M. le président. Par amendement n° 12, M. Jolibois, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 5 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article 721-1 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Sauf décision du juge de l'application des peines, prise après avis conforme de la commission de l'application des peines, les personnes condamnées à un suivi socio-judiciaire comprenant une injonction de soins, et qui refusent de suivre un traitement pendant leur incarcération, ne sont pas considérées comme manifestant des efforts sérieux de réadaptation sociale. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 109, présenté par M. Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, dans le texte proposé par cet amendement pour compléter le premier alinéa de l'article 721-1 du code de procédure pénale, à supprimer le mot : « conforme ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 12.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Les personnes condamnées à un suivi socio-judiciaire qui refusent de suivre l'injonction de soins ne pourront pas bénéficier des réductions supplémentaires de peine à celles qui peuvent déjà être prononcées pour bonne conduite.
Bien entendu, il n'est pas question de supprimer la réduction de peine pour bonne conduite, qui est un espoir, une récompense et qui facilite la vie et la bonne tenue dans nos prisons. Mais, puisque des réductions supplémentaires de peine sont prévues au bénéfice de ceux qui manifestent le désir de se réinsérer, de se réadapter socialement, nous estimons que la première manifestation d'un désir sérieux de réadaptation c'est le strict respect de l'injonction de soins qui a été prononcée.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour présenter le sous-amendement n° 109.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je présente également un sous-amendement semblable à l'amendement n° 13. Mes explications seront donc valables pour les deux, d'autant plus que - M. le rapporteur ne m'en voudra pas de le dire - la commission des lois et lui-même ont bien voulu les accepter et supprimer dans ces deux amendements le mot « conforme ».
En effet, la composition de la commission d'application des peines varie beaucoup au cours d'une même réunion, car nombreux sont ceux qui viennent exposer leurs dossiers puis repartent. Par ailleurs, il faut tout de même que le juge de l'application des peines ne soit pas mis en minorité, en particulier par de nombreux représentants de telle ou telle administration, alors que l'appel est possible en la matière.
Il ne faut pas diminuer les pouvoirs propres du juge de l'application des peines alors que le texte lui-même lui en conférera par ailleurs de très importants, y compris celui de prendre une décision exécutive par provision, après débat contradictoire. Il n'est donc pas nécessaire de prévoir que l'avis de la commission de l'application des peines doit être conforme, je le répète, car de toute façon un appel sera possible en cas de désaccord.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 109 ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 12 et sur le sous-amendement n° 109 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. J'ai très bien compris l'esprit de l'amendement proposé par M. le rapporteur. En même temps, j'étais réservée pour les raisons que vient d'expliquer M. Dreyfus-Schmidt sur les termes « après avis conforme ».
Dès lors que le terme « conforme » est supprimé, je ne peux que me rallier à l'amendement n° 12.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 109, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 12.
Mme Joëlle Dusseau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau. Je m'abstiendrai sur cet amendement en raison non pas du fond mais de la forme, notamment à cause des deux derniers mots : « réadaptation sociale ».
En effet, pour avoir beaucoup travaillé sur le problème, qui n'est pas très différent, des femmes battues, je me suis rendu compte que l'image classique de l'inadapté social, souvent alcoolique, qui bat sa femme correspond rarement à la réalité. En fait, les femmes battues appartiennent à tous les milieux...
M. Jean-Jacques Hyest. Il y a aussi des alcooliques dans tous les milieux !
Mme Joëlle Dusseau. ... quel que soit le niveau culturel ou financier, l'adaptation ou l'inadaptation sociale.
L'amendement, tel qu'il est rédigé, me gêne car il tend à considérer que les personnes qui commettent des délits ou des crimes sexuels sont des inadaptés sociaux, qui ont besoin d'une réadaptation sociale.
Or, lorsqu'un événement se produit et que les medias interrogent les voisins, les amis, tous disent qu'il s'agit de personnes tout à fait adaptées qu'ils connaissent très bien, qu'ils fréquentent, etc.
Le délit ou le crime sexuel, qu'il s'agisse des enfants ou des femmes, est très souvent commis, en effet, par des personnes parfaitement intégrées dans la vie sociale.
Je vous assure qu'elles n'ont aucun besoin d'adaptation sociale. Elles ont sûrement besoin d'être mieux dans leur tête. Mais cela c'est autre chose !
Il serait néfaste, me semble-t-il, de conforter cette image de l'inadapté social coupable de délit ou de crime sexuel. L'auteur de délit ou de crime sexuel est souvent caractérisé par une extrême banalité.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je ne doute pas que M. le rapporteur s'apprête à expliquer à notre collègue Mme Dusseau que les termes « effort sérieux de réadaptation sociale » sont ceux-là même qui, aux termes de la loi, permettent d'accorder des réductions de peine. Peut-être convient-il de les mettre entre guillemets, afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté possible ni de contresens, mais on ne peut pas en utiliser d'autres.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ? ...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 A.
Par amendement n° 13, M. Jolibois, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 5 A, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 721-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sauf décision du juge de l'application des peines prise après avis conforme de la commission de l'application des peines, les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux personnes condamnées pour l'une des infractions mentionnées à l'article 706-48 si, lorsque leur condamnation est devenu définitive, le casier judiciaire faisait mention d'une telle condamnation. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 110, présenté par M. Dreyfus-Schmidt et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 13 pour compléter l'article 721-1 du code de procédure pénale, à supprimer le mot : « conforme ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13.
M. Charles Jolibois, rapporteur. Il s'agit d'exclure les délinquants sexuels récidivistes du bénéfice des réductions de peine supplémentaires, sauf autorisation expresse de la commission de l'application des peines.
En effet, ces réductions de peine sont accordées aux condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale ; nous retrouvons toujours les mêmes termes, madame Dusseau. Or, le fait qu'un délinquant sexuel ait récidivé après une première condamnation suffit à démontrer que, en dépit de ses efforts en prison, sa réadaptation - je ne dirai pas « sociale » pour ne pas heurter les convictions, que j'ai très bien comprises, de Mme Dusseau - est pour le moins aléatoire.
Il convient donc de permettre à la commission de l'application des peines, qui comprend le psychiatre de l'établissement pénitentiaire, de s'opposer aux réductions de peine supplémentaires. Ces réductions ne seront pas impossibles mais il sera plus difficile à un récidiviste de les obtenir.
M. le président. M. Dreyfus-Schmidt s'est déjà exprimé sur son sous-amendement n° 110.
Quel est l'avis de la commission sur celui-ci ?
M. Charles Jolibois, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 13 et sur le sous-amendement n° 110 ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 110, accepté par la commission et par le Gouvernement.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 A.
Article 5