Séance du 12 novembre 1998
PARTICIPATION DES EMPLOYEURS
À L'EFFORT DE CONSTRUCTION
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 43, 1998-1999)
relatif à l'emploi des fonds de la participation des employeurs à l'effort de
construction. [Rapport n° 49 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, le texte de loi dont le projet est soumis aujourd'hui à votre
examen constitue une étape importante dans la mise en place d'une politique
d'accession à la propriété sociale pérenne et sécurisée.
Ce projet de loi est également porteur d'un nouvel élan, d'une nouvelle
ambition en faveur de ce que l'on appelle le 1 % logement, pour la
participation des employeurs à l'effort de construction, puisqu'il jette en
effet les bases d'une nouvelle politique d'emploi des fonds et d'une
modernisation du mouvement 1 % logement dans son ensemble.
Avant d'en venir au contenu du texte proprement dit, permettez-moi de vous
rappeler très brièvement le contexte dans lequel il s'inscrit et la démarche
qui a été adoptée pour traiter ce double dossier de l'accession à la propriété,
d'une part, et du devenir du 1 % logement, d'autre part.
Le contexte, il y a un an environ, c'était une accession sociale à la
propriété fondée sur un dispositif, le prêt à taux zéro, efficace, mais dont le
financement n'était établi que jusqu'à la fin de 1998, puisqu'il reposait sur
une contribution du 1 % logement de l'ordre de 7 milliards de francs par an
venant alimenter un compte d'affectation spéciale.
Les partenaires sociaux considéraient - ce n'était pas illégitime - que ce
prélèvement massif, représentant à peu près l'équivalent de la collecte,
n'avait pas vocation à la pérennité.
Par ailleurs, pour en terminer avec le contexte, la sécurisation des accédants
à la propriété, bien qu'annoncée depuis quelque temps, était restée à l'état de
projet.
Quant à la démarche adoptée, elle a été, je crois, marquée par la volonté du
dialogue, mais aussi de la réflexion, compte tenu de l'importance des
enjeux.
C'est d'abord le Conseil économique et social, saisi par le Premier ministre,
qui rendait, en début d'année 1998, un avis réaffirmant la légitimité du 1 %
logement et son utilité économique dans une société en mutation.
Le Conseil économique et social insistait également, dans cet avis, sur la
nécessité d'adapter les objectifs du 1 % logement pour prendre en compte les
besoins nouveaux des salariés et des populations en difficulté ou en situation
d'exclusion, ainsi que sur l'intérêt d'une contractualisation réelle entre les
partenaires sociaux et l'Etat.
C'est sur ces bases - toujours sur un mandat du Premier ministre - que nous
avons, M. Jean-Claude Gayssot et moi-même, engagé une discussion avec les
partenaires sociaux, discussion qui a abouti, le 3 août dernier, à la
conclusion d'une convention quinquennale adoptant le principe d'une rénovation
des emplois et des structures du 1 % logement.
Cette convention s'ordonne autour de trois idées fortes.
D'abord, elle marque un engagement clair dans la durée - cinq ans - qui
garantit les moyens des collecteurs du 1 % logement, puisque le taux de la
collecte - 0,45 % - sera maintenu sur cette période et que la contribution au
budget du logement s'éteindra progressivement d'ici à 2003.
Le deuxième axe fort, c'est la poursuite de la modernisation des structures
des organismes collecteurs, avec le renforcement du paritarisme et la
transformation des CIL, les comités interprofessionnels du logement, en unions
d'économie sociale, structures juridiques mieux adaptées à leurs
responsabilités.
Enfin, l'accord prévoit une diversification des emplois du 1 % logement en
fonction de l'évolution des besoins et, plus précisément, une extension de ces
emplois à la sécurisation des accédants à la propriété et des locataires. C'est
là l'innovation majeure, et c'est cette réforme des emplois que concrétise le
présent projet de loi.
Chacun perçoit bien les enjeux de cette sécurisation : la société
contemporaine est marquée par une mobilité plus forte, par une instabilité plus
grande, qu'il s'agisse des parcours professionnels et résidentiels, ou encore
de la composition des familles. Avec la mobilité professionnelle, le travail
temporaire ou précaire, le chômage, hélas ! les divorces, les remariages, les
choses bougent plus vite aujourd'hui, surtout chez les jeunes, et les
conditions de logement doivent bien sûr s'adapter.
Les ménages les plus modestes sont évidemment les plus sensibles à ces
changements et les plus prompts à glisser dans la précarité à cause de
difficultés qui, pourtant, ne sont souvent que temporaires, qu'ils soient
locataires ou accédants à la propriété.
C'est pourquoi notre société a besoin en matière de logement non seulement
d'une offre diversifiée, mais aussi de mécanismes de garantie et de sécurité
plus forts qu'autrefois.
Et c'est à ce titre que le 1 % logement est prêt aujourd'hui à s'engager sur
deux mécanismes, l'un pour l'accession sociale à la propriété, l'autre pour
l'accès au logement locatif.
En ce qui concerne l'accession à la propriété, il s'agit d'éviter, pour les
prêts à l'accession sociale, les sinistres que l'on avait pu connaître avec les
PAP, les prêts aidés pour l'accession à la propriété.
Il est prévu, en premier lieu, un dispositif applicable à tous les accédants
bénéficiaires d'un prêt d'accession sociale et, le cas échéant, d'un prêt à
taux zéro, qu'ils soient salariés du privé ou du public, ou non salariés, dans
la limite d'un même plafond de ressources. Ce dispositif, qui protégera les
accédants à la propriété en cas de chômage, consiste en un report gratuit, en
fin de prêt, de la moitié des mensualités de l'emprunt pendant douze mois.
Cette sécurisation, que nous qualifierons d'universelle puisqu'elle est
applicable à tous les accédants bénéficiaires d'un PAS, est complétée, pour les
salariés des entreprises cotisant au 1 % logement et dont le revenu est
inférieur aux plafonds du prêt à taux zéro, par un dispositif d'avances
gratuites, calculées selon la situation des salariés et qui interviendront en
cas de chômage mais aussi en cas de perte de ressources liée à une rupture
familiale.
