SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Eloge funèbre de François Giacobbi, sénateur de Haute-Corse (p. 1 ).
MM. le président, Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Suspension et reprise de séance (p. 2 )

PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE

3. Conférence des présidents (p. 3 ).

4. Election de sénateurs (p. 4 ).

5. Organisme extraparlementaire (p. 5 ).

6. Dépôt d'un rapport du Gouvernement (p. 6 ).

7. Démission de membres de commissions et candidatures (p. 7 ).

8. Rappel au règlement (p. 8 ).
MM. Emmanuel Hamel, le président.

9. Inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales. - Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 9 ).
Discussion générale : MM. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur ; Christian Bonnet, rapporteur de la commission des lois ; Bernard Plasait, Jean-Jacques Hyest, Charles de Cuttoli, Guy Allouche, MichelDuffour, Bernard Joly, Jacques Habert, Mme Monique Cerisier-ben Guiga.
Clôture de la discussion générale.
M. le ministre.

Article 1er. - Adoption (p. 10 )

Article 2 (p. 11 )

Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Jacques Hyest, Guy Allouche, Michel Duffour. - Adoption.
Amendements n°s 4 et 5 de M. Ostermann. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 2 (p. 12 )

Amendement n° 1 de M. Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre, Guy Cabanel, Guy Allouche. - Rejet.
Amendement n° 2 de M. Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre, Guy Allouche. - Rejet.
Amendement n° 3 de M. Joly. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre, Jacques Habert. - Rejet.
Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Vote sur l'ensemble (p. 13 )

MM. Yvon Collin, Guy Allouche, Alain Gérard, François Trucy, Jacques Habert, le ministre, Emmanuel Hamel, Michel Duffour, Jean-Jacques Hyest.
Adoption du projet de loi.

10. Nomination de membres de commissions (p. 14 ).

11. Transmission de projets de loi (p. 15 ).

12. Dépôt d'une proposition d'acte communautaire (p. 16 ).

13. Ordre du jour (p. 17 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.

2

ÉLOGE FUNÈBRE DE FRANÇOIS GIACOBBI,
SÉNATEUR DE HAUTE-CORSE

M. le président. Mes chers collègues, je vais prononcer l'éloge de François Giacobbi. (MM. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
C'est avec une profonde émotion que j'évoquerai devant vous le parcours de François Giacobbi, disparu le 5 mars dernier. Le destin de ce républicain vigilant, homme de courage et de générosité, était étroitement lié à celui de la Corse, dont il partageait les espoirs et les tourments et qu'il a représentée au sein de notre assemblée durant plus de trente ans.
Lorsque François Giacobbi voit le jour le 19 juillet 1919 dans la maison familiale de Venaco, il est l'héritier et le dépositaire d'une longue tradition. Des idées républicaines ont valu l'exil à l'un de ses ancêtres sous le Second Empire. Son grand-Père, sénateur, compte parmi les fondateurs de la IIIe République. Son père, Paul, fera partie des « Quatre-vingts », ces parlementaires qui refuseront le vote des pleins pouvoirs au maréchal Pétain. L'itinéraire politique de François Giacobbi sera frappé au coin de ce républicanisme intransigeant.
Etudiant à Paris, le jeune homme se destine à la carrière d'avocat. Ses études de droit interrompues par la guerre, il s'engage dans la Résistance et combat pour la liberté dans les maquis du Midi et du Vercors. C'est dans l'action qu'il reprend à son compte avec foi et ardeur le patriotisme familial. A la même époque, son père est condamné à mort par l'armée d'occupation pour son activité dans la Résistance. Pudique, François Giacobbi n'évoquait guère cette période, mais ses camarades de maquis sont les témoins d'un courage dont il ne s'est jamais départi.
A la Libération, François Giacobbi exerce le métier de journaliste au Télégraphe , à l' Action automobile et à Paris-Match . De retour en Corse après avoir repris ses études, il s'inscrit comme avocat au barreau de Corte.
Il entre en politique en 1951, au conseil municipal de sa ville natale et comme conseiller général du canton de Vezzani. C'est le début d'une longue et brillante carrière, tout entière dévouée à la cause de la Corse et de ses habitants, lesquels lui renouvelleront maintes fois leur confiance, dans les assemblées locales comme au Parlement.
Appelé à la mairie de Venaco à la suite du décès de son père en 1951, François Giacobbi ne quittera ce mandat que trente ans plus tard. Elu président du conseil général de Corse, puis du conseil général de Haute-Corse, il assumera cette fonction durant trente-trois ans. François Giacobbi présidera aussi le conseil régional avant de siéger à l'assemblée de Corse.
De toute l'oeuvre accomplie par l'élu local, c'est sans doute de la création du parc naturel régional, fruit de ses efforts, qu'il était le plus fier. François Giacobbi fut un des premiers à promouvoir une idée encore neuve, la protection de la nature, menacée en Corse par la récurrence des incendies et par une urbanisation incontrôlée. Président de la fédération des parcs naturels de France, président d'honneur des parcs européens, il voit son action énergique couronnée par le prix de l'institut Goethe, la plus haute distinction mondiale pour la protection de l'environnement.
En 1956, François Giacobbi est élu à l'Assemblée nationale. Le nouveau député de Corse, membre du parti radical-socialiste, est bientôt appelé au Gouvernement, comme sous-secrétaire d'Etat à la présidence du Conseil dans les cabinets Bourgès-Maunoury et Gaillard, où il est chargé des relations avec le Parlement.
En 1958, il fait campagne en faveur de la nouvelle Constitution. Secrétaire général du parti radical-socialiste de 1960 à 1969, il anime la scène politique nationale de sa forte présence.
Elu sénateur en 1962, François Giacobbi siège à la commission des affaires culturelles, avant de rejoindre la commission des lois. Il y déploie ses talents de juriste et fait entendre sa voix, pour affirmer sa foi dans les valeurs de la République. Toujours au coeur des débats de principe, François Giacobbi est très écouté de ses collègues, qui le portent à la vice-présidence de la commission.
Passionné par les questions de sécurité, il prend une part active aux travaux de deux commissions de contrôle, l'une sur la lutte contre le terrorisme en 1983, l'autre sur les services du ministère de l'intérieur en 1991. Confronté au malaise de la population corse, il réprouve sans équivoque la violence, dont il condamne toutes les manifestations. Il fait entendre ses convictions, sans détour.
Ardent défenseur de la Constitution, François Giacobbi est convaincu que « l'audace et la modernité consistent non pas à la réformer, mais à l'appliquer », tout particulièrement lorsque la Corse est en question.
Chacun se souvient ici de son intervention à la tribune lors du débat sur le statut de l'île en 1991. Il combat pied à pied l'inscription dans la loi des termes : « peuple corse composante du peuple français ». Le Conseil constitionnel lui donnera raison.
J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de m'en entretenir longuement avec lui. Il m'expliquera, avec la fougue et la passion qui le caractérisaient, les raisons de sa virulence. Dans la violence qui a meurtri la Corse ces dernières années, il voit le spectre de la haine liberticide que, jeune maquisard, il a tant combattue. Voilà ce que fait revivre en lui ce débat qui divise les fils de la Corse, sa terre. L'amour de la liberté, qu'il a failli payer de sa vie, avec un grand courage, justifie sa passion oratoire et ses prises de position, dont la clarté est respectée sur tous les bancs.
L'avenir, pour lui, est ailleurs. Il passe par la promotion d'une réelle égalité des chances. « Les Corses revendiquent non pas le droit à la différence, mais le droit à la ressemblance », affirme-t-il. Et il défendra cette idée, avec le franc-parler dont il était coutumier.
L'appartenance de la Corse à la République est, pour lui, un principe intangible qui ne souffre aucune concession. « Lorsque, élu de la Corse, je m'exprime à cette tribune, dit-il, c'est en ma qualité de représentant du peuple français tout entier. »
François Giacobbi combat avec la même vigueur et la même conviction toute atteinte aux droits du Parlement, à ses yeux trop souvent négligés. Il voit dans la représentation nationale un rempart contre la démagogie et la concentration du pouvoir. Il dénonce l'inflation législative, source de complexité et de confusion pour le citoyen. Il défend avec fermeté le bicamérisme, tout particulièrement les prérogatives du Sénat dans la procédure de révision de la Constitution. Pour lui, la République ne se conçoit pas sans le Sénat, comme il l'a montré en intervenant avec force dans le débat constitutionnel de 1969.
Homme de conviction, homme de caractère, François Giacobbi manifestait la même aisance dans les actions de terrain que dans le combat national.
Sa curiosité intellectuelle, son énergie, confortées au spectacle de la montagne corse dont il ne se lassait jamais, ouvraient un champ inépuisable à de multiples activités qu'il pratiquait en amateur éclairé. Passionné de sport, il était à ses heures poète et musicien.
Fidèle à ses amis autant qu'à ses principes, il savait faire partager son amour de la Corse, de ses habitants, de ses paysages. Ses collègues de la commission des lois ont pu apprécier la chaleur de son hospitalité et s'en souviennent encore.
François Giacobbi nous a quittés, mais les valeurs politiques et personnelles qu'il incarnait demeurent.
Au nom du Sénat, j'assure de notre solidarité ses enfants, sa famille et ses amis du groupe du Rassemblement démocratique et social européen. Je rends hommage à la mémoire d'un homme généreux qui aura toujours posé en préalable les principes de la République.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, au nom du Gouvernement, m'associer à l'hommage rendu aujourd'hui à François Giacobbi. Puis-je ajouter que je reçois cette mission avec une réelle émotion et comme un grand honneur ; on sait les liens qui m'unissaient à votre collègue disparu, dont la personnalité, la stature ont compté dans mon existence comme elles ont marqué tous ceux qui l'ont connu.
L'intelligence vive, l'esprit de synthèse, la verve et l'éloquence, tous les domaines lui étaient ouverts au lendemain d'une guerre exemplaire dans les maquis du Sud-Est. Il devient journaliste, mais deux générations de parlementaires l'ont précédé et il entre en politique en 1951 dans un engagement total où il révélera une vertu supplémentaire et rare : le caractère.
Ce caractère, qui avait conduit son père Paul, qui fut lui-même ministre, à refuser en 1940 - ils étaient peu nombreux - les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, François Giacobbi le démontrera tout au long de sa vie.
Vous avez rappelé, monsieur le président, cette carrière d'un demi-siècle, riche de tant de fonctions brillamment remplies, au Gouvernement de la France, dans les ministères Bourgès-Maunoury et Félix Gaillard, en charge des relations avec le Parlement, mais aussi dans les mandats locaux en Corse, où ce jacobin proclamé assumera pleinement la décentralisation qu'il appelait de ses voeux ; il y témoignera d'un esprit novateur dans les domaines les plus divers comme la protection de l'environnement - vous y avez fait allusion, monsieur le président - où, précurseur, son action pour les parcs naturels lui vaudra la grande distinction internationale qu'est la médaille Goethe.
Vous avez évoqué le bref passage à l'assemblée nationale et, bien sûr, les trente-cinq années passées au Sénat où son travail, sa compétence, la force de ses interventions sont dans toutes les mémoires.
Si sa longévité politique lui faisait prêter quelque habileté manoeuvrière, François Giacobbi répondait en riant : « Le comble du machiavélisme, c'est la ligne droite ». En effet, il fut d'abord un homme de constance dans ses choix, dans sa fidélité à son parti, dans sa fidélité à l'idéal républicain dont, féru d'histoire et de droit constitutionnel, il avait une conception exigeante et longuement méditée.
Il était fier du message universel et humaniste de la France.
Lorsque surviendront, dans cette Corse qu'il connaît en profondeur et qu'il aime passionnément, les troubles que l'on sait, il affirmera le premier que l'avenir de l'île et même la sauvegarde de son identité culturelle passent par la démocratie, hors de toute violence, dans le cadre républicain un et indivisible.
Le combat pour la République en Corse est d'ailleurs, à ses yeux, un combat pour la République, tout simplement. Il le mènera jusqu'à son dernier souffle, avec un courage et une pugnacité extraordinaires, qui lui vaudront, bien sûr, quelques farouches oppositions mais aussi le respect unanime, et l'Histoire dira combien il lui est dû que l'essentiel ait été préservé.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la République a perdu, avec François Giacobbi, un grand serviteur. Le Gouvernement salue sa mémoire et adresse à sa famille l'expression de sa profonde et amicale sympathie.
M. le président. Mes chers collègues, conformément à la tradition, en signe de deuil, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Jacques Valade.)

PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
A. - Mercredi 24 septembre 1997, à quinze heures et le soir :
Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de MM. Charles Descours, Claude Huriet et plusieurs de leurs collègues, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 413, 1996-1997).

La conférence des présidents avait fixé :
- au mardi 23 septembre, à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi ;
- à trois heures, la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session ordinaire et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le mardi 23 septembre.
B. - Jeudi 25 septembre 1997, à neuf heures trente et à quinze heures :
Suite des conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme.
C. - Mardi 30 septembre 1997, à dix heures, à seize heures et le soir :
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes (n° 423, 1996-1997) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 29 septembre à dix-huit heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;
- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session ordinaire et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 29 septembre.
D. - Mercredi 1er octobre 1997, à quinze heures et, éventuellement, le soir :
1° Ouverture de la session ordinaire de 1997-1998 ;

Ordre du jour prioritaire

2° Suite du projet de loi relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes.
E. - Jeudi 2 octobre 1997, à dix heures, à seize heures trente et, éventuellement, le soir :

Ordre du jour prioritaire

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier (n° 425, 1996-1997) ;
La conférence des présidents a fixé au mercredi 1er octobre, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
F. - Mardi 7 octobre 1997, à dix heures trente et à seize heures :

Ordre du jour prioritaire

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme du service national (n° 426, 1996-1997) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 6 octobre à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé le 23 septembre et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 6 octobre.
G. - Mercredi 8 octobre 1997 :
A neuf heures trente :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi portant réforme du service national ;
A quinze heures :
2° Nomination des membres de la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes du Sénat.
Les candidatures à cette commission devront être déposées par les groupes au secrétariat du service des commissions le mardi 7 octobre, avant dix-sept heures ;

Ordre du jour prioritaire

3° Suite du projet de loi portant réforme du service national.
H. - Jeudi 9 octobre 1997 :
A neuf heures trente :

Ordre du jour prioritaire

1° Projet de loi autorisant la ratification de la convention européenne sur la reconnaissance de la personnalité juridique des organisations internationales non gouvernementales (n° 338, 1996-1997) ;
2° Projet de loi autorisant la ratification de la convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est (ensemble quatre annexes et deux appendices) (n° 386, 1996-1997) ;
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Espagne concernant la construction et l'exploitation de la section internationale d'une ligne ferroviaire à grande vitesse entre la France et l'Espagne (façade méditerranéenne) (n° 201, 1996-1997) ;
4° Projet de loi autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités aux autorités territoriales (ensemble trois déclarations) (n° 371, 1996-1997) ;
5° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Croatie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 342, 1996-1997) ;
6° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kenya en vue d'éviter les doubles impositions en matière de transport aérien en trafic international (n° 341, 1996-1997) ;
7° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales (n° 219, 1996-1997) ; 8° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, agissant dans le cadre de l'Union européenne, d'une part, et la République de Slovénie, d'autre part (n° 388, 1996-1997) ;
9° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Lituanie, d'autre part (n° 392, 1996-1997) ;
10° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Lettonie, d'autre part (n° 393, 1996-1997) ;
11° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Estonie, d'autre part (n° 394, 1996-1997) ;
La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion générale commune de ces trois projets de loi, n°s 392, 393 et 394.
A quinze heures :
12° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de question devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.

Ordre du jour prioritaire

13° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de loi relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.

4

ÉLECTION DE SÉNATEURS

M. le président. En application des articles LO 325 et LO 179 du code électoral, M. le président du Sénat a reçu de M. le ministre de l'intérieur une communication de laquelle il résulte qu'à la suite des opérations électorales du 21 septembre 1997 MM. Jean Arthuis, Michel Barnier et Jean-Pierre Raffarin ont été proclamés élus sénateurs respectivement de la Mayenne, de la Savoie et de la Vienne. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

5

ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une lettre par laquelle il demande au Sénat de bien vouloir désigner un sénateur appelé à siéger au sein d'un organisme extraparlementaire.
En application de l'article 9 du règlement, j'invite la commission des affaires économiques à présenter une candidature pour un sénateur appelé à siéger, en remplacement de M. Jean-Marie Rausch, démissionnaire, au sein de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications.

6

DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport, établi en application de la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, sur le fonctionnement pour l'année 1996 du fonds de modernisation de la gestion des déchets.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.

7

DÉMISSION DE MEMBRES
DES COMMISSIONS ET CANDIDATURES

M. le président. J'ai reçu avis de la démission de M. Henri Weber, comme membre de la commission des affaires culturelles, et de celle de M. René Rouquet, comme membre de la commission des affaires économiques et du Plan.
Le groupe intéressé a fait connaître à la présidence le nom des candidats proposés en remplacement.
Ces candidatures vont être affichées et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.

8

RAPPEL AU RE`GLEMENT

M. Emmanuel Hamel. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Au risque d'exaspérer les membres de la conférence des présidents et les présidents de commission ou de délégation présents dans l'hémicycle, je crois devoir signaler qu'il est extrêmement regrettable à mon humble avis, que nous persistions dans la concomitance des séances publiques et des réunions de commissions.
En effet, des citoyens sont présents dans les tribunes, et ils en repartiront avec le sentiment que nous nous adonnons au péché de l'absentéisme, alors que nous travaillons ailleurs. Ainsi, M. Genton est là pour en attester, la délégation du Sénat pour l'Union européenne siégera cet après-midi à partir de dix-sept heures. Devons-nous rester dans l'hémicycle ou nous rendre à cette réunion ? De même, demain se tiendront plusieurs réunions de la commission des finances : faut-il y participer ou être présents en séance publique ?
Un effort doit être véritablement accompli pour mettre fin à cette impossibilité apparente d'organiser nos travaux, de telle sorte que les commissions ne se réunissent pas alors que se déroule la séance publique. En effet, c'est l'image du Parlement qui souffre de cette pratique. (Applaudissements.)
M. le président. Mon cher collègue, je vous donne acte de votre rappel au règlement. Je transmettrai bien évidemment vos remarques à M. le président du Sénat, mais faut-il rappeler que ce n'est pas la première fois que nous évoquons ce problème,...
M. Charles de Cuttoli. Il faut trouver une solution !
M. le président. ... ici même et à l'Assemblée nationale.
J'espère que les propositions que vous pourrez faire nous permettront de trouver plus facilement cette solution que nous recherchons tous, quelles que soient nos positions respectives sur l'échiquier politique, depuis de nombreuses années.

