SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Hommage à Claude Erignac, préfet de Corse
(p.
1
).
3.
Décès de Maurice Schumann
(p.
2
).
Suspension et reprise de la séance (p. 3 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
4.
Dépôt du rapport d'une commission d'enquête
(p.
4
).
5.
Démission d'un membre d'une commission d'enquête et candidature
(p.
5
).
6.
Baux ruraux.
- Adoption des conclusions du rapport d'une commission (p.
6
).
Discussion générale : M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des
lois ; Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice ; MM.
Serge Vinçon, Guy Allouche.
Clôture de la discussion générale.
M. le rapporteur.
Articles 1er et 2. - Adoption (p.
7
)
Vote sur l'ensemble (p.
8
)
MM. Jean Derian, Guy Allouche, Serge Vinçon, Michel Dreyfus-Schmidt.
Adoption, par scrutin public, d'une proposition de loi.
7.
Nomination d'un membre d'une commission d'enquête
(p.
9
).
8.
Prestation compensatoire en cas de divorce.
- Discussion des conclusions du rapport d'une commission (p.
10
).
Discussion générale : M. Jean-Jacques Hyest, en remplacement de M. Daniel
Hoeffel, rapporteur de la commission des lois ; Mme Elisabeth Guigou, garde des
sceaux, ministre de la justice ; MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Nicolas About,
Robert Pagès.
Mme le garde des sceaux.
Clôture de la discussion générale.
Renvoi de la suite de la discussion.
Suspension et reprise de la séance (p. 11 )
PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
9.
Conférence des présidents
(p.
12
).
10.
Intervention des organismes d'HLM sur le parc locatif privé.
- Adoption d'une proposition de loi (p.
13
).
Discussion générale : MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Gérard
Braun, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Daniel
Eckenspieller, Alain Vasselle, Bernard Piras, Dominique Braye, Robert Pagès,
Marcel-Pierre Cléach, Georges Mouly.
M. le secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.
Articles 1er et 2. - Adoption (p. 14 )
Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.
11.
Remplacement d'un sénateur décédé
(p.
15
).
12.
Dépôt de propositions de loi
(p.
16
).
13.
Dépôt de propositions d'acte communautaire
(p.
17
).
14.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
18
).
15.
Ordre du jour
(p.
19
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.
2
HOMMAGE À CLAUDE ÉRIGNAC,
PRÉFET DE CORSE
M. le président.
Madame le ministre, mes chers collègues, au moment de reprendre nos travaux,
je voudrais que le Sénat observe une minute de silence après les terribles
événements survenus en Corse ces derniers jours.
(Mme le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et observent une minute
de silence.)
En votre nom, mes chers collègues, j'ai exprimé notre indignation devant
cet acte lâche et inacceptable : l'attentat dont a été victime le représentant
de l'Etat, le préfet Claude Erignac.
Le Sénat, comme l'ensemble des institutions de la République, ne saurait
accepter l'enchaînement tragique dans lequel certains voudraient pousser une
partie du territoire national à laquelle nous sommes tant attachés ; il ne
l'accepte pas, il ne s'y résigne pas ; il le rejette et le combattra.
Que chacun sache que, au-delà de la profonde solidarité dont nous assurons la
famille de ce serviteur de l'Etat, nous ferons preuve, à notre place, de la
détermination la plus totale pour faire reculer la violence et garantir à
chacun qu'il peut vivre, sous les lois de la République, dans la sécurité et la
paix civile.
3
DÉCÈS DE MAURICE SCHUMANN
M. le président.
Mes chers collègues, je suis très ému, car j'ai une autre mauvaise nouvelle à
vous annoncer : la mort de Maurice Schumann, cette nuit.
(Marques d'émotion sur toutes les travées.)
Vous voyez mon désarroi. C'est terrible ! Je m'apprête à aller m'incliner
devant sa dépouille.
Le Sénat va interrompre ses travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures trente-cinq, est reprise à neuf heures
cinquante-cinq, sous la présidence de M. Jean Faure.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
DÉPÔT DU RAPPORT
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
M. le président.
M. le président a reçu de M. Jean Arthuis un rapport fait au nom de la
commission d'enquête chargée de recueillir des éléments d'information sur les
conséquences financières, économiques et sociales de la décision de réduire à
trente-cinq heures la durée hebdomadaire du travail, créée en vertu d'une
résolution adoptée par le Sénat le 11 décembre 1997.
Ce dépôt a été publié au
Journal officiel,
édition des lois et décret
du vendredi 6 février 1998. Cette publication constitue, conformément au
paragraphe III du chapitre V de l'instruction général du bureau, le point de
départ du délai de six jours nets pendant lequel la demande de constitution du
Sénat en comité secret peut être formulée.
Ce rapport sera imprimé sous le n° 279 et distribué, sauf si le Sénat,
constitué en comité secret, décide, par un vote spécial, de ne pas autoriser la
publication de tout ou partie du rapport.
5
DÉMISSION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
ET CANDIDATURE
M. le président.
J'ai reçu avis de la démission de M. Fernand Tardy, comme membre de la
commission d'enquête chargée d'examiner le devenir des grands projets
d'infrastructures terrestres d'aménagement du territoire.
Le groupe intéressé à fait connaître à la présidence le nom du candidat
proposé en remplacement.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à
l'article 8 du règlement.
6
BAUX RURAUX
Adoption des conclusions
du rapport d'une commission
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 314,
1995-1996) de M. Jean-Paul Delevoye, fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de loi (n° 239, 1995-1996) de MM.
Serge Vinçon, Michel Alloncle, Louis Althapé, Jean Bernard, Roger Besse, Paul
Blanc, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Robert Calméjane, Jean-Pierre Camoin,
Auguste Cazalet, Jacques Chaumont, Jean-Patrick Courtois, Désiré Dabavelaere,
Philippe de Gaulle, Luc Dejoie, Jacques Delong, Charles Descours, Michel
Doublet, Alain Dufaut, Patrice Gélard, Alain Gérard, Daniel Goulet, Georges
Gruillot, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, André Jourdain, Alain
Joyandet, Edmond Lauret, Jean-François Le Grand, Maurice Lombard, Pierre
Martin, Mme Nelly Olin, MM. Charles Pasqua, Alain Pluchet, Victor Reux, Roger
Rigaudière, Michel Rufin, Jean-Pierre Schosteck, Maurice Schumann, Louis Souvet
et Jacques Valade tendant à autoriser les élus des communes comptant 3 500
habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, permettez-moi de
vous soumettre les conclusions de la commission des lois sur la proposition de
loi proposée par Serge Vinçon.
Ce problème suscite un intérêt non négligeable de la part des élus puisqu'une
enquête de l'Association des maires de France montre qu'environ 1 000
collectivités locales de moins de 3 500 habitants sont concernées.
Il convient d'affirmer en préalable que nous tenons à ce que les affaires
publiques soient empreintes d'une très grande éthique, d'une très grande
moralisation, d'une très grande transparence, et qu'il ne s'agit en aucun cas
de confondre intérêt privé et intérêt public. Mais il convient aussi de ne pas
pénaliser celles et ceux qui acceptent de se concacrer à la vie publique. La
démocratie a besoin d'eux.
L'article 432-12 du nouveau code pénal dispose : « Le fait, par une personne
dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public
ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir
ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une
entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou
partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation
ou le paiement - même quand l'opération est positive pour la commune et même si
la personne ne retire aucun bénéfice de l'opération prohibée - est puni... »
Les choses sont donc très claires ; une lacune apparaît cependant. Dès 1967,
le législateur a prévu des dérogations au délit d'ingérence, devenu, en 1994,
le délit de prise illégale d'intérêts, et l'article 432-12 du code pénal
prévoit trois séries d'assouplissement.
Tout d'abord, les maires, les adjoints et les conseillers municipaux peuvent
traiter avec leurs communes pour le transfert de biens ou la fourniture de
services dans la limite de 100 000 francs.
Ils peuvent aussi, sur autorisation du conseil municipal, acquérir une
parcelle d'un lotissement communal pour y construire leur habitation
personnelle.
Ils peuvent également, toujours sur autorisation du conseil municipal,
acquérir un bien qui appartient à la commune pour y créer ou y développer une
activité à caractère professionnel.
Bien évidemment, dans tous ces cas, l'élu intéressé ne doit pas participer à
la délibération du conseil municipal relative à la conclusion ou à
l'approbation du contrat.
Notre collègue Serge Vinçon a souligné l'impossibilité, pour certains élus
locaux, de conclure des baux ruraux avec leur commune et a mis l'accent sur une
situation paradoxale. En effet, le code pénal reconnaît aux élus la faculté de
conclure avec leur collectivité des actes
a priori
plus lourds, portant
sur le patrimoine de la commune, mais leur refuse la possibilité de conclure
des baux ruraux.
Selon nous, qui peut le plus peut le moins, à condition bien évidemment de
prendre un certain nombre de précautions.
Quels sont les objectifs visés par la proposition de loi qui est soumise à
votre approbation par la commission des lois ?
A l'évidence, il s'agit de préserver l'intérêt de la commune et, dans cet
esprit, de s'assurer que l'élu ne puisse pas se prévaloir de son autorité pour
en tirer un quelconque avantage, ne puisse pas commettre, ce que j'appellerai
un délit d'initié, et que les baux soient conclus à un prix tout à fait
normal.
C'est la raison pour laquelle il vous est proposé d'ajouter au code pénal la
possibilité de louer des terrains, mais d'encadrer strictement cette faculté
comme celles qui sont d'ores et déjà reconnues par le code pénal. Ainsi, cette
dérogation posée par la proposition de loi ne concerne que les baux ruraux de
droit commun régis par le titre Ier du livre IV du code rural.
Cette précision apporte une garantie sur le prix du bail, puisque celui-ci
doit être compris dans la fourchette fixée par le préfet ; ce qui constitue une
garantie absolue et permet à la commune de résilier le bail à tout moment
lorsque les biens loués sont nécessaires à la réalisation d'un projet d'utilité
publique.
Nous proposons en outre de limiter à neuf ans la durée du bail ainsi conclu.
Nous n'avons pas souhaité autoriser une durée inférieure à neuf ans pour ne pas
apporter de dérogation supplémentaire. Nous n'avons pas non plus souhaité une
durée supérieure, de façon à éviter toute rente de situation.
Enfin, nous prévoyons la publication de l'estimation du service des Domaines,
ce qui donne la garantie de la transparence de l'information, et ce d'autant
plus que le contrat ne pourra en aucun cas être signé moins de deux mois après
cette publication. Il n'y aura donc aucun risque de « délit d'initié ».
Il nous semble donc que cette proposition de loi permet de combler une lacune,
de garantir la transparence dans la gestion des affaires publiques, de
préserver les intérêts de la commune et de ne pas fausser le libre jeu de la
concurrence.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les dispositions qui sont
soumises à votre approbation.
(Applaudissements sur les travées du RPR et de
l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou.
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat examine aujourd'hui, par
application des dispositions de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution, une
proposition de loi amendée par votre commission des lois et tendant à apporter
une nouvelle dérogation au délit de prise illégale d'intérêts, ou délit
d'ingérence.
Cette dérogation tend à permettre aux élus des communes de moins de 3 500
habitants de conclure avec leur collectivité locale des baux ruraux, ainsi que
vient de l'expliquer votre rapporteur, M. Delevoye.
De prime abord, cette proposition paraît réaliste. La loi ne permet-elle pas
déjà à ces élus d'acquérir sous certaines conditions des biens de leur commune
ou de lui louer un logement ?
Ne faut-il pas par ailleurs permettre aux agriculteurs de nos petites communes
rurales, comme il est indiqué dans l'exposé des motifs de la proposition de
loi, de continuer à participer activement à la vie publique locale ?
Les choses ne sont toutefois pas aussi simples, même si le Gouvernement
partage à l'évidence pleinement le souci qui anime les auteurs de la
proposition de loi de permettre à des élus des petites communes de poursuivre
leur activité professionnelle.
Cette proposition ne peut donc recevoir l'accord du Gouvernement, pour des
raisons de principe que je vais vous exposer et dont j'espère vous
convaincre.
A titre préliminaire, un bref rappel s'avère indispensable.
L'ancien article 175 du code pénal ne connaissait qu'une dérogation en matière
d'ingérence : dans les communes de moins de 1 500 habitants, les élus concernés
pouvaient traiter avec la commune pour l'exécution de menus travaux ou la
livraison de fournitures courantes, dans la limite de 75 000 francs par an.
L'actuel article 432-12, entré en vigueur avec le nouveau code pénal le 1er
mars 1994, a introduit d'autres dérogations : le seuil d'habitants des communes
susvisées a été porté à 3 500 ; le montant annuel autorisé a été porté à 100
000 francs et peut s'appliquer à tous types d'opérations, y compris
immobilières ; les élus peuvent désormais acquérir une parcelle d'un
lotissement communal pour se loger ; ils peuvent aussi acquérir un bien
appartenant à la commune pour créer ou développer une activité
professionnelle.
Les trois premières dérogations figuraient dans le projet de loi initial du
Gouvernement de l'époque, la dernière résultant d'un amendement parlementaire,
combattu en son temps par le Gouvernement pour des raisons liées à la
nécessaire impartialité de la puissance publique.
La proposition de loi vise à élargir cette dernière dérogation, en permettant
non plus seulement l'acquisition, mais aussi la location d'un bien appartenant
à la commune pour créer ou développer une activité professionnelle, agricole en
l'espèce.
Elle encourt des critiques du même ordre que celles qui avaient été formulées
à l'époque.
Le délit de prise illégale d'intérêt ou d'ingérence est un délit « préventif
», un délit obstacle. Son rôle dans notre droit pénal est symbolique : il est
de proclamer de la manière la plus solennelle que tout conflit entre un intérêt
privé et l'intérêt général est prohibé.
Cette affirmation est essentielle au plan de l'impartialité de la puissance
publique. Non seulement ceux qui représentent celle-ci ne doivent pas « faire
des affaires » - comme l'on dit habituellement - ce qui va de soi, mais surtout
ils ne doivent pas pouvoir être soupçonnés d'en faire avec elle.
L'élu titulaire d'un mandat électif public ne doit pas prêter le flanc à des
critiques, même injustes ; pour ce faire, il doit s'abstenir, aussi exigeant
que cela puisse paraître, de se placer dans des situations à risque. Le statut
comporte, en effet, ses servitudes.
Par ailleurs, l'élu pourra toujours être soupçonné de disposer, de par ses
fonctions, d'informations qui rompent l'égalité entre lui et ses concitoyens
s'il traite avec sa commune ; il est, d'une certaine façon, initié, juge et
partie.
Il est tout autant question ici d'apparence et de perception de la vie
publique que de réalité de la fraude.
Le maire dispose potentiellement de tous les éléments pour fausser la
concurrence entre lui et ses administrés. Cela ne signifie pas qu'il le fera,
mais il peut être soupçonné de le faire. En effet, il connaît les règlements
d'occupation du sol et leur évolution à long terme, il est informé des travaux
de viabilisation ou d'adduction d'eau et des projets en cours, il a les moyens
d'influer sur leur évolution, enfin, il connaît la situation personnelle de ses
administrés.
C'est aussi et surtout afin d'éviter le soupçon que le délit de prise illégale
d'intérêts a été conçu dans des termes aussi larges. Il a pour objet non pas de
nuire aux élus en les empêchant d'exercer leur activité professionnelle, mais,
bien au contraire, de les protéger dans l'exercice impartial de la puissance
publique.
Il s'agit en réalité d'un texte de protection de l'élu et non d'un texte
dirigé contre l'élu.
Dans cet esprit, seules des dérogations pour des cas parfaitement transparents
et incontestables peuvent être envisagées.
Tel est le cas de l'actuelle dérogation destinée à permettre à l'élu de se
loger dans un lotissement communal ou dans un logement appartenant à la
commune. Il est évident que le maire doit se loger dans sa commune. Or cette
opération ne peut guère donner lieu à des abus dans les communes de moins de 3
500 habitants, qui sont rarement propriétaires d'un parc important de bâtiments
d'habitation.
Il en va tout autrement lorsqu'il s'agit d'une activité professionnelle,
notamment de son développement. L'activité professionnelle est en effet un
intérêt exclusivement privé et lucratif, qui doit être dissocié de l'activité
publique.
C'est pour cette raison que le Gouvernement s'était opposé à l'époque à la
dérogation que j'évoquais tout à l'heure, tendant à permettre aux élus
d'acquérir un bien appartenant à la commune pour créer ou développer une
activité professionnelle.
Il avait été soutenu, lors des débats relatifs au nouveau code pénal, que la
dérogation souhaitée se justifiait parce qu'il était impossible de créer ou de
développer une activité industrielle ou artisanale en dehors des zones prévues
à cet effet, zones dont la création et l'organisation dépendent de la
commune.
Cette particularité ne se retrouve pas pour les terres agricoles.
Par ailleurs, la dérogation introduite par le nouveau code pénal est en
pratique d'une portée limitée, puisqu'il s'agit d'un achat qui, à la différence
d'une location, engage l'acheteur dans une dépense importante. Les situations
de location sont potentiellement plus nombreuses et peuvent porter sur des
surfaces importantes, les petites communes étant fréquemment propriétaires de
grandes surfaces de terre.
Enfin et surtout, permettre au maire de louer un bien communal ancre une
situation de conflit d'intérêts dans le temps.
A ce stade de mon propos, je voudrais aborder les garanties que les auteurs de
la proposition de loi, puis la commission des lois, ont prévues pour encadrer
le texte.
Ces garanties sont les suivantes. Tout d'abord, il doit s'agir d'un bail rural
au sens du code rural, ce qui rend applicables les dispositions de ce code en
matière de fixation du prix et de résiliation par la puissance publique pour
cause d'utilité publique. Ce bail doit ensuite faire l'objet d'une estimation
préalable par le service des Domaines. Enfin, ce bail ne peut être conclu avant
l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la publication de cette
évaluation.
Ces précisions sont, bien entendu, très utiles, et je rends hommage à leurs
auteurs. Mais, à mes yeux, elles ne constituent pas des garanties à la mesure
des inconvénients présentés par le texte.
Il convient ici de rappeler que la durée d'un bail rural est de neuf années,
renouvelable. Le conflit d'intérêts ne peut donc que s'installer dans le long
terme.
Par ailleurs, quelle peut être l'effectivité de la faculté de résiliation pour
cause d'utilité publique ? Qui instruit en effet les dossiers d'utilité
publique ? Si l'équipe municipale ne change pas, elle n'aura aucune raison de
résilier le bail. Et si elle change et qu'elle le résilie, la situation sera
critiquable, car il pourrait s'agir d'un règlement de comptes politiques.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
C'est vrai !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
La mesure de publicité ne constitue pas davantage une
garantie importante. Qui est en mesure, dans une petite commune rurale, de
concourir avec le maire ?
Quelles seront les chances réelles de bénéficier du contrat dans la mesure où
c'est précisément le maire qui va choisir le contractant de la commune ?
Quant à la question du montant du loyer, elle est sans intérêt : l'ingérence
ne suppose en effet nullement un préjudice pour la commune.
J'espère que vous comprenez bien la position que je développe ici. Je ne crois
pas que les élus feraient un mauvais usage de ce texte car, comme je l'ai déjà
dit, les élus locaux de notre pays sont honnêtes dans leur immense majorité.
Mais il suffit que l'on puisse soupçonner qu'il n'en soit pas ainsi pour que
l'image de l'ensemble des élus soit atteinte.
Pour conclure, je voudrais appeler votre attention sur des considérations plus
générales.
Le professeur Emile Garçon écrivait, dans son code pénal annoté de 1901, que
l'article 175 du code pénal trouvait son origine dans des dispositions du droit
romain et de nombreuses ordonnances des rois de France.
Force est de constater que l'interdiction pour un maire de conclure des baux
ruraux avec sa commune est plus que séculaire et que la France est un pays de
tradition agricole très ancienne. Pourquoi alors ne pas avoir soulevé plus tôt
la difficulté ?
La réponse paraît contenue dans l'exposé des motifs de la présente proposition
de loi : les élus redoutent des poursuites pénales. Vous conviendrez avec moi
qu'il ne faut pas modifier la loi pénale pour des cas particuliers.
Enfin, d'autres catégories socioprofessionnelles également dignes d'intérêt
pourraient légitimement former des demandes de même nature, qu'il s'agisse des
chercheurs, pour la valorisation de la recherche publique, des membres des
chambres de commerce et d'industrie ou des membres des chambres de métiers.
Je crois que la loi pénale doit être, autant qu'il est possible, la même pour
tous et qu'il ne faut y déroger qu'avec la plus grande circonspection.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement ne peut que s'opposer à l'adoption de
la présente proposition de loi.
Pour autant, le Gouvernement est bien évidemment sensible aux difficultés
rencontrées par les élus concernés, dont le Sénat se fait légitimement
l'écho.
Comme vous le savez, la question évoquée aujourd'hui a fait l'objet à la
Chancellerie d'un groupe de travail qui a réuni, au-delà de toute sensibilité
ou, plutôt, en rassemblant toutes les sensibilités des membres du Sénat, des
membre de la Chancellerie et des représentants de l'Assemblée permanente des
chambres d'agriculture.
Ce groupe de travail a fait, dans son rapport, une analyse juridique détaillée
de la question et a conclu, en substance, qu'une appréciation stricte de la loi
pénale permettait de considérer que le délit n'avait pas un champ d'application
aussi étendu que celui qui lui est souvent donné.
Ce document technique général n'a évidemment pas vocation à régler toutes les
difficultés rencontrées, que vous avez soulignées, et encore moins à conférer
aux personnes concernées une immunité. Les interprétations des textes qui y
sont données le sont, comme il est d'usage, sous la réserve de l'appréciation
souveraine des juridictions.
Toutefois, sa diffusion pour information aux parquets, aux préfets, voire aux
chambres régionales des comptes, leur permettrait de disposer d'une
documentation technique leur permettant d'exercer leurs missions de la manière
la plus avisée.
Si votre rapporteur, qui a participé à ces travaux, en est d'accord, la
Chancellerie est disposée à diffuser ce travail et à procéder, le moment venu,
à une nouvelle évaluation de la situation. Telle est la proposition que vous
fait le Gouvernement.
(Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste
républicain et citoyen, ainsi que sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Vinçon.
M. Serge Vinçon.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, les activités
agricole et forestière constituent le socle irremplaçable de toute politique
cohérente de développement rural. En effet, ces activités sont les seules
capables d'entretenir 85 % de notre territoire.
Cette fonction d'entretien est, vous me permettrez de le rappeler,
indispensable à la survie du monde rural. Chacun d'entre nous, dans cette
enceinte, a certainement en mémoire, pour les avoir parfois vécues dans son
département, les conséquences néfastes de l'abandon de ces activités :
enfrichement, réapparition de risques écologiques, tels que les incendies, les
avalanches ou les inondations, et perte totale d'attrait d'un milieu rural non
entretenu.
Face à ces risques, nous sommes confrontés à une insuffisante adéquation de la
législation aux réalités sociologiques propres aux communes rurales, et plus
particulièrement aux plus petites d'entre elles.
En effet, les exploitants agricoles constituent le poumon de nos communes
rurales non seulement par l'importance qu'ils représentent pour celles-ci sur
le plan économique, mais également par le fait que nombre d'entre eux siègent
au sein des conseils municipaux et participent activement à la vie locale.
Or en vertu de notre législation, et plus précisément de l'article 432-12 du
code pénal, sont considérés comme coupables de prise illégale d'intérêts, et
donc passibles de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 francs d'amende, les
élus locaux qui concluent des baux ruraux avec leur collectivité.
Cet article du nouveau code pénal vise ainsi à réprimer le délit d'ingérence,
afin d'éviter toute confusion entre les intérêts personnels de certains agents
publics et ceux des collectivités qu'ils administrent.
Toutefois, les alinéas 2, 3 et 4 du même article prévoient des dérogations
applicables aux élus des communes comptant 3 500 habitants au plus.
Ainsi, ces derniers peuvent-ils traiter avec les communes dont ils ont la
charge pour le transfert des biens mobiliers ou immobiliers, ou la fourniture
de services dans la limite d'un montant annuel de 100 000 francs.
Ceux-ci peuvent encore acquérir une parcelle d'un lotissement communal pour y
édifier leur habitation personnelle ou conclure des baux d'habitation avec la
commune pour leur propre logement, voire acquérir un bien appartenant à la
commune pour la création ou le développement de leur activité
professionnelle.
Cependant, l'actuelle rédaction de l'article 432-12 du code pénal passe sous
silence la conclusion des baux ruraux. L'élu d'une commune de 3 500 habitants
au plus peut donc acquérir, mais non louer, un terrain appartenant à la
collectivité locale.
N'est-ce pas, ici, une lacune du code pénal, quand on sait que les communes
comptant au plus 3 500 habitants sont majoritairement rurales et représentent
plus de 90 % des 36 000 communes que compte notre pays ?
N'est-ce pas aussi quelque peu paradoxal quand on sait que ces communes
possèdent, dans leur domaine privé, des terrains qu'elles louent à des
exploitants agricoles et que, de surcroît, un grand nombre d'exploitants
agricoles sont depuis toujours les élus de ces communes ?
L'élu se trouve donc placé face à l'alternative suivante : soit abandonner son
mandat, soit renoncer à son activité professionnelle. Dans les deux cas, c'est
la commune qui est perdante. En effet, c'est soit la démocratie locale, soit la
vie économique du village qui est atteinte par ce choix.
On ne peut donc que regretter que les agriculteurs soient empêchés,
aujourd'hui, de conclure de tels baux ruraux avec la collectivité qu'ils
administrent.
J'insiste également sur le fait que les services de l'Etat chargés du contrôle
de légalité des actes des collectivités locales qualifient en effet d'illégales
sur le fond, et non sur la forme, puisque l'article L. 121-35 du code des
communes est respecté, des délibérations de conseils municipaux accordant la
location de terrains communaux au maire ou à un conseiller municipal.
L'enquête réalisée en 1997 par l'Association des maires de France, que préside
notre rapporteur et collègue Jean-Paul Delevoye, permet d'affirmer que plus de
1 000 maires ou maires adjoints sont directement concernés et pourraient être à
tout moment mis en examen. Ne pas agir reviendrait à laisser se dégrader une
situation qui pose un véritable problème de fonctionnement de la démocratie
locale, je le répète, notamment dans les plus petites communes.
Les dernières élections municipales de juin 1995 ont montré le peu
d'empressement dont les Français font preuve pour être candidats à un mandat
électoral dans les petites communes et, paradoxalement, l'article 432-12 du
nouveau code pénal fait aujourd'hui peser la menace de démissions collectives
des élus exploitants agricoles pour lesquels l'activité professionnelle est
mise en péril. Cela s'est déjà produit depuis 1995.
Loin de remettre en cause le principe louable qui est d'éviter tout risque
d'amalgame entre les affaires de la collectivité et les affaires de l'élu, je
souhaite ardemment que la législation prenne en compte les spécificités de nos
communes rurales.
Madame le ministre, je tiens à vous citer l'exemple d'une commune de mon
département, qui compte vingt-six habitants, dont trois agriculteurs, qui tous
exploitent des terrains appartenant à la commune et sont élus. Nous voyons bien
qu'il n'y a là aucun risque de prise illégale d'intérêt et que nous sommes loin
des grandes affaires qui, quelquefois, secouent l'actualité.
Dans cet exemple, soit il n'existe plus de conseil municipal, soit il faut
supprimer la commune, puisqu'il n'y aura plus personne pour l'administrer. Il
faut faire preuve de pragmatisme et de réalisme dans des cas de figure aussi
patents que celui-là. Les propositions de notre rapporteur vont dans le sens
que je souhaitais, puisque, d'une part, il autorise les élus à conclure
certains baux ruraux avec leur collectivité, et que, d'autre part, il assure
une parfaite transparence de la procédure.
Je voterai donc, avec mes collègues du groupe du RPR, les conclusions de la
commission des lois, en remerciant M. Delevoye et l'Association des maires de
France d'avoir étudié cette délicate question depuis maintenant 1995.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, moins de
quatre ans après l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, le 1er mars 1994,
la majorité sénatoriale, sur proposition de plusieurs de nos collègues, dont
Serge Vinçon est le premier signataire, et sur la base d'un rapport de notre
collègue Jean-Paul Delevoye, nous invite à modifier, pour en atténuer la
portée, l'article 432-12 du code pénal qui incrimine la prise illégale
d'intérêts par une personne dépositaire de l'autorité publique.
En l'occurrence, la majorité sénatoriale veut autoriser certains élus locaux -
les maires et les adjoints des communes de moins de 3 500 habitants - à
conclure, avec la collectivité locale dont ils ont la charge, des baux ruraux,
et ce en totale contradiction avec l'esprit qui a présidé à la rédaction et à
l'adoption de cet article du code pénal.
On peut comprendre la motivation des auteurs de cette proposition de loi :
peut-être entendent-ils apporter réponse et solution à un problème posé...
MM. Serge Vinçon et André Jourdain.
Oui, c'est cela !
M. Guy Allouche.
Ce serait légitime, encore qu'il aurait été utile de connaître le nombre de
cas portés à leur connaissance. Nous aurions aimé être en possession d'une
statistique portant sur l'ensemble du territoire national, statistique annexée
au rapport et comprenant une analyse détaillée par département. Je pense que
l'Association des maires de France que vous présidez, monsieur le rapporteur,
aurait pu fournir à temps une telle étude. Mais ce n'est pas le cas !
Au-delà de cette interrogation, cette demande d'atténuation de la portée de
l'article 432-12 du code pénal est-elle opportune ? Assurément, non.
Pour ses auteurs, la présente proposition de loi est justifiée par des
considérations d'intérêt général. Mais justement, chers collègues, en cette
période où tout le personnel politique, à tous niveaux, est injustement mis en
cause au motif qu'une poignée d'élus a fait preuve d'indélicatesse, il n'est ni
opportun ni judicieux de vouloir confondre intérêt général, dévouement à la
chose publique et intérêts économiques et privés personnels.
Cette proposition va à l'encontre de la moralisation de la vie politique tant
réclamée par l'opinion publique.
Ceux qui défendent un tel dispositif ont-ils pleinement mesuré son impact, ses
effets et ses conséquences ? Michel Dreyfus-Schmidt a coutume de dire que « le
mieux est parfois l'ennemi du bien ». Cette formule n'a jamais été autant
appropriée qu'à l'égard de cette proposition de loi. Tous les élus doivent
constamment avoir à l'esprit qu'ils sont là pour « servir et non pas se servir
» !
La tradition républicaine a consisté à mettre en place, par des dispositions
légales, par une forme de contrainte sociale, un grand nombre de précautions
destinées à prémunir les élus contre les tentations. Un élu, et plus
particulièrement le maire, ne peut pas faire comme tout le monde. Il faut
préserver cet état d'esprit ; mieux, il faut lui redonner un second souffle.
Que celui qui brigue un mandat majoral sache que la contrepartie de son
élection comporte un certain nombre de limitations à sa liberté d'action, en
particulier dans le domaine économique.
Oui, mes chers collègues, la fonction élective a ses honneurs, mais elle a
aussi ses contraintes et ses devoirs. N'est-ce pas d'ailleurs son titre de
noblesse et sa force d'abnégation ?
Précisément, le problème soulevé n'est pas nouveau. La prise illégale
d'intérêts a fait l'objet d'un long et riche débat à l'occasion de la réforme
du code pénal. Lors de son examen, l'autorisation pour les élus d'acquérir une
parcelle appartenant à la commune pour le développement de leur activité
commerciale ou artisanale n'avait pas été retenue au motif essentiel qu'il ne
doit pas exister de confusion possible entre l'exercice d'une fonction publique
et les intérêts privés de la personne exerçant une telle fonction. J'ajoute que
l'extension de la dérogation pour les baux ruraux proposée aujourd'hui n'avait
pas, alors, été formulée. Pourtant, la commission mixte paritaire avait abouti
à un accord statisfaisant.