Sont concernés par ces dispositifs plus de 100 000 ménages par an au titre de
la sécurisation dite universelle, et 60 000 environ pour la sécurisation qui
est plus spécifique aux salariés des entreprises cotisant au 1 %, c'est le
second dispositif que je viens d'évoquer.
En matière d'accès au logement locatif, la convention prévoit plusieurs
mesures en faveur non seulement des salariés des entreprises assujetties à la
participation à l'effort de construction, mais aussi des jeunes de moins de
trente ans en situation ou en recherche de premier emploi et des salariés en
situation de mobilité professionnelle.
Le 1 % logement apportera, d'abord, un financement du dépôt de garantie, sous
forme d'avance gratuite. Il apportera ensuite une garantie de paiement du loyer
et des charges locatives qui protégera le bailleur contre les risques
d'impayés. Par voie de conséquence, il facilitera l'accès au logement locatif
de nombreux ménages et, de ce fait, il évitera des procédures contre les
locataires qui rencontreraient des difficultés couvertes par ce nouveau
dispositif.
Cette garantie pourra représenter jusqu'à neuf mois de loyer et charges pour
une durée d'engagement de location de trois ans. Dans le cas du parc locatif
privé conventionné, que nous souhaitons par ailleurs développer, elle pourra
être portée à trois ans en contrepartie d'une réservation locative pour le 1 %
logement.
Le présent projet de loi concrétise donc cette réforme des emplois du 1 %
logement dans son article 1er.
Outre les mécanismes de garantie que je viens d'évoquer, il entérine les
interventions du 1 % logement relatives aux emplois très sociaux, ainsi que le
soutien qu'il apporte aux associations agréées d'information du public en
matière de logement.
L'article 2 en tire les conséquences sur les missions de l'Union d'économie
sociale du logement et l'article 3 sur son organisation financière, avec la
création d'un fonds spécifique destiné au soutien de l'accession à la propriété
eu égard au risque de chômage, dont les règles de fonctionnement sont également
définies.
C'est donc un texte court, mesdames, messieurs les sénateurs, mais important,
qui constituera une nouvelle avancée dans la politique pérenne et équilibrée de
droit au logement qu'il nous appartient de mener. C'est un texte qui est
attendu par tous ceux qui se sont mobilisés pour que le 1 % logement rénové
puisse pleinement contribuer à cette politique ; je pense, en particulier, aux
partenaires sociaux, dont l'unanimité sur ce sujet a été remarquable.
Pour conclure, j'ajouterai que les emplois traditionnels du 1 % logement en
faveur de l'investissement seront, bien sûr, consolidés, et même accrus pour ce
qui est du parc locatif social, avec une enveloppe annuelle de 4,5 milliards de
francs. L'activité du bâtiment, et donc l'emploi, trouveront leur compte dans
cette réforme.
J'indique également, mais nous y reviendrons lors de l'examen du budget du
logement, que le financement du prêt à taux zéro sera réintégré dans le budget
de l'Etat, dès 1999, pour 110 000 logements.
Enfin, je précise que d'autres dispositions de la convention du 3 août
appelleront d'autres mesures législatives, en particulier la transformation des
comités interprofessionnels du logement en unions d'économie sociale, et cela
lorsque le travail préparatoire de mise au point de ces textes aura abouti.
Nous aurons donc l'occasion de nous revoir en 1999.
Mais, d'ores et déjà, la loi dont le projet vous est soumis aujourd'hui
permettra de traduire dans les faits, dès 1999, au bénéfice de nos concitoyens,
les réelles avancées que permet l'accord sur le 1 % logement en matière de
sécurité des accédants à la propriété et des locataires.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Marcel-Pierre Cléach,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur
le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il y a
exactement deux ans, le Sénat était saisi du projet de loi relatif à l'union
d'économie sociale du logement pris en application de la convention d'objectif
signée le 17 septembre 1996 par l'Etat, les partenaires sociaux et l'Union
nationale interprofessionnelle du logement.
Rapporteur de ce projet de loi au nom de la commission, j'avais souligné
qu'aux termes de cette convention l'Etat obtenait, pour 1998 et 1999, le
versement d'une part importante des fonds prélevés au titre du 1 % logement, en
s'engageant toutefois à maintenir ces fonds dans le champ des aides à la
pierre, en l'occurrence le financement des prêts à taux zéro. En contrepartie,
la convention prévoyait la définition d'un nouveau cadre juridique pour
réorganiser les structures gérant les fonds issus du 1 % logement, d'où la
création de l'UESL.
Aujourd'hui, il convient de souligner la similitude de forme du dispositif
général qu'il vous est proposé d'examiner, puisqu'il s'agit également d'une
convention, assortie d'un projet de loi et d'un article de la loi de finances.
Néanmoins, le contenu des textes n'est pas identique, et il faut se féliciter
de l'engagement pris par l'Etat de renoncer progressivement au prélèvement
opéré sur les fonds du 1 % et de sa volonté de rebudgétiser le prêt à taux
zéro. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat.
En contrepartie, les organismes collecteurs et gestionnaires du 1 %
poursuivront leur modernisation et vont développer de nouvelles missions pour
mieux répondre aux nouvelles attentes des salariés en matière de logement.
C'est de ce dernier aspect que traite le présent projet de loi, et votre
rapporteur en approuve le contenu.
Sans vouloir ici exposer les mécanismes essentiels du 1 % logement, je vous
rappellerai seulement ses conséquences économiques positives pour le secteur du
bâtiment, ainsi que son rôle essentiel pour accompagner les besoins en logement
et assurer aux organismes constructeurs le bouclage financier de certaines
opérations immobilières. Pour 1997, les ressources à long terme du 1 % logement
étaient estimées à 15,6 milliards de francs.
Je vous rappellerai également que, à compter du 1er janvier 1999, les pouvoirs
publics seront confrontés à une situation difficile : le financement du prêt à
taux zéro n'était plus assuré mais, dans le même temps, poursuivre au-delà de
1997 et de 1998 les ponctions lourdes opérées sur les ressources du 1 %
logement aurait condamné à court terme ce dispositif.
