Séance du 9 novembre 1999
M. le président. La parole est à M. Cazalet, auteur de la question n° 620, adressée à Mme le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.
M. Auguste Cazalet. En matière de santé publique, il y a un temps pour tout : pour l'analyse d'un problème, pour le lancement des études d'observation épidémiologique et des essais d'interventions cliniques nécessaires, pour le recueil et l'analyse des données, pour la décision politique, pour l'action collective et, enfin, pour le bilan.
Il en est ainsi du dépistage du cancer colorectal. Celui-ci est en effet, en France, l'un des cancers les plus fréquents. Il domine en tout cas la pathologie tumorale digestive et est, par ailleurs, en constante progression.
Selon les données statistiques les plus récentes, il devient fréquent chez l'adulte de plus de quarante-cinq ans et son incidence augmente avec l'âge. On admet que celle-ci double à chaque décennie. L'évolutivité est d'autant plus grande et le pronostic plus sombre que le diagnostic est plus tardif, et le cancer du côlon est à lui seul responsable de 26 000 nouveaux cas et de 16 000 décès par an.
Un Français sur quinze sera atteint par ce cancer, et un sur quarante en mourra.
On sait que le dépistage individuel et familial des sujets à haut risque est efficace et utile. On sait aussi que, sous certaines conditions, le dépistage de masse en deux temps, commençant par le test « Hémoccult », permet de réduire la mortalité.
Aucun argument scientifique ou éthique ne peut, aujourd'hui, justifier la persistance des incohérences et atermoiements passés. Aucun principe administratif dépassé ne doit plus faire obstacle à la prise en charge de ces tests.
La France, j'en suis convaincu, est capable de rejoindre, sur cette question, les pays avancés en matière de gestion de leur système de santé. Elle est capable d'actions concertées, durables et indépendantes des aléas du court terme et des conflits d'intérêts.
Les conditions du succès de la mise en place de ce dépistage sont bien définies : il faut une décision politique ferme, fédératrice, s'inscrivant dans la durée et bien distincte de la gestion quotidienne de l'assurance maladie, une information claire et une mobilisation active de la population, ainsi que des professionnels de santé, quel que soit leur mode d'exercice, une prise en compte des conditions techniques de la qualité et de l'efficacité du dépistage et, enfin, un suivi des résultats.
Des expériences pilotes régionales ont été couronnées de succès. Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous m'indiquer quels moyens le Gouvernement envisage de mettre en place ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Bartolone, ministre délégué à la ville. Monsieur le sénateur, nous estimons comme vous que le cancer colorectal constitue un véritable enjeu de santé publique. D'après les travaux de registres du cancer, on estime que 33 000 nouveaux cas surviennent chaque année en France et, malgré les progrès thérapeutiques importants réalisés ces dernières années, ce cancer est responsable de près de 15 000 décès par an.
Le dépistage devrait permettre, grâce à un diagnostic précoce, de réduire la mortalité de ces cancers.
Les dispositions adoptées dans la loi de financement de la sécurité sociale de 1999 permettent de définir une politique ambitieuse de dépistage des maladies aux conséquences mortelles évitables, notamment des cancers.
J'aimerais insister sur la responsabilité des pouvoirs publics s'agissant de la qualité des services offerts à la population concernée par ces programmes. Une conférence de consensus a ainsi été organisée sur le thème du dépistage du cancer colorectal, en 1998, par l'Agence nationale d'évaluation et d'accréditation en santé.
Cette conférence n'a pas permis de trancher définitivement quant à l'intérêt de généraliser en France un dépistage du cancer colorectal en proposant à l'ensemble de la population concernée un dépistage par la recherche de sang dans les selles.
En effet, pour être efficace, ce dépistage doit être réalisé dans l'optique d'un programme où la qualité technique des examens est associée à une organisation rigoureuse. La participation de la population concernée doit être élevée et maintenue pendant toute la durée du programme, tout comme l'implication des médecins traitants.
Par ailleurs, si le dépistage peut apporter des bénéfices à certaines personnes, beaucoup d'autres pourraient souffrir de ses effets néfastes. Quand l'examen est positif, il faut en effet pratiquer une coloscopie, examen qui n'est pas dénué de risques, même s'il est réalisé par des opérateurs performants.
Ces résultats peuvent être également source d'une anxiété importante pour les personnes considérées à tort comme positives. C'est pourquoi il est indispensable, avant d'envisager toute généralisation du dépistage et la prise en charge du coût des tests, de mettre en place un dispositif permettant l'implication des professionnels et la mobilisation de la population.
Actuellement, trois départements mènent un programme expérimental de dépistage du cancer colorectal, en portant une attention particulière aux conditions permettant d'assurer la participation de la population et des professionnels. Un groupe technique est, depuis le début de l'année, directement rattaché à la direction générale de la santé. Il a pour objectif d'élaborer un cahier des charges respectant ces critères de qualité.
Au vu des résultats de ses travaux, le Gouvernement prendra les dispositions nécessaires pour étendre ces programmes.
M. Auguste Cazalet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet. Je prends acte, monsieur le ministre, de votre réponse. Je souhaite néanmoins que la mise en oeuvre d'un dépistage systématique du cancer colorectal ne reste pas limitée à trois départements, mais que cette mesure soit étendue à l'ensemble du territoire.
RATIFICATION PAR LA FRANCE
DE LA CONVENTION UNIDROIT