Nous pouvons affirmer que la solution retenue en 1992 tient compte de la
réalité de ce problème et lui apporte une réponse grâce à de nombreuses
dérogations. Rappelons que le seuil de population a été relevé, puisqu'il est
passé de 1 500 habitants à 3 500 habitants, que le plafond annuel de la
transaction est désormais de 100 000 francs, alors qu'il était fixé à 75 000
francs, et que les élus de ces communes peuvent acquérir une parcelle communale
pour y édifier leur habitation personnelle ou conclure des baux d'habitation
pour leur propre logement. Ainsi le législateur a fait preuve de réalisme pour
plus de rigueur.
On peut concevoir et justifier une dérogation lorsqu'il s'agit de se loger.
Mais il existe une grande différence entre ce que j'appellerai le « droit à un
toit », pour loger sa famille, et le droit d'acheter un terrain pour développer
son activité professionnelle. Dans un cas, on répond à un besoin fondamental de
la personne humaine, dans l'autre, on favorise une situation. C'est là que le
bât blesse.
Le débat parlementaire de 1992 s'était fait l'écho de cette nécessaire
distinction. Accepter d'y déroger aujourd'hui, c'est ouvrir la voie à de
nombreux abus. Ce serait source de confusions de toute nature, d'autant que la
location ici proposée, contrairement à l'acquisition qui revêt un caractère
ponctuel, se poursuit dans le temps, et par là même pérennise une situation de
confusion.
Il est cependant exact que, depuis plusieurs années, se manifeste chez les
élus une prise de conscience plus aiguë du risque pénal encouru. Mes chers
collègues, sans aller jusqu'à considérer que cette proposition de loi porte en
elle des dispositions amnistiantes, je ne peux m'empêcher de penser que son
auteur et ceux qui approuvent sa démarche ont sûrement connaissance de
situations actuellement illicites !
Je note au passage que ce texte, qui a été déposé en 1996, est inscrit à
l'ordre du jour du Sénat en 1998, comme par hasard année de renouvellement
sénatorial. Certes, il faut être de mauvaise foi pour relever cette
coïncidence,...
M. Serge Vinçon.
Je crois !
M. Guy Allouche.
... mais comment pourrais-je m'en dispenser ?
M. Serge Vinçon.
Il ne faut tout de même pas exagérer !
M. Guy Allouche.
A cet égard, le rapporteur de la commission des lois a restreint le dispositif
initial en le limitant à l'intitulé exact de la proposition de loi et en
proposant des mesures destinées à assurer la transparence et l'égalité entre
les citoyens.
Néanmoins, ces garanties -
a minima
- sont quelque peu illusoires, car
elles n'empêchent pas les élus concernés d'être en situation privilégiée par
rapport aux autres citoyens. Il y a même un « parfum de délit d'initié » dans
cette opération puisque c'est le maire qui est le maître d'oeuvre de la
procédure. Il est détenteur de toutes les informations, bien avant ses
administrés, sans oublier qu'il se trouve déjà dans une position de force
puisqu'il est informé de ce qui se passe dans sa commune, comme chez chacun de
ses administrés.
Dès lors qu'il est maître de l'action, l'estimation du service des Domaines,
la publication par voie d'affichage en mairie et la limitation de la durée du
bail ne changent rien ni quant au fond ni quant à l'opportunité. Au contraire,
une telle mesure est de nature, quoi qu'il en soit, à faire peser le soupçon
sur les élus et à porter atteinte à leur fonction.
Mes chers collègues, sur un plan plus général, il convient de rappeler que la
définition d'un délit de prise illégale d'intérêts a pour finalité essentielle
d'éviter tout conflit entre l'intérêt général et l'intérêt privé. Il ne nous
paraît pas opportun d'affaiblir ce principe d'impartialité de la puissance
publique en accordant une dérogation supplémentaire au profit d'une catégorie
d'élus, aussi estimable soit-elle.
Il ne s'agit pas pour moi de méconnaître la réalité, parfois l'acuité, de
certaines situations, mais je considère que l'article 432-12 du code pénal, qui
prévoit déjà des dérogations, constitue un cadre raisonnable dans la mesure où
il protège les élus et préserve leur image d'honnêteté et d'intégrité.
L'opinion publique, aujourd'hui plus qu'hier, ne comprendrait pas qu'un maire
puisse profiter - c'est bien le terme qui convient - de sa fonction pour
développer son activité économique ou, ce qui paraît encore plus excessif, pour
la créer.
Certes, les dispositions de l'article 432-12 du code pénal sont sévères. Lors
de son adoption, le Parlement a considéré que cette sévérité était nécessaire
pour assurer la moralisation de la vie publique et protéger les élus. C'est
encore vrai aujourd'hui.
Par ailleurs, alors que le code pénal vient juste d'être mis en oeuvre, il
n'est pas sage de vouloir déjà modifier les règles relatives au délit
d'ingérence - domaine sensible s'il est est - dans un sens plus libéral pour
les élus, et ce en contradiction avec ce que nous avons adopté en 1992.
Cette proposition de loi n'emportant pas leur approbation, loin s'en faut,
tant elle va à l'encontre de l'objectif visé, les sénateurs du groupe
socialiste ne l'adopteront pas.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je souhaite faire quelques commentaires sur l'analyse que
vient de présenter M. Allouche.
Je note tout d'abord, mon cher collègue, que tout votre propos relève en
quelque sorte de l'air du soupçon. Ainsi vous dites que ce débat se nourrit
d'arrière-pensées, de calculs électoraux. De deux choses l'une : soit vous avez
un profond respect pour le débat parlementaire, soit vous estimez que c'est le
calcul électoral qui prédomine dans ce débat, mais alors vous manifestez un
certain mépris pour le Parlement.
Par ailleurs, vous semblez avoir une curieuse conception de l'exercice du
mandat de maire. Lorsque vous participez à des cérémonies de remise de
médailles, par exemple, ne saluez-vous pas l'engagement des 500 000 élus locaux
- et de leurs proches - et des millions de bénévoles qui se trouvent au coeur
des plus belles réussites économiques et qui sont confrontés aux plus grandes
détresses sociales ? Ne soulignez-vous pas à quel point le sacrifice qu'ils
consentent, au détriment de leur vie professionnelle, de leur vie personnelle
et au profit de la collectivité publique est un gage de la bonne respiration
républicaine ?
Monsieur Allouche, puisque vous souhaitiez des indications chiffrées,
permettez-moi de vous indiquer que, sur 1 398 communes propriétaires de terres
agricoles, 400, soit 28,5 %, ont loué des terrains leur appartenant à des élus
après leur élection et 604 en ont loué à des élus avant leur élection.
Il paraît un peu surprenant, ainsi que Mme le garde des sceaux l'a
parfaitement souligné, qu'un maire qui exerce par ailleurs la profession
d'agriculteur et qui a conclu un bail avec sa commune avant son élection soit
accusé de prise illégale d'intérêts lors du renouvellement de ce bail. Voilà en
effet une personne dont la commune estimait, sans doute à juste raison, qu'en
sa qualité d'agriculteur elle devait entretenir le terrain communal, mais qui,
sous prétexte qu'elle a décidé de s'engager au service de sa commune en se
présentant au suffrage de ses concitoyens, est désormais considérée comme se
trouvant en opposition avec l'intérêt de sa commune ! Il y a tout de même là
quelque chose de tout à fait étonnant.
Enfin, monsieur Allouche, vous faites aux élus, en quelque sorte, un procès en
« opacité ». Vous parlez même de « délit d'initié ». Vos propos ont dû dépasser
votre pensée !
Selon le texte actuellement en vigueur, lorsqu'un maire achète une maison ou
contracte un bail avec sa commune, il n'y a pas publicité du prix. Or la
disposition que nous proposons vise précisément à injecter de la transparence
en instituant la publicité de l'estimation du bien par le service des Domaines,
assortie d'un délai qui permet à chacun de savoir que la commune est sur le
point de louer un de ses biens à un élu. C'est une disposition qui concerne
toutes les hypothèses, y compris celles qui sont d'ores et déjà prévues par le
code pénal, et non la seule location de terrains agricoles.
Monsieur Allouche, il faut également tenir compte des réalités de la vie de
tous les jours dans une petite commune. Vous savez aussi bien que moi ce que
peut apporter le monde agricole dans la gestion de la commune. Le maire d'une
commune de vingt-six habitants n'est pas seulement maire : il est aussi un peu
cantonnier, c'est l'homme à tout faire. Souvent, les habitants sont bien
contents de trouver un agriculteur qui prête son tracteur, sa remorque, ses
bras, ses collaborateurs pour apporter bénévolement une amélioration à
l'environnement, à la voirie et, parfois, pour les mettre au service de la
sécurité.
Monsieur Allouche, votre accusation - car vos propos étaient singulièrement
dépourvus de délicatesse - quant à l'opacité des procédures et aux
arrière-pensées des uns et des autres ne pouvait rester sans réponse.
J'ai préféré de beaucoup l'analyse plus mesurée de Mme le garde des sceaux.
Celle-ci a d'ailleurs souligné que d'autres catégories professionnelles
pourraient « légitimement » revendiquer le bénéfice de mesures de même nature.
Le terme « légitimement » est révélateur. Il montre à quel point la situation
dans laquelle nous sommes actuellement n'est pas satisfaisante.
Je suis favorable à ce que la note du groupe de travail soit diffusée. Cela
étant, je relève que, comme le souligne cette note, la Cour de cassation
assimile le renouvellement du bail à la conclusion d'un bail entièrement
nouveau. Par conséquent, le renouvellement du bail pose le problème de la prise
illégale d'intérêts. D'ailleurs, le code rural est très clair à cet égard : « A
défaut de congé, le bail est renouvelé pour une durée de neuf ans. Sauf
conventions contraires, les clauses et conditions du nouveau bail sont celles
du bail précédent. » Le code rural qualifie donc expressément le bail renouvelé
de « nouveau bail ».
C'est pourquoi, si je suis tout à fait favorable à la diffusion de cette note,
je considère que le problème demeure et qu'une proposition de loi doit donc
être adoptée.
Monsieur Allouche, au regard de la bonne respiration démocratique, de la
préservation des intérêts des citoyens et des communes, vous n'avez pas abordé
le débat sous un bon angle. Il ne s'agit pas de protéger les élus contre
eux-mêmes ou contre de quelconques dérapages : il s'agit avant tout de poser
les conditions d'une bonne gestion publique, de garantir l'intérêt de la
commune au regard de son patrimoine et d'assurer une bonne pratique
républicaine.
C'est parce que cette proposition de loi apporte de la transparence,
permettant aux citoyens d'être mieux informés de la gestion des affaires
communales, et parce qu'elle donne aux maires ruraux les moyens de faire vivre
pleinement cette ruralité dont chacun est si fier dans les discours qu'elle
doit être votée.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Serge Vinçon.
Belle connaissance du terroir !
M. le président.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ L'article 432-12 est modifié comme suit :
« I. _ Après les mots : "ou conclure", la fin de la première phrase
du troisième alinéa est ainsi rédigée : "avec la commune des baux
d'habitation pour leur propre logement ou des baux régis par le titre premier
du livre IV du code rural".
« II. _ Il est ajouté
in fine
un alinéa ainsi rédigé :
« Les estimations et évaluations du service des domaines prévues par le
présent article font l'objet d'une publication avant l'autorisation de l'acte
par le conseil municipal. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ L'article L. 411-4 du code rural est complété
in fine
par
un alinéa ainsi rédigé :
« Un contrat de bail entre une commune de 3 500 habitants au plus et le maire,
un adjoint ou un conseiller municipal délégué ou agissant en remplacement du
maire ne peut être autorisé par le conseil municipal qu'à l'expiration d'un
délai de deux mois à compter de la publication de l'estimation des biens
concernés par le service des domaines. La durée de ce bail est de neuf ans. » -
(Adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Dérian, pour explication de vote.
M. Jean Dérian.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ne voteront pas la
proposition de loi présentée par M. Vinçon et rapportée par M. Jean-Paul
Delevoye.
Cette proposition vise à autoriser les élus des communes comptant 3 500
habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux.
Il s'agit en fait d'ouvrir une nouvelle brèche dans le principe du délit
d'ingérence, brèche déjà entrouverte par l'article 432-12 du nouveau code
pénal. Cet article atténuait la sévérité, que nous jugions pourtant nécessaire,
de l'article 175 de l'ancien code pénal, qui ne prévoyait qu'une dérogation en
matière d'ingérence.
Pour résumer, l'article 432-12 du nouveau code pénal autorisait notamment le
transfert de biens ou la fourniture de services, dans la limite de 100 000
francs par an, l'acquisition d'une parcelle d'un lotissement communal pour y
édifier une habitation personnelle ou conclure des baux d'habitation avec la
commune pour son propre logement ainsi que l'acquisition d'un bien communal en
vue d'une activité professionnelle, et ce dans certaines conditions.
Le 23 avril 1992, lors du débat sur le nouveau code pénal, M. Charles
Lederman, alors sénateur du Val-de-Marne et juriste dont la qualité était
largement reconnue sur ces travées, indiquait que les dispositions « du texte
qui nous est proposé peuvent laisser craindre qu'il ne soit porté atteinte à
l'indépendance de la fonction élective. Certes, nous comprenons parfaitement
les problèmes de logement que peuvent rencontrer les maires ou les élus des
petites communes. Néanmoins, il nous semble exclu que les convenances
personnelles interviennent dans la gestion des communes. Il nous apparaît très
important de le souligner à l'heure où la lutte contre la corruption figure
parmi les premiers objectifs du Gouvernement ».
Cette attitude, qui peut paraître stricte, nous semble devoir être maintenue
tant la lutte contre la corruption, contre la confusion des intérêts privés et
de l'intérêt général est, selon nous, toujours d'actualité.
Nous sommes, bien entendu, soucieux des problèmes particuliers qui peuvent
apparaître ici et là. Toutefois, comme le débat l'a montré, ces problèmes sont
extrêmement limités et peuvent être résolus dans le cadre de la législation
actuelle.
Ces quelques cas ne justifieraient donc pas, à notre sens, une remise en cause
nouvelle du principe d'interdiction de l'ingérence, et ce d'autant plus que la
location, objet de la présente proposition de loi, revêt un caractère de longue
durée pouvant créer, durant de nombreuses années, une confusion entre l'intérêt
de l'élu et celui de la commune, alors que l'acquisition autorisée par
l'article 432-12 du nouveau code pénal revêt, elle, un caractère ponctuel.
Comme certains l'ont souligné, la location donnera lieu à une multiplication
des situations d'ingérence car il s'agit d'une procédure moins lourde que celle
de l'acquisition.
Nous ne voterons donc pas cette proposition de loi, car nous n'estimons pas
acceptable, sur le plan des principes démocratiques, à une époque où la
politique est parfois vivement critiquée, qu'un élu puisse être soupçonné de
tirer un profit personnel de sa position élective.
Notre vote a pour objectif de préserver l'élu ainsi que son indépendance et
d'éviter, au nom de la résolution de quelques cas, je le répète, rares, de
jeter une nouvelle fois le soupçon sur ces hommes et sur ces femmes qui, dans
leur immense majorité, sont dévoués à leurs administrés, à leur ville, à leur
village.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain
et citoyen. - Mme Bergé-Lavigne applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche.
J'ai déclaré, voilà quelques instants, que nous ne pouvions pas adopter cette
proposition de loi, mais je profite de cette explication de vote pour tenter de
répondre en partie aux propos tenus par M. le rapporteur.
Monsieur le rapporteur, je ne soupçonne personne ; ce n'est pas dans mes
habitudes. Nous débattons d'un sujet sensible, dans une période sensible, et je
n'ai porté d'accusation à l'encontre de personne. Au contraire, je me suis
efforcé de mettre en garde contre des tentations ou des tentatives de prise
illégale d'intérêts. Je n'accepte donc pas les accusations que vous avez
portées à mon encontre.
Vous parlez de mépris du Parlement. Mais si chaque fois que nous exprimons une
divergence profonde lors d'un débat parlementaire nous méprisons le Parlement,
alors, mes chers collègues, nous le faisons tous ! S'il est un lieu où,
précisément, doivent s'exprimer nos convictions souvent divergentes, c'est bien
le Parlement à moins, monsieur le rapporteur, que vous n'ayez une conception
particulière de cette institution où se formulerait la pensée unique, l'idée
unique. Je ne partage pas cette conception.
Nous vivons en démocratie, et le Parlement est justement, je le répète, le
lieu privilégié de la confrontation d'idées. Permettez-moi, à mon tour, de vous
dire que vos paroles ont sans doute dépassé votre pensée, puisque je vous sais
profondément respectueux à la fois du Parlement et des idées des uns et des
autres.
Il faut bien évidemment rendre hommage au travail des maires - nous le faisons
tous régulièrement - mais prenons le cas des agriculteurs. Je m'interroge :
est-on agriculteur avant d'être maire ou maire avant d'être agriculteur ? Si un
agriculteur devient maire dans l'espoir de tirer profit d'une situation
élective.
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
Cela me paraît dangereux. Pour ce qui me concerne, je ne
peux pas concevoir les choses ainsi. Vous mettez le doigt dans un engrenage
dont vous ne mesurez pas aujourd'hui les conséquences à terme.
Il est toujours question, dans ces cas-là, d'intention louable. Vous entendez
aujourd'hui remédier à la situation actuelle, mais qu'en sera-t-il demain et
après-demain ? Vous l'ignorez.
Monsieur le rapporteur, il est vrai que le monde rural souffre de certains
problèmes. Vous les connaissez, tout comme nous, mais, au nom de la crise
économique et des mesures qui doivent être prises, il ne faut pas tout
mélanger.
Nous examinons un texte qui a trait à la moralisation de la vie publique. Il
faut s'en tenir à la disposition qui a été prévue, lors du débat sur le code
pénal, à propos de la prise illégale d'intérêts car elle préserve les élus. Le
texte que vous soutenez met le doigt dans un engrenage qui peut être un jour
fatal non seulement aux intéressés et aux maires concernés, mais également à
l'ensemble de la démocratie.
M. le président.
La parole est à M. Vinçon.
M. Serge Vinçon.
Monsieur le président, je ne peux pas rester silencieux après les propos qui
viennent d'être tenus. Cette proposition de loi tend à répondre à une question
qui se pose aujourd'hui concrètement dans de nombreuses communes de notre
pays.
Je ne pensais franchement pas, en déposant ce texte, remettre en cause la
démocratie ni mettre le doigt dans un engrenage qui aboutirait aux grandes
affaires que nous connaissons.
J'ai voulu me placer au plan local. Je ne suis pas le seul dans cet hémicycle
à connaître la situation dans nos départements ruraux. Il ne s'agit pas de
grandes affaires ni de grandes exploitations. Dans les plus petites communes de
France, la plupart des exploitants qui exploitent des terres communales se
retrouvent normalement, légitimement au conseil municipal. Faut-il pour autant
qu'ils cessent d'être exploitant agricole et d'exploiter des terres qui
risquent alors de devenir des friches ou de ne plus être entretenues ?
Je comprends bien les grands principes qui ont été évoqués par mes collègues
et auxquels je souscris. Mais n'exagérons pas.
J'ai cité un exemple qui peut apparaître, aux yeux de certains, caricatural.
Dans une petite commune de vingt-six habitants, trois exploitants agricoles
exploitent des terres appartenant à la commune. Ce ne sont ni des truands ni
des tricheurs ; ils entretiennent le patrimoine de la commune, exercent une
activité économique et veulent se dévouer à la cause commune. Il n'y a là rien
de coupable.
Il est vrai qu'il faut mettre des garde-fous. Je tiens, à cet égard, à rendre
hommage au travail accompli par la commission des lois, par la commission qui a
été créée par l'AMF et par le groupe de travail, auquel j'ai d'ailleurs
participé au début, qui a été constitué à la Chancellerie sur ce thème.
Il s'agit de répondre à un problème concret qui soulève des difficultés dans
mon département comme dans d'autres. Des élus ont dû démissionner depuis 1995 ;
d'autres sont aujourd'hui menacés d'être mis en examen. Il faut mettre un terme
à cette situation inconfortable qui ne répond pas pleinement aux exigences de
la démocratie locale, du devenir économique et du développement de nos plus
petites communes.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
J'ai suivi le débat avec beaucoup d'intérêt comme je l'avais d'ailleurs fait
en commission des lois voilà quelque temps. Un argument sur lequel a insisté M.
le rapporteur retient l'attention : il s'agit du renouvellement du bail. Sur ce
point, peut être pourrions-nous le suivre. Il n'est pas normal, en effet, qu'un
exploitant, au motif qu'il devient maire, ne puisse plus continuer de louer les
terres qu'il exploitait.
A entendre votre dernière intervention, monsieur le rapporteur, chacun
pourrait croire que tel est l'objet de la proposition de loi que nous
examinons. Mais ce n'est pas cela du tout ! Elle va beaucoup plus loin. Vous
proposez qu'une personne qui est maire puisse se voir consentir des avantages
dont il sera toujours à craindre qu'elle ne les doive à sa qualité de maire. Or
aucun élu ne doit pouvoir être soupçonné. C'est la raison pour laquelle, comme
l'a parfaitement dit Guy Allouche, nous ne pouvons pas vous suivre et nous
voterons contre ce texte.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
74:
Nombre de votants | 316 |
Nombre de suffrages exprimés | 315 |
Majorité absolue des suffrages | 158 |
Pour l'adoption | 218 |
Contre | 97 |
Le Sénat a adopté.
7
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
M. le président.
Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté une candidature pour
la commission d'enquête chargée d'examiner le devenir des grands projets
d'infrastructures terrestres d'aménagement du territoire.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Roger
Rinchet, membre de la commission d'enquête chargée d'examiner le devenir des
grands projets d'infrastructures terrestres d'aménagement du territoire, en
remplacement de M. Fernand Tardy, démissionnaire.
8
PRESTATION COMPENSATOIRE
EN CAS DE DIVORCE
Discussion des conclusions
du rapport d'une commission
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 20,
1997-1998) de M. Daniel Hoeffel, fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur :
- la proposition de loi (n° 151, 1996-1997) de M. Nicolas About tendant à
modifier les propositions du code civil relatives à la prestation compensatoire
en cas de divorce ;
- la proposition de loi (n° 400, 1996-1997) de MM. Robert Pagès, Michel
Duffour, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mmes Danielle
Bidard-Reydet, Nicole Borvo, MM. Guy Fischer, Pierre Lefebvre, Paul Loridant,
Mme Hélène Luc, MM. Louis Minetti, Jack Ralite, Ivan Renar et Mme Odette
Terrade relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de
divorce.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest,
en remplacement de M. Daniel Hoeffel, rapporteur de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale.
Monsieur le président, madame le garde des
sceaux, mes chers collègues, je dois d'abord excuser notre collègue M. Daniel
Hoeffel, rapporteur de la commission des lois sur les propositions de loi que
nous examinons, car il ne peut, hélas ! être parmi nous.
La commission des lois s'est interrogée sur l'opportunité de l'adoption, par
le Sénat, d'une proposition de loi relative à la prestation compensatoire en
matière de divorce. On pouvait effectivement se demander s'il n'était pas plus
logique d'attendre qu'une réforme plus globale de la loi sur le divorce puisse
être engagée. La commission a toutefois estimé que le législateur ne pouvait
ignorer plus longtemps certaines conséquences négatives des dispositions
relatives à la prestation compensatoire en matière de divorce qui figurent
aujourd'hui dans le code civil.
En 1986, le Sénat avait abordé cette question à l'occasion de l'examen d'une
proposition de loi issue de l'Assemblée nationale qui ne l'a pas, jusqu'à
présent, inscrite à son ordre du jour pour une deuxième lecture. Il nous a donc
semblé que les difficultés constatées après vingt ans d'application de cet
aspect de la loi de 1975 justifiaient que le législateur intervienne sans
attendre une réforme globale de la procédure de divorce.
Depuis la loi de 1975 portant réforme du divorce, la pension alimentaire entre
époux a été remplacée par une prestation compensatoire, même si certains
regrettent cette modification. La pension alimentaire ne subsiste que dans les
cas de divorce pour abandon du domicile conjugal. Selon l'article 270 du code
civil, la prestation compensatoire a pour objet de « compenser, autant qu'il
est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions
de vie respectives ».
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Dans la rupture de la vie commune !
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
En principe, cette prestation revêt, en vertu de l'article
273 du code civil, un caractère forfaitaire. Le législateur a prévu comme moyen
de paiement principal le versement d'un capital. Toutefois, l'article 276 du
code civil prévoit, à titre subsidiaire, que la prestation compensatoire peut
prendre la forme d'une rente. En fait, cette modalité subsidiaire est devenue
la règle, les magistrats optant dans la plupart des cas pour un versement
périodique sans référence à un capital et dont la durée n'est pas toujours
fixée.
Cette préférence pour la rente s'explique sans doute par les habitudes des
juges et des parties, par la composition des patrimoines, mais également par
des considérations fiscales. En cas de versement d'un capital en effet,
l'imposition est celle des mutations à titre gratuit. Ainsi, au-delà d'une
franchise de 330 000 francs, les droits progressent de 5 à 40 %.
Par ailleurs, l'une des caractéristiques de la prestation compensatoire est
d'être très difficilement révisable. L'article 273 du code civil prévoit
qu'elle ne peut être révisée que si l'absence de révision devait avoir pour
l'un des conjoints des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
A l'heure actuelle, les juges modulent souvent le montant et la durée de la
prestation en fonction de la durée du mariage, de l'âge des conjoints et de
leurs perspectives professionnelles, mais ces précautions ne suffisent pas à
éviter certaines situations difficiles quand interviennent des changements
importants dans la situation de l'une ou l'autre des parties. En effet, les
juges appliquent l'article 272 du code civil, mais un certain nombre de choses
n'ont pas été prévues, dont il convient de tenir compte aujourd'hui.
Les propositions de loi déposées, d'une part, par M. About et, d'autre part,
par M. Pagès et plusieurs de ses collègues, visaient toutes deux à permettre
l'assouplissement des conditions de révision de la prestation compensatoire
lorsqu'elle prend la forme d'une rente. La proposition de loi de M. About
tendait, en outre, à limiter à dix ans la durée de la rente et à supprimer le
report de la charge de la rente sur les héritiers du débiteur.
Au cours de sa réunion du 8 octobre 1997, la commission des lois, sur le
rapport de M. Hoeffel, a adopté un texte composé de quatre articles.
L'article 1er prévoit l'assouplissement des modalités de révision de la rente,
cette dernière pouvant être révisée « en cas de changement substantiel dans les
ressources ou les besoins des parties ».
L'article 2 dispose que le juge fixe la durée de la rente. La commission a
estimé préférable de ne pas déterminer dans la loi un plafond pour cette durée
et d'en laisser la libre appréciation au juge.
L'article 3 tend à faciliter le versement de la prestation compensatoire sous
forme d'un capital, en atténuant ses conséquences fiscales par le doublement de
l'abattement prévu par le code général des impôts pour les droits de mutation à
titre gratuit.
Enfin, l'article 4 prévoit l'application de ces nouvelles dispositions aux
rentes en cours. Naturellement, les demandes de révision éventuelles ne
vaudront que pour les arrérages futurs de la rente et ne sauraient remettre en
cause les versements effectués antérieurement à l'entrée en vigueur de la
loi.
La commission a décidé de maintenir la transmission de la dette aux héritiers,
telle qu'elle est prévue à l'article 276-2 du code civil, car elle est conforme
au droit commun. Dès lors que l'on facilite la possibilité de révision, il
convient de maintenir cette règle commune qui figure dans la loi de 1975.
La commission a été saisie d'un certain nombre d'amendements qui émanent,
notamment, du Gouvernement. Ceux qui visent à améliorer les propositions de la
commission des lois seront accueillis favorablement. S'agissant des autres,
nous aurons l'occasion d'en débattre. L'examen des articles permettra de
vérifier la concordance entre la position du Gouvernement et celle de la
commission.
(Applaudissements sur le bancs des commissions.)
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président,
mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat a souhaité inscrire à son ordre du
jour la proposition de loi de M. Nicolas About et celle de M. Robert Pagès, au
nom du groupe communiste républicain et citoyen, qui tendent à permettre de
réviser la prestation compensatoire allouée en cas de divorce.
Dans son principe, cette initiative recueille mon approbation.
En effet, nul ne conteste que des aménagements doivent être apportés au
dispositif en vigueur en raison de l'évolution, depuis 1975, de la situation
économique et sociale. Par ailleurs, cette réforme peut être conduite en marge
de la réflexion d'ensemble que j'ai décidé d'engager concernant le droit de la
famille.
Mais la marge de manoeuvre est étroite, car il ne saurait être question de
remettre en cause la philosophie de la réforme de 1975, et la commission des
lois du Sénat est d'ailleurs la première à en convenir.
C'est dans cet esprit qu'elle propose une adaptation sur trois points du
dispositif en vigueur.
Le premier concerne la possibilité de réviser la prestation compensatoire
versée sous forme de rente en cas de changement substantiel dans les besoins et
les ressources des parties.
Le deuxième a trait à la fixation de la durée de la rente en considération de
critères caractérisant la situation particulière du couple.
Le troisième consiste à aménager la fiscalité applicable à la prestation
allouée en capital.
Cependant, je ne suis pas certaine que ces modifications apportent toutes les
réponses nécessaires à l'adaptation du régime de la prestation compensatoire
qui, il est vrai, est attendue, plus de vingt ans après le vote de la loi du 11
juillet 1975.
C'est pourquoi le Gouvernement vous propose d'adopter une démarche quelque peu
différente.
Il faut en effet, à mes yeux, répondre à un double objectif : d'abord,
privilégier et faciliter le paiement de la prestation compensatoire au moment
même du prononcé du divorce,...
M. Nicolas About.
Très bien !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
... et, ensuite, circonscrire la faculté nouvelle de
révision de celle-ci aux situations les plus graves.
Je souhaite maintenant m'expliquer sur ce point.
Comme l'a fort justement souligné la commission, les principes qui ont guidé
le législateur de 1975 dans l'instauration de la prestation compensatoire ont
été battus en brèche dans les faits.
L'idée de départ, pourtant, était excellente : il s'agissait de mettre fin au
mécanisme des pensions alimentaires entre époux divorcés, dont les conséquences
néfastes étaient avérées.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Pas du tout !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
La possibilité de prendre en compte l'attribution des
torts pour l'allocation et la révision des pensions alimentaires a en effet
généré un contentieux important, exacerbant les passions et laissant aux époux
le sentiment de ne pouvoir clore définitivement une union qui s'est soldée par
un échec.
A notre époque où les difficultés économiques et sociales influent fortement
sur la situation des couples qui se défont et où se développent les familles
recomposées, il est plus que jamais nécessaire de régler, dans toute la mesure
possible, bien entendu, les effets pécuniaires du divorce au moment de son
prononcé.
La prestation compensatoire répond à cet objectif, puisque, aux termes de
l'article 270 du code civil, elle vise à compenser la disparité que la rupture
du mariage crée dans les conditions de vie respectives des ex-époux.
De là découlent un certain nombre de règles auxquelles la prestation est
soumise : son fondement est indemnitaire, elle est forfaitaire, elle n'est pas
révisable et elle est en principe attribuée sous forme de capital.
Cependant, la majorité des couples ne disposent pas de biens suffisants pour
permettre le versement d'un capital, et en auraient-ils que l'opération est
dissuasive sur le plan fiscal.
