Séance du 4 mars 1999
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Ma question, qui s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, concerne la politique nucléaire de la France.
Depuis quelques mois, les industriels et les travailleurs français du nucléaire, sans parler de l'opinion publique, ont été soumis à une rude épreuve.
Je rappellerai quelques éléments. D'abord, M. le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale, a annoncé une décision très partisane : la fermeture de Superphénix. Puis l'incertitude s'est installée sur la poursuite ou non du programme électronucléaire français, tel qu'il a été mis en place depuis trente ans sous tous les gouvernements, quelle que soit leur sensibilité, pour assurer l'indépendance énergétique de notre pays. Enfin, la décision du gouvernement allemand de ne plus faire traiter les déchets à La Hague a encore accru cette inquiétude, décision sur laquelle il semble être revenu ces jours derniers puisque le projet de loi qu'il a présenté au Parlement allemand n'en fait plus mention.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais vous poser trois questions.
Premièrement, pouvez-vous nous dire clairement quelle est la position du Gouvernement en ce qui concerne la poursuite du programme électronucléaire français et, partant, l'indépendance énergétique nationale ?
Deuxièmement, le gouvernement français a-t-il aujourd'hui des assurances du gouvernement allemand s'agissant de la poursuite du traitement des déchets nucléaires à l'usine de La Hague, conformément aux accords signés, assurant ainsi l'équilibre de la COGEMA, la Compagnie générale des matières nucléaires, et la pérennité des emplois de cette entreprise ?
Troisièmement, permettez enfin, au sénateur de l'Isère que je suis de vous interroger plus particulièrement sur les moyens consacrés par l'Etat à la reconversion du site de Creys-Malville. Je citerai quelques titres de la presse locale : « Le surgénérateur de la colère », « Désillusion énorme », « Moyens largement insuffisants ». Je rappelle, tant c'est dérisoire, qu'il s'agit de 100 millions de francs en huit ans, soit 15 millions de francs par an, et ce pour démanteler un équipement ayant coûté 25 milliards de francs. Il paraît que le Gouvernement, probablement grâce à vous, monsieur le ministre, ce dont je dois vous donner acte - je n'en dirai pas autant de tous les membres du Gouvernement ! (Exclamations sur les travées socialistes.) - commence à se rendre compte de ce fait. Est-il disposé à augmenter les moyens et à faire avancer le dossier ? A cet égard, je citerai notamment le remboursement des prêts grand chantier souscrits par les communes, un relais emploi Superphénix efficace, la signature d'une convention entre l'Etat et le département, la délocalisation d'entreprises publiques, comme cela avait été promis.
Avec un ministre de l'aménagement du territoire qui est aussi ministre de l'environnement, je ne suis pas sûr que tout cela soit très facile ! (Protestations sur les travées socialistes.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, les élus, les habitants du nord de l'Isère ainsi que les employés de Superphénix, de la COGEMA et l'ensemble des travailleurs du nucléaire vous écoutent. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le sénateur, la politique énergétique de la France se poursuit dans les grands équilibres qui sont les siens : diversification, avec appel aux énergies fossiles, aux énergies renouvelables, mais aussi - il faut le redire - avec une confiance donnée à l'industrie électronucléaire, qui reste le pôle essentiel de la production d'électricité primaire. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Votre deuxième question porte sur la politique énergétique de l'Allemagne. Comme vous le savez, le gouvernement français n'interfère pas dans les décisions de ses partenaires membres de l'Union européenne quant à la détermination de leur politique énergétique.
M. Xavier de Villepin. C'est dommage !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je suis toutefois très satisfait de constater que le gouvernement allemand a renoncé à interdire par la loi le retraitement. Les contrats entre la COGEMA et les électriciens allemands vont donc pouvoir se poursuivre. Ils ne sont pas remis en cause.
Par ailleurs, la France applique strictement sa propre loi, celle du 30 décembre 1991, sur le retour des déchets issus du retraitement dans leur pays d'origine. Elle vient d'ailleurs de procéder à un transport de ce type vers le Japon. Elle fera de même avec l'Allemagne. Je suis donc très heureux de vous confirmer la poursuite de cette politique, monsieur le sénateur.
Quant à la reconversion du site de Creys-Malville, le Gouvernement a décidé avec sérieux d'exercer, par une action interministérielle, la solidarité nationale à l'égard de cette région. Une délégation d'élus nationaux et locaux, parmi lesquels figurait le maire de Morestel, commune de votre département, a été reçue à mon cabinet, le 24 février dernier. L'information et la concertation sur le programme économique et social sont notre règle et accompagnent l'évolution de ce secteur. Des actions sont lancées en faveur des entreprises prestataires de la centrale pour assurer leur diversification. Un fonds de développement économique et social doté de 15 millions de francs par an - 10 millions de francs provenant de l'Etat et 5 millions de francs provenant d'EDF - a été mis en place. D'ores et déjà, dix-huit projets, concernant la création de 220 emplois, ont pu être enregistrés. Par ailleurs, un reclassement de 220 agents d'EDF au sein de l'entreprise EDF elle-même est en cours.
Les collectivités locales bénéficieront de l'annulation de leurs créances au titre des procédures « grands chantiers » de la Caisse des dépôts et consignations. Les conventions entre celle-ci, EDF et les collectivités locales sont lancées.
Enfin, les opérations de démantèlement du site de Creys-Malville demanderont plusieurs années et mobiliseront donc plusieurs centaines d'emplois sur le site. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
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