9

INSCRIPTION D'OFFICE DES PERSONNES ÂGÉES DE DIX-HUIT ANS SUR LES LISTES ÉLECTORALES

Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (n° 408, 1996-1997) relatif à l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales. [Rapport n° 417 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'exercice de la citoyenneté n'a rien d'automatique. C'est d'abord le fruit de l'instruction, le témoignage de la compréhension des mécanismes mêmes qui fondent la démocratie. Inscrire dans les esprits et dans les coeurs des jeunes générations l'attachement à la France et à la République, développer l'instruction civique à tous les niveaux de l'éducation, tels sont, sans aucun doute, les meilleurs moyens d'améliorer la participation des jeunes citoyens à la vie publique.
Au moins avons-nous le devoir d'encourager cette participation, et spécialement de rendre aussi aisée qu'il est possible l'inscription de tous les citoyens sur les listes électorales. En effet, si la République ne se résume pas au suffrage universel, celui-ci est, pour la souveraineté populaire, le moyen de s'exprimer : c'est d'abord le fait de se rendre aux urnes lors des consultations qui marque le désir de chacun de prendre sa part de citoyen à la vie publique.
Or, l'expérience nous a montré récemment que nombre de jeunes électeurs se trouvèrent surpris et empêchés de participer à une grande consultation nationale, faute d'avoir pu être inscrits à temps sur les listes électorales. Ce sont des situations de ce type qu'il convient de réduire ou de faire disparaître, et tel est l'objet du présent projet de loi.
M. le Premier ministre, lors de sa déclaration de politique générale, le 19 juin dernier, avait pris l'engagement de faire en sorte que « l'inscription de chaque citoyen sur les listes électorales soit rendue automatique l'année de sa majorité ». Le Président de la République avait également formé un voeu analogue lors de propos télévisés tenus au début de l'année.
Nous voici donc au pied du mur : il convient d'ancrer dans la réalité de notre ordre juridique ces dispositions nouvelles.
Les principes auxquels je viens de faire allusion semblent rencontrer une large approbation.
Votre rapporteur, M. Christian Bonnet, a bien voulu rappeler, dans son rapport écrit, l'esprit dans lequel la commission des lois du Sénat a abordé l'étude de ce projet de loi. Je l'en remercie.
Je voudrais, en premier lieu, préciser les objectifs que vise le Gouvernement à travers ce texte.
Aujourd'hui, vous le savez, l'inscription sur les listes électorales, qui est obligatoire, ne comporte aucun caractère automatique et demeure subordonnée à une demande expresse des citoyens. Il s'agit, toutefois, d'une obligation qui reste sans sanction en cas d'inobservation. L'on peut dire qu'il n'est pas de citoyenneté sans effort et sans abnégation, cela est vrai, mais faut-il pour autant exiger de chacun qu'il accomplisse une formalité quelquefois longue et difficile ?
L'état de fait que nous constatons, joint à l'évanescence progressive, que je déplore, de l'instruction civique dans les programmes de l'éducation nationale, n'a guère encouragé les jeunes majeurs à effectuer les démarches d'inscription auprès de leur mairie ; chacun d'entre vous le sait. C'est pourquoi le Gouvernement vous propose d'édicter des dispositions propres aux jeunes gens atteignant l'âge de dix-huit ans, et permettant leur inscription automatique sur les listes électorales.
Ces mesures sont particulières aux nouveaux citoyens atteignant l'âge de la majorité. Elles s'inscrivent donc dans notre droit électoral sans en changer les fondements essentiels, mais elles permettront, de manière pragmatique, de répondre à des situations de fait où des jeunes se sont trouvés hors d'état d'accomplir leur devoir civique, faute d'information ou d'initiative suffisante.
Il s'agit non pas, j'y insiste, de conférer la qualité d'électeur à ces jeunes gens, puisque cette qualité leur est conférée par la Constitution, mais seulement d'accomplir la formalité administrative qui leur permettra de remplir leur devoir d'électeur dans leur commune.
Le principe d'égalité est tout à fait respecté. En effet, le Conseil constitutionnel admet parfaitement que des situations différentes soient traitées différemment. Or, comme l'indique excellemment M. Bonnet dans son rapport, le fait d'atteindre dans l'année l'âge de la majorité constitue bien une différence d'avec les autres électeurs, laquelle justifie un traitement particulier, à savoir l'inscription d'office, l'objet de cette mesure étant la recherche de la plus large participation de tous les électeurs aux différents scrutins.
A cette fin, il convient de définir une méthode simple et transparente.
La volonté de simplicité a conduit à faire des commissions administratives existantes l'instance compétente pour procéder à l'inscription d'office.
Chaque commission administrative - il y en a une par bureau de vote - est composée de trois membres, à savoir un représentant du maire, un délégué désigné par le préfet et un délégué désigné par le président du tribunal de grande instance, ainsi qu'en dispose l'article L. 17 du code électoral. La diversité de cette composition est gage d'un contrôle pluraliste efficace.
Je dois vous préciser que, pour ce qui me concerne, j'ai rappelé aux préfets, par une circulaire en date du 30 juin 1997, l'intérêt qui s'attache à la nomination de ces représentants. Il convient de veiller à la composition pluraliste des commissions et à la qualité de ceux qui ont à accomplir ces tâches bénévoles mais indispensables au bon fonctionnement de la démocratie.
Les commissions administratives pourront procéder aux inscriptions d'office, non point de leur propre initiative ou sur la base de renseignements qu'elles auraient d'elles-mêmes recueillis, car vous mesurez bien à quels risques de fraudes nous exposerait une telle démarche, mais sur la foi des informations que leur transmettront les services de l'Institut national de la statistique et des études économiques. Je préciserai dans un instant comment ces informations seront réunies.
Les commissions administratives procéderont donc à l'ensemble des inscriptions - j'insiste bien sur ce point - c'est-à-dire aussi bien celles qui résultent des démarches volontaires effectuées par les citoyens dans les conditions habituelles que celles qui concernent les jeunes électeurs ayant atteint l'âge de dix-huit ans depuis la dernière clôture définitive des listes électorales ou atteignant cet âge avant la prochaine clôture définitive de ces listes, sous réserve, bien entendu, qu'ils répondent aux autres conditions prescrites par la loi.
L'unité administrative et le regroupement au sein des seules commissions administratives de l'ensemble des opérations d'inscription, d'office ou volontaires, est un gage de simplicité.
Je ne vous dissimulerai pas pour autant que de nombreux obstacles d'ordre technique s'opposent à la réussite de cette entreprise.
Dois-je ici faire observer que ce sont ces difficultés qui avaient, en d'autres temps, conduit à reporter la mise en oeuvre d'un principe dont les plus hautes autorités de l'Etat avaient pourtant souligné l'intérêt ?
En effet, comment peut-on recenser, par commune, tous les jeunes Français atteignant ou devant atteindre l'âge de dix-huit ans ?
Le répertoire national de l'Institut national de la statistique et des études économiques ne nous renseigne nullement sur la commune de résidence. Or, entre le lieu de naissance et le lieu de domicile, au long de dix-huit années, de nombreux changements ont pu se produire.
Le recensement effectué pour le service national sera donc notre premier outil. Je rappelle que tous les garçons sont tenus de se faire recenser dans leur mairie à l'âge de dix-sept ans. Cela donne lieu à l'établissement d'un fichier fiable et complet, qui ne réunit que les jeunes de nationalité française. Le recensement, comme l'accomplissement des obligations du service national, constitue l'une des marques maîtresses de la nationalité.
Dès après le vote du présent projet de loi par le Parlement, les services du ministère de la défense pourront communiquer à l'INSEE les informations nominatives portant, aux termes du présent texte, « exclusivement sur les nom, prénoms, nationalité, date et lieu de naissance et adresse ». Les actes réglementaires qui seront pris après consultation de la Commission nationale de l'informatique et des libertés sont d'ores et déjà en cours de préparation ; ils permettront d'étendre à l'inscription sur les listes électorales les finalités du recensement, et d'ajouter l'INSEE et les commissions administratives au nombre des destinataires des informations dont j'ai rappelé la nature.
Ainsi, dès les premiers jours de novembre 1997, c'est-à-dire d'ici à deux mois, les communes devraient bénéficier de cette importante source d'information.
En second lieu, les fichiers gérés par les organismes de base de l'assurance maladie seront mis à contribution. Ils ont le mérite d'enregistrer les jeunes filles, à la différence du recensement. Comme vous le savez, le droit de vote est accordé aux femmes depuis 1946 dans notre pays. (Sourires.)
Ces fichiers ne sont pas aujourd'hui homogènes. Certains, étant fondés sur la qualité d'« ouvrant droit », recensent les parents, mais rarement les jeunes majeurs jouissant de la qualité d'« ayants droit » et, à ce titre, simplement rattachés à l'identification de leurs parents. Des traitements appropriés seront nécessaires dans certains cas. Il est vrai que d'autres fichiers, tel celui de la Mutualité sociale agricole, permettent en revanche de sélectionner rapidement les informations visées par le présent projet de loi. Mais, surtout, la constitution, à partir du 1er janvier 1998, du répertoire national interrégimes d'assurance maladie répondra complètement à nos voeux. Les services du ministère de l'emploi et de la solidarité estiment qu'en juillet 1998 des renseignements exhaustifs pourront être transmis à l'INSEE.
Le mécanisme retenu vise à garantir la confidentialité des informations. C'est donc l'Institut national de la statistique et des études économiques, dont vous connaissez déjà la rigueur et la précision dans la tenue des fichiers électoraux, qui se voit confier la charge de réunir les informations provenant aussi bien du recensement pour le service national que des organismes servant des prestations de base des régimes d'assurance maladie. Après croisement de ces informations, l'INSEE transmettra aux communes les listes de jeunes majeurs dont l'inscription d'office sera possible : il s'agira des communes désignées par les jeunes majeurs eux-mêmes, soit lors du recensement, soit lors de leur plus récent contact avec leur régime d'assurance maladie. En effet, le présent projet de loi prévoit, dans son article 1er, que le lieu d'inscription d'office est la commune où se trouve le domicile réel de la personne concernée. La jurisprudence définit ce domicile réel comme celui du principal établissement.
Cependant, il convenait de faire droit au souhait de certains jeunes gens d'être inscrits en un autre lieu que celui de leur domicile réel. Il peut en aller ainsi du lieu où ils poursuivent leurs études, du lieu où ils auraient récemment établi leur domicile, quittant celui de leurs parents. Cette possibilité demeurera et, en cas de double inscription, l'INSEE ne manquera pas de les signaler, comme il le fait déjà, pour qu'il soit mis fin à ces irrégularités dans les conditions du droit commun.
Ce mécanisme fiable ne saurait, je le souligne, dispenser les commissions administratives de procéder aux vérifications qui sont rendues nécessaires par la loi.
Ainsi en va-t-il de la nationalité. Si, comme je vous l'ai dit, les informations issues du recensement emportent preuve de la nationalité française, il n'en va pas de même des fichiers de l'assurance maladie. Il reviendra alors aux commissions administratives de convoquer les jeunes gens et les jeunes filles dont l'identification aura ainsi été enregistrée afin de se présenter en mairie pour justifier de leur nationalité. Ce sera particulièrement vrai dans les villes. Ce sera moins vrai dans les villages.
Cette convocation indispensable n'est en rien contraire au principe de l'inscription d'office : elle permettra à ces jeunes de connaître la possibilité d'inscription d'office qui leur est offerte, dès lors du moins qu'ils auront apporté la preuve de leur nationalité. Cette condition remplie, l'automaticité joue donc pleinement pour les jeunes inscrits à partir du fichier de l'assurance maladie.
Je veux dire enfin un mot de la période transitoire, celle qui concerne la révision en cours des listes électorales, révision ouverte depuis le 1er septembre dernier et qui se poursuit jusqu'au 31 décembre 1997.
L'inscription d'office des jeunes de dix-huit ans n'atteindra l'exhaustivité qu'au cours de l'année prochaine, c'est-à-dire au moment où les organismes de base de l'assurance maladie et la constitution du répertoire national interrégime d'assurance maladie fourniront à l'INSEE des informations complètes. Vous comprenez parfaitement qu'à la date du 23 septembre il soit impossible de garantir, dans les quelques semaines qui nous séparent de la clôture des listes électorales, l'exhaustivité de l'inscription d'office des jeunes.
Donc, pour cette période transitoire, je le dis à travers vous à tous les jeunes ayant atteint l'âge de dix-huit ans en 1997, et je vous prie d'être auprès d'eux mon porte-parole,...
M. Jean-Jacques Hyest. Inscrivez-vous !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. ... rendez-vous dans votre mairie, parce que cette année encore cette formalité est nécessaire. L'année prochaine elle ne le sera pratiquement plus, si ce n'est pour les contrôles d'usage. Mais, pour 1997, il faut encore une dernière fois accomplir cette démarche. J'espère que le message sera reçu.
Ce sera une précaution superfétatoire dans un an pour les jeunes inscrits d'office par le mécanisme que j'ai déjà décrit. Toutefois, ce sera une démarche nécessaire pour tous ceux dont l'état actuel de l'informatique ne permet pas de connaître l'identité et l'adresse. La France, mesdames, messieurs les sénateurs, est loin d'être un pays « fiché » comme on le décrit quelquefois à tort ! Nous le voyons bien aujourd'hui.
Nous devons cependant ouvrir dès à présent cette période transitoire. Pourquoi ? Parce que en votant cette loi le Parlement ouvrira dès à présent la voie au processus d'inscription d'office qui, en quelques mois, deviendra opératoire grâce à l'amélioration des données transmises à l'INSEE.
Ainsi, le recensement des jeunes filles qui sera organisé à compter du 1er janvier 1999 améliorera considérablement la fiabilité de l'ensemble des informations dont disposeront les commissions administratives.
J'ai bien noté que la commission des lois du Sénat estime dès lors qu'il conviendrait peut-être de différer l'inscription d'office à la date de généralisation du recensement.
Cependant, deux raisons me paraissent devoir y être opposées :
Tout d'abord, cette proposition reporterait l'effectivité de l'inscription d'office à l'an 2000, car je vous rappelle que le recensement complet des jeunes garçons et des jeunes filles commencera au 1er janvier 1999. Or, d'ores et déjà, un nombre important de jeunes gens en 1997, et la quasi-totalité en 1998, pourront bénéficier de l'inscription d'office. Pourquoi donc ne pas le faire ? Ouvrons dès aujourd'hui ce processus évolutif qui bénéficiera à plusieurs centaines de milliers de nouveaux électeurs.
Ensuite, en votant dès à présent ce projet de loi, vous ouvrirez pour les jeunes ayant atteint l'âge de majorité en 1997 un droit à l'inscription d'office qu'ils pourront faire valoir, même après la clôture de la liste et jusqu'au jour du scrutin, devant le juge d'instance.
Cette possibilité est le second argument que je souhaitais vous apporter. L'article L. 34 du code électoral vise ainsi « les personnes indûment omises des listes électorales par suite d'une erreur matérielle ». Nous ne verrons plus, ainsi, les scènes auxquelles nous avons pu assister récemment, à savoir des jeunes qui voulaient voter mais ne le pouvaient pas.
Le rattrapage de ceux qui ne figureront pas dans les informations transmises à l'INSEE sera donc possible. Une classe d'âge - dois-je vous le rappeler ? - représente 2 % des électeurs, soit environ 750 000 jeunes gens répartis sur tout le territoire. Il s'agit donc d'effectifs raisonnables et nous ne devons pas surestimer les charges liées à ce processus, ni au rattrapage possible jusqu'au jour du scrutin par décision du juge d'instance, sur le fondement du projet de loi que je vous invite à voter.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne veux pas nier les difficultés objectives qui se présentent sur notre chemin. Mais je les crois surmontables, et, surtout, j'ai le sentiment qu'elles se dissiperont avec le temps, et de manière rapide.
Il ne s'agit nullement d'une baguette magique pour éveiller le civisme chez les jeunes. Il faut pour cela, je l'ai maintes fois exprimé et je le répète aujourd'hui, inscrire dans l'esprit et dans le coeur des jeunes générations l'amour de la République, le sens de l'intérêt général, le respect de la loi, la connaissance de la citoyenneté, ensemble indissociable de droits et de devoirs, car elle fait de chaque citoyen un membre du souverain, la nation définie comme communauté de citoyens.
C'est d'abord l'affaire de l'école ; vous connaissez mon attachement à l'instruction civique. C'est là que se trouvent les clés d'un esprit civique retrouvé.
Mais que à tout le moins les formalités nécessaires à l'accomplissement de ce devoir soient rendues plus commodes : tel est l'objet de ce projet de loi qui répond au voeu exprimé depuis les horizons politiques les plus divers, mais que le Gouvernement, auquel j'appartiens, a voulu d'emblée faire entrer dans la réalité. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Bonnet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, mes chers collègues, face au projet de loi dont nous sommes saisis, je vous propose d'évoquer successivement son objectif, sa compatibilité avec les principes généraux de notre droit public, ses modalités, avant d'aborder, enfin, ses conséquences, qu'elles soient heureuses, neutres, ou qu'elles appellent une correction que proposera la commission.
J'évoquerai donc tout d'abord l'objectif. A coup sûr, il est louable. Ne s'agit-il pas de favoriser la participation des jeunes à la vie de la cité, de faciliter l'accession à la majorité civique d'environ 750 000 Français qui accèdent chaque année à la majorité civile ?
Aujourd'hui, l'inscription sur les listes électorales est, certes, obligatoire, mais - vous l'avez rappelé, monsieur le ministre - elle suppose une demande de l'intéressé, souvent alerté par sa mairie - vous le savez comme moi - même si la loi ne prévoit aucune sanction en cas d'inobservation de cette obligation.
Les études conduites par plusieurs organisations sérieuses, comme l'INSEE, le Centre national de la recherche scientifique ou le Centre d'études de la vie politique française, permettent de situer entre 5 et 10 % le phénomène de l'auto-exclusion civique dont l'origine est très diverse : la négligence, l'indifférence, l'hostilité, l'ignorance, singulièrement de la part de ceux que, depuis un livre de René Lenoir, on qualifie d'« exclus ». Monsieur le ministre, vous avez à très juste titre - et je sais à quel point vous êtes attaché à cette notion d'instruction civique - noté qu'il y avait aussi parmi ces causes l'évanescence de l'instruction civique que vous avez défendue lorsque vous étiez en poste rue de Grenelle.
Une telle procédure est-elle possible en droit ? Au regard du droit public, la réponse est « oui ». Avant la loi du 31 décembre 1975, la commission administrative pouvait déjà procéder à l'inscription d'office, mais cela pouvait entraîner le risque de double inscription, éventuellement frauduleuse, d'où les sanctions de 100 000 francs d'amende et d'un an d'emprisonnement qui avaient été prévues par le texte.
Quelle innovation apporte le projet de loi ? Seuls sont concernés les jeunes atteignant dix-huit ans. A ce propose, notre excellent collègue M. de Cuttoli a marqué qu'il ne concernait pas les Français établis hors de France. L'inscription s'effectuerait à partir de deux fichiers tenus pour fiables, et non à partir des informations dont dispose la commission administrative, tandis que seraient maintenues la procédure d'inscription sur demande pour les électeurs potentiels âgés de plus de dix-huit ans et la possibilité, ouverte par l'article L. 11 du code électoral, de s'inscrire au lieu de son domicile réel ou là où l'on figure depuis cinq ans sur les rôles de l'une des contributions locales directes, ou encore là où un fonctionnaire public est amené à résider obligatoirement, ou, enfin, au lieu de résidence qui est le sien depuis six mois.
Au regard du droit constitutionnel, il n'y a pas davantage d'obstacle. Il n'y a pas d'innovation dans les obligations, l'inscription étant réputée obligatoire et le vote ne l'étant toujours pas.
Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs décidé en 1991, à propos de la refonte des listes électorales en Corse, terre d'élection du contentieux électoral, que l'inscription sur une liste est susceptible d'affecter le lieu d'exercice du droit de vote, mais pas l'exercice de ce droit.
Le Conseil constitutionnel a également décidé que la loi pouvait traiter de manière différente des situations différentes, et ces différences entre les jeunes atteignant dix-huit ans et les autres adultes sont bien évidemment appelées à s'harmoniser au fil des années.
Venons-en maintenant aux modalités de l'inscription d'office telles que les prévoit le projet de loi.
J'aborderai d'abord l'identification. Elle devrait s'opérer à travers les deux fichiers tenus pour les plus fiables et dont la couverture est la plus large.
Le premier est celui de recensement, établi en application du code du service national. Ce fichier a l'inconvénient de ne pas intégrer les jeunes filles. Cet inconvénient sera bientôt gommé. En revanche, ce fichier présente un avantage majeur : il ne recèle aucune ambiguïté sur la nationalité. Ce fichier, vous l'avez rappelé à l'instant, monsieur le ministre, emporte preuve de la nationalité française.
Le second fichier est celui des organismes qui servent les prestations de base des régimes obligatoires de l'assurance maladie.
Le projet de loi prévoit que l'INSEE collecte, corrige en tant que de besoin et transmet aux commissions administratives ces renseignements, lesquelles doivent les détruire soit à l'expiration des délais de recours, soit, en cas de recours, lorsque la décision de justice est devenue définitive, toutes ces opérations s'effectuant bien évidemment dans le respect des règles relatives au traitement des informations telles qu'elles sont prévues par la loi de 1978.
Ceux qui s'apercevraient qu'ils n'auraient pas été inscrits, pour une raison indépendante de leur volonté, auront la possibilité d'invoquer l'article L. 34, auquel vous avez fait allusion, en mobilisant le juge d'instance, jusqu'au jour du scrutin.
J'en viens au lieu d'inscription. Vous en avez parlé vous-même en évoquant la notion de « domicile réel », étant observé que le domicile « sécurité sociale » ou « INSEE » peut être différent du domicile réel, lieu du principal établissement, avez-vous rappelé.
Après le temps de l'exposé vient celui du commentaire. Le projet de loi en son état actuel engendrerait deux types de conséquences qu'il convient de distinguer.
En premier lieu, il entraîne des effets ressortissant à la sociologie électorale. La commission des lois estime qu'il aboutira en effet à un gonflement arithmétique du taux des abstentions. Le désintérêt pour la chose publique étant souvent, hélas ! je le déplore avec vous, l'apanage de la jeunesse, tout laisse à penser que bien des non-inscrits d'aujourd'hui seront des abstentionnistes de demain.