Aussi le législateur de 1975 a-t-il dû prévoir que, à titre subsidiaire, le
débiteur de la prestation pouvait s'en acquitter sous forme de rente. Dans un
souci de réalisme, le législateur a été conduit à opérer un certain
rapprochement entre la prestation compensatoire et les anciennes pensions
alimentaires.
C'est ainsi que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins du
créancier et les ressources du débiteur, c'est l'article 271 du code civil.
Elle est indexée « comme en matière de pension alimentaire » et peut varier par
périodes successives suivant l'évolution probable des ressources et des besoins
des intéressés, c'est l'article 276-1. Elle peut, dans les divorces sur requête
conjointe, est révisée en cas de changement imprévu dans la situation des
époux, dès lors que ces derniers en ont prévu la possibilité, c'est l'article
279. Elle peut également, dans les autres divorces où elle est susceptible
d'être allouée, être révisée si le maintien de son montant initial devait avoir
pour l'un des conjoints des conséquences d'une exceptionnelle gravité, c'est
l'article 273. Enfin, elle ne peut bénéficier à l'époux aux torts exclusifs
duquel le divorce est prononcé, c'est l'article 280-1.
Ce sont autant de caractéristiques qui, vous en conviendrez, empruntent à la
pension alimentaire.
La pratique elle-même a d'ailleurs accentué la ressemblance en s'écartant à
certains égards de l'esprit de la loi de 1975.
Ainsi, la démarche n'a pas toujours été faite de rechercher si l'allocation
d'un capital était possible.
La prestation compensatoire sous forme de rente a été privilégiée. En 1994,
parmi les prestations compensatoires, 60,3 % prenaient la forme d'une rente,
près de 4 % celle d'une rente ajoutée à un capital et seulement 20 % celle d'un
capital pur.
Enfin, si le législateur de 1975 n'a pas entendu exclure les rentes viagères,
leur usage devait, dans son esprit, rester limité afin de ne pas faire perdurer
les effets patrimoniaux du divorce. Or nombreuses ont été, au lendemain de la
réforme, les rentes à vie. En 1994, celles-ci représentaient encore près de 31
%.
Aussi n'est-il pas surprenant que les conjoints eux-mêmes aient vu dans la
rente une simple pension alimentaire soumise, dans leur esprit, aux
fluctuations des besoins et des ressources de chacun d'eux.
C'est pourquoi la jurisprudence de la Cour de cassation, faisant une stricte
interprétation de l'article 273 du code civil, n'a généralement pas été
comprise par les intéressés.
La perte d'un emploi, la mise à la retraite, la maladie, le remariage de
l'époux créancier avec un conjoint fortuné ne constituent pas nécessairement
des événements impliquant que le maintien de la prestation initiale aurait des
conséquences d'une exceptionnelle gravité. D'où un taux de rejet des demandes
de révision atteignant près de 54 %. Telle est la situation dans laquelle nous
nous trouvons actuellement.
Lorsqu'un décalage entre les attentes du corps social et les dispositions d'un
texte de loi se développe de cette façon, il est temps de s'interroger - c'est
ce que vous avez fait - sinon sur la pérennité même de celles-ci, du moins sur
les adaptations dont elles pourraient faire l'objet.
Depuis un certain nombre d'années, plusieurs propositions de loi ont été
déposées tendant à réformer plus ou moins en profondeur le dispositif de 1975.
Celles dont nous discutons aujourd'hui entendent s'inscrire dans une démarche à
la fois ponctuelle et mesurée.
Je crains néanmoins que les propositions formulées ne permettent ni d'encadrer
suffisamment le mécanisme de révision proposé ni, d'une manière plus générale,
de tendre réellement à apurer les relations financières des époux au moment où
ils se séparent.
La commission des lois souhaite permettre désormais la révision de la
prestation compensatoire en cas de changement substantiel dans les ressources
ou les besoins des parties et entend modifier en ce sens l'article 273 du code
civil.
Si l'assouplissement de l'accès à la révision ainsi proposé est de nature à
permettre au juge de mieux individualiser la situation des couples, je crains
cependant que la formulation retenue ne soit à l'origine de plus de questions
que de réponses.
Le qualificatif « substantiel » me semble en effet impropre à préserver la
révision de la prestation compensatoire des errances qu'ont connues les
anciennes pensions alimentaires.
Il est probable que l'on discute sans fin sur ce qu'est ou non un changement
financier « substantiel ». Est-ce une diminution de 30 %, de 50 % ou de 70 %
des ressources ? A l'inverse, quel niveau d'augmentation de salaire retenir ?
Qu'en est-il du remariage ? Voilà autant d'interrogations propres à engendrer
l'insécurité juridique.
Un écueil doit être évité : celui de laisser penser que le principe actuel est
désormais renversé et que la révision redevient la règle. Tout débiteur voyant
ses ressources varier à la baisse aussi peu que ce soit trouve sa charge trop
lourde et souhaite la voir alléger. Actuellement, et malgré les termes
extrêmement restrictifs de l'article 273 du code civil, le taux d'appel des
débiteurs insatisfaits atteint 60 %, ce qui constitue un record.
Qu'en sera-t-il alors demain avec la rédaction retenue par la commission des
lois ?
Contrairement à ce qui est suggéré dans le rapport de la commission, la
révision de la prestation compensatoire ne doit à mon avis pas cesser d'être
une exception. Ce sont les situations les plus graves qu'il convient de prendre
en compte.
C'est pourquoi le Gouvernement a déposé un amendement tendant à circonscrire
plus clairement la faculté de révision désormais ouverte. Celle-ci doit être
subordonnée à un changement non seulement important, mais encore imprévu dans
la situation financière respective des parties, et sa mise en oeuvre doit
rester exceptionnelle.
Ce triple critère que je vous propose d'introduire dans la nouvelle rédaction
de l'article 273 du code civil me paraît plus à même de prévenir les querelles
d'interprétation et les divergences jurisprudentielles que la formulation
retenue par la commission des lois.
Je crois également nécessaire d'être plus directif que la commission dans la
fixation de la durée de la rente lorsque la prestation compensatrice emprunte
cette forme.
La commission s'est longuement interrogée sur la question de la
transmissibilité de la charge de cette rente aux héritiers du débiteur. Je le
comprends, et j'ai moi-même beaucoup hésité.
Le principe, en droit français, est que les dettes se transmettent aux ayants
droit du défunt, sauf lorsqu'elles ont un caractère personnel. Tel était le cas
de la pension alimentaire.
Le fondement indemnitaire de la prestation compensatoire milite pour la
solution inverse.
Néanmoins, le propre de la prestation compensatoire est de remédier à la
disparité que la rupture provoque dans les conditions de vie respectives des
époux, considération proprement personnelle à ces derniers.
C'est pourquoi il m'apparaît en définitive que le caractère au maximum viager
de la rente devrait en principe prévaloir, même si, dans un souci
d'individualisation des situations, il semble opportun de laisser au juge et
aux époux, en cas de divorce par requête conjointe, la faculté d'en décider
autrement.
Le Gouvernement vous propose de modifier en ce sens l'article 2 de la
proposition de loi.
J'en viens maintenant aux mesures complémentaires qu'il me paraît souhaitable
d'insérer dans le texte afin de conforter l'objectif du législateur de 1975 de
mettre un terme au contentieux pécuniaire de l'après-divorce entre époux.
A dire vrai, je me suis longuement interrogée sur l'ampleur que devaient
revêtir ces mesures.
La logique de la réforme de 1975 devrait conduire à imposer un règlement
d'ensemble de tous les problèmes financiers entre époux au moment du divorce.
Je pense à la liquidation du régime matrimonial qui n'est opérée à cette date
que dans la procédure sur requête conjointe. Je pense également au sort des
donations et autres avantages pécuniaires, qui n'est pas davantage figé lors de
la rupture du lien matrimonial.
Mais une telle réforme implique une véritable refonte de pans entiers de notre
droit patrimonial de la famille et ne peut à l'évidence se faire sans un examen
approfondi qui retarderait d'autant les modifications dont le régime de la
prestation compensatoire - je suis d'accord avec vous sur le principe - doit
faire l'objet.
Le Gouvernement, vous le savez, a décidé d'entreprendre une réflexion générale
sur les adaptations que l'évolution de la famille nécessite dans notre droit.
Une mission vient d'être confiée par Mme la ministre de l'emploi et de la
solidarité et par moi-même à Mme Irène Théry, sociologue du droit, spécialiste
de la famille et de la vie privée. Son rapport, les travaux menés par la
commission présidée par le professeur Hauser, constituée dans le cadre du
groupement d'intérêt public « Recherche Droit et Justice », et la mise en place
de groupes de travail plus spécialisés permettront de mettre en oeuvre des
réformes d'ensemble.
Mais, dans l'immédiat, il m'apparaît que peuvent être détachés de cette
réflexion d'ensemble un certain nombre d'aménagements propres à conforter le
caractère forfaitaire de la prestation compensatoire voulu par le législateur
de 1975.
Les dispositions qu'il vous est proposé d'introduire forment un tout cohérent
destiné à faciliter le versement de la prestation en capital et, lorsque cette
modalité de paiement n'est pas praticable, à limiter dans toute la mesure du
possible la durée de la rente.
C'est ainsi que je crois tout d'abord nécessaire de prévoir que, lorsque le
juge entend écarter le paiement en capital, il lui appartient de motiver
spécialement sa décision.
Dans la même optique, le débiteur de la rente doit pouvoir en demander à tout
moment la capitalisation.
Enfin, il paraît souhaitable d'assouplir les formes que peut présenter le
versement en capital afin de le rendre plus attractif.
S'agissant du versement de la prestation compensatoire sous forme de rente, le
principe du caractère temporaire de celle-ci me paraît devoir être affirmé.
Certes, un tel principe ne saurait être absolu et le juge doit avoir la
latitude d'en disposer autrement. Mais si son choix se porte sur une rente
viagère, sa décision devra faire l'objet d'une motivation spéciale.
Enfin, et dans le souci de diversifier les modalités de versement, la rente
doit pouvoir faire l'objet, comme le réclament les praticiens, d'un terme
extinctif, tel que la mise à la retraite du débiteur, ou d'une condition
résolutoire, comme le remariage du créancier.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales dispositions
qui me paraissent utilement compléter la proposition de loi que vous examinez
aujourd'hui tout en respectant les préoccupations qui ont animé ses auteurs.
Parce que ces aménagements participent du souci de rechercher, dans l'intérêt
même des parties, un équilibre entre la possibilité nouvelle de révision de la
prestation compensatoire et l'objectif essentiel de ne pas ressuciter le
contentieux pécuniaire entre époux, le Sénat, je pense, ne restera pas
insensible à la démarche du Gouvernement.
En proposant une réforme de la prestation compensatoire, le Sénat a montré sa
préoccupation d'adapter un aspect essentiel de notre droit de la famille aux
réalités économiques et sociales contemporaines et d'aider nos concitoyens à
surmonter cette épreuve que constitue toujours l'échec d'une vie
matrimoniale.
Cette préoccupation, je la partage pleinement : elle constitue, je le
rappelle, l'un des axes essentiels de mon plan de réforme de la justice.
Aujourd'hui, les propositions de MM. les sénateurs About et Pagès, que la
commission des lois a synthétisées avec la qualité qu'on lui connaît, vont nous
permettre de franchir une première étape. D'autres étapes viendront. J'espère
que nous les poursuivrons ensemble.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur
les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. About applaudit
également.)
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je
constate d'emblée avec beaucoup de satisfaction que le Gouvernement n'est pas
insensible aux préoccupations du Parlement... Voilà des problèmes qui se posent
depuis vingt-trois ans.
Le Sénat avait déjà examiné en première lecture, il y a plus de dix ans, une
proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, sur l'initiative de
notre ami Jean-Pierre Michel. Mais ce texte n'ayant jamais été inscrit à
l'ordre du jour pour une deuxième lecture, nous n'avons donc jamais eu à
l'examiner de nouveau. Il convient par conséquent de se féliciter des
initiatives de nos collègues Robert Pagès et Nicolas About, grâce auxquelles le
problème de la prestation compensatoire en matière de divorce se retrouve posé
devant le Parlement.
Si la perspective d'une réforme d'ensemble est satisfaisante, vous avez
néanmoins raison, madame la garde des sceaux, de ne pas nous demander
d'attendre, pour traiter de la prestation compensatoire, la fin de la réflexion
générale qui a été engagée. En effet, comme le rappelait tout à l'heure Guy
Allouche, le mieux est l'ennemi du bien. C'est donc maintenant qu'il faut
prendre des mesures simples pour éviter des situations souvent extrêmement
pénibles.
Je suis parfaitement d'accord avec nombre de vos réflexions, madame la garde
des sceaux, et en particulier avec votre analyse de l'évolution de la situation
avant 1975 et depuis 1975, comme avec celle des textes. En revanche, je ne
partage pas votre sévérité envers le système de la pension alimentaire, qui
avait une qualité rare : une parfaite souplesse.
Ce système permettrait en effet de revenir à tout moment devant le juge, dès
lors qu'était intervenue une modification dans les besoins de l'un ou dans les
possibilités de l'autre.
Le fondement juridique de la pension était l'engagement pris, l'article 212 du
code civil stipulant que « les époux se doivent mutuellement fidélité, secours,
assistance ». L'un des deux époux, dès lors qu'il avait rompu le contrat,
devait une pension alimentaire si l'autre en avait besoin.
Ce système était tout à fait acceptable à la réserve près que, dès lors qu'il
y avait faute, aucune pension alimentaire n'était plus octroyée, et ce même si
l'époux se trouvait dans le besoin, ce qui était chèrement payer un manquement
au contrat !
Bien sûr, il fallait revenir devant le juge, qui appréciait s'il y avait ou
non une modification suffisante des besoins ou des possibilités - il le faisait
même si le terme « substantielle » ne figurait pas dans le texte - pour que la
pension soit elle-même modifiée ou non dans un sens ou dans l'autre. C'était
parfait.
Or, en 1975, est intervenu le changement de législation, la prestation
compensatoire remplaçant le plus souvent la pension alimentaire sur un
fondement nouveau : régler le problème une fois pour toutes, tout en veillant à
éviter que ne s'instaure du fait du divorce une trop grande disparité dans les
conditions de vie des époux.
Si l'idée était bonne, elle est malheureusement impossible à mettre en
pratique : on ne peut en effet pas régler les problèmes une fois pour toutes,
d'autant plus que, en raison du développement du chômage, certaines personnes
tenues au versement d'une prestation compensatoire n'arrivent plus à payer
cette dernière, alors que d'autres, qui ne perçoivent pas ou plus de prestation
compensatoire, ne parviennent plus à vivre faute de trouver du travail. La
situation économique a, à l'évidence, joué un grand rôle dans l'échec,
aujourd'hui patent, de la prestation compensatoire.
Madame le garde des sceaux, vous avez dit vous-même que l'on avait voulu
supprimer la pension alimentaire au profit d'un autre système, mais que,
finalement, la logique reprenant ses droits, on en était revenu à quelque chose
qui ressemblait beaucoup à la pension alimentaire. Règler les questions une
fois pour toutes n'est possible qu'en prévoyant l'évolution des choses : or il
n'est pas possible de tout prévoir !
La loi prévoit que la règle, en matière de prestation compensatoire, est le
versement d'un capital mais nombreux sont ceux qui n'ont pas la possibilité de
verser un capital !
J'ai lu dans les motifs de l'un de vos amendements, madame le garde des
sceaux, que le paiement en capital doit rester la règle. Mais, vous l'avez
parfaitement dit, la règle, en pratique, c'est, au contraire, une rente. C'est
dans la logique des choses !
Notre ami Jean-Pierre Michel avait fait observer que, si l'on capitalisait les
rentes telles qu'elles sont ordonnées et payées, on atteignait des sommes d'une
importance extraordinaire, et qu'il fallait donc fixer le montant du capital,
dans tous les cas, de manière que les débirentiers ne finissent pas par payer
infiniment trop. Mais la prestation compensatoire n'est pas révisable.
Ce qui est tout de même incroyable, alors que le but est de compenser les
disparités de revenus résultant de la dissolution du mariage, c'est que le
résultat, en cas de modifications importantes de la situation de chacun des
époux, peut être une disparité inversée de ce qu'elle était au moment du
divorce : ainsi l'époux qui avait largement les moyens de donner de l'argent à
son ex-conjoint pour lui maintenir son niveau de vie peut, au bout d'un certain
temps, se trouver dans l'impossibilité de le faire, alors que l'ex-conjoint, au
contraire, s'est entre-temps, par remariage ou autrement, fait une situation
florissante. Ainsi, ce dernier continue à toucher des fonds de quelqu'un qui en
a beaucoup moins que lui ! Il n'est évidemment pas pensable de laisser perdurer
cette situation !
C'est tellement vrai que l'on porte atteinte au principe - qui est qu'il n'y a
pas possibilité de révision, que la prestation compensatoire est forfaitaire -
en cas d'« exceptionnelle gravité ». On en est ainsi revenu à la notion de
pension alimentaire, elle, révisable.
Seulement, la jurisprudence - elle n'est pas en cause, elle a appliqué les
textes - a constaté qu'une « exceptionnelle gravité » est, c'est l'évidence,
extrêmement rare. Dans la plupart des cas, elle refuse donc toute révision.
D'où des situations extrêmement pénibles.
Tout le monde est d'accord ici pour dire qu'il faut rendre la révision plus
facile.
Certains font valoir qu'il en résultera un travail accru pour les magistrats,
comme c'était le cas avec la possibilité de réviser les pensions alimentaires,
travail que le système de la rente était censé alléger. Certes, mais ce n'est
pas là une bonne manière de voir les choses. Ce qu'il faut, bien entendu, c'est
qu'il y ait une justice ; et la justice, c'est que la prestation compensatoire,
si on la garde - je ne sais d'ailleurs pas pourquoi on s'escrime à vouloir la
garder, mais on verra cela plus tard, dans le cadre de la réforme générale -
puisse être révisée lorsque c'est nécessaire.
Autre problème : cette prestation doit-elle être transmissible aux héritiers ?
Il serait normal qu'une dette soit transmissible. Oui, sauf si l'on considère
qu'une prestation compensatoire révisable est assimilable à une pension
alimentaire !
La pension alimentaire présentait en effet l'avantage de disparaître avec le
décès, avec, bien entendu, pour le survivant, la possibilité de demander une
aide alimentaire à ceux qui y sont tenus par la loi.
Sur ce point, je suis en désaccord avec la commission. En effet, cela me
choque que l'on puisse demander aux enfants, particulièrement s'ils sont d'un
autre lit, ou à la veuve de continuer à payer. J'aimerais mieux que l'on s'en
remette au système ancien, c'est-à-dire à l'aide alimentaire, qui ne peut être
demandée qu'aux uns et pas aux autres, et seulement si l'intéressé est dans le
besoin. Car c'est un faux problème, je le répète, de dire que, du moment où
c'est une dette, il y a prestation compensatoire, il y a dette à laquelle tout
héritier est tenu. Il suffit que la loi dise, en l'espèce, le contraire.
Car, comme vous le savez très bien, cette prestation compensatoire est
redevenue, en vérité - elle ne peut pas être autre chose - une pension
alimentaire - c'est une pension alimentaire déguisée - ne vous arrêtez pas aux
termes « prestation compensatoire » et considérez qu'il n'est pas normal,
finalement, que son paiement soit transmissible et donc payable par les
héritiers, quels qu'ils soient et dans tous les cas.
Il est bon que cette discussion s'ouvre. J'espère qu'elle se poursuivra
rapidement devant l'Assemblée nationale. En effet, s'il reste un important
travail parlementaire à faire pour peaufiner les nouveaux textes, il y a aussi
urgence, et je suis obligé de constater que c'est parce que le Parlement peut
dorénavant inscrire à son ordre du jour des propositions de loi qu'il y a
maintenant cet espoir de voir rapidement apportées les solutions indispensables
à des problèmes qui se posent depuis trop longtemps.
(Applaudissements sur
les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. About.
M. Nicolas About.
Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, à
l'heure où les autorités des Yvelines, autour du préfet, rendent hommage à
Claude Erignac, je souhaite, en tant que parlementaire de ce département,
m'associer très officiellement, du haut de cette tribune, à cet hommage.
J'en viens à notre sujet.
Lorsqu'une loi est mauvaise, il ne faut pas hésiter à la réformer, ses
intentions premières fussent-elles parfaitement louables.
Dans un souci d'équité, le législateur de 1975 avait souhaité pallier la
disparité de revenus que pouvait engendrer un divorce entre deux époux en
instaurant une prestation compensatoire.
Comme son nom l'indique, cette prestation versée par le conjoint le plus
fortuné à son ex-époux devait servir à compenser autant que possible le
préjudice financier que pouvait constituer pour le conjoint le plus démuni la
rupture de la vie commune.
Le juge, au regard d'un certain nombre de critères - l'âge, la situation
professionnelle, la durée du mariage, etc. - devait s'ériger en prophète pour
fixer le montant de cette indemnité forfaitaire, en évaluant les ressources et
les besoins des ex-époux « dans un avenir prévisible ». La tâche ne semblait
pas alors trop ardue puisqu'il suffisait de tenir compte de l'évolution normale
d'une carrière professionnelle qui ne présentait guère de surprises, il y a
vingt ans.
La situation, aujourd'hui, a bien changé. L'instabilité qui règne sur le monde
du travail ne permet plus de prédire avec justesse ce que l'avenir réserve à
deux personnes qui se séparent. Et il n'est pas rare de voir se produire, avec
la montée du chômage dans toutes les catégories sociales, les véritables
retournements de situation dont parlait M. Dreyfus-Schmidt à l'instant, où le
conjoint qui semblait pourtant le mieux armé financièrement au moment du
divorce tombe dans une grave précarité. Cette précarité ne l'exempte pourtant
pas de continuer à payer une rente à son ex-conjoint beaucoup mieux loti que
lui. Devant une telle instabilité socio-économique, la rigidité qu'impose la
loi de 1975 en matière de prestation compensatoire est devenue obsolète. Pis,
elle est devenue, à son corps défendant, source d'injustices sociales.
Cette rigidité n'a pas échappé à la vigilance de la commission des lois, qui a
souhaité, sur l'une de mes propositions ; introduire plus de souplesse. C'est
dans cet esprit que je reprendrai les trois grands axes de la réforme qu'il me
paraît urgent de réaliser : l'assouplissement des modalités de révision de la
rente, sa limitation dans le temps, son intransmissibilité aux héritiers.
Premier axe, donc, l'assouplissement des modalités de révision.
Comme l'a rappelé M. le rapporteur, le principe même de la prestation
compensatoire était de régler une fois pour toutes les différends pécuniaires
entre les ex-époux, afin de limiter dans le temps les effets néfastes du
divorce.
La règle générale était d'instaurer entre le débiteur et le créancier un
versement en capital. A titre exceptionnel, la prestation pouvait prendre la
forme d'une rente. La pratique judiciaire - vous l'avez rappelé, madame le
ministre - a, hélas ! détourné la lois de 1975 puisque le versement sous forme
de rente ou sous une forme qui peut s'apparenter à une pension alimentaire est
devenu la règle générale - plus de 80 % des cas - et le capital, l'exception -
seulement 20 % des cas.
Comment expliquer cette dérive ?
D'abord, par des dispositions fiscales aberrantes qui privilégient,
aujourd'hui, le versement d'une rente plutôt que d'un capital ; la rente est
déductible, chaque année, du revenu du débirentier, alors que le versement en
capital, même en trois annuités, est soumis à la même imposition que les
donations. Je m'inscris donc très clairement en faveur des mesures fiscales
proposées par la commission des lois, et qui consistent à doubler l'abattement
fiscal lorsque la prestation est versée en capital, même si cette disposition
est peut-être encore insuffisante.
La deuxième explication à cette dérive - je crains, hélas ! que les facilités
fiscales annoncées ne fassent qu'en atténuer les effets sans les régler
totalement - c'est la précarité des capitaux personnels, qu'il est bien
difficile, en cette période de chômage, de mobiliser lors du prononcé du
divorce, divorce qui - faut-il le rappeler ? - est toujours source
d'appauvrissement pour le couple qui se sépare.
Souvent mal informé des conséquences d'un tel choix, l'époux débiteur, quand
on lui offre le choix, opte pour le versement d'une rente à son ex-conjoint,
pensant ainsi préserver son capital dans l'hypothèse d'une nouvelle
installation, voire d'un remariage.
La troisième explication à cette dérive, c'est peut-être, de la part de
certains, la volonté de punir à vie l'un des époux en établissant des liens
financiers avec son ex-époux. Divorcer serait-il donc devenu un crime si grave
pour se voir infliger non pas une peine de sûreté de trente ans, non pas la
perpétuité, mais la transmissibilité de la peine ?
La quatrième explication réside sans doute dans la confusion, dans l'esprit
des juges, entre la prestation compensatoire et la pension alimentaire. A
partir du moment où le versement de la rente est devenu la règle, l'étalement
dans le temps des effets du divorce a peu à peu fait perdre à la prestation
compensatoire son caractère indemnitaire pour prendre une dimension
alimentaire.
Cette assimilation de la prestation à la pension alimentaire était l'un des
écueils tant redoutés de la loi de 1975. Il n'a malheureusement pas pu être
évité, tant les juges, habitués au régime de la pension alimentaire, tendaient
à y faire référence dans le calcul de la prestation.
A partir du moment où la prestation compensatoire prend une dimension
alimentaire, il devient difficile de rester inflexible sur le chapitre de la
révision.
Cessons de croire que le versement d'un capital et le versement d'échéances
étalées dans le temps sont équivalents. Le temps introduit des changements
importants dans la situation initiale des époux, qui sont difficilement
prévisibles pour un juge. La réalité, nous le savons, dépasse souvent la
fiction.
C'est, par exemple, le cas d'un retraité dont les ressources ont chuté et qui
doit continuer à verser une prestation - équivalant à 49 % de ses revenus - à
son ex-épouse pourtant remariée avec un P-DG ! Ce type de situations est
monnaie courante, et pourtant elles ne relèvent pas, comme on l'a dit, du
critère d'« exceptionnelle gravité », qui permettrait d'ouvrir une procédure en
révision.
Une importante baisse des revenus due au chômage, à une maladie ou à un départ
à la retraite ne constitue pas une cause suffisante pour une demande en
révision. Pis, il existe des disparités d'appréciation entre les juges pour
juger du degré de gravité recevable pour une révision : ainsi, le chômage est
apparu tantôt comme insuffisant, tantôt comme recevable, suivant les tribunaux.
A tel point qu'une spécialiste du droit de la famille a récemment qualifié de «
loterie judiciaire » les procédures en révision des prestations
compensatoires.
Soyons clairs : l'étroitesse des critères de révision, qui devait mettre fin,
dans l'esprit de 1975, au contentieux entre les ex-époux, est devenue, avec le
temps, source d'injustices et de nouvelles rancoeurs. Au lieu de régler
définitivement les effets néfastes du divorce, la rente compensatoire n'a fait
que les prolonger, en remplaçant des liens affectifs rompus par des liens
financiers perpétuels et indénouables. A la lumière de ces exemples, il me
paraît urgent d'ouvrir les possibilités de révision de la rente, et ce dans les
deux cas de figure suivants.
Premier cas de figure, en cas de changement « négatif », lorsque la rente
devient difficile à honorer pour le débiteur, pour cause de baisse
substantielle de son niveau de vie. C'est le cas, notamment, du chômage ou d'un
départ à la retraite. Nous devons en effet considérer que, si le mariage avait
perduré, le conjoint aurait de toute façon connu une baisse de revenus, si son
époux s'était retrouvé au chômage ou à la retraite.
Second cas de figure, en cas de changement positif, lorsque la prestation
compensatoire n'est plus nécessaire pour le créancier, en raison d'une
élévation importante de ses revenus. C'est notamment le cas lorsque survient un
héritage ou un remariage.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Pas toujours !
M. Nicolas About.
Mais c'est possible !
J'irai même plus loin : je m'inscris en faveur d'une suppression automatique
de la prestation compensatoire en cas de remariage ou de concubinage notoire du
créancier.
A partir du moment où le créancier contracte une nouvelle union, le lien de
solidarité qui existait entre lui et son ex-conjoint tombe, ou, plutôt, il est
transféré à son nouveau conjoint ou concubin qui assume désormais la charge du
ménage.
M. Dreyfus-Schmidt évoquait tout à l'heure les articles 212, 213 et suivants
du code civil ; je rappelle que, aux termes de l'article 214, « si les
conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges
du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives ».
Ainsi, le nouveau contrat de mariage entraînera des obligations pour le nouveau
conjoint et devrait donc lever celles du précédent.
Il faut, en effet, éviter à tout prix ces situations invraisemblables où, par
exemple, une femme qui a divorcé deux fois et se remarie cumule les deux
prestations compensatoires de ses ex-maris, malgré une situation financière
devenue très confortable et de nouveaux liens de solidarité tissés. C'est cela
qui est important.
Dans notre code civil, les pensions alimentaires deviennent caduques dès qu'il
y a remariage ou concubinage de l'époux bénéficiaire. A partir du moment où la
prestation compensatoire prend, dans la pratique - tout le monde l'a rappelé -
une dimension alimentaire, on doit accepter qu'elle s'éteigne dans les mêmes
conditions que la pension alimentaire. La rente compensatoire doit donc
s'éteindre dès l'instant où l'époux créancier se remet en ménage.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Mais non !
M. Nicolas About.
J'en viens à la limitation de la durée de la rente.
Je rappelais à l'instant comment le législateur de 1975, en donnant la
possibilité au juge de transformer le capital en rente, sans guère lui laisser
la possibilité de la réviser, n'avait fait que perpétuer des liens d'ordre
financier entre les ex-époux. Après tout, il n'est pas choquant de penser que
subsiste entre deux personnes qui ont partagé de nombreuses années de leur vie,
qui ont eu ensemble des enfants, un devoir moral d'assistance. Un divorce ne
peut effacer d'un trait de plume une histoire passée, vécue en commun. Personne
ne conteste ici le bien-fondé de la prestation compensatoire, correspondant à
l'ancien devoir de secours du code Napoléon.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Pourquoi la limiter ?
M. Nicolas About.
Ce qui est plus choquant, c'est de voir se prolonger des versements, parfois à
vie. Un capital versé une fois pour toutes, dès le prononcé du divorce,
pourrait pourtant permettre à l'époux créancier de prendre une certaine
autonomie financière par rapport à son ex-conjoint. Il devrait également
permettre à l'époux débiteur de tourner la page. Il faut souligner ici le
caractère vexatoire que peuvent représenter pour le débirentier des versements
indemnitaires perpétuels, surtout lorsque leur montant est faible. Au bout d'un
certain temps, il finit par les vivre comme une sanction financière qui lui est
infligée par la justice, alors qu'il n'est pas coupable. Rappelons en effet que
le régime des prestations compensatoires est valable, y compris pour les
divorces les plus neutres, par consentement mutuel ou sur requête conjointe. Il
arrive même que ce soit celui qui ne voulait pas le divorce qui soit contraint
de payer ! C'est le cas le plus fréquent. Arrêtons cette condamnation absurde,
en revenant au système du capital ou, à défaut, en limitant le plus possible la
durée de versement de la rente.
J'avais, pour ma part, proposé de limiter à dix ans la durée de versement de
la rente, sauf si cette limitation devait avoir des conséquences d'une
exceptionnelle gravité pour le créancier. Je voulais en effet que la loi
n'oublie pas le cas particulier des vieux époux, pour qui l'arrêt des
versements aurait pu avoir des conséquences fâcheuses.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Eh oui !
