Il s'agit d'abord et principalement de la rémunération des huissiers.
Le 5 mai 1999, le Conseil d'Etat a annulé un décret du 12 décembre 1996 qui
mettait une partie des frais d'huissiers à la charge du créancier en cas de
recouvrement forcé.
Cette disposition était en effet contraire à la loi du 9 juillet 1991 portant
réforme des procédures civiles d'exécution, qui met les frais à la seule charge
des débiteurs. L'annulation était donc prévisible, comme l'a souligné M. le
rapporteur de la commission des lois.
Pour anticiper sur cette annulation, un amendement avait été introduit par M.
Gouzes, à l'Assemblée nationale, le 3 février 1999, à l'occasion de l'examen
d'une proposition de loi relative à l'exercice sous forme de sociétés des
professions libérales. Il prévoyait que « les droits proportionnels de
recouvrement ou d'encaissement peuvent être partiellement mis à la charge des
créanciers dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ».
Cette disposition est venue au Sénat, en mai dernier, sous la forme d'un «
cavalier » législatif, lors de la discussion en deuxième lecture du projet de
loi sur l'efficacité de la procédure pénale ; elle fut alors repoussée.
Adoptée par l'Assemblée nationale le 9 juin 1999, elle nous revient
aujourd'hui.
Nous avions, à l'époque, exprimé nos réserves sur le texte proposé, notamment
du fait de l'absence de concertation préalable avec les organismes intéressés,
associations de consommateurs et avocats principalement.
Certes, nous partageons un certain nombre des préoccupations évoquées par Mme
la ministre : nous sommes sensibles, en particulier, au risque de voir le
recouvrement des créances tomber dans l'escarcelle de sociétés privées, voire
de la force privée, au motif que les huissiers n'accepteraient plus de
recouvrer des créances à perte.
De plus, l'avant-projet de décret, dont le Gouvernement a bien voulu nous
communiquer les principaux éléments, répond à un certain nombre de nos
questions, je veux parler de l'exonération des personnes morales de droit
public délivrant des titres exécutoires et surtout de la non-application des
dispositions aux créances prud'homales ou alimentaires. Néanmoins, nous
voudrions nous faire l'écho, madame la ministre, des inquiétudes exprimées par
les associations de consommateurs : si les huissiers ont un droit à une
rémunération équitable, qui peut passer, dans certains cas, par la mise
partielle des frais à la charge du débiteur, il serait souhaitable d'encadrer
plus strictement leur mode de rémunération.
On constate en effet un alourdissement parfois injustifié des droits fixes
perçus par eux : cumulé avec les larges possibilités qui leur sont données de
facturer des honoraires libres et la perception de frais de dossiers excessifs,
leur système de rémunération peut conduire à des excès. Nous souhaiterions que
vous en teniez compte lors de l'élaboration du décret.
La régularisation du concours interne de surveillant des services
pénitentiaires organisé en 1997 constitue une autre disposition essentielle de
la proposition de loi.
Ce concours a en effet été annulé par le Conseil d'Etat au vu de certaines
irrégularités constatées dans son organisation et, en particulier, en raison de
la désignation d'examinateurs en dehors des membres du jury. Il nous semble
fondamental que les candidats promus ne soient pas victimes d'irrégularités qui
ne leur sont pas imputables.
En conclusion, je voudrais toutefois appeler l'attention du Gouvernement sur
la méthode employée, qui n'emporte guère notre approbation.
Après les DMOS, DDOS et DDOEF, ces textes portant diverses mesures ou
dispositions d'ordre social et diverses dispositions d'ordre économique et
financier, la mode des lois « fourre-tout » prospère : on a aujourd'hui des
DPRMJ - textes portant sur diverses professions relevant du ministère de la
justice ! Nous désapprouvons fortement cette méthode législative,...
M. Jean-Jacques Hyest.
Vous avez raison !
M. Robert Bret.
... qui contribue à affaiblir la force symbolique des lois.
M. Jean-Jacques Hyest.
C'est vrai ! Très bien !
M. Robert Bret.
Par ailleurs, à l'instar de notre collègue Michel Dreyfus-Schmidt, nous
souhaitons exprimer les plus vives réserves sur la pratique qui consiste à «
couvrir »
a posteriori
des illégalités sanctionnées par le juge : il est
tout de même choquant et néfaste à la sécurité juridique que l'on passe ainsi
outre à des décisions de justice.
Enfin, il nous semble également qu'un certain nombre de ces dispositions sont
le rattrapage de négligences : certaines incohérences semblent
a posteriori
évidentes, telles les modifications induites par la création du comité de
réglementation. Cela nous confirme dans l'idée que nous vivons dans un maquis
législatif de plus en plus dense et incompréhensible, dans lequel même les plus
« calés » ou les plus acharnés ont du mal à s'y retrouver. Imaginez ce qu'il
représente pour le citoyen ordinaire !
Ainsi, la codification du droit est de plus en plus urgente si l'on veut que
l'accès au droit n'en reste pas à un stade purement théorique.
Telles sont, madame la ministre, mes chers collègues, les quelques remarques
que je voulais soumettre à votre réflexion.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
5
NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept
membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un
texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la
réduction négociée du temps de travail.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été
affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat
à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean Delaneau, Louis Souvet, Jacques Bimbenet, Philippe
Nogrix, Jacques Machet, Mmes Marie-Madeleine Dieulangard et Nicole Borvo.
Suppléants : MM. Jean Chérioux, Claude Domeizel, Guy Fischer, Serge Franchis,
Alain Gournac, Jean-Louis Lorrain et Mme Nelly Olin.
6
LUTTE CONTRE LA CORRUPTION
Discussion d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 179, 1998-1999)
modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte
contre la corruption. [Rapport n° 42 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, la lutte contre la délinquance économique et
financière constitue l'un des axes principaux de l'action du Gouvernement.
Le projet de loi qui est aujourd'hui soumis à votre examen s'inscrit dans
cette perspective.
La lutte contre la délinquance économique et financière suppose d'abord une
action déterminée contre la corruption.
La corruption constitue en effet un véritable fléau qui affecte la bonne
gestion des affaires publiques. Elle ruine la confiance des citoyens dans la
chose publique. Elle altère la qualité du pacte social. Elle met en péril celui
qui en est le garant : l'Etat.
Sur le plan économique, ses effets sont également désastreux. La corruption
freine le développement économique et fausse les conditions de la concurrence.
Elle renchérit le coût des investissements publics, puisque les prix pratiqués
sont augmentés à proportion du montant des commissions occultes versées pour
l'obtention de tel ou tel marché.
Enfin, la corruption constitue une forme d'action de la criminalité organisée.
L'existence de liens entre corruption et criminalité organisée se vérifie
aujourd'hui dans un très grand nombre de pays, contribuant à faire de ce
phénomène une question de dimension mondiale particulièrement préoccupante.
La sauvegarde de l'impartialité dans l'exercice des fonctions publiques
constitue donc une absolue nécessité.
Compte tenu de l'imbrication de plus en plus poussée des économies et, pour ce
qui concerne plus spécialement l'Union européenne, des structures juridiques et
politiques, la lutte contre la corruption ne peut être conduite efficacement
dans un cadre strictement national.
Les corrupteurs et les corrompus tirent en effet adroitement profit des
divergences et des carences des législations nationales. Il est donc nécessaire
d'éviter que les actes de corruption échappent à la répression, en raison soit
des imperfections des législations, soit des pesanteurs de l'entraide
judiciaire.
Dès lors, cette répression, spécialement lorsque la corruption touche aux
pratiques du commerce international, doit veiller à assurer la sauvegarde des
principes fondamentaux d'égalité et de transparence de la concurrence entre les
entreprises.
En définitive, seule la mise en oeuvre concordante d'engagements contraignants
similaires dans les différents pays concernés est de nature à assurer les
conditions justes et durables d'une lutte efficace contre la corruption.
C'est la position que la France a soutenue et fait prévaloir dans les
enceintes internationales, au sein desquelles le problème de la lutte contre la
corruption a été abordé au cours des dernières années : chronologiquement, dans
le cadre d'abord de l'Union européenne, ensuite de l'Organisation de
coopération et de développement économiques, puis du Conseil de l'Europe et de
l'Organisation des Nations unies.
L'ensemble de ces considérations permet de mieux comprendre l'originalité de
ce projet de loi, qui concerne non seulement la vie publique nationale, mais
aussi, dans une certaine mesure, la vie publique de pays étrangers.
Le rapporteur, M. Balarello, a justement souligné la dimension des enjeux. Je
le remercie pour la qualité et la précision de son travail, et pour
l'appréciation positive qu'il porte sur l'esprit du projet de loi qui vous est
soumis.
Certaines dispositions font pourtant l'objet de désaccord entre nous. J'y
reviendrai lors de la discussion des amendements présentés par la
commission.
D'ores et déjà, j'indique à votre assemblée mon désaccord sur la proposition
d'abaisser les peines d'emprisonnement prévues et sur la proposition de
centraliser à Paris les poursuites effectuées concernant l'effet de corruption
dans le commerce international.
Le projet de loi qui vous est soumis a pour objet essentiel de permettre aux
juridictions de la République de juger les corrupteurs de fonctionnaires
étrangers, y compris lorsque de tels faits ont lieu en tout ou en partie sur le
territoire français.
En l'état actuel de notre droit, la corruption d'un fonctionnaire étranger
n'est pas punissable.
En effet, il est traditionnellement considéré que le délit de corruption a
pour objet de garantir l'intégrité et la probité de l'administration publique
française, et d'elle seule.
Une même approche caractérise la plupart des législations pénales
étrangères.
La communauté internationale a donc constaté, dans le cadre des diverses
enceintes internationales évoquées tout à l'heure, les carences des
législations étatiques.
Plusieurs conventions ont d'ores et déjà été signées, en particulier dans le
cadre de l'OCDE et de l'Union européenne. Elles obligent toutes à incriminer et
à sanctionner, de manière effective, proportionnée et dissuasive, les actes de
corruption commis à l'encontre d'agents publics étrangers.
Je vais, dans un premier temps, vous présenter l'économie générale des traités
signés dans le cadre de l'Union européenne. J'évoquerai, ensuite, les grands
axes de la convention signée dans le cadre de l'OCDE. Je vous présenterai,
enfin, les dispositions que je vous propose d'adopter dans le cadre du projet
de loi d'adaptation.
S'agissant tout d'abord des traités signés dans le cadre de l'Union
européenne, je précise qu'ils ont été négociés au sein du troisième pilier et
qu'ils ont fait l'objet de lois de ratification en date du 27 mai 1999.
Ils s'inscrivent dans la ligne des efforts entrepris pour assurer une
meilleure protection des intérêts financiers des Communautés européennes. Les
fraudes aux recettes comme les fraudes aux dépenses entravent l'action des
Communautés, causent un préjudice aux différents Etats membres, mais aussi à
chacun des citoyens des pays de l'Union.
Une convention et plusieurs protocoles destinés à assurer une lutte plus
efficace contre cet ensemble de fraudes ont donc été élaborés. La France
disposant d'un arsenal législatif suffisant pour en assurer une ferme
répression, les exigences de ces traités sont d'ores et déjà satisfaites en
droit interne.
Il est apparu, toutefois, que ces fraudes pouvaient aussi reposer sur des
faits de corruption impliquant soit des fonctionnaires communautaires, soit des
fonctionnaires nationaux d'autres Etats membres, et que les législations
nationales présentaient, de ce point de vue, un certain nombre de carences.
Un protocole tendant à la répression des faits de corruption dans la stricte
mesure où ils portaient atteinte aux intérêts financiers des Communautés a,
dans un premier temps, été élaboré. Il s'agit du premier protocole à la
convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés
européennes. Il a été suivi d'une convention du 26 mai 1997 tendant à
l'incrimination de tout fait de corruption, qu'il ait ou non porté atteinte aux
intérêts financiers des Communautés.
Parmi les traités signés dans le cadre de l'Union, c'est, pour l'essentiel,
cette convention qui fait l'objet d'une adaptation du droit interne.
On mesure aisément combien son champ d'application est large. Tout fait de
corruption, pour quelque motif et dans quelque domaine qu'il ait lieu, doit
pouvoir être puni.
Il s'agit là d'une différence essentielle avec la convention de l'OCDE, dont
nous verrons tout à l'heure qu'elle a un champ d'application beaucoup plus
limité.
L'autre caractéristique du protocole et de la convention relative à la lutte
contre la corruption signés dans le cadre des traités de l'Union est qu'ils
visent non seulement la corruption active mais aussi la corruption passive.
Il en résulte que, pour satisfaire aux exigences de ces traités, les tribunaux
français devront pouvoir juger non seulement le corrupteur d'un fonctionnaire
communautaire ou national d'un autre Etat membre mais aussi ce fonctionnaire
lui-même, c'est-à-dire le corrompu.
Un tel système ne pouvait se concevoir que dans un espace au sein duquel les
pays ont établi entre eux des liens étroits et forts, sur les plans aussi bien
juridique qu'économique et politique. C'est évidemment le cas au sein de
l'Union européenne.
Les traités signés dans le cadre de l'Union contiennent, en outre, toutes
sortes de dispositions destinées à renforcer la coopération judiciaire entre
les Etats. Ces dispositions ne nécessitent pas d'adaptation en droit
interne.
Il va néanmoins de soi que la France entend appliquer les engagements qu'elle
a souscrits en vue d'assurer l'efficacité des procédures d'entraide et des
divers processus de coopération ; mais cela n'est pas d'ordre législatif.
J'en viens maintenant à la convention signée dans le cadre de l'OCDE, qui a
également fait l'objet d'une loi de ratification en date du 27 mai 1999.
Elle comprend plusieurs types de mesures.
S'agissant des dispositions qui touchent au droit pénal de fond, celles qui
concernent la corruption sont les plus importantes.
La convention oblige en effet à incriminer les faits de corruption active
commis en vue d'obtenir un marché ou un autre avantage indu dans le commerce
international.
Il en résulte que les juridictions françaises, à condition, évidemment,
qu'elles disposent d'un critère de compétence selon les conditions de droit
commun, doivent pouvoir juger les corrupteurs d'agents publics étrangers, quel
que soit l'Etat ou l'organisation internationale dont relèvent ces agents.
La convention n'exige pas, en revanche, que les juridictions françaises
puissent juger les agents publics corrompus.
La convention de l'OCDE a une vocation universelle et vise les faits de
corruption commis à l'encontre des agents publics de l'ensemble des Etats du
monde. C'est à ces Etats qu'incombe, au premier chef, la lutte contre la
corruption de leurs propres agents publics.
L'obligation d'incriminer la corruption passive d'un agent public étranger
n'était envisageable que dans le cadre de l'Union européenne, espace homogène,
politiquement et juridiquement. Il aurait été irréaliste de l'envisager dans le
cadre d'une convention à vocation universelle, au risque de s'immiscer indûment
dans les affaires intérieures d'Etats étrangers.
Notons une autre différence avec les traités signés dans le cadre de l'Union
européenne : le champ d'application du délit est limité ; les faits doivent
avoir été commis « en vue d'obtenir un marché ou un autre avantage indu dans le
commerce international ». Cette restriction résulte, en quelque sorte, du champ
même des compétences de l'OCDE.
La convention de l'OCDE fait, par ailleurs, état d'un certain nombre d'autres
mesures, touchant notamment à l'incrimination du blanchiment des capitaux liés
à des opérations de corruption ou à la définition de normes comptables
permettant de trouver trace de ces mêmes opérations. Sur ces points, la
législation française satisfait d'ores et déjà aux exigences du traité.
Quant aux dispositions concernant l'entraide et l'extradition, qui tendent,
pour l'essentiel, à faire en sorte que la coopération judiciaire entre Etats
soit prompte et effective, la France s'engage à les respecter et à en favoriser
l'application. Toutefois, là encore, aucune modification du droit interne n'est
nécessaire sur ces points.
J'en arrive au projet de loi d'adaptation.
