SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE JEAN FAURE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Air et utilisation rationnelle de l'énergie. -
Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire (p.
1
).
Discussion générale : M. Philippe François, rapporteur pour le Sénat de la
commission mixte paritaire ; Mme Corinne Lepage, ministre de
l'environnement.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire (p.
2
)
Vote sur l'ensemble (p.
3
)
M. Jack Ralite.
Adoption du projet de loi.
Suspension et reprise de la séance (p. 4 )
3.
Transposition dans le code de la propriété intellectuelle de directives
européennes. -
Adoption d'un projet de loi en deuxième lecture (p.
5
).
Discussion générale : MM. Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture ;
Pierre Laffitte, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Mme
Danièle Pourtaud, MM. Jack Ralite, Pierre Laffitte.
M. le ministre.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er. - Adoption (p.
6
)
Article 2 (p.
7
)
Amendements n°s 4 et 5 de M. Ralite. - MM. Ralite, le rapporteur, le ministre.
- Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l'article 4 (p. 8 )
Amendement n° 9 de Mme Pourtaud. - Mme Pourtaud, MM. le rapporteur, le ministre, Ralite. - Retrait.
Article 5. - Adoption (p.
9
)
Article 5
bis
(p.
10
)
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Articles 7 à 9, 12, 14 A, 14 et 15. - Adoption (p.
11
)
Article 16 (p.
12
)
Amendement n° 8 de M. Blaizot. - MM. Blaizot, le rapporteur, le ministre. -
Retrait.
Adoption de l'article.
Article 16 bis (p. 13 )
Amendements n°s 6 du Gouvernement et 2 de la commission. - MM. le ministre, le rapporteur, Ralite, Mme Pourtaud. - Adoption de l'amendement n° 6 supprimant l'article, l'amendement n° 2 devenant sans objet.
Article 16 ter (p. 14 )
Amendements n°s 3 de la commission et 7 du Gouvernement. - MM. le rapporteur,
le ministre. - Retrait de l'amendement n° 3 ; adoption de l'amendement n° 7.
Adoption de l'article modifié.
Vote sur l'ensemble (p. 15 )
MM. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles ;
Jack Ralite, le rapporteur, Jacques Machet.
Adoption du projet de loi.
Suspension et reprise de la séance (p. 16 )
4.
Zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d'outre-mer.
- Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire (p.
17
).
Discussion générale : MM. Jean Huchon, rapporteur pour le Sénat de la
commission mixte paritaire ; Jean-Jacques de Peretti, ministre délégué à
l'outre-mer.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire (p.
18
)
Sur l'article 1er (p.
19
)
Amendements n°s 1 rectifié, 2 et 3 rectifié du Gouvernement. - MM. le ministre
délégué, Jean Huchon, rapporteur de la commission des affaires économiques. -
Adoption des trois amendements.
Adoption de l'ensemble du projet de loi.
Suspension et reprise de la séance (p. 20 )
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
5. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 21 ).
APPLICATION DES EXONÉRATIONS
DANS LES ZONES DE REVITALISATION RURALES (p.
22
)
MM. Ambroise Dupont, Jean-Pierre Raffarin, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat.
AVENIR DE L'INDUSTRIE DU RAFFINAGE EN FRANCE (p. 23 )
MM. Robert-Paul Vigouroux, Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
STATUT DES INTERMITTENTS DU SPECTACLE (p. 24 )
MM. Ivan Renar, Philippe Douste-Blazy, ministre de la culture.
NÉCESSITÉ D'UNE RESTRUCTURATION
DE L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE EUROPÉENNE (p.
25
)
MM. Alain Pluchet, Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
INDÉPENDANCE DES MAGISTRATS DU PARQUET (p. 26 )
MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Jacques Toubon, garde des sceaux, ministre de la justice.
ILLETTRISME ET EXCLUSION (p. 27 )
MM. Jacques Machet, François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
DIFFICULTÉS DE L'HÔTELLERIE-RESTAURATION
DANS LE CALVADOS (p.
28
)
M. Philippe de Bourgoing, Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat aux transports.
ÉTAT D'AVANCEMENT DE LA RÉFORME DE L'ÉTAT (p. 29 )
MM. Hilaire Flandre, Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.
INONDATIONS DANS LE MIDI (p. 30 )
MM. Roland Courteau, Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.
POLITIQUE EUROPÉENNE DES TRANSPORTS (p. 31 )
M. Kléber Malécot, Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'Etat aux transports.
MISE AUX NORMES DES ÉQUIPEMENTS DE TRAVAIL
DANS LES COLLÈGES (p.
32
)
MM. Philippe Adnot, François Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Suspension et reprise de la séance (p. 33 )
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
6.
Décès d'un ancien sénateur
(p.
34
).
7.
Modification de l'ordre du jour
(p.
35
).
8.
Traité avec l'Espagne relatif à la coopération transfrontalière. -
Adoption d'un projet de loi (p.
36
).
Discussion générale : MM. Alain Lamassoure, ministre du budget ; Michel
Alloncle, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
9.
Statut général des fonctionnaires de Mayotte et statut de Saint-Barthélemy et
de Saint-Martin. -
Adoption d'un projet de loi en deuxième lecture (p.
37
).
Discussion générale : MM. Jean-Jacques de Peretti, ministre délégué à
l'outre-mer ; François Blaizot, rapporteur de la commission des lois.
Clôture de la discussion générale.
Article 1er. - Adoption (p.
38
)
Article 11 (p.
39
)
Amendements n°s 1 de la commission, 4 de Mme Michaux-Chevry et 5 de M. Faure. - M. le rapporteur, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. le ministre délégué, Jacques Larché, président de la commission des lois ; Michel Dreyfus-Schmidt, Yann Gaillard, Jacques Machet, Philippe de Bourgoing, Emmanuel Hamel. - Retrait des amendements n°s 4 et 5 ; adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article 12 (p. 40 )
Amendement n° 2 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Intitulé du projet de loi (p. 41 )
Amendement n° 3 de la commission. - Adoption de l'amendement modifiant
l'intitulé.
Adoption de l'ensemble du projet de loi.
10.
Ratification d'ordonnances prises en matière pénale pour Mayotte et les
territoires d'outre-mer.
- Adoption d'un projet de loi en deuxième lecture (p.
42
).
Discussion générale : MM. Jean-Jacques de Peretti, ministre délégué à
l'outre-mer ; François Blaizot, en remplacement de M. Jean-Marie Girault,
rapporteur de la commission des lois ; Emmanuel Hamel.
Clôture de la discussion générale.
Articles 1er et 2 quinquies. - Adoption (p. 43 )
Adoption de l'ensemble du projet de loi.
Suspension et reprise de la séance (p. 44 )
11.
Saisine du Conseil constitutionnel
(p.
45
).
12.
Union d'économie sociale du logement. -
Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire (p.
46
).
Discussion générale : MM. Marcel-Pierre Cléach, rapporteur pour le Sénat de la
commission mixte paritaire ; Pierre-André Périssol, ministre délégué au
logement.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire (p. 47 )
Adoption de l'ensemble du projet de loi.
13.
Dépôt d'une proposition de loi
(p.
48
).
14.
Transmission d'une proposition de loi
(p.
49
).
15.
Dépôt d'une proposition d'acte communautaire
(p.
50
).
16.
Dépôt de rapports
(p.
51
).
17.
Ordre du jour
(p.
52
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
AIR ET UTILISATION RATIONNELLE
DE L'ÉNERGIE
Adoption des conclusions
d'une commission mixte paritaire
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 116,
1996-1997) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur
les dispositions restant en discussion du projet de loi sur l'air et
l'utilisation rationnelle de l'énergie.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe François,
rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Monsieur le
président, madame le ministre, mes chers collègues, la commission mixte
paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en
discussion du projet de loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie
s'est réunie au Sénat le mercredi 4 décembre 1996.
Quelques points d'importance restaient en discussion, notamment la gratuité
des transports en commun en cas de pic de pollution, l'obligation d'indiquer le
montant annuel des frais de chauffage et celle d'entretenir les équipements de
chauffage, le statut particulier des réseaux de chaleur, l'utilisation de
carburants enrichis en oxygène par les « flottes captives » appartenant aux
personnes publiques et les exonérations de vignette et de taxe sur les cartes
grises pour les véhicules propres.
