Séance du 9 novembre 1999
M. le président. La parole est à M. Martin, auteur de la question n° 633, adressée à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Pierre Martin. Madame le ministre, je souhaite appeler votre attention, une nouvelle fois, sur les conséquences induites par la modification du zonage de la prime d'aménagement du territoire pour la région Picardie et, en particulier, pour le département de la Somme.
Les critères retenus par le Gouvernement pour l'attribution de la PAT manquent de cohérence du point de vue tant géographique qu'économique.
En réponse à une question écrite que je vous avais posée le 22 avril 1999, vous m'avez apporté, madame le ministre, la précision suivante : « Le découpage du zonage, en France comme ailleurs, ne pourra plus épouser les contours des zones industrielles, mais il devra incorporer la population des bassins d'emploi dans la totalité. » C'est ici que les difficultés commencent pour notre département, en particulier pour de nombreux cantons menacés, de fait, d'isolement économique.
Un exemple parmi d'autres, celui du canton d'Hallencourt, dont je suis l'élu, est particulièrement éclairant. Ce canton répond à l'ensemble des critères retenus pour l'éligibilité dans le zonage de la PAT. Il bénéficiait donc, jusqu'alors, de la PAT comme du FEDER ; il s'en trouverait exclu dans le nouveau projet, vu son appartenance au bassin d'emploi d'Amiens.
Et, pourtant, le canton d'Hallencourt possède une limite territoriale avec le canton d'Abbeville-Sud. Il dépend de l'arrondissement d'Abbeville - et non pas d'Amiens - pour toutes les formalités administratives des particuliers, mais également des entreprises. Ses activités traditionnelles et industrielles relèvent toutes du Vimeu ; il est porteur d'une histoire locale et de noms de village faisant référence à ce secteur du Vimeu. Il appartient aux structures locales de développement de ce même secteur. Son rattachement au bassin d'emploi du Vimeu, dans l'arrondissement d'Abbeville, paraîtrait naturel. Tel n'est pas le cas.
Cette situation, résultant en partie d'une définition obsolète donnée par l'INSEE de la zone d'emploi d'Amiens, constitue une anomalie géographique et historique, une enclave dans le bassin d'emploi du Vimeu.
Vous sachant, madame le ministre, soucieuse d'équité, je vous pose la question : vous serait-il loisible de porter votre attention tout spécialement sur la situation paradoxale du canton d'Hallencourt en reconsidérant son appartenance - illogique - au bassin d'emploi d'Amiens et en adoptant une approche moins théorique dans les facteurs d'éligibilité retenus pour son classement dans le zonage PAT ?
Etes-vous prête, en outre, à accorder au département de la Somme un complément de population éligible, étant donné que les réductions sont de l'ordre de 21 % dans ce département contre 1 % dans l'Aisne ?
Enfin, concernant le zonage objectif 2, êtes-vous prête à remédier à la situation d'injustice que vivent le département de la Somme, avec 40 % de réduction de population éligible, et la région Picardie, avec 25 % de réduction ? Il ne faudrait pas que le zonage objectif 2 reconduise les mêmes insuffisances que le récent zonage PAT !
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, il ne me revient heureusement pas d'accorder telle ou telle « rallonge » en termes de population. La réduction drastique à laquelle nous avons été confrontés au titre d'une politique non d'aménagement du territoire mais de la concurrence, est effectivement douloureuse à vivre. C'est sur la base de cette argumentation et des critères qui nous étaient imposés par le règlement communautaire que nous avons été amenés à formuler des propositions en toute objectivité.
Je vous signale que la discussion avec la Commission est vive et que M. Monti nous a d'ores et déjà fait savoir qu'il n'entendait pas valider la carte qui lui avait été transmise par les autorités françaises.
La négociation est en cours. S'il semble possible de faire valoir notre point de vue en ce qui concerne la prise en compte de situations de chômage particulièrement graves dans la périphérie des grandes villes, dans des zones touchant à des agglomérations, dans les espaces confrontés à des restructurations minières ou énergétiques, la Commission européenne s'est montrée, elle, fort peu flexible : elle requiert, pour ces espaces, une stricte coïncidence avec la proposition de zonage objectif 2.