Comme je l'indiquais un instant plus tôt, le Premier ministre a confirmé la
mission d'origine du 1% logement, à savoir loger les salariés, et a décidé de
poursuivre le financement du prêt à taux zéro, écartant le projet du ministère
de l'économie et des finances qui consistait à fiscaliser les ressources du 1 %
logement.
En mars 1998, l'avis du Conseil économique et social et ses propositions ont
inspiré très largement le contenu de la convention signée par l'Etat et l'UESL
qui fixe le cadre d'action du 1 % logement de l'an 2000.
Cette convention s'ordonne autour de quatre principes essentiels.
Le premier est la durée, qui permettra aux collecteurs du 1 % logement de
travailler pour la première fois depuis longtemps avec une visibilité sur cinq
ans.
Le deuxième est l'extinction progressive des prélèvements de l'Etat qui seront
supprimés à la fin de 2002, soit un an avant l'expiration de la convention.
Le troisième est la diversification des emplois des fonds du 1 % logement en
fonction de l'évolution de la demande et des besoins des salariés des
entreprises.
Enfin, le quatrième est la poursuite de la modernisation des structures des
organismes collecteurs, avec le renforcement du paritarisme et la
transformation des comités interprofessionnels du logement, les CIL, en union
d'économie sociale afin de leur donner une structure juridique mieux adaptée à
leurs responsabilités.
Cette convention trouve sa mise en oeuvre à travers un article de la loi de
finances, qui fixe à 6,4 milliards de francs le prélèvement pour 1999, et à
travers deux projets de loi : celui qui vise à moderniser les structures des
organismes collecteurs et qui sera vraisemblablement déposé d'ici au premier
trimestre 1999 et celui que nous examinons aujourd'hui et qui prévoit une
diversification des emplois du 1 % logement.
Ce texte comporte trois innovations importantes.
Il introduit la sécurisation des accédants à la propriété avec deux
dispositifs pour les ménages à revenus modestes. Les titulaires d'un prêt à
l'accession sociale, PAS, pourront, en cas de perte d'emploi, reporter en fin
de remboursement de leur emprunt une partie des mensualités du PAS, 50 % au
maximum. Par ailleurs, les emprunteurs salariés des entreprises cotisant au 1 %
logement et ayant des revenus inférieurs aux plafonds du prêt à taux zéro
pourront disposer, en cas de forte baisse de leurs ressources, d'une avance
remboursable gratuite.
En 1997, 65 820 PAS ont été mis en place et le montant moyen d'un prêt s'élève
à 313 000 francs. Plus des deux tiers des prêts financent une opération de
construction. Enfin, les bénéficiaires d'un PAS sont en majorité des ménages de
petite taille appartenant à des catégories socioprofessionnelles modestes.
Le projet de loi confirme également l'octroi d'aides aux travaux
d'emménagement pour faciliter la mobilité professionnelle des salariés, ainsi
que la mise en place, pour les locataires, d'un système de prise en charge sans
frais de la caution locative et, pour le bailleur, d'une garantie en cas
d'impayés de loyers et de charges.
En conséquence, l'article 1er du projet de loi élargit la définition des
emplois du 1 % logement tels qu'ils sont prévus par l'article L. 313-1 du code
de la construction et de l'habitation.
L'article 2 du projet de loi modifie l'article L. 313-19 du code de la
construction et de l'habitation qui énumère les compétences de l'Union
d'économie sociale du logement, l'UESL. Il prévoit que l'UESL financera le
mécanisme de soutien à l'accession sociale à la propriété à travers la
constitution d'un fonds de soutien et dans des conditions fixées
contractuellement par une convention signée avec l'Etat.
L'article 3 du projet de loi modifie l'article L. 313-20 du code de la
construction et de l'habitation pour adapter l'organisation financière et
comptable de l'UESL à ses nouvelles missions. Il crée un fonds spécifique
destiné au soutien de l'accession sociale à la propriété et prévoit trois
textes pour mettre en oeuvre ce dispositif.
Il s'agit d'abord de la convention signée entre l'UESL et l'Etat qui arrêtera
les modalités d'alimentation et de fonctionnement de ce fonds.
Ensuite, un décret qui sera pris après consultation de l'UESL fixera les
règles de fonctionnement administratif et financier du fonds, ainsi que les
règles de solvabilité et les ratios de couverture des risques.
Enfin, une convention d'application sera signée entre l'UESL et la société de
gestion du fonds de garantie de l'accession sociale, le FGAS.
Pour des raisons de transparence et de sécurité, il est prévu que les
opérations de fonds de soutien et d'intervention feront l'objet d'une
comptabilité séparée.
Pour l'ensemble de ces raisons, et sous réserve de quelques amendements de
forme qui améliorent, me semble-t-il, la lisibilité du dispositif, je vous
propose, mes chers collègues, d'adopter ce projet de loi.
M. le président.
Je donne la parole à M. Plancade, qui intervient pour la première fois à cette
tribune.
(Applaudissements.)
M. Jean-Pierre Plancade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui concrétise les engagements pris
par l'Etat le 29 juillet 1998 à l'égard de l'Union d'économie sociale du
logement, l'UESL. Ce projet de loi, s'il cicatrise une plaie ouverte par le
précédent gouvernement, confirme cependant une partie des engagements que ce
même gouvernement avait pris à l'égard de l'UESL.
La plaie ouverte, ce sont, au terme de la convention du 16 septembre 1996, les
14 milliards de francs prélevés sur les recettes du 1 % logement, au profit du
budget de l'Etat, pour financer pour deux ans seulement le nouveau dispositif
d'accession sociale à la propriété, le prêt à taux zéro qui venait d'être mis
en place.
Les engagements confirmés, ce sont, d'une part, la poursuite de la
modernisation des structures du 1 % logement et, d'autre part, la confirmation
de l'intervention du 1 % logement en faveur des plus défavorisés.