Il s'agit, par le présent projet de loi, de compléter notre droit interne pour
que notre pays puisse remplir l'ensemble des engagements contractés par la
signature des différents traités que je viens de rappeler.
Le Gouvernement a décidé de s'en tenir strictement aux exigences de ces
traités, sans rien y ajouter et, bien sûr, sans rien y enlever.
Le projet se décompose donc en plusieurs articles qui touchent soit au droit
pénal de fond, soit à la procédure pénale.
Pour ce qui concerne le droit pénal de fond, il a été jugé préférable de
rassembler les dispositions dans un nouveau chapitre au sein du livre IV du
code pénal. Dans un but pédagogique, les articles nouveaux font
systématiquement référence aux traités dont ils constituent l'adaptation en
droit interne.
Les articles visant à l'application des conventions signées dans le cadre de
l'Union européenne concernent l'incrimination de la corruption active et de la
corruption passive.
Les articles visant à l'application de la convention signée dans le cadre de
l'OCDE n'incriminent que la corruption active commise dans le cadre du commerce
international.
La définition des agissements tombant sous le coup de ces articles nouveaux
correspond à celle qui figure dans les articles actuels relatifs à la
corruption active et passive d'un fonctionnaire national. Seule la qualité de
la personne corrompue change.
Il importe de relever que, pour les seules incriminations créées en vue de
l'application de la convention de l'OCDE, le régime des poursuites fait l'objet
d'une disposition spéciale.
Si la totalité des faits a lieu à l'étranger, le déclenchement de l'action
publique obéit aux principes de droit commun. Seul le ministère public peut
engager les poursuites si les faits lui ont été dénoncés dans les conditions
légales, et il a la liberté de le faire ou de ne pas le faire.
En revanche, si une partie ou la totalité des faits a lieu sur le territoire
national, le droit commun permet à une partie civile de déclencher l'action
publique au moyen d'une plainte auprès du juge d'instruction. C'est cette
possibilité qu'il a été décidé d'exclure. Une disposition spéciale réserve donc
au ministère public, et à lui seul, la possibilité de poursuivre ces faits.
Cette disposition a pour but d'assurer une équivalence dans les conditions de
poursuite. L'équivalence fonctionnelle entre les mesures prises par les Etats
est, en effet, l'un des principes fondamentaux de la convention. Or, nous le
savons, certains pays membres de l'OCDE ne connaissent pas la possibilité du
déclenchement de l'action publique par l'action d'une partie civile.
Dans ces conditions, et afin que la France se trouve dans une situation
comparable à ces pays, il s'est avéré nécessaire d'adopter une mesure limitant
la possibilité, pour un plaignant, de déclencher les poursuites.
Les incriminations qui sont créées sont, de surcroît, soumises à des peines
d'emprisonnement de dix ans et à des frais d'amende de 1 million de francs, ce
qui correspond aux peines prévues pour les faits de corruption de
fonctionnaires nationaux.
Les dispositions concernant, d'une part, les peines complémentaires
applicables aux personnes physiques et, d'autre part, la mise en oeuvre de la
responsabilité pénale des personnes morales sont elles aussi calquées sur les
dispositions existant déjà pour les faits de corruption de fonctionnaires
nationaux.
Par application du principe de non-rétroactivité d'une loi pénale plus sévère,
il a été jugé utile de rappeler que les nouveaux articles pris pour
l'adaptation de notre droit aux divers traités ne sauraient avoir de portée
rétroactive. Tel est l'objet de l'article 2 du projet de loi.
Ainsi, la mise en oeuvre, postérieurement à la date d'entrée en vigueur de la
loi, d'engagements pris en vue de déterminer la conclusion de contrats signés
antérieurement à cette date ne sera pas punissable.
C'est là, vous le comprendrez, une disposition qui s'inspire d'un souci de
sécurité juridique puisque des personnes ont pu prendre, avant l'entrée en
vigueur de la loi, des engagements pour l'avenir.
Les pratiques du commerce international toléraient jusqu'alors de tels
engagements, que la loi pénale française ne punissait d'ailleurs pas. Il serait
difficilement compréhensible que l'exécution de ces engagements, passés dans un
temps où la loi pénale française ne punissait pas leur conclusion, rende leurs
auteurs passibles des tribunaux français.
Du reste, il s'agit d'une simple application du principe de non-rétroactivité
de la loi pénale, principe qui a valeur constitutionnelle.
Quant aux dispositions relatives à la procédure pénale qui figurent dans le
projet de loi, elles sont de deux ordres : l'une est liée à l'application des
traités, l'autre constitue une mesure de bonne administration de la justice.
La disposition proposée pour l'application des traités signés dans le cadre de
l'Union européenne concerne la compétence des juridictions françaises.
En effet, le premier protocole et la convention relative à la lutte contre la
corruption prévoient, de manière spécifique, dans plusieurs hypothèses,
l'établissement de la compétence territoriale des juridictions françaises en
cas de commission de faits de corruption ou de fraude portant atteinte aux
intérêts financiers des Communautés.
Ces hypothèses sont les suivantes : une infraction est commise hors du
territoire de l'Union par un fonctionnaire non ressortissant d'un Etat membre,
mais appartenant à une institution communautaire ayant son siège en France ;
une infraction est commise hors du territoire national par un Français ou par
un fonctionnaire de la République française qui serait de nationalité étrangère
; une infraction est commise à l'encontre d'un ressortissant français hors du
territoire national.
Il s'agit, à vrai dire, d'hypothèses marginales, mais les traités les ont
prises en compte pour éviter toute lacune potentielle dans la répression.
Le principal effet pratique de ces dispositions est de supprimer, dans les cas
où elle aurait pu être exigée sur le fondement de l'article 113-6 du code
pénal, toute condition de réciprocité d'incrimination. Elles n'auront de portée
réelle que lorsque les faits auront eu lieu en dehors du territoire de l'Union,
la condition de réciprocité étant, au sein de l'Union, systématiquement
remplie.
En tout état de cause, la France déclarera, conformément à ce que permettent
les traités, qu'elle n'appliquera ces règles de compétence que dans certaines
conditions procédurales.
Ces conditions sont celles que prévoit actuellement le code pénal en cas de
commission d'une infraction entièrement en dehors du territoire national : les
poursuites ne pourront avoir lieu que sur requête du ministère public et
devront avoir été précédées d'une plainte de la victime ou d'une dénonciation
officielle par l'autorité du pays où les faits auront été commis.
Pour ce qui concerne la disposition relative à la bonne administration de la
justice, elle tend à donner compétence aux tribunaux spécialisés en matière
économique et financière pour poursuivre, instruire et juger les infractions
aux nouvelles dispositions pénales que je viens de vous présenter.
Il s'agira, dans la plupart des cas, d'affaires complexes, qui doivent pouvoir
être confiées à des juridictions habituées au traitement de procédures
économiques et financières.
M. Balarello rappelle à juste titre dans son rapport écrit que j'ai engagé une
action déterminée pour développer des pôles économiques et financiers - ce qui
n'existait pas voilà seulement deux ans et demi - afin de renforcer la
spécialisation, et donc l'efficacité, de ces juridictions.
Quatre pôles sont déjà en place, à Paris, Lyon, Marseille et Bastia ; d'autres
sont en cours de construction, à Versailles, Bordeaux et Fort-de-France.
Mon objectif est la mise en place de dix à douze pôles pour renforcer la lutte
contre la délinquance économique et financière sur tout le territoire de la
République.
Je crois en effet qu'il ne suffit pas de transposer les traités européens et
internationaux ; il nous faut aussi nous donner les moyens matériels de lutter
plus efficacement contre la délinquance économique et financière.
Je conclurai en disant que ce projet de loi traduit la volonté de la France de
prendre une fois encore toute sa place dans la lutte contre la corruption.
Cette volonté s'est concrétisée par la ratification récente des instruments
issus des négociations conduites dans le cadre de l'Union européenne, puis sous
l'égide de l'OCDE.
Bien entendu, nous continuerons avec fermeté dans cette voie.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du
groupe communiste républicain et citoyen.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation,
du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur
le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi
qui nous est soumis aujourd'hui, et qui a pour objet de modifier le code pénal
et le code de procédure pénale, est relatif à la lutte contre la corruption
dans le commerce international.
Cette corruption a longtemps été considérée comme inévitable, alors même
qu'elle constitue une atteinte aux principes de la démocratie, qu'elle entrave
le développement d'un grand nombre de pays émergents et y pérennise quelquefois
la misère. Une prise de conscience, ces dernière années, a conduit un certain
nombre d'organisations internationales - vous l'avez indiqué, madame la
ministre - à rechercher les moyens de mener une action efficace contre ce
fléau.
C'est ainsi que de multiples initiatives ont été prises, notamment par le
Conseil de l'Europe, par l'Assemblée générale des Nations unies dès 1996, par
le Fonds monétaire international et par la Banque mondiale.
Dès 1987, la Commission européenne s'est dotée d'une unité de coordination de
lutte antifraude, l'UCLAF, qui enquête sur les fraudes au budget
communautaire.
Toutes ces initiatives ont abouti au projet de loi qui nous est soumis
aujourd'hui, dont l'objet est de transposer en droit interne six conventions
issues, pour les cinq premières, de l'Union européenne et, pour la sixième, de
l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE.
Dans le projet de loi, il est rappelé, en effet, que « certaines dispositions
de droit interne ne satisfont pas aux engagements résultant de ces traités
internationaux, en ce qui concerne, d'une part, le droit pénal de fond, d'autre
part la procédure pénale. »
Ainsi, les cinq conventions et protocoles issus des travaux de l'Union
européenne invitent les Etats membres à incriminer la corruption active et
passive de fonctionnaire communautaire et la corruption de fonctionnaire des
Etats membres de l'Union européenne.
Le sixième texte, la convention de l'OCDE, concerne uniquement la corruption
active d'agent public étranger, quel que soit le pays de l'agent corrompu. La
corruption visée dans ladite convention est uniquement celle qui a pour but
d'obtenir un marché ou un autre avantage indu dans le commerce
international.
Le projet de loi que vous avez soumis au Sénat, madame la ministre, tend à
créer dans notre code pénal quatre nouvelles infractions pour assurer une
transposition complète des diverses conventions.
Il tend à punir de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 francs d'amende
ces nouvelles infractions de corruption.
Le projet de loi prévoit également, de manière fort juste, que les nouvelles
infractions ne concerneront pas les faits commis dans le cadre de contrats
signés avant l'entrée en vigueur des conventions. Le principe de
non-rétroactivité de la loi pénale, sauf si elle est moins sévère, implique en
effet que les contrats en cours d'exécution puissent bénéficier de la sécurité
juridique ; comme vous l'avez indiqué, madame la ministre, ce principe est
d'ordre constitutionnel.
Le projet de loi prévoit par ailleurs, en ce qui concerne la corruption
d'agent public étranger dans le cadre du commerce international visée par la
convention de l'OCDE, que la mise en mouvement de l'action publique est
réservée au ministère public.
Là encore, il s'agit d'une disposition qui mérite d'être approuvée dans la
mesure où des plaintes avec constitution de partie civile de la part
d'entreprises n'ayant pas obtenu un marché qu'elles convoitaient pourraient
avoir des conséquences très déstabilisantes pour les entreprises mises en
cause.
En tout état de cause, notre code pénal prévoit que le monopole des poursuites
au ministère public est la règle lorsqu'un délit est commis à l'étranger.
Madame la ministre, la commission des lois a approuvé les objectifs et les
orientations du projet de loi que vous nous présentez.
Nous ne pouvons nous contenter de déplorer la corruption internationale ; il
nous faut commencer à agir. Les responsables d'entreprises que j'ai rencontrés
- ils ont été nombreux - m'ont indiqué que ces dernières recherchaient
désormais de nouveaux moyens de rendre leurs offres commerciales attractives
sans recourir au versement de commissions ou autres avantages, déductibles, je
le rappelle, jusqu'en 1997 et peut-être encore jusqu'à ce jour, au titre de
l'impôt sur les sociétés.
Le projet de loi va dans le sens d'une remise en cause de pratiques qui n'ont
que trop duré, et nous approuvons cette évolution.
Nous devons cependant vous faire part de quelques préoccupations.
Tout d'abord, la lutte contre la corruption dans le commerce international n'a
de chance d'être efficace que si elle est menée avec la même fermeté par tout
le monde. Or, sur ce point, madame la ministre, nous avons quelques raisons
d'être sceptiques.
En effet, la convention de l'OCDE du 17 décembre 1997 n'a été signée que par
trente-quatre Etats sur près de deux cents, et certains pays qui jouent un
grand rôle dans le commerce international, comme l'Inde, la Chine, Israël,
l'Afrique du Sud et la Russie, n'en sont pas signataires.
Par ailleurs, les informations dont nous disposons sur les transpositions de
la convention qui ont déjà eu lieu dans certains Etats signataires nous
confirment qu'il existe des applications divergentes de cette convention.
Ainsi, le projet de loi que nous examinons prévoit de punir de dix ans
d'emprisonnement la corruption active d'agent public étranger, alors que les
peines d'emprisonnement prévues par nos principaux partenaires - sauf erreur de
notre part sur certains points, mais nos renseignements sont
a priori
exacts - sont parfois très inférieures : un an en Norvège, deux ans en Suède,
trois ans en Belgique, en Hongrie, en Islande, au Japon, cinq ans en Allemagne,
au Canada et en Grèce et six mois en Angleterre, sauf en cas de récidive, la
peine prévue étant alors de sept ans.
De même, le projet de loi prévoit la possibilité d'infliger des peines lourdes
aux personnes morales, telles que la fermeture d'établissements, alors que la
plupart des pays signataires de la convention ne connaissent pas, dans leur
droit interne, la responsabilité pénale des personnes morales, même si des
sanctions civiles sont prévues dans presque tous les droits des grands pays
exportateurs, telles que la suppression de licence d'exportation aux
Etats-Unis.
Il faut aussi mentionner, mes chers collègues, que certains Etats ont des
règles procédurales que nous ne connaissons pas. Aux Etats-Unis, par exemple,
la mise en mouvement de l'action publique en matière de corruption
internationale est réservée à
l'attorney general,
votre homologue,
madame la garde des sceaux, et elle nécessite, de surcroît, l'autorisation d'un
grand jury.
En outre, les Etats-Unis connaissent le
plea bargaining,
qui permet à
quelqu'un de plaider coupable et de transiger sur la peine, de façon à éviter
un procès public et toute médiatisation qui serait préjudiciable à son
entreprise.
De ce fait, aux Etats-Unis, malgré une législation anti-corruption dans le
commerce international datant de 1977 avec la création du
Foreign corrupt
practies act,
le FCPA, le nombre des condamnations est peu important.
Il existe donc un véritable risque que la convention ne soit pas appliquée de
manière homogène par les pays signataires, alors que l'un de ses objets
essentiels est d'assurer l'équivalence entre les mesuress prises par les
différents pays. Nous y reviendrons lors de l'examen des articles.
Pour être complet sur les inquiétudes que suscite le projet de loi, je dois
également mentionner les risques de contournement de la convention de l'OCDE.
Celle-ci ne concerne que la corruption active d'agents étrangers. Elle exclut
donc, vous l'avez souligné, madame la ministre, la corruption passive, celle du
corrompu, de même qu'elle ne concerne pas le trafic d'influence, pourtant si
proche de la corruption
En outre, le recours à des procédés de plus en plus complexes utilisant des
sociétés de droit local et le passage par des centres
off-shore
risque
de permettre le maintien de la corruption par de nouveaux moyens.
Aussi mes chers collègues, nous faut-il aborder ce projet de loi avec beaucoup
de détermination, mais sans angélisme.
Afin d'améliorer le texte qui nous est soumis, la commission formule trois
propositions.