C'est une contrainte très lourde qui ne peut être satisfaite dans tous les cas et qui se traduira sans doute par quelques redéploiements au sein de la proposition de zonage PAT. En effet, nous ne pouvons pas « manger » des populations d'une façon considérable dans des zones où les activités ne sont pas aussi nombreuses qu'on pourrait le souhaiter et où nous ne profiterions pas au mieux des possibilités de zonage.
Le choix des critères retenus résulte largement d'un travail engagé au sein du Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire et des recommandations formulées par ce dernier.
Vous le savez, plusieurs scénarios étaient possibles. Nous avons préféré le scénario dit d'aménagement du territoire, parce qu'il tenait le mieux compte de la richesse, du chômage, de la dépopulation des territoires en mutation industrielle. Nous n'avons pas voulu conforter l'idée finalement assez cynique selon laquelle il aurait fallu ne retenir que les seules zones qui pouvaient au mieux se servir de cette opportunité.
Au regard de ces critères, la zone d'emploi d'Amiens, qui comprend le canton d'Hallencourt, a été retenue non pas en totalité, au titre de la proposition de zonage PAT, mais à hauteur de 98 000 habitants, suivant un découpage, élaboré sur le plan local qui privilégie les zones industrielles touchées par un fort taux de chômage dans la périphérie de l'agglomération d'Amiens, en respectant un principe de continuité géographique. Le canton d'Hallencourt, qui est distant du zonage proposé pour Amiens, ne peut donc, à ce stade des négociations avec la Commission, être réintégré dans la proposition française.
S'agissant du zonage objectif 2, la Picardie avec une baisse de 24,7 % - après affectation de 15 000 personnes supplémentaires au titre de la réserve, afin d'assurer le zonage partiel de Soissons en objectif 2, compte tenu des difficultés récentes - se trouve dans une situation relativement moins pénalisante que l'ensemble des autres régions, qui connaissent une baisse moyenne de 26,3 %.
Le taux de couverture du futur objectif 2 pour la Picardie, avec 778 041 personnes, est de l'ordre de 43 %, à comparer avec un taux de couverture national de l'ordre de 31 %.
La proposition de zonage objectif 2, élaborée sur le plan local, conforte le zonage PAT pour ce qui concerne la frange de la zone d'emploi d'Amiens ; elle comprend par ailleurs la commune d'Hallencourt, sur laquelle vous m'avez interrogée.
M. Pierre Martin. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Martin.
M. Pierre Martin. Je vous remercie de toutes ces précisions, madame le ministre. Une avancée a été faite pour le canton d'Hallencourt ; elle est, certes, insuffisante, mais je crois que, dans ce combat pour l'emploi que nous menons tous dans nos différents secteurs d'activité, la souplesse permet certainement d'avancer plus rapidement que la rigidité !
M. le président. Cela nous appelle tous à la modestie. Ce qui avait été négocié dans le passé n'était pas si catastrophique que cela !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le président, si la Commission européenne a imposé la réduction d'un quart de la population couverte, je rappelle que cette règle a été assumée, lors du sommet de Berlin, par les deux têtes de l'exécutif.
Il s'agit de stabiliser le budget communautaire. Il s'agit également d'assurer les meilleurs retours financiers possibles pour la France, et c'est au titre de la politique agricole commune que ces retours sont les plus satisfaisants historiquement. Il s'agit, enfin, de concentrer des moyens importants sur des zones qui sont réellement en retard de développement, que ce soit au titre de l'objectif 1, qui concerne notamment les départements d'outre-mer, ou au titre des dispositifs de sortie.
Nous n'avons pas à rougir du travail qui a été engagé. Je tenais à replacer ce débat dans un contexte peut-être plus complexe que celui que vous imaginez, monsieur le président.
M. le président. Je serais content d'avoir les résultats obtenus en Picardie pour Marseille qui a subi des amputations par rapport au passé.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Nous sommes tous passionnés par ces problèmes, monsieur le président.
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