M. Nicolas About.
Ma proposition n'a pas été retenue par la commission qui a préféré laisser au
juge - on a vu ce qu'il a fait de la loi de 1975 ! - la libre appréciation de
cette durée.
Je crains, pour ma part, qu'une telle liberté ne crée de nouveau des
disparités d'appréciation d'un tribunal à l'autre, et des ruptures d'égalité
entre les justiciables.
Pour y remédier, il me paraît important de fixer une borne symbolique que le
juge pourra toujours reculer si, à l'expiration de cette période, la
suppression de la prestation devait avoir des conséquences d'une exceptionnelle
gravité. Je défendrai tout à l'heure un amendement en ce sens, en proposant une
durée maximale égale à deux fois celle du mariage.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Ah !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Cela dépend de l'âge des enfants !
M. Nicolas About.
Le troisième aspect de mon propos portera sur l'intransmissibilité de la rente
aux héritiers.
En ne fixant aucune limite temporelle à la rente compensatoire, le législateur
de 1975 a commis une double erreur : ...
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Ah non !
M. Nicolas About.
... non seulement il a « condamné à perpétuité » l'un des époux à subvenir aux
besoins de l'autre, mais, en plus, il a en quelque sorte hypothéqué son avenir
et celui de ses enfants. Par une disposition parfaitement aberrante, il a en
effet inscrit dans le code civil le principe de la transmissibilité de la
charge aux héritiers.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
C'était logique.
M. Nicolas About.
Autrement dit, si l'époux débiteur vient à décéder, la charge de la rente se
transmet à ses héritiers, c'est-à-dire à son nouveau conjoint et aux éventuels
enfants issus de son second mariage, alors même que ceux-ci n'ont aucun lien de
parenté avec le créancier. Le seul moyen dont disposent les héritiers pour
échapper à cette obligation consiste alors à refuser purement et simplement la
sucession.
Cette disposition me semble particulièrement injuste. De nombreuses femmes
remariées se voient ainsi contraintes, alors qu'elles viennent de perdre leur
mari et qu'elles doivent continuer à élever leurs enfants, de payer une rente à
la première femme de leur mari, alors qu'elles ne sont en rien responsables des
liens de ce premier mariage, auxquels le divorce a, en principe, mis un terme
définitif.
M. Robert Pagès.
C'est exact !
M. Nicolas About.
D'autres sont obligées de rependre une activité professionnelle pour payer une
prestation à la première épouse qui, elle, n'a jamais travaillé ! Tout se
passe, en droit français, comme dans les dynasties chinoises, où la seconde
épouse devait respect et assistance à la première du nom, selon une hiérarchie
très codifiée.
La commission n'a pas jugé bon de revenir sur la transmissibilité de la rente
et je le regrette. Je ne pense pas pour ma part que ce principe soit « conforme
au droit commun », ou bien, s'il l'est, changeons le droit commun. C'est après
tout le rôle du législateur.
Au contraire, je pense que la rente compensatoire n'est pas une dette comme
les autres : elle découle de liens affectifs passés qui s'éteignent à la mort
de celui qui les a contractés. Contrairement à ce que dispose la loi - et, je
le répète, lorsque la loi n'est plus adaptée à la réalité de notre temps, il
faut la changer - il s'agit non pas d'une dette d'ordre patrimonial, mais bien
d'une dette à caractère personnel, correspondant à l'ancien devoir de secours
entre les ex-époux, qui ne saurait échoir à leurs héritiers.
Contraindre un nouveau conjoint ou des enfants issus d'un second mariage à
refuser la succession de leur père constitue une mesure inégalitaire qui ne
trouve aucun fondement valable. On ne peut, je le rappelle, faire porter la
charge de la rente à des individus que rien ne lie au créancier. Imaginez la
charge financière qu'aurait représentée une rente compensatoire versée à Jeanne
Calment, dernière doyenne de l'humanité, par les héritiers de son ex-mari et
vous comprendrez qu'on ne peut faire ainsi porter le poids d'une rente à toute
une descendance, sous prétexte qu'un aïeul a contracté des liens matrimoniaux
par le passé.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Elle avait
vendu en viager !
M. Nicolas About.
En achetant en viager, on prend un risque : on cherche à tirer un bénéfice de
cette transaction. Ce n'est pas le cas pour une prestation compensatoire. On ne
peut donc assimiler prestation compensatoire et rente viagère !
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Non, mais sur la forme, c'est comparable puisque la
prestation compensatoire c'est le versement d'un capital.
M. Nicolas About.
Certes, mais ce n'est pas une rente.
J'irai plus loin dans mon raisonnement, pour montrer l'absurdité à laquelle
nous conduit le principe de la transmissibilité de la rente.
Admettons que des ayants cause refusent la succession du défunt à cause de
cette rente alimentaire. Puisque la loi part du principe que le devoir de
secours à l'égard de l'ex-conjoint ne s'éteint pas à la mort du débiteur,
pourquoi l'Etat, qui reprend la succession, refuserait-il d'assumer le paiement
de la rente ? C'est vrai que l'Etat n'est jamais débiteur !
Par un dispositif qui n'incite guère les héritiers à reprendre la succession,
l'Etat peut récupérer les biens du défunt, mais il ne va pas jusqu'à reprendre
la dette qu'est la prestation compensatoire, puisqu'il n'assure pas le relais
du versement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Très juste !
M. Nicolas About.
C'est donc bien que lui, l'Etat, estime que cette dette n'est pas d'ordre
patrimonial mais bien qu'elle est personnelle au défunt. Revenir au principe de
l'intransmissibilité de la rente n'est donc que justice, pour le débirentier,
mais aussi pour sa descendance.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
C'est audacieux comme raisonnement !
M. Nicolas About.
C'est audacieux. De l'audace, toujours de l'audace, encore de l'audace !
(Sourires.)
Vous l'aurez compris, madame le ministre, mes chers collègues, deux
principes doivent à mon sens guider notre discussion : souplesse et justice.
Souplesse, d'abord, par l'ouverture des possibilités de révision de la
rente.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Non !
M. Nicolas About.
Souplesse, ensuite, par la limitation temporelle de son versement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Non !
M. Nicolas About.
Souplesse, enfin, par l'abrogation du principe de transmissibilité aux
héritiers.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Oui !
M. Nicolas About.
Cet objectif vers lequel nous devons tendre, et que, je l'espère, mes chers
collègues, nous atteindrons ensemble, ne fera que répondre au souci d'équité
qui avait présidé à l'élaboration de la loi de 1975, mais que la réalité
socioéconomique a dépassé. Faisons donc acte de justice.
En terminant, madame le ministre, même si certaines de vos propositions
appelleront de ma part quelques remarques au cours de la discussion des
articles, je veux vous remercier pour l'ensemble de vos propositions qui
contribuent très sensiblement à l'avancement de ce dossier délicat.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Bien !
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec l'examen
de ces deux propositions de loi modifiant les règles de la prestation
compensatoire, nous anticipons la réforme plus globale du divorce envisagée par
le Gouvernement.
Cette prestation compensatoire, instituée par la loi n° 75-617 du 11 juillet
1975 portant réforme du divorce, est sûrement l'un des volets dont les effets
pécuniaires sont les plus conséquents, donc les plus urgents à traiter.
A l'époque, dans les années soixante-dix, au moment où le nombre des divorces
explose, cette prestation avait pour objectif de garantir un revenu à l'épouse
divorcée, souvent femme au foyer, ou bien de compenser la disparité créée par
le divorce entre les conditions de vie des deux époux, lorsque les revenus de
la femme étaient inférieurs à ceux du mari. Il faut se rappeler qu'en 1975 près
de 59 % des femmes de vingt-cinq à quarante-quatre ans avaient une activité
professionnelle, contre environ 80 % en 1996.
Le principe de ce dispositif est juste et généreux, puisqu'il permet de
maintenir une certaine égalité dans les revenus des deux ex-conjoints après le
divorce.
Cependant, on l'a dit à plusieurs reprises, après vingt années d'application
de la loi de 1975, étant donné qu'aucun garde-fou n'a été prévu, les effets
pervers de cette loi que je dirai « égalitaire » se sont révélés, à l'usage,
redoutables, aboutissant à des situations d'une criante injustice, en raison
notamment de la persistance du chômage.
Parfois, la différence peut devenir trop importante entre les deux ex-époux,
avec le cas extrême où le débiteur devient chômeur, perdant ainsi une part
substantielle de ses revenus, alors que l'époux bénéficiaire voit ou peut voir
ses revenus augmenter ou sa situation s'améliorer, par remariage notamment.
La prestation compensatoire est alors souvent vécue comme une rente à vie,
voire une sanction à vie, par les débiteurs.
En effet, si en principe cette charge devait être versée en capital, en
pratique cette formule n'est pas fréquemment retenue ou très partiellement. En
conséquence, ce versement, qui prend, le plus souvent, la forme d'une rente
mensuelle, n'est pas limité dans le temps.
En outre, sa révision est exceptionnelle, donc quasiment impossible en
pratique, et le report de la charge de cette rente se fait sur les héritiers en
cas de décès du débiteur.
Ce système, rigide et sévère pour le débirentier, a engendré des situations
invraisemblables et injustes, dont nous avons pris connaissance et conscience,
et qui nous ont amené à déposer une proposition de loi visant à assouplir la
législation en la matière.
Je tiens à préciser que si, à l'origine, la loi de 1975 avait pour objectif
premier de mettre à l'abri du besoin l'épouse divorcée et ses enfants, les
temps ont changé.
C'est ainsi qu'aujourd'hui les femmes sont, en tant qu'épouses d'hommes
divorcés, elles aussi les victimes des aberrations du système, puisqu'en cas de
décès de leur mari elles héritent de la dette et doivent à leur tour verser la
prestation à la première épouse.
En outre, il arrive également, même si les cas sont plus rares, que les
tribunaux allouent des prestations aux hommes quand les épouses ont des
salaires plus élevés qu'eux.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
C'est l'égalité !
M. Robert Pagès.
Je ne dis pas que c'est mal ; je fais un constat. Ce n'est pas un jugement de
valeur, mon cher rapporteur.
M. Pierre Fauchon.
C'est une information !
M. Robert Pagès.
Pour en venir aux termes mêmes des conclusions de la commission des lois, je
ferai plusieurs observations.
L'article 1er prévoit que la prestation peut être révisée uniquement « en cas
de changement substantiel dans les ressources des parties ».
Actuellement, l'article 273 du code civil précise que la prestation « ne peut
être révisée même en cas de changement imprévu dans les ressources ou les
besoins des parties, sauf si l'absence de révision devait avoir pour l'un des
conjoints des conséquences d'une exceptionnelle gravité ».
Le législateur de 1975 a voulu que la situation soit définitivement fixée lors
du prononcé du divorce et ne puisse plus être constamment remise en cause.
Le fait est que, généralement, le jugement intervient au moment où le
débirentier est en activité et où la rente est supportable.
Les problèmes surviennent lorsque le débiteur devient retraité, chômeur,
RMIste, invalide ou à la tête d'une famille nombreuse - pourquoi pas ? Dans ces
cas précis, la rente devient, du jour au lendemain, à proprement parler
insupportable, car elle absorbe tout ou partie des revenus du débiteur.
Or, étant donné la rédaction de l'article 273 du code civil, la révision est
presque toujours impossible. C'est ainsi qu'il a été jugé que le licenciement
d'un débiteur ne constituait pas un changement imprévisible « compte tenu du
contexte économique » et ne pouvait justifier une révision. Il a été jugé de
même pour la mise à la retraite, même anticipée, et la liquidation
judiciaire.
Il n'y a guère qu'en cas de maladie grave que les juges se montrent plus
tolérants.
Il est donc urgent de modifier la loi, à l'heure où notre pays compte plus de
3,5 millions de chômeurs et bon nombre d'autres exclus, à l'heure où un foyer
sur trois est touché par le problème de la perte d'emploi. C'est d'autant plus
urgent que, dans la tranche d'âge comprise entre vingt-cinq et quarante-neuf
ans, c'est-à-dire celle qui est la plus confrontée au divorce, la proportion
des chômeurs de longue durée est la plus élevée.
Il est des situations qui aboutissent à l'inverse du but que la loi cherche à
atteindre, puisque le débiteur, dont la rente a été calculée sur la base d'un
salaire qu'il ne perçoit plus, se trouve désormais dans une situation
matérielle plus difficile que la personne à qui il apporte son soutien
financier.
Au surplus, le conjoint bénéficiaire de la rente qui se remarie peut non
seulement voir sa situation s'améliorer, mais également, en cas de nouveau
divorce, percevoir une seconde prestation compensatoire. Et ainsi de suite
!...
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Absolument !
M. Robert Pagès.
C'est pourquoi il eût été utile de préciser dans la loi qu'« en cas de
remariage ou de concubinage notoire de l'époux créancier, la charge de la rente
disparaît ».
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Pas du tout !
M. Robert Pagès.
Mais notre collègue M. Dreyfus-Schmidt n'en est évidemment pas convaincu !
Par ailleurs, il faut savoir que l'avenir de ces débirentiers, retraités,
chômeurs ou dont le salaire a substantiellement diminué du fait de la précarité
de l'emploi, est complètement bouché.
Et si leur ex-époux, remarié, peut voir sa situation devenir plus confortable,
il peut bien évidemment n'en être pas de même pour le débiteur.
A cela s'ajoute le fait que, si ce dernier se remarie, à son décès, la charge
de la rente sera supportée par leur nouveau conjoint, voire par les enfants nés
de cette nouvelle union, ce qui n'est pas acceptable.
En effet, la charge de la rente est transmissible et peut engendrer des
situations absurdes. Le cas le plus marquant est celui où, en cas de décès des
deux ex-époux, les enfants du second mariage du débirentier doivent verser une
rente au deuxième époux du ou de la bénéficiaire, alors qu'il n'y a aucun lien
de parenté entre eux !
Le versement d'une rente sur une trop longue durée pénalise ou favorise
injustement des personnes étrangères au divorce. C'est donc à juste titre que
l'article 2 du présent texte prévoit que « le décès de l'époux créancier avant
l'expiration de cette durée met fin à la charge de la rente ».
Toutefois, pour que le dispositif soit complet, nous estimons qu'il est
nécessaire de prévoir qu'« à la mort de l'époux débiteur, la charge de la rente
disparaît ».
Il arrive en effet que, en cas de décès du débiteur, les héritiers qui ne
peuvent pas prendre en charge la rente compensatoire soient dans l'obligation
de renoncer à la succession. Par notre amendement, nous proposons donc que la
charge de la rente disparaisse avec le décès du débiteur.
Nous approuvons également l'article 2 en ce qu'il précise que « le juge fixe
la durée de la rente en prenant les éléments d'appréciation prévus à l'article
272 ».
D'ailleurs, en pratique et en raison de la situation économique et sociale des
années quatre-vingt-dix, les juges ont déjà tendance à limiter le paiement de
la rente sur une période de trois à quinze ans, alors qu'elle était due à vie,
auparavant.
La rente ne devrait plus pouvoir être attribuée au-delà de la période
d'activité du débirentier ou, du moins, devrait-elle être largement révisée dès
cette date. On peut, en effet, considérer que, si le mariage était arrivé à «
tenir » jusqu'à la mise à la retraite des époux, le « créancier » aurait de
toute manière subi la diminution des ressources de son conjoint.
Les tribunaux tiennent bien compte, en cas de divorce d'époux retraités, de la
situation de retraité de chacun d'eux !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Absolument !
M. Robert Pagès.
Quant à l'article 3, qui prévoit de doubler l'abattement fiscal en cas de
versement de la prestation compensatoire sous forme de capital au lieu et place
d'une rente, il confirme un principe, l'attribution d'un capital, qui n'est pas
respecté actuellement.
En effet, les trois quarts des prestations sont aujourd'hui accordées sous
forme de rentes, dont le montant est fixé au jour du divorce et atteint en
moyenne 2 300 francs, mais un tiers d'entre elles excèdent 3 500 francs et 7 %
6 000 francs.
Le régime fiscal proposé, plus avantageux que le régime actuel, devrait
inciter les personnes qui divorcent à choisir le versement d'un capital plutôt
qu'une rente, ce qui leur permettrait de couper définitivement les liens du
mariage.
C'est d'ailleurs l'objectif de la loi de 1975, qui devait régler le plus
rapidement possible les effets du divorce en érigeant notamment en principe le
versement, une bonne fois pour toute, d'un capital.
Or, on l'a vu, le principe est devenu l'exception, et l'attribution d'une
rente a été largement employée par les tribunaux, qui ont fait ainsi perdurer
les « liens du divorce » bien au-delà de la volonté du législateur de 1975.
Telles sont les quelques observations que je tenais à faire quant aux
conclusions de la commission des lois, sur lesquelles nous reviendrons, bien
entendu, lors de la discussion des articles.
Nous sommes, bien évidemment, conscients qu'il ne s'agit là que de premières
mesures eu égard à l'importance du chantier que constitue la réforme du
divorce. Néanmoins, nous considérons qu'il est urgent de remédier d'ores et
déjà aux situations dramatiques que vivent les personnes divorcées, condamnées
à payer une rente à vie, une rente devenue trop lourde par rapport à leurs
revenus.
Avant de finir, il me reste à soulever deux interrogations.
L'une concerne la multiplication des requêtes qu'entraînera l'adoption de ces
mesures tant la pression des justiciables en la matière est grande, et donc la
question des moyens à mettre en oeuvre.
L'autre est relative à l'inscription de ce texte à l'ordre du jour de
l'Assemblée nationale, inscription que nous souhaitons, bien entendu, rapide,
de façon à ne pas prolonger encore une situation douloureuse pour nombre de nos
concitoyens.
En tout état de cause, les sénateurs du groupe communiste républicain et
citoyen sont favorables à l'adoption des modifications proposées.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Très bien !
Le capital, voilà l'ennemi !
(Sourires.)
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, nous sommes d'accord sur le principe : il faut modifier la
prestation compensatoire telle qu'elle a été instituée par la loi de 1975.
Cette prestation s'est en effet révélée inadaptée à l'évolution de la société,
à la grave instabilité résultant de la crise économique et sociale, de
l'explosion du chômage et du développement des situations de précarité. Mais il
faut, dans le même temps, faire attention à ne pas créer d'autres
difficultés.
Je partage l'avis de M. Hyest. Comme il l'a exprimé dans son rapport, il
convient d'assouplir les conditions de révision. Je le remercie d'ailleurs de
l'ouverture qu'il a faite quant aux améliorations possibles du dispositif
envisagé.
Je partage aussi l'avis de M. Dreyfus-Schmidt sur l'intérêt qui s'attache à
une modification de la prestation compensatoire sans attendre une réforme
d'ensemble du divorce ou du droit de la famille.
Je ne crois pas pour autant qu'il soit exact - nous divergeons sur ce point -
que la pension alimentaire donnait satisfaction. En effet, nous le savons tous,
les pensions alimentaires généraient un très important contentieux, un
contentieux qui se pérennisait pendant des années. Je ne souhaite donc pas que
nous revenions purement et simplement à l'ancien système.
Monsieur About, je partage votre souhait d'instaurer un dispositif souple. Je
pense d'ailleurs que les amendements proposés par le Gouvernement répondent à
votre voeu.
En effet, je ne suis pas favorable à un système rigide qui interdirait
systématiquement que la charge de la prestation compensatoire soit supportée
par les héritiers ou qui imposerait qu'elle cesse en cas de concubinage
notoire. Il nous faut trouver un point d'équilibre.
Je voudrais également dire à M. Pagès que je suis extrêmement sensible aux
observations qu'il a formulées concernant les situations d'injustice qui ont
été créées par cette prestation compensatoire : pénalisation de personnes en
situation de chômage ou de personnes mises à la retraite anticipée, sans
oublier la situation de seconde épouse par rapport à la première.
C'est pourquoi je suis entièrement d'accord avec vous, monsieur Pagès, quant à
la nécessité de modifier la loi et je vous remercie d'avoir déposé cette
proposition de loi qui nous permet d'avoir cette discussion aujourd'hui.
Il nous faut arriver à élaborer un système souple afin de tenir compte des
modifications pouvant intervenir dans la situation tant du créancier que du
débiteur. Mais, en même temps, il ne faut pas tomber dans une insécurité
juridique susceptible d'engendrer des contentieux eux-mêmes persistants.
Je pense - mais nous aurons le temps d'en reparler - que la discussion
parlementaire devrait nous permettre de parvenir à un bon point d'équilibre.
Le Gouvernement, je le rappelle, souhaite que la prestation compensatoire
reste forfaitaire, tout en faisant en sorte qu'elle puisse être modifiée plus
facilement qu'aujourd'hui en cas de changements imprévus et importants.
Le Gouvernement souhaite par ailleurs que la prestation compensatoire sous
forme de capital soit privilégiée - en tout cas, chaque fois que cela est
possible, mais nous savons bien que cela n'est pas toujours le cas - pour
permettre le règlement financier du divorce au moment où celui-ci est
prononcé.
Le Gouvernement estime de plus qu'à tout moment le débiteur de la rente doit
pouvoir demander la capitalisation au cas où sa situation de fortune
changerait.
Le Gouvernement souhaite en outre que la rente soit temporaire, qu'elle soit
assortie d'un terme ou d'une condition - ce que la jurisprudence jusqu'ici
n'avait pas permis - et que l'attribution d'une rente à titre viager soit
spécialement motivée.
Le Gouvernement souhaite encore que, sauf disposition contraire, lorsque le
débiteur de la rente meurt, le versement de celle-ci ne soit plus transmis aux
héritiers, tous les orateurs ont insisté sur ce point.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Sauf la commission !
Mme Elisabeth Guigou,
garde des sceaux.
C'est exact !
Enfin, le Gouvernement souhaite que soit prévue, pour garantir le paiement de
la rente, la possibilité de cautions ou d'assurance, ce qui était jusqu'ici
impossible.
Il me semble que nous sommes d'accord sur les objectifs tout en différant
manifestement sur quelques-unes des propositions. Nous sommes les uns et les
autres animés du souci de trouver un point d'équilibre pour remédier à des
situations difficiles. J'espère que la discussion parlementaire nous permettra
d'y parvenir ; en tout cas, je vous remercie de l'avoir suscitée. En ce qui me
concerne, je ferai tout pour que cette discussion puisse aboutir dans les
meilleurs délais.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La discussion des articles interviendra à une date ultérieure.
Afin de permettre à la conférence des présidents de se réunir, le Sénat va
maintenant interrompre ses travaux ; il les reprendra à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à seize heures
quinze, sous la présidence de M. Michel Dreyfus-Schmidt.)
PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
9
CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat.
A. -
Mercredi 11 février 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures :
Projet de loi relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur
l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de
l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997).
La conférence des présidents a fixé au mardi 10 février 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
B. -
Jeudi 12 février 1998 :
A neuf heures trente :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille.
A quinze heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures.
C. -
Mardi 24 février 1998 :
A neuf heures trente :
1° Dix-huit questions orales sans débat.
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- N° 157 de M. Jean Huchon à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer (statut de
la zone des cinquante pas géométriques dans les DOM) ;
- N° 159 de Mme Nicole Borvo à Mme le ministre de la culture et de la
communication (avenir des cinémas d'art et d'essai) ;
- N° 161 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre de l'agriculture et de la
pêche (retraités agricoles) ;
- N° 164 de M. Léon Fatous à M. le secrétaire d'Etat au logement (problème du
logement dans le bassin minier) ;
- N° 165 de M. Aubert Garcia transmise à M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation (contrôle sur le
recrutement des agents non titulaires dans la fonction publique territoriale)
;
- N° 166 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture et de la
pêche (mission des SAFER) ;
- N° 169 de M. François Autain à M. le secrétaire d'Etat à la santé (statut
des médecins à diplôme étranger) ;
- N° 170 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (projet de
délocalisation du centre d'essais en vol de Brétigny-sur-Orge) ;
- N° 171 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de la défense (conditions
d'incorporation des jeunes ayant un contrat de travail) ;
- N° 173 de M. Charles Descours à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (réalisation de l'autoroute A 51 Grenoble-Sisteron)
;
- N° 174 de M. André Vallet à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(contribution des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé) ;
- N° 175 de M. Georges Mouly à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises) ;
- N° 176 de M. Bernard Piras à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice
(statut des administrateurs
ad hoc
) ;
- N° 177 de M. Jean-Patrick Courtois à M. le ministre de l'agriculture et de
la pêche (projet de loi sur la qualité sanitaire des denrées alimentaires
destinées à l'alimentation humaine et animale) ;
- N° 178 de M. Gérard Fayolle à Mme le ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (gestion et traitement des déchets en Dordogne) ;
- N° 179 de M. Henri Revol à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice
(avenir du tribunal de Châtillon-sur-Seine) ;
- N° 182 de M. André Vézinhet à M. le ministre de l'intérieur (sécurité
publique à Lunel) ;
- N° 186 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie (délais de paiement appliqués aux produits cuisinés).
A seize heures et, éventuellement, le soir :
2° Eloge funèbre de M. Pierre Croze.
Ordre du jour prioritaire
3° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture de la
proposition de loi relative au fonctionnement des conseils régionaux.
La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification et
modification de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à
l'amélioration de la santé publique à Mayotte (n° 195, 1997-1998).
La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
5° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi
relative à la sécurité et à la promotion d'activités sportives.
La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.
D. -
Mercredi 25 février 1998 :
A quinze heures :
Ordre du jour prioritaire
1° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi relatif
à la nationalité.
La conférence des présidents a fixé au mardi 24 février 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
Ordre du jour complémentaire
2° Suite des conclusions de la commission des lois (n° 20, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Nicolas About, tendant à modifier les
dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de
divorce (n° 151, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues
relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce (n°
400, 1996-1997).
Aucun amendement à ce texte n'est plus recevable.
E. -
Jeudi 26 février 1998 :
A dix heures :
Ordre du jour prioritaire
1° Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée
nationale, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la
sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 222, 1997-1998).
La conférence des présidents a fixé au mercredi 25 février 1998, à dix-sept
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.
A quinze heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures.
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
F. -
Mardi 3 mars 1998 :
A neuf heures trente :
1° Onze questions orales sans débat :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- N° 92 de M. Paul Masson transmise à M. le secrétaire d'Etat à la santé
(lutte contre la toxicomanie) ;
- N° 103 de M. Gérard Roujas à M. le ministre de l'intérieur (montant de la
vignette automobile) ;
- N° 109 de M. Ivan Renar à Mme le ministre de la culture et de la
communication (situation fiscale des structures culturelles) ;
- N° 112 de M. François Lesein transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget
(régime de la taxe professionnelle applicable à France Télécom et à la Poste)
;
- N° 142 de M. Jean-Jacques Robert à Mme le ministre de la jeunesse et des
sports (conditions d'exercice du parachutisme sportif en région parisienne)
;
- N° 155 de Mme Anne Heinis transmise à M. le ministre de l'agriculture et de
la pêche (problèmes de la pêche aux abords des îles anglo-normandes et du
Cotentin) ;
- N° 181 de M. André Dulait à M. le ministre de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie (financement de l'utilisation des ressources
multimédia dans les établissements scolaires) ;
- N° 183 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (tracé du TGV pendulaire Clermont-Paris) ;
- N° 184 de M. Franck Sérusclat à M. le secrétaire d'Etat à la santé
(politique en matière de toxicomanie) ;
- N° 187 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie (statut des animateurs de la mission d'insertion
de l'éducation nationale) ;
- N° 188 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de l'intérieur (conditions
d'incorporation dans les écoles de police).
A seize heures et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Sous réserve de sa transmission, projet de loi d'orientation et
d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN n° 512) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 mars 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 2 mars
1998.
G. -
Mercredi 4 mars 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A quinze heures et le soir :
Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du
temps de travail (AN n° 512).
H. -
Jeudi 5 mars 1998 :
Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution
A neuf heures trente :
1° Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 257 rect.,
1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Michel Moreigne et plusieurs de ses collègues
visant à étendre aux centres de santé gérés par la Mutualité sociale agricole
la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale (n°
43, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Georges Mouly et plusieurs de ses collègues
visant à étendre aux centres de soins infirmiers gérés par la Mutualité sociale
agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité
sociale (n° 377, 1996-1997).
2° Proposition de loi de M. Jean Delaneau et plusieurs de ses collègues visant
à élargir les possibilités d'utilisation des crédits obligatoires d'insertion
des départements (n° 250, 1997-1998) ;
A quinze heures et le soir :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la
séance avant onze heures.
Ordre du jour prioritaire
4° Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction
du temps de travail (AN n° 512).
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence
des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence
des présidents s'agissant de l'ordre du jour établi en application de l'article
48, troisième alinéa, de la Constitution et de l'ordre du jour complémentaire
?...
Ces propositions sont adoptées.
10
INTERVENTION DES ORGANISMES HLM
SUR LE PARC LOCATIF PRIVÉ
Adoption d'une proposition de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 185,
1997-1998), adoptée par l'Assemblée nationale, permettant aux organismes
d'habitations à loyer modéré d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant
à bail des logements vacants pour les donner en sous-location (rapport n° 262
[1997-1998]).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, la proposition de loi que nous allons examiner aujourd'hui
prévoit, ainsi que M. le rapporteur vous l'indiquera dans quelques instants, un
nouvel outil pour remettre en location des logements vacants du secteur
privé.
L'enquête logement de 1996, la plus récente de l'Institut national de la
statistique et des études économiques, l'INSEE, chiffre ce parc à 2 231 000
logements, soit 7,9 % de l'ensemble des logements, c'est-à-dire les logements
pour la résidence principale, les résidences secondaires et les logements
occasionnels. L'importance de cette vacance ne peut laisser indifférent
puisque, parallèlement à l'existence de logements vides, nous nous heurtons à
la difficulté de proposer un toit à des personnes sans logement ou très mal
logées.
Toutefois, gardons-nous - mais vous en avez bien conscience - de conclusions
hâtives en aboutissant à une équation pure et simple entre le nombre de
logements vides et le nombre de logements qui font défaut. C'est évidemment
moins simple.
Le Conseil national de l'habitat, le CNH, rappelle, dans son rapport de 1996,
que les chiffres doivent être considérés avec précaution. Il s'agit, pour de
nombreux logements, d'une vacance qui peut être purement conjoncturelle, alors
que c'est bien entendu sur une vacance structurelle, dont la durée est d'au
moins six mois pour être considérée comme telle, que les efforts doivent porter
pour une mobilisation du parc vacant.
Quant à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, elle
signalait en 1995 que l'expression « logement vacant » non seulement ne veut
pas forcement dire « logement disponible », mais signifie souvent « logement
hors marché ». Le logement peut être situé dans une zone qui ne connaît pas de
demande ; il peut ne pas correspondre à la demande. La demande de logement
n'est pas excédentaire partout ; il apparaît que la mobilisation du parc vacant
n'est donc pas nécessaire partout.
Cependant, l'intérêt pour la mobilisation d'une offre nouvelle et la fluidité
du parc de logements est indéniable dans les zones où l'offre fait défaut au
regard des files d'attente pour l'attribution de logements sociaux. Le
chiffrage effectué dans le rapport Robert de 1992, selon lequel 500 000
logements pourraient être recyclés, dont 200 000 rapidement, ne peut laisser
indifférent.
Il est donc raisonnable de ne rien négliger pour que l'offre potentielle
réponde à la demande locale dès lors que cette demande est bien réelle. C'est
ce que le Gouvernement souhaite faire dans le cadre des chantiers qu'il a
ouverts dans le domaine du logement.
Pour ce faire, il faut bien appréhender les divers aspects de la vacance de
façon à mieux évaluer les besoins d'intervention.