Cet accroissement sera lui-même générateur de deux phénomènes : un nombre plus élevé de seconds tours du fait de l'exigence d'un seuil de 25 % des électeurs inscrits pour ceux-là mêmes qui auraient obtenu la majorité dès le premier tour et un relèvement en quelque sorte mécanique du nombre des voix requises pour pouvoir se maintenir au second tour. Vous connaissez comme moi le taux de 12,5 % des inscrits pour les élections législatives, et celui de 10 % des inscrits pour les élections cantonales.
Mais tout cela découle du principe même de l'inscription d'office que la commission n'entend pas remettre en cause. Aussi bien aucun amendement à l'article 1er n'est-il, en son sein ou hors son sein, proposé au suffrage de la Haute Assemblée.
Il en va tout différemment des dispositions prévues à l'article 2 pour l'application de ce principe. Satisfaisantes peut-être du point de vue de Sirius, elles ne le sont pas - mais alors, pas du tout ! - au regard des praticiens, qui les estiment inutilement complexes et dispendieuses, alors que vous les voulez - je reprends les termes mêmes dont vous vous êtes servi à l'instant, monsieur le ministre - « simples et transparentes ».
L'un des commissaires a d'ailleurs souligné qu'aucune étude comparative, aucune estimation financière n'avait été diligentée. L'étude d'impact ne peut faire autrement que de signaler l'augmentation des charges supportées par les mairies et les administrations publiques, augmentation des charges que vous m'avez paru, dans votre propos, minimiser quelque peu, monsieur le ministre.
En un temps où les maires, unanimes par-delà leurs légitimes convictions, se disent comme emportés par l'avalanche de textes législatifs et réglementaires dont la maîtrise est impossible et l'application tout autant, l'article 2 aboutirait à coup sûr à alourdir les tâches des commissions administratives et des services dans les agglomérations de quelque importance.
« Pitié pour les maires ! », s'écriait récemment M. Jean-Louis Bianco, stigmatisant dans un article vengeur cette déferlante de textes à la rédaction desquels il a sans doute participé au sein d'un cabinet ou comme ministre de l'équipement avant d'en découvrir, une fois élu, toute la perversité.
Dans le cas présent, la commission s'est émue des difficultés auxquelles allaient devoir faire face, outre certaines administrations publiques, les élus et les fonctionnaires territoriaux, les membres des commissions administratives des villes n'ayant pas une connaissance des habitants telle que celle que peuvent avoir une bonne trentaine de milliers de communes, celles sans doute que vous avez qualifiées de villages à l'instant : Bobigny n'est pas Etriché, ni Chanteloup-les-Vignes, Cuxac-Cabardès.
Considérant que les fichiers de sécurité sociale sont à la fois lacunaires - les ayants droit n'y figurent pas toujours, comme vous l'avez noté, monsieur le ministre - et redondants - l'INSEE n'estime-t-il pas à quelque 20 % les doublons qu'il conviendrait dès lors de supprimer ? - considérant qu'ils ne portent pas de mention de nationalité, considérant dès lors que les vérifications entraîneraient en aval les démarches et les contrôles que l'on a précisément voulu écarter en amont, la commission vous proposera, mes chers collègues, de supprimer à l'article 2 toute référence aux fichiers des organismes servant les prestations de base des régimes obligatoires d'assurance maladie et de se fonder, pour la mise en oeuvre de l'inscription d'office, sur le seul fichier de recensement établi en application du code du service national, fichier qui ne peut couvrir, comme je l'ai déjà mentionné après vous, monsieur le ministre, que les seuls nationaux.
Un second amendement vous sera proposé aux termes duquel les dispositions emportant inscription d'office sur les listes électorales n'entreront en vigueur « qu'à compter du jour où les nationaux des deux sexes seront soumis à l'obligation de recensement en application du code du service national ».
L'Assemblée nationale ayant hier soir, par un heureux concours de circonstances, retenu la date toute proche du 1er janvier 1999 pour l'entrée en vigueur de cette disposition, la commission s'en est trouvée confortée ce matin dans sa résolution.
Approuvant le geste en direction des jeunes initié en mars dernier par M. le Président de la République et aujourd'hui accompli par le Gouvernement, la commission vous proposera donc, mes chers collègues, d'alléger sa mise en oeuvre pour ne pas risquer d'en gommer, par des difficultés d'application, les effets positifs recherchés par ses auteurs. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 30 minutes ;
Groupe socialiste, 25 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 21 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 17 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 9 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 7 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément ».
« La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. »
Consacrée par les articles III et VI de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la notion de citoyenneté s'est affirmée dès le début de la Révolution française, en même temps que le principe de l'Etat-nation.
La nation est constituée à partir de la volonté populaire d'appartenir à la même communauté politique. C'est en elle que réside le principe de toute souveraineté, et c'est d'elle qu'émane toute autorité politique légitime.
Mettant un terme aux longs débats qui agitèrent le XIXe siècle et une partie du XXe siècle entre souveraineté nationale et souveraineté populaire, les constituants de 1946 ont consacré le principe selon lequel « la souveraineté nationale appartient au peuple français ». Et l'article 3 de la Constitution de 1958 ajoute que celui-ci « l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum ».
Dès lors, le corps électoral occupe une place essentielle dans le fonctionnement des institutions politiques.
Il constitue le premier des organes de l'Etat, puisque sa volonté est décisive et que, par l'élection, tous les autres organes émanent de lui directement ou indirectement.
En outre, il dispose du pouvoir de les contrôler par ses représentants et de celui de trancher les conflits qui peuvent s'élever entre les pouvoirs constitués. Il est, selon l'expression du professeur Burdeau, « l'agent d'exercice par excellence de la souveraineté nationale ».
Cependant, l'assimilation du corps électoral à la nation n'est jamais complète. Elle comporte des restrictions de droit et de fait.
Les restrictions de droit résultent des conditions mises à l'attribution de la qualité d'électeur, conditions qui doivent être posées par la loi.
Le droit de vote figurant au premier rang des libertés publiques, la compétence législative pour en régler l'exercice s'impose.
D'ailleurs, dans sa décision du 18 novembre 1982 relative à la loi modifiant le régime électoral des conseils municipaux, le Conseil constitutionnel a posé comme règle que les conditions et restrictions imposées au droit de vote dans tout suffrage de caractère politique ne peuvent se fonder que sur des critères objectifs : « La qualité de citoyen assure le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu. »
Par conséquent, en l'état actuel de la législation, les conditions mises à la jouissance du droit de vote sont de deux types : les conditions liées à la personne et une condition de forme, à savoir l'inscription sur les listes électorales.
Les conditions liées à la personne sont des conditions d'âge, de capacité et de nationalité, traditionnelles en droit français. Il n'y a donc pas lieu de s'y appesantir, sauf à faire deux observations qui me paraissent importantes pour la suite de notre débat.
Tout d'abord si le droit de vote ne peut être attribué qu'à ceux qui ont le discernement nécessaire pour l'exercer - c'est la capacité - il s'agit aussi d'un honneur qui se mérite, de sorte que les personnes ayant subi certaines condamnations doivent en être privées.
Par ailleurs, la condition de nationalité matérialise le lien qui existe entre le vote et la citoyenneté, considération à ne pas négliger pour le contrôle du dispositif qui nous est proposé.
Quant à la condition de forme requise pour jouir du droit de vote, il s'agit de l'inscription sur les listes électorales. Il n'est en effet possible d'exercer le droit de vote que si l'on est inscrit sur la liste électorale tenue dans une commune.
La question qui nous occupe aujourd'hui est celle du mécanisme d'inscription sur les listes électorales que vous entendez modifier par ce projet de loi, monsieur le ministre.
Encore faut-il rappeler qu'en vertu de l'article L. 9, alinéa 1er, du code électoral l'inscription sur les listes électorales est obligatoire. Certes, cette formule est une fausse précision. Il va de soi que la commission est tenue d'inscrire sur la liste électorale les personnes qui en ont formulé la demande et en remplissent les conditions, et qu'elle commettrait une illégalité en ne le faisant pas.
Mais, jusqu'à présent, cette inscription demeure subordonnée à la demande de l'électeur et ne saurait avoir lieu d'office, comme l'ont affirmé tant le Conseil d'Etat que la deuxième chambre civile de la Cour de cassation.
Dans ces conditions, autant dire que l'inscription ne constitue nullement une obligation pour l'électeur et que la formule de l'article L. 9 du code électoral revêt à son égard un caractère purement moral.
C'est pourquoi, partageant le souhait exprimé le 10 mars dernier par le Président de la République de trouver les moyens permettant que les jeunes « se sentent un peu plus concernés par la vie de la cité », le Gouvernement a déposé ce projet de loi. Celui-ci tend à permettre l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales, en vue - ai-je pu lire - de « faire participer les jeunes, en particulier les jeunes des quartiers, à la vie démocratique ».
Cet objectif me conduit à formuler trois remarques.
Tout d'abord, il s'agit de substituer une logique administrative, que recouvre l'inscription automatique, à un acte de volonté.
Comment ne pas y voir une sorte d'inversion des responsabilités, la responsabilité collective prenant le pas sur l'initiative individuelle ?
A cet égard, je partage pleinement les observations que M. le rapporteur, notre excellent collègue Christian Bonnet, a formulées.
M. Emmanuel Hamel. Plus qu'excellent... Exceptionnel ! (Sourires.)
M. Bernard Plasait. J'en conviens !
Puisse cela ne pas présager d'éventuelles modifications dans le domaine de l'acquisition de la nationalité, comme on a pu l'entendre ici ou là !
Certes, on estime le phénomène de la non-inscription à environ 10 % de l'ensemble de la population en âge de voter, M. Philippe Ardant citant, dans un article récent, le taux de 7,3 % du corps électoral potentiel en 1995, soit, tout de même, près de trois millions de citoyens !
Sans entrer dans une querelle de chiffres, je reconnais qu'un tel comportement est la manifestation du peu d'intérêt que portent un certain nombre de membres de la communauté nationale à cette forme de participation, pourtant essentielle, à la vie politique.
Et, s'il s'agit bien souvent d'une négligence ou d'une mauvaise information sur les démarches à effectuer, cela peut aussi relever d'un choix délibéré, celui de ne pas participer à la vie démocratique. Ce choix, il ne faut certes pas l'encourager, mais il existe : c'est une faculté de refus, un espace de liberté, qui est à la fois une conséquence mais aussi une condition de cette liberté.
Ensuite, comment ne pas s'interroger sur les inéluctables incidences d'une telle automaticité ? En effet, l'inscription d'office sur les listes électorales comporte deux conséquences logiques. D'une part, comme l'a très justement relevé le président de la commission des lois, M. Jacques Larché, elle ne manquera pas de relancer le débat sur la reconnaissance du vote blanc. D'autre part, elle conduira à poser, à plus ou moins brève échéance, la question du vote obligatoire.
Ces deux points me paraissent d'une grande importance car, par ce texte, monsieur le ministre, vous ouvrez une boîte de Pandore : au sein de l'Union européenne, notre pays ne pourra rester longtemps insensible à l'exemple de ses partenaires qui, tels l'Espagne, le Luxembourg ou la Belgique, ont rendu le vote obligatoire ; sans parler de l'Italie, où le vote n'est pas obligatoire mais où l'abstention est inscrite en mairie, ce qui expose l'électeur qui n'a pas voté un certain nombre de fois à la déchéance de son droit de vote.
La Grèce a, quant à elle, opté pour des représailles « administratives », la délivrance d'un passeport étant, par exemple, subordonnée à la présentation de la carte d'électeur, sur laquelle est mentionnée la date du dernier vote. L'abstentionniste risque d'essuyer un refus s'il ne peut se justifier, ce qui rend évidemment le système très dissuasif.
Cette idée de rendre le vote obligatoire en France fait aujourd'hui son chemin, puisque chacun d'entre nous, mes chers collègues, a été récemment destinataire d'un document émanant d'un comité national qui en fait une ardente promotion.
Partant du constat, au demeurant facile à établir, que le premier parti de France est devenu celui des abstentionnistes, ce comité voit, entre autres avantages, au vote obligatoire celui « que l'on puisse voter "blanc" si l'on ne peut vraiment pas choisir, mais que ces "blancs" seront, au besoin, inclus dans le décompte des bulletins ».
Il n'est, dès lors, plus possible d'en douter, reconnaissance du vote blanc et vote obligatoire sont intimement liés.
Enfin, troisième observation, inscrire d'office de nouveaux électeurs ne garantit pas une participation électorale sensiblement plus élevée. Bien au contraire, on peut craindre qu'en la matière le remède ne soit pire que le mal.
Vous ne nous avez pas démontré, monsieur le ministre, comment et pourquoi les « électeurs non inscrits » d'aujourd'hui ne viendront pas grossir les bataillons des « abstentionnistes » de demain.
Nous savons bien que, lorsque des candidats sont élus avec un fort taux d'abstention, d'autres affectent rapidement de mettre en doute leur légitimité. Il y a là un danger.
Pis, on ne peut que prévoir un accroissement mécanique du nombre de seconds tours dans des circonscriptions où un candidat aurait pourtant obtenu, dès le premier tour, la majorité des suffrages exprimés.
Outre ces appréciations sur les objectifs mêmes du texte, il importe de bien mesurer les difficultés juridiques et pratiques que celui-ci ne manquera pas de poser.
En premier lieu, apparaît de toute évidence la question des sources d'information permettant l'identification des jeunes gens sur le point d'atteindre leur majorité. Mais je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit tout à l'heure à ce sujet par M. le rapporteur.
En second lieu, il me paraît tout aussi nécessaire de porter une particulière attention aux indispensables vérifications, tant en ce qui concerne le lieu de l'inscription d'office que les conditions requises pour être électeur.
Enfin, je ne peux que partager les craintes qui ont déjà été exprimées par les précédents orateurs quant aux risques de voir la responsabilité des maires encore engagée, alors qu'ils agissent en qualité de représentants de l'Etat.
Aussi, je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si vous pouvez, étant donné que l'étude d'impact est fort discrète sur ce point, nous apporter quelques précisions sur le coût financier de ce dispositif, sauf à envisager un nouvel accroissement des charges des services municipaux.
Pour ma part, je suivrai les avis éclairés - car nourris par l'expérience - de notre éminent collègue M. Christian Bonnet.
Mais ce ne sera pas sans avoir répété ma très profonde conviction. Oui, il faut s'attacher à ce que les jeunes gens se sentent plus concernés par la vie de la cité, mais il est tout aussi nécessaire de prendre garde à ce qu'un jeune Français ne devienne pas citoyen sans le savoir : ce serait un péché grave contre l'idée que nous avons de la nation, du rôle du citoyen et de la démocratie.
Dans Notre Jeunesse , Charles Péguy écrivait : « Des hommes ont vécu sans nombre, héroïquement, saintement, des hommes ont souffert, des hommes sont morts, tout un peuple a vécu pour que le dernier des imbéciles ait le droit d'accomplir cette formalité truquée. Ce fut un terrible, un laborieux, un redoutable enfantement. Ce ne fut pas toujours du dernier grotesque... Les élections sont dérisoires. Mais il y a élection. » Et c'est parce que l'élection est la clé de la démocratie que devenir citoyen électeur ne peut être une formalité banale et purement administrative. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me suis interrogé sur la justification du dépôt d'un tel projet de loi. Certes, une promesse en ce sens figurait effectivement dans la déclaration de politique générale présentée le 19 juin dernier par M. le Premier ministre, et M. le Président de la République avait lui aussi évoqué cette éventualité précédemment.
En guise d'explication, il nous a été indiqué que de nombreux jeunes n'avaient pu participer aux élections législatives consécutives à la dissolution. Force m'est cependant de vous faire observer que ce texte ne résoudra rien du tout puisqu'en tout état de cause la clôture des listes électorales interviendra le 31 décembre et que, quelle que soit l'organisation choisie, ceux qui auront atteint l'âge de dix-huit ans et qui voudront voter entre la clôture des listes électorales et la date de l'élection devront utiliser la procédure habituelle, en faisant intervenir le juge d'instance. Comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le ministre, cette procédure a en effet toujours existé : les jeunes qui ont atteint l'âge de dix-huit ans depuis le 31 décembre et qui veulent participer aux élections, que celles-ci soient prévues à l'avance ou qu'elles soient consécutives à une dissolution, doivent saisir le juge pour être inscrits sur les listes électorales.
Faut-il alors déduire du dépôt de ce texte - mais cela deviendrait, dans ce cas, extrêmement compliqué ! - que les commissions administratives devraient siéger en permanence et inscrire les jeunes au fur et à mesure qu'ils atteignent l'âge de dix-huit ans ? Ce serait tout à fait impossible et parfaitement contraire à nos habitudes et au droit actuel !
Ce n'est donc pas pour cette raison que l'on prévoit l'inscription d'office des jeunes de dix-huit ans sur les listes électorales, mais parce qu'on estime que, dans la mesure où ils ne le font pas spontanément, il faut leur faciliter l'exercice de leur vie de citoyen. Permettez-moi cependant de vous dire que, à force de faciliter la vie des citoyens, je crois que l'on responsabilise de moins en moins les uns et les autres !
Quoi qu'il en soit, puisque la promesse avait été faite, il faut l'honorer. Je n'y suis d'ailleurs pas hostile en théorie, dans la mesure où, si le vote est un droit, c'est aussi un devoir. Pourquoi donc ne pas inscrire tout le monde d'office ?
La difficulté, cependant, c'est que l'on ne peut pas le faire aisément puisqu'on ne connaît pas le domicile de la plupart des intéressés. De plus - permettez-moi de faire référence à quelques notions de droit - vous parlez de domicile réel. Or, juridiquement, le domicile est le lieu du principal établissement. Il peut y avoir un domicile fiscal, un domicile de secours, voire beaucoup d'autres domiciles, mais, en droit, le domicile, c'est le lieu du principal établissement. Et l'on oublie aussi de dire que le code civil prévoit déjà que les citoyens, pour indiquer leur domicile, doivent à la fois signaler leur départ à la municipalité et faire connaître la commune dans laquelle ils élisent domicile. Si le domicile n'a pas été déclaré, c'est donc l'intention qui permet au juge de déterminer le domicile. Pour ces différentes raisons, j'aurais préféré que le texte vise le domicile tout court, et non le domicile « réel ». Cela aurait été beaucoup plus clair pour tout le monde.
Quoi qu'il en soit, même si l'on admet l'inscription automatique des jeunes de dix-huit ans, il faut savoir que leur recensement pose déjà des difficultés réelles : les garçons doivent se rendre à la mairie à l'âge de dix-sept ans pour être recensés, mais, la plupart du temps, ils ne savent pas qu'ils doivent remplir cette obligation. Les services de recrutement doivent donc retrouver les intéressés à partir du fichier de l'INSEE, où ne figure que le lieu de naissance. Et je ne parle ici que des jeunes garçons, qui ont des obligations en matière de service national ! Quant aux jeunes filles, à partir de 1999, si j'ai bien compris les travaux qu'a menés hier soir l'Assemblée nationale, elles seront elles aussi conduites à se faire recenser, mais on aura les mêmes difficultés pour les joindre !
Par conséquent, la proposition de M. le rapporteur me paraît faciliter le processus : tout le monde devant se faire recenser à dix-sept ans, l'année suivante, les jeunes seront inscrits automatiquement sur les listes électorales. La boucle est bouclée : on fait recenser les jeunes filles, ce qui n'était pas une obligation pour elles, et les garçons continuent à se faire recenser. On sait alors qu'ils sont français et, une année après, ils sont inscrits sur les listes électorales. Voilà un projet tout simple, j'en suis d'accord.
Cela étant, monsieur le ministre, vous ne nous avez pas proposé ce système et vous avez prôné, pour mettre en oeuvre le plus rapidement possible cette réforme, l'utilisation des fichiers de la sécurité sociale, fichiers qui, vous l'avez vous-même reconnu, ne sont pas parfaits.
Au demeurant, ces fichiers ne comportent pas d'indication sur la nationalité. Heureusement, d'ailleurs, car, s'agissant de sécurité sociale, il convient de ne pas se fonder sur ce critère, mais sur la seule qualité de cotisant. Ne donnons pas des idées à certains !
En outre, ces fichiers sont extrêmement divers : qu'en est-il, par exemple, du fichier de la mutualité sociale agricole, ou du fichier de la caisse autonome du Sénat ? Suffit-il de se référer aux ayants droit des sénateurs en matière de sécurité sociale pour recenser l'ensemble de leurs enfants dès lors qu'ils atteignent l'âge de dix-huit ans ? Et, comme il existe de nombreuses caisses autonomes, cela rend la tâche d'autant plus difficile.
Quoi qu'il en soit, je crois en conclusion que, si l'on veut rendre cette réforme pertinente et éviter quelle ne complique la tâche de l'administration, de l'INSEE ou des mairies, mieux vaut attendre le recensement. C'est ce que nous propose M. le rapporteur, et c'est le dispositif que mon groupe votera. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. de Cuttoli.
M. Charles de Cuttoli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est avec timidité que j'aborde ce débat : mon propos se limitera à un point qui, en termes arithmétiques, n'est pas le plus important, à savoir l'inscription sur les listes électorales des jeunes Français établis hors de France.
Ce point, qui a été évoqué par M. le rapporteur, figure non dans le projet de loi lui-même, mais dans son exposé des motifs. Je tiens toutefois à souligner devant le Sénat que c'est probablement la première fois - ou l'une des premières fois - qu'un projet de loi vise spécifiquement les Français de l'étranger. Il est vrai que, ne siégeant au Sénat que depuis vingt-quatre ans, je peux avoir des lacunes en la matière.
M. Emmanuel Hamel. Un quart de siècle !
M. Charles de Cuttoli. Je vous remercie donc de votre intention, monsieur le ministre, et je vous en félicite au nom des compatriotes que je représente.
L'exposé des motifs de ce projet de loi précise qu'il est impossible, dans l'immédiat, de prévoir l'inscription d'office des Français de l'étranger sur les listes électorales, en raison des particularités liées à cette inscription.
Tout d'abord, et c'est le premier point qui vient à l'esprit, parce qu'ils n'ont pas de domicile réel en France.