Il faut bien reconnaître que la collecte, la gestion et l'utilisation de ces
fonds ont fait souvent l'objet de critiques par le passé. Mais il faut tout
autant admettre le rôle important, sur les plans tant économique que social,
que joue le 1 % logement. Ce rôle a bien failli être remis en cause par la
convention de 1996. En effet, pour maintenir sa capacité d'investissement,
l'UESL a dû non seulement mobiliser la trésorerie de ses associés collecteurs,
mais aussi emprunter 1,2 milliard de francs en 1997 et 4 milliards de francs en
1998.
Voici quelques chiffres pour mieux apprécier le rôle économique du 1 %
logement.
En 1996, le coût des opérations qui ont bénéficié du 1 % a été de l'ordre de
37 milliards de francs. Ce sont 13 milliards de francs qui sont investis chaque
année, 8 milliards de francs de prêts aux ménages et 5 milliards de francs de
prêts pour construire ou rénover des appartements sociaux. Ce sont aussi 139
700 logements locatifs financés en 1996.
Il est bon de rappeler également l'engagement du 1 % dans le logement « très
social » qui, souvent, est indispensable pour « boucler » une opération.
Depuis 1997, il est prévu pour cinq ans d'engager 1,8 milliard de francs pour
la rénovation des foyers des travailleurs migrants. Par ailleurs, les
organismes collecteurs se sont engagés à investir 10 % des sommes collectées et
des retours des prêts pour aider les populations salariées ou en recherche
d'emploi ainsi que les familles en grande difficulté. Les ressources
disponibles, vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, sont estimées à un
peu plus de 15 milliards de francs pour 1997 et elles devraient atteindre 18
milliards de francs à l'horizon 2002.
Devant l'importance économique et sociale du 1 %, le Gouvernement a souhaité
remettre à plat ce dossier, et ce d'autant plus que la convention qui lie
l'Etat et le Gouvernement vient à expiration le 31 décembre 1998.
Le Premier ministre lui-même a voulu qu'une large consultation s'engage entre
les partenaires, mais il a aussi saisi le Conseil économique et social pour
avis « pour mener une réflexion stratégique sur la pérennisation du dispositif
d'aide à l'accession sociale à la propriété par les entreprises et sur le
renforcement du 1 % logement comme outil d'accompagnement de la politique de
l'Etat en matière de logement social ».
L'avis rendu par le CES a confirmé le rôle du 1 % : « 52 % des accédants
bénéficiant du 1 % sont des ouvriers ou des employés, alors même qu'ils ne
représentent que 37 % de l'ensemble des accédants. » Le 1 % logement s'adresse
aussi à des couples qui dépassent les plafonds de ressources sans disposer pour
autant de réserves suffisantes pour se loger dans le parc privé.
Dans le même temps, le Conseil économique et social fait un certain nombre de
recommandations portant sur la nécessité de plus de transparence, du
renforcement du rôle des partenaires sociaux, de la diversification des
politiques d'emploi du 1 % pour diminuer les coûts et pour favoriser la mixité
sociale en utilisant le secteur privé.
Cette très large réflexion a abouti à une convention adoptée à l'unanimité,
vous l'avez souligné tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, par les
partenaires sociaux et signée par l'Etat le 29 juillet dernier.
Que prévoit cette convention établie pour cinq ans, ce qui donne un peu de
visibilité aux partenaires ?
Elle prévoit de conforter l'action du 1 % logement dans le secteur locatif
social.
Elle prévoit la sécurisation des accédants à la propriété, en offrant un
allégement partiel de leurs mensualités en cas de difficultés, chômage ou
rupture familiale. C'est là également un élément nouveau.
Elle prévoit la sécurisation des locataires et des bailleurs, par voie de
conséquence, par l'avance du dépôt de garantie par un prêt sans intérêt ou
encore, en cas de difficulté, la garantie du paiement du loyer et des charges
pendant neuf mois sur trois ans.
Elle prévoit l'aide à l'aménagement pour les salariés en mobilité
professionnelle, pour financer des travaux de remise en état d'un logement.
Elle prévoit le développement du secteur conventionné privé, par une aide
octroyée pour financer des travaux, en contrepartie d'une location réservée au
1 %.
Elle prévoit la modernisation des organismes collecteurs du 1 % logement par
la transformation des comités interprofessionnels du logement, les CIL, en
unions d'économie sociale, à gestion paritaire, l'établissement d'un rapport
public annuel, la possibilité offerte aux salariés de faire appel d'une
décision négative et l'amélioration de l'efficacité et de la productivité de
l'union d'économie sociale du logement.
Enfin, elle prévoit la clarification des relations entre l'Etat et l'UESL par
la pérennisation du 1 % logement sur la durée de la convention et le maintien
de son taux de collecte actuel ainsi que la prise en charge progressive par le
budget de l'Etat, à l'horizon 2003, du financement du prêt à taux zéro, mesure
très attendue par les partenaires.
Le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui ne traite pas de l'ensemble
du dispositif mis en place par la convention. Il vise simplement à prendre les
mesures législatives nécessaires à la mise en oeuvre des nouvelles utilisations
des fonds du 1 % logement. Il s'agit essentiellement du dispositif de
sécurisation des accédants à la propriété, bénéficiaires d'un prêt à
l'accession sociale, le PAS, qu'ils soient ou non salariés d'une entreprise
cotisant au 1 % logement. Pour cela, le projet de loi prévoit la création d'un
fonds de soutien au sein du fonds d'intervention de l'UESL, destiné à mettre à
la disposition du fonds de garantie à l'accession sociale les sommes
nécessaires à la mise en oeuvre du dispositif de sécurisation.
Par ailleurs, pour assurer la transparence et la sécurité des opérations
réalisées au titre des différentes politiques d'emplois des fonds, le projet de
loi pose le principe de comptabilité distincte de chacun des fonds.
Enfin, ce texte inscrit dans la loi les autres nouvelles missions du 1 %
logement : la sécurisation des locataires, l'action en faveur des personnes
défavorisées et l'aide aux organismes d'information au public sur le logement
tels que l'association départementale d'information sur le logement, l'ADIL.
Quand ce projet de loi sera voté, un pas de plus sera fait en faveur du
logement social.