Certains logements connaissent un temps de vacance normal dans l'attente d'une
vente ou d'une mise en location. D'autres logements connaissent une vacance
dite de transformation du bien soit en raison de travaux, de démolition prévue,
de changement d'usage, de situation de blocage juridique, ou encore une vacance
liée à l'absence de demande du fait du manque de confort, de l'environnement
déplaisant ou d'un phénomène local de dépopulation.
Reste la vacance que l'ANAH, l'Agence nationale pour l'amélioration de
l'habitat, qualifiait en 1995 de vacance « expectative » : celle des logements
réservés pour une occupation future, voués à disparaître ou faisant l'objet
d'une rétention, spéculative ou non. Il faut alors prendre en compte la volonté
du propriétaire de conserver le bien en état pour une transmission de
l'héritage, le refus de complications, l'indécision du propriétaire, quand elle
existe, sur le devenir de son logement.
Cette diversité des causes de la vacance est essentielle à connaître pour
proposer des outils différents, adaptés à chaque situation. Il serait illusoire
de vouloir apporter une réponse unique ; nous pouvons tous en convenir, et je
suis sûr que c'est la conclusion à laquelle est parvenue la commission au terme
de ses travaux.
Tout d'abord, il me paraît nécessaire de ne pas lier la remise en location au
logement d'un public déterminé. Le propriétaire décidé à remettre son bien sur
le marché ne doit pas être contraint à loger un seul type de locataires.
Aussi, c'est dans le cadre de deux dossiers, celui du projet de loi pour la
prévention et la lutte contre les exclusions, mais également celui qui portera
statut du bailleur, privé que le Gouvernement traitera cette question.
Au regard de la prévention et de la lutte contre les exclusions, comment ne
pas être sensible au caractère inadmissible de la vacance, alors que des
personnes sont sans logement ou mal logées ? Aussi prévoyons-nous d'appliquer
une taxe sur les logements vacants là où l'offre de logements fait cruellement
défaut ; je dis bien : là où l'offre de logements fait cruellement défaut. Mais
taxer la vacance serait injuste si le propriétaire ne disposait pas d'outils
pour mettre son bien en location.
D'une part, nous étudions les améliorations à apporter au bail à
réhabilitation et les moyens de renforcer le rôle des intermédiaires
associatifs, dont l'intervention est parfois nécessaire pour assurer une
gestion locative adaptée ou un accompagnement social.
D'autre part, dans le cadre du futur statut du bailleur privé, nous
recherchons les moyens de motiver les investisseurs à s'engager sur le champ du
locatif privé et les propriétaires de logements vacants à remettre leur bien en
location. Le choix du locataire doit alors être laissé, sans imposer le
logement de telle ou telle catégorie de personnes.
Pour cela, nous devons prendre en compte la rentabilité d'une mise en
location, et nous nous efforcerons de moduler l'effort financier de l'Etat en
faveur des propriétaires en fonction des efforts consentis par ceux-ci sur le
niveau des loyers et la durée de la location. Nous avons également à examiner
les moyens de sécuriser les propriétaires en recherchant des systèmes de
garantie pour le paiement des loyers.
Sur ce dernier point, nous savons que la sécurisation des bailleurs passe
aussi par la capacité de disposer d'intermédiaires pour l'acte de louer. Je
pense à des propriétaires âgés qui ne veulent pas assurer en direct la gestion
de la location. C'est ainsi que nous réfléchissons au rôle que peuvent jouer
les agences immobilières qui interviennent habituellement sur le secteur
locatif privé - je pense à ces agences qui ont pignon sur rue dans toutes nos
villes - mais également les agences immobilières à vocation sociale ou les
organismes d'HLM généralement confrontés à un public qui n'est pas forcément au
centre de l'intérêt de tel ou tel agent immobilier.
L'objectif du Gouvernement est d'apporter des réponses adaptées en tenant
compte des attentes de tous. C'est à cette condition que les propositions pour
une mobilisation de la vacance seront les plus efficaces.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai cru devoir vous présenter l'ensemble
de notre réflexion sur ce sujet, car la proposition de loi que vous allez
examiner aujourd'hui se situe sur ce champ.
Cette proposition de loi assigne au parc mobilisable un rôle social en
désignant des locataires potentiels dont les revenus sont inférieurs aux
plafonds de ressources pris en compte pour l'attribution de logements sociaux
et en prévoyant des limites aux loyers praticables. Elle propose un nouvel
intervenant, l'organisme d'HLM, pour une prise à bail de logements vacants.
Tel qu'il a été adopté par les députés, le texte laisse aux intervenants
habituels sur le secteur locatif privé le temps de mettre en location les
logements de façon plus classique. En effet, vous l'avez observé, c'est un
délai de vacance de deux ans qui a été retenu avant que s'ouvre la possibilité
de la prise à bail par un organisme d'HLM.
Le dispositif proposé tient compte des attentes de chacun et laisse à la voie
contractuelle le soin de régler les questions du financement des travaux
éventuellement nécessaires et du coût de la gestion locative. Ainsi,
propriétaires et organismes d'HLM pourront, en signant un contrat de location
permettant la sous-location, répondre au souci de trouver des solutions de
logement pour des personnes en dehors du cadre souvent très collectif du
logement social ; mais encore au souci de permettre l'intervention d'un
gestionnaire social pour une période de location aboutissant soit à une
location directe au ménage logé, soit à une solution de relogement dans le parc
social.
Cette proposition de loi donne une chance supplémentaire de mobilisation de
logements par un nouveau type d'intervenant, l'organisme d'HLM. Cette démarche
n'est pas en contradiction avec les travaux du Gouvernement, qui s'en remet
donc à la sagesse de votre assemblée, mesdames, messieurs les sénateurs, pour
l'adoption de ce texte.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Braun,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur
le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
proposition de loi n° 185, adoptée par l'Assemblée nationale, dont est saisie
la commission des affaires économiques, doit permettre aux organismes
d'habitation à loyer modéré d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à
bail des logements vacants pour les donner en sous-location.
Elle est issue d'une proposition de loi déposée par M. Meyer, député, qui
reprend, dans des termes quasiment identiques, une proposition de loi qu'il
avait déjà déposée sous la précédente législature, mais qui n'avait pu aboutir
en raison de la dissolution décidée le 22 avril 1997.
Le dispositif qu'il nous est demandé d'examiner se veut une réponse au
problème de la vacance dans le parc immobilier privé, qui est ressenti de façon
aiguë, compte tenu des deux millions de personnes dépourvues de logement ou mal
logées.
Cette crise du logement durable est un problème primordial, qui nécessite la
recherche d'outils très diversifiés pour faciliter une meilleure adéquation
entre l'offre et la demande de logements.
Dans mon rapport écrit, qui procède à une analyse précise des causes de la
vacance, j'indique qu'environ 200 000 logements devraient pouvoir être remis
rapidement sur le marché, selon les différentes enquêtes menées sur le
sujet.
Mais je voudrais insister sur les mécanismes existants pour mobiliser les
logements vacants, en opposant au dispositif du bail à réhabilitation, institué
par la loi du 31 mai 1990 et qui n'a connu qu'un succès très relatif, le rôle
très positif de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH.
En effet, en cinq ans, le bail à réhabilitation n'a été utilisé que dans
cinquante-quatre départements et n'a concerné qu'environ 1 000 logements. Les
preneurs ont été essentiellement des associations, qui ont bénéficié des aides
de l'ANAH pour réhabiliter ces logements. Mais force est de constater que les
collectivités territoriales et les organismes sociaux se sont très peu
impliqués dans ce dispositif.
Les raisons de cet échec tiennent aux difficultés et aux lourdeurs constatées
dans le bouclage des opérations, à la longueur du bail imposé par la loi -
douze ans - et aux incertitudes fiscales, en fin de bail, portant sur la
qualification des travaux d'amélioration réalisés sur le logement.
En revanche, il convient de souligner, parmi les dispositifs existants, le
rôle primordial joué par l'ANAH, qui a fait de la remise sur le marché des
logements vacants l'un de ses objectifs prioritaires. En 1996, elle a
subventionné la remise en état de 38 500 logements vacants, ce qui représente
un tiers des logements subventionnés mais les trois quarts des subventions
distribuées, soit 1,9 milliard de francs sur un total de 2,59 milliards de
francs.
On constate ainsi que les opérations menées avec les collectivités
territoriales contribuent fortement à la remise sur le marché de logements
vacants, qu'il s'agisse d'opérations programmées d'amélioration de l'habitat,
les OPAH, ou de programmes sociaux thématiques, les PST.
De plus, pour augmenter l'offre de logements conventionnés dans les OPAH, le
conseil d'administration de l'ANAH a décidé, en 1994, de porter de 35 % à 40 %
le taux de subvention de l'Agence, sous réserve qu'une collectivité locale
accorde une subvention complémentaire de 5 %, ce qui porte au total le taux de
subvention à 45 %. Ces aides des collectivités sont assorties de critères
particuliers, dépendant des priorités que se donne la collectivité, notamment
la résorption de la vacance.
On ne peut donc, une fois encore, que dénoncer la très insuffisante
progression de la subvention de l'Etat au budget de l'ANAH - 10 % sur cinq ans
- alors même que, durant la même période, le produit de la taxe additionnelle
au droit de bail, la TADB, a augmenté de 43 %. Il y a, pour la période
1990-1996, un déficit de 1,2 milliard de francs entre ce qu'a rapporté la taxe
et le budget de l'ANAH.
Contrairement aux engagements pris en 1987, le « décrochage » entre le produit
de la TADB et les ressources de l'ANAH n'a fait que s'accentuer, alors que,
pour remédier à la vacance des logements dans le secteur privé, une
augmentation sensible des moyens de l'ANAH aurait des effets immédiatement
positifs.
Cela aurait également un impact très fort sur l'activité du secteur du
bâtiment, notamment pour les petites et moyennes entreprises et les artisans ;
on estime en effet que un milliard de francs de subvention de l'ANAH génère
environ 4,5 milliards de francs de travaux. Vous pourriez monsieur le
secrétaire d'Etat, en privilégiant cette voie, faire d'une pierre deux coups :
lutter efficacement contre la vacance des logements et favoriser la création
d'emplois.
J'en viens à la proposition de loi qui est aujourd'hui soumise à l'examen de
la Haute Assemblée.
Ce texte met en place un dispositif qui présente des analogies avec le bail à
réhabilitation, mais en privilégiant une procédure beaucoup plus souple, qui
renvoie largement à la convention conclue entre les parties.
Si le bail à réhabilitation peut être signé par un organisme d'HLM, une
société d'économie mixte, une collectivité territoriale ou une association
agréée, le dispositif de la prise à bail est réservé aux seuls organismes
d'HLM.
Dans le cadre du bail à réhabilitation, la durée du bail est au minimum de
douze ans, alors qu'elle est fixée librement par les parties pour la prise à
bail.
En ce qui concerne les travaux à effectuer, ils sont à la charge du preneur
dans un bail à réhabilitation et du bailleur, c'est-à-dire du propriétaire,
dans le cas de la prise à bail.
Mais, dans l'un et l'autre des dispositifs, le relogement des occupants est
obligatoire en fin de bail, et il est à la charge du preneur, étant précisé
que, dans la prise à bail, les ressources de l'occupant ne doivent pas dépasser
le plafond de ressources fixé pour bénéficier d'un prêt locatif aidé.
La définition de ce nouveau champ de compétences ainsi ouvert aux organismes
d'HLM nécessite l'insertion d'un chapitre nouveau dans le code de la
construction et de l'habitation.
Le premier article de ce chapitre arrête la liste des organismes pouvant
prendre à bail des logements vacants. Il s'agit, en plus des offices publics
d'habitations à loyers modérés, des offices publics d'aménagement et de
construction, des sociétés anonymes coopératives de production d'HLM et des
sociétés anonymes d'HLM.
Le deuxième article fixe deux conditions importantes.
En premier lieu, dans les communes qui, au sens de la loi d'orientation sur la
ville, ont un nombre de logements locatifs sociaux supérieur à 20 % du nombre
total de logements, le contrat de prise à bail doit recueillir l'accord du
maire, qui peut en apprécier l'impact au regard des besoins de la commune ou de
la mixité sociale.
En second lieu, le logement pris à bail doit être vacant depuis deux ans au
moins. Cette durée implique qu'il s'agit d'une vacance structurelle et que
toutes les solutions offertes par le secteur privé se sont révélées
inopérantes.
Le troisième article précise que les travaux de mise aux normes, s'ils sont
nécessaires, sont à la charge du bailleur, mais que l'organisme d'HLM peut être
chargé de leur suivi et de leur réalisation pour le compte du propriétaire.
Les quatrième et cinquième articles précisent que le logement est attribué
dans les mêmes conditions qu'un logement HLM et, pour certaines dispositions
concernant le contenu du contrat de sous-location, les droits et obligations de
l'occupant ou encore le droit à congé, qu'il est fait application de la loi du
6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.
Le dernier article du nouveau chapitre précise les conditions de fin de bail
entre le propriétaire et l'organisme d'HLM, à l'issue de la durée de location,
qu'ils auront librement déterminée.
Le propriétaire peut ainsi décider de passer directement un contrat de
location avec le sous-locataire du logement, mais il peut également décider de
récupérer son bien libre de toute occupation.
Dans ce dernier cas, l'organisme d'HLM est tenu, vis-à-vis du propriétaire, de
faire libérer le logement. Vis-à-vis de l'occupant, si ce dernier remplit les
conditions pour être bénéficiaire d'un logement HLM, l'organisme doit lui
proposer un logement répondant à ses besoins et à ses possibilités.
La commission des affaires économiques juge tout à fait intéressant le contenu
de la proposition adoptée par l'Assemblée nationale. Ce texte devrait répondre
aux besoins de personnes en attente de logement ainsi qu'aux souhaits des
propriétaires, qui seraient assurés de percevoir régulièrement un loyer et de
récupérer leur bien en bon état en fin de bail.
De même, en favorisant la réalisation de travaux de réhabilitation sur le
patrimoine privé, ce dispositif va stimuler l'activité dans le secteur du
bâtiment.
Il s'agit en outre d'un dispositif équilibré, qui respecte l'initiative privée
en prévoyant un délai de vacance suffisamment long et en ne donnant pas un
mandat de gestion aux organismes d'HLM, de telle sorte que les agences
immobilières et les syndics n'auront pas à subir une concurrence à cet
égard.
Enfin, il associe au processus les élus locaux, qui ont des responsabilités
particulières en ce qui concerne la mixité sociale des populations qu'ils
administrent.
Cet outil, certes, monsieur le secrétaire d'Etat, ne constitue pas la panacée,
mais c'est un élément de réponse tant pour des communes rurales, par
l'intervention d'un office départemental d'HLM,...
M. Alain Vasselle.
Tout à fait !
M. Gérard Braun,
rapporteur.
... que pour des logements vacants situés dans des villes
moyennes. Il peut s'insérer, en tant qu'outil d'intervention pour un organisme
d'HLM, dans une opération programmée d'amélioration de l'habitat lancée par une
collectivité locale.
Enfin, je soulignerai tout l'intérêt de ce dispositif pour des populations en
difficulté : un bon usage de la prise à bail devrait leur permettre, à terme,
de bénéficier d'un logement convenable dans des conditions de droit commun. Je
juge en effet très souhaitable que l'organisme d'HLM puisse, le plus souvent
possible, s'effacer à l'issue de la convention de prise à bail pour que le
propriétaire bailleur signe un contrat de location directement avec l'occupant
du logement.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous indique, mes chers collègues,
que la commission a approuvé l'ensemble de cette proposition de loi et qu'elle
vous invite à l'adopter sans modification.
(Très bien ! et
applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
proposition de loi dont nous sommes saisis vise à mettre en place une procédure
qui répond à une incontestable utilité.
L'excellent rapport présenté par notre collègue M. Gérard Braun est, à cet
égard, éloquent.
Outre son utilité, sur laquelle je reviendrai dans un instant, ce texte a la
triple particularité de s'appuyer, d'une manière très pragmatique, sur des
constats vérifiables sur le terrain, de reposer sur la libre adhésion de ceux
qui auront à le mettre en oeuvre et de laisser la place à une très grande
souplesse dans son application.
Rien ne devrait donc s'opposer à ce que cette proposition de loi rencontre un
accueil consensuel.
Notre pays compte aujourd'hui environ deux millions de logements vacants, soit
près de 8 % du parc total, et cela alors que des centaines de milliers de
demandes, émanant le plus souvent de familles modestes, ne peuvent pas être
satisfaites.
Parmi ces logements vacants, il en est bien sûr qui, appartenant à des
investisseurs institutionnels, ne sont pas visés par la présente proposition de
loi. Il y a également ceux qui sont situés dans des immeubles neufs et qui, au
gré des fluctuations du marché, seront mis en vente ou loués ; ceux-ci non
plus, ne serait-ce qu'en raison de leur coût, ne peuvent entrer dans le cadre
qui nous intéresse ici.
En revanche, peuvent être concernés les logements devenus vacants et restant
dans l'attente d'un nouveau locataire, les logements pour lesquels les normes
minimales d'habitabilité et de confort ne sont plus respectées, les logements
que leur propriétaire hésite à relouer, pour les raisons les plus diverses,
ainsi que les logements provisoirement indisponibles, dans l'attente de travaux
ou du règlement d'une situation juridique complexe.
Le dispositif proposé ne pouvant s'appliquer qu'aux logements vacants depuis
au moins deux ans, on est fondé à admettre qu'il vise les cas où le
propriétaire n'a pas voulu ou n'a pas pu relouer son bien ou encore que les
professionnels de la gestion immobilière n'ont su répondre à l'attente
éventuelle du propriétaire.
L'intervention d'un organisme public qui viendrait pallier cette inertie ou
cette défaillance ne saurait donc être contestée dans son principe.
Comme, en tout état de cause, le dispositif envisagé repose sur la libre
acceptation du propriétaire, il ne peut s'agir pour lui d'une contrainte ; il
s'agit plutôt de lui offrir une assistance pour faire face à une situation
problématique qui, souvent, le dépasse.
Il convient en effet, me semble-t-il, d'échapper à une vision trop manichéenne
des relations entre propriétaires et locataires.
La gestion d'un bien peut se révéler, pour un propriétaire, une tâche trop
lourde. Les membres d'une même famille héritant d'un immeuble, les personnes
âgées hébergées en maison de retraite et désireuses de ne pas se défaire de
leur bien immobilier avant leur décès, les propriétaires qui devraient assumer
tant sur le plan technique que du point de vue administratif la réhabilitation
ou la mise aux normes d'un logement locatif, ceux qui ont vécu des relations
difficiles avec un ou plusieurs locataires préfèrent, plus souvent qu'on
pourrait le penser, laisser leur bien vacant.
C'est là que le savoir-faire des organismes d'habitation à loyer modéré peut
permettre au propriétaire de se décharger des contraintes et des risques
qu'entraînerait pour lui une initiative dont il garderait la maîtrise.
Il n'est pas question, bien évidemment, que ces organismes investissent
financièrement au bénéfice de propriétés privées. Ils sauront, cependant, en
tant que mandataires des propriétaires, conduire les études techniques
nécessaires, établir éventuellement les dossiers de demande de subvention
spécifique, négocier avec les entreprises, surveiller leurs prestations et
faire bénéficier les propriétaires d'économies d'échelle, compte tenu de
l'importance du parc sur lequel les entreprises sont conduites à intervenir.
S'agissant de l'occupation du logement, le propriétaire n'a à entretenir de
relations qu'avec un seul interlocuteur, l'organisme d'HLM, celui-ci étant tenu
de restituer, au terme du contrat, le logement au propriétaire, libre de toute
occupation, après qu'il aura - et c'est une autre de ses obligations - assuré
le relogement de son propre locataire.
Sans doute la mission des organismes d'HLM s'en trouvera-t-elle alourdie. Mais
chacun d'entre eux ne mettra en oeuvre cette procédure que dans la mesure et
dans les proportions qu'il aura lui-même décidées. De plus, les avantages
devraient être globalement tels qu'ils justifient très largement les
contraintes supplémentaires inhérentes au système.
Avant tout, le parc locatif se trouvera considérablement élargi, et il sera
donc possible d'apporter plus rapidement une réponse aux très nombreuses
demandes en instance.
La diversité des logements entrant dans le cadre de la procédure visée par la
loi permettra, au regard tant de la composition et de la surface des logements
que du prix de location au mètre carré, de répondre à l'attente et aux
possibilités financières des familles d'une manière sans doute plus fine que si
l'on ne dispose que d'un grand ensemble locatif aux unités relativement
stéréotypées.
Le dispositif qui est proposé va aussi dans le sens d'une plus grande mixité
sociale, objectif prioritaire de la politique de la ville, puisque les
logements concernés seront nécessairement disséminés à travers le tissu
urbain.
A cet égard, il convient de souligner la sagesse de la disposition qui associe
obligatoirement le maire aux opérations envisagées, sachant qu'il est le mieux
à même d'en mesurer l'effet sur l'équilibre social de telle ou telle partie de
sa ville ou de sa ville considérée dans sa globalité.
Un autre intérêt, non négligeable, me semble résider dans le « coup de fouet »
que la mise en oeuvre de la loi pourrait donner aux métiers du second oeuvre du
bâtiment, métiers qui connaissent aujourd'hui d'importantes difficultés.
Sans doute une étude macroéconomique permettrait-elle de démontrer que, grâce
au levier que représente la subvention de l'ANAH pour la mise aux normes et la
réhabilitation de logements anciens, les cotisations sociales, les taxes sur
les salaires et, surtout, le produit de la TVA compensent les fonds publics
investis dans les opérations, sans compter le coût qu'induirait le chômage des
ouvriers concernés si les chantiers n'étaient pas ouverts.
Un abondement significatif des crédits destinés à l'ANAH constituerait dans
cette perspective, me semble-t-il, un investissement particulièrement opportun
et efficace.
L'objectif que vise la proposition de loi dont nous débattons est ambitieux :
il consiste à remettre sur le marché locatif, en quelques années, plusieurs
centaines de milliers de logements.
Son principal atout réside dans sa très grande souplesse, puisqu'elle renvoie
à la négociation entre le propriétaire et l'organisme d'HLM la détermination
des conditions du contrat ainsi que sa durée.
Le propriétaire ne court aucun risque. L'organisme d'HLM n'investit pas de
fonds et ne court, dans ses relations avec son propre locataire, pas plus de
risques qu'il n'en court dans le parc qui lui appartient en propre.
Reste une interrogation : comment le contact entre l'organisme d'HLM et les
propriétaires va-t-il s'établir ? Comment arrivera-t-on à dénicher ces
centaines de milliers de logements qui se trouvent aujourd'hui dans l'attente
d'un locataire ?
Il est bien entendu tout à fait impensable que des services publics, tels que
les services fiscaux ou encore l'INSEE, à l'issue d'un recensement, fournissent
aux organismes d'HLM une liste de logements inoccupés. Ce serait non seulement
totalement illégal, mais encore contraire à l'esprit de la proposition de loi
dont nous délibérons, le dispositif devant s'appliquer sans pression d'aucune
sorte.
Il conviendra donc de mener une importante campagne d'information, en y
consacrant les moyens nécessaires. L'enjeu le justifie.
Il faudra également ouvrir un large dialogue avec les syndicats de
propriétaires, afin qu'ils se fassent, eux aussi, auprès de leurs mandants, les
avocats d'un dispositif qui va dans le sens de leur intérêt et qui devrait, par
ailleurs, permettre d'assurer un logement décent et à un prix abordable à des
familles aujourd'hui en attente.
La réduction de la fracture sociale passe aussi par la réalité du droit au
logement.
Le groupe du Rassemblement pour la République votera avec conviction la
proposition de loi qui nous est soumise et qui est due à l'initiative du
député-maire de Colmar, M. Gilbert Meyer.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
avec un parc vacant qui a plus que triplé en quarante ans, avec 1,9 million de
logements vacants - M. le secrétaire d'Etat a cité le chiffre de 2,2 millions
et M. Eckenspieller celui de 2 millions - dénombrés sur un parc de 26 millions
de logements, ce qui n'est pas négligeable, il fallait prendre rapidement des
mesures favorisant le développement de l'offre locative du parc social privé.
La proposition de loi qui nous est soumise va dans le bon sens et devrait
répondre à l'attente de nombreux maires, notamment en milieu rural, sans cesse
confrontés à la pénurie de logements locatifs.
Comme je l'avais dit devant la mission sur l'aménagement du territoire, je
préfère plutôt des mesures incitatives de cette nature à une formule de
taxation des propriétaires de logements vacants qui ne mettraient pas ceux-ci
sur le marché, soit en les louant, soit en les vendant. Cette idée avait été
défendue par le président de la commission des affaires économiques du Sénat,
M. François-Poncet, et soutenue par nombre de nos collègues du groupe
socialiste
Je dénonce, pour ma part, une disposition de cette nature. Il vaut mieux, je
le répète, prendre des mesures incitatives et voir leurs effets. La proposition
de loi qui nous est soumise y contribue. Si nous constatons qu'un certain
nombre de propriétaires sont récalcitrants et que les résultats escomptés ne
sont pas obtenus, il sera temps d'envisager la taxation de ces logements.
La construction de logements locatifs sociaux se révèle de plus en plus
difficile d'un point de vue tant financier que juridique et les dispositifs
actuels n'ont pas eu l'effet escompté.
Ainsi, comme l'ont souligné M. le secrétaire d'Etat et M. le rapporteur, le
bail à réhabilitation n'est pas suffisamment exploité. A la fin de 1993, seules
420 opérations ont été réalisées ; c'est vraiment peu. Mille logements,
avez-vous dit, monsieur le rapporteur, ont été concernés depuis l'existence de
ce bail ; c'est vraiment en deçà des espérances des gouvernements qui se sont
succédé.
Pourtant, ce mécanisme constitue l'une des « bonnes » solutions pour répondre
à nos besoins en matière de logements sociaux avec le concours des organismes
d'HLM et des communes. En tant que président d'une société anonyme d'HLM, j'ai
signé plusieurs baux à réhabilitation et même quelques baux à construction.
Mais il est vrai qu'il n'est pas facile de convaincre les propriétaires. Il
faut donc mener une campagne de sensibilisation auprès de ceux-ci pour qu'ils
s'engagent dans une opération de cette nature.
Vous avez relevé vous-même, monsieur le rapporteur, quels étaient les
obstacles : la durée du bail, les difficultés de montage sur le plan juridique,
les dispositions fiscales qui peuvent en résulter et que craint le propriétaire
en fin de parcours. Tous ces éléments ont été de nature à freiner les effets
attendus de la mise en place du bail à réhabilitation ou du bail à
construction.
Il faudrait sans aucun doute, en dehors des mesures qui vont être prises par
le biais de ce texte, mener des campagnes de sensibilisation ou d'information
auprès de l'ensemble des propriétaires et peut-être également auprès des
organismes qui semblent peu user du dispositif qui leur est offert.
D'autres dispositifs ont tenté de contribuer à réactiver le parc vacant. C'est
ainsi que le propriétaire qui a reloué son logement vacant depuis plus d'un an
peut bénéficier pendant deux ans d'une exonération de ses impôts sur ses
revenus fonciers. Par ailleurs, la faculté a été reconnue aux préfets de
réquisitionner un logement vacant depuis plus de dix-huit mois. Là encore, les
résultats sont assez mitigés. Il s'agit d'une formule coercitive qui n'enchante
bien évidemment pas les propriétaires mais qui se justifie certainement dans
des villes importantes.
Les résultats étant ce qu'ils sont, une initiative devait être prise et je me
réjouis donc du dépôt de la proposition de loi de notre collègue député Gilbert
Meyer. Elle devrait constituer une avancée notable au regard de la législation
actuelle.
Le dispositif proposé s'inspire très largement des baux à réhabilitation. Le
texte prévoit qu'une convention de location sera passée entre le bailleur privé
et l'organisme d'HLM. Ce contrat librement négocié, vous l'avez rappelé,
monsieur le rapporteur, devra préciser les missions de ce dernier, au regard
notamment du logement pris à bail, et définir les modalités de rémunération de
l'organisme d'HLM.
Le propriétaire aura plusieurs options : concernant les travaux de rénovation,
soit il en assumera la charge, soit il en confiera la réalisation à
l'organisation d'HLM locataire ; s'agissant du loyer, le propriétaire pourra
soit se conformer à la réglementation de droit commun, soit opter pour la
législation applicable aux HLM en matière de plafond de ressources. Encore
faudrait-il préciser - et sur ce point M. le secrétaire d'Etat et M. le
rapporteur ont été muets - les conditions d'éligibilité des futurs locataires à
l'APL. Cette disposition est essentielle si nous voulons que cette proposition
de loi ait les effets escomptés.
Ce sont autant de possibilités qui devraient rassurer le propriétaire privé
tant en ce qui concerne le paiement du loyer que l'entretien du bien. Comme
pour le bail à réhabilitation, le propriétaire serait assuré de récupérer son
logement à l'issue du contrat, l'organisme d'HLM ayant l'obligation de reloger
le sous-locataire.
Certes, ce dispositif introduira une plus grande souplesse. Nous pouvons donc
espérer que les retombées seront positives. Toutefois, il subsiste un certain
nombre de points sur lesquels je souhaiterais obtenir de la part de M. le
secrétaire d'Etat ou de M. le rapporteur quelques précisions
complémentaires.
Il demeure, à mon sens, pour ce qui concerne les organismes d'HLM, un certain
flou qui risque de compliquer la gestion et de soulever quelques difficultés
pratiques qu'il me paraît souhaitable de prévenir. S'il faut en effet
indéniablement inciter les propriétaires privés, il n'en est pas moins
nécessaire de définir les contours juridiques, administratifs et financiers de
ce dispositif pour les organismes d'HLM afin de les encourager à y entrer.
S'agissant des modalités financières et fiscales, le texte qui nous est soumis
n'est pas très explicite. Des dispositions d'ordre réglementaire devraient donc
venir le préciser et le compléter afin que ce dispositif « intéressant » soit
pleinement effectif.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous faire connaître vos
intentions quant aux décrets d'application ? Certes, vous nous avez dit tout à
l'heure que le loyer tiendrait compte de la durée du bail et qu'une ou deux
mesures complémentaires préciseraient les conditions dans lesquelles cette
opération pourrait se réaliser.
Accepterez-vous l'application d'une TVA minorée ? Les organismes d'HLM
pourront-ils, pour ces logements, accéder aux crédits PALULOS, prime à
l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale ?
Pourront-ils bénéficier des prêts bonifiés pour ces opérations ? Quelle en sera
la durée ? Quel sera le délai pour le relogement du locataire ? Quelle sera la
durée du bail ? Le conventionnement sera-t-il possible ?
Ce sont autant de questions que les organismes d'HLM se posent et se poseront
et sur lesquelles les propriétaires souhaitent obtenir des assurances.
J'approuve le bilan de l'ANAH dressé de manière fort exhaustive par M. le
rapporteur. Lors de l'examen des crédits consacrés au logement, j'avais déjà eu
l'occasion de relever que la taxe additionnelle au droit au bail qui alimentait
les ressources de l'ANAH n'était pas totalement réaffectée à cette agence. Je
ne puis donc que m'associer totalement aux remarques pertinentes formulées à ce
sujet par notre excellent rapporteur, M. Braun.
J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous réussirez à convaincre très
rapidement votre collègue de Bercy et M. le Premier ministre pour qu'un pas en
avant sensible soit franchi en faveur du logement privé au moins dans la
perspective de la loi de finances pour 1999.
Comme pour le bail à réhabilitation, les organismes d'HLM vont se trouver
confrontés à la difficulté de reloger le sous-locataire à l'issue du contrat.