Ensuite, parce que plusieurs options leur sont offertes. Ils sont, certes, soumis aux dispositions de l'article 11 du code électoral, mais l'article 12 du même code leur permet de s'inscrire sur les listes électorales d'autres communes que celle de leur lieu de résidence, telles que la commune de leur lieu de naissance ou celle de leur dernier domicile.
Enfin, parce que à l'étranger, ils votent surtout par procuration dans les consulats.
Je tiens cependant à donner une précision. Il n'y a que deux occasions pour lesquelles on peut effectivement voter à l'étranger, où l'on peut avoir des listes électorales distinctes de celles des communes françaises. La première c'est l'élection du Conseil supérieur des Français de l'étranger ; mais cela n'entre pas tout à fait dans le cadre de ce projet pour l'excellente raison qu'en l'espèce la liste électorale pour les bureaux de vote n'est autre que la liste d'immatriculation établie - je l'ai rappelé - dans les ambassades et les consulats. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'inscrire obligatoirement puisque tel est le cas pour tout le monde, sauf refus d'inscription.
L'autre liste électorale, c'est la liste des centres de vote. Que sont les centres de vote ? Créés par une loi du 31 janvier 1976, dont j'avais l'honneur d'être le rapporteur à cette même tribune, ils ne fonctionnent, pour des raisons pratiques, que pour les grandes élections : celle du Président de la République, les référendums et les élections au Parlement européen. L'inscription sur les listes de ces centres de vote est d'ailleurs facultative.
Dans le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, s'agissant de l'inscription des jeunes Français de l'étranger, l'aveu a été fait dans l'exposé des motifs qu'en raison de ces particularités que j'ai rappelées tout à l'heure il était impossible de proposer dès maintenant une solution au Parlement, qu'on allait donc consulter.
Consulter qui ? Bien entendu, l'assemblée qui est toute désignée pour l'être en raison de son caractère largement représentatif, à savoir le Conseil supérieur des Français de l'étranger, assemblée importante, extrêmement sérieuse, travaillant beaucoup, élue au suffrage universel direct dans les ambassades et dans les consulats, et présidée de droit par le ministre des affaires étrangères. Elle offre donc toutes les garanties pour donner un avis pertinent.
Qu'a dit le Conseil supérieur des Français de l'étranger dans cet avis qui lui a été demandé par le Gouvernement et qu'il a rendu il y a quelques jours ? Si vous n'en avez pas eu connaissance, monsieur le rapporteur, je le tiens à votre disposition.
Le Conseil supérieur des Français à l'étranger ne peut évidemment pas demander l'inscription d'office sur les listes électorales des communes françaises ; il ne peut demander cette inscription d'office que sur les seules listes qui sont chez lui, celles qu'il connaît, c'est-à-dire celles des centres de vote à l'étranger. Mais il assortit cette demande de deux conditions.
Premièrement, ces jeunes Français de l'étranger qui pourraient être inscrits d'office sur les listes des centres de vote - listes facultatives, ce qui juridiquement peut encore poser un certain nombre de petits problèmes - pourraient être inscrits également sur le territoire métropolitain sur d'autres listes de vote, exactement comme, en France, on peut être inscrit non seulement sur la liste de la commune du domicile réel mais également sur d'autres listes, pour une option.
Deuxièmement - c'est un particularisme - le Conseil supérieur des Français de l'étranger a émis le voeu que le jeune âgé de dix-huit ans puisse refuser son inscription d'office sur la liste d'un centre de vote.
Pourquoi ce droit de refus ? Cela paraît à première vue peu républicain, peu démocratique, même si le vote n'est pas obligatoire, comme le souhaitent nombre de nos collègues.
La raison en est qu'à l'étranger les conditions sont particulières. Un certain nombre de Français de l'étranger sont des doubles nationaux. Ils ne veulent pas, pour toutes sortes de raisons, que cette double nationalité soit connue. Bien entendu, dans les pays européens, tout au moins ceux qui ne sont pas signataires de la convention du Conseil de l'Europe de Strasbourg de 1963 ou de la future convention sur la nationalité qui va être ratifiée le 7 novembre prochain, il n'y a guère de problèmes. En revanche, dans certains pays d'Amérique du Sud, d'Asie ou d'Afrique, on peut à l'évidence, vouloir éviter de faire connaître cette double nationalité, car il pourrait en résulter un certain nombre de désagréments, voire, dans certains cas, des risques extrêmement sérieux.
Or, ces listes électorales, contrairement à celles des fichiers d'immatriculation, sont publiques : elles sont affichées par les consulats ; les représentants des candidats ont le droit de s'en faire délivrer une photocopie. Voilà pourquoi il serait bon qu'il y ait cette possibilité de refus.
Alors, si le Gouvernement - je me permets d'attirer votre attention sur ce point, monsieur le ministre - décide de poursuivre son action en faveur des Français de l'étranger s'agissant de la garantie de leurs droits, conformément au souhait du Conseil supérieur des Français de l'étranger, c'est-à-dire de les inscrire d'office sur les listes des centres de vote, deux possibilités s'offrent à vous.
Premièrement, vous pouvez, bien entendu, déposer un projet de loi organique, car on ne peut, par un simple amendement, dans ce débat, amender un texte qui concerne des centres de vote liés à l'élection du Président de la République, elle-même régie par une loi organique.
Deuxièmement - je le dis un peu en souriant - vous pourriez peut-être plus simplement obtenir de l'Assemblée nationale l'examen - je suis persuadé que si cela lui était demandé M. le ministre des relations avec le Parlement se ferait un plaisir d'inscrire le texte à l'ordre du jour prioritaire - d'une proposition de loi présentée par l'ensemble des sénateurs des Français de l'étranger, dont j'ai été le rédacteur et le rapporteur, et qui a été votée par le Sénat le 13 juin 1996. Entre autres dispositions, cette proposition de loi prévoit non pas l'inscription d'office des jeunes Français à l'étranger, mais des facilités. En effet, pour un jeune Français de l'étranger perdu dans la brousse nigérienne, aller saisir le juge d'instance du premier arrondissement de Paris sans passer par le consulat pose évidemment un certain nombre de problèmes ! Je me permets donc de suggérer que l'Assemblée nationale amende ce texte, monsieur le ministre.
Je souhaite ne pas avoir abusé trop longtemps des instants du Sénat, que je remercie de son attention. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'idée est généreuse, l'intention est louable : tout ce qui peut favoriser l'éveil à la citoyenneté et son plein exercice doit être entrepris.
Mais ne nous voilons pas la face ! La faisabilité immédiate de cette intention est complexe sur les plans technique et administratif. Elle soulève, au-delà même du principe, bien d'autres questions que nous ne pouvons passer sous silence.
Le 10 mars dernier, lors d'un entretien télévisé, le Président de la République s'est ému de la faible participation des jeunes à la vie de la cité. Afin d'y remédier, il avait demandé au ministre de l'intérieur la mise à l'étude de la possibilité d'inscrire automatiquement sur les listes électorales les jeunes majeurs de dix-huit ans, qui auraient donc dû recevoir automatiquement leur carte électorale.
C'est le Président de la République, M. Jacques Chirac, qui a remis la participation des jeunes aux élections au devant de l'actualité en dissolvant, de manière impromptue, l'Assemblée nationale, privant de nombreux jeunes « oublieux » de l'exercice de leur droit de vote. Ces derniers ont été pris de vitesse : ils n'avaient pas l'âge de voter en 1995 et 1996, et ils ne pensaient pas voter, selon le calendrier électoral, avant 1998.
La loi, quant à elle, leur interdisait la participation aux dernières élections législatives, faute de ne pouvoir rouvrir à cette période l'inscription sur les listes électorales. Ces jeunes se sont sentis frustrés.
Dans sa déclaration de politique générale, soulignant la portée que représente la participation des jeunes à la vie démocratique, le Premier ministre, M. Lionel Jospin, a annoncé le dépôt d'un projet de loi relatif à l'inscription automatique de chaque citoyen sur les listes électorales l'année de sa majorité. C'est le respect d'un engagement pris devant la jeunesse de notre pays et la manifestation de l'intérêt que le Gouvernement lui accorde.
Sans engager une querelle d'antériorité, je me dois de rappeler qu'en 1995, pendant la campagne des élections présidentielles, le candidat Lionel Jospin avait pris l'engagement de cette inscription d'office des jeunes sur les listes électorales. Il l'a repris dans sa déclaration de politique générale, et je crois que, faisant écho à la demande de M. Président de la République, nous ne pouvons qu'être satisfaits de la prise en compte de ces engagements.
Il est notoire - nous le savons tous - que les jeunes n'apprécient guère l'accomplissement des tâches administratives dont l'aboutissement n'est jamais sûr. Si l'inscription à l'université ou la recherche d'un emploi leur paraissent indispensables, vitales, en est-il de même pour l'inscription sur les listes électorales, pourtant obligatoire ? La possession d'une carte d'électeur - c'est un fait ! - leur apparaît parfois accessoire au regard des difficultés quotidiennes qu'ils vivent. La confiance de certains jeunes dans les institutions s'est, hélas ! atténuée ; leur scepticisme grandit face à la difficulté, pour les pouvoirs publics, de résoudre leurs problèmes.
Les récentes études consacrées à cette catégorie de la population révèlent une réelle dégradation de la situation des jeunes, dont la précarité a nécessairement des conséquences sur les autres aspects de leur vie personnelle et sociale.
Il est essentiel de conforter le pacte républicain qu'évoquait le Premier ministre dans sa déclaration du 19 juin 1997. Toute mesure de nature à favoriser le renforcement du tissu social et la participation électorale ne peut être considérée qu'avec intérêt.
Louable dans son objectif, simple dans son principe, l'inscription d'office des jeunes majeurs n'est pas sans soulever un certain nombre de difficultés pratiques. Dans son excellent rapport, M. Bonnet a dressé une liste non exhaustive des problèmes que son application soulève. Je n'ai donc pas à les rappeler.
Cependant, je veux mettre l'accent sur le point suivant : la procédure d'inscription d'office ne garantit nullement une participation électorale plus élevée et risque même d'entraîner des effets pervers. Je fais miennes, par ailleurs, les remarques de notre rapporteur sur l'accroissement du nombre de seconds tours et sur les difficultés qu'auront bien des candidats pour se maintenir à ce second tour.
C'est pourquoi j'attire tout particulièrement votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessité d'accompagner le nouveau dispositif de campagnes d'information civique, afin de rappeler à chacun l'accomplissement de son devoir électoral. Connaissant votre conception de la République et de la citoyenneté, j'imagine que cette question vous « interpelle », comme l'on dit aujourd'hui. C'est peut-être aussi une chance, car vous êtes l'un des plus avertis pour veiller à ce que rien ne vienne dénaturer ces valeurs citoyenne et républicaine.
La nécessité de délivrer une pédagogie permanente pour une citoyenneté moderne et active est traitée fort justement dans l'excellent rapport sur Les nouvelles techniques d'information et de communication : de l'élève au citoyen de mon ami et de notre collègue Franck Sérusclat : « L'apprentissage de la citoyenneté nécessite un long parcours : il prend le départ dès les premières années de la scolarité. Il est d'une lente progressivité, les rôles des enseignants et des parents y sont souvent mêlés, au risque parfois de se contredire. Etre un citoyen est d'autant plus difficile que les capacités à acquérir sont diverses. Il ne suffit pas d'être inscrit le moment venu sur une liste électorale et de déposer un bulletin de vote dans l'urne, même si cet objectif est essentiel : le droit majeur de tout citoyen est le droit de vote. »
C'est la raison pour laquelle je vous demande instamment, monsieur le ministre, quels moyens le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour accompagner ce nouveau dispositif, faute de quoi ce projet de loi manquerait son objectif, à savoir faire des jeunes gens et des jeunes filles des citoyens actifs - j'insiste sur ce terme - prenant leur destin en mains.
Je rappelle que M. le Premier ministre indiquait dans sa déclaration de politique générale que « la mission d'instruction dévolue à l'école devait également comprendre l'apprentissage du civisme pour faire naître et vivre durablement un profond sentiment d'attachement aux valeurs républicaines au premier rang desquelles... l'adhésion à une citoyenneté active et responsable... ». A cet effet, il a demandé au ministre de l'éducation nationale de prendre des mesures pour que soient enseignées et pratiquées non seulement l'instruction civique, mais aussi la morale civique.
Une telle démarche est parfaitement cohérente avec celle qui est contenue dans le projet de loi portant la réforme du service national, en cours d'adoption, en ce qui concerne le rôle dévolu à l'éducation nationale. L'inscription d'office et l'objectif qui est fixé n'ont de sens que si les conditions d'éducation civique sont remplies.
Certes, des contradictions peuvent apparaître. M. Bonnet ne souligne-t-il pas dans son rapport écrit : « On pourrait trouver singulier de dispenser les jeunes majeurs d'une formalité "en amont" - la demande d'inscription - tout en les invitant "en aval", à déférer à de nouvelles procédures de contrôle. Le principe d'automaticité ayant guidé l'élaboration du projet de loi pourrait en paraître quelque peu contredit. »
La mise en place d'un nouveau fichier est toujours délicate, surtout lorsque les données sont extraites de fichiers établis à d'autres fins. L'informatique n'est pas infaillible, nous le savons, et c'est parce que nous sommes conscients des difficultés soulevées par ce texte que nous espérons qu'elles s'atténueront dans les meilleurs délais.
Dans l'immédiat, il serait utile que le Gouvernement lance une vaste campagne d'information et de sensibilisation, par tous moyens appropriés - et ils sont nombreux - en direction des jeunes et, plus largement, en direction de tous ceux qui n'ont pas encore rempli cette obligation. Pour que la conscience citoyenne soit toujours en éveil, l'inscription automatique doit être un complément de l'acte civique volontaire et non son substitut.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe socialiste approuve la démarche, l'intention affichée et la finalité de ce projet de loi. Derrière son apparente simplicité se cache en fait une multitude d'observations et de questions. Nous nous devions de les formuler.
Vous nous avez dit, monsieur le ministre, que toutes dispositions ont été ou seront prises pour que ce projet de loi entre en vigueur dès l'année 1998. Acceptons-en l'augure ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en rendant automatique l'inscription des jeunes gens atteignant leur majorité sur les listes électorales, ce texte vise à inciter les jeunes à exercer leur droit de vote et, par là même, à les impliquer davantage dans la vie politique. Nous n'avons pas la naïveté de penser que cette simple mesure suffira à atteindre cet objectif, mais cette décision est très positive et propre à lever certains obstacles.
La faible participation des jeunes aux récents scrutins est un sérieux problème pour le fonctionnement de nos institutions. L'édifice républicain en est affaibli et c'est un défi à relever pour les responsables politiques de tous bords.
Si, au fil des ans, 8 % à 10 % des électeurs français potentiels ne sont pas inscrits sur les listes électorales, ce taux est de 15 % à 20 % chez les dix-huit - vingt-cinq ans et de 25 % chez les seuls dix-huit ans.
Si la situation des jeunes est évidemment diverse, il y a quelques grands points communs. Les frustrations et les angoisses face à une hypothétique insertion dans la société, la précarité qui est devenue une norme, l'éreintant parcours pour arracher des diplômes qui ne sont plus les passeports de naguère nourrissent l'incertitude du lendemain et se prêtent mal aux projections citoyennes.
Mais on sait que les jeunes sont plus nombreux à s'inscrire sur les listes lorsque des échéances électorales fortes suivent.
Lequel d'entre nous n'a pas rencontré des jeunes gens désolés d'être privés de la possibilité de voter en juin dernier, et se plaignant d'avoir été surpris par l'anticipation de l'échéance ? Quelque 800 000 jeunes gens nés entre juin 1977 et mars 1979 n'étaient pas inscrits et n'ont pu participer aux scrutins de mai et juin derniers. Inscrits, auraient-ils pour autant voté ? Le doute est permis pour un nombre non négligeable d'entre eux, mais la proportion de jeunes aurait été à coup sûr beaucoup plus importante.
Pour autant, faut-il faire la moue devant l'inscription automatique et regretter que cette dernière ne résulte pas d'un acte volontaire ?
Ces réactions sont à mes yeux très discutables. Une distinction s'impose entre le peu d'empressement - c'est un euphémisme - à aller s'inscrire à la mairie de son domicile et l'intérêt porté par les jeunes aux grands choix de société, voire à leur traduction électorale. Pour les jeunes, l'acte citoyen se vit dans la quotidienneté. Tout n'est pas chez eux que légèreté ou imprévoyance. Il faut prendre garde aux propos trop moralisateurs. Je ne connais pas de grands rassemblements de jeunes où chacun ait décidé d'y participer longtemps à l'avance. N'y a-t-il pas des engouements de dernière heure propre à cette catégorie d'âge ?
N'est-ce pas beaucoup plus qu'hier le lot de nos sociétés et le rôle que les médias y tiennent ? Les événements exceptionnels, musicaux, religieux ou sportifs ne se contruisent-ils pas dans un présent et un concret fortement médiatisés ?
Ne demandons pas plus à l'engagement citoyen et politique que ce que les jeunes peuvent entendre. Les pratiques citoyennes ont été bousculées et ne se transmettent plus par tradition. Contribuons à les rebâtir plutôt qu'à les détruire. Nous sommes donc, comme vous le constatez, de fervents partisans de la mesure que nous allons très certainement adopter tout à l'heure.
En simplifiant la procédure, ce texte constitue donc une avancée de citoyenneté. La question du lien entre les jeunes et la politique n'en demeure pas moins sur le fond.
Au-delà du principe de l'inscription automatique des jeunes sur les listes électorales, le problème à résoudre n'est pas d'abord chez les jeunes, mais il est dans le contenu des politiques qu'on leur propose, dans la confiance qu'on leur porte, dans le respect de leurs aspirations.
En effet, que signifie la citoyenneté pour ceux qui n'ont pas d'horizon, qui sont sans emploi et sans reconnaissance sociale ?
Les jeunes connaissent les expériences vécues par leurs aînés. Ils ressentent l'amertume de ces dernières années et déplorent l'impuissance des politiques antérieures à faire bouger une situation dans le sens de leurs intérêts.
S'il est vrai que, pour la plupart d'entre eux, la politique est synonyme de discrédit, ils éprouvent néanmoins une réelle attente, une demande de politique qui se fait autrement.
L'INSEE a publié lundi matin une étude intitulée Les intermittences du vote, qui dresse un bilan de la participation de 1995 à 1997. Elle fait apparaître que, si la participation des jeunes inscrits atteint d'emblée une valeur élevée, l'ardeur du néophyte cède vite la place au désenchantement.
La consultation nationale des jeunes en 1994 a montré leur volonté affichée d'être associés aux décisions.
Comme le notait le sociologue Michel Fize : « Les jeunes de France ... veulent être écoutés, conseillés, soutenus dans leurs initiatives, aidés dans la réalisation de leurs projets. Ils défendent plus qu'on ne croit les valeurs républicaines de liberté, d'égalité et de fraternité. Ils sont sensibles aux grandes causes humanitaires, s'indignent des préjugés raciaux, de la montée des intolérances. »
Monsieur le ministre, au-delà du projet de loi d'aujourd'hui, nous entendons le message du Gouvernement, comme un engagement fort à ne pas décevoir la jeunesse.
J'ajoute à cette opinion générale sur le projet de loi quelques remarques complémentaires.
Je tiens à souligner ici les différences supplémentaires qui résulteront de l'inscription automatique des jeunes de nationalité française, alors que les jeunes nés de parents étrangers devront, en l'état actuel de la législation sur la nationalité, manifester leur volonté d'être français à l'âge de dix-huit ans et se trouveront, une nouvelle fois, en décalage avec leurs camarades d'études ou de quartier.
C'est un sérieux problème à prendre en considération lors des futurs débats sur le code de la nationalité.
Nous pensons, par ailleurs, monsieur le ministre - ce n'est certes pas l'objet du texte, mais quelques engagements forts peuvent être pris à l'occasion de sa discussion - que ce projet de loi a besoin d'être accompagné de grandes campagnes d'information en direction des jeunes bien avant qu'ils n'atteignent leur majorité.
Enfin, ce texte va entraîner indiscutablement des frais supplémentaires pour les collectivités locales. Cela suscite une certaine inquiétude chez les maires, qui voient là non seulement un accroissement de leur responsabilité, mais aussi un surcoût pour les services municipaux et les commissions administratives chargés d'effectuer les vérifications préalables nécessaires à toute inscription.
Comme M. le rapporteur de la commission des lois, j'estime que tout allégement de la mise en oeuvre de cette loi est le bienvenu, mais tout retard dans son application affaiblirait le signe fort que nous adressons à la jeunesse. Ce serait à mes yeux une erreur.
Ainsi, sous le bénéfice de ces observations, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, estimant que ces mesures peuvent contribuer à éveiller l'esprit civique chez les jeunes et à les faire pleinement participer à la vie de la cité, voteront pour ce projet de loi qui répond à une réelle attente. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 72 % au Blanc-Mesnil, 73 % à Châteauroux, 74 % à Mulhouse et 75 % à Epinay-sur-Seine, tels furent certains des taux d'abstention enregistrés aux élections cantonales partielles qui se sont tenues en fin de semaine dernière.
S'il était jusqu'alors constant que l'intérêt pour la chose politique accusait un net recul, c'est sa totale disparition que nous pouvons aujourd'hui déplorer.
Monsieur le ministre, dans la commune d'Epinay-sur-Seine, ce sont 22 131 personnes qui, un jour, ont fait la démarche de s'inscrire sur les listes électorales. Pourtant, sur ce nombre, seuls 5 441 électeurs se sont rendus dimanche aux urnes. Comment attendre de ceux qui, en infraction à l'article L. 9 du code électoral, n'ont pas souhaité s'inscrire sur les listes électorales, qu'une fois inscrits d'office ils participent aux élections ?
Puisque je viens d'évoquer l'article L. 9, je relève avec étonnement que sa modification n'est pas envisagée dans le projet de loi. Avouez, mes chers collègues, que la rédaction du futur code électoral sera pour le moins paradoxale. Un article L. 11-1 nouveau rendra l'inscription sur les listes électorales automatique, tandis que l'article L. 9 continuera d'affirmer son caractère obligatoire. Mon collègue M. Bernard Plasait s'est d'ailleurs exprimé sur ce sujet.
Mes chers collègues, voter est certes un droit, mais c'est également un devoir. S'inscrire sur les listes électorales constitue une démarche positive qui, pour celui qui y procède, exprime l'adhésion à l'engagement démocratique de notre société.