Néanmoins, la commission mixte paritaire a pu trouver un accord sur l'ensemble
des points restant en discussion.
Elle a tout d'abord adopté l'article 3 dans la rédaction de l'Assemblée
nationale, qui supprime l'obligation légale relative à la surveillance des
pollens.
La commission a décidé d'adopter l'article 9 dans la rédaction de l'Assemblée
nationale qui prévoit que les plans de protection de l'atmosphère sont élaborés
dès que les valeurs limites risquent d'être dépassées.
La commission a adopté l'article 10 dans la rédaction de l'Assemblée nationale
sous réserve d'une précision rédactionnelle, après qu'il a été rappelé que,
pour le choix des mesures à mettre en oeuvre à l'occasion du plan de protection
de l'atmosphère, il serait fait application du principe défini par la loi du 2
février 1995, qui dispose que sont sélectionnées les « meilleures techniques
disponibles à un coût économiquement acceptable ».
La commission a adopté l'article 11
bis
dans la rédaction de
l'Assemblée nationale.
A l'article 13
bis,
un large débat s'est déroulé sur l'opportunité de
décider de la gratuité des transports en commun en cas de pic de pollution.
La commission s'est prononcée à la majorité pour l'adoption de ce principe,
affirmant ainsi son attachement à une mesure symbolique forte, dont le coût
serait faible, du fait de ses conditions d'application restreintes. Une
minorité de membres s'est opposée à ce dispositif, s'interrogeant sur les
effets pervers d'une telle mesure et sur les charges qui en résulteraient pour
les autorités organisatrices de transport.
A l'article 14, relatif au régime juridique des plans de déplacements urbains
et modifiant plusieurs articles de la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des
transports intérieurs, dite LOTI, la commission a adopté : à l'article 28 de la
LOTI, le premier alinéa dans le texte du Sénat et le dernier dans le texte de
l'Assemblée nationale ; l'article 28-1 de la LOTI dans le texte de l'Assemblée
nationale, qui autorise la classification de la voirie selon les catégories
d'usagers ; l'article 28-2 de la LOTI dans la rédaction du Sénat, qui fixe le
principe d'une révision quinquennale des plans de déplacements urbains ; enfin,
à l'article 28-3 de la LOTI, le texte adopté par l'Assemblée nationale sur le
régime juridique du plan de déplacements urbains - le PDU - mais en retenant le
texte du Sénat pour ce qui concerne le lien entre le PDU et le schéma directeur
de la région d'Ile-de-France.
La commission a ensuite adopté l'article 16 dans la rédaction de l'Assemblée
nationale, puis l'article 17 dans le texte du Sénat, sous réserve de la
nouvelle présentation préconisée par l'Assemblée nationale.
A l'article 19, la commission a adopté une nouvelle rédaction du deuxième
alinéa du paragraphe I, visant expressément les normes de rendement des biens
mobiliers à tous les stades de leur cycle de vie et, par coordination, elle a
supprimé le deuxième alinéa - 1° - de l'article 20.
La commission a adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale le
paragraphe II ainsi que le paragraphe V, relatif à l'obligation d'utiliser des
matériaux en bois dans certaines constructions.
A l'article 20, au cinquième alinéa - 4° -, relatif à l'obligation de fournir
une estimation des frais de chauffage de tout logement ou local à usage
tertiaire à l'occasion de leur vente ou de leur mise en location, la commission
a adopté un dispositif prescrivant l'obligation de fournir une estimation
normalisée du montant annuel des frais de consommation d'énergie desdits
locaux, disposition qui supprime, dans l'habitat ancien notamment, l'obligation
de fournir des factures.
La commission a adopté le sixième alinéa - 5° - dans le texte de l'Assemblée
nationale, qui reprend la rédaction du Sénat sur les dispositions en matière de
construction permettant le choix et le remplacement de tout type d'énergie,
mais en en étendant l'application aux maisons individuelles.
La commission a supprimé le septième alinéa - 5°
bis -
de l'article 20,
après avoir dénoncé la pesateur administrative de la procédure imposant
l'entretien périodique des équipements de chauffage et la disproportion entre
le coût supporté par les ménages et les économies d'énergie attendues.
La commission a adopté dans le texte de l'Assemblée nationale le huitième
alinéa - 6° - relatif à la réduction des émissions de composés organiques
volatils liés au ravitaillement des véhicules dans les stations-service d'un
débit supérieur à 3 000 mètres cubes par an, ce qui permet d'exclure du champ
d'application les petites stations-service situées en zone rurale.
A l'article 20
bis,
relatif au classement prioritaire des réseaux de
chaleur, la commission a adopté le texte dans la rédaction du Sénat, complété
par des dispositions rédactionnelles introduites par l'Assemblée nationale,
après avoir souligné qu'il ne fallait pas aller au-delà du dispositif voté par
le Sénat sous peine d'instaurer un monopole au profit des réseaux de chaleur
sans justification économique et sans contrôle possible sur les prix.
A l'article 21, la commission a adopté l'article L. 8 A du code de la route
dans la rédaction de l'Assemblée nationale.
Elle a adopté ensuite l'article L. 8 B et inséré un article L. 8 C dans une
rédaction commune que les deux rapporteurs avaient élaborée.
Ce texte fixe notamment, à l'article L. 8 B du code de la route, une
obligation d'acquérir des véhicules propres pour les flottes gérées directement
ou indirectement par l'Etat et les collectivités locales ainsi que par les
établissements publics n'appartenant pas au secteur concurrentiel.
L'introduction d'un article L. 8 C permet d'obliger les mêmes autorités à
utiliser pour leurs flottes consacrées au transport public en commun de
voyageurs des carburants spécifiques enrichis en oxygène ; ce dispositif
concrétise enfin un dossier stratégique que les parlementaires, notamment les
sénateurs, soutenaient depuis longtemps.
La commission a également adopté, à l'article 21, le paragraphe IV, ainsi que
l'article 23
bis
dans le texte de l'Assemblée nationale.
A l'issue d'une large discussion sur la relative efficacité des dispositions
d'exonération de taxe sur les cartes grises et de vignette pour encourager le
marché des véhicules peu polluants et sur les risques de transfert de
ressources entre collectivités, la commission a suivi la position défendue par
le Sénat en décidant la suppression des articles 25 et 26.
La commission a ensuite adopté l'article 27
bis
introduit par
l'Assemblée nationale en deuxième lecture, qui autorise l'amortissement
exceptionnel des cyclomoteurs électriques.
Elle a adopté l'article 37
bis
introduit par l'Assemblée nationale
relatif aux compétences du comité régional de l'environnement.
A l'article 39, proposant une modification de l'article 7 de la loi du 19
juillet 1976 sur les installations classées, la commission a adopté, pour le
paragraphe I, une rédaction donnant au ministre de l'environnement la
possibilité, s'il le juge utile, de fixer dans un document unique l'ensemble
des règles s'appliquant aux installations classées et relatives aux rejets dans
tous les milieux naturels.
Elle a en revanche supprimé le paragraphe II, s'opposant ainsi à la validation
rétroactive de l'arrêté du 1er mars 1993 récemment annulé par le Conseil d'État
pour excès de pouvoir.
Enfin, à l'article 40, la commission a adopté le texte dans la rédaction de
l'Assemblée nationale.
Mes chers collègues, je vous propose donc d'adopter les dispositions restant
en discussion que la commission mixte paritaire a ainsi retenues et que je
viens de vous présenter brièvement.
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage,
ministre de l'environnement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, je serai très brève dans mon propos, qui consistera
essentiellement à remercier très vivement la Haute Assemblée, en particulier le
rapporteur, M. Philippe François, du travail qui a été accompli et qui a
permis, dans le cadre de la commission mixte paritaire, de parvenir à un
accord.
Le texte qui a été en définitive adopté en commission mixte paritaire, et dont
M. François vient de rappeler le contenu, constitue un équilibre entre ce que
souhaitait l'Assemblée nationale et ce que souhaitait le Sénat, entre la
contrainte et l'incitation. Il marque une avancée tout à fait considérable de
notre droit pour la protection de la santé de nos concitoyens et pour
l'amélioration de la qualité de l'air.