Peut-être s'agit-il d'un élément susceptible de dissuader un certain nombre
d'organismes d'HLM de se lancer dans une telle opération, à l'instar de
l'expérience vécue pour les baux à réhabilitation. En effet, il n'est pas aisé
de reloger un locataire dans une petite commune rurale qui dispose d'un parc
locatif limité.
Il faudrait donc pouvoir introduire par la voie réglementaire une plus grande
souplesse pour donner un délai à l'organisme HLM afin de lui permettre de
reloger le sous-locataire qui occupait un logement privé. J'ai conscience que
certains candidats propriétaires pourraient manifester quelques réticences mais
à, mon avis, dans la mesure où les délais resteraient raisonnables, l'organisme
d'HLM et le propriétaire devraient pouvoir accepter une telle pratique.
A cet égard, il conviendrait donc de poursuivre la démarche entreprise par le
biais de cette proposition de loi en instituant, à la fin du bail, un système
plus souple, tel que le mandat de gestion au profit des organismes d'HLM. Si
cette formule était mise en oeuvre, il serait possible de pérenniser l'ensemble
du dispositif à l'issue du bail.
Cette proposition de loi devra également prendre en compte la mixité sociale.
Il faudra veiller à une meilleure mixité sociale non seulement dans les villes,
mais aussi sur l'ensemble du territoire, c'est-à-dire à une mixité géographique
entre espaces urbains et ruraux, afin de mettre un terme à la concentration des
habitants aux ressources modestes dans des quartiers qui, à terme, vont se
dégrader et poser tous les problèmes que nous connaissons aujourd'hui en
matière de sécurité et d'intégration des habitants dans les quartiers et dans
les villes.
Si nous pouvons développer cette formule du parc social en milieu rural en
nous appuyant sur le parc privé, je suis persuadé que nous répondrons à un
objectif essentiel de la loi d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire.
Ce texte devrait donc avoir le mérite de remettre en vie nombre de logements
abandonnés et de satisfaire de nombreuses demandes de logement en instance tout
en évitant au parc public d'HLM de croître sans cesse et de faire toujours
appel à la collectivité publique. Toutefois, pour que son succès soit certain
et que nous n'ayons pas dans deux ans à en tirer les mêmes conclusions que pour
le bail à réhabilitation, il me semble impérieux qu'un certain nombre de
mesures complémentaires suivent, dispositions que nous pourrions d'ailleurs
tout à fait intégrer dans un projet de loi portant diverses dispositions
d'ordre social, si vous le jugez nécessaire, monsieur le secrétaire d'Etat, le
moment venu. Si ce texte est accompagné d'un arsenal réglementaire complet et
qui répond à l'attente des organismes d'HLM et des propriétaires, nul doute
qu'il répondra aux objectifs que l'on cherche à atteindre.
Compte tenu de ces remarques, j'associerai sans aucune difficulté mon vote à
celui de mes collègues pour approuver la proposition de loi telle qu'elle nous
a été présentée par M. le rapporteur.
(Applaudissements sur les travées du
RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Piras.
M. Bernard Piras.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si
nous examinons aujourd'hui une proposition de loi permettant aux organismes
d'HLM d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail des logements
vacants pour les donner en sous-location, c'est parce que nous assistons, pour
l'instant impuissants, à une situation véritablement paradoxale.
D'un côté, on constate un manque cruel de logements, ou plutôt une offre de
logements inadaptée aux besoins de la population : une pénurie de logements en
zone urbaine et des logements dont les loyers sont trop élevés par rapport aux
ressources d'une partie de la population. Il en résulte que plus d'un million
et demi de personnes sont mal logées et que plus de 200 000 personnes sont sans
logement. De l'autre, on constate que deux millions de logements sont vacants,
dont environ 20 % pourraient être assez rapidement remis dans le circuit
locatif, selon le rapport du Haut comité pour le logement des personnes
défavorisées.
Devant la persistance d'un tel déséquilibre, socialement et moralement
insupportable, les pouvoirs publics se devaient, à l'évidence, d'intervenir.
Tel a d'ailleurs été le principal objet de la loi du 31 mai 1990, visant à la
mise en oeuvre du droit au logement, dont vous avez été l'heureux initiateur,
monsieur le secrétaire d'Etat. Dans cette loi a été institué le bail à
réhabilitation. Ce dispositif, comme la proposition de loi que nous examinons
aujourd'hui, vise à inciter les propriétaires privés à mettre en location des
logements vacants en confiant la gestion, les travaux d'amélioration et
l'entretien à une personne morale : organisme d'HLM, SEM, collectivité
territoriale, organisme spécialisé dans le logement des personnes défavorisées.
Le bail est conclu pour une durée de douze ans.
Par ailleurs, depuis 1994, pour rendre le système un peu plus attractif, les
communes peuvent exonérer de la part de la taxe foncière qui leur revient les
logements faisant l'objet d'un bail à réhabilitation.
Malheureusement, cette disposition n'a pas donné les résultats escomptés, même
si le nombre de baux ne cesse de croître.
L'esprit du dispositif qui nous est proposé dans la présente proposition de
loi est assez proche de celui du bail à réhabilitation : le preneur est une
personne morale, en l'espèce les seuls organismes d'HLM ; la prise à bail ne
vise que les logements de personnes physiques, vacants depuis deux ans.
Toutefois, et c'est une différence importante avec le bail à réhabilitation,
aucune durée de location n'est fixée par la loi. Les conditions de la prise à
bail sont fixées par voie contractuelle ; il est simplement précisé que les
logements sont attribués selon les règles en vigueur pour les HLM et que la
grille des loyers est déterminée par l'autorité administrative. A ce propos, le
Gouvernement peut-il nous indiquer quelle sera la grille de référence, à savoir
celle des HLM ou celle des logements conventionnés par l'ANAH ?
Enfin, je souhaite souligner un dernier point. A l'origine, la proposition de
loi prévoyait de solliciter l'accord du maire de la commune concernée avant
toute prise de bail. Sur l'initiative des députés socialistes, il a été précisé
que l'accord des maires ne sera requis que dans les communes dont le parc
public social représente au moins 20 % du parc total des logements - seuil
retenu pour la dotation de solidarité urbaine. Cet amendement me paraît capital
pour éviter que des maires peu soucieux de mixité sociale ne puissent s'opposer
à la prise à bail. La commission des affaires économiques a retenu cette
rédaction et je m'en félicite.
Ce nouveau dispositif permettra-t-il non seulement de pallier les
insuffisances du bail à réhabilitation, mais aussi de mobiliser le parc privé
vacant ? Permettez-moi d'en douter.
Je vois à cela plusieurs raisons.
La première réside dans une question de méthode. Je m'étonne que l'on mette en
place un dispositif proche d'un autre dispositif dont tout le monde s'accorde à
dire qu'il n'a pas très bien fonctionné. N'aurait-il pas fallu avant toute
chose examiner les raisons de cet échec ? Sur ce point, pouvez-vous, monsieur
le secrétaire d'Etat, nous indiquer l'état de vos réflexions ? Envisagez-vous
de modifier le régime fiscal des baux à réhabilitation - revenus fonciers, taxe
de publicité foncière et droits de mutation - pour les rendre plus attractifs
?
La deuxième raison est la suivante : l'un des principaux acteurs du système,
les organismes d'HLM, ne sont pas demandeurs. En effet, on a du mal à voir quel
est leur intérêt dans cette affaire, puisqu'ils ont à supporter tous les
inconvénients du système : prise en charge des impayés et de leurs conséquences
malheureuses que sont les expulsions, ou encore obligation de faire une offre
de relogement au sous-occupant dans leur parc à l'issu du contrat de bail,
quand bien même le taux de vacance de ce parc est nul...
L'auteur de la proposition de loi met alors en avant le savoir-faire des
organismes d'HLM en matière de gestion locative. Soit. Mais que devient ce
savoir-faire dès lors qu'il s'agit de gérer non pas des ensembles collectifs
mais des copropriétés ? Par ailleurs, cette procédure risque d'entraîner pour
ceux-ci des frais supplémentaires. Or on connaît les difficultés de trésorerie
qu'ils rencontrent.
Les organismes d'HLM auraient préféré le mécanisme du mandat de gestion. Mais
ce serait alors les transformer en administrateurs de biens. Ce n'est sans
doute pas là leur vocation.
Troisième raison : les organismes d'HLM ne sont peut-être pas ceux qui sont le
plus à même de gérer ce type d'opérations.
Je considère que c'est une bonne chose, dans le souci de permettre le logement
des personnes défavorisées et de mieux mobiliser le parc vacant, d'encourager
ce qu'on appelle la gestion locative intermédiée. La location de logements par
des associations en vue de leur sous-location à des familles en difficulté et
la gestion par des agences immobilières à vocation sociale se sont développées
au cours des dernières années. C'est bien souvent un moyen judicieux pour
vaincre les réticences des propriétaires. On remarque, par exemple, que, parmi
les preneurs de baux à réhabilitation, 93 % sont des associations. Cette
mission d'intermédiation a malheureusement un coût élevé, en raison du public
auquel elle s'adresse. Là encore, monsieur le secrétaire d'Etat, allez-vous,
dans le cadre du projet de loi relatif à la lutte contre les exclusions, faire
des propositions pour favoriser ce genre d'initiative ?
Dernière raison : l'autre acteur du dispositif, le propriétaire du logement,
n'a, lui non plus, guère d'intérêt à un tel système. Certes, il est déchargé de
soucis importants : les impayés et la réalisation des travaux, ce qui est un
élément non négligeable pour les personnes âgées. Néanmoins, la charge
financière des travaux incombe au propriétaire. Il est vrai que les logements
étant conventionnés, celui-ci pourra avoir recours aux subventions de l'ANAH.
Cependant, malgré la hausse des crédits budgétaires dans la loi de finances
pour 1998, la ressource n'est guère extensible, d'autant que ce type
d'opérations coûte cher et que les crédits de l'ANAH vont subventionner des
réhabilitations plus en zone rurale qu'en zone urbaine, là où le marché n'est
pas tendu.
Pour toutes ces raisons, nous doutons que ce nouveau dispositif ait un effet
important sur la baisse du nombre de logements vacants. Je souhaite de tout
coeur me tromper, compte tenu des enjeux, mais j'ai bien peur que cela ne se
révèle décevant. Cependant, il ne serait pas raisonnable de ne pas tout essayer
pour résoudre le paradoxe actuel. Aussi, tout en étant conscient des lacunes,
nous ne nous opposerons pas à cette proposition de loi.
M. Gérard Braun,
rapporteur.
Très bien !
M. Bernard Piras.
Cependant, nous souhaitons que le problème de la vacance des logements dans le
parc locatif privé soit abordé de manière approfondie et exhaustive dans les
projets de loi en cours de préparation : celui qui est relatif à la lutte
contre les exclusions et celui qui concerne le statut du bailleur privé.
Les sénateurs du groupe socialiste font, depuis plusieurs années, des
propositions pour lutter contre la vacance des logements, je pense à un
amendement que nous défendons régulièrement et qui vise à réduire de 50 % à 20
% la déduction du montant de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour
les logements vacants depuis plus de deux ans. J'espère que vous ferez vôtre
cette idée, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Alain Vasselle.
Non !
M. Bernard Piras.
J'espère, enfin, que vous explorerez toutes les voies possibles pour donner à
tous un logement décent.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi
que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Vasselle.
Sur ce point, nous sommes d'accord, mais pas sur la taxation.
M. le président.
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
cette proposition de loi fait la preuve de l'excellent travail issu de
l'initiative parlementaire. Je tiens d'ailleurs à féliciter mon éminent
collègue Gérard Braun de la clarté et de la pertinence de son rapport.
M. Alain Vasselle.
Comme toujours !
M. Dominique Braye.
Ce texte permet d'atteindre l'objectif visé en proposant une solution, parmi
beaucoup d'autres naturellement, au problème crucial du logement dans notre
pays. Mais je souhaiterais surtout insister sur la politique de réhabilitation
des logements anciens, qui est, selon moi, une solution d'avenir, dans un
contexte budgétaire resserré.
Il est évident qu'il faut trouver un remède au douloureux problème de
l'insuffisance des logements dans notre pays, surtout de logements adaptés à
l'extrême diversité des situations sociales. Alors que, comme l'a rappelé M. le
rapporteur, près de deux millions de personnes sont mal logées ou sont sans
logement, il est impératif de se mobiliser pour que tous les logements vacants
- nombreux, on le sait - soient mis en état d'accueillir des locataires. C'est
un service à rendre à des personnes en attente de logement, mais aussi à de
nombreux petits propriétaires.
Cette proposition de loi répond parfaitement à cet objectif par la mise en
place d'une procédure souple, et plus équilibrée que le bail à réhabilitation
qui, comme tous les orateurs l'ont rappelé, a montré ses limites. C'est donc un
dispositif qui devrait profiter aussi bien aux propriétaires qu'aux locataires
et aux offices d'HLM.
J'observe que ce texte marque une reconnaissance officielle du savoir-faire et
de la compétence des offices d'HLM dans la gestion d'un parc locatif à la fois
très important et essentiel à notre société.
M. Alain Vasselle.
Et des sociétés anonymes !
M. Dominique Braye.
Les offices d'HLM en général, et les sociétés anonymes d'HLM en particulier,
si vous voulez, mon cher collègue.
Ce parc est en effet un élément clé de notre politique sociale. L'utilité
sociale des mesures prévues par ce texte est indéniable, et nous pouvons tous
nous en féliciter.
Le système qui nous est proposé a l'avantage de concilier les intérêts souvent
divergents des propriétaires privés et des locataires, qui peuvent parfois
rencontrer des difficultés à se loger hors du parc HLM public. Il garantit, en
effet, une sécurité financière et juridique aux propriétaires, sécurité qui est
devenue aujourd'hui un critère déterminant dans la conclusion des baux.
Il est évident qu'une telle incitation systématisée sur l'ensemble du parc
locatif ancien et vacant aura des incidences extrêmement positives sur le
bâtiment, secteur de notre économie riche en main-d'oeuvre. Cela aura donc des
retombées positives, d'une part, sur les chiffres du chômage dans un secteur
d'activité particulièrement sinistré et, d'autre part, sur la qualité globale
du parc locatif ancien.
Si ce texte est en mesure d'apporter une solution à l'un des aspects de la
vacance des logements, il n'en demeure pas moins qu'il met en lumière une
perspective essentielle de la politique du logement comme de la politique de la
ville : la réhabilitation du parc ancien, pour laquelle l'Agence nationale pour
l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, est un outil essentiel et
irremplaçable.
La réhabilitation des logements anciens est une idée d'avenir, car elle est
une alternative économique à la construction de logements neufs. Elle permet,
notamment, d'élargir la gamme de l'offre à tous les niveaux de revenus.
Mais la principale raison de la vacance, après la crainte des loyers impayés,
est la non-conformité des logements aux normes de salubrité et de confort, que
les petits propriétaires ne peuvent résoudre seuls.
Je m'arrêterai ici un instant sur un exemple que je connais particulièrement
bien et qui illustre la place indispensable de l'ANAH.
Dans le cadre du projet « Mantes en Yvelines », programme d'investissement et
de redynamisation urbaine sans précédent, que vous connaissez, monsieur le
secrétaire d'Etat, puisque vous vous êtes récemment déplacé dans notre Mantois
afin de signer le CDU, le contrat de développement urbain, nous avons mis en
place un programme coordonné d'intervention sur le logement. Mis en oeuvre pour
trois ans depuis le 1er janvier 1997, il a déjà atteint le tiers de ses
objectifs au bout d'un an, à savoir quatre cents logements, soixante enseignes
et quarante vitrines rénovées en centre-ville.
Or il faut savoir que, sur les 55 millions de francs du budget total de ce
programme, 40 millions de francs sont pris en charge par l'Etat par le biais de
l'ANAH et de la prime à l'amélioration de l'habitat, la PAH. L'apport de l'ANAH
a donc été décisif dans le lancement de cette opération, dont le résultat sera
la réhabilitation du centre de Mantes-la-Jolie, qui était progressivement
déserté en raison de la vétusté de la plupart des logements, lesquels étaient
le plus souvent récupérés par des marchands de sommeil.
La redynamisation du centre-ville, qui est au coeur de notre politique, répond
en outre à deux objectifs ambitieux, qui sont la restauration d'une véritable
mixité sociale dans l'habitat et la relance du secteur du bâtiment dans le
Mantois.
On le voit, l'ANAH est un instrument formidable. En 1996, elle a permis, comme
le rappelait M. le rapporteur, de remettre sur le marché 38 500 logements
vacants en France. La remise en état de ces logements a mobilisé les quatre
cinquièmes de son budget, soit 1,9 milliard de francs. Malheureusement, son
budget total, qui s'élève à 2,2 milliards de francs, est notoirement
insuffisant.
Je voudrais soulever ici un point préoccupant. Le budget de l'ANAH devait
initialement être abondé à la même hauteur que les sommes perçues au titre de
la taxe additionnelle au droit de bail, la TADB. L'Etat s'y était en effet
engagé lors de l'institution de cette taxe. Or, depuis 1992, l'assiette de
cette dernière a été élargie et son revenu a augmenté de 43 % en cinq ans pour
atteindre 3,358 milliards de francs en 1996, alors que, dans le même temps, le
budget de l'ANAH n'a augmenté que de 10 %.
La TADB, destinée à l'amélioration de l'habitat, ne saurait être consacrée à
d'autres objectifs. Et, sans aller jusqu'à parler de « hold-up », je m'étonne
qu'un tiers de la somme qui devait être allouée à l'ANAH, soit plus d'un
milliard de francs, soit affecté au budget général de l'Etat. Cela va à
l'encontre de la politique d'amélioration de l'habitat, qui fait pourtant, je
crois, l'objet d'un vaste consensus.
Les moyens de l'ANAH doivent non seulement être préservés, mais même augmentés
pour atteindre cet objectif. Nous attendons par conséquent un engagement ferme
de l'Etat en faveur d'une augmentation soutenue du budget de l'ANAH. Consacrer
nos efforts à l'amélioration de l'habitat, c'est contribuer à remédier aux deux
problèmes centraux de notre société que sont le chômage et le logement. Cela
mérite, mes chers collègues, toute notre attention et, de votre part, monsieur
le secrétaire d'Etat, une totale détermination.
Cette proposition de loi allant dans ce sens, je la voterai avec plaisir.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
situation du logement dans notre pays demeure, pour de nombreuses familles, un
droit à conquérir.
En effet, les conséquences de la législation issue de la loi Méhaignerie et la
détérioration des conditions de vie d'un grand nombre de nos compatriotes sont
tellement prégnantes que l'on ne peut manquer de souligner que cette
proposition de loi témoigne de la gravité des problèmes posés.
L'un des objectifs de la réforme de 1986 était de développer l'offre foncière
et de permettre, par la voie d'un libéralisme harmonieux dans les relations
locatives, à chacun de nos compatriotes de disposer du logement de ses
rêves.
Le constat est aujourd'hui amer ! Un grand nombre de logements du parc privé
ont en effet quitté le champ de l'accessible pour de nombreux ménages, et leurs
loyers ont pris l'ascenseur, faute d'installation de ce dernier dans les
parties communes des immeubles mis en location.
La pression s'est donc retournée vers les organismes d'HLM, eux-mêmes
confrontés à des difficultés majeures de financement de leur politique de
construction neuve et de réhabilitation de logements.
En ces matières, on ne peut d'ailleurs que souligner à nouveau la nécessité
d'un maintien à un niveau acceptable de l'aide publique directe à la
construction et à la réhabilitation de logements sous forme de subvention PLA
et PALULOS.
La présente proposition de loi apparaît en fait comme une solution parmi
d'autres aux difficultés de logement qui perdurent dans de très nombreuses
villes.
Il nous faut apprécier la présente proposition de loi comme un outil de
gestion de la demande de logement dans de nombreuses collectivités locales où
se posent, par exemple, des problèmes de relogement liés à des opérations de
maîtrises d'oeuvre urbaine et sociale particulièrement importantes et
structurantes.
On peut d'ailleurs considérer que la possibilité ouverte par la proposition de
loi peut constituer une réponse face à certaines demandes de logement émanant
de locataires qui souhaitent quitter certains de nos grands ensembles d'habitat
social pour d'autres types de résidence.
Nous ajouterions donc ainsi un élément de plus à la panoplie, certes déjà
importante, des outils de régulation de la demande et d'intervention publique
en matière de logement, qui passe par la réhabilitation des anciens hôtels
meublés ou par l'exercice du droit de réquisition.
On peut d'ailleurs faire de cette proposition de loi un palliatif à l'exercice
de ce droit de réquisition, une sorte de contrat plus harmonieux que la
situation naturellement conflictuelle issue de ce droit.
Pour autant, la présente proposition de loi doit conserver certaines
précautions qui sont loin d'être inutiles.
Tout d'abord, même si cela est dit dans le texte même, la qualité des
logements soumis à la passation d'un contrat de location doit être réelle et
répondre aux exigences d'aujourd'hui.
En cette matière, force est de constater que l'inoccupation d'une partie du
parc privé est aujourd'hui un facteur de dégradation de ce dernier, en grande
partie de par la négligence des propriétaires, même si certains ont pour excuse
de ne pas disposer de ressources suffisantes.
M. Dominique Braye.
Comment, « pour excuse » ?
M. Robert Pagès.
La question de la fixation du montant du loyer est également importante. Nous
pensons, en particulier, que le loyer ne doit et ne peut dépasser les plafonds
en vigueur en matière de prêts locatifs aidés, voire être limité à un
pourcentage significatif de ces plafonds.
Les futurs sous-locataires ayant en effet les mêmes caractéristiques que les
locataires du secteur social, il ne serait pas juste, de notre point de vue, de
créer une forme de discrimination peu justifiée.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous saurions gré de nous éclairer sur ce
point précis. Vous avez abordé le problème tout à l'heure ; je souhaiterais que
vous nous l'exposiez de façon plus détaillée.
La question des éventuels travaux de remise en état des logements reloués se
pose également.
Il importe ici de savoir si un financement est prévu pour faciliter ces
opérations et si, par exemple, les travaux accomplis par les organismes
bailleurs sociaux seront subventionnables ou susceptibles d'être expressément
décomptés du montant du loyer dû au propriétaire en titre.
En tout état de cause, et compte tenu du fait que la gravité de la situation
du logement dans notre pays impose de faire preuve de quelque peu d'imagination
et de trouver des solutions diversifiées, nous ne pouvons qu'approuver les
principes de cette proposition de loi.
Pour autant, et ce indépendamment des réponses qui seront fournies à nos
interrogations sur sa mise en oeuvre, cette proposition de loi souligne à quel
point le dispositif existant en matière de contrats de location et de relations
locatives nécessite aujourd'hui une réforme en profondeur, comme d'ailleurs
l'ensemble des règles de financement du logement dans notre pays ainsi que des
conditions de son développement et de sa pérennité.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Cléach.
M. Marcel-Pierre Cléach.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'objectif de la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui est
d'arriver à mobiliser le parc de logements privés disponibles mais inutilisés
en donnant la possibilité à certains organismes d'habitation à loyer modéré de
les prendre à bail pour les mettre en sous-location auprès des personnes
physiques.
La vacance, dont les raisons sont multiples, est en matière de logement l'un
des problèmes constants auxquels la France est confrontée depuis de nombreuses
années.
Sans vouloir dresser un panorama complet d'une situation bien connue de tous,
rappelons pour mémoire que la part du parc vacant dans le parc total a plus que
triplé de volume depuis 1954.
Pourtant, plusieurs mesures fiscales ont été prises afin d'inciter les
propriétaires à remettre en location leurs logements vacants ; je citerai
notamment à cet égard la loi du 31 mai 1990 instituant le bail de
réhabilitation - vous la connaissez bien, monsieur le secrétaire d'Etat - et
celle du 21 juillet 1994, permettant aux communes d'exonérer de leur part de
taxe foncière les logements faisant l'objet d'un bail de réhabilitation.
Force est de constater que ces formules n'ont connu qu'un succès très mitigé -
vous l'avez d'ailleurs souligné, monsieur le secrétaire d'Etat - et que le
règlement de ce problème nécessite de nouvelles initiatives.
Le dispositif que nous examinons aujourd'hui tend à la mise en place d'un
nouvel outil de mobilisation du parc des logements habituellement vacants en
tirant parti d'un savoir-faire existant qui est celui des organismes d'HLM,
sans que ce recours déséquilibre le marché existant : le texte qui nous est
proposé institue un mécanisme souple qui respecte à la fois l'initiative privée
et le pouvoir des élus locaux.
Si, dans son esprit, le nouveau dispositif est proche du bail à
réhabilitation, la procédure, pour sa part, est sensiblement améliorée et
allégée, puisqu'il n'y a pas de durée de détention et que les conditions du
contrat sont renvoyées à la libre négociation entre les parties. Cette
souplesse offre un gage de réussite certain puisqu'elle permet une réelle
adaptabilité aux réalités du terrain.
Par ailleurs, en prévoyant que seuls les logements vacants depuis plus de deux
ans entrent dans le nouveau cadre législatif, le texte respecte l'équilibre
entre l'initiative privée et l'initiative publique, évitant que le recours aux
organismes d'HLM n'en fasse des concurrents déloyaux des administrateurs de
biens. Elle respecte également la liberté de décision des bailleurs en leur
offrant un simple choix sans contrainte.
Enfin, le dispositif proposé respecte le pouvoir des maires en matière de
logement social, notamment le pouvoir d'appréciation de la mixité sociale,
puisque l'accord formel du maire est obligatoire pour les communes comptant au
moins 20 % de logements locatifs sociaux au 1er janvier de la pénultième année.
Il s'agit là d'une mesure de bon sens de nature à éviter que les villes déjà
largement pourvues en logements sociaux ne voient leur situation s'aggraver.
Pour les autres communes dans lesquelles l'autorisation formelle des maires
n'est pas requise, il apparaît néanmoins évident que l'organisme d'HLM devra,
avant d'arrêter toute disposition, en informer le maire afin de préserver sa
relation privilégiée avec les élus locaux.
L'intérêt pour l'organisme d'HLM est bien évidemment de pouvoir proposer de
nouveaux logements sans devoir les acquérir : ainsi, il se contentera de les
gérer sans avoir à modifier sa stratégie d'acquisition patrimoniale.
Pour le propriétaire privé, l'intérêt de cette sous-location réside dans la
garantie qu'apporte l'organisme d'HLM. En effet, ce dernier devient le bailleur
garant du locataire face au propriétaire privé. L'organisme prend donc en
charge les loyers impayés, les dégradations et devient responsable du
comportement de la famille ainsi logée. De plus, l'organisme d'HLM pourra
intervenir en qualité de mandataire du propriétaire pour réaliser les travaux
de remise aux normes du logement. Ces dispositions sont certes de nature à
inciter le propriétaire privé. Mais seront-elles suffisantes ?
L'intérêt, enfin, est grand pour le particulier qui se verra offrir en
sous-location un logement avec des garanties, des règles d'accès et
d'attribution identiques à celles qui sont prévues pour le parc locatif social
par le code de la constrution et de l'habitation.
Le problème est de savoir si le propriétaire privé va se laisser séduire par
cette offre ; en effet, les organismes d'HLM ont vocation non seulement par
nature, mais également en raison de la conjoncture à loger des familles
présentant socialement des handicaps de plus en plus lourds : faiblesse des
ressources financières et, parfois, comportements hors norme.
La faisabilité financière du projet suppose que le loyer fixé puisse couvrir à
la fois le loyer à acquitter au propriétaire et les frais de gestion de
l'organisme, tels les frais généraux, les frais d'impayés et les frais
d'entretien. Cela signifie que le loyer perçu par le propriétaire privé devra,
dans la plupart des cas, être inférieur au loyer plafond fixé par l'autorité
administrative. Cette difficulté, non négligeable, laisse entrevoir les limites
du système.
La dernière difficulté réside dans le fait que les logements vacants sont
souvent petits, anciens, inconfortables, et qu'ils nécessitent donc, dans la
majorité des cas, des travaux importants de remise en état. Or, compte tenu du
fait que les loyers que peuvent escompter les propriétaires seront plutôt
faibles, il est à craindre que ces derniers ne renâclent à entreprendre des
travaux importants. Même si les aides à la réhabilitation de l'ANAH leur sont
ouvertes dans les conditions prévues par la réglementation actuelle, l'obstacle
financier risque de bloquer la remise sur le marché de nombreux logements
vacants.
En conclusion, il est souhaitable et possible d'arriver à une plus grande
mobilisation du parc locatif privé. Recourir au savoir-faire des organismes
d'HLM est justifié, dans la mesure où l'initiative privée s'avère défaillante
et où l'intérêt général et social le commande.
Comme beaucoup de mes collègues, je pense que la multiplication des
initiatives devrait nous permettre de résoudre, partiellement en tout cas, ce
problème de vacance. C'est pourquoi le groupe des Républicains et Indépendants
votera cette proposition de loi, qui est de nature à répondre à certaines
situations locales critiques.
La réussite de ce texte dépendra aussi, d'une part, de l'importance des
garanties données au propriétaire privé pour l'inciter à laisser gérer son
logement par les organismes d'HLM, en dépit de la « perte » ou de la
moins-value financière qui en résultera sur le plan locatif et, d'autre part,
du sérieux du suivi des sous-locataires assuré par les HLM.
Je crains néanmoins que ce palliatif législatif ne soit insuffisant pour
répondre au problème posé. Tout d'abord, il n'entre pas dans la vocation des
organismes d'HLM de se transformer en gérants du parc locatif privé ; ensuite,
cette disposition ne doit pas conduire à remettre en cause l'importance de la
construction sociale ; enfin, il est nécessaire de multiplier les dispositions
pour élargir le parc locatif, et cette discussion me donne l'occasion de
rappeler combien il nous semble indispensable, monsieur le secrétaire d'Etat,
de mettre en place sans tarder le statut du bailleur privé que vous nous
annoncez.
Ne nous faisons cependant pas trop d'illusions. Des mesures techniques, même
intelligentes, comme celles que contient la proposition de loi qui est soumise
à notre examen, mes chers collègues, ne suffiront pas à ramener les
investisseurs privés sur le marché locatif.
Je crains que leur désenchantement ne soit irrémédiable, et les causes en sont
bien connues. Elles ne tiennent pas uniquement, loin s'en faut, au ministère
concerné, mais surtout aux évolutions ondoyantes des politiques fiscales de
l'Etat, qui privent de visibilité ce type d'investissement en modifiant, et ce
d'une année sur l'autre quelquefois, la donne fiscale.
Comment espérer, dans ces conditions, faire revenir sur ce marché le grand
nombre de propriétaires, pour la plupart des petits propriétaires, qui avaient
vu dans ce type de placement l'espoir d'un complément de retraite ou de
constitution d'un capital pour leurs enfants ou leurs petits-enfants ? Il leur
est bien plus facile, plus rémunérateur et moins risqué de souscrire à un fonds
financier !
Si l'on ajoute à cette incertitude fiscale, qui est toujours allée dans le
sens d'une aggravation des charges, les difficultés rencontrées en cas
d'impayés de loyers, les années et les coûts nécessaires pour obtenir
réparation - j'allais dire justice - il faudra aussi de très longues années et
un changement radical de politique inscrit et engagé dans la durée pour que ce
secteur, qui fut très important pour notre vie économique, remplisse à nouveau
le rôle qui fut le sien et dont nous connaissons l'importance pour l'activité
du bâtiment et le maintien de l'emploi dans ce secteur.
M. Emmanuel Hamel.
Analyse très juste ! Monsieur le secrétaire d'Etat, méditez ce qui vient
d'être dit !