Elle suggère, en premier lieu, de ramener de dix à cinq ans la peine
d'emprisonnement applicable en matière de corruption d'agent public étranger
dans le commerce international, tout en gardant une peine d'amende fixée à 1
million de francs. S'agissant de la corrélation entre l'importance de la peine
de prison et celle de la peine d'amende, je n'e ai trouvé aucun texte ; il
s'agit d'une coutume, me semble-t-il. Et il existe déjà des exceptions dans
notre droit, madame la ministre, notamment en matière de recel, si mes
souvenirs sont exacts.
Nous avons pris cette décision après avoir constaté que tous nos partenaires
signataires de la convention du 17 décembre 1997 avaient prévu des peines
maximales de cinq ans d'emprisonnement, sauf dans quelques hypothèses très
spécifiques.
Cette modification respecte donc pleinement le principe d'équivalence entre
les parties évoqué au préambule de la convention de l'OCDE, lequel précise qu'«
assurer l'équivalence entre les mesures que doivent prendre les parties
constitue un objet et un but essentiel de la convention qui exigent que la
convention soit ratifiée sans dérogations affectant cette équivalence ».
En revanche, la commission proposera de maintenir les peines à dix ans
d'emprisonnement et à 1 million de francs d'amende pour la transposition des
textes de l'Union européenne, c'est-à-dire les mêmes peines qu'en droit
interne.
Je sais que l'on me répondra qu'il est paradoxal de punir de dix ans
d'emprisonnement la corruption de fonctionnaires nationaux ou de fonctionnaires
d'un Etat membre de l'Union européenne et de cinq ans d'emprisonnement
seulement la corruption active de fonctionnaires d'autres Etats.
Cette différence n'est pas choquante, car nous sommes dans des situations
totalement différentes. Au niveau de l'Union européenne, nous sommes engagés
dans un processus d'unification qui justifie pleinement que nous traitions de
la même manière la corruption des fonctionnaires français et des fonctionnaires
communautaires.
En outre, pour ces catégories de personnes, notre dispositif répressif sera
complet puisque nous punissons à la fois la corruption active et la corruption
passive. Il n'en est pas de même en ce qui concerne la corruption d'agent
public étranger dans le commerce international puisque la convention ne punit
que la corruption active.
La deuxième proposition de la commission consiste à limiter la liste des
peines applicables aux personnes morales.
Nous avons constaté que la plupart des pays signataires de la convention de
l'OCDE ne connaissaient pas la responsabilité pénale des personnes morales et
que peu d'Etats disposaient d'un régime aussi sophistiqué que le nôtre en cette
matière.
Il nous a semblé, là encore, qu'il n'était pas pertinent de copier purement et
simplement les sanctions existant en droit interne en cas de corruption active.
Certaines peines, telles la fermeture d'établissements ou l'exclusion de tout
marché public, même si elles sont rarement appliquées par les tribunaux, nous
ont paru disproportionnées et susceptibles de présenter de grandes difficultés,
notamment sur le terrain de l'emploi, alors qu'il s'agit d'infractions le plus
souvent commises à l'étranger et troublant peu ou pas l'ordre public
interne.
Enfin, la commission a estimé souhaitable, à l'unanimité, que la poursuite et
le jugement des infractions de corruption active d'agent public étranger aient
lieu au parquet et au tribunal correctionnel de Paris. Deux raisons ont guidé
ce choix.
Tout d'abord, les infractions en cause passent souvent par des mécanismes
complexes de droit international privé et public, de droit commercial et
d'arbitrage international. Il est donc nécessaire que des magistrats très
spécialisés soient en charge de ces dossiers si l'on veut que la répression
soit à la fois efficace et objective. Il nous a semblé que la centralisation à
Paris constituait un gage d'efficacité.
Ensuite, nous avons également souhaité éviter des comportements trop
divergents d'un parquet à l'autre en matière de corruption dans le domaine
délicat du grand commerce international. Rappelons que la France est le
quatrième exportateur mondial, avec un chiffre d'affaires à l'exportation en
1998 de 1 798 milliards de francs.
Vous avez entrepris, madame la ministre - vous venez de le rappeler à cette
tribune - de constituer des pôles économiques et financiers dans certaines
juridictions, afin de rendre plus efficace la lutte contre la délinquance
économique et financière. Cela ne nous paraît pas contradictoire avec notre
proposition, destinée à avoir l'assurance que la corruption internationale sera
traitée par des magistrats spécialisés.
Bien sûr, si, dans quelques années, il existe véritablement, dans le ressort
d'un certain nombre de cours d'appel, une juridiction équipée pour rechercher
et punir efficacement la corruption internationale, nous pourrons envisager de
renoncer à la centralisation à Paris.
Nous espérons d'ailleurs que, rapidement, l'Union européenne prendra des
initiatives, afin de créer, dans ce domaine comme dans quelques autres, tels le
blanchiment de l'argent et la lutte contre la drogue, un espace judiciaire
européen. Du reste, nous nous félicitons de l'initiative du Conseil européen de
Tampere, en octobre dernier, de créer, dans le domaine de la justice, Eurojust
: cette vérité verra le jour avant le fin de l'année 2001 ; elle constitue le
premier pas important vers une Europe judiciaire.
Il reste que, dans cette attente, la centralisation à Paris est une solution
qui fonctionne bien en matière de terrorisme. Loin d'affaiblir la lutte contre
la corruption internationale, elle la renforcera.
Telles sont, madame la ministre, mes chers collègues, les conclusions
auxquelles est parvenue la commission.
Le texte que nous vous proposons nous semble permettre une répression
efficace, dissuasive et proportionnée de la corruption, tant au sein de l'Union
européenne que dans le commerce international. Nous espérons le voir adopté,
afin que la France puisse déposer sans tarder les instruments de ratification
des conventions de l'OCDE et de l'Union européenne, ce qu'ont déjà fait
dix-sept pays sur les trente-quatre signataires.
(Applaudissements sur les
travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, notre
collègue Robert Badinter aurait souhaité intervenir dans ce débat. Je serai, à
sa place, le porte-parole du groupe socialiste.
Le texte dont nous débattons aujourd'hui revêt une importance particulière. Il
nous conduit en effet à l'adaptation de notre droit pénal et de notre procédure
pénale afin de satisfaire aux obligations qu'a contractées notre pays en
ratifiant les cinq engagements signés dans le cadre de l'Union européenne, dont
la convention du 26 mai 1997 relative à la lutte contre la corruption
impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires
des Etats membres de l'Union européenne, ainsi que la convention du 17 décembre
1997 relative à la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans
les transactions commerciales internationales, signée dans le cadre de l'OCDE.
Ces engagements marquent la préoccupation des Etats face aux pratiques de
corruption trop répandues dans les transactions commerciales
internationales.
La corruption, mal constant de nos sociétés, frappant tous les Etats, est un
phénomène difficile à quantifier avec précision. Cependant, le volume des
transactions internationales est tel que le coût de cette corruption est estimé
par le FMI à 500 milliards de dollars par an, soit 2 % du produit intérieur
brut mondial. Ce montant tient compte à la fois des sommes détournées - les
pots-de-vin - et des pertes occasionnées par la distorsion de concurrence
résultant de la corruption. A cet égard, je rappellerai que, selon l'étude
faite par
Transparency International,
notre pays figurerait parmi les
plus mal classés.
Les effets pervers de la corruption d'ordre international ne se limitent pas à
des coûts financiers. La corruption grève l'économie et le développement des
pays qu'elle frappe en détournant l'argent vers des secteurs non productifs,
vers des projets qui ne sont pas de réelles priorités nationales. La corruption
fait également fuir l'investissement international et freine le développement
national par une course à l'argent facile. De tels dérèglements entraînent
parfois une crise d'envergure, comme l'a montré la récente crise asiatique. Et
que dire des difficultés que rencontre la Russie depuis plusieurs années, sinon
que la corruption y a certainement une part importante ?
Tout cela, nous ne le savons que trop. Et les fatalistes, les résignés, de
réciter le couplet bien connu : la corruption existera toujours, alors, à quoi
bon ?
C'est oublier que, face à une corruption qui non seulement perdure, mais se
renforce, se diversifie et s'internationalise sans répit, l'abstention équivaut
à de la complaisance. La réaction doit impérativement être des plus fermes et
s'organiser au niveau international, car la corruption est, aujourd'hui, un
crime international.
C'est le sens des propos très nets tenus, en 1998, par le procureur général
près la Cour de cassation, M. Burgelin : « Si chaque Etat agit de façon isolée
et à son rythme contre ce phénomène, il risque très vite d'être marginalisé et
exclu de la concurrence. Une action concertée d'envergure du plus grand nombre
d'Etats apparaît donc indispensable pour rendre la corruption internationale
plus visible, plus dangereuse, moins rémunératrice et donc moins attractive. La
lutte contre la corruption internationale doit être une véritable priorité
gouvernementale. Il n'est plus acceptable qu'à l'aube du xxie siècle, alors que
partout, y compris et surtout dans le monde de l'entreprise, une réflexion
éthique se développe, les Etats continuent de fermer les yeux sur ces pratiques
et tolèrent hors de leurs frontières, parce que loin de leur vue, ce qu'ils
jugent inacceptable chez eux et poursuivent de leurs foudres judiciaires. »
La communauté internationale, au sein de différentes enceintes, a ainsi
manifesté sa détermination à combattre ce cancer qui ronge les fondements de
l'Etat de droit. On peut citer comme instruments de valeurs normatives, certes,
inégales, les engagements suivants : la résolution de l'Assemblée générale de
l'ONU, en 1996 ; la politique de « bonne gouvernance » du Fonds monétaire
international et de la Banque mondiale ; l'accord sur les marchés publics au
sein de l'Organisation mondiale du commerce ; les conventions conclues au sein
de l'Union européenne ; la convention signée dans le cadre de l'OCDE.
Bien sûr, ce sont les conventions conclues sous l'égide de l'Union européenne
et de l'OCDE qui formalisent le plus précisément cette volonté
internationale.
L'objet de mon propos n'est pas de revenir ici en détail sur le contenu de ces
instruments internationaux, puisque nous avons eu ce débat lors de
l'autorisation de ratification des conventions signées respectivement dans le
cadre de l'Union européenne et de l'OCDE. Il convient cependant de rappeler que
celles-ci relèvent du droit international pénal, ce qui nous oblige, lors de
l'adaptation de notre législation, à respecter l'objectif de répression et de
prévention efficace de ces crimes de corruption.
Ainsi, notre pays, à la suite de la ratification de ces conventions, se
trouvait soumis à une obligation de résultat tout en conservant, à cet égard,
son autonomie procédurale. Le présent projet de loi s'inscrit dans cette
logique classique du droit international public et tend à adapter notre droit
pénal tout en respectant sa cohérence.
Mme le garde des sceaux et M. le rapporteur ont excellemment expliqué les
principales caractéristiques de ce texte, sur lesquelles je ne m'attarderai
donc que très peu, avant d'exprimer l'opposition du groupe socialiste à
certains des amendements retenus par la commission des lois.
Au préalable, je voudrais souligner avec intérêt le choix rédactionnel de
créer un nouveau chapitre au sein du livre IV du code pénal. Certes, cette
option s'explique par un souci de clarté, toujours préférable en matière
législative, et particulièrement pénale. Mais, de surcroît, cela permet de
marquer le lien de ces futures dispositions avec le droit international pénal,
matière en pleine évolution. En distinguant, y compris dans la définition des
infractions, leur origine conventionnelle, le législateur français démontre, si
besoin en était, que la lutte contre certaines formes de délinquance ou de
criminalité internationale, celles qui se rient des frontières, exige une
action transnationale, une action coordonnée.
Je me plais à saluer, madame la ministre, l'énergie que vous consacrez à cette
ambition et dont les résultats du récent sommet de Tampere témoignent.
Comme cela a donc été montré, notre code pénal incrimine déjà, dans ses
articles 432-11 et 433-1, les infractions de corruption de personnes
dépositaires de l'autorité publique, chargées d'une mission de service public
ou investies d'un mandat électif public. Mais il est vrai que, en vertu d'une
jurisprudence faisant application de l'ancien code pénal, la corruption, alors
visée par les articles 177 à 180, était jugée comme ne concernant pas les
agents publics étangers. Les éléments constitutifs des infractions retenues par
le nouveau code pénal n'ayant pas changé, la même appréciation s'impose. C'est
pourquoi il était nécessaire de prévoir des infractions spécifiques.
L'article 435-1 proposé réprime la corruption passive de fonctionnaire
communautaire ou de fonctionnaire d'un autre Etat membre de l'Union européenne,
c'est-à-dire le fait du corrompu qui sollicite le corrupteur. Le changement par
rapport au droit actuel tient ici à la qualité de la personne corrompue,
puisque, pour le reste, la définition des actes concernés reprend celle qui
figure déjà dans les dispositions existantes sur ce sujet.
L'article 435-2 vise, pour sa part, les faits de corruption active de
fonctionnaire communautaire ou de fonctionnaire d'un autre Etat membre de
l'Union européenne. Là encore, l'élément novateur concerne la qualité de la
personne corrompue, les autres éléments constitutifs de l'infraction reprenant
ceux qui sont connus dans notre droit pénal.
Les articles 435-3 et 435-4 concernent plus particulièrement la mise en oeuvre
de la convention signée dans le cadre de l'OCDE, et donc seulement les faits de
corruption active d'agents publics étrangers ou appartenant à des organisations
internationales autres que les Communautés européennes. A cet égard, il
convient d'observer que le Gouvernement a fait le choix d'une rédaction très
fidèle au texte même de la convention, notamment au paragaphe 4 de son article
1er définissant la notion d'agent public.
On relèvera cependant que, pour l'adaptation de notre législation à la
convention signée dans le cadre de l'OCDE, il est apparu indispensable de
préciser que l'objet de l'infraction est l'obtention ou la conservation d'un
marché ou d'un autre avantage indu dans le commerce international.
Sur le plan procédural, il est important de noter le rôle reconnu au ministère
public en ce qui concerne les infractions tirées de la convention signée dans
le cadre de l'OCDE. En conférant, sur ce terrain, au parquet le monopole du
déclenchement de l'action publique lorsque les faits constitutifs de
l'infraction ont été commis en totalité hors du territoire national, le projet
de loi tient compte de la spécificité de ces délits. S'agissant de faits qui ne
peuvent se développer qu'au travers de pratiques occultes et bien souvent au
terme de montages complexes, il est clair que cette mission réservée au
ministère public trouvera un prolongement bienvenu dans la création présente ou
à venir de pôles économiques et financiers dans le ressort de certaines
juridictions - Paris, Lyon, Marseille et Bastia.
Cependant, la lutte contre une délinquance à vocation internationale nécessite
des moyens coordonnés, ce que le Conseil européen de Tampere a mesuré en
décidant de la création d'Eurojust, unité composée de procureurs, de magistrats
ou d'officiers de police ayant des compétences équivalentes et détachés par
chaque Etat membre conformément à son système juridique. Eurojust aura pour
mission de contribuer à une bonne coordination entre les autorités nationales
chargées des poursuites et d'apporter son concours aux enquêtes relatives aux
affaires de criminalité organisée, notamment sur la base de l'analyse effectuée
par Europol.
Voilà donc quelques éléments sur lesquels il était utile de revenir brièvement
pour montrer que le présent projet de loi répond bien à cette double logique
que je rappelais précédemment : une adaptation de notre droit pénal, dans le
respect de sa cohérence et de ses principes fondamentaux, de nature à
satisfaire aux objectifs de répression et de prévention déterminés par les
engagements internationaux par lesquels notre pays est obligé.
Je fais ce rappel, car je voudrais à présent attirer l'attention de la Haute
Assemblée sur les amendements de la commission des lois relatifs à la mise en
oeuvre de la seule convention signée dans le cadre de l'OCDE, dont la teneur,
voire une certaine inspiration, risquerait, s'ils étaient adoptés, de rompre la
double logique que je viens d'évoquer.
Le premier amendement en cause a pour objet de réduire la peine prévue à
l'encontre des personnes physiques à cinq ans, au lieu de dix ans comme
envisagé dans le texte du projet gouvernemental. Le deuxième amendement
critiqué limite les peines encourues par les personnes morales à l'amende, la
confiscation, l'affichage de la décision et au placement sous surveillance
judiciaire, alors que le projet de loi retient les mêmes peines que celles qui
sont prévues en cas de corruption d'un fonctionnaire national par une personne
morale.