Ce projet de loi est un texte équilibré dans ses objectifs en ce qui concerne,
d'une part, la santé publique et, d'autre part, l'utilisation rationnelle de
l'énergie, puisque la commission mixte paritaire a bien voulu retenir un
certain nombre de dispositions qui permettront incontestablement d'économiser
de l'énergie et, par là même, de participer à l'effort de tous les Etats de la
planète pour réduire le gaz carbonique.
Ainsi, au terme de ces débats, qui ont été longs, devant votre assemblée comme
devant l'Assemblée nationale, nous disposons désormais d'un texte tout à fait
consistant, qui couvre bien tous les domaines qui devaient l'être et qui
permettra à nos concitoyens, de respirer un air de meilleure qualité.
Permettez-moi encore, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous remercier
pour les apports de votre assemblée au texte originel, apports qui ont permis
de renforcer de manière tout à fait constructive, le texte qui vous avait été
proposé par le Gouvernement.
Je crois que nous avons tous ensemble, en unissant nos efforts, bien travaillé
pour cette oeuvre commune.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement,
lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la
commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur
l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
« TITRE Ier
« SURVEILLANCE, INFORMATION, OBJECTIFS DE QUALITÉ DE L'AIR, SEUILS D'ALERTE ET
VALEURS LIMITES
« Art. 3. - L'Etat assure, avec le concours des collectivités territoriales
dans le respect de leur libre administration et des principes de la
décentralisation, la surveillance de la qualité de l'air et de ses effets sur
la santé et sur l'environnement. Il confie à l'Agence de l'environnement et de
la maîtrise de l'énergie la coordination technique de la surveillance de la
qualité de l'air. Des objectifs de qualité de l'air, des seuils d'alerte et des
valeurs limites sont fixés, après avis du Conseil supérieur d'hygiène publique
de France, en conformité avec ceux définis par l'Union européenne ou, à défaut,
par l'Organisation mondiale de la santé. Ces objectifs, seuils d'alerte et
valeurs limites sont régulièrement réévalués pour prendre en compte les
résultats des études médicales et épidémiologiques.
« Au sens de la présente loi, on entend par :
« - objectifs de qualité, un niveau de concentration de substances polluantes
dans l'atmosphère, fixé sur la base des connaissances scientifiques, dans le
but d'éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs de ces substances
pour la santé humaine ou pour l'environnement, à atteindre dans une période
donnée ;
« - seuils d'alerte, un niveau de concentration de substances polluantes dans
l'atmosphère au-delà duquel une exposition de courte durée présente un risque
pour la santé humaine ou de dégradation de l'environnement à partir duquel des
mesures d'urgence doivent être prises ;
« - valeurs limites, un niveau maximal de concentration de substances
polluantes dans l'atmosphère, fixé sur la base des connaissances scientifiques,
dans le but d'éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs de ces
substances pour la santé humaine ou pour l'environnement.
« Les substances dont le rejet dans l'atmosphère peut contribuer à une
dégradation de la qualité de l'air au regard des objectifs mentionnés au
premier alinéa sont surveillées, notamment par l'observation de l'évolution des
paramètres propres à révéler l'existence d'une telle dégradation. Les
paramètres de santé publique susceptibles d'être affectés par l'évolution de la
qualité de l'air sont également surveillés.
« Un dispositif de surveillance de la qualité de l'air et de ses effets sur la
santé et sur l'environnement sera mis en place au plus tard : pour le 1er
janvier 1997 dans les agglomérations de plus de 250 000 habitants, pour le 1er
janvier 1998 dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants, et pour le
1er janvier 2000 pour l'ensemble du territoire national. Les modalités de
surveillance sont adaptées aux besoins de chaque zone intéressée.
« Un décret fixe les objectifs de qualité de l'air, les seuils d'alerte et les
valeurs limites ainsi que la liste des substances mentionnées au sixième
alinéa. La liste et la carte des communes incluses dans les agglomérations de
plus de 250 000 habitants ainsi que dans les agglomérations comprises entre 100
000 et 250 000 habitants sont annexées à ce décret.
« Dans chaque région, et dans la collectivité territoriale de Corse, l'Etat
confie la mise en oeuvre de cette surveillance à un ou des organismes agréés.
Ceux-ci associent, de façon équilibrée, des représentants de l'Etat et de
l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, des collectivités
territoriales, des représentants des diverses activités contribuant à
l'émission des substances surveillées, des associations agréées de protection
de l'environnement, des associations agréées de consommateurs et, le cas
échéant, faisant partie du même collège que les associations, des personnalités
qualifiées. Les modalités d'application du présent alinéa sont définies par un
décret en Conseil d'Etat.
« Les matériels de mesure de la qualité de l'air et de mesure des rejets de
substances dans l'atmosphère, ainsi que les laboratoires qui effectuent des
analyses et contrôles d'émissions polluantes, sont soumis à agrément de
l'autorité administrative. Celle-ci détermine les méthodes de mesure et les
critères d'emplacement des matériels utilisés.
« Les agréments délivrés en application du présent article peuvent être
retirés lorsque les organismes et laboratoires ainsi que les matériels de
mesure ne satisfont plus aux conditions qui ont conduit à les délivrer.
« TITRE II
« PLANS RÉGIONAUX
POUR LA QUALITÉ DE L'AIR
« TITRE III
« PLANS DE PROTECTION DE L'ATMOSPHÈRE
« Art. 9. - I. - Dans toutes les agglomérations de plus de 250 000 habitants,
ainsi que dans les zones où, dans des conditions précisées par décret en
Conseil d'Etat, les valeurs limites mentionnées à l'article 3 sont dépassées ou
risquent de l'être, le préfet élabore un plan de protection de l'atmosphère,
compatible avec les orientations du plan régional de la qualité de l'air s'il
existe.
« II. - Le projet de plan est, après avis du comité régional de
l'environnement et des conseils départementaux d'hygiène concernés, soumis,
pour avis, aux conseils municipaux et, lorsqu'ils existent, aux organes
délibérants des établissements publics de coopération intercommunale
intéressés. L'avis qui n'est pas donné dans un délai de six mois après
transmission du projet de plan est réputé favorable. Il est ensuite soumis à
enquête publique dans les conditions prévues par la loi n° 83-630 du 12 juillet
1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de
l'environnement.
« III. - Eventuellement modifié pour tenir compte des résultats de l'enquête,
le plan est arrêté par le préfet.
« IV. - Pour les agglomérations de plus de 250 000 habitants, les plans de
protection de l'atmosphère prévus par le présent titre sont arrêtés dans un
délai de dix-huit mois à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente
loi. Pour les zones dans lesquelles est constaté un dépassement des valeurs
limites, ils sont arrêtés dans un délai de dix-huit mois à compter de la date à
laquelle ce dépassement a été constaté.
« V. - Les plans font l'objet d'une évaluation au terme d'une période de cinq
ans et, le cas échéant, sont révisés.
« Art. 10. - Le plan de protection de l'atmosphère a pour objet, dans un délai
qu'il fixe, de ramener à l'intérieur de la zone la concentration en polluants
dans l'atmosphère à un niveau inférieur aux valeurs limites visées à l'article
3, et de définir les modalités de la procédure d'alerte définie à l'article
12.
« Lorsque des circonstances particulières locales liées à la protection des
intérêts définis aux articles premier et 2 le justifient, le plan de protection
de l'atmosphère peut renforcer les objectifs de qualité de l'air mentionnés à
l'article 3 et préciser les orientations permettant de les atteindre. Il peut,
également, renforcer les mesures techniques mentionnées aux articles 19 et
20.
« Le décret mentionné à l'article 11
bis
précise les mesures qui
peuvent être mises en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés par le plan de
protection de l'atmosphère, notamment en ce qui concerne les règles de
fonctionnement et d'exploitation de certaines catégories d'installations,
l'usage des carburants ou combustibles, les conditions d'utilisation des
véhicules ou autres objets mobiliers, l'augmentation de la fréquence des
contrôles des émissions des installations, des véhicules ou autres objets
mobiliers, et l'élargissement de la gamme des substances contrôlées.
« Art. 11
bis.
- Les modalités d'application du présent titre sont
fixées par décret en Conseil d'Etat pris après avis du Conseil supérieur des
installations classées et du Conseil supérieur d'hygiène publique de France.