M. Marcel-Pierre Cléach.
Je crois, mon cher collègue, que M. le secrétaire d'Etat connaît parfaitement
cette question !
Il dépend encore un peu de nous, mes chers collègues, qu'il en soit ainsi un
jour et que nos désillusions successives ne nous conduisent pas à baisser les
bras mais que, au contraire, elles nous encouragent à nous battre pour le
retour à une politique d'initiative, de liberté et de bon sens.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'absence de logement est l'une des formes d'exclusion les plus destructrices
pour l'individu qui, privé d'un espace protecteur, est menacé dans son
intégrité physique et morale, dans sa santé comme dans ses capacités
relationnelles.
Ce constat, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, est
d'évidence. Si l'énoncé peut paraître banal, la réalité n'en est pas moins
dramatique. La vacance de logements, dans une société qui compte près de 200
000 ménages dépourvus de logement, apparaît à beaucoup comme un phénomène
scandaleux et d'aucuns, face à ce phénomène, formalisent des équations simples
telles que celle-ci : on répond aux besoins de 200 000 ménages en rendant
rapidement disponibles 200 000 logements vacants sur les quelque 2 000 000 qui
sont recensés. Mathématiquement, c'est facile ; la réalité est plus nuancée et
la solution n'est pas si simple. A preuve, si les mesures jusque-là proposées -
parmi lesquelles la loi de 1990, que vous connaissez bien, monsieur le
secrétaire d'Etat - ont quelque peu facilité les choses, elles n'ont cependant
pu résoudre la crise que connaît le logement social, qui reste confronté à de
graves difficultés pour accueillir tous ceux qui demandent à se loger dans des
conditions compatibles avec la dignité à laquelle chacun doit pouvoir
prétendre.
Plus précisément, l'examen des mesures qui existent afin d'inciter les
propriétaires bailleurs à remettre leur logement sur le marché - et ces mesures
sont assez nombreuses ! - montre l'effort qui a été entrepris depuis des
années.
Les incitations fiscales spécifiquement liées à la vacance ont bien pour
objectif de redynamiser le marché locatif. Par ailleurs, le rôle joué par
l'ANAH - agence à propos de laquelle je partage tout à fait les réflexions
formulées par notre excellent rapporteur et par notre collègue Alain Vasselle -
est important, je puis en témoigner sur le terrain, dans la mesure où elle
accorde des subventions pour les travaux de mise aux normes de confort. Ce
dispositif a été renforcé par les diverses primes qui, depuis 1995 notamment,
viennent en complément des subventions.
Les besoins n'en restent pas moins très importants, d'ou l'opportunité, à mes
yeux, du texte que nous examinons aujourd'hui.
Son adoption doit permettre aux organismes d'HLM d'intervenir sur le parc
locatif privé en prenant à bail des logements vacants pour les donner en
sous-location.
Il y a tout lieu de se féliciter de l'économie générale de ce texte, qui est
susceptible de résoudre deux difficultés : d'une part, celle qui tient au fait
que certains propriétaires ne souhaitent pas investir pour rénover des
logements ne répondant plus aux normes ; d'autre part, celle qui provient des
propriétaires qui renoncent à assumer la gestion locative et qui craignent les
risques locatifs.
Je ne reviendrai pas sur les divers éléments de la proposition de loi, qui ont
été longuement développés par les différents intervenants. Je me contenterai de
souligner qu'à mes yeux il s'agit d'un texte équilibré, d'un texte suffisamment
souple et d'un texte sage, les mécanismes prévus étant limités aux logements
appartenant à des personnes physiques et la vacance étant constatée après deux
ans.
Comment ne pas souligner au passage l'importance de ce texte pour l'artisanat
? Je suis président d'une association de restauration immobilière et
protection, amélioration, conservation, transformation de l'habitat existant,
ou PACT-ARIM. Je me plais à souligner que ces associations, au sujet desquelles
je vous ai posé une question orale sans débat mardi dernier, monsieur le
secrétaire d'Etat, ont une expérience en la matière.
Cela étant, si le président de la fédération des PACT-ARIM considère la
présente proposition justifiée, il y voit cependant un double inconvénient :
premièrement, la concurrence pour ce qui est de l'intervention dans le parc
privé ; deuxièmement, la multiplication des systèmes et des modes d'action dans
un secteur déjà complexe.
Je peux comprendre ces remarques, même si je ne suis pas leur auteur en ce qui
concerne la réserve exprimée en conclusion d'un rapport dont vous avez
peut-être eu connaissance.
J'espère que, tout bien arbitré, les bénéficiaires - d'abord les locataires,
mais aussi les propriétaires - y trouveront heureusement et harmonieusement
leur compte.
En conclusion, je formulerai un souhait - qui a déjà été exprimé par notre
excellent rapporteur - celui que le système mis en place permette aux
organismes d'HLM de s'effacer à terme, en tout cas le plus tôt possible, devant
les propriétaires.
Bref, tout bien considéré, le groupe du RDSE est favorable à l'adoption du
texte en discussion, même s'il ne constitue pas la panacée, même s'il n'apporte
pas une solution d'ensemble à un problème que nous retrouverons - vous l'avez
dit, monsieur le secrétaire d'Etat - lors de l'examen du projet de loi relatif
à l'exclusion, en particulier pour ce qui est du statut du bailleur privé. Mais
quel texte, au demeurant, apporterait une solution d'ensemble ? Il faut bien
avouer, mes chers collègues, que le souhait est facile à exprimer, mais les
mesures plus difficiles à prendre.
En tout cas, aux yeux de l'élu rural que je suis,...
M. Emmanuel Hamel.
Ce sont les meilleurs yeux !
(Sourires.)
M. Georges Mouly.
... un instrument appréciable est mis en place avec la présente proposition de
loi, dont la mise en oeuvre et le succès supposeront cependant une large
information.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite m'exprimer par courtoisie à l'égard de
tous les intervenants, plusieurs d'entre eux ayant ajouté à leur adhésion
unanime aux conclusions de la commission des questions ou des observations qui
méritent, me semble-t-il, un écho.
Selon certains d'entre vous, un équilibre est souhaitable dans les efforts
faits par la collectivité publique en direction des diverses composantes du
parc immobilier.
Permettez-moi, à cet égard, de rappeler les grandes masses en cause. Le parc
privé reçoit la ligne budgétaire PAH, « prime à l'amélioration de l'habitat »,
pour les propriétaires occupants dont les ressources sont modestes, pour un
montant de 800 millions de francs. Le budget de l'ANAH, qui provient
effectivement de la taxe additionnelle au droit au bail, est cette année de 2
200 millions de francs. Par conséquent, ANAH plus PAH, cela fait 3 milliards de
francs.
A cela s'ajoutent les mesures fiscales des lois de finances successives en
termes d'abattements sur le revenu - quant il y a impôt sur le revenu - ou le
remboursement de 15 % des factures acquittées à défaut d'un taux de TVA réduit,
ce qui répond à un souhait des artisans. Les deux mesures additionnées, celle
qui préexistait et celle qui s'ajoute pour l'exercice 1998, représentent un
coût annuel de 5 milliards de francs à 5,2 milliards de francs.
Globalement, donc, l'effort de la collectivité publique pour le parc privé est
de 8 milliards de francs.
L'an dernier, il était effectivement inférieur, puisqu'il était de 6,6
milliards de francs. Ainsi, avec 400 millions de francs de plus pour l'ANAH et
la PAH et 1 milliard de francs de plus pour les mesures fiscales relatives au
remboursement de 15 % des factures acquittées ou pour les dégrèvements d'impôt
sur le revenu, voire les mesures de restitution pour les personnes non
imposables à l'impôt sur le revenu - mesure totalement nouvelle puisque, vous
le savez, les mesures fiscales ne pouvaient jusqu'à présent s'appliquer à ceux
qui n'étaient pas assujettis à l'impôt sur le revenu - nous sommes passés, avec
la loi de finances pour 1998, de 6,6 milliards de francs à 8 milliards de
francs pour le parc privé.
Dans le même temps, il y a eu une augmentation, elle aussi significative, de
l'effort pour le parc social. Celui-ci bénéficiait de 1,6 milliard de francs de
subventions PALULOS. Il gardera 800 millions de francs, les 800 millions de
francs restants étant affectés à l'aide à la pierre, rétablie pour le
financement des prêts locatifs aidés pour 30 000 d'entre eux.
A ces 800 millions de francs de subventions PALULOS, qui demeurent, s'ajoute
cependant la mesure d'abaissement du taux de la TVA qui, en année pleine,
représentera 2,8 milliards de francs. Nous passons donc de 1,6 milliard de
francs à 3,6 milliards de francs.
L'effort pour le parc privé est donc accru de 1,4 milliard de francs, et
l'effort en faveur du parc social de 2 milliards de francs. L'écart demeure,
certes : 8 milliards de francs d'un côté et 3,6 milliards de francs de l'autre.
Quand on a le souci de l'équilibre, on peut porter des appréciations diverses,
mais il faut savoir que le nombre des logements en cause n'est pas comparable.
Il faut, en tout cas, me semble-t-il, garder ces grandes masses présentes à
l'esprit.
Plusieurs d'entre vous ont souhaité savoir si les travaux éventuellement
nécessaires seront éligibles aux subventions PALULOS, à la TVA minorée ou à
d'autres dispositifs. En fait, les propriétaires gardent leur statut de
propriétaire privé. Nous sommes donc dans le mécanisme de l'ANAH, et non des
PALULOS.
En revanche, nous n'avons pas encore tranché - et je n'aurai garde d'oublier à
cet égard les interventions de différents intervenants sur ce point - à propos
de la grille des loyers de référence.
Il est vrai que l'on peut avoir à choisir entre les loyers ANAH et les loyers
HLM. Si l'on veut rester complètement dans la logique du propriétaire privé, on
devrait plutôt choisir la logique des loyers ANAH, mais il faut bien en
examiner les conséquences pour les locataires - j'allais dire les
sous-locataires - eux-mêmes, car il est évident que ces derniers sont, hors
conventionnement, éligibles à l'allocation logement ; par ailleurs, s'il y a
conventionnement, l'article L. 353-9-1 du code de la construction s'applique et
les rend éligibles à l'APL.
Il faut donc approfondir ce point particulier, dont les modalités
d'application pourront faire l'objet d'un arrêté spécifique. Avant de fixer
définitivement le contenu des textes d'application, je me reporterai à vos
contributions.
M. Vasselle a fait état de ses préoccupations quant à une éventuelle taxation
de la vacance. Je l'ai dit, nous sommes conscients de la diversité des
situations rencontrées.
En fait, le problème que nous posons est celui de la pertinence du maintien de
l'avantage fiscal que constitue pour la vacance le fait de ne pas être dans le
champ de la taxe d'habitation, surtout dans les secteurs urbains les plus
tendus, là où la demande est forte et la vacance, de ce fait, plus inadmissible
encore.
Si donc une mesure était prise, elle consisterait à supprimer cet avantage
fiscal pour constituer une incitation supplémentaire à la remise sur le marché.
C'est en tout cas l'axe des réflexions qui sont conduites dans la préparation
de la disposition correspondante devant figurer dans le projet de loi de
prévention et de lutte contre les exclusions.
M. Cléach a parlé de la multiplication pertinente des outils. C'est vrai, plus
nous mettons à la disposition du bailleur potentiel des preneurs diversifiés -
après le preneur professionnel, médiateur compétent, l'agence immobilière à
vocation sociale et, aujourd'hui, les organismes d'HLM - plus nous lui
accordons des protections : si c'est un organisme d'HLM, par exemple, il assure
le relogement du locataire ; si c'est une association médiatrice, elle apporte
la garantie de loyer.
Lorsqu'il y a ainsi une large palette de preneurs, le bailleur potentiel qui
ne serait pas intéressé par toute incitation nouvelle, y compris fiscale,
pourrait, portant attention à ces dispositifs votés par la représentation
nationale, choisir le plus adapté des preneurs et donc avoir moins de raisons
de faire une rétention là où les besoins sont très réels.
Je tiens donc, moi aussi, à souligner l'intérêt de cette multiplication des
outils.
M. Pagès a rappelé que le marché ne pouvait pas pourvoir au droit au logement.
Effectivement, et c'est bien pourquoi notre intention est de renforcer les
dispositifs législatifs sur le droit au logement. Ce sera le cas, en
particulier, avec le volet « logement » du projet de loi de prévention et de
lutte contre les exclusions.
Cela se traduit aussi par le retour de l'aide à la pierre dans presque la
moitié de la programmation PLA 1998. Autrement dit, après la baisse du taux de
la TVA, nous retrouvons des subventions dont le taux va varier entre 8 % et 20
% selon les catégories de PLA, étant entendu que le PLA d'intégration
bénéficiera du taux maximum de 20 % calculé sur la base d'une subvention
moyenne de 80 000 francs par logement, niveau de subvention qui n'avait jamais
été atteint pour un PLA, quand bien même, à l'époque, le taux de TVA était de
20,6 %.
Aujourd'hui, donc, non seulement nous avons un taux de TVA à 5,50 %, mais nous
avons également 80 000 francs de subvention. Voilà pourquoi, bien évidemment,
nous souhaitons une mobilisation de tous les acteurs pour que ces moyens
nouveaux soient mis en oeuvre avec le maximum d'efficacité.
Monsieur Mouly, vous avez expliqué pourquoi il fallait toujours porter des
appréciations nuancées puisque chaque mesure ne peut pas avoir l'efficacité
maximale ; il y a toujours quelque obstacle que l'on a tendance à minimiser. Je
vous rejoins tout à fait sur ce point.
Vous avez appelé mon attention sur l'appréciation de la fédération des
PACT-ARIM. A mon avis, il faut que nous indiquions clairement que la démarche
qui nous anime tous, au travers de ce texte, est non pas la création d'une
concurrence pour les organismes existants, mais la volonté d'une
complémentarité qui, me semble-t-il, grâce à cette multiplication des acteurs,
devrait permettre de répondre de façon plus large à l'attente des
propriétaires.
M. Braye et bien d'autres après lui ont souligné la qualité du travail
effectué par l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat. Le
Gouvernement partage, bien sûr, cette appréciation sur cet outil qui vient de
fêter ses vingt ans et auquel il faut, évidemment, continuer à donner le
maximum de moyens tant son action est efficace, nous le savons tous.
Comme MM. Piras et Vasselle, je suis heureux qu'ait été souligné le souci de
la Haute Assemblée d'une mixité sociale dans le parc immobilier sur l'ensemble
du territoire.
Ce point a fait l'objet d'un amendement à l'Assemblée nationale, M. Piras l'a
rappelé. C'est essentiel, car, si la même démarche ne prévalait pas sur tout le
territoire, cela voudrait dire que la loi - je pense, en particulier, à la loi
d'orientation sur la ville - ne serait pas appliquée partout.
Or, la décentralisation n'a pas pour vocation de faire obstacle à
l'application de la loi ; elle est une invitation à tous les responsables des
collectivités territoriales décentralisées à procéder, certes, aux adaptations
que chaque situation locale peut justifier, mais dans le cadre de la loi, sans
s'exonérer de son application.
Ayant ainsi, me semble-t-il, répondu à peu près à toutes les questions, je
veux faire savoir au Sénat que des dirigeants du mouvement HLM qui se sont
exprimés ont vu dans cette proposition de loi un intérêt pour la mise en oeuvre
du protocole d'accord qui a été signé sur la politique d'attribution, pensant
en particulier à la vacance éventuelle de logements plus autonomes, et donc
plus adaptés ou plus facilement adaptables à des familles connaissant de vraies
difficultés d'insertion sociale.
Il y a donc là une conjonction d'appréciations qu'on ne peut que souligner,
pour l'apprécier.
M. Hamel, dans une très brève interruption qui se voulait constructive, m'a
adressé une invitation à la méditation.
M. Emmanuel Hamel.
Pour vous connaître depuis si longtemps, monsieur le secrétaire d'Etat, je
sais votre capacité intense de méditation !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je vous ai bien entendu et je vais vous donner
satisfaction, monsieur Hamel : je n'exclus nullement la méditation dans la
préparation de l'action que nous avons à conduire.
M. Emmanuel Hamel.
Merci, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Cet outil nous aidera dans l'action que nous voulons
conduire ensemble pour le droit au logement.
Puisque l'unanimité sur cette proposition de loi a été annoncée, puisqu'il n'y
a pas d'amendement, puisque, de ce fait, je ne reprendrai pas la parole, je
voudrais remercier de nouveau la commission et son rapporteur pour le travail
positif qui a été accompli.
Je me réjouis de ce souci qui s'est manifesté d'une meilleure coopération
entre exécutif et législatif, de l'existence de cette « niche » - je crois que
c'est le mot qui a été retenu - qui permet à une proposition de loi émanant de
l'opposition à l'Assemblée nationale d'aboutir, et ce dans un domaine qui nous
est cher à tous.
C'est un fait qu'il faut se garder de passer sous silence. Longtemps
parlementaire, j'ai souffert de ne pouvoir faire adopter des propositions de
lois parce que j'étais dans l'opposition.
Aujourd'hui, démonstration est faite que cela peut être le cas de
parlementaires qui ne sont pas dans la majorité. C'est un plus pour la
démocratie. En l'espèce, c'est aussi un plus pour faire progresser la cause du
logement.
(Très bien ! et applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ Le titre IV du livre IV du code de la construction et de
l'habitation est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Prise à bail de logements vacants
par les organismes d'habitations à loyer modéré
«
Art. L. 444-1
. _ Les offices publics d'habitations à loyer modéré,
les offices publics d'aménagement et de construction, les sociétés anonymes
coopératives de production d'habitations à loyer modéré visées à l'article L.
422-3 du présent code et les sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré
peuvent prendre à bail des logements vacants pour les donner en sous-location à
des personnes physiques dans les conditions fixées par le présent chapitre.
«
Art. L. 444-2
. _ Le contrat de prise à bail ne peut être conclu
qu'avec l'accord du maire de la commune, site du logement concerné lorsque dans
cette commune le nombre des logements locatifs sociaux, mentionnés à l'article
L. 2334-17 du code général des collectivités territoriales, représente au 1er
janvier de la pénultième année au moins 20 % des résidences principales au sens
du II de l'article 1411 du code général des impôts. Le logement pris à bail
doit être vacant depuis deux ans au moins et appartenir à une ou des personnes
physiques.
«
Art. L. 444-3
. _ Le logement donné en sous-location par l'organisme
d'habitations à loyer modéré doit satisfaire aux normes minimales de confort et
d'habitabilité mentionnées à l'article 25 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre
1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété
de logements sociaux et le développement de l'offre foncière.
« L'organisme d'habitations à loyer modéré peut être chargé par le
propriétaire de réaliser en son nom et pour son compte les travaux permettant
le respect de ces normes.
«
Art. L. 444-4
. _ Le logement est attribué au sous-locataire selon les
règles fixées par la section 1 du chapitre Ier du présent titre.
«
Art. L. 444-5
. _ Les dispositions des articles 3 à 7, 9-1, 12, des
deuxième et troisième alinéas du I de l'article 15, du
d
de l'article 17
et des articles 21 à 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à
améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du
23 décembre 1986 sont applicables au contrat de sous-location. Les dispositions
de l'article 14 de la même loi sont applicables au contrat de sous-location,
lorsque le bénéficiaire du transfert de ce contrat remplit les conditions pour
l'attribution d'un logement d'habitations à loyer modéré.
« Le loyer de sous-location ne peut excéder un plafond fixé selon les zones
géographiques par l'autorité administrative.
« L'organisme d'habitations à loyer modéré ne peut donner congé au
sous-locataire que pour un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution
par le sous-locataire de l'une des obligations lui incombant. Le congé doit
mentionner le motif allégué.
«
Art. L. 444-6
. _ Si, à l'expiration du contrat de location passé
entre le propriétaire et l'organisme d'habitations à loyer modéré, il n'a pas
été conclu de contrat de location entre le propriétaire et le sous-locataire,
ce dernier est déchu de tout titre d'occupation sur le logement que l'organisme
est tenu de restituer au propriétaire libre de toute occupation.
« Trois mois avant l'expiration du contrat entre le propriétaire et
l'organisme d'habitations à loyer modéré, ce dernier est tenu de proposer au
sous-occupant qui n'a pas conclu de contrat de location avec le propriétaire et
qui remplit les conditions pour l'attribution d'un logement d'habitations à
loyer modéré la location d'un logement correspondant à ses besoins et à ses
possibilités. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ Le code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié
:
« I. _ Il est inséré, après l'article L. 353-9, un article L. 353-9-1 ainsi
rédigé :
«
Art. L. 353-9-1
. _ Lorsqu'un logement conventionné par son
propriétaire en application du 4° de l'article L. 351-2 est pris à bail par un
organisme d'habitations à loyer modéré dans les conditions fixées par les
articles L. 444-1 et suivants, le sous-locataire est assimilé à un locataire
pour bénéficier de l'aide personnalisée au logement et l'organisme
d'habitations à loyer modéré est assimilé au bailleur du logement pour le
versement de cette aide. »
« II. _ L'article L. 421-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils peuvent aussi prendre à bail des logements vacants pour les donner en
sous-location à des personnes physiques dans les conditions fixées par les
articles L. 444-1 et suivants. »
« III. _ L'article L. 422-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles peuvent aussi prendre à bail des logements vacants pour les donner en
sous-location à des personnes physiques dans les conditions fixées par les
articles L. 444-1 et suivants. » -
(Adopté.)
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
11
REMPLACEMENT D'UN SÉNATEUR DÉCÉDÉ
M. le président. Conformément aux articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat qu'en application de l'article L.O. 320 du code électoral, M. Jean-Paul Bataille est appelé à remplacer, en qualité de sénateur du Nord, M. Maurice Schumann, décédé le 9 février 1998.
12
DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. Hubert Haenel une proposition de loi tendant à étendre la
dotation de solidarité rurale aux communes situées dans un parc régional.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 280, distribuée et renvoyée
à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques
de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission
spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Jean-François Le Grand, Michel Alloncle, Louis Althapé, Henri
Belcour, Jean Bizet, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Calmejane,
Jean-Pierre Camoin, Charles Ceccaldi-Raynaud, Désiré Debavelaere, Jean-Paul
Delevoye, Jacques Delong, Christian Demuynck, Charles Descours, Michel Doublet,
Alain Dufaut, François Gerbaud, Daniel Goulet, Alain Gournac, Georges Gruillot,
Emmanuel Hamel, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, Lucien Lanier,
René-Georges Laurin, Pierre Martin, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM.
Jacques Oudin, Maurice Schumann et Louis Souvet une proposition de loi visant à
étendre à certains agents de la fonction publique de l'Etat la possibilité de
se voir attribuer la médaille d'honneur régionale, départementale et
communale.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 282, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
J'ai reçu de MM. Daniel Eckenspieller, Michel Alloncle, Roger Besse, Paul
Blanc, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Calmejane, Auguste Cazalet, Jacques
Chaumont, Jean-Patrick Courtois, Désiré Debavelaere, Christian Demuynck, Xavier
Dugoin, Philippe François, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Daniel Goulet,
Georges Gruillot, Hubert Haenel, Emmanuel Hamel, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot,
Roger Husson, André Jourdain, Gérard Larcher, Edmond Lauret, René-Georges
Laurin, Jean-François Le Grand, Maurice Lombard, Joseph Ostermann, Victor Reux,
Jean-Pierre Schosteck, Louis Souvet et Alain Vasselle une proposition de loi
relative à la prime de fin d'année attribuée aux fonctionnaires des
collectivités territoriales.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 283, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
J'ai reçu de MM. Jean-Michel Baylet et Yvon Collin une proposition de loi
tendant à créer un minimum contributif pour les retraites agricoles.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 284, distribuée et renvoyée
à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution
éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le
règlement.
13
DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement CE du Conseil concernant la conclusion de l'accord
sous forme d'échange de lettres modifiant l'accord sous forme d'échange de
lettres entre la Communauté européenne et la Roumanie, relatif à
l'établissement réciproque de contingents tarifaires pour certains vins, et
modifiant le règlement CE n° 933/95, portant ouverture et mode de gestion de
contingents tarifaires communautaires pour certains vins.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-1007 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- proposition de décision du Conseil relative à la conclusion du protocole
d'adaptation des aspects commerciaux de l'accord européen établissant une
association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une
part, et la République d'Estonie, d'autre part, pour tenir compte de l'adhésion
de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de
Suède à l'Union européenne et des résultats des négociations agricoles de
l'
Uruguay Round
y inclus les améliorations du régime préférentiel
existant.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sour le numéro E-1008 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil
concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et
administratives des Etats membres en matière de publicité en faveur des
produits du tabac.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sour le numéro E-1009 et
distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
- recommandation du Conseil sur la décharge à donner à la Commission sur
l'exécution du budget général des Communautés européennes pour l'exercice
1996.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-1010 et
distribuée.
14
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de M. Lucien Lanier un rapport d'information, fait au nom de la
délégation du Sénat pour l'Union européenne, sur une révision de l'article 88-4
de la Constitution.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 281 et distribué.
15
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au mercredi 11 février 1998, à quinze heures :
Discussion du projet de loi (n° 291, 1996-1997) relatif à l'application de la
convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la
fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur
destruction.
Rapport (n° 253, 1997-1998) de M. Francis Grignon, fait au nom de la
commission des affaires économiques et du Plan.
Avis (n° 268, 1997-1998) de M. Guy Penne, fait au nom de la commission des
affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Avis (n° 254, 1997-1998) de M. Jean-Paul Amoudry, fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale.
Aucun amendement n'est plus recevable.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures cinquante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 10 février 1998
à la suite des conclusions de la conférence des présidents
Mercredi 11 février 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures :
Projet de loi relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993
sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de
l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 10 février 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Jeudi 12 février 1998 :
A
9 h 30 :
Ordre du jour prioritaire
1° Suite de l'ordre du jour de la veille.
A
15 heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance avant 11 heures.)
Mardi 24 février 1998 :
A
9 h 30 :
1° Dix-huit questions orales sans débat (l'ordre d'appel des questions sera
fixé ultérieurement) :
- n° 157 de M. Jean Huchon à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer (Statut de
la zone des cinquante pas géométriques dans les DOM) ;
- n° 159 de Mme Nicole Borvo à Mme le ministre de la culture et de la
communication (Avenir des cinémas d'art et d'essai) ;
- n° 161 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre de l'agriculture et de la
pêche (Retraités agricoles) ;
- n° 164 de M. Léon Fatous à M. le secrétaire d'Etat au logement (Problème du
logement dans le bassin minier) ;
- n° 165 de M. Aubert Garcia transmise à M. le ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation (Contrôle sur le
recrutement des agents non titulaires dans la fonction publique territoriale)
;
- n° 166 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture et de la
pêche (Mission des SAFER) ;
- n° 169 de M. François Autain à M. le secrétaire d'Etat à la santé (Statut
des médecins à diplôme étranger) ;
- n° 170 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (Projet de
délocalisation du centre d'essais en vol de Brétigny-sur-Orge) ;
- n° 171 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de la défense (Conditions
d'incorporation des jeunes ayant un contrat de travail) ;
- n° 173 de M. Charles Descours à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (Réalisation de l'autoroute A 51 Grenoble-Sisteron)
;
- n° 174 de M. André Vallet à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(Contribution des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé) ;
- n° 175 de M. Georges Mouly à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité
(Aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises) ;
- n° 176 de M. Bernard Piras à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice
(Statut des administrateurs
ad hoc) ;
- n° 177 de M. Jean-Patrick Courtois à M. le ministre de l'agriculture et de
la pêche (Projet de loi sur la qualité sanitaire des denrées alimentaires
destinées à l'alimentation humaine et animale) ;
- n° 178 de M. Gérard Fayolle à Mme le ministre de l'aménagement du territoire
et de l'environnement (Gestion et traitement des déchets en Dordogne) ;
- n° 179 de M. Henri Revol à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice
(Avenir du tribunal de Châtillon-sur-Seine) ;
- n° 182 de M. André Vézinhet à M. le ministre de l'intérieur (Sécurité
publique à Lunel) ;
- n° 186 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'économie, des finances et
de l'industrie (Délais de paiement appliqués aux produits cuisinés).
A
16 heures
et, éventuellement, le soir :
2° Eloge funèbre de Pierre Croze.
Ordre du jour prioritaire
3° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture de la
proposition de loi relative au fonctionnement des conseils régionaux.
(La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.)
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification
et modification de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à
l'amélioration de la santé publique à Mayotte (n° 195, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
5° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, de la proposition de
loi relative à la sécurité et à la promotion d'activités sportives.
(La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.)
Mercredi 25 février 1998 :
A
15 heures :
Ordre du jour prioritaire
1° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi relatif
à la nationalité.
(La conférence des présidents a fixé au mardi 24 février 1998, à 17 heures,
le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Ordre du jour complémentaire
2° Suite des conclusions de la commission des lois (n° 20, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Nicolas About tendant à modifier les
dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de
divorce (n° 151, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues
relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce (n°
400, 1996-1997).
(Aucun amendement à ce texte n'est plus recevable.)
Jeudi 26 février 1998 :
A
10 heures :
Ordre du jour prioritaire
1° Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée
nationale, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la
sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 222, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 25 février 1998, à 17
heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de
loi.)
A
15 heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance, avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
3° Suite de l'ordre du jour du matin.
Mardi 3 mars 1998 :
A
9 h 30 :
1° Onze questions orales sans débat :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 92 de M. Paul Masson transmise à M. le secrétaire d'Etat à la santé
(Lutte contre la toxicomanie) ;
- n° 103 de M. Gérard Roujas à M. le ministre de l'intérieur (Montant de la
vignette automobile) ;
- n° 109 de M. Ivan Renar à Mme le ministre de la culture et de la
communication (Situation fiscale des structures culturelles) ;
- n° 112 de M. François Lesein transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget
(Régime de la taxe professionnelle applicable à France Télécom et à La Poste)
;
- n° 142 de M. Jean-Jacques Robert à Mme le ministre de la jeunesse et des
sports (Conditions d'exercice du parachutisme sportif en région parisienne)
;
- n° 155 de Mme Anne Heinis transmise à M. le ministre de l'agriculture et de
la pêche (Problèmes de la pêche aux abords des îles Anglo-Normandes et du
Cotentin) ;
- n° 181 de M. André Dulait à M. le ministre de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie (Financement de l'utilisation des ressources
multimédia dans les établissements scolaires) ;
- n° 183 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'équipement, des
transports et du logement (Tracé du TGV pendulaire Clermont-Paris) ;
- n° 184 de M. Franck Sérusclat à M. le secrétaire d'Etat à la santé
(Politique en matière de toxicomanie) ;
- n° 187 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie (Statut des animateurs de la mission d'insertion
de l'éducation nationale) ;
- n° 188 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de l'intérieur (Conditions
d'incorporation dans les écoles de police).
A
16 heures
et le soir :
Ordre du jour prioritaire
2° Sous réserve de sa transmission, projet de loi d'orientation et
d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN, n° 512).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 mars 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des
amendements à ce projet de loi ;
- à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion
générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun
groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel
il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront
être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 2 mars
1998.)
Mercredi 4 mars 1998 :
Ordre du jour prioritaire
A
15 heures
et le soir :
Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du
temps de travail (AN, n° 512).
Jeudi 5 mars 1998 :
A
9 h 30 :
(Ordre du jour établi en application de l'article 48, troisième alinéa, de
la Constitution) :
1° Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 257 rectifié,
1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Michel Moreigne et plusieurs de ses collègues
visant à étendre aux centres de santé gérés par la Mutualité sociale agricole
la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale (n°
43, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Georges Mouly et plusieurs de ses collègues
visant à étendre aux centres de soins infirmiers gérés par la Mutualité sociale
agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité
sociale (n° 377, 1996-1997).