Pour justifier ces propositions, M. le rapporteur invoque le texte de la
convention signée dans le cadre de l'OCDE en ce qu'il fait référence, d'abord,
à la notion d'« équivalence fonctionnelle » et, ensuite, à des arguments
d'opportunité. Je crois que son raisonnement ne peut sérieusement prospérer.
En premier lieu, il importe de donner à l'expression « équivalence
fonctionnelle » sa portée exacte. Elle figure au dernier paragraphe du
préambule de la convention en des termes qu'il faut citer intégralement : «
Reconnaisant qu'assurer l'équivalence entre les mesures que doivent prendre les
parties constitue un objet et un but essentiels de la convention qui exigent
que la convention soit ratifiée sans dérogations affectant cette équivalence
».
Conformément aux principes du droit des traités, cette rédaction renvoie, en
réalité, à la prohibition de formuler des réserves contraires au but et à
l'objet de la convention en question. Au moment de la ratification, les hautes
parties contractantes ne peuvent pas déposer de réserves conduisant à écarter
telle ou telle disposition et donc à compromettre l'équivalence des mesures
d'adaptation dans les droits internes de chaque Etat. Cela se comprend d'autant
plus en droit international pénal, lequel vise des objectifs de répression et
de prévention.
Mais nous ne sommes plus au stade de la ratification. Aussi, l'équivalence
dont il s'agit ne peut être invoquée utilement à ce stade du débat.
En tout état de cause, cette notion d'équivalence figurant dans le seul
préambule du traité doit se lire avec les dispositions de la convention. Or, à
cet égard, cette lecture combinée montre que la voie choisie par le
Gouvernement est pertinente.
En effet, l'article 3 du traité prescrit que « l'éventail des sanctions
applicables doit être comparable à celui des sanctions applicables à la
corruption des agents publics de la partie en question ».
Si l'équivalence fonctionnelle ne peut conduire à l'uniformité des mesures
d'adaptation, elle suppose cependant que chaque Etat organise une répression en
cohérence avec son propre système juridique. Le droit français actuel punit de
dix ans et d'une amende d'un million de francs la corruption d'agent public
français. Il est donc impératif, au regard des obligations que nous tenons de
ce traité, de prévoir une peine semblable pour la corruption d'agent public
étranger. Si l'amendement était adopté, le risque d'inconstitutionnalité ne
pourrait être écarté.
Il en va de même pour ce qui concerne les sanctions applicables aux personnes
morales. L'article 2 de la convention signée dans le cadre de l'OCDE dispose
que chaque partie prend les mesures nécessaires, conformément à ses principes
juridiques, pour établir la responsabilité des personnes morales. C'est donc
fort logiquement que le projet de loi s'en tient aux prescriptions de notre
code pénal en la matière.
On rappellera que l'article 3, paragraphe 4, de la convention demande aux
Etats ne connaissant pas la responsabilité des personnes morales dans leur
droit interne de prévoir, toutefois, des sanctions administratives ou
civiles.
Le commentaire de la convention établi par le groupe de travail de l'OCDE
donne notamment comme exemples de ces sanctions civiles ou administratives
l'exclusion du bénéfice d'un avantage public ou d'une aide publique, ainsi que
l'interdiction temporaire ou permanente de participer à des marchés publics ou
d'exercer une activité commerciale.
Il serait pour le moins étonnant que le législateur français, par dérogation à
son droit commun, exclue de la liste des sanctions pénales applicables aux
personnes morales celles que le commentaire de la convention préconise en tout
état de cause.
J'ajoute que l'article 3, paragraphe 1, de la convention stipule que les
sanctions déterminées par les droits nationaux doivent être efficaces,
proportionnées et dissuasives. Le fait de prévoir des peines moins sévères que
celles qui sont déjà établies pour la répression d'infractions de même nature
serait certainement regardé, du point de vue du droit international, comme un
écart par rapport à l'obligation ainsi posée.
On le voit, ces deux amendements sont critiquables à un double titre. D'une
part, ils méconnaissent la portée de l'obligation de répression et de
prévention à laquelle est tenu notre pays du fait de la ratification de ce
traité. D'autre part, ils sont de nature à créer une rupture avec la cohérence
de l'échelle des peines voulue par le législateur de 1992.
En second lieu, ces propositions me semblent poser un problème de
constitutionnalité au regard du principe d'égalité devant la loi pénale. Pour
s'en convaincre, il suffit d'observer que, pour des infractions de même nature
et dont les éléments constitutifs sont sinon identiques du moins quasiment les
mêmes, les peines encourues seraient différentes. Cela est vrai non seulement
par rapport à la répression de la corruption d'agents publics français, mais
également par rapport à la répression de la corruption des fonctionnaires
communautaires organisée par ce texte.
Quelle différence objective de situation justifierait une telle différence de
répression ? Quelle invocation de l'intérêt général viendrait l'habiller ? Le
fait que l'objet de la corruption soit, ici, exclusivement tourné vers une
opération de commerce international ne semble pas une justification suffisante.
Le caractère relatif de la différence de traitement n'emporterait pas davantage
l'adhésion. La corruption d'un agent public est aussi insupportable de ce côté
de la planète que de l'autre, et l'objectif de maintien de l'ordre public ne
saurait se satisfaire de sanctions échelonnées en fonction d'un critère tenant
in fine
à la nationalité du corrompu.
Ce relativisme répressif n'est pas acceptable. Il laisse planer, bien à tort,
un doute sur la nécessité d'une lutte implacable contre la corruption sous
toutes ses formes. Or, vous nourrissez ce relativisme répressif par des
considérations d'opportunité qui ne sont pas convaincantes.
La convention signée dans le cadre de l'OCDE a expressément prévu dans les
règles conditionnant son entrée en vigueur un mécanisme propre à réduire les
risques de distorsion de concurrence susceptibles d'affecter le commerce
international. Ainsi, la convention entrera en vigueur le soixantième jour
suivant la date à laquelle cinq pays qui comptent parmi les dix premiers pays
pour les exportations et qui représentent à eux cinq au moins 60 % des
exportations cumulées de ces dix pays auront ratifié ladite convention. C'est
là une garantie de nature à s'assurer que la répression sera organisée de façon
équivalente par les principaux Etats commerçants de la planète.
C'est aussi au sujet de votre vision de la répression des personnes morales
que vos arguments d'opportunité paraissent les moins en adéquation avec la
réalité économique. Se contenter d'une amende de 5 millions de francs quand on
connaît le montant de certains marchés laisse rêveur quant au caractère
dissuasif de votre proposition. On peut même imaginer que ce risque soit
intégré dans les stratégies les plus complexes dès lors que le bilan
coût-avantage s'avérerait bénéficiaire.
Le parti du réalisme n'est pas celui que vous croyez. La fermeture d'un
établissement
off-shore
ou l'exclusion des marchés publics, voire
l'interdiction de faire appel à l'épargne, sont des armes nécessaires à la
dissuasion. Il faut éliminer des zones sensibles les entreprises les plus
corruptrices. En effet, l'égalité des chances entre concurrents se mesure non
seulement entre les entreprises françaises et les entreprises étrangères, mais
également entre les entreprises françaises elles-mêmes. Il n'y aurait rien de
satisfaisant à maintenir des ferments de distorsion entre les acteurs
économiques nationaux, sauf à montrer une méconnaissance certaine des réalités
économiques. Il faut libérer les entrepreneurs de ce poids et se convaincre que
les entreprises vertueuses sont également dignes d'être protégées.
C'est pourquoi le groupe socialiste, qui soutient pleinement le projet du
Gouvernement, ne votera pas ces amendements qui risquent de donner un signal
pouvant être mal interprété. La vertu n'a pas à être marchandée ; elle n'est
pas affaire de circonstances. Ne voyez dans notre propos aucune naïveté.
Voyez-y, au contraire, le refus de la fatalité ! La corruption internationale
dévaste les économies et entretient la misère et les inégalités. Elle corrompt
les Etats. Elle doit être combattue sans relâche et sans ménagement.
M. le président.
La parole est à M. de La Malène.
M. Christian de La Malène.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, le 29
avril dernier, j'avais l'occasion de présenter au Sénat, au nom de la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, la
convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption dans les transactions
commerciales internationales.
Au moment où nous nous apprêtons à modifier notre droit pénal pour nous
conformer à cette convention, il me semble nécessaire de rappeler son contexte
ainsi que les réserves qu'elle a pu susciter lors de son examen par le Sénat au
printemps dernier.
Soulignons d'abord que, au-delà d'un objectif de moralisation qui ne peut que
susciter l'adhésion générale, la convention de l'OCDE s'inscrit surtout dans un
contexte bien particulier, celui de la réglementation de la compétition
internationale pour la conquête des marchés à l'exportation. C'est en cela
qu'elle n'est pas neutre pour notre pays, quatrième exportateur mondial.
Je n'insisterai pas sur un certain nombre de facteurs qui apportent autant de
limites à une convention par ailleurs pleine de bonnes intentions.
La convention n'agit que sur l'« offre » susceptible d'émaner d'entreprises
exportatrices, mais elle n'agit en aucun cas sur les pays qui ont fait de la
corruption un passage obligé pour l'accès à leur marché. Elle n'est signée que
par trente-quatre pays, qui ne résument pas à eux seuls le commerce
international. Enfin, elle comporte des risques de contournement par les
entreprises, notamment les plus importantes, qui auront les moyens de recourir
à des sociétés écran ou de passer par des paradis fiscaux.
L'une des conclusions majeures du débat qui s'est déroulé au Sénat en avril
dernier était que l'efficacité et la crédibilité de cette convention
reposeraient sur la volonté réelle de chaque Etat partie d'appliquer ce texte
de manière similaire.
Notre crainte portait sur le risque de trop fortes disparités, selon les pays,
dans le régime des sanctions pénales, dans l'interprétation des textes ou dans
la propension des parquets à poursuivre, disparités pouvant engendrer
d'inacceptables distorsions de traitement, au lieu de les réduire.
Cette crainte n'était pas infondée. Elle résulte de l'observation de la
législation américaine, en apparence très sévère mais, en réalité, pratiquement
pas appliquée. Le filtrage sélectif des affaires, la pratique de transactions
avant tout déclenchement des poursuites, le respect de la règle du secret,
l'extrême centralisation de la mise en oeuvre de l'action pénale et la
quasi-absence de sanctions que nous avons constatée au fil des années dans la
pratique sont en effet les caractéristiques de cette législation.
Cet exemple important de la législation américaine illustre l'importance du
principe d'équivalence, sur lequel repose toute la convention de l'OCDE,
principe qui a inspiré la réflexion de la commission des lois. Je m'en réjouis
et je vous en félicite, monsieur le rapporteur.
En effet, les amendements adoptés par la commission des lois, que ce soit sur
le régime des sanctions pénales ou sur la mise en oeuvre de l'action publique,
prolongent de manière très opportune les réflexions dont le Sénat s'était fait
l'écho au moment de l'examen de la convention de l'OCDE.
Ces amendements permettront, me semble-t-il, de mieux garantir le respect de
ce principe d'équivalence. Ils témoignent d'une approche réaliste, du souci de
tenir compte des pratiques de nos principaux partenaires et de placer les
entreprises exportatrices françaises dans un cadre juridique relativement
comparable à ce que connaissent leurs homologues des pays étrangers.
Je voterai donc le projet de loi assorti des amendements proposés par M. le
rapporteur, dont je tiens à saluer le travail. Le Sénat pourra ainsi faire de
cette loi de transposition un texte équilibré servant les objectifs de la
convention sans les dénaturer.
Pour conclure, j'ajouterai que la responsabilité des pouvoirs publics, face à
l'application de cette convention de l'OCDE, ne saurait, bien sûr, s'arrêter à
cette modification du code pénal.
Il faudra, selon moi, oeuvrer, sur le plan international, à une extension
géographique des dispositions de la convention, par exemple - et là nous sommes
en pleine actualité - à tous les membres de l'Organisation mondiale du
commerce. C'est la condition d'une prise de conscience beaucoup plus large des
phénomènes de corruption.
Il faudra également que le Gouvernement accorde une vigilance spéciale à la
procédure de suivi de la convention, confiée à un groupe de travail de l'OCDE,
car il s'agit là de notre seul moyen de veiller à son application équilibrée
dans les différents pays signataires.
Telles sont, mes chers collègues, les quelques observations que je tenais à
effectuer avant l'examen des articles de ce projet de loi.
M. le président.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest.
Je ne vais pas, à mon tour, exposer le projet de loi, car Mme le garde des
sceaux l'a fait très complètement ; en outre, l'excellent rapport de M.
Balarello me permettra de limiter mes commentaires.
Ce projet de loi comporte, à mon avis, deux parties.
S'agissant de la première, constituée par un ensemble de cinq conventions et
protocoles, M. de La Malène a rappelé le point de vue qu'il avait exposé lors
de l'examen de ces textes par le Sénat.
S'agissant des problèmes de corruption dans l'Union européenne, je m'étais
demandé s'il n'était pas possible d'intégrer les dispositifs dans les articles
432-11 et 433-1 du code pénal relatifs à la corruption active ou passive. En
effet, les mêmes infractions sont visées. Le dernier rapport de la Cour des
comptes européenne révèle l'existence de cas de corruption, à tous les niveaux
d'ailleurs, au sein des organismes européens, et certaines révélations ont même
abouti au changement de certains responsables, notamment au sein de la
Commission européenne. Il est bien entendu nécessaire, comme cela se passe pour
les fonctionnaires français, de poursuivre efficacement toutes les infractions,
notamment celles qui concernent les aides apportées par l'Union européenne à
certaines catégories.
La deuxième partie de ce projet de loi - la convention signée dans le cadre de
l'OCDE - a suscité le plus grand nombre de commentaires.
Certains se demandent ce que ce texte va changer, estimant qu'aucun signataire
n'appliquera réellement la convention et que des moyens détournés seront
trouvés. Cette attitude est dangereuse et amène aussi à se demander pourquoi,
dans ces conditions, une telle convention a été signée. Une convention signée
doit être respectée.
Une moralisation est nécessaire en matière de commerce international, les
grands pays se livrant encore - aujourd'hui moins que naguère, certes - à des
corruptions. Nous avons connu, je le rappelle, de grandes affaires, à cet égard
: un certain nombre de marchés relatifs à des avions de combat ont ainsi fait
tomber un Premier ministre japonais, je ne sais combien de ministres belges,
quelques ministres italiens, etc. Les faits de corruption ont donc eu, dans
certains pays, des conséquences extrêmement importantes et ont été réprimés.
Comme la majorité du commerce mondial s'effectue entre pays développés,
signataires de la convention, on peut espérer que cette dernière sera
appliquée.
Mais il reste, bien entendu, des lacunes. Il en est ainsi, tout d'abord, de la
corruption active : comme un certain nombre de pays n'ont pas la même
législation, qu'en sera-t-il lorsque l'on sollicitera des avantages pour
obtenir des marchés ? Comme nous le savons bien, cette situation continuera
d'exister dans divers pays pendant un certain nombre d'années.
Je me suis aussi interrogé sur le champ visé par la convention. Les marchés et
les avantages indus dans le commerce international sont évoqués. Mais qu'en
est-il, par exemple, des autorisations d'exploitation en matière
d'hydrocarbures, des autorisations de toutes sortes permettant de s'implanter
dans un pays ? Certaines autorisations administratives ne sont pas visées dans
la convention et n'entrent pas, à mon avis, dans le champ de cette dernière,
contrairement à ce que d'aucuns ont affirmé. Il existe donc une lacune. Nous
savons en effet l'importance qu'ont, sur le plan économique, les autorisations
d'exploitation en matière d'hydrocarbures, de ressources minérales, etc., et ce
que cela peut représenter dans certains pays, notamment en Afrique.