A contrario , le fait de ne pas agir de la sorte, s'il ne reflète pas nécessairement un « antidémocratisme », traduit néanmoins un profond désintérêt pour la citoyenneté.
Pour ma part, je réfute vivement les arguments tendant à faire reconnaître le manque d'information comme l'une des causes de non-inscription sur les listes électorales. Quelles que soient les conditions de vie des jeunes majeurs, leur niveau d'études ou leur milieu socioculturel, tous connaissent parfaitement les prérogatives liées à la majorité, à commencer par le permis de conduire.
S'il ne s'agissait que d'un manque d'information, il serait alors simple et efficace de mener une campagne de publicité qui saurait parer à cette carence.
La principale cause du phénomène que nous cherchons à combattre est la négligence. Je crains, à l'instar de notre collègue Jean-Paul Delevoye, que l'inscription automatique ne soit en fait la marque d'une « déresponsabilisation collective » des citoyens.
Je ne suis pas opposé à l'inscription automatique sur les listes électorales. Toutefois, je n'y suis favorable que si elle s'accompagne de l'obligation de participer au scrutin, sans quoi elle aura seulement pour effet d'accroître l'abstention.
Par ailleurs, chacun sait que la baisse des taux d'inscription et de participation est liée à un désintérêt pour la classe politique. Par souci d'honnêteté, il est indispensable de prendre en compte ce phénomène dans le résultat des élections et c'est pourquoi je suis convaincu qu'il convient d'intégrer les votes blancs parmi les suffrages exprimés.
Enfin, si l'on veut redresser le taux de participation électorale, il faut s'en donner tous les moyens, notamment en facilitant le vote par procuration.
J'aurai l'occasion d'évoquer plus longuement ces sujets en défendant les amendements que j'ai déposés et qui tendent à rendre le vote obligatoire, à valider les bulletins blancs et à faciliter le vote par procuration.
La majorité de mes collègues du groupe du Rassemblement démocratique et social européen votera ce texte. J'attendrai pour ma part que mes amendements soient discutés avant de faire connaître ma position (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Monsieur le président, monsieur le minisre, mes chers collègues, les Français de l'étranger veulent être des citoyens à part entière. Aussi ont-ils souhaité de tout temps participer, malgré leur éloignement, aux consultations électorales en France.
A cet égard, la décision la plus importante a été celle qui leur a permis de voter dans les consulats et dans les ambassades pour les élections du Président de la République. C'est la loi organique du 31 janvier 1976. Vous faisiez d'ailleurs partie, monsieur le rapporteur, du gouvernement qui a permis cette remarquable avancée.
Voilà donc plus de vingt ans que nos compatriotes de l'extérieur peuvent exercer le droit de voter au loin, dans leur pays de résidence. Mais, en même temps, pour ce qui concerne les élections municipales, cantonales et les législatives, ils votent d'une autre façon, directement en France, en s'inscrivant sur les listes de leur commune de naissance ou de rattachement et en exerçant leur droit de vote par procuration.
Nous abordons ici une première difficulté. Pour l'assimilation complète des Français de l'étranger à ceux de France, on parle d'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales. Pour nos compatriotes de l'extérieur, de quelle liste s'agit-il ? Celle de France ? Celle de l'étranger ? Les deux à la fois ? On pense surtout, bien sûr, aux listes constituées à l'étranger.
Le Gouvernement a bien vu cette difficulté. Dans l'exposé des motifs du projet de loi, il a tenu à signaler que : « la situation particulière des Français établis hors de France n'est, pour l'instant, pas couverte par le dispositif, car cette question a paru soulever des problèmes de nature juridique et d'ordre matériel ».
Cela est évident, notre rapporteur, M. Christian Bonnet, l'a signalé tant à la tribune tout à l'heure que dans son rapport écrit.
Lors de l'examen de ce texte à la commission des lois et, il y a un instant, à cette tribune, notre excellent collègue Charles de Cuttoli soulignait que « le projet de loi n'avait pu inclure le cas des Français de l'étranger en raison des conditions particulières de leur inscription ». Il ajoutait qu'il jugeait « impossible de leur appliquer telles quelles les dispositions du projet de loi du fait de la spécificité des règles régissant le vote des Français résidant hors de France, certaines relevant du domaine de la loi organique ».
M. de Cuttoli est un expert en la matière. Il a lui-même rappelé - je ne révèle donc pas un secret - qu'il siège au Sénat et à la commission des lois depuis 1974. Depuis cette date, il a toujours été rapporteur des questions juridiques concernant les Français de l'étranger. Non seulement il en a été le rapporteur, mais il a également été l'initiateur de plusieurs autres textes, notamment de propositions de loi sur ce sujet.
Il faut rappeler à cet égard la dernière en date : notre proposition de loi votée ici même, le 13 juin 1996.
M. Charles de Cuttoli. Vous êtes donc un autre expert !
M. Jacques Habert. Sans doute ! (Sourires.)
Cette proposition de loi a été cosignée par tous les sénateurs des Français établis hors de France, mais elle n'a jamais été examinée en séance à l'Assemblée nationale. C'est peut-être la première chose à faire, monsieur le ministre, pour aller plus loin dans la voie indiquée par le Gouvernement.
Pourquoi ne soumettez-vous pas au vote de l'Assemblée nationale cette proposition de loi ? Cela réglerait déjà bien des questions. De surcroît, cela peut être fait immédiatement, contrairement au projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Mais revenons à ce projet. L'exposé des motifs, qui est d'une grande clarté, se poursuit ainsi : « Compte tenu de ces difficultés, le Gouvernement a donc décidé de saisir le Conseil supérieur des Français de l'étranger, qui examinera cette question lors de sa prochaine session plénière afin que puisse être, le cas échéant, amendé le présent projet de loi, voire envisagé un texte organique pour ce qui concerne l'élection du Président de la République. »
Je dois dire, mes chers collègues, que cela a été fait avec une remarquable dextérité. En effet, le projet de loi a été déposé ici, à la présidence du Sénat, le 28 août 1997. Le même jour, le Gouvernement adressait ce texte au ministre des affaires étrangères, président du Conseil supérieur des Français de l'étranger, en demandant qu'il soit immédiatement étudié par le conseil, convoqué le 1er septembre pour sa 50e session plénière.
Efficacité notable, dont je félicite tous les artisans, nous avons pu, au conseil, nous saisir immédiatement de ce texte. Dès le lendemain, la commission des droits, présidée par Mme Gabrielle Théry-Monseu, avocate d'une grande distinction qui réside à Bruxelles, examinait ce projet de loi.
Très vite, la commission découvrait l'intérêt de ce texte et les possibilités qu'il offrait. En même temps, elle en discernait toutes les difficultés et certains inconvénients.
Cependant, il est évident que l'inscription d'office des jeunes âgés de dix-huit ans présenterait à l'étranger des avantages certains. Vous connaissez la dispersion de nos compatriotes : certains se trouvent à 1 000 kilomètres, voire 2 000 kilomètres du consulat le plus proche. Par conséquent, l'automaticité d'inscription serait un excellent moyen de détendre et de resserrer la communauté française en montrant immédiatement à nos compatriotes qu'ils ont le droit de vote.
Dans certains pays européens, en Grande-Bretagne par exemple, lorsqu'un étudiant âgé de plus de dix-huit ans, qu'il soit Français ou originaire d'un autre pays européen, arrive là-bas, il est informé qu'il peut immédiatement voter lors des élections municipales de la ville où se trouve son collège ou son établissement.
Certains élargissements pourraient donc être envisagés à cet égard, mais, évidemment, le problème est différent. Cependant, des solutions pourraient être trouvées sur le plan européen.
En même temps, ce texte présenterait des inconvénients qui ont été énumérés par M. de Cuttoli et sur lesquels je ne reviendrai pas. Je pense, par exemple, au problème de la double nationalité.
Oui, les difficultés existent. La démarche du Gouvernement était donc justifiée, il fallait être prudent en la matière. Toutes les dispositions nouvelles doivent être examinées de près.
Cependant, désireuse d'offrir aux jeunes Français de l'étranger toutes les facilités possibles pour voter, la commission des droits du Conseil supérieur des Français de l'étranger a décidé de proposer un voeu, qui a été voté à l'unanimité le 4 septembre 1997, c'est-à-dire à peine une semaine après la transmission du texte. Ce voeu demande « que le projet de loi soit amendé en vue de l'étendre aux jeunes Français établis hors de France en les inscrivant d'office, après une information préalable, sur la liste du centre consulaire dont ils dépendent, sans préjudice de leur faculté de s'inscrire dans une commune en France ou de refuser leur inscription. »
Notons que les trois options possibles ont été énumérées, ce qui montre la complication, la complexité de cette situation. Néanmoins, le souhait de nos compatriotes français à l'étranger n'en est pas moins clairement exprimé.
Sur le fond, tout le monde est d'accord : il faut faire le maximum pour permettre l'inscription de tous les jeunes de dix-huit ans sur les listes électorales. Mais pour le moment, il semble sage de ne retenir de ce voeu - malgré tout notre désir de le satisfaire aussi vite que possible - que la phrase qui suggère une « information préalable ».
C'est la route que nous devons suivre, en accord avec le Gouvernement, et par une concertation avec la commission des lois du Sénat et les experts de la direction des Français à l'étranger du ministère des affaires étrangères dont plusieurs, que je salue, assistent d'ailleurs à cette séance.
Voilà donc ce qui va être fait. Nous devrions, dès les informations réunies, trouver rapidement un texte convenable. Car, pour nous, le but est clair : il faut que toutes les facilités soient données aux jeunes Français de l'étranger pour qu'ils puissent, dès l'âge de dix-huit ans, comme tous ceux de France, être inscrits sur les listes électorales, afin de participer comme eux à la vie et à l'avenir de la nation.
Tel est bien l'esprit de ce projet de loi. C'est la raison pour laquelle, pour ce qui me concerne et au nom du groupe que je représente, je voterai ce texte, amendé sans doute par certaines des propositions que va nous faire à juste titre notre commission des lois, et en attendant les autres amendements qu'espèrent les Français à l'étranger. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Charles de Cuttoli. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Cerisier-ben Guiga.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà un troisième sénateur des Français de l'étranger qui prend la parole sur ce texte. Ce n'est pas tout à fait un hasard.
Nous sommes particulièrement sensibles au maintien dans la communauté nationale de jeunes qui sont souvent nés à l'étranger. Je ne répéterai pas les propos tenus par mes deux éminents collègues qui m'ont précédée de longue date dans cet hémicycle, mais je rappelle que près de 30 % des Français immatriculés dans les consulats ont moins de 18 ans. Il s'agit d'une population jeune. Ces 300 000 jeunes Français doivent vraiment, comme l'a dit mon collègue Jacques Habert, pouvoir devenir citoyens dans les mêmes conditions que leurs compatriotes de l'Hexagone et des départements et territoires d'outre-mer. L'égalité républicaine le veut, mais c'est aussi l'intérêt de la France.
En effet, qui sont les jeunes Français que nous évoquons ?
Pour un petit tiers, il s'agit d'enfants d'expatriés qui, du fait de leur carrière, sont amenés à passer quelques années dans tel ou tel pays. Ces enfants gardent des liens étroits avec la France. Le français continue d'être la langue de communication familiale. Ils fréquentent des écoles françaises et ils reviennent souvent en vacances en France.
En revanche, pour les deux autres tiers, soit environ 200 000 enfants immatriculés dans les consulats, il s'agit de jeunes issus de familles durablement installées à l'étranger, parfois depuis plusieurs générations. Les enfants sont nés à l'étranger et sont français par filiation, le plus souvent à l'égard d'un seul de leurs parents.
Ces jeunes doivent rester français. Ils le restent d'abord parce que leurs parents les immatriculent. Un premier indice fort de l'attachement de leur famille à l'appartenance française est cette immatriculation au consulat, qui n'est pas obligatoire, et qu'une proportion considérable de Français à l'étranger néglige, puisqu'on évalue à 600 000 le nombre des Français qui ne sont pas immatriculés à l'étranger.
Si ce lien administratif et civique avec la France existe pour ces familles durablement installées à l'étranger, les liens linguistiques, culturels et affectifs peuvent être beaucoup plus lâches, surtout en Union européenne et sur le continent américain.
En effet, la majorité de ces enfants français fréquente une école du pays d'accueil, par choix culturel ou par commodité, ou souvent parce que l'école française est trop éloignée, beaucoup trop coûteuse, trop marquée socialement, trop élitiste.
Leur maîtrise de la langue française est variable ; leur connaissance de la France aussi. Combien parmi eux n'y sont jamais allés en raison du coût du voyage et de la perte des attaches familiales de leurs parents ?
Leur inscription d'office sur les listes électorales est bonne ; elle démontrerait à ces jeunes gens que la France tient à eux et qu'elle les considère comme des Français à part entière. Ainsi, par la pratique du vote, leur sentiment d'appartenance nationale serait renforcé.
Il est un aspect de ce problème qui a été analysé dans le rapport sous un angle négatif, me semble-t-il, alors que, pour moi, il constitue une raison de plus pour inscrire ces jeunes sur les listes électorales : les deux tiers d'entre eux sont binationaux.
Il faut considérer, en effet, que la binationalité ou la plurinationalité est intrinsèquement liée à l'expatriation, surtout quand celle-ci devient émigration.
Pour ces jeunes, ce n'est pas la conséquence d'un choix, c'est un état de fait : à leur naissance, ils ont deux ou trois nationalités ; naître d'un père français et d'une mère espagnole au Venezuela. c'est naître avec trois nationalités.
Ce phénomène est de plus en plus fréquent, de mieux en mieux compris et accepté par les Etats, à défaut de l'être par les opinions publiques. Or, pour la France, il est essentiel de comprendre que sa présence à l'étranger dépend de ces Français binationaux, particulièrement aptes, si l'on a su conforter leur appartenance française, à établir des relations fructueuses entre notre pays et le monde extérieur.
Contrairement à ce qui a lieu d'habitude, le Conseil supérieur des Français de l'étranger, ô miracle ! a été saisi de ce texte.En effet, monsieur le ministre, si cette saisine est prévue dans les textes, elle est tellement rarement mise en oeuvre qu'il faut saluer le fait. Je profite de cette occasion pour vous indiquer que nous souhaitons vivement que le conseil soit également saisis du texte sur la nationalité. Il ne l'avait pas été en 1993, ce qui avait suscité quelques remous au sein du conseil.
Le Conseil supérieur des Français de l'étranger a ainsi émis à l'unanimité le souhait que les dispositions de ce projet de loi soient étendues aux jeunes Français de l'étranger avec les aménagements dont mes collègues vous ont fait part, concernant l'information préalable et la possibilité donnée aux jeunes de refuser cette inscription dans les rares pays où leur sécurité serait en cause et où l'inscription sur les listes électorales risquerait de les mettre en danger.
L'essentiel est que les jeunes se sentent accueillis dans la communauté nationale et soient incités à accomplir leur devoir civique, qu'ils deviennent des citoyens actifs et non de ces citoyens passifs que le principe de désuétude exclurait un jour de notre nationalité. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. Habert applaudit également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, après l'excellent rapport de M. Bonnet et les interventions des divers orateurs, je peux relever qu'un accord assez général se manifeste sur les travées du Sénat en faveur de l'inscription d'office des jeunes majeurs sur les listes électorales. Je tiens à saluer cet accord de principe.
Tout le reste n'est qu'affaire de modalités ou de calendrier et méritera d'être examiné de manière objective. C'est d'ailleurs le style de votre maison d'agir ainsi.
Les arguments allant à l'encontre de l'inscription d'office ne m'ont pas paru réellement convaincants. Je le dis très cordialement à ceux qui se sont exprimés en ce sens.
M. Hyest a avancé l'argument selon lequel le recrutement ne serait pas complet. Evidemment, rien n'est parfait, mais, s'il n'est pas complet, il est tout de même assez général. Pour sa part, votre commission des lois propose d'attendre que les jeunes filles soient également prises en compte pour rendre applicable la loi.
La méthode que propose le Gouvernement consiste à croiser les fichiers ; nous pensons que les choses iront constamment en s'améliorant.
Quant à la surcharge des services municipaux, mesdames, messieurs les sénateurs, je pense qu'il ne faut pas l'exagérer : une classe d'âge représente 2 % de l'électorat. On peut penser que, spontanément, au moins la moitié des jeunes s'inscriront d'eux-mêmes. Par conséquent, la surcharge sera inférieure à 1 % du total ; ce n'est quand même pas considérable !
J'ai entendu l'argument de M. Plasait sur le risque de substituer à l'initiative individuelle une responsabilité collective. Ce discours me plaît, il montre que la citoyenneté implique effort et mobilisation de chacun. Mais, à vrai dire, croyez-vous que ce soit au niveau de l'accomplissement d'une formalité administrative que l'on doive surtout inciter à l'effort ? Ne s'agirait-il pas plutôt de susciter un effort de la conscience ? C'est cela qui caractérise vraiment la citoyenneté.
Je ne crois pas beaucoup au risque de gonfler les chiffres de l'abstentionnisme. L'objectif de ce projet de loi est surtout de faire voter des électeurs qui, sans lui, ne voteraient pas. Il aura pour résultat, qu'on le veuille ou non, d'augmenter le nombre des électeurs qui voteront, et cela seul compte.
M. Hyest a prétendu que le projet de loi n'aurait aucune incidence sur les recours possibles devant le juge. Ce n'est pas exact. Lors de la dernière consultation électorale, un jeune n'était pas fondé à se présenter devant le juge pour demander à voter. Si ce projet de loi est adopté, il pourra le faire.
On nous a suggéré d'attendre. Est-ce vraiment opportun ? Ne serait-ce pas compris comme un signe négatif, ainsi que l'ont dit MM. Allouche et Duffour ?
Un engagement a été pris vis-à-vis de la jeunesse, et par le Président de la République et par le Premier ministre, par les deux majorités qui se sont succédé. Comment voulez-vous que les jeunes comprennent, après de tels engagements solennels, que rien ne s'ensuive. N'est-il pas temps de passer aux actes ?
Certes, nous n'obtiendrons pas 100 % d'inscrits du premier coup. D'ailleurs, y parviendrons-nous jamais ? Si les critiques faites à l'imperfection de tel ou tel fichier sont fondées, peut-être en y remédiant parviendrons-nous presque à la perfection ; de toute façon, vous le savez bien, la perfection n'est pas de ce monde !
Le problème des Français de l'étranger a été évoqué successivement par MM. de Cuttoli, Habert et Mme Cerisier-ben Guiga.
Ces trois sénateurs, qui représentent nos compatriotes résidant hors de France, ont émis le voeu qu'il soit davantage tenu compte de l'avis du Conseil supérieur des Français de l'étranger. En effet, ce dernier a souhaité que « ce projet de loi soit amendé en vue de l'étendre aux jeunes Français établis hors de France en les inscrivant d'office après une information préalable sur la liste du centre de vote consulaire dont ils dépendent sans préjudice de leur faculté de s'inscrire dans une commune de France ou de refuser leur inscription ». Tels sont les termes de l'avis qui vient d'être rendu.
Si j'ai bien compris, vous êtes tous trois d'accord pour qu'un amendement en ce sens soit adopté. Je pense que cela serait souhaitable, sous réserve que soit ménagée à chacun la possibilité de s'inscrire en France même, de façon à pouvoir participer aux élections municipales, cantonales et régionales.
M. Charles de Cuttoli. Dans un autre texte, monsieur le ministre. Dans celui-ci, c'est impossible ! La loi organique ne le permet pas.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Il faudra étudier cette question et voir si cette disposition peut être inscrite dans la loi.
Le problème de la double nationalité a été évoqué. Il ne faut pas que la double nationalité soit un obstacle à cette inscription.
Madame le sénateur, vous avez souhaité que le Conseil supérieur des Français de l'étranger soit également saisi du projet de loi sur la nationalité. Je transmettrai votre voeu à Mme la ministre, garde des sceaux.
MM. Allouche et Duffour ont beaucoup insisté sur la nécessité d'organiser une bonne information de la jeunesse. Cela suppose quelques moyens. Comme le disait votre rapporteur, nous n'y consacrerons jamais autant d'argent que France Télécom en aura consenti pour la mise sur le marché de ses actions. C'est fort probable et c'est regrettable, mais c'est ainsi. En tout cas, il faudra mobiliser les moyens dont nous disposons. Les gouvernements, les maires, les préfets, le centre d'information civique...
M. Guy Allouche. Et les recteurs !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Tout à fait et même les inspecteurs d'académie !
... devront veiller à cette sensibilisation des jeunes, qui, je le rappelle, devront accomplir cette année encore un certain nombre de formalités.
J'ai bien entendu la suggestion relative au vote obligatoire formulée par M. Joly.
Monsieur le sénateur, se poserait alors un problème de constitutionnalité dans la mesure où la Constitution définit le vote comme un droit. Or, le droit, c'est le droit de voter ou de ne pas voter.
Par ailleurs, comment sanctionnerait-on le non-vote ? Les maires devraient-ils transmettre la liste des abtentionnistes ?
Vous êtes maire, me semble-t-il... (M. Joly fait un signe de dénégation.) Vous ne l'êtes plus, mais vous avez cette expérience. Vous savez donc combien les maires répugneraient à transmettre au juge du tribunal d'instance la liste des abstentionnistes. C'est normal, puisqu'ils sont élus par leurs administrés.
En outre, la culture républicaine - on l'a vu à maintes reprises - est aux antipodes de tout ce qui pourrait ressembler à de la délation.
Par conséquent, j'émets quelques réserves sur cette proposition. Mais nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion des amendements.
Refuser d'appliquer rapidement la loi si elle est votée serait, je le répète, un signe négatif fort adressé à la jeunesse. Je vous invite en revanche, mesdames, messieurs les sénateurs, à adresser à la jeunesse un signe fort de confiance, d'intérêt, marquant la volonté clairement manifestée par la représentation nationale de faire en sorte que les jeunes soient plus nombreux à voter dès cette année.
Au-delà du symbole, vous donnerez à plusieurs centaines de milliers d'entre eux la possibilité de s'inscrire, dès cette année, sur les listes électorales et de pouvoir exercer leur droit de vote aux prochaines élections locales.
Vous prouverez ainsi votre volonté d'aller de l'avant.
J'ose espérer que le Sénat, dans sa sagesse, ne voudra pas retarder un mouvement qu'il sait inéluctable. (Applaudissements.)
M. le président. Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er

