M. le président. M. Georges Mouly appelle l'attention de M. le ministre de la culture sur le problème posé par l'étalement de la loi de programme sur le patrimoine du 31 décembre 1993 et il lui demande quelles sont les possibilités budgétaires ouvertes aujourd'hui, comment la fondation du patrimoine pourra relayer l'effort de l'Etat et quelle est l'ambition du Gouvernement en matière de patrimoine dans les années à venir. (N° 558.)
La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Monsieur le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, c'est vous qui, en l'absence de M. Douste-Blazy, allez me répondre. Avec ma question, nous sommes loin de la fonction publique, mais il est vrai que la réforme de l'Etat et la décentralisation sont un vaste domaine !
C'est pour beaucoup une évidence : le patrimoine de notre pays représente une incontestable richesse.
A mon sens, cette richesse est triple : richesse culturelle, d'abord, bien sûr, puisque témoin d'une civilisation, d'un passé régional ou local ; richesse touristique, ensuite, ce patrimoine attirant chaque année davantage de touristes étrangers, voire français, qui découvrent ou redécouvrent les traces de leur passé, d'où la forte augmentation du tourisme culturel que l'on constate depuis quelques années ; richesse socio-économique, enfin, dans la mesure où l'entretien, la restauration, l'animation procurent du travail à bien des entreprises artisanales, permettant ainsi leur survie, voire leur développement.
Je puis attester de la réalité de la chose puisque le conseil général de mon département conduit depuis vingt-six ans, à l'instigation de l'actuel Président de la République, alors président du conseil général, une politique en faveur des édifices non protégés.
Pour ces raisons, la décision d'étaler la loi de programme sur le patrimoine du 31 décembre 1993 a quelque peu surpris ici ou là, à l'heure où s'ouvraient un certain nombre de chantiers.
Je ne méconnais pas, monsieur le ministre, les rigueurs budgétaires auxquelles nous devons nous résoudre dans l'intérêt général du pays ; mais, chacun en conviendra, une politique en faveur du patrimoine est, par définition, une oeuvre de longue haleine et exige, par conséquent, que l'on ne prenne pas de retard.
Mes questions sont donc les suivantes.
Tout d'abord, quelles sont les possibilités budgétaires exactes offertes aujourd'hui à ceux qui restaurent les monuments publics ou privés ? Il y a, certes, le budget du ministère, mais il y a également d'autres possibilités, qui ne sont pas toujours bien connues.
Ensuite, quelles sont les perspectives que, devant l'intérêt de ce problème, on peut aujourd'hui entrevoir ?
Enfin, quelles sont, du point de vue financier, les possibilités ouvertes par la Fondation du patrimoine ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation. Monsieur le sénateur, je vous prie, tout d'abord, de bien vouloir excuser l'absence de M. Douste-Blazy, qui, retenu ce matin, m'a demandé de le remplacer.
J'en suis très heureux, car, si la Bougogne n'est peut-être pas aussi belle que la Corrèze, elle compte cependant un certain nombre de monuments auxquels nous sommes très attachés.
Vous avez eu raison de rappeler que, cette année, du fait de l'étalement des contrats pluriannuels entre l'Etat et les collectivités territoriales, on enregistre une baisse des crédits de 500 millions de francs, puisque nous sommes passés de 1 600 millions à 1 100 millions de francs.
M. Douste-Blazy avait eu l'occasion d'en discuter avec vous dans cette assemblée, au moment du débat budgétaire. Il avait exprimé son souhait d'éviter toute conséquence préjudiciable à la fois pour le rythme des travaux et pour le secteur économique vivant de la réhabilitation des monuments historiques, les entreprises étant sensibles au niveau des marchés.
Je rappelle au passage que c'est le Gouvernement en place de 1986 à 1988 qui avait lancé cette politique de réhabilitation du patrimoine culturel.
M. Douste-Blazy a donc souhaité que le niveau des engagements, nonobstant l'évolution des inscriptions budgétaires, puisse rester constant.
Il a demandé à ses services de mettre en oeuvre trois mesures : premièrement, clôturer au plus vite les opérations achevées, de manière à récupérer les reliquats de crédits disponibles ; deuxièmement, faire un effort de trésorerie pour gérer de manière plus tendue les flux financiers, en réduisant le fonds de roulement et en dégageant ainsi des crédits susceptibles d'être affectés à des opérations déterminées ; troisièmement, engager plus rapidement les crédits.
En 1996, le pourcentage d'engagement en cours d'année n'était que de 64 %. Si, cette année, il peut atteindre 75 % - c'est le souci de mon collègue - cela compensera sensiblement la baisse des crédits budgétaires inscrits et répondra par là même au souhait des entreprises qui travaillent sur les chantiers concernés.
Par ailleurs, M. Douste-Blazy a obtenu que soient délégués, dès le début de l'année 1997, 80 % des crédits qui sont en gestion déconcentrée. Cela facilitera le travail des services régionaux, qui pourront ainsi engager les opérations.
Enfin, je rappelle que la Fondation du patrimoine, institution privée dont les statuts viennent d'être approuvés par le Conseil d'Etat, a vocation à prendre en charge le patrimoine, extrêmement riche - dans un certain nombre de régions - qui n'est pas protégé au titre des monuments historiques.
Cette prise en charge ne pouvait pas être assurée par les crédits d'Etat puisque ceux-ci assurent déjà le financement d'environ 38 000 monuments classés ou inscrits, ce qui est considérable.
C'est pour travailler sur ce patrimoine à la fois fragile et de grand intérêt que la Fondation du patrimoine est mise en oeuvre. Son action, menée en collaboration avec les collectivités territoriales, sera complémentaire de celle des services de l'Etat.
M. Georges Mouly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Monsieur le ministre, il y a dans votre réponse plusieurs éléments qui me donnent satisfaction.
Clôturer plus vite les opérations est une bonne chose.
Pour les efforts de trésorerie, c'est à voir !
C'est surtout engager plus rapidement les crédits qui est important, ce problème n'étant d'ailleurs pas propre au patrimoine culturel - il se pose aussi, notamment, pour les HLM.
Je note également avec satisfaction que 80 % des crédits sont délégués dès le début de cette année.
Vous le savez, la création de la Fondation du patrimoine a suscité un grand espoir. Je me réjouis que ses efforts portent - on le sait, mais il est bon de le répéter - sur le patrimoine non protégé, qui représente un volume très important du patrimoine de nos provinces, patrimoine auquel les Français sont attachés, bien sûr, et qui n'est pas dénué d'intérêt pour les étrangers.

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