« TITRE III
BIS
« MESURES D'URGENCE
« Art. 13
bis
. - En cas de mesure de restriction ou de suspension de la
circulation des véhicules décidée par le préfet dans le cadre d'une procédure
d'alerte, l'accès aux réseaux de transport public en commun de voyageurs est
assuré gratuitement.
« TITRE IV
« PLANS DE DÉPLACEMENTS URBAINS
« Art. 14. - L'article 28 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982
d'orientation des transports intérieurs est remplacé par trois articles ainsi
rédigés :
«
Art. 28.
- Le plan de déplacements urbains définit les principes de
l'organisation des transports de personnes et de marchandises, de la
circulation et du stationnement, dans le périmètre de transports urbains. Il
doit être compatible avec les orientations des schémas directeurs et des
schémas de secteur, des directives territoriales d'aménagement définies par le
code de l'urbanisme, ainsi qu'avec le plan régional pour la qualité de l'air
s'il existe. Il couvre l'ensemble du territoire compris à l'intérieur du
périmètre. Il vise à assurer un équilibre durable entre les besoins en matière
de mobilité et de facilité d'accès, d'une part, et la protection de
l'environnement et de la santé, d'autre part. Il a comme objectif un usage
coordonné de tous les modes de déplacements, notamment par une affectation
appropriée de la voirie, ainsi que la promotion des modes les moins polluants
et les moins consommateurs d'énergie. Il précise les mesures d'aménagement et
d'exploitation à mettre en oeuvre. Il est accompagné d'une étude des modalités
de son financement et de la couverture des coûts d'exploitation des mesures
qu'il contient.
« Dans un délai de deux ans à compter de la publication de la loi n° du
sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, l'élaboration d'un plan de
déplacements urbains est obligatoire, dans les périmètres de transports urbains
inclus dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants définies au
huitième alinéa de l'article 3 de la loi n° du précitée ou recoupant
celles-ci.
«
Art. 28-1.
- Les orientations du plan de déplacements urbains portent
sur :
« 1° A la diminution du trafic automobile ;
« 1° Le développement des transports collectifs et des moyens de déplacement
économes et les moins polluants, notamment l'usage de la bicyclette et la
marche à pied ;
« 2° L'aménagement et l'exploitation du réseau principal de voirie
d'agglomération, afin de rendre plus efficace son usage, notamment en
l'affectant aux différents modes de transport et en favorisant la mise en
oeuvre d'actions d'information sur la circulation ;
« 3° L'organisation du stationnement sur le domaine public, sur voirie et
souterrain, notamment la classification des voies selon les catégories
d'usagers admis à y faire stationner leur véhicule, et les conditions de sa
tarification, selon les différentes catégories de véhicules et d'utilisateurs,
en privilégiant les véhicules peu polluants ;
« 4° Le transport et la livraison des marchandises de façon à en réduire les
impacts sur la circulation et l'environnement ;
« 5° L'encouragement pour les entreprises et les collectivités publiques à
favoriser le transport de leur personnel, notamment par l'utilisation des
transports en commun et du covoiturage.
«
Art. 28-2.
- Le plan de déplacements urbains est élaboré ou révisé à
l'initiative de l'autorité compétente pour l'organisation des transports
urbains sur le territoire qu'il couvre. Les services de l'Etat sont associés à
son élaboration. Les représentants des professions et des usagers des
transports, les chambres de commerce et d'industrie et les associations agréées
de protection de l'environnement sont consultés à leur demande sur le projet de
plan.
« Le projet de plan est arrêté par délibération de l'autorité organisatrice
puis, sous un délai de trois mois, soumis pour avis aux conseils municipaux,
généraux et régionaux intéressés ainsi qu'aux préfets. L'avis qui n'est pas
donné dans un délai de trois mois après transmission du projet de plan est
réputé favorable. Le projet, auquel sont annexeés les avis des personnes
publiques consultées, est ensuite soumis à enquête publique dans les conditions
prévues par la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation
des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement.
« Eventuellement modifié pour tenir compte des résultats de l'enquête, le plan
est approuvé par l'organe délibérant de l'autorité organisatrice des
transports.
« Le plan est mis en oeuvre par l'autorité compétente pour l'organisation des
transports urbains. Les décisions prises par les autorités chargées de la
voirie et de la police de la circulation ayant des effets sur les déplacements
dans le périmètre de transports urbains doivent être compatibles ou rendues
compatibles avec le plan.
« Si, dans un délai de trois ans à compter de la publication de la loi n° du
précitée, le plan n'est pas approuvé, le préfet procède à son élaboration
selon les modalités prévues au présent article. Eventuellement modifié pour
tenir compte des résultats de l'enquête publique, le plan est approuvé par le
préfet après délibération de l'autorité organisatrice des transports. La
délibération est réputée prise si elle n'intervient pas dans un délai de trois
mois après transmission du projet de plan.
« Au terme d'une période de cinq ans, le plan fait l'objet d'une évaluation et
est révisé le cas échéant.
«
Art. 28-3.
- Dans la région d'Ile-de-France, le plan de déplacements
urbains est élaboré ou révisé à l'initiative de l'Etat. Ses prescriptions
doivent être compatibles avec les orientations du schéma directeur de la région
d'Ile-de-France prévu par l'article L. 141-1 du code de l'urbanisme.
« Le syndicat des transports parisiens, le conseil régional d'Ile-de-France et
le conseil de Paris sont associés à son élaboration et délibèrent sur le projet
de plan. Le préfet de police et les préfets des départements concernés sont
également associés à son élaboration. Les représentants des professions et des
usagers des transports, les chambres de commerce et d'industrie et les
associations agréées de protection de l'environnement sont consultés à leur
demande sur le projet de plan.
« Le projet de plan est soumis pour avis aux conseils municipaux et généraux
concernés. L'avis qui n'est pas donné dans un délai de six mois après
transmission du projet est réputé favorable. Le projet est ensuite soumis à
enquête publique dans les conditions prévues par la loi n° 83-630 du 12 juillet
1983 précitée. Eventuellement modifié pour tenir compte des résultats de
l'enquête, le plan est arrêté par l'autorité administrative. Les décisions
prises par les autorités chargées de la voirie et de la police de la
circulation ayant des effets sur les déplacements dans le périmètre de
transports urbains doivent être compatibles ou rendues compatibles avec le
plan. »
« Au terme d'une période de cinq ans, le plan fait l'objet d'une évaluation et
est révisé le cas échéant. »
« TITRE V
« URBANISME ET ENVIRONNEMENT
« Art. 16. - L'article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 précitée
est ainsi modifié :
« I. - Au premier alinéa, après les mots : "impératifs de sécurité",
sont insérés les mots : "et de protection de l'environnement", et
après les mots : "des coûts sociaux", sont insérés les mots :
"dont ceux des atteintes à l'environnement".
« II. - Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces schémas directeurs comprennent une analyse globale des effets sur
l'environnement et sur la santé. »
« Art. 17. - I. - Le code de l'urbanisme est ainsi modifié :
« 1° A l'article L. 110, après les mots : "zones urbaines et
rurales", sont insérés les mots : "et de rationaliser la demande de
déplacements" ;
« 2° A l'article L. 121-10, après les mots : "utilisation de
l'espace", sont insérés les mots : "de maîtriser les besoins de
déplacements", et après les mots : "risques technologiques",
sont insérés les mots : "ainsi que les pollutions et nuisances de toute
nature" ;
« 3° Au premier alinéa de l'article L. 122-1, après le mot :
«préservation", la fin de la première phrase est ainsi rédigée : "de
la qualité de l'air, des milieux, sites et paysages naturels ou urbains"
et, dans la deuxième phrase, après les mots : "Ils prennent en
considération", sont insérés les mots : "l'impact des pollutions et
nuisances de toute nature induites par ces orientations ainsi que" ;
« 4° Au 1° de l'article L. 123-1, après les mots : "denrées de qualité
supérieure", sont insérés les mots : "les orientations des plans de
déplacements urbains s'ils existent," ;
« 5°
Supprimé ;
« 6° La deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 311-4 est complétée
par les mots : "et les orientations du plan de déplacements urbains
lorsqu'il existe" ;
« 7° Le quatrième alinéa de l'article L. 421-3 est complété par les mots :
"ou de la réalisation des travaux nécessaires à la desserte des
constructions par des transports collectifs urbains".