2° Proposition de loi de M. Jean Delaneau et plusieurs de ses collègues visant
à élargir les possibilités d'utilisation des crédits obligatoires d'insertion
des départements (n° 250, 1997-1998).
A
15 heures
et le soir :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de
la séance, avant 11 heures.)
Ordre du jour prioritaire
4° Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN, n° 512).
A N N E X E
Questions orales sans débat inscrites
à l'ordre du jour du mardi 24 février 1998
N° 157. - M. Jean Huchon attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à
l'outre-mer sur le retard pris dans la mise en oeuvre de la loi sur les
cinquante pas géométriques. A sa connaissance, aucun décret d'application à ce
jour n'est paru. Or de nombreuses familles des départements d'outre-mer, en
particulier de la Guadeloupe et de la Martinique, concernées par ce texte,
attendent de pouvoir régulariser leur situation, notamment par la validation de
leur titre de propriété. Les dispositions de la loi répondent à une situation
d'urgence à la fois humaine et économique. Tout retard dans son application met
à mal le règlement définitif concernant la question de l'occupation sans titre,
mais aussi la question du développement économique, au regard notamment de la
concrétisation de projets de rénovation de l'habitat insalubre et de la
modernisation de certains quartiers, et enfin la question de l'amélioration de
la protection du littoral. C'est pour l'ensemble de ces éléments qu'il lui
demande de bien vouloir l'informer des dispositions que compte prendre le
Gouvernement pour l'application rapide de la loi.
N° 159. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de Mme la ministre de la culture
et de la communication sur le fait que deux cinémas d'art et d'essai parisiens,
Entrepôt et Accatone, s'inquiètent de leur avenir à la suite de la diminution
des subventions accordées par le Centre national de cinématographie. Accatone,
ex-studio Cujas, créé il y a dix ans par Kazik Hentchel, est sérieusement
menacé par de nouveaux critères d'attribution d'aides aux salles d'édition qui
ont fait chuter sa subvention de 60 % en deux ans. Quant à Entrepôt, créé en
1975 par Frédéric Mitterrand, il annonce la suspension de ses activités d'art
et d'essai. Le montant de sa subvention s'élève seulement à 180 000 francs pour
1997, au lieu de 225 000 francs pour 1996. Afin que des cinémas d'art, d'essai
et de recherche tels qu'Accatone et Entrepôt puissent vivre et assurer une
programmation indépendante, qui donne toutes ses chances à des oeuvres
exigeantes, elle lui demande ce qu'il compte faire pour attribuer des moyens
suffisants et prendre les mesures nécessaires.
N° 161. - M. Bernard Dussaut appelle l'attention de M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche sur la situation des retraités agricoles. Lors de
la discussion du projet de loi de finances pour 1998 notamment, des
dispositions ont été annoncées permettant la revalorisation des plus basses
retraites et plus particulièrement celles des conjoints et des aides familiaux.
L'effort budgétaire consenti doit, pour être rendu effectif, donner lieu à la
publication de décrets d'application. Il lui demande de bien vouloir lui en
faire connaître la teneur et les délais de publication. Il souhaiterait par
ailleurs vivement que lui soient précisées les mesures qu'il entend prendre
pour permettre à tous les retraités agricoles de bénéficier rapidement d'une
retraite agricole égale au moins à 75 % du salaire minimum interprofessionnel
de croissance.
N° 164. - M. Léon Fatous attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au
logement sur le cas spécifique du bassin minier, qui représente près de 450 000
habitants. En 1990, le bassin minier se voyait accorder une dotation de 300
prêts locatifs aidés par an ; il serait nécessaire que ce niveau d'attribution
soit reconduit. Par ailleurs, il aimerait connaître son avis sur l'élaboration
d'un statut définitif apparenté aux organismes de logements sociaux pour le
parc du logement minier actuellement géré par les Charbonnages de France.
N° 165. - M. Aubert Garcia attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur
sur la brèche de plus en plus profonde ouverte dans le statut de la fonction
publique territoriale, par le recours abusif aux non-titulaires, rendu possible
en raison de l'inefficacité du contrôle de légalité à endiguer cette tendance.
A titre d'exemple, il cite la situation créée par un fonctionnaire territorial
du grade d'agent de maîtrise principal, en cessation progressive d'activité qui
a démissionné pour être repris le lendemain, sur le même emploi, en qualité de
contractuel avec une rémunération de catégorie A, alors que l'emploi libéré
était de catégorie C. En laissant perdurer et prospérer de telles pratiques,
non seulement le statut s'érode, mais, de plus, les lauréats des concours
administratifs en attente sur les listes d'aptitudes voient leurs perspectives
d'embauche considérablement réduites et finissent sur des listes mouroirs,
participant ainsi à la décrédibilisation des concours organisés par les centres
de gestion et le Centre national de la fonction publique territoriale et par là
même du statut dans son ensemble. Il lui demande de lui faire connaître les
dispositions qu'il entend prendre tant au plan du renforcement des moyens dont
disposent les préfectures pour assurer un contrôle de légalité homogène sur le
territoire, ainsi que l'exigent les principes de la République, qu'au plan
législatif, si la loi se révélait impraticable eu égard aux conditions
d'administration souhaitables pour les collectivités territoriales.
(Question transmise à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme
de l'Etat et de la décentralisation.)
N° 166. - M. René-Pierre Signé rappelle à M. le ministre de l'agriculture
et de la pêche que la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990 complétée par le décret
du 18 août 1993 prévoit et organise le concours technique des Sociétés
d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) aux collectivités.
Toutefois, ce concours demeure trop limité, en raison de la définition trop
restrictive de la mission assignée aux SAFER relativement à la rétrocession des
terres agricoles. Il en est ainsi, en particulier, de l'impossibilité encore
faite aux communes, dans le cadre de ce type de procédures, de préempter des
parcelles pour les destiner à des projets d'aménagement et de développement
d'intérêt collectif. Il lui demande s'il envisage d'élargir la mission des
SAFER dans ce domaine, approfondissant ainsi la démarche adoptée en 1990.
N° 169. - M. François Autain souhaite attirer l'attention de M. le secrétaire
d'Etat à la santé sur la situation des médecins à diplôme étranger. En effet,
après avoir passé avec succès l'examen d'équivalence du diplôme français de
docteur en médecine selon les dispositions de l'article L. 356 (2) du code de
la santé publique, complété par l'article 1er de la loi n° 72-661 du 13 juillet
1972, leur situation est encore aujourd'hui précaire. Le statut de praticien
adjoint contractuel (PAC) ne résout en rien les discriminations dont sont
victimes ces médecins, en dépit des services rendus et du nombre d'années
exercées au sein de l'hôpital public (ils assurent la majorité des gardes
délaissées et désertées par leurs collègues français de souche). Le comité des
médecins à diplôme étranger proteste contre le statut actuel accordé à ces
médecins et il lui demande si l'adoption d'un texte réglementaire qui les
intégrera complètement et définitivement dans le système médical français est
prochainement envisagée.
N° 170. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de la
défense sur l'avenir du centre d'essais en vol (CEV) de Brétigny-sur-Orge. Ce
centre, qui relève de la direction générale pour l'armement, envisage la
délocalisation de la moitié de son personnel, près de six cents personnes, et
le transfert des activités d'essais en vol sur les sites d'Istres et de Cazaux.
Il s'inquiète des conséquences de ce projet : 1. Pour les personnels civils et
militaires de la base, et leur famille habitant à proximité ; 2. Pour les
entreprises de la région qui, grâce à la sous-traitance, bénéficient du
rayonnement et des retombées des activités économiques du CEV ; 3. Pour les
quatre communes de Leudeville, Vert-le-Grand, Le Plessis-Pâté et
Brétigny-sur-Orge, qui sont regroupées en syndicat de communes, afin de
partager les recettes fiscales provenant de la taxe professionnelle versée au
titre des activités de l'Etat. Déjà, le 19 septembre 1996, un engagement écrit
de son prédécesseur avait garanti aux salariés du CEV la poursuite des
activités sur le site de Brétigny : « ni délocalisation, ni transfert de site,
ni plan social » (extrait du courrier). Dans le climat économique actuel,
peut-on imaginer que notre Gouvernement veuille revenir sur la « parole donnée
» ? C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui faire connaître le projet
de décision prévu à ce jour.
N° 171. - M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre de la
défense sur les conditions de report d'incorporation des jeunes appelés qui ont
obtenu un contrat de travail au moins trois mois avant la date d'expiration de
leur report. La loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service
national donne la possibilité aux jeunes titulaires d'un contrat de travail à
durée indéterminée de demander à bénéficier d'un report d'incorporation d'une
durée de deux ans pouvant être prolongée. Si ces jeunes concluent un contrat de
travail à durée déterminée d'une durée au moins égale à six mois, ils pourront
demander un report jusqu'au terme de leur contrat en cours dans la limite de
deux ans. La loi précise que ce texte doit entrer en vigueur au plus tard le
1er janvier 1999. Les jeunes incorporables en 1998 s'interrogent légitimement
sur la date exacte de ces nouvelles mesures. Il lui demande quand doivent
paraître les décrets d'application pour ces deux cas définis par la loi et à
partir de quand ces dispositions seront effectivement applicables.
N° 173. - M. Charles Descours attire l'attention de M. le ministre de
l'équipement, des transports et du logement sur les décisions qu'il compte
prendre concernant le projet autoroutier A 51 Grenoble-Sisteron. Le 9 juin
1997, M. le ministre prenait la décision de suspendre le démarrage de l'enquête
publique de ce projet autoroutier au motif de la nécessité de recommencer la
concertation sur ce dossier, concertation engagée pourtant depuis dix ans déjà.
Les conclusions des experts nommés pour cette nouvelle concertation devant lui
être remises courant février, il souhaiterait, en tant qu'élu de l'Isère, les
connaître ainsi que les décisions qu'il compte prendre, la ville de Grenoble,
l'agglomération et l'Isère étant au premier chef concernées.
N° 174. - M. André Vallet attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi et
de la solidarité sur la contribution des communes aux dépenses d'aide sociale
et de santé. Il lui indique qu'en 1995, comme vient de le révéler l'APCG
(Assemblée des présidents des conseils généraux), les dépenses d'aide sociale
des départements ont représenté 82 milliards de francs, soit plus de 60 % des
dépenses de fonctionnement de ceux-ci. Il lui rappelle en outre que les lois de
décentralisation ont cependant maintenu le principe d'une participation
financière des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé relevant
pourtant de la compétence des départements (art. 93 de la loi du 7 janvier 1983
et art. 42 de la loi du 22 juillet 1983). Il lui indique également que ce
contingent d'aide sociale constitue pour les communes une dépense obligatoire
qui pèse de plus en plus sur les budgets communaux. En outre, il lui indique
que le montant et la progression de cette dépense tendent, de simple problème
ponctuel lié à des situations particulières, à devenir une véritable difficulté
structurelle concernant les communes. Par ailleurs, si, en moyenne nationale
hors Paris, les communes participent à hauteur de 15,8 % aux dépenses nettes
d'aide sociale obligatoire du département, soit 202 francs par habitant, la
diversité des situations locales permet de s'interroger sur l'équité de la
participation financière des communes à ce financement. Il lui signale qu'en
1995 les participations financières des communes représentaient, en moyenne
hors Paris, 7,6 % des quatre taxes principales des impôts communaux. Ce taux de
prélèvement était de 1,3 % pour l'Essonne, 2,9 % pour les Hauts-de-Seine, 3,1 %
pour la Seine-Saint-Denis, alors qu'il dépassait 17 % dans les
Bouches-du-Rhône. Il lui demande donc dans quelle mesure, dans le cadre des
réformes annoncées par le précédent gouvernement, notamment en matière de
clarification des compétences pour éviter les financements croisés et l'absence
de lisibilité des réelles responsabilités pour le contribuable local, le
Gouvernement envisage de réserver aux seuls départements le financement de
l'aide sociale.
N° 175. - M. Georges Mouly attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi
et de la solidarité sur le problème posé par la disparition, en 1996, de
l'ACCRE (aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises). A l'heure où
le Gouvernement déclare tout mettre en oeuvre pour combattre le chômage avec le
programme emplois-jeunes et la mise en chantier des 35 heures, il lui demande
s'il ne serait pas opportun de réinstaurer cette aide. Selon les statistiques
de l'INSEE, en effet, il semblerait que presque 80 000 entreprises privées ont
pu être créées en France, grâce à l'ACCRE, et en particulier dans des régions
défavorisées comme l'Auvergne et le Limousin, ce qui laisse supposer
a
priori
que l'ACCRE a été utile.
N° 176. - M. Bernard Piras attire l'attention de Mme le garde des sceaux,
ministre de la justice, sur la situation des administrateurs
ad hoc
. Le
régime juridique de ces derniers est partiellement évoqué par le projet de loi,
actuellement en débat au Parlement, sur la prévention et la répression des
infractions en matière sexuelle. Malheureusement, lors de cette réforme, la
situation de ces administrateurs
ad hoc
n'est évoquée que de manière
partielle, alors que leur mission ne peut être cantonnée au droit pénal. En
effet, leur intervention peut, par exemple, se révéler nécessaire en matière de
droit civil (problème de succession ou de filiation). Il est indispensable
qu'un projet de loi, ou bien un décret si cela relève du domaine réglementaire
(encore que, si l'on se réfère au statut des tuteurs, cf. loi n° 64-1230 du 14
décembre 1964, une loi paraît mieux appropriée), soit adopté pour appréhender
de manière globale le statut de ces auxiliaires de justice, qui ont une mission
bien particulière d'ordre public ou de service public. Il doit ainsi être
précisé dans leur statut : le mode de désignation, notamment l'agrément, la
qualification nécessaire, les causes d'exclusion et les cas d'incompatibilités,
le refus et la démission, le mandat, notamment le contenu et le contrôle, la
responsabilité et la rémunération... Il semble à ce sujet que, selon une
réponse à une question écrite posée par un député, une réflexion soit
actuellement menée à la chancellerie. Il est vivement souhaitable qu'elle
débouche sur un texte permettant une reconnaissance publique du rôle des
administrateurs
ad hoc
. Mais avant que celui-ci ne soit adopté
définitivement, un problème doit être réglé de manière urgente : à qui incombe
le financement de ces mandats judiciaires ? Les conseils généraux sont-ils
tenus de les financer ? Sont-ils tenus légalement d'exercer ces mandats lorsque
le juge ne trouve personne pour le faire ? A ce jour, il semble qu'aucun texte
ne prévoit clairement à qui il revient de verser ces sommes. De fait, la
situation varie en fonction des départements concernés, selon que le conseil
général décide ou non d'assumer cette charge, ou que la trésorerie générale
accepte ou non d'appliquer les décisions judiciaires. Mais même au titre des
frais de justice, l'indemnisation est refusée par certains TG. C'est ainsi que,
dans certains départements, les administrateurs
ad hoc
ne sont pas
indemnisés depuis plusieurs mois. Par ailleurs, les indemnités prévues aux
articles R. 130 et R. 138 du code de procédure pénale, lorsqu'elles sont
versées, ne couvrent qu'une partie infime, voire dérisoire, des frais exposés
par l'administrateur
ad hoc
, puisque l'indemnité kilométrique est de
0,38 franc. Il lui demande alors sur quelle base les administrateurs
ad
hoc
peuvent solliciter le remboursement de leurs frais et auprès de qui.
N° 177. - M. Jean-Patrick Courtois appelle l'attention de M. le ministre de
l'agriculture et de la pêche sur le devenir du projet de loi sur la qualité
sanitaire des denrées alimentaires destinées à l'alimentation humaine et
animale (n° 224, Sénat). Ce texte, amendé et adopté par l'Assemblée nationale
les 18 et 19 février 1997, a été transmis à M. le président du Sénat. Renvoyé à
la commission des affaires économiques et du Plan, il a fait l'objet d'un
rapport de notre collègue Marcel Deneux. A ce jour, son examen n'a toujours pas
été inscrit à l'ordre du jour de la séance du Sénat. Par conséquent, il demande
quelle est l'intention du Gouvernement quant à l'avenir de ce texte, d'une
part, et, d'autre part, quelle politique il entend mener pour renforcer le
dispositif de réglementation et de contrôle de l'hygiène des produits
alimentaires, et plus particulièrement en matière de lutte contre l'utilisation
d'anabolisant et toute autre substance prohibée.
N° 178. - M. Gérard Fayolle appelle l'attention de Mme la ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement sur le plan pour la gestion
et le traitement des déchets de la Dordogne. Il lui demande si certaines
modifications vont être apportées au plan arrêté en 1995 et, dans ce cas, de
lui préciser lesquelles.
N° 179. - M. Henri Revol souhaite faire part de son inquiétude à Mme le garde
des sceaux, ministre de la justice, quant à la possible suppression du tribunal
de commerce de Châtillon-sur-Seine, dans le cadre de la refonte de la carte
judiciaire. Cette réforme intégrerait la circonscription de Châtillon à celles
de Montbard et Semur-en-Auxois, qui dépendent du tribunal de commerce de Dijon,
entraînant ainsi la disparition du tribunal de Châtillon, et ce en dépit d'une
activité soutenue. Ainsi, pour l'année 1997, 152 affaires ont été inscrites :
126 ont été évacuées, dont 103 par jugement contradictoire et RC, une par
défaut, 22 par radiation, désistement, 26 affaires restant à juger au 31
décembre 1997. Aussi, il souhaiterait savoir s'il ne serait pas plus opportun
que le tribunal de Châtillon puisse désencombrer le tribunal de commerce de
Dijon en lui intégrant les circonscriptions de Montbard et Semur-en-Auxois. Il
semblerait dommageable, en effet, alors que les pouvoirs publics font de
l'aménagement du territoire l'une de leurs priorités, que l'on choisisse de
priver le Châtillonnais de sa juridiction de commerce. En tout état de cause,
il souhaiterait obtenir des assurances quant à la pérennité du tribunal de
commerce de Châtillon-sur-Seine.
N° 182. - M. André Vezinhet souhaite attirer l'attention de M. le ministre de
l'intérieur sur la situation de la quatrième ville de son département, Lunel,
au regard des moyens mis à sa disposition pour assurer la sécurité publique.
Chef-lieu d'un canton de 40 000 habitants (13 communes), Lunel compte à ce jour
une population de 21 500 personnes et n'est pas dotée d'une police d'Etat. Elle
relève de la brigade territoriale de la gendarmerie nationale, composée de 23
gendarmes pour 40 000 habitants. Il lui indique que le sentiment général
manifesté par les 13 maires concernés est que l'Etat n'exerce pas, faute de
moyens, sa mission de sécurité publique, analyse partagée par la population et
doublée d'un sentiment manifeste d'insécurité, malgré la prise en charge du
problème par la ville de Lunel contrainte de pallier cette carence par le
recours à une police municipale comptant 28 agents armés et patrouillant de
nuit. Connaissant particulièrement bien la situation de ce canton de l'est
héraultais, il lui fait part de son appui total à la demande réitérée de son
collègue maire et conseiller général de création d'une police urbaine d'Etat
dans sa commune qui, outre le fait qu'elle dépasse le seuil des 20 000
habitants prévu par les textes, présente notamment les caractéristiques d'être
classée en zone d'éducation prioritaire (ZEP), d'avoir des quartiers classés en
zone urbaine sensible et zone de revitalisation urbaine, et bénéficie d'un
contrat de prévention de la délinquance... L'implantation d'un commissariat de
police nationale permettrait naturellement le redéploiement de l'intervention
de la brigade territoriale de la gendarmerie nationale sur les 12 autres
communes du canton. Il insiste sur la justesse et la légitimité de cette
revendication et le remercie de bien vouloir lui donner des assurances sur ce
dossier important et sensible sur lequel il a déjà été alerté par les élus
concernés.
N° 186. - M. Yann Gaillard attire l'attention de M. le ministre de l'économie,
des finances et de l'industrie sur les délais de paiement appliqués aux plats
cuisinés et aux conserves. Il apparaît en effet anormal que les industriels
soient assujettis à un délai de paiement de 30 jours (art. 35 nouveau de
l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifié par la loi n° 92-1442 du
31 décembre 1992 et par la loi n° 96-588 du 1er juillet 1996) pour les produits
périssables à partir desquels ils produisent des plats cuisinés et ne soient
payés qu'à un délai compris entre 120 et 150 jours par les centrales de
restauration hors foyer et les distributeurs qui revendent ces produits. Il
apparaît clairement que dans cette situation les industriels jouent un rôle de
banquier à l'égard de leurs clients, ce qui ne se justifie pas. Il serait donc
normal, aux yeux de ces industriels, d'aligner les conditions de l'épicerie
(conserves de légumes, de viande, plats cuisinés...) sur celles des produits
frais. Il lui demande donc ce qu'il compte faire pour rétablir une certaine
logique et une certaine équité dans ce domaine et ne soit pas tenté d'exercer
en plus une activité d'organisme financier.
DÉCÈS D'UN SÉNATEUR
M. le président du Sénat a le regret de porter à la connaissance de Mmes et MM. les sénateurs qu'il a été avisé du décès de M. Maurice Schumann, sénateur du Nord, survenu le 9 février 1998.
REMPLACEMENT D'UN SÉNATEUR
Conformément aux articles LO 325 et LO 179 du code électoral, M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat qu'en application de l'article LO 320 du code électoral M. Jean-Paul Bataille est appelé à remplacer, en qualité de sénateur du Nord, M. Maurice Schumann, décédé le 9 février 1998.
MODIFICATIONS AUX LISTES
DES MEMBRES DES GROUPES
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE
(87 membres au lieu de 88)
Supprimer le nom de M. Maurice Schumann.
RÉUNION ADMINISTRATIVE DES SÉNATEURS NE FIGURANT
SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE
(10 au lieu de 9)
Ajouter le nom de M. Jean-Paul Bataille.
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
Dans sa séance du mardi 10 février 1998, le Sénat a nommé :
M. Roger Rinchet membre de la commission d'enquête chargée d'examiner le
devenir des grands projets d'infrastructures terrestres d'aménagement du
territoire, dans une perspective de développement et d'insertion dans l'Union
européenne, en remplacement de M. Fernand Tardy, démissionnaire.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Conditions d'incorporation
dans les écoles de police
188.
- 6 février 1998. -
M. Christian Demuynck
attire l'attention de
M. le ministre de l'intérieur
sur les conditions d'incorporation, dans les écoles de police, des candidats
qui ont réussi le concours de gardien de la paix. Pour être intégré dans ces
écoles, les démarches sont particulièrement longues. En premier lieu, une
enquête administrative est faite sur le candidat qui doit passer une visite
médicale et des tests psychologiques. Pour être admis au concours, ce dernier
doit ensuite réussir des épreuves écrites, orales et sportives. Une fois
l'admission définitive acquise, il doit encore patienter de nombreux mois avant
d'obtenir des informations précises sur la date d'incorporation et sur l'école
nationale de police ou le centre de formation qu'il devra rejoindre. Ainsi, il
n'est pas rare qu'un an et demi se passe entre le moment où le postulant
s'inscrit et celui où il est effectivement affecté dans l'école. Alors que la
nécessité de recruter des gardiens de la paix dans notre pays est évidente, il
n'est pas admissible qu'un candidat attende aussi longtemps pour commencer sa
formation. Il lui demande si les services chargés du suivi des dossiers peuvent
informer les élèves gardiens de la paix de la date et du lieu d'affectation,
dès qu'ils ont réussi leur concours d'entrée.
Octroi d'une indemnité de résidence aux agents hospitaliers
de l'hôpital de l'Assistance publique Georges-Clemenceau
de Champcueil (Essonne)
189.
- 9 février 1998. -
M. Jean-Jacques Robert
attire l'attention de
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie
sur l'inégalité de traitement subie par les personnels hospitaliers de
l'hôpital Georges-Clemenceau de Champcueil, qui ne perçoivent aucune indemnité
de résidence, bien qu'agents de l'Assistance publique de Paris. La
réglementation sur l'indemnité de résidence (art. 9 du décret n° 85-1148 du 24
octobre 1985 modifié) fixe le taux de cette indemnité en fonction des zones
territoriales d'abattement de salaires, déterminées par l'article 3 du décret
du 30 octobre 1962. Ce sont des dispositions fort anciennes qui ont pour
conséquence d'exclure injustement le personnel de cet hôpital de la zone
ouvrant droit au versement de l'indemnité de résidence : la commune de
Champcueil est classée dans la zone 3, au taux de 0 % de l'indemnité de
résidence. Tenant compte de l'évolution démographique dans ces zones, la
circulaire interministérielle, intervenue en 1991, a permis le reclassement de
certains personnels. Dans un esprit de compromis face à la réalité sur le
terrain, pourquoi ne pas prévoir aussi l'indemnité de résidence dont ces agents
ne peuvent pas bénéficier, exerçant à moins d'un kilomètre de la zone favorable
? Il lui demande de bien vouloir répondre à cette demande de simple justice
entre les personnels de l'Assistance publique, alignant l'indemnité de
résidence des agents de l'hôpital de Champcueil sur celle de leurs collègues,
soumis aux mêmes réalités économiques.
Réalisation du TGV Montpellier-Barcelone
190.
- 9 février 1998. -
M. Roland Courteau
souhaite indiquer à
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement
qu'il prend acte des récentes décisions du Gouvernement en faveur de la
réalisation prochaine du TGV-Est et Rhin-Rhône. Il lui fait remarquer,
cependant, que cette annonce a suscité (à tort ou à raison), en
Languedoc-Roussillon, nombre d'interprétations dont certaines consistaient à
conclure que par voie de conséquence le projet global TGV, entre Montpellier et
Barcelone, serait mis, délibérément, entre parenthèses pour ne pas dire
abandonné ou, au mieux, reporté à une date aussi éloignée qu'indéterminée : 1°
il lui demande donc, face à autant de déductions hâtives et empressées, de lui
apporter tous éclaircissements précis susceptibles de fonder un jugement
objectif sur les perspectives d'évolution du dossier (TGV-Languedoc-Roussillon
; 2° par ailleurs, en sa qualité de rapporteur au titre de la commission des
affaires économiques et du Plan, lors de la séance au Sénat du 14 octobre 1997,
consacrée à l'examen du projet de loi autorisant l'accord franco-espagnol pour
la construction d'une ligne grande vitesse entre Perpignan et Figueras, il
sollicite toutes précisions quant à l'évolution de ce projet et aux délais
précis concernant la mise en place de la commission intergouvernementale, la
désignation du concessionnaire, la procédure conduisant à la déclaration
d'utilité publique et le démarrage effectif des travaux. Dans une logique non
seulement française, mais européenne, il lui rappelle qu'avec la réalisation de
la deuxième phase Montpellier-Narbonne-Perpignan, il s'agit là du plus européen
de tous les projets TGV européens, sur l'axe
Londres-Paris-Montpellier-Barcelone-Madrid-Séville, mais également du plus
rentable, tant par l'immense marché des transports que par la cohésion qu'il
apporte. C'est pourquoi, et alors que de nombreuses études annoncent la
saturation très prochaine et plus rapide que prévue des axes routiers,
autoroutiers, mais aussi ferroviaires, entre Montpellier et la frontière
espagnole, il lui demande de lui faire connaître sa position, d'une part, sur
la pertinence de la réalisation d'une liaison à grande vitesse, d'abord entre
Montpellier et Narbonne, puis ensuite entre Narbonne et Perpignan, sous quels
délais il lui paraît raisonnable d'envisager sa mise en place et s'il entend
procéder au lancement de l'enquête publique sur l'ensemble du tracé.
Congés bonifiés pour les employés
des hôpitaux originaires des DOM-TOM
191.
- 10 février 1998. -
Mme Marie-Claude Beaudeau
demande à
M. le secrétaire d'Etat à la santé
de lui préciser les mesures modificatives du décret n° 87-482 du 1er juillet
1987 qu'il envisage pour permettre à tout employé hospitalier originaire d'un
département ou territoire d'outre-mer exerçant actuellement dans un
établissement public hospitalier métropolitain de bénéficier des congés
bonifiés. Elle lui demande également de lui préciser les mesures financières
qu'il envisage d'attribuer à chaque hôpital concerné afin de permettre ainsi
une application nouvelle de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.
Droit de prêt à la charge des bibliothèques
192.
- 10 février 1998. -
M. Jean-Louis Lorrain
attire l'attention de
Mme le ministre de la culture et de la communication
sur les conséquences pour les bibliothèques publiques de l'application de la
directive européenne 92/100/CEE du 19 novembre 1992. Cette directive, qui vise
la protection des droits d'auteur, demande aux bibliothèques publiques de payer
un droit de prêt et seuls certains établissements peuvent être exemptés dudit
paiement par les Etats membres. La France n'a pas appliqué ce droit de prêt
dans la mesure où le Centre national du livre, fondé en 1946, aide les auteurs
et les éditeurs. De plus, la loi du 11 mars 1957 protège les droits d'auteur
par rapport à l'éditeur et à la diffusion de ses oeuvres. Afin d'éviter
l'alourdissement des charges des municipalités qui participent majoritairement
aux frais de fonctionnement des bibliothèques, serait-il possible que le
ministère de la culture adopte la dérogation prévue à l'article 5 de la
directive européenne, pour les documents imprimés, prêtés ou consultés sur
place dans les bibliothèques publiques ? Ces dernières verraient, par
l'application d'un droit de prêt, leur budget d'achat de livres grevé par cette
nouvelle contrainte. En outre, du fait de leur développement récent, les
bibliothèques ne disposent pas encore toutes d'un service de lecture et de
documentation.
Enseignement du latin et du grec
193.
- 10 février 1997. -
M. Jean-Louis Lorrain
appelle l'attention de
Mme le ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire
sur les études des latinistes, dans la filière des lettres classiques. La
trilogie français, latin et grec a toujours constitué une grande tradition de
la culture française et un élément non négligeable d'unité de la culture
européenne. Or, une décision récente allant à l'encontre des dispositions
antérieures, favorablement accueillies par les enseignants et les parents
d'élèves, contraint désormais les élèves de troisième à opter, au choix, soit
pour le latin, soit pour le grec. Les priver de ce double enseignement
fragilise la formation classique tout entière. Et cette dernière est un moyen
efficace pour lutter contre la baisse de niveau souvent observée dans les
collèges. Quelles motivations ont précédé une telle prise de position et quelle
sera la filière désormais pour ceux des élèves qui souhaitent étudier
simultanément grec et latin ?
ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 10 février 1998
SCRUTIN (n° 74)
sur l'ensemble des conclusions du rapport de M. Jean-Paul Delevoye, fait au nom
de la commission des lois, sur la proposition de loi de M. Serge Vinçon et
plusieurs de ses collègues, tendant à autoriser les élus des communes comptant
3 500 habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux.
Nombre de votants : | 316 |
Nombre de suffrages exprimés : | 315 |
Pour : | 218 |
Contre : | 97 |
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre :
16.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :
Pour :
16.
Contre :
6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer,
Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :
Pour :
94.
GROUPE SOCIALISTE (75) :
Contre :
75.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :
Pour :
56.
N'ont pas pris part au vote :
2. _ MM. René Monory, président du Sénat,
et Jean Faure, qui présidait la séance.
GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :
Pour :
43.
Abstention :
1. _ M. Nicolas About.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :
Pour :
9.
Ont voté pour
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
André Gaspard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Ont voté contre
François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber
Abstention
M. Nicolas About.
N'ont pas pris part au vote
MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la
séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes
à la liste de scrutin ci-dessus.