Cependant, monsieur le secrétaire d'Etat, tout n'est pas encore réglé. Ce
projet de loi renvoie à de nouvelles conventions entre l'Etat et l'union
d'économie sociale du logement pour déterminer des choses aussi simples mais
aussi complexes que le nombre et la part de mensualités reportées, le délai de
carence ou de franchise s'il en existe. Il faudra probablement veiller à ce que
la prise en charge des échéances s'opère en tenant compte de la dégressivité du
chômage. Il faudra réfléchir également à ce que les mesures proposées ne
viennent pas alourdir de façon trop importante les mensualités de fin de prêt,
parce que c'est également en fin de prêt que l'accédant rembourse les avances
qu'il a obtenues au titre du prêt à taux zéro.
On peut s'interroger, et je m'interroge par ailleurs, sur la traduction
juridique de la notion « d'éclatement de la cellule familiale », sur ce qu'elle
recouvre et sur la façon dont elle sera déclinée, même si cette notion est tout
à fait importante et innovante.
Il avait été un temps envisagé le relogement prioritaire dans le parc HLM des
accédants à la propriété en difficulté, après vingt-six mois de chômage.
Travaillez-vous encore sur cette piste en liaison avec l'Union des HLM ?
Peut-être faudrait-il aussi se pencher sur le système de l'assurance contre la
perte d'emploi, qui n'est pas très satisfaisant ?
S'agissant des mesures de sécurisation des locataires, notamment de celles qui
profitent aux jeunes de moins de trente ans, salariés ou en recherche d'un
premier emploi, j'aimerais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous
indiquiez si, dans certains cas, ces personnes pourront aussi avoir accès au
FSL, le fonds de solidarité pour le logement, ou si ces deux aides sont
exclusives l'une de l'autre.
Enfin, nous serons très attentifs au projet de loi relatif à la réforme des
structures des organismes collecteurs car il faut bien reconnaître que, en
signant cette convention, le Gouvernement a tendu la main à ces organismes,
leur a donné en quelque sorte une deuxième chance, en rétablissant et en
élargissant le rôle du 1 % logement.
C'est pourquoi nous pensons que l'Etat devra manifester une exigence de
qualité à l'égard de ces organismes, exigence de qualité dans la transparence,
dans la gestion, dans les choix et l'utilisation des fonds, lesquels
proviennent, il faut bien le dire, de l'argent du travail, de l'argent des
entreprises, bref de l'argent des autres...
Peut-être, monsieur le secrétaire d'Etat, laisserez-vous à notre assemblée un
délai suffisant pour examiner un projet aussi important ?
Pouvez-vous, sur les différents points que j'ai évoqués, nous apporter
quelques précisions, même si nous ne sommes pas trop inquiets, car nous avons
appris à connaître, monsieur le secrétaire d'Etat, votre douce obstination,
votre patiente détermination en faveur du logement et en particulier en ce qui
concerne les plus démunis ?
Pour conclure, je dirai que ce projet de loi est un bon projet : il constitue
une avancée importante en même temps que la concrétisation législative d'une
volonté commune, exprimée à l'unanimité par les partenaires sociaux et l'Etat ;
il précise ainsi les conditions d'utilisation du 1 % logement, en élargissant
le nombre de bénéficiaires, en apportant des garanties supplémentaires aux
prêteurs, aux bailleurs et aux locataires.
Par ailleurs, il confirme le rôle du 1 % logement comme outil d'accompagnement
de la politique de l'Etat en matière de logement social, en élargissant la
compétence de l'UESL aux accédants à la propriété bénéficiant d'un prêt à
l'accession sociale, prêt qui est garanti par l'Etat.
Enfin, ce projet de loi prend en compte l'évolution des conditions de vie des
salariés, qu'elles soient liées à la mobilité professionnelle ou à la
précarisation du travail ou encore à l'évolution de la cellule familiale. C'est
pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe socialiste le soutiendra.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
texte qui nous est proposé aujourd'hui a pour objectif d'inscrire dans la loi
les dispositions de la convention quinquennale signée entre l'Etat et l'Union
d'économie sociale pour le logement et portant sur les structures et l'emploi
de la participation des employeurs à l'effort de construction, plus connue sous
le nom de « 1 % logement ».
Cette convention appelle en fait plusieurs mesures législatives et
réglementaires pour assurer la mise en oeuvre de l'ensemble des principes
qu'elle a définis.
Le premier de ces principes, M. le secrétaire d'Etat l'a rappelé, est inscrit
dans le projet de loi de finances pour 1999. Il s'agit en effet,
progressivement jusqu'en 2003, de mettre un terme à la ponction qu'avait
décidée l'ancien gouvernement et qui consistait à prélever 7 milliards de
francs sur la participation des employeurs à l'effort de construction pour
financer le prêt à taux zéro, pourtant du ressort de l'Etat.
Les sénateurs de mon groupe, cela n'étonnera personne, se réjouissent de
l'annonce de l'arrêt de ce détournement qui participait, avec quelques autres
dispositifs, à la diminution de l'effort réel de l'Etat en matière de
financement du logement.
Nous regrettons toutefois la progressivité si lente de ce retour à la
situation normale, qui occasionnera encore l'année prochaine un manque à gagner
de 6,4 milliards de francs pour le 1 % logement, ce qui ne manquera pas d'avoir
des conséquences importantes sur le logement social, sur l'activité dans le
secteur du bâtiment et plus particulièrement sur le logement des salariés.
La convention qui nous dicte ce projet de loi est, je l'ai dit, quinquennale.
Avons-nous, monsieur le secrétaire d'Etat, toutes les assurances que, à son
terme, aucun autre prélèvement ne sera, de nouveau, opéré abusivement ? Un tel
verrou me paraît nécessaire.
Je ne reviendrai pas sur l'historique du 1 %. Permettez-moi simplement de
souligner combien son objectif originel reste d'actualité.
Il s'agissait en effet très justement de faire participer les entreprises au
logement de leurs salariés. C'était un élément de la politique sociale de
l'entreprise pour faciliter la construction d'habitations dont l'occupation ne
devait pas découler du contrat de travail. Il s'agissait alors de répondre
durablement aux besoins nés du développement de la société industrielle.