Le débat va, bien sûr, tourner autour des amendements présentés par la
commission des lois. Il eût été plus simple, je le répète, d'appliquer,
s'agissant des infractions visées par la convention signée dans le cadre de
l'OCDE, les mêmes dispositions que celles qui figurent dans le code pénal
actuel. Mais M. le rapporteur a bien expliqué qu'il fallait d'abord assurer une
analogie des échelles de peines et donc procéder par comparaison avec ce qui se
fait ailleurs.
Par ailleurs, on peut reprocher à notre code pénal d'aggraver toujours les
peines - c'est un phénomène général - alors que, dans d'autres pays qui ne
disposent pas d'une échelle des peines aussi excessive, la répression est tout
autant efficace. Mais de toute façon, en France, les juges, dans leur sagesse,
n'appliquent pas les peines maximales qui sont manifestement excessives ; c'est
un phénomène permanent. En matière d'application des peines, par exemple, nous
savons bien que la justice est obligée de corriger les excès, quelquefois
sympathiques, que le législateur, sous le coup de l'émotion, est amené à
prendre dans le domaine des sanctions.
J'en viens au problème des personnes morales, qui est réel. En effet, nombre
de pays ne connaissent pas l'incrimination vis-à-vis des personnes morales ; en
outre, imaginons qu'une grande société française se soit livrée à des faits de
corruption ; imaginons à la limite que, sans le savoir, elle ait, par des
intermédiaires, vendu à un certain pays des radars - je ne dirai pas « des
frégates », car ce serait vraiment déplacer le problème
(Sourires)
et
l'on ne vend plus, maintenant, de frégates, même si l'on en a vendu beaucoup à
certains pays - et que cette grande société soit condamnée à la peine maximale
: l'interdiction des marchés publics. Cela signifierait qu'un grand groupe
français, que tout le monde connaît, ne pourrait plus fournir de radars à
l'armée française !
Il faut donc, à mon avis, être un peu mesuré : on peut aggraver les sanctions
pécuniaires ou les fixer à proportion du marché gagné. Mais l'application
systématique de l'interdiction des marchés publics ou la fermeture de
l'entreprise serait à mon avis, quelque peu démesurée et ne serait de toute
façon pas appliquée.
Tels sont les commentaires que je souhaitais faire. Ce projet est important,
puisqu'il vise à moraliser le commerce international. Mais il faut aussi faire
preuve de réalisme. Le groupe de l'Union centriste soutiendra donc les
propositions de la commission des lois.
(Applaudissements sur les travées du
RPR - M. le rapporteur applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici
réunis, aujourd'hui, pour examiner en première lecture les dispositions visant
à transposer dans notre droit interne cinq traités européens de lutte contre la
corruption, ainsi que la convention de Paris du 17 décembre 1997.
Tous ces textes participent du même objectif : instiller un peu de morale dans
les relations économiques internationales qui, traditionnellement, s'y révèlent
réfractaires. C'est ce que soulignait récemment Jean-François Burgelin, Premier
président de la Cour de cassation : « S'il est un domaine où, pendant
longtemps, les intérêts économiques des entreprises ont semblé dominer les
exigences du droit et de la morale, c'est bien celui des transactions
commerciales », écrivait-il.
Alors que le droit national tolérait de moins en moins les comportements
illicites à l'intérieur du territoire, il semblait admis, sinon conseillé, de
monnayer l'obtention de marchés à l'extérieur.
La morale économique présente ainsi, tel Janus, deux visages : le premier,
respectueux de la concurrence à l'intérieur des frontières, et le second,
érigeant le bakchich au rang de règle de négociation internationale à
l'extérieur.
C'est bien ainsi qu'il faut considérer la pratique dite « du confessionnal »,
qui permet la déduction fiscale des commissions versées pour obtenir un marché
à l'étranger, après accord du ministre des finances, et dont nous ne sommes pas
sûrs qu'elle ne subsiste pas sous d'autres formes.
Comment se satisfaire d'une telle situation, véritable initiation à la
corruption ? Alors que le monde devient, selon l'expression consacrée, de plus
en plus « petit », les citoyens sont, avec raison, de plus en plus demandeurs
de morale internationale : l'extension du concept d'ingérence humanitaire nous
le prouve bien. Ils n'admettent plus que des pratiques jugées répréhensibles,
condamnables, voire criminelles, en France, ne soient pas sanctionnées dès lors
qu'elles sont perpétrées hors du territoire national : la répression du
tourisme sexuel constitue, de ce point de vue, un symbole emblématique.
C'est cette évolution des mentalités qu'il nous est proposé d'inscrire
aujourd'hui dans notre droit national.
Parmi les textes européens, quatre ont pour objet la protection des intérêts
financiers de la Communauté.
La convention du 26 juillet 1995 définit le concept de fraude aux intérêts
financiers. Quant aux protocoles additionnels, ils visent à définir les
comportements de corruption active et passive - c'est le protocole du 27
septembre 1996 - et à prendre en compte l'interprétation de la Cour de justice
- c'est le protocole du 29 novembre 1996.
Le protocole du 19 juin 1997 concerne spécifiquement la responsabilité des
personnes morales, le blanchiment et l'entraide judiciaire.
Le dernier texte en date, à savoir la convention de Bruxelles du 26 mai 1997,
concerne très généralement la lutte contre la corruption, qu'elle mette ou non
en cause les intérêts financiers de la Communauté.
Parallèlement, à la fin de l'année 1997, était signé un traité dans le cadre
de l'OCDE, destiné à lutter contre la corruption d'agents publics étrangers à
l'occasion des transactions commerciales internationales.
Il convient aujourd'hui de tirer les conséquences juridiques de ces textes
ratifiés.
Notre droit pénal français actuel se désintéresse en effet largement des
infractions commises sur des agents publics étrangers, puisqu'il n'incrimine
que la corruption active et passive des personnes « dépositaires de l'autorité
publique », ce qui exclut les agents publics étrangers, il ne prend pas non
plus en compte les délits perpétrés à l'étranger : sauf application du principe
de la double incrimination, le principe de la territorialité de la loi pénale
fait obstacle à la poursuite en France de ces infractions.
Pour plus de lisibilité, le Gouvernement a choisi de séparer dans des
chapitres différents les dispositions « européennes » des dispositions signées
dans le cadre de l'OCDE, qui n'ont pas le même champ d'application ni du point
de vue géographique ni au regard des infractions visées.
Cette distinction n'implique cependant pas - et c'est là le principal mérite
du projet de loi déposé par le Gouvernement - de différence de traitement entre
les délits de corruption sur un fonctionnaire français ou sur un agent public
étranger.
C'est ainsi, notamment, que les personnes morales ou physiques coupables de
tels agissements sont soumises aux mêmes peines que celles qui résultent de la
corruption d'agents publics nationaux.
Cette égalité de traitement a été refusée par la commission des lois ; cette
dernière, en effet, a retenu un système moins sévère pour les infractions de
corruption active visées par la convention signée dans le cadre de l'OCDE.
C'est ainsi qu'elle propose de réduire de moitié les peines d'emprisonnement
encourues dans ce cadre et qu'elle institue une compétence exclusive du
tribunal correctionnel de Paris pour les infractions de corruption visées par
la convention signée dans le cadre de l'OCDE.
Par ailleurs, la commission des lois a posé des limites à l'assimilation au
droit pénal national en faisant dépendre l'application des dispositions du code
pénal à l'entrée en vigueur sur le territoire de la République de la convention
et en évinçant toute sanction de nature commerciale à l'égard des personnes
morales reconnues coupables de corruption en application des traités de l'Union
européenne ou de l'OCDE.
Cette position était attendue : en avril dernier, à l'occasion de la
ratification de l'ensemble des traités visés par les projets de lois, il est
bon de rappeler que la droite sénatoriale, par la voix de M. de La Malène,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, avait émis de nombreuses
réserves : tout en approuvant, dans son principe, l'objectif de transparence,
il estimait que ces textes risquaient de pénaliser la France face à ses
concurrents - c'est ce qu'il a de nouveau répété aujourd'hui - notamment si les
conditions de réciprocité n'étaient pas réunies.
En particulier, il déplorait - et il déplore encore - la sévérité du texte
français eu égard à la législation des autres nations.
Ces arguments, nous les avons retrouvés amplifiés au sein de la commission des
lois, notamment au travers des amendements qu'elle a déposés en ce sens et que
j'ai explicités plus haut.
Les membres du groupe communiste républicain et citoyen sont tout à fait
hostiles à ces modifications. Outre le caractère choquant de cette distinction
cette position véhicule des idées particulièrement détestables.
Elle accrédite l'idée selon laquelle, pour obtenir des contrats dans certains
pays, singulièrement dans les pays en voie de développement, il faut payer des
pots-de-vin. Elle participe ainsi à la perpétuation d'une vision inégalitaire
du monde entre les pays occidentaux, par principe vertueux, et les autres,
corrompus.
Elle maintient dans des rapports de dépendance les pays en voie de
développement, en maintenant et en légitimant une économie liée aux
dessous-de-table ; enfin, elle fait prospérer le mercantilisme comme règle des
rapports internationaux.
Cette vision du monde, non seulement nous ne la partageons pas, mais nous la
combattons vivement. J'ai été particulièrement atterré de constater, lors de
nos débats en commission, que l'on pouvait encore soutenir sans rougir que la
France serait perdante si elle sanctionnait trop sévèrement ces pratiques de
corruption, car elle serait alors défavorisée par rapport à ses concurrents. En
effet, comment peut-on être trop sévère à l'égard de pratiques moralement
répréhensibles ?
Vous me direz que, à l'heure de la mondialisation, je suis d'une particulière
naïveté. Peut-être ! Je pense néanmoins que d'autres types de rapports avec les
pays en voie de développement peuvent être mis en place : nous sommes en effet
loin d'avoir épuisé les ressources de la coopération. La France n'a-t-elle pas,
en ce domaine, un rôle original à jouer ?
L'attente est forte du côté des pays émergents, particulièrement à l'heure de
la conférence sur le commerce international, où l'on doute fort qu'ils seront
entendus.
Pour notre part, nous avons fait des propositions qui tendent à rompre avec
l'exploitation ou le paternalisme. Par exemple, il serait possible d'apurer la
dette ou de consacrer 1 % du PIB au développement. L'institution d'un « vrai »
prix des matières premières devrait aussi contribuer à réduire les versements
occultes complémentaires.
Je considère, de surcroît, qu'il est tout à l'honneur de la France que de
prôner des sanctions plus sévères que ne le font d'autres pays. Terre des
droits de l'homme, pourquoi la France ne jouerait-elle pas le rôle d'un
aiguillon pour une moralisation de la vie économique internationale ? Je serais
d'ailleurs le premier à voter pour l'extension de l'application de ces mesures
au secteur privé.
Vous aurez donc compris, mes chers collègues, que les sénateurs du groupe
communiste républicain et citoyen approuveront le projet gouvernemental sans
restriction et refuseront les modifications proposées par la commission des
lois allant dans le sens d'une atténuation des sanctions contre la corruption
internationale.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
7
DÉPÔT DU RAPPORT
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
M. le président.
M. le président a reçu de M. René Garrec un rapport fait au nom de la
commission d'enquête sur la conduite de la politique de sécurité menée par
l'Etat en Corse, créée en vertu d'une résolution adoptée par le Sénat le 19 mai
1999.
Un avis de dépôt de ce rapport a été transmis aujourd'hui au
Journal
officiel
en vue d'une publication à l'édition des lois et décrets du jeudi
11 novembre 1999. Cette publication constituera, conformément au paragraphe III
du chapitre V de l'instruction générale du bureau, le point de départ du délai
de six jours nets pendant lequel la demande de constitution du Sénat en comité
secret peut être formulée.
8
LUTTE CONTRE LA CORRUPTION
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de loi modifiant le code pénal et le
code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Je voudrais, tout d'abord, remercier Mme Derycke et M.
Bret d'avoir soutenu la position du Gouvernement et d'avoir indiqué leur
désaccord avec les amendements déposés par la commission des lois.
Je voudrais, ensuite, formuler quelques remarques à la suite des interventions
de MM. de La Malène et Hyest.
Je souhaite notamment indiquer que l'instauration d'un comité de suivi est
bien prévue par la convention de l'OCDE. Il s'agit, en effet, d'un point
important.
Ce comité devra notamment veiller à ce que les caractéristiques des
législations des pays signataires de cette convention soient effectivement
compatibles avec le principe d'égalité de traitement des différents pays.
Ce comité de suivi devra, à notre sens, également être chargé de mettre en
place de nouveaux dispositifs de lutte contre la corruption. Le risque de
failles dues à l'existence de centres
off-shore
a été évoqué. Ce point
est très important, et fait l'objet de toute l'attention du Gouvernement. Des
propositions concernant la mise en place d'une réglementation minimale
s'imposant aux centres
off-shore
ont été formulées dans les instances
européennes, reprenant notamment des projets qu'avait présentés M. Dominique
Strauss-Kahn. Ces propositions ont reçu un accueil favorable des ministres de
l'économie et des finances du G7 et du comité intérimaire du Fonds monétaire
international, ainsi que lors du Conseil européen de Tampere. A cette occasion,
l'Union européenne a affirmé sa volonté de voir mise en oeuvre une
réglementation minimale applicable aux centres
off-shore.
Bien entendu, la non-observation de cette réglementation serait assortie de
sanctions telles que l'interdiction pure et simple des relations entre ces
centres
off-shore
et les institutions financières des pays de l'OCDE ou
des pays signataires des accords.
C'est la première fois que nous constatons une avancée aussi nette sur ces
sujets, et j'ai également demandé, dans l'optique des travaux du conseil
européen justice - affaires intérieures, que soient posées la question du
secret bancaire et celle des instruments juridiques favorisant la délinquance
économique et financière et la criminalité organisée, notamment les sociétés
écran ou les fiducies, lesquelles, heureusement, n'existent pas dans notre
droit.
Je suis par ailleurs heureuse de pouvoir rappeler ici au Sénat que ces points
très concrets et précis ont été abordés, sur l'initiative de la France, dans
les conclusions du Conseil européen de Tampere.
Il est vrai que les conventions actuelles ne permettent pas de tout régler.
Cependant, nos conceptions progressent dans les différentes enceintes et nous
avons, de plus, mis en place un comité de suivi au sein de l'OCDE qui doit
permettre, précisément, de faire en sorte que l'ensemble des pays membres de
cette instance adoptent des dispositions de cette nature.
Telles sont les remarques que je voulais faire. Dans la suite du débat, je
présenterai mes observations sur les amendements présentés par la
commission.
M. Christian de La Malène.
Ce qui est important, ce qui nous intéresse, madame le garde des sceaux, ce
n'est pas tant les textes et leur suivi que la pratique !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Bien sûr, monsieur le sénateur. C'est pourquoi j'ai
parlé des deux !
M. le président.
Ces choses ont été précisées, monsieur de La Malène.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ Il est créé dans le titre III du livre quatrième du code pénal
un chapitre V intitulé : "Des atteintes à l'administration publique des
Communautés européennes, des Etats membres de l'Union européenne, des autres
Etats étrangers et des organisations internationales publiques" comprenant
trois sections ainsi rédigées :
« Section 1
« De la corruption passive
«
Art. 435-1
. _ Pour l'application de la convention relative à la lutte
contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes
ou des fonctionnaires des Etats membres de l'Union européenne faite à Bruxelles
le 26 mai 1997, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 francs
d'amende le fait par un fonctionnaire communautaire ou un fonctionnaire
national d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou par un membre de la
Commission des Communautés européennes, du Parlement européen, de la Cour de
justice et de la Cour des comptes des Communautés européennes de solliciter ou
d'agréer, sans droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses,
des dons, des présents ou des avantages quelconques pour accomplir ou
s'abstenir d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat
ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat.
« Les dispositions de l'alinéa précédent entreront en vigueur le jour de
l'entrée en vigueur de la convention précitée.