« II. - Les dispositions du présent article ne s'appliquent aux documents
d'urbanisme existants que lors de leur mise en révision engagée à l'initiative
de la collectivité locale ou de l'établissement public de coopération
intercommunale concerné.
« TITRE VI
« MESURES TECHNIQUES NATIONALES DE PRÉVENTION DE LA POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE ET
D'UTILISATION RATIONNELLE DE L'ÉNERGIE
« Art. 19. - I. - En vue de réduire la consommation d'énergie et de limiter
les sources d'émission de substances polluantes nocives pour la santé humaine
et l'environnement, des décrets en Conseil d'Etat définissent :
« - les spécifications techniques et les normes de rendement applicables à la
fabrication, à la mise sur le marché, au stockage, à l'utilisation, à
l'entretien et à l'élimination des biens mobiliers autres que les véhicules
visés à l'article 21 ;
« - les spécifications techniques applicables à la construction,
l'utilisation, l'entretien et la démolition des biens immobiliers ;
« - les conditions de contrôle des opérations mentionnées aux deux alinéas
précédents.
« II. - Les décrets mentionnés au I peuvent aussi :
« 1° Imposer aux constructeurs et utilisateurs de contrôler les consommations
d'énergie et les émissions de substances polluantes de leurs biens, à leur
diligence et à leurs frais ;
« 2° Prescrire les conditions de limitation de la publicité ou des campagnes
d'information commerciale relatives à l'énergie ou à des biens consommateurs
d'énergie lorsqu'elles sont de nature à favoriser la consommation d'énergie
dans les cas autres que ceux prévus à l'article premier de la loi n° 74-908 du
29 octobre 1974 relative aux économies d'énergie ;
« 3°
Supprimé.
« III. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles le
fioul domestique, le gazole, l'essence et les supercarburants devront comporter
un taux minimal d'oxygène avant le 1er janvier 2000.
« IV. - Un décret fixe les conditions dans lesquelles les spécifications des
carburants mentionnées au III devront être redéfinies avant la même date.
« V. - Pour répondre aux objectifs de la présente loi, un décret en Conseil
d'Etat fixe les conditions dans lesquelles certaines constructions nouvelles
devront comporter une quantité minimale de matériaux en bois avant le 1er
janvier 2000.
« Art. 20. - Les décrets prévus à l'article 19 fixent les conditions dans
lesquelles les autorités administratives compétentes sont habilitées à :
« 1°
Supprimé ;
« 2° Délivrer et retirer l'agrément des experts ou organismes chargés des
contrôles prévus au 1° du II de l'article 19 ;
« 3° Prescrire l'obligation d'afficher la consommation énergétique de certains
biens sur le lieu de leur vente ou de leur location et préciser les méthodes de
mesure ;
« 4° Prescrire l'obligation de fournir une estimation normalisée du montant
annuel des frais de consommation d'énergie des logements ou locaux à usage
tertiaire proposés à la vente ou à la location et préciser les règles
d'élaboration de cette estimation ;
« 5° Prescrire l'obligation d'équiper les immeubles d'habitation ou à usage
tertiaire dont le permis de construire a été déposé plus de six mois après la
date de publication de la présente loi, de dispositifs permettant le choix et
le remplacement, à tout moment de la vie du bâtiment, de tout type d'énergie
;
« 5°
bis. Supprimé ;
« 6° Prescrire les conditions dans lesquelles seront limitées, à compter du 31
décembre 1998, les émissions de composés organiques volatils liées au
ravitaillement des véhicules dans les stations-service d'un débit supérieur à 3
000 mètres cubes par an.
« Art. 20
bis
. - La loi n° 80-531 du 15 juillet 1980 relative aux
économies d'énergie et à l'utilisation de la chaleur est ainsi modifiée :
« I A. - Dans le premier alinéa de l'article 5, après les mots : "réseaux
de distribution de chaleur", sont insérés les mots : "et de
froid".
« I B. - Dans le premier alinéa du même article, après les mots : "une
utilisation rationnelle des ressources énergétiques", sont insérés les
mots : "et de prévenir, réduire ou supprimer les pollutions atmosphériques
de proximité".
« I. - Le premier alinéa du même article est complété par une phrase ainsi
rédigée :
« Ne peuvent bénéficier d'un classement que les réseaux alimentés
majoritairement par de la chaleur produite à partir d'énergies renouvelables,
d'énergies de récupération ou par cogénération, ainsi que les réseaux de froid.
»
« II. - La première phrase du deuxième alinéa du même article est ainsi
rédigée :
« Ce classement est prononcé par le préfet après enquête publique pour une
durée déterminée qui ne peut excéder trente ans. »
III. - Le troisième alinéa du même article est ainsi rédigé :
« L'arrêté de classement précise la zone de desserte et détermine les
modalités d'application des articles 6 et 7. »
« IV. - Dans le quatrième alinéa du même article, les mots :
"l'administration" sont remplacés par les mots : "le
préfet".
« V. - Le quatrième alinéa de l'article 7 est ainsi rédigé :
« - utilisent des sources d'énergies renouvelables ou de la chaleur de
récupération ; ».
« VI. - La dernière phrase du dernier alinéa du même article est supprimée.
« VII. - Les articles 8 et 9 sont abrogés.
« VII
bis.
- A la fin du premier alinéa de l'article 10, les mots :
"aux articles 7 et 8" sont remplacés par les mots : "à l'article
7".
« VIII. - Dans la dernière phrase de l'article 11, après les mots : "en
vertu de l'article premier", sont insérés les mots : "les formes
et".
« Art. 21. - I. - Le titre III du livre II du code de la route est ainsi
rédigé : "Règles concernant les véhicules eux-mêmes et leurs
équipements".
« II. - Il est inséré, avant l'article L. 8 du code de la route, un article L.
8 A ainsi rédigé :
«
Art. L. 8 A.
- Les véhicules doivent être construits, commercialisés,
exploités, utilisés, entretenus et, le cas échéant, réparés de façon à assurer
la sécurité de tous les usagers de la route et à minimiser la consommation
d'énergie, la création de déchets non valorisables, les émissions de substances
polluantes, notamment de dioxyde de carbone, visées à l'article 2 de la loi n°
... du ... sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie ainsi que les
autres nuisances susceptibles de compromettre la santé publique.
« La consommation énergétique des véhicules et leurs méthodes de mesure
doivent être affichées sur le lieu de leur vente ou de leur location.
« Les véhicules automobiles font l'objet d'une identification fondée sur leur
contribution à la limitation de la pollution atmosphérique. Les véhicules ainsi
identifiés peuvent notamment bénéficier de conditions de circulation et de
stationnement privilégiées.
« Des décrets en Conseil d'Etat déterminent les conditions d'application du
présent article.
« III. - Il est inséré, après l'article L. 8 A du code de la route, un article
L. 8 B et un article L. 8 C ainsi rédigés :
«
Art. L. 8 B.
- Dans un délai de deux ans à compter de la publication
de la loi n° ... du ... précitée, sous réserve des contraintes liées aux
nécessités du service, l'Etat, les établissements publics, les exploitants
publics, les entreprises nationales, pour leurs activités n'appartenant pas au
secteur concurrentiel, ainsi que les collectivités territoriales et leurs
groupements, lorsqu'ils gèrent directement ou indirectement une flotte de plus
de vingt véhicules, acquièrent ou utilisent, lors du renouvellement de leur
parc automobile, dans la proportion minimale de 20 %, des véhicules
fonctionnant à l'énergie électrique, au gaz de pétrole liquéfié ou au gaz
naturel. Cette mesure s'applique à l'ensemble des véhicules desdits parcs
automobiles à l'exception de ceux dont le poids total autorisé en charge excède
3,5 tonnes.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article. »
«
Art. L. 8 C.