M. le président. « Art. 1er. - Il est inséré, après l'article L. 11 du code électoral, un article L. 11-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 11-1. - Sans préjudice de l'application des dispositions de l'article L. 11, sont inscrites d'office sur la liste électorale de la commune de leur domicile réel les personnes qui remplissent la condition d'âge depuis la dernière clôture définitive des listes électorales ou la rempliront avant la prochaine clôture définitive de ces listes, sous réserve qu'elles répondent aux autres conditions prescrites par la loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. « Art. 2. - Il est inséré, après l'article L. 17 du code électoral, un article L. 17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 17-1. - Pour l'application des dispositions de l'article L. 11-1, les autorités gestionnaires des fichiers du recensement établi en application du code du service national et des fichiers des organismes servant les prestations de base des régimes obligatoires d'assurance maladie transmettent aux commissions administratives les informations nominatives portant exclusivement sur les nom, prénoms, nationalité, date et lieu de naissance et adresse des personnes remplissant la condition d'âge mentionnée audit article. Les informations contenues dans les fichiers sont transmises aux commissions administratives par l'intermédiaire de l'Institut national de la statistique et des études économiques.
« Les commissions administratives font détruire les informations qui leur sont transmises soit à l'expiration des délais des recours prévus aux articles L. 20 et L. 25, soit, dans le cas où un recours a été introduit, après l'intervention de la décision définitive.
« Les règles relatives au traitement des informations nominatives prévues au présent article sont fixées dans les conditions définies par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »
Par amendement n° 6, M. Bonnet, au nom de la commission, propose :
I. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article L. 17-1 du code électoral, de supprimer les mots : « et des fichiers des organismes servant les prestations de base des régimes obligatoires d'assurance maladie, ».
II. - En conséquence, de remplacer dans cette même phrase les mots : « des fichiers du recensement » par les mots : « du fichier du recensement ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Bonnet, rapporteur. J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer l'accord de la commission des lois sur le principe mais sa répugnance à entrer dans un dispositif dont la complexité a été soulignée par différents orateurs.
J'ai noté au passage une phrase de notre excellent collègue M. Allouche : « Une multitude d'observations et de questions se dissimulent derrière l'apparente simplicité de ce texte. » J'ai entendu M. Duffour nous dire que « tout allégement serait le bienvenu ». C'est précisément un tel allégement que la commission propose au Sénat.
Nous ne pouvons pas, à l'extérieur, joindre nos voix au choeur des élus protestant contre la prolifération de textes qui allongent la durée des procédures tout en surchargeant les finances de leur collectivité et, ici, nous déjuger en votant des projets porteurs de complexités inutiles.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Christian Bonnet, rapporteur. La surcharge, monsieur le ministre, vient toujours des cas marginaux. Mais c'est cette surcharge qui est insupportable. Elle concerne en particulier la détermination de la nationalité, qui est automatiquement donnée par le fichier du recensement national, mais pas par les fichiers des différentes caisses versant les prestations de base de l'assurance maladie.
J'observe d'ailleurs que l'étude d'impact est très nette à cet égard. Je ne veux pas lasser la Haute Assemblée en revenant sur des points dont mon rapport écrit fait largement état, mais je rappelle que cette étude souligne la complexité du dispositif d'application de ce texte.
Il faut savoir, monsieur le ministre - je cite de bons auteurs ! - « donner du temps au temps ». Mieux vaut parfois attendre quelque peu plutôt que de courir le risque de contribuer à l'échec d'une mesure mise trop hâtivement en application. Il y a des exemples : les certificats d'hébergement, la collégialité des juges d'instruction, toutes mesures votées dans l'enthousiasme et l'inconscience des uns et des autres.
Nous n'avons pas envie de récidiver ni de compliquer encore la tâche de nos élus.
Un signe n'est pas fort s'il s'accompagne d'un raté.
Le Président de la République et le Premier ministre se sont accordés sur le principe ; ils n'en ont pas fixé les modalités de mise en oeuvre. Il revient précisément au Parlement, et singulièrement au Sénat, d'alléger la tâche des élus dont les sénateurs sont les représentants.
A partir du moment où vous aurez satisfaction sur le principe et sur le fait que l'application de cette disposition interviendra dès que le recensement prendra en compte les jeunes gens des deux sexes, je ne vois pas pourquoi, monsieur le ministre, vous pourriez vous opposer plus longtemps à l'amendement de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je crois avoir répondu par avance aux objections de M. le rapporteur. J'ignorais cependant qu'il faisait désormais siens les principes de François Mitterrand. C'est une conversion tardive ! Mais tout arrive ! (Sourires.)
Toutefois, s'agissant du principe que vous avez évoqué, je crois qu'il faut l'appliquer avec discernement et je serai plus pragmatique que vous : il est des occasions où il faut savoir aller vite, et celle-ci en est une parce que les plus hautes autorités de l'Etat se sont engagées publiquement. Si c'était si difficile, elles n'auraient pas dû s'engager ainsi. Comme elles l'ont fait, il faut passer à l'acte, et je vous propose de le faire, avec les moyens du bord.
Il est vrai que le fichier du recensement sera complet en 1999.
M. Christian Bonnet, rapporteur. C'est demain !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Certes, mais, de toute façon, il ne nous dispensera pas d'effectuer le croisement avec le fichier de l'assurance maladie : que deux précautions valent mieux qu'une et, comme M. Hyest l'avait observé tout à l'heure,...
M. Jean-Jacques Hyest. Je n'ai pas dit cela, monsieur le ministre !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. J'ai compris que, selon vous, il était très difficile pour un jeune de dix-sept ans de savoir qu'il devait se faire recenser à la mairie, que cela posait de nombreux problèmes et qu'il y avait quelquefois des ratés.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le ministre, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. Hyest, avec l'autorisation de M. le ministre.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le ministre, j'ai dit qu'il y avait de toute façon une formalité à accomplir puisqu'un avis est publié et que les jeunes doivent ensuite se faire recenser. Or un certain nombre d'entre eux ne défèrent pas à cet avis, d'où un énorme travail pour les services du recrutement, qui doivent retrouver tous les jeunes. Ils y parviennent presque toujours, et cela vaut d'ailleurs mieux pour les intéressés car, si ces derniers ne sont retrouvés qu'après trois ou quatre ans, ils doivent accomplir leur service national - tant que celui-ci existe - à ce moment-là, et ce n'est pas très agréable.
Il est certain que, demain, la tâche sera encore plus ardue pour ces services dans la mesure où la conscription n'existera plus.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Quoi qu'il en soit, deux précautions valent mieux qu'une. Mieux vaut croiser les données des deux fichiers, et le Gouvernement pense qu'il faut s'attaquer au problème très rapidement.
Les difficultés sont réelles - je n'ai pas cherché à les dissimuler - mais elles sont appelées à s'amenuiser très vite.
Par conséquent, le travail qui aura été accompli au cours de cette année n'aura pas à être repris l'année suivante.
C'est, au fond, une attitude psychologique. Vous faites vôtre, monsieur le rapporteur, la maxime de l'ancien Président de la République en ce domaine. Fort bien, mais moi, je vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, d'être un petit peu moins mitterrandiens...
M. Emmanuel Hamel. Vous nous demandez de reculer ? (Sourires.)
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. ... et un peu plus...
M. Jean-Jacques Hyest. Chiraquiens ? (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. ... offensifs, l'un n'empêchant d'ailleurs pas l'autre. (Nouveaux sourires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Guy Allouche. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Notre opposition à cet amendement n'a rien de farouche, car ce que nous rappelait à l'instant M. le rapporteur n'est pas faux. Je le remercie d'ailleurs au passage d'avoir bien voulu citer l'une des phrases que j'ai prononcées tout à l'heure à la tribune. Il ne faut pas se voiler la face : des difficultés existent, c'est certain ; elles sont d'ordre technique et administratif.
En commission, nous avions initialement suivi notre excellent collègue Jean-Paul Delevoye, qui avait proposé que nous donnions mandat à notre rapporteur pour rechercher une voie dans le sens d'un recensement général rendant la mesure applicable au 1er janvier 1999, ce recensement pouvant s'effectuer tout au long de l'année 1998. Cette idée n'a toutefois pas été retenue. Il est vrai que la réforme du service national telle que l'a votée l'Assemblée nationale offre, avec le recensement obligatoire des jeunes gens et des jeunes filles à partir de 1999, une nouvelle possibilité. Cependant, comme l'a relevé M. le ministre, la prise en compte de ce recensement des jeunes gens et des jeunes filles ne sera effective qu'en l'an 2000. Cela représente donc deux ans de plus !
Or il y a, en quelque sorte, urgence. Des engagements ont été pris et la jeunesse sait maintenant, parce que cela a été rendu public et rappelé, que l'inscription automatique va être effective. Il serait fâcheux que, lors des prochaines élections, certains, s'imaginant qu'ils sont automatiquement inscrits, n'accomplissent pas les formalités et, de ce fait, ne puissent finalement pas voter.
Sans méconnaître les obstables à surmonter, je crois que le ministère de l'intérieur peut tout mettre en oeuvre pour appliquer cette disposition dans les meilleurs délais. Monsieur le ministre, vous nous assurez que toutes les dispositions ont été prises ou vont l'être pour que cette disposition soit effective au 1er janvier 1998 ; j'en accepte l'augure. C'est un défi qui est lancé de part et d'autre : il faut le relever !
M. Michel Duffour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour. J'ai déjà fait connaître notre position.
M. le rapporteur a évoqué l'un de mes propos, rappelant que j'étais partisan d'un allégement de modalités de mise en oeuvre de ce texte. Mais je crois que M. le ministre fait preuve de compréhension au regard des difficultés que nous soulignons.
En même temps, il rappelle, et je le suis pleinement, que la jeunesse a besoin de signes forts. Si nous donnions l'impression, si peu que ce soit, de « traîner les pieds » devant la mesure proposée, je pense que ce signe serait brouillé. Je voterai donc contre l'amendement de la commission.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 4, M. Ostermann propose, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 17-1 du code électoral, de remplacer le mot « transmettent » par les mots : « sont tenus de transmettre ».
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Compte tenu de l'adoption de l'amendement n° 6, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 4 est retiré.
Par amendement n° 5, M. Ostermann propose, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L. 17-1 du code électoral, après les mots : « informations nominatives », d'insérer les mots : « régulièrement mises à jour ».
La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Je retire également cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 5 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 2