« Section 2
« De la corruption active
« 1° De la corruption active des fonctionnaires des Communautés européennes,
des fonctionnaires des Etats membres de l'Union européenne, des membres des
institutions des Communautés européennes.
«
Art. 435-2
. _ Pour l'application de la convention relative à la lutte
contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes
ou des fonctionnaires des Etats membres de l'Union européenne faite à Bruxelles
le 26 mai 1997, est puni de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 francs
d'amende le fait de proposer sans droit, directement ou indirectement, des
offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour
obtenir d'un fonctionnaire communautaire ou d'un fonctionnaire national d'un
autre Etat membre de l'Union européenne ou d'un membre de la Commission des
Communautés européennes, du Parlement européen, de la Cour de justice et de la
Cour des comptes des Communautés européennes qu'il accomplisse ou s'abstienne
d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité
par sa fonction, sa mission ou son mandat.
« Est puni des mêmes peines le fait de céder à une personne visée à l'alinéa
précédent qui sollicite, sans droit, directement ou indirectement, des offres,
des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour
accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte visé audit alinéa.
« Les dispositions des alinéas précédents entreront en vigueur le jour de
l'entrée en vigueur de la convention précitée.
« 2° De la corruption active des personnes relevant d'Etats étrangers autres
que les Etats membres de l'Union européenne et d'organisations internationales
publiques autres que les institutions des Communautés européennes.
«
Art. 435-3
. _ Pour l'application de la convention sur la lutte contre
la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales signée à Paris le 17 décembre 1997, est puni de dix ans
d'emprisonnement et de 1 000 000 francs d'amende le fait de proposer sans
droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des
présents ou des avantages quelconques pour obtenir d'une personne dépositaire
de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public, ou investie
d'un mandat électif public dans un Etat étranger ou au sein d'une organisation
internationale publique, qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte
de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa
mission ou son mandat, en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un autre
avantage indu dans le commerce international.
« Est puni des mêmes peines le fait de céder à une personne visée à l'alinéa
précédent qui sollicite, sans droit, directement ou indirectement, des offres,
des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour
accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte visé audit alinéa.
« Les dispositions des alinéas précédents entreront en vigueur le jour de
l'entrée en vigueur de la convention précitée.
« La poursuite des délits visés au présent article ne peut être exercée qu'à
la requête du ministère public.
«
Art. 435-4
. _ Pour l'application de la convention sur la lutte contre
la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales signée à Paris le 17 décembre 1997, est puni de dix ans
d'emprisonnement et de 1 000 000 francs d'amende le fait de céder aux
sollicitations d'un magistrat, d'un juré ou de toute autre personne siégeant
dans une formation juridictionnelle, d'un arbitre ou d'un expert nommé soit par
une juridiction, soit par les parties ou d'une personne chargée par l'autorité
judiciaire d'une mission de conciliation ou de médiation, dans un Etat étranger
ou au sein d'une organisation internationale publique, ou de proposer des
offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques afin
d'obtenir d'une de ces personnes l'accomplissement ou l'abstention d'un acte de
sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa
mission ou son mandat, en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un autre
avantage indu dans le commerce international.
« Les dispositions de l'alinéa précédent entreront en vigueur le jour de
l'entrée en vigueur de la convention précitée.
« La poursuite des délits visés au présent article ne peut être exercée qu'à
la requête du ministère public.
« Section 3
« Peines complémentaires
et responsabilité des personnes morales
«
Art. 435-5
. _ Les personnes physiques coupables de l'une des
infractions prévues au présent chapitre encourent également les peines
complémentaires suivantes :
« 1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les
modalités prévues par l'article 131-26 ;
« 2° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer une
fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans
l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise
;
« 3° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions
prévues par l'article 131-35 ;
« 4° La confiscation, suivant les modalités prévues par l'article 131-21, de
la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose
qui en est le produit, à l'exception des objets susceptibles de restitution.
« L'interdiction du territoire français peut en outre être prononcée dans les
conditions prévues par l'article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une
durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger qui s'est rendu
coupable de l'une des infractions visées au premier alinéa.
«
Art. 435-6
. _ Les personnes morales peuvent être déclarées
responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des
infractions définies aux articles 435-2, 435-3 et 435-4.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Pour une durée de cinq ans au plus :
« _ l'interdiction d'exercer directement ou indirectement l'activité
professionnelle ou sociale dans laquelle ou à l'occasion de l'exercice de
laquelle l'infraction a été commise ;
« _ le placement sous surveillance judiciaire ;
« _ la fermeture des établissements ou de l'un des établissements de
l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
« _ l'exclusion des marchés publics ;
« _ l'interdiction de faire appel public à l'épargne ;
« _ l'interdiction d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le
retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou
d'utiliser des cartes de paiement.
« 3° La confiscation, suivant les modalités prévues par l'article 131-21, de
la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose
qui en est le produit, à l'exception des objets susceptibles de restitution
;
« 4° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions
prévues par l'article 131-35. »
ARTICLE 435-1 DU CODE PÉNAL
Par amendement n° 1, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer le second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article
435-1 du code pénal.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législature, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Il s'agit
d'un amendement rédactionnel.
En effet, le projet de loi prévoit, à juste titre, que les nouvelles
incriminations introduites dans le code pénal entreront en vigueur le jour de
l'entrée en vigueur de la convention qu'il tend à transposer.
Toutefois, le projet de loi a inscrit ces dispositions transitoires dans le
code pénal lui-même, ce qui ne me paraît pas être de bonne technique
législative.
C'est pour cette raison que l'amendement n° 1 a pour objet de supprimer cette
clause du nouvel article 435-1 du code pénal, pour la réintroduire à l'article
2 du projet de loi, qui n'a pas vocation à être codifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Je ne partage pas l'avis de M. le rapporteur. Pour des
raisons de clarté et de pédagogie, je souhaiterais que les dispositions visées
soient maintenues dans le code pénal.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article 435-1 du code
pénal.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 435-2 DU CODE PÉNAL
M. le président.
Par amendement n° 2, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer le dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article
435-2 du code pénal.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement est presque identique au précédent, mais vise
l'article 435-2 du code pénal.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article 435-2 du code
pénal.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 435-3 DU CODE PÉNAL
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans le
premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 435-3 du code
pénal, de remplacer les mots : « dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000
francs » par les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 1 000 000 francs
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, si les
conventions de l'Union européenne font obligation aux Etats de traiter de
manière identique les fonctionnaires communautaires et les fonctionnaires
nationaux, il n'en va pas de même pour la convention de l'OCDE. Celle-ci
prévoit seulement, en effet - M. de La Malène l'a relevé voilà quelques
instants - que l'éventail des sanctions réprimant la corruption d'agents
publics étrangers doit être comparable à celui qui est prévu pour punir la
corruption d'agents nationaux.
La convention a, en outre, pour objet d'assurer l'équivalence fonctionnelle
entre les dispositions prévues par les Etats parties pour la transposition de
la convention. Or, la plupart des pays qui ont opéré cette transposition ont
prévu des peines qui n'excèdent pas cinq ans d'emprisonnement - cinq ans pour
les Etats-Unis, un an pour la Norvège, deux ans pour la Suède, trois ans pour
la Belgique et le Japon et cinq ans pour l'Allemagne. Il serait donc paradoxal
que la France prévoie des peines deux fois plus lourdes.
En outre, on m'a indiqué - je pense que Mme le garde des sceaux me le
confirmera - qu'il existait une corrélation entre le nombre d'années
d'emprisonnement et le montant des amendes. J'ai cependant découvert une
divergence à cet égard s'agissant du recel, celui-ci étant puni de cinq ans de
prison et de 2,5 millions de francs d'amende.
M. le président.
Quel l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
J'ai indiqué tout à l'heure que j'étais défavorable à
cet amendement, et je vais maintenant expliquer les raisons de cette
opposition.
Si cet amendement était adopté, les responsables d'une entreprise française
qui corromprait un fonctionnaire français ou un fonctionnaire d'un autre Etat
membre de l'Union européenne encourraient une peine de dix ans
d'emprisonnement, alors qu'ils n'encourraient qu'une peine de cinq ans
d'emprisonnement si la même entreprise corrompait un agent public d'un Etat non
membre de l'Union européenne. Rien ne peut justifier cette disparité dans les
sanctions encourues.
En effet, les faits de corruption active sont objectivement aussi graves, que
la personne corrompue soit un fonctionnaire français, un fonctionnaire d'un
Etat de l'Union européenne ou un fonctionnaire d'un autre Etat. Il ne saurait
donc y avoir de sanction à géométrie variable pour la répression de la
corruption active en fonction de l'Etat auquel appartient l'agent public.
De plus, l'article 3 de la convention de l'OCDE dispose, en son alinéa 1, que
la corruption d'un agent public étranger doit être passible de sanctions
pénales efficaces, proportionnées et dissuasives. Ce même alinéa précise, en
outre, que « l'éventail des sanctions applicables doit être comparable à celui
des sanctions applicables à la corruption des agents publics de la partie en
question ». Une harmonisation est vraiment nécessaire, c'est la convention
elle-même qui l'exige.
J'ajoute, pour conclure, que la juridiction de jugement est libre de prononcer
le
quantum
de peine adapté aux faits poursuivis. La peine de dix ans
d'emprisonnement n'est, bien entendu, qu'un maximum légal.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 4, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer le troisième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour
l'article 435-3 du code pénal.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement est, lui aussi, rédactionnel ; il s'agit de
supprimer la disposition transitoire que le Gouvernement propose d'inscrire
dans les articles du code pénal. Elle sera rétablie à l'article 2 du projet de
loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 435-3 du code
pénal.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 435-4 DU CODE PÉNAL
M. le président.
Par amendement n° 5, M. Balarello, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le texte présenté par l'article 1er pour l'article 435-4 du code
pénal :
«
Art. 435-4.
- Pour l'application de la convention sur la lutte contre
la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales signée à Paris le 17 décembre 1997, est puni de cinq ans
d'emprisonnement et de 1 000 000 francs d'amende le fait de proposer sans droit
directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents
ou des avantages quelconques pour obtenir d'un magistrat, d'un juré ou de toute
autre personne siégeant dans une fonction juridictionnelle, d'un arbitre ou
d'un expert nommé soit par une juridiction, soit par les parties, ou d'une
personne chargée par l'autorité judiciaire d'une mission de conciliation ou de
médiation, dans un Etat étranger ou au sein d'une organisation internationale
publique, qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction,
de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa mission ou son
mandat, en vue d'obtenir ou conserver un marché ou un autre avantage indu dans
le commerce international.
« Est puni des mêmes peines le fait de céder à une personne visée à l'alinéa
précédent qui sollicite, sans droit, directement ou indirectement, des offres,
des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour
accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte visé audit alinéa.
« La poursuite des délits visés au présent article ne peut être exercée qu'à
la requête du ministère public. »
Cet amendement est assorti de trois sous-amendements.
Les deux premiers sont identiques.
Le sous-amendement n° 14 est présenté par le Gouvernement.
Le sous-amendement n° 16 est déposé par M. Bret et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent, dans le premier alinéa du texte présenté par l'amendement
n° 5 pour l'article 435-4 du code pénal, à remplacer les mots : « cinq ans
d'emprisonnement » par les mots : « dix ans d'emprisonnement ».
Le sous-amendement n° 15, présenté par le Gouvernement, vise, après le
deuxième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 5 pour l'article 435-4 du
code pénal, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des alinéas précédents entreront en vigueur le jour de
l'entrée en vigueur de la convention précitée. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement tend, d'une part, à clarifier la rédaction de
l'article 435-4 du code pénal afin d'en harmoniser la teneur avec les autres
nouvelles incriminations et, d'autre part, à ramener les peines à cinq ans
d'emprisonnement et à 1 000 000 francs d'amende, conformément à la décision
prise à l'article 435-3 du code pénal.
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux, pour défendre les sous-amendements
n°s 14 et 15.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Le sous-amendement n° 14 tend à maintenir le seuil de
la peine d'emprisonnement de dix ans prévu dans le projet de loi : rien ne peut
justifier une disparité des sanctions encourues selon qu'il s'agit de
corruption d'un fonctionnaire français ou de corruption d'un fonctionnaire
étranger.
Quant à l'amendement n° 15, il se justifie par son texte même.
M. le président.
La parole est à M. Bret, pour défendre le sous-amendement n° 16.
M. Robert Bret.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen approuvent la
rédaction proposée par la commission des lois pour l'article 1er, car elle leur
semble plus claire, mais avec une réserve - et elle est de taille : nous sommes
hostiles, pour les raisons que j'ai déjà exposées dans la discussion générale,
à la réduction des peines applicables aux infractions à la convention sur la
lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions
commerciales internationales, signée à Paris le 17 décembre 1997. Elle
aboutirait, en effet, à traiter différemment les phénomènes de corruption selon
qu'ils s'opèrent dans le cadre national et européen, auquel cas les corrupteurs
seraient exposés à une peine de dix ans d'emprisonnement, ou dans le cadre
international, pour lesquels les peines encourues seraient réduites de moitié.
C'est donc par principe que nous refusons cette distinction.
Dans la mesure où notre sous-amendement est identique à celui du Gouvernement,
nous le retirons. Mais si le sous-amendement du Gouvernement n'était pas
adopté, nous n'approuverions pas la modification qui nous est proposée par la
commission. Mieux vaut une mauvaise rédaction de forme qu'un mauvais fond, sans
vouloir faire de mauvais jeu de mots.
(Sourires.)
M. le président.
Le sous-amendement n° 16 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 5.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 14 et 15 ?
M. José Balarello,
rapporteur.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 14, repoussé par la commission.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 15, repoussé par la commission.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, le texte proposé pour l'article 435-4 du code pénal est ainsi
rédigé.
ARTICLE 435-5 DU CODE PÉNAL
M. le président.
Sur le texte proposé pour l'article 435-5 du code pénal, je ne suis saisi
d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je le mets aux voix.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 435-6 DU CODE PÉNAL
M. le président.
Par amendement n° 6, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
remplacer les quatrième à dixième alinéas du texte présenté par l'article 1er
pour l'article 435-6 du code pénal par un alinéa ainsi rédigé :
« 2° Pour une durée de cinq ans au plus, le placement sous surveillance
judiciaire ; »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Le code pénal dispose que seule l'amende est une peine
obligatoirement prévue pour les personnes morales ; les autres peines qui
peuvent être prononcées doivent être prévues par la loi.
Les peines prévues par le projet de loi à l'encontre des personnes morales
nous paraissent excessives. Dans certains pays comme l'Allemagne, il est très
difficile de faire jouer la responsabilité des personnes morales. Il est donc
justifié de supprimer des peines qui paraissent excessives à la commission, en
particulier la fermeture des établissements ou l'exclusion des marchés
publics.
La commission propose de maintenir l'amende, avec un maximum 5 millions de
francs, le placement sous surveillance judiciaire, la confiscation de la chose
qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction, et de supprimer les
autres pénalités.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement aux
termes duquel une personne morale déclarée coupable de corruption active d'un
agent public étranger ne serait passible que des seules peines d'amende, de
confiscation, de placement sous surveillance judiciaire ou d'affichage.
En d'autres termes, les peines telles que l'exclusion des marchés publics, la
fermeture de l'établissement ayant servi à commettre l'infraction,
l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle
l'infraction a été commise ne pourraient pas être prononcées.
Je fais pour les personnes morales le même raisonnement que pour les personnes
physiques. Il doit y avoir adéquation des peines prononcées en France aussi
bien contre des personnes morales françaises que contre des personnes morales
étrangères.
En conséquence, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article 435-6 du code
pénal.