Certes, me direz-vous, la situation a bien changé. J'en conviens aisément.
Pourtant y a-t-il moins de besoins en logement à satisfaire ? Je ne le crois
pas.
Selon l'enquête sur le logement de 1996, 2,2 millions de ménages souhaitaient
déménager et 1,6 million de ces demandeurs remplissaient les conditions d'accès
au logement social.
Dans de trop nombreuses villes, on constate des listes d'attente de plusieurs
années pour l'obtention d'un logement social, alors que, parallèlement, on
assiste au développement de poches de vacances dans le parc social et à la
sous-consommation des crédits d'Etat destinés au logement social.
Nous savons tous ici combien il devient périlleux, pour les bailleurs sociaux,
de concilier objectif social et gestion équilibrée.
Les débats riches que nous avons eus lors de la discussion de la loi relative
à la lutte contre les exclusions ont permis de mesurer le recul de la mixité
sociale dans les quartiers. Je peux moi-même témoigner de l'aggravation de
telles situations dans mon département et, plus précisément, dans ma ville,
Orly, où des cités entières sont de fait habitées par des locataires pouvant
être comptés parmi ceux qui rencontrent le plus de difficultés.
Sans vouloir noircir mon propos, je crois que c'est bien de crise que l'on
peut parler pour qualifier la situation actuelle du logement dans notre
pays.
Il est, à mon sens, important d'avoir à l'esprit ce contexte économique et
social afin de bien appréhender, d'une part, l'utilité d'un dispositif tel que
le 1 % logement et, d'autre part, son avenir.
Alors qu'est envisagée la refonte des structures du 1 % dans un prochain
projet de loi, je souhaite vous redire avec insistance, monsieur le secrétaire
d'Etat, combien nous demeurons opposés à ce que la participation des employeurs
à l'effort de construction ou 1 % logement ne soit en fait que de 0,45 % depuis
1992, pourcentage dont il faut, de plus, déduire un neuvième, destiné aux
populations en difficultés particulières.
Nous sommes favorables à une réévaluation de la « participation des employeurs
à l'effort de construction » afin que les sommes ainsi collectées répondent
mieux à leurs missions, notamment en ce qui concerne la construction. Il est,
en effet, de plus en plus fréquent que des salariés cherchant à louer un
appartement s'entendent dire par leurs employeurs qu'ils ne financent que
l'accession à la propriété.
Il est important que le 1 % logement conserve son rôle prépondérant dans
l'aide à la pierre.
Nous n'ignorons certes pas qu'en 2003 ce fonds sera excédentaire. Mais il
s'agit pour nous de lui donner un nouvel élan répondant mieux à l'urgence de la
situation du logement en France.
C'est justement du fait de ce contexte économique et social particulièrement
difficile qu'il convient de mobiliser plus et mieux l'ensemble des partenaires
du logement. Les entreprises ont, de ce point de vue, un rôle social à jouer et
leur place à tenir.
J'aimerais, pour poursuivre ma réflexion dans cette voie, m'arrêter quelques
instants sur l'utilité du 1 % dans notre économie et sur son efficacité
sociale.
Selon l'UESL, le chiffre d'affaires engendré par le 1 % logement pour le
secteur du bâtiment s'élève à 35 milliards de francs procurant un emploi à 85
000 personnes.
Le 1 % logement a financé de nombreuses opérations dans le secteur locatif
social ou intermédiaire. Son intervention représente 15 % des prêts distribués
bénéficiant d'une aide à la pierre-PLA, des prêts complémentaires aux PLA et
aux PALULOS, les primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à
occupation sociale.
En 1996, ce sont 154 300 familles qui ont eu recours à des prêts du 1 %
logement pour le financement de 22 % des opérations d'accession, soit 87 300
logements et 12 % des travaux d'amélioration.
Si l'on y ajoute les prêts aux personnes morales pour le locatif et l'ensemble
des contributions prioritaires pour le logement de certaines populations en
difficulté, on peut dire que 300 000 familles ont pu être logées grâce à
l'apport du 1 % logement. C'est dire l'importance de ce qui peut déjà se
réaliser et l'urgence qu'il y a à développer ce dispositif.
S'agissant plus précisément des articles du présent projet de loi, nous sommes
favorables aux mécanismes proposés en cas d'accession, tant pour les titulaires
d'un prêt à l'accession sociale, PAS, que pour les salariés d'une entreprise
assujettie au 1 %.
En effet, de nombreuses études montrent combien les dramatiques situations de
surendettement sont principalement dues au chômage, à la longue maladie, aux
changements de la composition familiale.
Dans le même esprit, nous soutenons, bien entendu, la création, dans le
secteur du locatif, d'un système de garantie d'impayés de loyers et de charges
au bénéfice des bailleurs ainsi que celle d'un système d'aides pour le logement
de certaines catégories de personnes, notamment les jeunes, confrontés à des
difficultés particulières de logement.
En conclusion, souscrivant à la philosophie générale de ce texte de
sécurisation des salariés, locataires ou accédants à la propriété, le groupe
communiste républicain et citoyen, dans le prolongement des amendements qu'il
avait déposés au moment de l'examen de la loi d'orientation relative à la lutte
contre les exclusions, se prononcera favorablement.
(Applaudissements sur
les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur celles
du groupe socialiste.)
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je tiens tout d'abord à remercier M. le rapporteur de
la qualité de son rapport et de la clarté de son exposé sur un sujet qui peut
paraître technique mais dont il a su très bien mettre en valeur le contenu et
les perspectives. Il a rappelé le contexte difficile dans lequel nous nous
trouvions pour négocier cette convention et il s'est félicité de son résultat,
ce dont, bien évidemment, je le remercie aussi.
Ainsi qu'il l'a souligné, la démarche entreprise par le Gouvernement diffère
de celle qui a été adoptée pour la convention précédente sur deux points :
d'une part, l'Etat va renoncer progressivement aux prélèvements opérés sur le 1
% ; d'autre part, il va assurer la pérennité du prêt à taux zéro en le
rebudgétisant.