M. le président. Par amendement n° 1, M. Joly propose d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 54 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L. 54. - La participation au scrutin est obligatoire.
« La violation de l'alinéa précédent entraîne la condamnation, par le tribunal d'instance dans le ressort duquel se trouve la commune d'inscription et sur saisine du maire de cette commune, au paiement d'une amende civile de 500 francs.
« Le tribunal pourra toutefois ne pas prononcer cette condamnation si l'intéressé établit qu'il se trouvait dans l'impossibilité de participer au scrutin et de voter par procuration. »
« II. - L'article L. 55 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. L. 55. - Le scrutin ne dure qu'un seul jour ; il a lieu un dimanche. »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. J'ai déjà eu l'occasion, au cours de la discussion générale, d'aborder la question du vote obligatoire. La défense de cet amendement me donnera l'occasion de développer mon propos.
D'emblée, je reconnais que la disposition que je vous demande de bien vouloir introduire dans la loi est susceptible de heurter certains. Une telle réaction, à mon sens, ne peut que céder devant l'examen des motifs.
Tout d'abord, il est possible d'obliger les électeurs à se rendre aux urnes sans que le fondement et le fonctionnement de la démocratie s'en trouvent altérés. En effet, il était jusqu'alors obligatoire de s'inscrire sur les listes électorales ; or, à ma connaissance, cette mesure n'a jamais soulevé de critiques particulières. Aussi la notion d'obligation ne me semble-t-elle pas constituer une objection dirimante.
Pour ce qui concerne la condamnation à une amende civile, je conçois qu'une telle mesure puisse susciter des réserves. Toutefois, comment s'assurer qu'une obligation se trouvera remplie si elle n'est pas sanctionnée ? Il s'agit d'un corollaire.
Je rappelle que l'actuel article L. 9 du code électoral dispose, dans son premier alinéa : « L'inscription sur les listes électorales est obligatoire. » Reconnaissez, monsieur le ministre, que, si ce texte de loi avait été effectivement respecté, vous n'auriez pas été amené à venir nous présenter ce projet de loi aujourd'hui !
Aussi, pour que l'obligation de vote ne connaisse pas le même sort que l'article L. 9, je propose que cette mesure soit assortie d'une sanction financière ayant le caractère d'une amende civile. Incomplète, la démarche serait inopérante.
Je ne suis pas particulièrement attaché au montant proposé, mais il m'a semblé que celui-ci devait être suffisamment dissuasif pour que la mesure s'avère efficace.
Mes chers collègues, vous n'êtes pas sans savoir que le système que je vous propose d'adopter est celui que plusieurs pays européens ont choisi et qui, je crois, fonctionne aujourd'hui sans encombre.
Monsieur le ministre, vous m'avez demandé par quel moyen on pouvait rendre le vote obligatoire, mais vous n'avez pas répondu à mon observation concernant les taux d'abstention, et cela m'étonne de vous, qui êtes si attaché à une république citoyenne.
S'agissant du moyen de rendre le vote obligatoire, je vous rappelle que, dans d'autres circonstances, une amende peut être prononcée à l'encontre de ceux qui ne remplissent pas leurs obligations citoyennes. Je citerai en particulier le cas des délégués sénatoriaux ainsi que celui des jurés. En effet, en vertu de l'article L. 288 du code de procédure pénale, « tout juré qui, sans motif légitime, n'a pas déféré à la citation qui lui a été notifiée est condamné par la cour à une amende. »
Pour différent que soit leur objet, la participation à un jury d'assises tout comme le vote sont des devoirs inhérents à la citoyenneté et je ne vois pas au nom de quoi le manquement au premier pourrait être sanctionné tandis que le manquement au second ne le serait pas.
En ayant terminé avec les arguments juridiques qui plaident en faveur de mon amendement, je souhaite aborder brièvement la question de l'incidence pratique de la mesure que je propose d'adopter.
Il est bien évident que je ne souhaite pas voir les électeurs contraints de mobiliser une journée entière pour se rendre aux urnes. Il me semble au contraire important de concilier les impératifs familiaux, de loisirs et de repos dominical avec la participation au scrutin. C'est la raison pour laquelle j'ai également déposé un amendement visant à faciliter l'exercice du vote par procuration.
En dehors de ces aspects juridiques et pratiques, d'autres considérations militent en faveur de ma démarche.
Il me semble utile de rappeler l'importance que les textes fondateurs de la République française confèrent au vote. Qu'il s'agisse de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 ou de la Constitution de 1958, la place accordée à l'exercice du droit de vote est prépondérante.
Le choix par les citoyens de leurs représentants constitue l'essence même de la République. La solennité dont la Constitution revêt cet exercice démocratique empêche qu'il puisse y être dérogé.
On peut tout à fait concevoir qu'un électeur rejette l'ensemble des candidatures qui lui sont proposées. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai également déposé un amendement visant à ce que les bulletins blancs ne soient plus assimilés aux bulletins nuls.
Refuser de participer au scrutin, c'est refuser d'assumer les responsabilités propres à chaque individu, sans lesquelles tout projet de société se révèle irréalisable. Croyez-vous sain, mes chers collègues, qu'un département soit administré grâce aux seuls suffrages du quart des électeurs inscrits ?
L'abstention est un phénomène dangereux, qu'il convient d'enrayer avant que la démocratie ne s'en trouve affectée. Mon amendement constitue la seule façon d'y mettre fin.
L'histoire de notre pays est remplie des noms de ceux qui, au péril de leur vie, ont lutté pour que leurs descendants puissent librement choisir ceux qui les gouvernent. Aujourd'hui encore, à travers le monde, des peuples se battent pour adopter un régime politique semblable au nôtre.
Nous ne pouvons tolérer que cette prérogative, parfois chèrement payée, tombe en désuétude par simple négligence.
Telle sont les raisons pour lesquelles je vous demande de bien vouloir adopter mon amendement. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur quelques travées du RPR.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Bonnet, rapporteur. La commission a estimé que cet amendement n'entrait pas à proprement parler dans le cadre du sujet dont nous débattons aujourd'hui. Au demeurant, même dans le cas contraire, je crois qu'elle y aurait été hostile.
M. Delevoye n'a pas hésité à dire, comme je crois l'avoir indiqué dans mon rapport écrit, qu'il redoutait que le projet de loi n'amène un jour, tôt ou tard, à poser la question du vote obligatoire. Pour sa part, il rejetait par avance ce principe.
De surcroît, M. le ministre nous a indiqué que cela posait un problème de constitutionnalité. En outre, sur un plan pratique, nous savons tous que les maires sont peu enclins à la dénonciation.
Pour conclure, la commission des lois n'est pas favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. J'aimerais faire plaisir à M. Joly, mais je pense qu'il a tort d'estimer que l'instauration du vote obligatoire pourrait se substituer à la réhabilitation du civisme, de l'acte citoyen par excellence qu'est l'acte de voter. Je ne crois pas que l'on pourrait intéresser davantage notre peuple aux questions qui touchent à son destin en l'obligeant par la loi à se rendre aux urnes : cette analyse me paraît superficielle.
D'ailleurs, croyez-vous que les pays voisins où le vote est obligatoire se caractérisent forcément par un degré supérieur d'intérêt de la population pour la politique ?
Si l'on veut réhabiliter la politique, il faut donner à nos débats une hauteur de ton, et définir les enjeux véritables. Il faut que les hommes politiques, qui tiennent leur mandat du suffrage universel, aient l'audace de parler selon leur conscience, aient la rigueur de pousser leurs raisonnements jusqu'à leurs dernières conséquences et mettent leurs actes en accord avec leurs paroles. Cela seul pourra rendre aux citoyens l'estime qu'ils devraient avoir pour une activité qui est à coup sûr noble, dès lors qu'elle tend à la recherche de l'intérêt général.
En outre, votre proposition se heurte, monsieur Joly, je vous l'ai déjà dit tout à l'heure et je vous le répète, à un argument de constitutionnalité. En effet, l'article VI de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle le préambule de la Constitution fait référence, dispose : « La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. »
Voter est donc un droit. Mais qu'est-ce qu'un droit ? Pour Littré, le droit est une « faculté reconnue, naturelle ou légale, d'accomplir ou de ne pas accomplir un acte ».
Or transformer ce droit en une obligation serait aller à l'encontre du préambule de la Constitution et de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
J'observe d'ailleurs qu'en Belgique, puisque vous avez évoqué le cas de ce pays, où le vote est en effet obligatoire, cette obligation est inscrite dans la constitution belge. Pour aller dans le sens que vous souhaitez, monsieur le sénateur, il faudrait donc envisager une révision constitutionnelle, afin de faire figurer cette obligation dans la Constitution. (M. Joly opine.)
Je ne reviendrai pas sur le fait que les sanctions sont difficiles à mettre en oeuvre. J'ai parlé des maires, mais croyez-vous qu'il serait beaucoup plus facile à un préfet de les appliquer ? Cela ne correspond absolument pas à notre culture.
Tout en déplorant comme vous le niveau élevé, malheureusement traditionnel, de l'abstention aux élections cantonales, je vous invite plutôt à emprunter le sentier, certes rocailleux, difficile et malaisé, qui peut nous conduire à une véritable réhabilitation de la politique. Il s'agit de faire en sorte que, aussi bien dans leurs analyses que dans leur comportement, les hommes politiques auxquels le peuple français a accordé sa confiance s'en montrent tout simplement dignes.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Guy Cabanel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. En ce qui concerne l'instauration éventuelle du vote obligatoire, la proposition de M. Joly reflète effectivement l'inquiétude de ceux qui pensent que l'inscription automatique et sans motivation véritable des jeunes atteignant l'âge de dix-huit ans n'abourira qu'à majorer le taux d'abstention et risquera, dans certains endroits, au moins dans un premier temps, d'apporter un trouble supplémentaire, par des conditions d'élections qui paraîtront parfois plus ridicules encore qu'elles ne le sont actuellement lors de certains scrutins cantonaux ou partiels.
Par ailleurs, vous avez souligné tout à l'heure, monsieur le ministre, le fait que nous risquions d'être contraints d'emprunter la voie de la réforme constitutionnelle.
A cet égard, je citerai l'article L. 318 du code électoral, qui a déjà institué un vote obligatoire en France pour les élections sénatoriales.
M. Jean-Jacques Hyest. Ce n'est pas pareil !
M. Guy Cabanel. Le cas est différent, certes, parce que les délégués des conseils municipaux pour les élections sénatoriales ont le plus souvent fait acte de candidature. Mais tous les conseillers municipaux, dans les communes comptant 9 000 habitants et plus, sont délégués de droit, et ils n'ont pas le droit de ne pas voter. S'ils s'abstiennent, ils risquent une amende de quatre-vingts francs.
Je reconnais que le problème n'est pas simple, mais je me demande si l'amendement n° 1 présenté par M. Joly est réellement anticonstitutionnel.
En effet, même si l'on admet qu'il est en contradiction avec le préambule de la Constitution et avec la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il reste à souligner que les préambules sont des éléments d'inspiration constitutionnelle, et non pas des textes constitutionnels régulièrement adoptés.
Personnellement, sans faire de l'instauration du vote obligatoire un motif de passion, je voterai l'amendement n° 1 de M. Joly.
M. Guy Allouche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Je ne voterai pas l'amendement n° 1, pour une raison à mon sens toute simple : la question soulevée est trop importante pour pouvoir être réglée par le biais d'un amendement.
En effet, le vote obligatoire mérite un long débat. Certes, il est exact que, compte tenu du nombre assez élevé des abstentionnistes, bien des Français s'interrogent sur l'opportunité de l'instituer. La réflexion est engagée sur ce thème, mais nous ne réglerons pas cette question aujourd'hui, au détour d'un amendement.
Prenons l'exemple des délégués des conseils municipaux aux élections sénatoriales. Il est heureux, monsieur Cabanel, que nos anciens aient, sagement, rendu leur vote obligatoire.
En effet, nous sommes élus au second degré, par des élus. Il serait donc grave que ceux-ci, qui ont été élus parce que des citoyens ont fait leur devoir civique, ne se déplacent pas pour aller désigner les parlementaires que nous sommes.
Par conséquent, cette obligation me paraît en la circonstance naturelle. Quand on a été élu grâce au concours des citoyens, il est normal qu'à son tour on accomplisse son devoir électoral. C'est ainsi que j'interprète l'obligation de vote pour les élections sénatoriales.
Je voudrais dire aussi qu'il ne faut pas noircir un tableau qui est déjà gris. Il est vrai que nous sommes unanimes pour regretter que le taux d'abstention soit parfois élevé. Il faut savoir que ce chiffre varie suivant la nature de l'élection. C'est ainsi que les élections municipales mobilisent les électeurs, de même que, dans certains cas, les élections présidentielles. Tenons compte de ces données.
A mon sens, ce n'est pas en rendant le vote obligatoire que nous réussirons à convaincre les Français de faire preuve de davantage de civisme : puisque la politique n'est guère magnifiée en ce moment, il nous appartient d'agir auprès de nos compatriotes pour les intéresser à nos idées et pour les inciter à voter.
Dans le climat politique actuel, je ne crois pas que nous y parviendrons par l'instauration du vote obligatoire, et je crains que certains électeurs ne perçoivent une telle disposition comme une contrainte pure et simple.
Vous avez d'ailleurs eu raison, monsieur Joly, de déposer, à côté de l'amendement n° 1 sur le vote obligatoire, un amendement n° 2 concernant le vote blanc, car ils vont de pair.
En tout état de cause, il nous est difficile de soutenir l'amendement n° 1.
M. le président. Personne ne demande plus laparole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 2, M. Joly propose d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« 1° Il est inséré, après le premier alinéa de l'article L. 58 du code électoral, un alinéa ainsi rédigé :
« Il sera mis à la disposition des électeurs des bulletins blancs de même format que les bulletins des candidats. Le maire doit recevoir et tenir à la disposition des électeurs ces bulletins blancs, sur cette même table, pendant toute la durée du vote. »
« 2° Le troisième alinéa de l'article L. 65 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les bulletins blancs sont décomptés et proclamés séparément des bulletins nuls dans le résultat du scrutin. »
« 3° Le début du premier alinéa de l'article L. 66 du même code est modifié de la façon suivante :
« Les bulletins ne contenant pas une désignation suffisante... (Le reste sans changement.) »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. L'amendement que je propose au Sénat d'adopter a pour objet d'assimiler les bulletins blancs à des suffrages exprimés, et non plus à des bulletins nuls.
Je sais que cette mesure est attendue par nombre de nos concitoyens, qui n'admettent pas que leur choix ne soit pas pris en considération, ce qui constitue incontestablement une cause majeure d'abstention.
En effet, de nombreux électeurs qui souhaitent se prononcer de la sorte ne se rendent pas aux urnes, parce qu'ils savent pertinemment que leur vote n'aura pas plus d'incidence qu'une abstention. Pourtant, l'électeur qui se déplace pour déposer un bulletin blanc dans l'urne accomplit son devoir de citoyen, au même titre que celui qui opère un choix parmi les différents candidats : sa démarche est volontaire, consciente et réfléchie.
Pourquoi, dès lors, ne pas prendre en compte ce type de manifestation républicaine ? C'est à dessein que j'emploie cette expression, dans la mesure où la faculté offerte à tout citoyen de voter blanc est inscrite dans la loi.
En effet, le code électoral impose aux communes dont les bureaux de vote sont équipés d'une machine à voter de faire en sorte que cet appareil permette de comptabiliser les votes blancs.
Le libre exercice de la démocratie suppose incontestablement la possibilité, pour un citoyen, de rejeter l'ensemble des candidatures qui lui sont présentées. Or cette possibilité ne peut s'exercer que grâce au vote blanc, et c'est la raison pour laquelle celui-ci doit être pris en considération. Dans le cas contraire, le résultat électoral ne correspond pas à la réalité des suffrages.
J'ajoute, monsieur le ministre, qu'une telle mesure constituerait une arme efficace dans la lutte contre les extrémismes. En effet, de nombreux sondages ont prouvé q'une partie importante des voix accordées aux formations défendant de telles options traduisait une volonté de sanctionner l'ensemble de la classe politique. Le « vote-sanction » n'est pas antidémocratique en soi, mais il ne saurait profiter aux partisans de valeurs qui ne sont pas celles de la République.
Aussi suis-je convaincu qu'un grand nombre d'électeurs qui apportent leur soutien à des formations extrémistes agiraient différemment si, demain, ils pouvaient manifester un vote contestataire efficace, quoique neutre.
Certains d'entre nous ont déjà songé au bien-fondé d'une telle disposition. C'est ainsi que, en 1994, notre collègue Edouard Le Jeune avait déposé une proposition de loi visant aux mêmes fins.
Parce qu'elle est plus juste, parce qu'elle concourra à lutter contre l'ascension des extrémismes et parce qu'elle permettra de tarir partiellement l'abstentionnisme, je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir adopter cette mesure.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Bonnet, rapporteur. La commission a estimé que le vote blanc n'avait pas plus de signification que l'abstention, et qu'il s'agissait d'un amendement en quelque sorte hors sujet.
Elle a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Encore une fois, j'aimerais faire plaisir à M. Joly, ne serait-ce que parce qu'il est franc-comtois comme moi et que, par conséquent, il n'est pas fondamentalement mauvais... (Sourires.)
Cependant, je voudrais souligner que le vote blanc ne fait pas du tout partie de la tradition française, de notre tradition républicaine. Vous semblez, monsieur Joly, méconnaître le fait que la prise en compte du vote blanc et le dépôt sur les tables de bulletins blancs ne changeraient rien pour les élections à la représentation proportionnelle.
Par ailleurs, en cas de scrutin majoritaire à deux tours, la disposition que vous proposez compliquerait les choses, et surtout aboutirait à rendre plus difficiles les élections au premier tour. La prise en compte des votes blancs jouerait toujours au détriment du candidat arrivé en tête et pourrait, à la limite, conduire à des impasses juridiques, dans la mesure où le total des bulletins blancs représenterait la majorité absolue des suffrages au premier tour, ou leur majorité relative au second tour. On pourrait donc, dans certains cas, constater la vacance du ou des sièges à pourvoir.
J'en viens à l'élection du Président de la République. Vous avez évoqué la lutte contre M. Le Pen.
Pour lutter efficacement contre M. Le Pen, il faut s'attaquer au chômage, mieux assurer l'emploi, relever les principes de la citoyenneté, rendre confiance dans la République, rendre à chaque Français la fierté de la France comme communauté de citoyens, ...
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. ... c'est-à-dire comme modèle de nation exemplaire. C'est cela qui fera reculer M. Le Pen, beaucoup plus que la mise à disposition de bulletins blancs dans les bureaux de vote.
M. Le Pen aurait pu bloquer l'élection présidentielle de 1995, en donnant au second tour à son électorat la consigne de voter blanc. Imaginez ce que cela aurait pu signifier. Un candidat aurait pu être élu objectivement par défaut, avec une majorité relative.
Lors d'un référendum, un projet doit être adopté à la majorité des suffrages exprimés. Organiser le vote blanc serait faire en sorte que, dans certains cas, les bulletins blancs pourraient l'emporter sur le oui.
Comptabiliser des bulletins blancs parmi les suffrages exprimés pourrait aller à l'encontre de la volonté de neutralité que peuvent exprimer certaines personnes qui votent blanc. Les électeurs qui votent blanc ne le font pas tous pour les mêmes raisons. Certains rejettent le système politique. Mais faut-il aller dans ce sens ?
Ne faut-il pas plutôt conduire les électeurs à choisir ? Dans la vie, il faut faire des choix. Il ne s'agit pas de trancher entre les bons et les méchants. On peut le dire entre nous, même si, au fond de soi, chacun s'estime meilleur que l'autre, mais c'est une notion très relative.
Par conséquent, ne perdez pas de vue, monsieur le sénateur, qu'une élection a d'abord pour finalité de désigner des élus, et que cela seul compte en définitive. Ne compliquez donc pas les choses à plaisir, si je puis dire, et ne cherchez pas la formule d'Archimède qui rendrait cette désignation beaucoup plus difficile.
Telle est la position du Gouvernement. Je regrette de devoir indiquer qu'il est plutôt hostile à l'amendement.
M. Christian Bonnet. rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Bonnet, rapporteur. La commission considère qu'un vote nul par un bulletin barré vaut tout aussi bien le rejet du système.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2.
M. Guy Allouche. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. La reconnaissance du vote blanc comme expression du suffrage est une proposition très souvent avancée, mais qui pose de nombreux problèmes.
Je rappelle à la Haute Assemblée que le Centre d'information civique a organisé plusieurs colloques et travaux sur cette question, qui n'ont pas abouti parce que les inconvénients de cette disposition sont bien supérieurs aux avantages que l'on pourrait en attendre.
La règle selon laquelle les bulletins blancs ne sont pas comptabilisés parmi les suffrages exprimés est constante dans notre droit électoral.
Il convient tout d'abord d'établir nettement la signification qu'on doit accorder aux bulletins blancs. La personne qui prend soin de confectionner elle-même et à l'avance son bulletin blanc pour l'insérer ensuite dans l'enveloppe électorale manifeste le scrupule d'accomplir exactement son devoir électoral en même temps que le souci de n'avantager aucun des candidats ou aucune des listes en présence. Qu'en serait-il de cette volonté de neutralité si les bulletins blancs étaient comptabilisés parmi les suffrages exprimés ?
Ainsi, pour l'élection présidentielle, l'article 7 de la Constitution prévoit que « le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés ». Dans le régime actuel, si cette condition n'est pas réalisée au premier tour, elle l'est obligatoirement au second, puisque ne peuvent alors se présenter que « les deux candidats qui, le cas échéant, après retrait de candidats plus favorisés, se trouvent avoir recueilli le plus grand nombre de suffrages au premier tour ». On conçoit aisément que si les bulletins blancs entrent dans le décompte des suffrages exprimés, donc dans le calcul de la majorité absolue, ils joueront automatiquement au premier tour à l'encontre du candidat arrivé en tête, son élection étant ainsi rendue plus difficile. Mais, résultat plus grave, il peut très bien se faire qu'au second tour aucun des candidats n'obtienne la majorité absolue, surtout si les deux adversaires ne sont séparés que par un nombre de voix relativement réduit.
Dans l'état actuel de notre droit électoral, une telle réforme risquerait, dans certains cas, d'aller à l'encontre de la volonté de neutralité manifestée par les électeurs qui auraient déposé un bulletin blanc dans l'urne.
Mon cher collègue, je vais vous faire un aveu. Voilà quelque temps, j'étais partisan de la prise en compte du vote blanc, mais je me suis rendu à l'évidence, j'ai compris la difficulté de cette opération pour aujourd'hui penser que, étant donné la tradition française, la culture française, il y a encore beaucoup de travail avant d'arriver à cette maturité.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. Joly propose d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« 1° Le I de l'article L. 71 du code électoral est ainsi rédigé :
« I. - Les électeurs absents de leur commune d'inscription le jour du scrutin. »
« 2° Le III de ce même article est abrogé.
« 3° Un décret en Conseil d'Etat déterminera les mesures réglementaires ayant pour vocation de faciliter le vote par procuration. »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Monsieur le ministre, j'ai pris connaissance, avec joie, de votre volonté de me faire plaisir : il ne reste plus qu'un amendement pour vous donner l'occasion de le faire... (Sourires.)
En l'occurrence, il s'agit de faciliter le vote par procuration.
Cette mesure constituait un complément fort utile à l'amendement concernant le vote obligatoire que j'ai présenté mais qui n'a, hélas ! pas été adopté. Cet amendement présentant toutefois un caractère autonome, il demeure particulièrement opportun.
Aujourd'hui, nombreux sont les électeurs qui, sachant qu'ils ne pourront pas participer au scrutin, tentent de voter par procuration. J'emploie sciemment le verbe « tenter » car cette démarche s'avère si difficile que nombreux sont ceux qui y renoncent.
En premier lieu, l'électeur doit établir qu'il prend ses vacances ou que des obligations dûment constatées l'empêchent de prendre part au scrutin. S'il est malade, il doit le prouver en présentant un certificat médical justifiant qu'il est dans l'impossibilité matérielle de se rendre au bureau de vote.
Par la suite, il doit se rendre au tribunal, au commissariat ou à la mairie, ce qui implique souvent qu'il doive quitter son lieu de travail pour régler ces formalités.
Monsieur le ministre, lorsque les élections ont lieu pendant les beaux jours, comme ce fut le cas pour l'élection du Président de la République qui s'est tenue pendant le pont du 8 Mai, nombreux sont les électeurs qui, partant en week-end, ne se trouvent pas dans l'un des cas prévus par le décret du 12 février 1976.
En effet, les Français qui rejoignent leur famille ou des amis, ou qui se rendent dans leur maison de campagne pour la fin de semaine ne sont ni en vacances, ni malades, et dès lors toute procuration est impossible à obtenir.
C'est la raison pour laquelle je propose qu'il soit mis fin au système actuel qui paralyse l'exercice du droit de vote et favorise l'abstentionnisme.
Ne pourrait-on pas tout simplement admettre que les électeurs absents de leur commune le jour du scrutin puissent voter par procuration sans être contraints à justifier leur absence ?
La fin d'une procédure décourageante aurait incontestablement pour effet d'augmenter le nombre des votants lors des prochaines élections.
Je ne crois pas qu'il soit raisonnable d'opposer le problème de la fraude à mon amendement. A l'heure actuelle, celui qui cherche à frauder n'a aucune difficulté à fournir une pièce justificative, un contrat de location ou une réservation hôtelière.
Monsieur le ministre, votre projet de loi a pour objet de relever le taux de participation. Mon amendement y concourt. C'est la raison pour laquelle je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir l'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Bonnet, rapporteur. La commission a examiné l'objet tel qu'il a été rédigé par l'auteur de l'amendement. Il dispose : « Cet amendement peut être considéré comme la conséquence de l'amendement visant à rendre le vote obligatoire. » Il précise ensuite : « Dans l'hypothèse où la Haute Assemblée admettrait le caractère nécessaire du vote obligatoire... ». Le principe du vote obligatoire n'ayant pas été adopté par notre assemblée, la commission considère que cet amendement ouvrirait la porte à tous les abus. Elle ne peut se prononcer, quelque regret qu'elle en ait, en faveur de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je dirai à M. Joly que cet amendement, là encore, contrevient au principe qui est posé par la Constitution et selon lequel un vote doit être égal et secret. Vous percevez bien que la généralisation du vote par procuration serait une atteinte portée à ce secret du vote et il faut donc encadrer strictement cette procédure. Toutefois, je ne tiens pas à argumenter sur ce terrain.
Monsieur le sénateur, bien que je ne vous l'aie pas promis, je vais vous faire plaisir.
D'abord, je veux rendre hommage à votre esprit de système. En effet, vous avez très bien vu que de l'inscription d'office - ici vous avez fait un petit saut, épistémologiquement parlant - on pouvait déduire le vote obligatoire - c'est à cela que vous tenez ; du vote obligatoire, vous avez déduit le vote blanc, et du vote blanc la généralisation du vote par procuration. Tout cela constitue un système parfaitement cohérent, et cette logique en elle-même est satisfaisante pour l'esprit.
Toutefois, tous les autres amendements que vous avez déposés ayant été rejetés, vous devriez pousser votre logique, qui, je le répète, est remarquable, jusqu'au bout et, par conséquent, retirer cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Jacques Habert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Aux termes de son objet même, cet amendement serait une conséquence d'une disposition précédente portant sur le vote obligatoire. Personnellement, je ne pense pas qu'il soit une conséquence du vote obligatoire.
Cet amendement soulève, certes, une véritable question. Cependant, il ne s'agit pas, monsieur le ministre, de généraliser le vote par procuration. Il faut lutter pour faire en sorte que les procurations soient plus faciles. En effet, pour ceux qui voyagent ou qui vivent à l'étranger et pour certains autres de nos concitoyens, quand une consultation est organisée pendant un long week-end, par exemple, il est extrêmement difficile de voter.
Je peux citer le cas, dans ma famille, d'une personne hospitalisée à laquelle on a dû envoyer des gendarmes en uniforme pour chercher la procuration, bien que j'aie entrepris les démarches huit jours plus tôt. La procédure est extrêmement compliquée. On pourrait alléger le dispositif du vote par procuration et le rendre un peu plus facile.
Je voterai l'amendement de M. Joly afin de donner un signal. Il est en effet trop difficile d'établir les procurations.
Cette disposition permettrait d'augmenter le nombre de votants, de réduire le nombre des abstentionnistes. Il convient de faciliter la procuration quand elle est établie de bonne foi par deux personnes qui, de toute évidence, veulent simplement voter.
Je souhaiterais que cette proposition soit prise en compte afin que nous puissions y réfléchir au cours de la navette.
M. Christian Bonnet, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Bonnet, rapporteur. Cette banalisation me paraît ouvrir la voie à toutes les fraudes, à toutes les industries. Vous verrez se répandre dans les campagnes des personnes qui viendront ramasser les procurations. J'ai déjà eu à constater et à déplorer que le vote par procuration soit parfois accordé de manière trop restrictive, mais de là à une généralisation, sûrement pas !
M. Jacques Habert. Ce n'est pas une généralisation !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 7, M. Bonnet, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 2, un article additionnel rédigé comme suit :
« Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur à compter du jour où les nationaux des deux sexes seront soumis à l'obligation de recensement en application du code du service national. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Christian Bonnet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence relatif à la date d'entrée en vigueur du présent projet de loi. Comme je l'ai dit, une heureuse coïncidence veut que, la nuit dernière, l'Assemblée nationale ait fixé une date d'application au 1er janvier 1999, qui devrait faciliter ce report.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. J'ai déjà fait connaître la position du Gouvernement. Donner et retenir ne vaut : le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Collin, pour explication de vote.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aux termes de ce débat, je souhaite confirmer la satisfaction de la majorité des membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen de voir aboutir l'inscription d'office des jeunes gens de dix-huit ans sur les listes électorales. En effet, le projet de loi dont nous avons discuté cet après-midi rencontre, à mon avis, au moins dans son principe, un certain consensus dans la mesure où il renforce indirectement un élément essentiel dans l'exercice de la citoyenneté, celui du droit de vote.
Fidèle à un engagement pris par le Premier ministre au mois de juin dernier, vous avez proposé, monsieur le ministre, un dispositif, qui, pour ma part, me paraît répondre à son objectif.
Quelques orateurs jugent le mécanisme d'inscription complexe et difficile à mettre en place. Mes chers collègues, il me semble que notre pays dispose des moyens administratifs suffisants pour soutenir cette entreprise que je ne considère pas comme insurmontable.
Si la plus grande rigueur est employée, dans le respect des libertés et des droits des personnes qui feront l'objet d'une inscription d'office, la démocratie française a tout à gagner du projet de loi.
J'ai aussi entendu que l'inscription volontaire sur les listes électorales était une initiative individuelle importante et que le fait de la rendre automatique risquait de déresponsabiliser la collectivité.
Au contraire, c'est à mon avis le vote lui-même qui est une démarche individuelle positive, et l'inscription sur les listes est une formalité pouvant apparaître, à certains, comme une tracasserie administrative.
Inscrits d'office, les jeunes, selon qu'ils exerceront ou non leur droit de vote, choisiront de vivre la démocratie de façon active ou passive.
Même si l'inscription d'office se révélait peu influente sur les taux d'abstention aux élections - je ne l'espère pas - nous ne serions pas coupables, avec les mesures aujourd'hui proposées, de n'avoir rien tenté pour aider les jeunes à renouer avec les institutions représentatives de notre pays.
Compte tenu de l'avis que je viens d'exposer au nom de la majorité des sénateurs du RDSE, j'invite ces derniers à voter en faveur du présent projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai annoncé, au cours de la discussion générale, que le groupe socialiste était favorable au projet de loi, à sa philosophie, et je n'ai pas caché que ce texte présentait des difficultés d'ordre technique et administratif. Il aurait donc été logique que les sénateurs socialistes votent ce texte.
Néanmoins, compte tenu de l'adoption par la Haute Assemblée de deux amendements, dont l'un prévoit l'entrée en vigueur de la loi à compter du jour où les nationaux des deux sexes seront soumis à l'obligation de recensement, c'est-à-dire en l'an 2000, les membres du groupe socialiste, favorables à l'application aussi immédiate que possible de ce dispositif, ne pourront pas voter ce texte en l'état.
Il nous est difficile de voter pour ; nous ne pouvons voter contre, dans la mesure où l'idée est généreuse et où nous ne sommes pas hostiles à ce texte ; enfin, il n'est pas facile de s'abstenir. Par conséquent, mes chers collègues, le groupe socialiste ne prendra pas part au vote !
M. Jean-Jacques Hyest. Un vote blanc ou un vote nul ?
M. le président. La parole est à M. Gérard.
M. Alain Gérard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi que nous venons d'examiner a été conçu pour encourager les jeunes à participer à la vie civique, répondant ainsi notamment au souhait exprimé par M. Jacques Chirac, Président de la République.
Nous ne pouvons qu'en approuver le principe. Toutefois, comme l'a excellemment démontré M. le rapporteur et comme les débats l'ont souligné, le mécanisme proposé par le Gouvernement était peu fiable et source de complications administratives et de difficultés juridiques.
En effet, le premier inconvénient tenait à la fiabilité toute relative des fichiers de sécurité sociale à partir desquels l'INSEE demanderait aux communes l'inscription d'office d'un jeune et qui ne comportent pas, bien entendu, de renseignements sur sa nationalité.
Le second inconvénient, parfaitement mis en évidence par M. le rapporteur, était l'alourdissement des tâches des commissions administratives. En effet, il était à craindre un risque de fraude dans les inscriptions. C'est ce qui avait d'ailleurs conduit à la suppression des inscriptions d'office prévues par la loi de 1975. Le rapport d'impact du ministère de l'intérieur est sur ce point éloquent.
De plus, la charge de travail pour les services municipaux ne manquerait pas d'augmenter. Là encore, le rapport d'impact du ministère de l'intérieur ne cache rien des problèmes auxquels les communes seront confrontées.
Vous avez également eu raison, monsieur le rapporteur, de mettre en évidence le caractère singulier du dispositif proposé, qui dispense les jeunes majeurs d'une formalité en amont, la demande d'inscription, tout en les invitant en aval à déférer à de nouvelles procédures de contrôle.
En conséquence, nous ne pouvons que nous réjouir de la proposition formulée par M. le rapporteur et adoptée par le Sénat, qui tend, d'une part, à éviter le recours aux fichiers de la sécurité sociale et, d'autre part, à fixer l'entrée en vigueur de la loi à compter du jour où les nationaux des deux sexes seront soumis à l'obligation de recensement.
Cette solution aura le mérite, d'une part, de limiter le nombre de contentieux dans lesquels la responsabilité des maires risquait une fois de plus d'être engagée alors que ces derniers agissaient dans cette matière en qualité d'agents de l'Etat et, d'autre part, de dispenser les communes des contrôles en aval.
Telles sont toutes les raisons pour lesquelles les membres du groupe du Rassemblement pour la République voteront ce projet de loi tel qu'il a été amendé. Ils le feront en étant toutefois conscients du fait que l'éveil à la citoyenneté pourra être atteint non par une simple mesure d'inscription d'office sur les listes électorales, mais par une véritable politique de sensibilisation. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de ce débat sur le projet de loi relatif à l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales, nous émettons le souhait que la portée du texte soit bien celle qui est escomptée, c'est-à-dire la participation et l'intérêt accrus des jeunes pour la vie politique de leur pays. Notre excellent rapporteur, M. Christian Bonnet, a exposé les incidences de telles dispositions, et nous nous félicitons de l'adoption des amendements qu'il a proposés au nom de la commission des lois.
Ainsi, à l'impact du texte sur les jeunes et à la simplification administrative qui en découle pour eux s'ajoute un système cohérent, qui alourdira cependant - nous en sommes conscients - le travail des collectivités.
C'est pourquoi le groupe des Républicains et Indépendants votera ce texte tel qu'il résulte des travaux de la Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Habert.
M. Jacques Habert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne répéterai pas les raisons que nous avons de voter ce texte, m'associant aux excellents propos tenus à l'instant par MM. Yvon Collin, Alain Gérard et François Trucy.
Je souhaite simplement vous dire, monsieur le ministre, que les sénateurs représentant les Français établis hors de France ont noté la promesse ou la demi-promesse que vous leur avez faite, en tout cas l'espérance que vous leur avez donnée, d'inclure peut-être dans le projet de loi - il ne s'agit en effet que d'un article additionnel - les jeunes Français de l'étranger. Nous pensons en effet qu'ils peuvent l'être.
Notre concertation, nos hésitations, nos consultations étaient nécessaires. Les représentants du ministère des affaires étrangères et du ministère de l'intérieur, les commissions saisies au fond, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, sont maintenant à même, à mon avis, d'élaborer en quelques jours ou en quelques semaines un texte pour cet article additionnel que, à juste raison, vous avez considéré comme possible, monsieur le ministre.
Nous l'espérons fermement en tout cas. Il est temps maintenant de nous mettre à l'oeuvre, et nous disposons d'ailleurs de textes déjà parfaitement au point. Sous réserve de votre accord, cette concertation pourrait avoir lieu. Si, comme nous l'espérons, telle est votre volonté, les jeunes Français de l'étranger pourraient être placés dans ce texte sur un pied d'égalité avec les jeunes Français de France. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je tiens à répondre très précisément à M. Habert, ainsi qu'aux autres représentants des Français de l'étranger.
Un avis vient d'être rendu par le Conseil supérieur des Français de l'étranger, et je vous ai indiqué que le Gouvernement était prêt à en tenir compte.
Néanmoins, il résulte des informations que j'ai recueillies qu'un article additionnel ne suffirait pas à régler les problèmes nombreux que pose l'avis du Conseil supérieur des Français de l'étranger, et que plusieurs lois, dont des lois organiques, devraient être modifiées. Je crains, par conséquent, qu'un projet spécifique ne soit nécessaire pour régler cette question. Cela mérite étude. Permettez que je consulte les juristes avant de vous donner une réponse définitive. Nous allons en tout cas nous mettre au travail, monsieur le sénateur.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'il me soit permis de dire que je ne peux pas en conscience, compte tenu de mon idée de la démocratie, de la République, voter ce texte. En effet, selon moi, la démocratie est, certes dans le respect du bien public, la liberté, l'autonomie de la personne ; c'est le choix volontaire assumé en conscience de ses conséquences.
La démocratie, ce n'est pas l'inscription d'office du citoyen sur une liste, ce n'est pas le fait de subir les conséquences d'une action administrative, ce n'est pas l'engrenage dans une société qui impose ses choix. L'exercice de la citoyenneté ne doit rien avoir d'automatique. Qui dit automaticité dans ce domaine contredit, dans mon esprit, la liberté, le choix, l'acte volontaire.
Puisque la République, c'est la liberté, puisque la démocratie, ce doit être le choix libre, je ne pourrai, si grandes qu'aient été les améliorations apportées à ce texte à la suite des interventions toujours remarquables du rapporteur, M. Christian Bonnet, voter ce texte visant à l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales. Je vous rappellerai d'ailleurs, mes chers collègues, que le mot « élection » vient du latin« eligere », qui signifie non pas imposer, mais choisir.
Je suis donc pour le choix, pour la liberté et non pour l'automaticité.
M. le président. La parole est à M. Duffour.
M. Michel Duffour. Nous avons voté contre l'amendement n° 7 présenté par la commission et adopté par la majorité du Sénat. Nous restons dans le même état d'esprit et sommes persuadés que cette loi doit être appliquée au plus vite. Nous espérons que la sagesse prévaudra en ce domaine.
J'ai été très étonné d'entendre certains collègues argumenter leur vote positif à partir de la question du fichier et manifester une sorte de contentement à l'idée que l'étape pourrait être reculée. (Protestations sur les travées du RPR.)
Pour notre part, gens de symbole, nous considérons ce projet de loin comme important et positif, et nous le voterons donc, mais avec les réserves que j'ai exprimées précédemment.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. A une exception près, tout le monde était d'accord, me semble-t-il, sur le principe de l'inscription d'office. D'ailleurs, on pourrait fort bien admettre que tous les citoyens soient inscrits sur les listes électorales. Mais le droit, ce n'est pas cela, c'est le droit de voter ou de ne pas voter, et nous avons eu un long débat à ce sujet.
Il est vrai que c'est une démarche administrative. On pourrait d'ailleurs demander l'inscription d'office. Par conséquent, n'en faisons pas un débat théorique.
Donc une promesse a été faite ; il faut la tenir. Simplement, monsieur le ministre, nous souhaitons que cette promesse soit vraiment tenue et, pour ce faire, il faut que le système soit réalisable et réaliste.
Or, je suis convaincu - M. le rapporteur l'a dit beaucoup mieux que moi - que les croisements de fichiers ne permettent pas, aujourd'hui, d'avoir une fiabilité suffisante. En effet, les fichiers de la sécurité sociale, notamment, ne sont pas faits pour déterminer la nationalité. Bien souvent, ils ne comportent ni le nom, ni le prénom, ni l'âge des ayants droit.
Face à une impossibilité totale, nous avons donc essayé de trouver un système qui soit fiable. D'où le recours au recensement des jeunes pour le service national, qui donne de façon sûre la nationalité et le domicile.
Puisque l'on s'est fixé un objectif, essayons de l'atteindre, mais faisons-le de manière sérieuse et réaliste. Il ne faut pas faire trop de lois symboliques car, ensuite, lorsqu'elles sont mal appliquées, cela se retourne contre le législateur.
M. Christian Bonnet, rapporteur. Tout à fait !
M. Jean-Jacques Hyest. Voilà, tout simplement, ce que nous avons voulu faire, et voilà pourquoi, avec mon groupe, je voterai le projet de loi tel qu'amendé par la commission.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