(Ce texte est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ Les articles 435-1 à 435-4 du code pénal ne s'appliquent pas aux
faits commis à l'occasion de contrats signés antérieurement à l'entrée en
vigueur de la convention visée par ces articles. »
Par amendement n° 7, M. Balarello, au nom de la commission, propose d'insérer,
avant le texte de cet article, un alinéa ainsi rédigé :
« Les articles 435-1 à 435-4 du code pénal ainsi que l'article 689-8 du code
de procédure pénale entreront en vigueur à la date d'entrée en vigueur sur le
territoire de la République des conventions ou protocoles visés par ces
articles. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination visant à rétablir
dans un article non codifié du projet de loi les dispositions qui viennent
d'être supprimées.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 8, M. Balarello, au nom de la commission, propose d'insérer,
dans l'article 2, après les mots : « l'entrée en vigueur » les mots : « sur le
territoire de la République ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
L'objet de cet amendement est d'éviter une ambiguïté. La
convention de l'OCDE est, au sens de son article 15, entrée en vigueur le 15
février 1999, le nombre de ratifications étant suffisant.
Toutefois, cette entrée en vigueur ne concerne pas la France. L'amendement
tend à préciser que la clause de non-rétroactivité s'applique aux contrats
signés antérieurement à l'entrée en vigueur de la convention sur le territoire
de la République.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Je suis favorable à cet amendement, qui clarifie et
précise la rédaction du texte.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. _ Il est créé après l'article 689-7 du code de procédure pénale un
article 689-8 ainsi rédigé :
«
Art. 689-8
. _ Pour l'application du protocole à la convention
relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes
fait à Dublin le 27 septembre 1996 et de la convention relative à la lutte
contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes
ou des fonctionnaires des Etats membres de l'Union européenne faite à Bruxelles
le 26 mai 1997, peut être poursuivi et jugé dans les conditions prévues à
l'article 689-1 :
« 1° Tout fonctionnaire communautaire au service d'une institution des
Communautés européennes ou d'un organisme créé conformément aux traités
instituant les Communautés européennes et ayant son siège en France, coupable
du délit prévu à l'article 435-1 du code pénal ou d'une infraction portant
atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes au sens de la
convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés
européennes faite à Bruxelles le 26 juillet 1995 ;
« 2° Tout français ou toute personne appartenant à la fonction publique
française coupable d'un des délits prévus aux articles 435-1 et 435-2 du code
pénal ou d'une infraction portant atteinte aux intérêts financiers des
Communautés européennes au sens de la convention relative à la protection des
intérêts financiers des Communautés européennes faite à Bruxelles le 26 juillet
1995 ;
« 3° Toute personne coupable du délit prévu à l'article 435-2 du code pénal ou
d'une infraction portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés
européennes au sens de la convention relative à la protection des intérêts
financiers des Communautés européennes faite à Bruxelles le 26 juillet 1995,
lorsque ces infractions sont commises à l'encontre d'un ressortissant
français.
« Les dispositions de l'alinéa précédent entreront en vigueur le jour de
l'entrée en vigueur des conventions précitées. »
Par amendement n° 9, M. Balarello, au nom de la commission, propose de
supprimer le dernier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article
689-8 du code de procédure pénale.
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Défavorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, ainsi modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président.
Par amendement n° 10, M. Balarello, au nom de la commission, propose
d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 706-1 du code de procédure pénale est rétabli dans la
rédaction suivante :
«
Art. 706-1. -
Pour la poursuite, l'instruction et le jugement des
actes incriminés par les articles 435-3 et 435-4 du code pénal, le procureur de
la République de Paris, le juge d'instruction et le tribunal correctionnel de
Paris exercent une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application
des articles 43, 52, 382, du second alinéa de l'article 663 et de l'article
706-42.
« Lorsqu'ils sont compétents pour la poursuite et l'instruction des
infractions prévues aux articles 435-3 et 435-4 du code pénal, le procureur de
la République et le juge d'instruction de Paris exercent leurs attributions sur
toute l'étendue du territoire national. »
« II. - A la fin du premier alinéa de l'article 693 du même code, les mots :
"et 706-17" sont remplacés par les mots : ", 706-1 et 706-17". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement prévoit la compétence de la juridiction
parisienne pour la corruption active d'agents publics étrangers.
Il est nécessaire que des magistrats très spécialisés soient chargés de ces
affaires. En outre, il convient de veiller à la cohérence de l'action publique
sur l'ensemble du territoire.
Pour éviter tout risque de nullité, cette compétence du procureur de la
juridiction parisienne sera concurrente de celle de la juridiction
territorialement compétente.
En pratique, compte tenu des règles actuelles de compétence prévues par le
code de procédure pénale, c'est la juridiction parisienne qui sera de toute
façon saisie le plus souvent en cas d'infractions commises à l'étranger.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Je suis défavorable à cet amendement.
En effet, sa portée pratique serait très réduite dans la mesure où le tribunal
de Paris sera de toute façon le plus souvent compétent en raison du lieu où
sont commises les infractions, et ce parce que la majeure partie des sièges
sociaux sont à Paris.
M. Jean-Jacques Hyest.
Non !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
De plus, l'article 704 du code de procédure pénale
établit la compétence de trente-cinq juridictions spécialisées. Or, il est très
important, je crois, de maintenir ces compétences.
Par ailleurs, j'ai engagé, vous le savez, une politique de modernisation et de
professionnalisation de la justice économique et financière qui concerne
plusieurs cours d'appel.
J'ai rappelé tout à l'heure que j'avais déjà mis en place quatre pôles
économiques et financiers à Paris, Lyon, Bastia et Marseille et que, à terme,
il existera dix à douze pôles de ce type.
Par conséquent, je pense qu'il vaut mieux que les juridictions spécialisées,
épaulées par les pôles économiques et financiers, restent compétentes pour
connaître du délit de corruption active d'agents publics étrangers dans les
transactions commerciales internationales.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi, après l'article 3.
Article 4
M. le président.
« Art. 4. _ A l'article 704 du code de procédure pénale, le 1° du premier
alinéa est ainsi rédigé :
« 1° Délits prévus par les articles 222-38, 313-1, 313-2, 313-4, 313-6, 314-1,
314-2, 432-10 à 432-15, 433-1, 433-2, 434-9, 435-1 à 435-4 du code pénal. »
Par amendement n° 11 rectifié, M. Balarello, au nom de la commission, propose
de rédiger comme suit le second alinéa de cet article :
« 1° Délits prévus par les articles 222-38, 313-1, 313-2, 313-4, 313-6, 314-1,
314-2, 324-1, 324-2, 432-10 à 432-15, 433-1, 433-2, 434-9, 435-1 et 435-2 du
code pénal. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
La commission ayant décidé de prévoir la compétence de la
juridction parisienne pour la corruption d'agents publics étrangers, elle a
déposé cet amendement de coordination tendant à supprimer la compétence des
juridictions spécialisées en matière économique et financière dans chaque cour
d'appel pour cette infraction bien précise prévue par la convention de
l'OCDE.
Ces juridictions spécialisées restent compétentes pour les nouvelles
infractions de corruption active ou passive de fonctionnaires communautaires ou
de fonctionnaires d'un Etat membre de l'Union européenne.
Par ailleurs, madame le garde des sceaux, une erreur s'est glissée dans le
texte du projet de loi, puisque certaines infractions ont disparu de la liste
proposée ; la commission suggère d'y remédier au travers de l'amendement n° 11
rectifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement pour
les mêmes raisons que précédemment.
Cela dit, je remercie M. le rapporteur d'avoir détecté cette erreur
matérielle, que nous nous attacherons à corriger au cours de la navette.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. _ La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, dans les
territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
Par amendement n° 12, M. Balarello, au nom de la commission, propose, dans cet
article, de remplacer les mots : « dans les territoires d'outre-mer » par les
mots : « en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. José Balarello,
rapporteur.
Cet amendement est rédactionnel, mais il est néanmoins
important. La Polynésie, en effet, ne sera plus un territoire d'outre-mer après
l'approbation par le Congrès du projet de loi constitutionnelle adopté dans les
mêmes termes par les deux assemblées.
Il convient donc de remplacer l'expression « dans les territoires d'outre-mer
» par les mots : « en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna ».
M. Jean-Jacques Hyest.
Sage précaution !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Bret pour explication de vote.
M. Robert Bret.
Alors que tous les groupes ont affirmé ici leur volonté de lutter contre la
corruption et d'oeuvrer en faveur de la moralisation de la vie économique, dans
la logique même du sommet de Tampere qui s'est tenu voilà quelques jours et qui
a fixé des objectifs de lutte contre le blanchiment des capitaux et la
corruption, je déplore que la droite sénatoriale ait souhaité limiter les
sanctions pour corruption d'agent public étranger dans le cadre des
transactions commerciales internationales.
Pour montrer leur opposition de principe, les sénateurs du groupe communiste
républicain et citoyen s'abstiendront. Nous comptons sur la sagesse de nos
collègues députés pour rétablir le texte initial.
M. Jean-Jacques Hyest.
On ne peut pas toujours compter sur leur sagesse !
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
J'ai dit dans la discussion générale tout le bien que je pensais du projet de
loi de Mme le garde des sceaux et tout le mal que je pensais des amendements
proposés par M. le rapporteur, au nom de la commission des lois.
Je n'ai pas voulu allonger la discussion des différents amendements, mais il
va de soi que nous sommes tous d'accord ici pour lutter contre la corruption.
Malheureusement, il semble que nos approches soient différentes quant aux
moyens de le faire, notamment lorsqu'il s'agit de la corruption internationale
et qu'elle se produit à l'étranger.
Favorable au projet de loi de Mme le garde des sceaux, le groupe socialiste se
voit contraint, compte tenu de l'adoption des amendements de la commission, qui
en diminuent quelque peu la portée, de s'abstenir, en espérant que la navette
permettra de nous mettre d'accord sur un texte.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Mme Dinah Derycke.
Le groupe socialiste s'abstient.
M. Robert Bret.
Le groupe communiste républicain et citoyen également.
(Le projet de loi est adopté.)
9
DÉPÔT D'UNE QUESTION ORALE AVEC DÉBAT
M. le président.
J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante
:
M. Hubert Haenel rappelle à M. le ministre de l'équipement, des transports et
du logement l'intérêt de la démarche novatrice, communément appelée
expérimentation de la régionalisation du transport ferroviaire de voyageurs,
qui a été expérimentée dans sept régions. Cette réforme, qui a pour but un
meilleur service public et une approche plus fine de l'aménagement du
territoire, a déjà eu plusieurs effets bénéfiques importants. Elle a permis de
démontrer que la décentralisation pouvait être expérimentée et négociée pour
s'adapter aux réalités géographiques, historiques, économiques des territoires.
Elle a contribué à mettre fin à la politique du tout TGV. M. le ministre de
l'équipement, des transports et du logement a indiqué, le 14 octobre, sa
volonté de déposer, dans les plus brefs délais, un projet de loi pour la
généralisation rapide de la régionalisation. Depuis lors, de nombreux échanges
ont eu lieu qui donnent prise à un climat d'incertitude. L'annonce prématurée
et incomplète d'un changement éventuel de cap avec une accélération du
calendrier législatif a entraîné des interprétations souvent erronées et
contradictoires des intentions de l'Etat, des conseils régionaux et de la SNCF,
qui ont eu pour effet de brouiller la perception que peuvent avoir les uns et
les autres des objectifs poursuivis, des délais impartis et des voies et moyens
pour y parvenir.
M. Hubert Haenel, à l'origine de cette réforme, demande à M. le ministre de
l'équipement, des transports et du logement de bien vouloir rappeler, comme il
l'a fait à plusieurs reprises, son profond attachement à la réforme et à la
démarche retenue pour la mettre en oeuvre, afin d'éviter à tout prix que les
atermoiements actuels ne conduisent à une démobilisation de l'ensemble des
partenaires. Il lui demande de recadrer rapidement l'ensemble du dispositif
conduisant à sortir de l'expérimentation pour entrer au plus vite dans la
généralisation, tout en tenant compte du temps nécessaire pour mener à bien la
phase législative et du délai qu'impliqueront la confrontation, le
rapprochement et l'ajustement des points de vue et interrogations des uns et
des autres par rapport à la transparence, à la lisibilité et à la certification
des comptes TER, opposables aux régions, cette situation pouvant nécessiter
d'utiliser temporairement des comptes provisoires ; il insiste, enfin, sur la
garantie que l'Etat et la SNCF devront donner aux régions pour ne pas
unilatéralement rompre ou remettre en cause les engagements financiers pris à
l'égard de celles-ci et la nécessité de dresser un bilan périodique de la
réforme pour permettre les ajustements appropriés (n° 19).
Conformément aux articles 79 et 80 du règlement, cette question orale avec
débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la
discussion aura lieu ultérieurement.
10
DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation
de la convention du 15 juillet 1982 portant création de l'Organisation
européenne de télécommunications par satellite (EUTELSAT) telle qu'elle résulte
des amendements adoptés à Cardiff le 20 mai 1999.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 66, distribué et renvoyé à la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous
réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les
conditions prévues par le règlement.
11
TEXTE SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement du Conseil (CE n°
1488/96 du 23 juillet 1996) sur les mesures financières et techniques
accompagnant la réforme des structures économiques et sociales dans le cadre du
partenariat Euro-méditerranéen (MEDA).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1331 et distribué.
12
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Christian Bonnet un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur :
- la proposition de loi de M. Michel Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe
socialiste et apparentés tendant à interdire les candidatures multiples aux
élections cantonales (n° 493, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Michel Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe
socialiste et apparentés relative à l'élection des députés et à l'élection des
conseillers généraux (n° 494, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de M. Bernard Joly visant à généraliser l'interdiction
des candidatures multiples aux élections (n° 465, 1997-1998) ;
- la proposition de loi de MM. Philippe Marini, Louis Althapé, Jean Bernard,
Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Calmejane, Jean-Pierre Camoin, Auguste
Cazalet, Charles Ceccaldi-Raynaud, Gérard César, Désiré Debavelaere, Daniel
Eckenspieller, Bernard Fournier, Alain Gérard, François Gerbaud, Daniel Goulet,
Adrien Gouteyron, Georges Gruillot, Bernard Hugo, Roger Husson, Edmond Lauret,
Guy Lemaire, Maurice Lombard, Paul Masson, Jacques de Menou, Mme Nelly Olin,
MM. Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Victor Reux, Roger Rigaudière, Jean-Pierre
Schosteck, Martial Taugourdeau et Alain Vasselle portant diverses dispositions
relatives aux élections municipales, cantonales et législatives (n° 482,
1997-1998) ;
- et la proposition de loi de MM. Georges Gruillot, Jean Bizet, Robert
Calmejane, Jean-Pierre Camoin, Auguste Cazalet, Gérard César, Désiré
Debavelaere, Jacques Delong, Christian Demuynck, Charles Descours, Michel
Doublet, Bernard Fournier, Philippe de Gaulle, Alain Gérard, François Gerbaud,
Charles Ginésy, Daniel Goulet, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Roger Husson,
André Jourdain, Jean-François Le Grand, Pierre Martin, Paul Masson, Jacques de
Menou, Mme Nelly Olin, MM. Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Roger Rigaudière,
Jean-Pierre Schosteck et Martial Taugourdeau relative aux conditions
d'éligibilité des candidats aux élections cantonales et aux déclarations de
candidatures au deuxième tour des élections cantonales et législatives (n° 548,
1997-1998).
Le rapport sera imprimé sous le n° 62 et distribué.
J'ai reçu de M. Christian Bonnet un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de loi de M. Jacques Pelletier,
permettant au juge des tutelles d'autoriser un majeur sous tutelle à être
inscrit sur une liste électorale (n° 185, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 63 et distribué.
J'ai reçu de M. Gérard César un rapport fait au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan sur la proposition de résolution (n° 35,
1999-2000), présentée au nom de la délégation pour l'Union européenne, en
application de l'article 73
bis
du règlement par M. Hubert Haenel sur la
proposition de règlement du Conseil relatif à certaines procédures de mise en
oeuvre de l'accord de commerce, de développement et de coopération entre la
Communauté et la République d'Afrique du Sud (n° E-1303).
Le rapport sera imprimé sous le n° 64 et distribué.