- Dans un délai de deux ans à compter de la publication
de la loi n° ... du ... précitée, sous réserve des contraintes liées aux
nécessités du service, l'Etat, les établissements publics, les exploitants
publics, les entreprises nationales, pour leurs activités n'appartenant pas au
secteur concurrentiel, ainsi que les collectivités territoriales et leurs
groupements, lorsqu'ils gèrent directement ou indirectement une flotte de plus
de vingt véhicules à usage de transport public en commun de voyageurs,
utilisent des véhicules fonctionnant à l'aide de carburants dont le taux
minimum d'oxygène a été relevé. Cette mesure s'applique dans les périmètres de
transports urbains des agglomérations de plus de 100 000 habitants définies au
huitième alinéa de l'article 3 de la loi précitée.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article. »
« IV. - L'article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut
de la copropriété des immeubles bâtis, est complété par un alinéa ainsi rédigé
:
« 1° L'installation ou la modification d'un réseau de distribution
d'électricité public destiné à alimenter en courant électrique les emplacements
de stationnement des véhicules, notamment pour permettre la charge des
accumulateurs de véhicules électriques. »
« TITRE VII
« DISPOSITIONS FINANCIÈRES ET FISCALES
« Art 23
bis.
- A compter du 1er janvier 1997, les exploitants de
réseaux de transport public en commun de voyageurs faisant équiper leurs
véhicules de transport en commun, mis en circulation entre le 1er janvier 1991
et le 1er juillet 1996, de systèmes permettant de réduire les émissions
polluantes bénéficient d'un remboursement du coût de cet équipement à hauteur
de la moitié de son prix d'acquisition et dans la limite de 8 000 francs par
véhicule de transport en commun. Les systèmes ouvrant droit à remboursement
doivent être agréés par arrêté conjoint du ministre chargé du budget, du
ministre chargé des transports et du ministre de l'environnement.
« Art. 25 et 26. -
Supprimés.
« Art. 27
bis. -
Il est inséré, après la première phrase du premier
alinéa de l'article 39 AC du code général des impôts, une phrase ainsi rédigée
:
« En outre, les cyclomoteurs acquis à l'état neuf à compter du 1er janvier
1997 qui fonctionnent exclusivement au moyen de l'énergie électrique peuvent
faire l'objet d'un amortissement exceptionnel sur douze mois à compter de la
date de leur première mise en circulation. »
« TITRE VIII
« CONTRÔLES ET SANCTIONS
« TITRE IX
« DISPOSITIONS DIVERSES
« Art. 37
bis. -
L'article 10 de la loi n° 95-101 du 2 février 1995
relative au renforcement de la protection de l'environnement est complété par
un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, le comité étudie les différents aspects de la pollution
atmosphérique et de ses effets sur l'environnement et la santé, avec le
concours des organismes agréés chargés de la surveillance de la qualité de
l'air prévus à l'article 3 de la loi n° ...... du ..........................
sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie. »
« Art. 39. - I. - Au premier alinéa de l'article 7 de la loi n° 76-663 du 19
juillet 1976 précitée, après les mots : "prescriptions techniques",
la fin de la première phrase est ainsi rédigée : "applicables aux
installations soumises aux dispositions du présent titre".
« II. -
Supprimé.
« Art. 40. - L'article L. 2243-3 du code général des collectivités
territoriales est ainsi modifié :
« 1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : "deux
ans" sont remplacés par les mots : "six mois" ;
« 2° Dans le deuxième alinéa et la seconde phrase du dernier alinéa, les mots
: "de deux ans" sont supprimés. »
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Ralite pour explication de vote.
M. Jack Ralite.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous avons,
lors des lectures successives de ce texte devant notre assemblée, exprimé notre
regret de ne pas voir la question de la qualité de l'air portée au rang où elle
mériterait d'être abordée.
Nous avons aussi, comme nombre des membres de notre assemblée, exprimé le
souhait de ne pas alourdir encore les charges des collectivités locales.
La gestion de l'eau, la gestion des déchets représentent autant de défis pour
lesquels les collectivités locales sont bien démunies dans un contexte qui tend
à alourdir toujours davantage les charges qui leur incombent.
Par ailleurs, la prévision des seuils de pollution reste, selon nous,
insuffisante.
Nous regrettons également l'absence d'un volet « transports » significatif.
Ainsi, les implications du développement du rail, la possibilité du transport
combiné, les modes de déplacements urbains alternatifs, sont autant d'éléments
que nous aurions voulu voir abordés de manière plus approfondie.
Aujourd'hui, la pollution atmosphérique est le résultat de multiples facteurs
: aménagements urbains, politique de la ville, éloignement pour des millions de
nos compatriotes des lieux de travail, transports en commun inadaptés ou
insuffisants, abandon des structures ferroviaires.
Enfin, le volet financier consacré à la prévention de la pollution
atmosphérique reste très en deçà de ce qui serait nécessaire. Rien, lors de
l'examen du budget de l'environnement, ne nous a permis d'être assurés que les
moyens seront à la hauteur des enjeux que constitue la qualité de l'air dans
notre pays.
Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen
s'abstiendra lors du vote sur l'ensemble des dispositions qui nous sont
soumises aujourd'hui.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix
l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la
commission mixte paritaire.
M. Jack Ralite.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques
instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures cinquante, est reprise à dix
heures.)
M. le président. La séance est reprise.
3
TRANSPOSITION DANS LE CODE
DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE
DE DIRECTIVES EUROPÉENNES
Adoption d'un projet de loi
en deuxième lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi n°
28 (1996-1997), modifié par l'Assemblée nationale portant transposition dans le
code de la propriété intellectuelle des directives du Conseil des Communautés
européennes n°s 93/83 du 27 septembre 1993 et 93/98 du 29 octobre 1993.
[Rapport n° 146 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur,
mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi transposant dans le code de
la propriété intellectuelle les directives du Conseil des Communautés
européennes n°s 93/83 du 27 septembre 1993 et 93/98 du 29 octobre 1993 revient
en deuxième lecture devant la Haute Assemblée, qui l'avait adopté le 5 mars
dernier.
L'Assemblée nationale n'a que légèrement modifié, le 10 octobre dernier, le
texte que le Sénat avait substantiellement amélioré. Ces améliorations ont
d'ailleurs été maintenues. Je m'en félicite, et je me joins à la commission des
affaires culturelles et à son rapporteur, M. Pierre Laffitte, pour saluer cette
convergence d'analyses.
Dans ces conditions, mon propos liminaire sera bref, et ce d'autant plus que,
sous réserve de quelques nuances rédactionnelles, la communauté de vues entre
les deux assemblées est parfaite en ce qui concerne la transposition proprement
dite des deux directives, qui fait l'objet principal de ce texte.
Je puis donc me borner à évoquer les dispositions diverses qui ont été
ajoutées à ce projet de loi. Je comprends naturellement que M. le rapporteur
regrette, sur le principe, l'ajout de telles dispositions, mais vous me
permettrez de me placer non sur le terrain de la procédure, mais sur celui de
l'opportunité juridique et politique.
A l'article 16
bis,
un amendement de l'Assemblée nationale a étendu le
régime des privilèges dont les auteurs bénéficient en cas de défaillance de
l'exploitant de leurs oeuvres. Le Gouvernement en avait approuvé le
principe.
Il apparaît, à la lecture du rapport de la commission, qui est très détaillé
sur ce point, que cette disposition soulève de sérieuses objections juridiques
et appelle une réflexion complémentaire. C'est la raison pour laquelle le
Gouvernement, sensible à l'analyse de la commission, vous proposera de
supprimer l'article 16
bis
et d'en rester au texte de l'article L. 131-8
du code de la propriété intellectuelle tel que le Sénat l'avait voté en 1957 et
dont l'application n'a pas, à ce jour, soulevé de difficultés
insurmontables.
Une situation inverse se présente à l'article 16
ter,
dont la
commission a souhaité la suppression pour des raisons de principe que je
comprends. Mais cet article de validation a pour objet de permettre l'exercice
effectif d'un droit reconnu par le législateur en 1985.
Force doit rester à la loi, et c'est dans cet esprit que le Gouvernement
souhaite faire obstacle aux procédures sans nombre engagées devant les
tribunaux par les groupes d'intérêts économiques qui n'ont jamais accepté ce
droit reconnu aux artistes.
Aussi vous demanderai-je de maintenir l'article 16
ter.
Le Gouvernement
a présenté un amendement qui, en répondant à l'une des critiques tout à fait
fondées du rapporteur, devrait, je l'espère, vous conduire à le suivre sur ce
point.
Je reviens, en concluant, à l'objet essentiel de notre débat pour vous
demander, monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, de
confirmer votre approbation sur ce projet de loi. Son objet est, vous le savez,
de renforcer l'harmonisation européenne de la protection juridique des
créateurs.