10

NOMINATION DE MEMBRES
DE COMMISSIONS

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté une candidature pour la commission des affaires culturelles et une candidature pour la commission des affaires économiques et du Plan.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :
- M. René Rouquet membre de la commission des affaires culturelles en remplacement de M. Henri Weber, démissionnaire ;
- M. Henri Weber membre de la commission des affaires économiques et du Plan en remplacement de M. René Rouquet, démissionnaire.

11

TRANSMISSION DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme du service national.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 426, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion de la République hellénique à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990, à laquelle ont adhéré la République italienne par l'accord signé à Paris le 27 novembre 1990 et le Royaume d'Espagne et la République portugaise par les accords signés à Bonn le 25 juin 1991.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 427, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion de la République d'Autriche à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990, à laquelle ont adhéré la République italienne, le Royaume d'Espagne et la République portugaise, et la République hellénique par les accords signés respectivement le 27 novembre 1990, le 25 juin 1991 et le 6 novembre 1992.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 428, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

12

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION
D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- projet de règlement (CE) du Conseil concernant l'interruption de certaines relations économiques avec l'Angola afin d'amener l'UNITA à remplir les obligations qui lui incombent dans le processus de paix.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-924 et distribuée.

13

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 24 septembre 1997, à quinze heures :
Discussion des conclusions du rapport (n° 413, 1996-1997) de M. Claude Huriet, fait au nom de la commission des affaires sociales, sur la proposition (n° 329, 1996-1997) de MM. Charles Descours, Claude Huriet, Maurice Blin, Guy Cabanel, Henri de Raincourt, Josselin de Rohan, Jacques Bimbenet, Paul Blanc, Mme Annick Bocandé, MM. Louis Boyer, Dominique Leclerc, Bernard Seillier et Jean-Pierre Fourcade relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme.
Avis (n° 418, 1996-1997) de M. Gérard César, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Aucun amendement n'est plus recevable.

Délais limites pour les inscriptions de parole
dans la discussion générale
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes (n° 423, 1996-1997) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 29 septembre 1997, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 29 septembre 1997, à dix-huit heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier (n° 425, 1996-1997) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 1er octobre 1997, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT

établi par le Sénat dans sa séance du mardi 23 septembre 1997 à la suite des conclusions de la conférence des présidents

Mercredi 24 septembre 1997 :

A 15 heures et le soir :
Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de MM. Charles Descours, Claude Huriet et plusieurs de leurs collègues relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 413, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 23 septembre 1997, à 12 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi ;

- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session ordinaire et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mardi 23 septembre 1997.)

Jeudi 25 septembre 1997 :

A 9 h 30 et à 15 heures :
Suite des conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme.

Mardi 30 septembre 1997 :

A 10 heures, à 16 heures et le soir :
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes (n° 423, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 29 septembre 1997, à 18 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;

- à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session ordinaire et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 29 septembre 1997.)

Mercredi 1er octobre 1997 :

A 15 heures et, éventuellement, le soir :
1° Ouverture de la session ordinaire de 1997-1998.

Ordre du jour prioritaire

2° Suite du projet de loi relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes.

Jeudi 2 octobre 1997 :

A 10 heures, à 16 h 30 et, éventuellement, le soir :

Ordre du jour prioritaire

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier (n° 425, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 1er octobre 1997, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)

Mardi 7 octobre 1997 :

A 10 h 30 et à 16 heures :

Ordre du jour prioritaire

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant réforme du service national (n° 426, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 6 octobre 1997, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;

- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé le 23 septembre 1997 et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 6 octobre 1997.)

Mercredi 8 octobre 1997,
à 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite du projet de loi portant réforme du service national ;
A 15 heures :
2° Nomination des membres de la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes du Sénat.
(Les candidatures à cette commission devront être déposées par les groupes au secrétariat du service des commissions le mardi 7 octobre 1997, avant 17 heures.)

Ordre du jour prioritaire

3° Suite du projet de loi portant réforme du service national.

Jeudi 9 octobre 1997 :

A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Projet de loi autorisant la ratification de la convention européenne sur la reconnaissance de la personnalité juridique des organisations internationales non gouvernementales (n° 338, 1996-1997).
2° Projet de loi autorisant la ratification de la convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est (ensemble quatre annexes et deux appendices) (n° 386, 1996-1997).
3° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d'Espagne concernant la construction et l'exploitation de la section internationale d'une ligne ferroviaire à grande vitesse entre la France et l'Espagne (façade méditerranéenne) (n° 201, 1996-1997).
4° Projet de loi autorisant l'approbation du protocole additionnel à la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (ensemble trois déclarations) (n° 371, 1996-1997).
5° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Croatie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 342, 1996-1997).
6° Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kenya en vue d'éviter les doubles impositions en matière de transport aérien en trafic international (n° 341, 1996-1997).
7° Projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales (n° 219, 1996-1997).
8° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, agissant dans le cadre de l'Union européenne, d'une part, et la République de Slovénie, d'autre part (n° 388, 1996-1997).
9° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Lituanie, d'autre part (n° 392, 1996-1997).
10° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République de Lettonie, d'autre part (n° 393, 1996-1997).
11° Projet de loi autorisant la ratification de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Estonie, d'autre part (n° 394, 1996-1997).
(La conférence des présidents a décidé qu'il sera procédé à une discussion générale commune de ces trois projets de loi, n°s 392, 393 et 394.)
A 15 heures :
12° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)

Ordre du jour prioritaire

13° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de loi relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes.

ORDRE DU JOUR PRÉVISIONNEL
(Application de l'article 29, alinéa 3 bis, du règlement)

En application de l'article 29, alinéa 3 bis, du règlement du Sénat, M. le ministre des relations avec le Parlement a présenté à la conférence des présidents du mardi 23 septembre 1997 la communication suivante :
Monsieur le président,
Madame, Messieurs les membres de la conférence des présidents,
J'ai l'honneur de vous communiquer, en application de l'article 29, alinéa 3 bis, du règlement du Sénat, le calendrier prévisionnel de travail du Sénat des six premiers mois de la session et leur période de discussion.
Comme il est d'usage et conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 15 décembre 1995, j'assortirai ce calendrier des réserves relatives au caractère indicatif de cette programmation, qui ne saurait lier le Gouvernement dans l'exercice de ses prérogatives mentionnées à l'article 48, premier alinéa, de la Constitution.

I. - TEXTES DE LOIS SUSCEPTIBLES D'ÊTRE INSCRITS À L'ORDRE DU JOUR PRIORITAIRE DU SÉNAT ET DONT LA DISCUSSION EST SUSCEPTIBLE D'ÊTRE ACHEVÉE AVANT LA FIN DE 1997
Première quinzaine d'octobre :

- projet de loi relatif au développement d'activités pour l'emploi des jeunes ;

- projet de loi portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier ;

- projet de loi portant réforme du service national ;

- troisième lecture du projet de loi d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines.

Deuxième quinzaine d'octobre :
- éventuellement, deuxième lecture du projet de loi organique relatif à l'exercice par les citoyens de l'Union européenne résidant en France, autres que les ressortissants français, du droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales ;

- projet de loi modifiant le code civil pour l'adapter aux stipulations de la convention de La Haye sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux et organiser la publicité du changement de régime matrimonial obtenu par application d'une loi étrangère ;

- lecture de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture du projet de loi relatif à l'inscription d'office des personnes âgées de dix-huit ans sur les listes électorales.

Première quinzaine de novembre :
- projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.

Deuxième quinzaine de novembre, première quinzaine de décembre :
- projet de loi de finances pour 1998 (20 novembre-9 décembre).

Deuxième quinzaine de décembre :
- projet de loi de finances rectificative pour 1997 ;

- éventuellement, diverses conventions.

II. - TEXTES DE LOI SUSCEPTIBLES D'ÊTRE EXAMINÉS
AU SÉNAT SANS ADOPTION DÉFINITIVE AVANT LA FIN DE 1997

Deuxième quinzaine d'octobre :

- projet de loi renforçant la prévention et la répression des atteintes sexuelles commises sur les mineurs et des infractions portant atteinte à la dignité de la personne ;

- projet de loi portant transposition de la directive 94/47/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 1994 concernant la protection des acquéreurs pour certains aspects des contrats portant sur l'acquisition d'un droit d'utilisation à temps partiel de biens immobiliers ;

- proposition de loi portant réforme du mode de vote des budgets régionaux.

Première quinzaine de novembre :
- projet de loi relatif aux obtentions végétales et modifiant le code de la propriété intellectuelle.

Deuxième quinzaine de décembre :
- projet de loi relatif à la nationalité et modifiant le code civil ;

- projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France et à l'asile ;

- éventuellement, diverses conventions.

III. - TEXTES DE LOI SUSCEPTIBLES D'ÊTRE DISCUTÉS AU SÉNAT
EN JANVIER, FÉVRIER ET MARS 1998

Outre les textes évoqués supra dont l'examen pourrait se poursuivre en 1998, le Gouvernement envisage d'inscrire à l'ordre du jour prioritaire du Sénat les textes suivants :
- projets de loi relatifs au cumul des mandats et au renforcement des incompatibilités ;

- projet de loi relatif à la lutte contre les exclusions ;

- projet de loi relatif au droit du licenciement ;

- projet de loi relatif à la création d'une instance indépendante compétente en matière de déontologie des forces de sécurité ;

- projet de loi relatif à la création d'une instance indépendante chargée de se prononcer sur les demandes de levée du secret défense ;

- projet de loi relatif à la partie Législative du livre VII du code rural ;

- deuxième lecture de la proposition de loi relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme ;

- deuxième lecture du projet de loi relatif à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs.

IV. - SONT SUSCEPTIBLES D'ÊTRE ADOPTÉS DÉFINITIVEMENT
À LA FIN DU MOIS DE FÉVRIER 1998 LES TEXTES SUIVANTS

Projet de loi relatif à la nationalité et modifiant le code civil ;
Projet de loi relatif à l'entrée et au séjour des étrangers en France, et à l'asile ;
Proposition de loi portant réforme du mode de vote des budgets régionaux ;
Proposition de loi relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme ;
Projet de loi relatif à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs.
Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'expression de ma haute considération.

Signé : Daniel Vaillant

ORDRE DE CLASSEMENT DES ORATEURS
POUR LE PREMIER DÉBAT ORGANISÉ
PAR LA CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS
(Session ordinaire de 1997-1998)
Tirage au sort effectué le 23 septembre 1997
en application de l'article 29 bis du règlement

1. Groupe du Rassemblement pour la République.
2. Groupe de l'Union centriste.
3. Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
4. Groupe des Républicains et Indépendants.
5. Groupe socialiste.
6. Groupe du Rassemblement démocratique et social européen.
7. Groupe communiste républicain et citoyen.

NOMINATIONS DE MEMBRES
DE COMMISSIONS PERMANENTES

Dans sa séance du mardi 23 septembre 1997, le Sénat a nommé :
- M. René Rouquet membre de la commission des affaires culturelles, en remplacement de M. Henri Weber, démissionnaire ;
- M. Henri Weber membre de la commission des affaires économiques et du Plan, en remplacement de M. René Rouquet, démissionnaire.

ÉLECTION DE SÉNATEURS

En application des articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le président du Sénat a reçu de M. le ministre de l'intérieur une communication de laquelle il résulte qu'à la suite des opérations électorales du 21 septembre 1997, MM. Jean Arthuis, Michel Barnier et Jean-Pierre Raffarin ont été proclamés élus sénateurs respectivement de la Mayenne, de la Savoie et de la Vienne.

MODIFICATIONS AUX LISTES
DES MEMBRES DES GROUPES
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE
(55 membres au lieu de 54)


Ajouter le nom de M. Jean Arthuis.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS
(42 membres au lieu de 41)


Ajouter le nom de M. Jean-Pierre Raffarin.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE
(87 au lieu de 86)


Ajouter le nom de M. Michel Barnier.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Stérilisation volontaire des sujets sains

33. - 19 septembre 1997. - M. Franck Sérusclat interroge M. le secrétaire d'Etat à la santé sur la question de la stérilisation volontaire des sujets sains. Une telle intervention est actuellement impossible à pratiquer en France, une jurisprudence de 1920 condamnant cette pratique comme une mutilation volontaire. Pourtant, il s'agit, pour certaines femmes, du seul moyen de contraception. L'impossibilité découlant de la jurisprudence aboutit alors à des grossesses non désirées et à des interruptions volontaires de grossesse. C'est également le mode de contraception le plus utilisé dans le monde. Le Comité consultatif national d'éthique a indiqué, dans un rapport n° 50 du 3 avril 1996, que trois solutions sont envisageables, sans montrer de préférences pour l'une d'entre elles : soit interdire toute stérilisation volontaire, soit n'en pratiquer que sur proposition du corps médical, soit, enfin, laisser la possibilité à toute personne d'utiliser cette méthode contraceptive après information et temps de réflexion. Il lui demande quelle est sa position sur ce sujet et s'il ne serait pas souhaitable, face à une question à laquelle les réponses de la société apparaissent très divisées, de permettre à chacun de choisir en conscience la solution qui emporte sa faveur.

Prévention des accidents liés aux médicaments

34. - 19 septembre 1997. - M. Franck Sérusclat attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé sur la volonté de mettre en oeuvre une politique globale de prévention en matière d'alcool au volant, mais aussi d'accidents liés aux médicaments. Ces derniers sont nombreux et meurtriers, dans la mesure où les Français figurent parmi les plus grands consommateurs de psychotropes et détiennent le triste record pour les médicaments antidépresseurs. Cette consommation, alliée à celle de l'alcool, entraîne une polytoxicomanie qui a des conséquences importantes sur la vigilance au volant jusqu'à être à l'origine d'accidents mortels. Ne devrait-il pas être envisagé de mener une grande campagne d'information et de prévention, à l'instar de celles réalisées dans les pays nordiques, afin que nos concitoyens soient réellement conscients des dangers qu'ils font courir aux autres, mais également à eux-mêmes ? Par ailleurs, il semble indispensable d'accentuer la formation des médecins qui prescrivent ces médicaments et n'informent pas assez leurs patients des dangers encourus. Enfin, une modification du conditionnement des produits neuroleptiques avec une mise en garde claire et forte pourrait également s'avérer une mesure efficace. Il demande au secrétaire d'Etat à la santé s'il compte prochainement engager une politique dans ces directions, afin de continuer à faire baisser le nombre d'accidents de la circulation.

Réglementation du droit de passage
sur le domaine public routier

35. - 19 septembre 1997. - M. Jean-Paul Delevoye appelle l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur les conditions de mise en oeuvre des articles L. 47 et L. 48 du code des postes et télécommunications par le décret n° 97-683 du 30 mai 1997, en ce qui concerne les droits de passage sur le domaine public routier. Se pose en particulier le problème du montant de la redevance maximale annuelle que les communes seront autorisées à demander aux différents opérateurs à partir du 1er janvier 1998, et des éléments techniques qui ont conduit à la fixation de ce montant, soit 15 centimes par mètre linéaire. En effet, ce montant très faible a été fortement minoré par rapport aux estimations initiales, de l'ordre de 1 franc par mètre linéaire, et cela sans qu'aucune explication n'ait été donnée aux communes. Dans le même temps, le montant des redevances pour l'occupation des autoroutes est resté identique aux estimations initiales, soit 10 francs et 20 francs par mètre linéaire. D'autre part, la notion « d'artère » introduite par le décret en droit français, en matière de calcul de cette redevance, reste insuffisamment précise et sujette à interprétation. Elle mérite donc d'être une bonne fois pour toutes précisée. Enfin, l'instauration d'une autorisation tacite d'occupation du domaine public en l'absence d'une réponse de la collectivité territoriale concernée dans le délai de deux mois, quelle que soit la taille de celle-ci, pose avec acuité le problème de la préservation de l'intégrité du domaine public. Il lui demande donc de bien vouloir lui répondre avec précision sur les deux premiers points et de lui indiquer les perspectives de son action sur le troisième point, ainsi que sur la nécessaire concertation avec les collectivités locales.

Difficultés d'accès aux fonds structurels européens

36. - 19 septembre 1997. - M. Michel Doublet rappelle à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes que les collectivités qui souhaitent mobiliser les financements communautaires doivent faire face à un véritable labyrinthe bureaucratique. En effet, les procédures communautaires conjuguées aux réglementations françaises, représentent un véritable parcours du combattant, d'autant plus que les services instructeurs ont souvent une méconnaissance de l'ensemble du dispositif, et qu'il faut aller glaner çà et là les informations indispensables au montage des dossiers, sachant que les délais de financement sont relativement longs. Il convient de rappeler que dans le budget 1997 de l'Union européenne, les crédits d'engagement des fonds structurels représentent un objectif de dépenses s'élevant à 28,6 milliards d'écus, soit un tiers du budget communautaire. Leur mobilisation passe par des actions dont l'initiative appartient soit à l'Etat membre, soit à la commission. Une fois les fonds répartis, cette manne passe par l'administration nationale. Cette programmation du sommet vers la base induit inévitablement des dysfonctionnements, les difficulté de l'accès aux financements résidant le plus souvent dans l'opacité des conditions d'attribution. Pour prendre un exemple concret, s'agissant du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) pour la réalisation de travaux d'hydraulique agricole et d'aménagement du marais du département de Charente-Maritime, le pourcentage des crédits effectivement perçus par rapport aux crédits demandés et votés est de l'ordre de 52 %. En conséquence, il souhaiterait connaître quelles sont les intentions du Gouvernement pour oeuvrer dans le sens d'une clarification, d'une plus grande souplesse et d'une plus grande rapidité dans l'étude des dossiers par les services de l'Etat, et principalement des directions régionales de l'environnement (DIREN).

Débits de boissons en milieu rural

37. - 19 septembre 1997. - M. Georges Mouly attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au budget sur le problème régulièrement posé de la réglementation des débits de boissons en milieu rural. Compte tenu des nombreuses contraintes actuellement en vigueur, ce transfert se révèle toujours difficile alors que, dans les villages, le café demeure souvent de nos jours le dernier lieu de vie. Il lui demande donc s'il entend réformer cette réglementation ou tout au moins l'assouplir, ce qui permettrait d'aller au-delà des lois de 1987 et 1995.

Situation de l'emploi dans le Mantois

38. - 19 septembre 1997. - M. Dominique Braye appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la situation de l'emploi industriel dans le Mantois, suite à l'annonce d'un plan de restructuration à l'usine Sulzer de Mantes-la-Ville (78) qui conduirait à la suppression de 238 postes, soit 130 à 140 licenciements secs. L'entreprise Sulzer, qui produit des moteurs destinés à la construction navale et aux centrales électriques, subit aujourd'hui la loi de la mondialisation de ce marché et le nouvel actionnaire principal - un groupe finlandais - a décidé une restructuration interne de la production. Cette restructuration intervient dans un contexte local bien particulier. Ces dernières années, le tissu industriel s'y est gravement détérioré : 800 emplois détruits (Porcher, Driver Harris, Seratherm...) contre seulement une centaine de nouveaux emplois créés. Cette situation désastreuse obère lourdement les résultats attendus de la mise en place du Grand Projet urbain dont l'agglomération mantaise est bénéficiaire. Aujourd'hui les efforts acharnés des élus locaux pour créer de nouveaux emplois et les conditions d'un redémarrage économique du Mantois paraissent ainsi largement compromis. Face à cette situation dramatique, il est bien évident que ces mêmes élus locaux se mobilisent et mettent à la disposition du personnel licencié l'ensemble des structures ad hoc qu'ils ont mises en place : mission pour l'insertion socioprofessionnelle du Mantois (MISPROM) et comité d'expansion économique du Mantois. Pourtant il est absolument nécessaire que des mesures exceptionnelles soient prises par le Gouvernement, en particulier grâce à un effort significatif d'aménagement du territoire. En conséquence, il lui demande donc quelles mesures il compte prendre pour rendre rapidement le Mantois éligible à la prime d'aménagement du territoire (PAT), afin de contrebalancer de manière décisive cet effondrement de l'emploi industriel dans l'agglomération, et ainsi de redonner espoir à des acteurs locaux rudement éprouvés par l'ampleur des problèmes socio-économiques du Mantois.