En contrepartie, le 1 % va poursuivre sa modernisation et assumer de nouvelles
missions qui correspondront mieux aux attentes des salariés.
Cela aussi, monsieur le rapporteur, nous le souhaitions.
Cet élargissement des emplois du 1 % logement est, comme vous l'avez rappelé,
l'objet du présent projet de loi. La présentation positive que vous venez d'en
faire n'exclut pas que le texte puisse être amélioré ; nous le verrons tout à
l'heure. Néanmoins, j'ai le sentiment que nous avons tous l'impression de nous
engager dans la bonne direction.
M. Plancade a posé plusieurs questions importantes auxquelles je souhaite
apporter quelques éléments de réponse.
Tout d'abord, il est vrai que le projet de loi et la convention signée entre
l'Etat et l'Union d'économie sociale du logement prévoient d'autres conventions
d'application.
Ainsi, l'article 3 prévoit une convention entre l'Etat et l'UESL définissant
précisément les modalités de report gratuit de la moitié des mensualités en fin
de prêt, ainsi que le délai de carence, c'est-à-dire celui qui s'écoule entre
la signature du contrat de prêt et le premier report de mensualités. Un tel
délai a semblé nécessaire pour éviter que des emprunts ne soient contractés
alors même que le risque élevé de chômage est déjà connu. Les discussions
actuelles avec l'Union d'économie sociale du logement laissent à penser qu'un
délai de l'ordre d'un an serait raisonnable. En revanche, en ce qui concerne la
franchise, la durée pourrait être très brève, voire nulle.
Quant à l'aide pour les salariés confrontés au chômage, je suis en mesure de
vous préciser qu'elle ne tiendra pas compte de la dégressivité des allocations
de chômage.
Nous étudions un dispositif simple qui laisse l'emprunteur libre de choisir à
quel moment le droit au report lui est ouvert, dès lors qu'il est inscrit à
l'ASSEDIC. Ainsi, les emprunteurs qui estiment être bien indemnisés pendant les
premiers mois du chômage pourraient conserver le droit de reporter la moitié de
leurs mensualités ultérieurement.
S'agissant du risque de cumul en fin de prêt avec le prêt à taux zéro, je vous
confirme que le remboursement des reports de mensualités s'ajoutera
effectivement au différé du prêt à taux zéro. Mais ce report portera sur
seulement la moitié au plus des mensualités. Dans la plupart des cas, le total
de la dernière mensualité ne devrait pas dépasser le montant d'une mensualité
PAS.
Monsieur Plancade, vous avez également appelé de vos voeux une réflexion plus
globale sur le système de l'assurance chômage dans le cadre du remboursement
des prêts immobiliers. Sur ce point, le Gouvernement souhaite permettre aux
accédants à la propriété victimes du chômage de faire face à leurs mensualités
pour leur éviter d'avoir à vendre leur logement.
Le dispositif proposé aujourd'hui constitue une première réponse au bénéfice
des accédants les plus modestes, donc les plus fragiles.
Il s'agit, j'y insiste, de tout faire pour éviter la vente du logement en
accession car, pour l'accédant, cette vente est bien souvent vécue comme
l'échec du projet le plus important de sa vie. Tout ce que nous pourrons faire
pour empêcher les reventes sera autant de gagné pour permettre aux projets des
accédants d'aboutir.
Je vous rappelle également que les aides personnelles au logement bénéficient
d'une augmentation en cas de situation de chômage. Il y a donc, là aussi, un
correctif qui est à l'oeuvre.
Par ailleurs, les systèmes d'assurance « perte d'emploi », qui concernent déjà
15 % des contrats, pourront se développer peu à peu à partir de cette première
étape de la sécurisation, dont la vocation est, comme je l'indiquais dans mon
propos liminaire, de portée universelle.
Cette sécurisation devrait permettre d'abaisser le coût de l'assurance et
contribuer, par là même, à son développement. On peut escompter un effet
cumulatif.
Monsieur le sénateur, vous avez abordé le problème de l'éclatement de la
cellule familiale. Le projet de loi vise principalement les couples qui
divorcent, mais aussi ceux qui, ayant accédé à la propriété, se séparent sans
que cette séparation soit nécessairement sanctionnée par un divorce.
Dans ces cas, c'est en général l'un des membres du ménage qui supporte seul la
charge des remboursements et, bien souvent, il mérite alors de recevoir une
aide pour faire face aux premières mensualités. Cela lui permet, en tout cas,
de disposer d'un délai avant d'effectuer le choix de conserver le logement ou
de s'en séparer.
Vous avez aussi évoqué le problème de l'articulation de ces dispositifs de
sécurisation avec les FSL.
Certes, la sécurisation des locataires prévue par la convention passée entre
l'Etat et l'UESL du 3 août dernier prend la forme de cautions et de dépôts de
garantie qui sont parfois apportés par les FSL. Cependant, la logique
d'intervention des FSL privilégie les populations déjà en difficulté, alors que
la convention assure des droits à des publics plus larges, tels que les jeunes
de moins de trente ans ou ceux que l'on appelle les « mobiles professionnels
».
La sécurisation, dans le dispositif dont il est ici question, s'inscrit donc
davantage dans une logique de prévention, alors que les FSL interviennent
souvent après l'apparition des difficultés.
Par ailleurs, le dispositif de garantie d'impayés de loyers, également ouvert
aux locataires du nouveau secteur conventionné, ne pouvait, par définition,
incomber aux FSL puisque, jusqu'à ce jour, le secteur conventionné n'existait
pas.
Vous avez également réaffirmé votre attachement au relogement par des
organismes HLM.
Il arrive que des sociétés coopératives d'HLM le pratiquent en raison de leur
double compétence : le locatif et l'accession ; elles orientent effectivement
l'accédant en difficulté vers le locatif. Il arrive aussi qu'une entente soit
conclue en ce sens entre des sociétés de crédit immobilier et des organismes
d'HLM.