Cette harmonisation est, à mes yeux, indispensable pour assurer l'un des
fondements d'un développement culturel de notre pays dans la diversité et
surtout dans l'indépendance. Face aux pressions qui s'exercent pour une culture
standardisée, pour un « prêt-à-porter » culturel, l'union des pays européens
pour la défense des créateurs apparaît de plus en plus nécessaire.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Laffitte,
rapporteur de la commission des affaires culturelles.
Je voudrais, tout
d'abord, remercier M. le ministre des propos aimables qu'il a tenus sur les
travaux effectués par le Sénat en première lecture et concernant la
transposition dans le code de la propriété intellectuelle des directives
européennes n°s 93/83 du 27 septembre 1993 et 93/98 du 29 octobre 1993.
Je dissocierai, dans ma présentation, le dispositif de transposition et les
quatre articles qui ont été introduits à l'issue de la première lecture.
L'Assemblée nationale a encore amélioré le texte adopté par le Sénat. Comme
nous, elle a voulu éviter de trop calquer le texte sur les directives, dont la
limpidité et la qualité linguistique laissaient à désirer, et de porter
atteinte aux principes ou à la terminologie du droit national de la propriété
littéraire et artistique.
Vous avez apporté votre contribution, monsieur le ministre, et je suis heureux
de constater que l'Assemblée nationale, suivant le rapporteur de la commission
des lois, Mme Nicole Ameline, a partagé notre souci et a poursuivi dans la même
voie que nous en complétant et en améliorant notre travail.
Outre des améliorations et des précisions rédactionnelles, qui sont
judicieuses, l'Assemblée nationale a apporté des améliorations de fond.
Elle a, tout d'abord, simplifié la rédaction des articles relatifs à la
procédure de médiation, prévue pour résoudre un éventuel conflit en matière de
redistribution câblée. Par ailleurs, elle a prévu, conformément à la directive
n° 93/98, l'institution d'un « droit de publication » pour les propriétaires
d'oeuvres anonymes ou collectives qui ne seraient plus protégées. Elle a, en
outre, aménagé les dispositions transitoires applicables aux oeuvres dérivées
d'une oeuvre ou d'un élément protégé rappelés à la protection.
Je vous propose donc, mes chers collègues, au nom de la commission, d'adopter
toutes ces modifications, qu'elles soient de fond ou de forme. J'en viens
maintenant aux dispositions qui pourraient être qualifées de « cavaliers »
puisqu'elles n'ont pas de lien direct avec la transposition des directives.
Elles tendent toutefois à démontrer que se pose le problème de la gestion
collective des droits, problème qui concerne directement la commission qui en a
débattu.
Nous vous proposons d'ailleurs d'entamer une réflexion par le biais soit d'un
groupe de travail, soit d'une mission d'information, en liaison étroite avec
les auteurs et les sociétés de gestion des droits. Nous pourrons ainsi mettre à
plat les nouvelles formes de mise à disposition du public que laissent
entrevoir les nouvelles technologies en matière d'information et de
communication et qui, pour certaines d'entre elles, commencent à apparaître, et
les nouvelles formes d'oeuvres de type multimédia, tels les CD-ROM.
Compte tenu de la complexité de la question - et, sur ce point, je partage
l'opinion de M. le ministre - il est urgent non pas de légiférer, mais de
réfléchir sur les initiatives que nous pouvons prendre dans un futur proche,
tant à l'échelon national qu'à l'échelon communautaire afin de parvenir à une
harmonisation qui ne soit pas préjudiciable à notre conception du droit
d'auteur. Il s'agit d'une impérieuse nécessité car il existe, dans certains
cas, des risques de délocalisation de certaines productions. La France mais
aussi l'Europe ont exprimé leur ferme volonté de maintenir ces créations
intellectuelles, qui sont des oeuvres de l'esprit, sur leurs territoires.
Nous devons pouvoir aborder à loisir ce problème et pas forcément à l'occasion
d'amendements de circonstance. C'est pourquoi j'approuve les amendements
déposés par le Gouvernement aux articles 16
bis
et 16
ter
.
Monsieur le ministre, j'ai une question à vous poser à propos de l'article 16,
qui permet aux commissaires-priseurs de reproduire en franchise de droits des
oeuvres d'art dans les catalogues mis à la disposition du public avant les
ventes aux enchères. L'Assemblée nationale a amélioré la rédaction de cet
article, dont le champ d'application devrait se restreindre, à partir du 1er
janvier 1998, aux ventes judiciaires.
Je vous proposerai d'adopter l'article 16 dans le texte de l'Assemblée
nationale. Mais nous vous demandons, monsieur le ministre, de nous confirmer
que ces catalogues ne pourront être vendus qu'à prix coûtant. Il s'agit, en ce
domaine, d'une question de principe.
L'article 5
bis
traite d'un sujet important puisqu'il s'agit du délai
de prescription de l'action des titulaires de droits à l'égard des sociétés de
perception et de répartition des droits.
Le texte de l'Assemblée nationale propose de fixer un délai de prescription de
dix ans, ce qui paraît raisonnable, et d'élargir l'obligation d'affectation des
droits non répartis à des actions d'intérêt collectif, c'est-à-dire à l'aide à
la création, à la diffusion du spectacle vivant, à la formation des artistes.
Il vise, enfin, à améliorer l'information sur les actions d'intérêt collectif
soutenues par les sociétés de perception et de répartition des droits.
La commission vous proposera de réécrire cet article, qui, ayant été rédigé un
peu rapidement, comporte certaines ambiguïtés. Cependant, elle a considéré que
le système proposé était équilibré et en a donc accepté le principe.
Cela dit, je regrette, là aussi, que cette question n'ait pas fait l'objet
d'un examen plus approfondi. Ce type d'examen fait d'ailleurs partie des
suggestions que nous essayerons de mettre en place, avec l'appui de vos
services, je l'espère, monsieur le ministre, et en tout cas dans le cadre d'une
concertation aussi large que possible sur ces problèmes tout à fait
essentiels.
Je constate, en outre, que la totalité des amendements que nous examinerons
concernent non pas l'ensemble du texte, mais précisément ce problème des
droits, auquel le Sénat est spécialement attentif, cette question étant
importante à la fois sur le plan culturel et sur le plan économique.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires culturelles
vous propose, mes chers collègues, d'adopter, en deuxième lecture, le projet de
loi qui nous est soumis.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en première
lecture, je m'étais exprimée longuement sur notre attachement à la protection
des droits d'auteur et des droits voisins dans notre système français fondé non
pas sur le droit patrimonial mais sur le droit moral. L'adhésion du groupe
socialiste au projet de loi est justifiée par ce souci.
Nous souhaitons, par ailleurs, la construction d'un dispositif juridique à un
niveau transnational, en l'occurrence européen.
Comme vous l'avez dit voilà quelques minutes, monsieur le ministre, le texte
qui nous revient de l'Assemblée nationale n'est pas très différent de celui que
nous avons voté en première lecture.
Je ne dirai donc aujourd'hui que quelques mots sur le sujet qui nous retient
pour le replacer dans un contexte plus général et dans des perspectives
d'avenir.
L'existence d'un arsenal juridique européen devient effectivement une
nécessité première, compte tenu des enjeux actuels liés à l'apparition des
nouvelles technologies qui permettront la transmission de données et
d'informations sans limitation de frontières.
Tout d'abord, je tiens à signaler qu'en France le droit de la propriété
intellectuelle et artistique et le droit de l'audiovisuel sont séparés de façon
trop hermétique, alors que les interférences entre ces deux secteurs se
multiplient.
Aucune logique commune ne semble avoir guidé le législateur dans l'élaboration
des dispositifs s'appliquant à ces deux secteurs. Il existe un code de la
propriété intellectuelle depuis quelques années et nous aurons bientôt un code
de la communication. N'aurait-on pas pu envisager un livre regroupant la
communication, au sens propre actuel et futur du terme, et les droits
d'auteurs, appelés également à évoluer ? En effet, ces deux matières présentent
davantage de similitudes, me semble-t-il, que le droit de l'audiovisuel avec le
statut de la Bibliothèque nationale de France et le prix du livre, qui
figureront pourtant dans le même code !
Mes propos sont inspirés par les craintes que je nourris quant au vide
juridique qui entoure, à l'heure actuelle, l'utilisation du multimédia et des
nouvelles technologies, notamment par rapport au respect des droits
d'auteur.