J'ai reçu de M. Michel Souplet un rapport fait au nom de la commission des
affaires économiques et du Plan sur les propositions de résolution présentées
en application de l'article 73
bis
du règlement par :
MM. Jean Bizet et Marcel Deneux, au nom de la délégation pour l'Union
européenne, sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement
européen relative à l'approche de l'Union européenne en vue du cycle du
millénaire de l'Organisation mondiale du commerce (n° E-1285) (n° 47,
1999-2000).
MM. Marcel Deneux, Jean Bizet, Pierre André, Mme Janine Bardou, MM. Bernard
Barraux, Michel Bécot, Georges Berchet, Gérard César, Marcel-Pierre Cléach,
Désiré Debavelaere, Michel Doublet, Jean-Paul Emorine, André Ferrand, Hilaire
Flandre, Philippe François, Jean François-Poncet, François Gerbaud, Francis
Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Rémi Herment,
Jean Huchon, Bernard Joly, Patrick Lassourd, Jean-François Le Grand, Guy
Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Louis Moinard, Bernard Murat,
Jean-Pierre Raffarin, Raymond Soucaret et Michel Souplet sur la communication
de la Commission européenne au Conseil et au Parlement européen relative à
l'approche de l'Union européenne en vue du cycle du millénaire de
l'Organisation mondiale du commerce (n° E-1285) (n° 46, 1999-2000).
Mme Hélène Luc, MM. Gérard Le Cam, Jack Ralite et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen sur la communication de la Commission
européenne au Conseil et au Parlement européen relative à l'approche de l'Union
européenne en vue du cycle du millénaire de l'Organisation mondiale du commerce
(n° E-1285) (n° 55, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 65 et distribué.
J'ai reçu de M. Christian Bonnet un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de loi organique de M. Jacques
Pelletier relative à l'inégibilité des majeurs sous tutelle (n° 186,
1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 67 et distribué.
13
DÉPÔT D'UN AVIS
M. le président.
J'ai reçu de M. Jacques Oudin un avis présenté au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, adopté par
l'Assemblée nationale (n° 40, 1999-2000).
L'avis sera imprimé sous le n° 68 et distribué.
14
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mardi 16 novembre 1999 :
A dix heures trente :
1. Discussion du projet de loi (n° 307, 1998-1999) autorisant la ratification
de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la
République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention concernant la
compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et
commerciale, ainsi qu'au protocole concernant son interprétation par la Cour de
justice, avec les adaptations y apportées par la convention relative à
l'adhésion du Royaume de Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, par la convention relative à l'adhésion
de la République hellénique et par la convention relative à l'adhésion du
Royaume d'Espagne et de la République portugaise.
Rapport (n° 398, 1998-1999) de M. André Boyer, fait au nom de la commission
des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
2. Discussion du projet de loi (n° 308, 1998-1999) autorisant la ratification
de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la
République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention sur la loi
applicable aux obligations contractuelles, ouverte à la signature à Rome le 19
juin 1980, ainsi qu'aux premier et deuxième protocoles concernant son
interprétation par la Cour de justice.
Rapport (n° 398, 1998-1999) de M. André Boyer, fait au nom de la commission
des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
La conférences des présidents a décidé qu'il serait procédé à une discussion
générale commune de ces deux projets de loi.
3. Discussion du projet de loi (n° 384, 1998-1999) autorisant la ratification
de la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union
européenne, concernant la compétence, la reconnaissance et l'exécution des
décisions en matière matrimoniale.
Rapport (n° 12, 1999-2000) de M. André Boyer, fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
4. Discussion du projet de loi (n° 385, 1998-1999) autorisant la ratification
du protocole, établi sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union
européenne, relatif à l'interprétation, par la Cour de justice des Communautés
européennes, de la convention concernant la compétence, la reconnaissance et
l'exécution des décisions en matière matrimoniale.
Rapport (n° 12, 1999-2000) de M. André Boyer, fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient
l'objet d'une discussion générale commune.
5. Discussion du projet de loi (n° 371, 1998-1999) autorisant l'approbation de
l'accord entre le Gouvernement de la République française et la Ligue des Etats
arabes relatif à l'établissement, à Paris, d'un bureau de la Ligue des Etats
arabes et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (ensemble
une annexe).
Rapport (n° 472, 1998-1999) de M. André Dulait, fait au nom de la commission
des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
6. Discussion du projet de loi (n° 482, 1998-1999) autorisant l'approbation
d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
de la République du Kazakhstan sur l'encouragement et la protection réciproques
des investissements (ensemble un protocole).
Rapport (n° 13, 1999-2000) de M. André Dulait, fait au nom de la commission
des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
7. Discussion du projet de loi (n° 339, 1998-1999) autorisant l'adhésion de la
République française à la convention internationale contre la prise
d'otages.
Rapport (n° 473, 1998-1999) de M. André Rouvière, fait au nom de la commission
des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
8. Discussion du projet de loi (n° 456, 1998-1999) autorisant l'approbation
d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
de la République de Slovénie sur l'encouragement et la protection réciproques
des investissements (ensemble un protocole).
Rapport (n° 6, 1999-2000) de M. Serge Vinçon, fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
9. Discussion du projet de loi (n° 479, 1998-1999) autorisant l'approbation de
l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement
des Etats-Unis du Mexique sur l'encouragement et la protection réciproques des
investissements.
Rapport (n° 14, 1999-2000) de M. Hubert Durand-Chastel, fait au nom de la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
10. Discussion du projet de loi (n° 501, 1998-1999) autorisant l'approbation
du protocole visant à amender le paragraphe 2 de l'article X de la convention
internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique.
Rapport (n° 45, 1999-2000) de Mme Danielle Bidard-Reydet, fait au nom de la
commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
11. Discussion du projet de loi (n° 481, 1998-1999) autorisant l'approbation
de la convention entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République du Kazakhstan en vue d'éviter les doubles
impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts
sur le revenu et la fortune.
Rapport (n° 59, 1999-2000) de M. Jacques Chaumont, fait au nom de la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation.
12. Discussion du projet de loi (n° 486, 1998-1999) autorisant l'approbation
de l'avenant à la convention du 10 mars 1964 entre la France et la Belgique
tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance
administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur les revenus.
Rapport (n° 60, 1999-2000) de M. Jacques Chaumont, fait au nom de la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation.
A seize heures et le soir :
13. Eloge funèbre de M. Jean-Paul Bataille.
14. Discussion du projet de loi (n° 40, 1999-2000) de financement de la
sécurité sociale pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Rapport (n° 58, 1999-2000) de MM. Charles Descours, Jacques Machet et Alain
Vasselle, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis (n° 68, 1999-2000) de M. Jacques Oudin, fait au nom de la commission des
finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mardi 16 novembre 1999, à onze heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : ouverture de la discussion
générale.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES
M. Hubert Durand-Chastel a été nommé rapporteur du projet de loi n° 33
(1999-2000) autorisant l'approbation de la convention d'entraide judiciaire en
matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République orientale de l'Uruguay (signée à Paris le 5
novembre 1996).
M. Hubert Durand-Chastel a été nommé rapporteur du projet de loi n° 34
(1999-2000) autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre le
Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
orientale de l'Uruguay (signée à Paris le 5 novembre 1996).
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Bernard Seillier a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 19
(1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la création d'un
Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC).
M. Jean-Louis Lorrain a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 36
(1999-2000) de Mme Gisèle Printz et M. Roger Hesling relative au régime local
d'assurance maladie complémentaire obligatoire des départements du Bas-Rhin, du
Haut-Rhin et de la Moselle applicable aux assurés des professions agricoles et
forestières.
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Nicolas About a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 496
(1998-1999) visant à demander une étude préalable par les préfectures pour les
projets de permis de construire déposés par certaines associations, dont la
commission des lois est saisie au fond.
NOMINATION D'UN RAPPORTEUR POUR AVIS
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Paul Girod a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 56
(1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, modifiant le code général des
collectivités territoriales et relatif à la prise en compte du recensement
général de population de 1999 pour la répartition des dotations de l'Etat aux
collectivités locales dont la commission des finances, du contrôle budgétaire
et des comptes économiques de la nation est saisie au fond.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Assujettissement à la TVA des subventions d'investissement
647.
- 10 novembre 1999. -
M. Jean-Patrick Courtois
appelle l'attention de
M. le ministre de l'intérieur
sur la question de l'assujettissement à la TVA des subventions
d'investissement. Dans le cas précis où une commune perçoit une subvention
d'investissement du conseil régional, du conseil général ou des fonds
européens, pour la construction d'une usine-relais, et que celle-ci choisit
d'entrer dans le régime normal d'assujettissement à la taxe sur la valeur
ajoutée (TVA), les services fiscaux semblent considérer que cette subvention
est un montant toutes taxes comprises (TTC) et que par conséquent, la commune
est redevable de la TVA sur la subvention octroyée par les collectivités
publiques citées précédemment. Ce raisonnement conduit à rendre imputable à la
TVA toutes les recettes d'investissement, ce qui paraît pour le moins
paradoxal. Lorsque les communes optent pour ce mode de fonctionnement, il
semblerait logique que seules les recettes de fonctionnement soient assujetties
à la TVA. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer l'action que le
Gouvernement entend mener dans ce domaine pour permettre aux communes de
bénéficier de subventions d'investissement d'autres collectivités locales non
imposables à la TVA.
Nuisances sonores causées par l'entraînement des élèves
de l'Ecole de l'air de Salon-de-Provence
648.
- 10 novembre 1999. -
M. Claude Domeizel
rappelle à
M. le ministre de la défense
les nombreuses actions menées pour alerter son ministère sur les nuisances
sonores occasionnées par les avions Tucano de l'Ecole de l'air de Salon. Les
élus et les habitants des quatre départements concernés se mobilisent
régulièrement sans qu'aucune réponse satisfaisante leur soit apportée. Ces
avions, qui décollent plusieurs fois par semaine de Salon pour différents
exercices (survols à basse altitude, voltiges), engendrent des nuisances
sonores dépassant notablement les seuils admis par le code de la santé
publique. Les tentatives d'amélioration telles que l'étalement des exercices
dans l'espace et dans le temps n'ont pas donné satisfaction. Les nuisances
persistent et continuent à dégrader les conditions de vie des habitants et à
mettre en danger la vocation touristique de ces régions. Aussi, il lui demande
quels moyens pourraient être mis en oeuvre dès à présent pour que cesse
définitivement une situation qui perdure et affecte gravement toute une
région.
Coût des interventions des collectivités locales
sur le domaine de l'Etat
649.
- 10 novembre 1999. -
M. Jean-Claude Carle
appelle l'attention de
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur les conditions de prise en charge par les collectivités territoriales de
travaux se déroulant sur le domaine de l'Etat. En raison du désengagement de
l'Etat, et, souvent devant l'urgence des situations, les communes et
départements sont amenés à se substituer à l'Etat et à prendre à leur charge
des travaux routiers dont la responsabilité lui incombe. Les collectivités
assurent la maîtrise d'ouvrage, mais la maîtrise d'oeuvre reste de la
compétence des directions départementales de l'équipement, ces dernières
facturant au prix fort leurs prestations. Ces opérations, selon une réponse
récente fournie par la préfecture de Haute-Savoie sur un cas précis, à savoir
la réalisation de giratoires sur la RN 201, sont réputées non éligibles au
fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, la préfecture arguant
que ces travaux ont été réalisés sur des biens n'entrant pas dans le patrimoine
des collectivités. En effet, l'article 54 de la loi de finances pour 1977 n°
76-1232 du 29 décembre 1976, modifié par la loi n° 88-1149 du 29 décembre 1988,
exclut du bénéfice du FCTVA les dépenses d'investissement qui ne sont pas
effectuées sur des biens destinés à être incorporés dans le patrimoine des
collectivités locales. L'article 1er du décret n° 89-645 du 6 septembre 1989
confirme ce principe général. Cette situation paraît douteuse et, finalement
scandaleuse à un double titre : d'une part, est-il normal que les collectivités
territoriales aient à se substituer à l'Etat pour la réalisation de travaux sur
son domaine ? D'autre part, comment accepter ce qu'il faut bien appeler un
véritable « racket », à savoir la non-éligibilité au FCTVA de ces travaux,
travaux dont il titre profit sans vergogne d'une part en encaissant la TVA y
afférente, d'autre part en facturant des honoraires au titre de la maîtrise
d'oeuvre ? Ces travaux sont normalement à la charge de l'Etat. Il lui rappelle
que les nombreux élus locaux, de tous bords, attendent une réponse précise. Il
lui demande s'il va mettre fin à cette situation totalement anormale notamment,
en rendant éligible au FCTVA les dépenses sur les infrastructures routières
d'Etat réalisées par les collectivités territoriales ?
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 10 novembre 1999
SCRUTIN (n° 14)
sur l'article 2 de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale,
portant sur diverses professions relevant du ministère de la justice, la
procédure civile et le droit comptable (droits proportionnels perçus par les
huissiers de justice en cas d'exécution forcée).
Nombre de votants : | 215 |
Nombre de suffrages exprimés : | 213 |
Pour : | 209 |
Contre : | 4 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Pour :
16.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :
Pour :
23.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (98) :
Contre :
1. - M. Patrick Lassourd.
N'ont pas pris part au vote :
97, dont M. Christian Poncelet, président
du Sénat.
GROUPE SOCIALISTE (78) :
Pour :
75.
Contre :
1. - M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Abstention :
1. - M. Robert Badinter.
N'a pas pris part au vote :
1. - M. Guy Allouche, qui présidait la
séance.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (52) :
Pour :
51.
Contre :
1. - M. Pierre Fauchon.
GROUPE DES REPUBLICAINS ET INDEPENDANTS (46) :
Pour :
44.
Contre :
1. - M. José Balarello.
Abstention :
1. - M. Nicolas About.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :
N'ont pas pris part au vote :
7.
Ont voté pour
François Abadie
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Denis Badré
René Ballayer
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Daniel Bernardet
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Yolande Boyer
Jean-Guy Branger
Robert Bret
Guy-Pierre Cabanel
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Yvon Collin
Gérard Collomb
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Jean Delaneau
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Claude Domeizel
Jacques Dominati
Michel Duffour
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Jean Faure
André Ferrand
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Serge Franchis
Jean François-Poncet
Yves Fréville
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Paul Girod
Serge Godard
Francis Grignon
Louis Grillot
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Roland Huguet
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Alain Lambert
Jacques Larché
Dominique Larifla
Henri Le Breton
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Marcel Lesbros
Claude Lise
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Kléber Malécot
André Maman
François Marc
René Marquès
Marc Massion
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Jean-Luc Mélenchon
Louis Mercier
Michel Mercier
Gérard Miquel
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Michel Moreigne
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Philippe Nogrix
Georges Othily
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Xavier Pintat
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rinchet
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Henri Torre
Pierre-Yvon Tremel
François Trucy
André Vallet
Albert Vecten
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Xavier de Villepin
Henri Weber
Ont voté contre
MM. José Balarello, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon et Patrick
Lassourd.
Abstentions
MM. Nicolas About et Robert Badinter.
N'ont pas pris part au vote
Philippe Adnot
Louis Althapé
Pierre André
Jean Bernard
Roger Besse
Jean Bizet
Paul Blanc
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Christian Demuynck
Charles Descours
Jacques Donnay
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Michel Esneu
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Bernard Fournier
Alfred Foy
Philippe François
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Jean-Paul Hugot
Roger Husson
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Lucien Lanier
Gérard Larcher
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Simon Loueckhote
Philippe Marini
Pierre Martin
Paul Masson
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Bernard Murat
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Charles Pasqua
Jacques Peyrat
Alain Peyrefitte
Victor Reux
Henri de Richemont
Yves Rispat
Jean-Jacques Robert
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
René Trégouët
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
Alain Vasselle
Serge Vinçon
Guy Vissac
N'ont pas pris part au vote
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Guy Allouche, qui présidait la
séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes
à la liste de scrutin ci-dessus.