Bien entendu, le Gouvernement ne peut qu'encourager le développement de ces
formules ; il a d'ailleurs eu l'occasion de le dire devant toutes les instances
du mouvement HLM. Il est évident que la solidarité entre organismes relevant
des diverses fédérations peut être porteuse de solutions à cet égard.
Je voudrais maintenant aborder une question qui n'a pas été soulevée mais qui,
j'en suis convaincu, préoccupe nombre d'entre vous.
La loi relative à la lutte contre les exclusions contient une disposition,
résultant d'une négociation entre le ministère de la justice et mes services,
qui permet l'exercice du droit de préemption urbain sur les ventes aux enchères
survenant en cas d'échec de formule d'accession. Les collectivités
territoriales, en usant, dans une telle situation, du droit de préemption
urbain au bénéfice d'un organisme d'HLM locatif sont susceptibles de préserver
le maintien dans les lieux de l'accédant en difficulté, celui-ci changeant
alors simplement de statut.
Jusqu'à maintenant, ces enchères se concluaient trop souvent par une vente à
vil prix, la mise à prix étant fixée en fonction de tel ou tel impayé, sans
qu'il soit tenu compte d'éventuelles autres charges. L'acquéreur, même s'il est
scrupuleux, est gêné par l'idée que le logement est occupé. Et, s'il n'est pas
scrupuleux, il se dit qu'il trouvera bien le moyen de faire libérer les lieux,
après avoir acheté au prix le plus bas possible.
Désormais, la collectivité territoriale pourra préempter, à ce prix, bien sûr,
mais pour transformer le logement en logement locatif. Ainsi, la famille -
souvent une femme avec des enfants, d'ailleurs - pourra y être stabilisée.
Je tenais à rappeler cet élément important de la loi que vous avez votée au
printemps.
Mme Terrade souhaiterait que la participation des employeurs à l'effort de
construction retrouve son niveau initial, c'est-à-dire 1 %.
Voilà un certain nombre d'années, en mesurant l'importance du remboursement
des prêts consentis au titre du 1 %, on a constaté que les moyens globaux des
gestionnaires dudit 1 % augmentaient très rapidement. L'existence de ces
retours de prêts a amené les pouvoirs publics à proposer au Parlement, qui l'a
alors accepté, de réduire le taux de la participation des employeurs à l'effort
de construction, mais le montant de la réduction ainsi consentie devait être
reportée sur le financement du Fonds national d'aide au logement, le FNAL.
Aujourd'hui, les entreprises paient encore 0,95 % du 1 % initial. La
diminution n'a donc été, en réalité, que de 0,05 point. Sur ces 0,95 %, une
part de 0,50 % est destinée à alimenter le FNAL, le reste, soit 0,45 %, faisant
seul l'objet de notre débat.
M. le rapporteur ainsi que M. Plancade ont souligné que l'importance de ces
retours, compte tenu de la croissance que l'on enregistrera dans les prochaines
années, allait donner au 1 % des disponibilités appréciables.
Une projection sur la durée de la convention montre que, si la collecte
progresse régulièrement au rythme de la masse salariale, les retours de prêts
augmentent plus rapidement. D'ici à 2002, ils devraient ainsi croître de plus
de 27 %. On peut, hélas ! prédire que ce sera pas le rythme d'augmentation de
la masse salariale servant d'assiette à la cotisation de 0,45 %.
Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, malgré la réduction progressive de
la contribution des employeurs, en masse, le 1 % a pu maintenir ses capacités
d'investissement.
Par ailleurs, l'engagement pris par l'Etat, dans le cadre de la convention en
question, de réduire progressivement ses prélèvements jusqu'à leur extinction
en 2003 rétablira totalement les possibilités d'action du 1 %. D'ici au terme
de la convention, les capacités réellement disponibles du 1 % seront
doublées.
S'agissant de l'action du 1 % en faveur du secteur locatif, madame Terrade, la
convention du 3 août dernier fixe un objectif annuel de 4,5 milliards de francs
d'investissements au profit des HLM. Une concertation tripartite, liant l'Etat,
l'Union d'économie sociale du logement et les organismes d'HLM, est en cours,
afin d'assurer la meilleure affectation possible de cette somme.
En outre, l'accès au parc locatif social public et au secteur locatif
conventionné sera facilité du fait de la prise en charge par le 1 % du dépôt de
garantie, sous forme d'une avance non rémunérée, consentie pour une durée
maximale de trois ans.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte ne couvre pas toute la réforme du
1 %. Ainsi que M. le rapporteur l'a lui-même indiqué, vous aurez à connaître
d'un autre texte tendant à favoriser le développement du paritarisme dans la
gestion du 1 %. Les unions d'économie sociale qui vont voir le jour sont
appelées à se substituer aux comités interprofessionnels du logement. Ce sera
l'occasion de généraliser la participation des syndicats de salariés à cette
gestion : dans tous les départements, leurs représentants siégeront aux côtés
de ceux des organisations professionnelles d'employeurs. C'est un progrès qui a
été voulu par la convention signée nationalement. Nous ne pourrons que nous en
féliciter.
Si le texte en discussion ne couvre pas toute la réforme du 1 %, celle-ci ne
couvre pas toute la volonté de réforme dans le secteur du logement qui est
celle du Gouvernement. Vous le savez, avant la fin de la présente session, nous
espérons pouvoir saisir le Parlement d'un texte concernant globalement
l'habitat et l'urbanisme, par lequel nous nous efforcerons de consolider les
réformes engagées et, en même temps, de mieux les articuler avec la politique
de la ville, ne serait-ce que pour prendre plus nettement en compte cette
nécessité impérieuse de préservation de la mixité dans tous nos quartiers.
D'ailleurs, madame Terrade, vous avez justement insisté, en vous appuyant sur
des exemples, sur la nécessité d'apporter des réponses ambitieuses à cet égard.
Nous nous efforcerons de les élaborer ensemble.
Je tiens, au terme de ce propos, à remercier la Haute Assemblée, sa commission
des affaires économiques et tout spécialement son rapporteur du soin apporté à
l'examen de ce texte et à son amélioration par les amendements dont nous allons
maintenant débattre.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
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