Je sais que le projet de loi dont nous débattons aujourd'hui a pour unique
objet de transposer deux directives. Cela constitue, certes, une mise à jour de
notre législation. Mais si nous nous acquittons ainsi de nos obligations
européennes, nous n'avons en aucun cas fait progresser le droit des nouvelles
technologies.
Je prendrai un exemple pour illustrer mon propos : il est maintenant possible
de consulter, par le biais d'Internet, une multitude d'ouvrages chez soi et,
ensuite, d'imprimer tout le contenu des publications consultées. Dans ce cas,
comment se trouvent respectés les droits d'auteur ? Il serait souhaitable, à
l'heure où l'on inaugure la bibliothèque François-Mitterrand, d'étudier cette
question.
Comme je le disais précédemment, les deux matières étant intimement liées,
nous reviendrons sans doute d'ici peu sur ces questions, lors du débat sur le
projet de loi relatif à audiovisuel. Je souhaiterais savoir si telle est votre
intention, monsieur le ministre.
Je constate que, partout, le sujet est à l'ordre du jour : protection des
utilisateurs, protection des droits d'auteur et voisins ; le monde virtuel des
signaux électroniques ne doit pas échapper à toute réglementation.
Ainsi, l'Allemagne légifère sur le multimédia afin de protéger efficacement
les utilisateurs. La conférence diplomatique de l'Organisation mondiale de la
propriété intellectuelle l'OMPI, qui s'est tenue au début du mois de décembre
dernier, portait sur l'actualisation des anciennes conventions protégeant le
droit d'auteur, notamment afin d'étendre la notion de propriété intellectuelle
aux différents signes électroniques qui se traduisent sous les formes les plus
variées sur les terminaux d'ordinateurs. Les Etats-Unis ont fait pression afin
de ne pas être soumis à une réglementation trop contraignante. Les conventions
actuelles n'appréhendent toujours que le livre et le cinéma. Notre droit est à
peine plus avancé.
Nous devons très vite réfléchir pour que le nouveau monde du multimédia tienne
compte du droit des auteurs, de celui des interprètes, des diffuseurs ou des
distributeurs, des producteurs et des consommateurs. Il n'est pas certain que
nous devrions adopter une législation spécifique plutôt que d'étendre le champ
d'application de la législation actuelle. En tout état de cause, les choses ne
peuvent rester en l'état.
Pour revenir au texte qui nous est soumis, le groupe socialiste souhaiterait
que soit mieux protégé le droit des producteurs de phonogrammes sur les
nouveaux services. Il faudrait pour cela les placer hors du champ d'application
de la licence légale, lors de la diffusion de leurs programmes musicaux par des
bouquets satellitaires pour des publics déterminés.
Nous espérons que, même s'il s'agit d'un cavalier, le Sénat adoptera
l'amendement que nous avons déposé et qui a pour objet de combler un vide
juridique et de garantir le respect des droits voisins dans le cadre du
développement des nouvelles technologies.
Monsieur le ministre, nous espérons que nous serons entendus de la même façon
que vous l'êtes par nous, puisque le groupe socialiste votera le texte amendé
par la commission des affaires culturelles du Sénat.
M. le président.
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de la
première lecture de ce projet de loi, j'ai voulu, au travers d'une abstention,
marquer notre volonté de mettre en état d'alerte celles et ceux qui sont
attachés au droit d'auteur et aux droits voisins. Je déclarais : « Une sorte de
goutte-à-goutte est en train de se distiller ; si l'on ne met pas en garde
contre les gouttes, un jour, on se retrouvera noyé. »
Aujourd'hui, le texte nous revient pour une deuxième lecture « avec quelques
modifications. Mais, surtout, notre discussion a lieu dans un contexte de
destabilisation du droit d'auteur : le goutte-à-goutte ressemble à de la
pluie.
Il me suffit d'évoquer ce qui s'est passé à Strasbourg, notamment au travers
du contenu de la directive « télévision sans frontière », la façon dont se
déroule, en ce moment même, la conférence de l'OMPI, à Genève, qui se clôture
demain, ce qui a eu lieu à Singapour, lors de la réunion de l'Organisation
mondiale du commerce, l'OMC, enfin, les négociations de l'OCDE relatives à un
accord multilatéral sur les investissements.
Dans les quatre cas, le droit d'auteur et le droit voisin sont concernés.
Soyons précis : dans tous ces cas, on perçoit bien la stratégie des Etats-Unis,
qui n'ont pas fait leur deuil de « l'exception culturelle » issue des
négociations du GATT ; Jack Valenti, le grand patron des
majors compagnies
du cinéma a déclaré : « le droit moral est un bacille qui doit être
combattu comme une menace à la parfaite existence des compagnies de cinéma
».
Permettez-moi, au risque d'être un peu long, de déplisser ces dossiers
succintement, mais rigoureusement.
Tout d'abord, à Strasbourg, à la Communauté européenne, j'ai eu connaissance
d'un document américain sur la stratégie globale des Etats-Unis dans
l'audiovisuel. Cette stratégie s'articule autour de sept démarches principales
; j'en retiendrai trois.
La première tend à éviter un renforcement des mesures restrictives, comme les
quotas, et à veiller à ce que ces mesures ne s'étendent pas aux nouveaux
services de communication. On a vu le résultat ! Ce point a été acquis par les
Américains à l'assemblée de Strasbourg, malgré un vote de 65 % des
parlementaires en faveur de la position des artistes.
La deuxième démarche a pour objet de lier les questions audiovisuelles et le
développement des nouveaux services de communication et de télécommunication
dans le sens de la déréglementation. Autrement dit, sous le prétexte que les
technologies vont fusionner, il faudrait assurer la convergence des régimes
applicables à l'audiovisuel et aux télécommunications.
On aurait pu, d'ailleurs, poser le problème inversement. Les Américains disent
: les télécommunications se dérégulent, il faut déréguler l'audiovisuel. Et
pourquoi pas : l'audivisuel est régulé, il faut donc de nouveau réguler les
télécommunications ? Il y a donc un danger !
Jack Valenti a dit récemment : « Satellites, fibres optiques, numérisation
créent une nouvelle situation donnant au consommateur le choix ultime des
programmes qu'il souhaite voir ; il est donc raisonnable de suivre une
politique de dérégulation. »
J'ajouterai que, malheureusement, la direction générale DG XIII de la
Commission européenne a la même approche. Elle a fait réaliser une étude par un
consultant anglais - KPMG - sur le thème « convergence entre audiovisuel et
télécommunications ».
Je pourrais encore dire que la DG XIII a proposé un livre vert développant ce
projet de convergence de l'audiovisuel et des télécommunications et invitant à
en tirer les conséquences pour les systèmes de régulation existant dans l'Union
européenne.
Bien évidemment, cette soumission au marché, qui signifierait qu'une oeuvre
audiovisuelle est de même nature qu'un fax ou un appel téléphonique, est une
mise en cause du droit d'auteur à la française et des droits voisins.
On comprend la troisième démarche de la stratégie américaine qui consiste à
éviter des drames et des querelles inutiles sur les questions culturelles.
Je préfère, quant à moi, ce que déclarait au Parlement de Strasbourg, voilà
quelques années, un représentant de l'association des réalisateurs américains,
le cinéaste Elliot Silverstein : « Renforcez clairement vos lois sans
compromission, en restant fidèles à vos traditions culturelles qui placent les
droits humains au-dessus des droits de propriété ». Le droit moral, le droit
d'auteur, les droits voisins ne sont pas une querelle culturelle ; ils sont le
fond même de la culture, au travers des oeuvres et de leurs auteurs, de leurs
interprètes, qu'ils protègent.
Cela est d'autant plus nécessaire que les auteurs sont souvent présentement
mis en cause, au point qu'un écrivain français, Christian Prigent a pu écrire
le livre intitulé
A quoi bon encore des poètes ?
J'y lis ceci : « Questions : quel sens (et en particulier quel sens
"social") a encore le fait d'écrire de la poésie ? A quoi servent ces
formes inouïes ? Que signifie cette obstination apparemment hors champ ? De
quoi témoigne-t-elle ? Qu'en attendre ? Quel usage en faire ? Ou, plus
simplement : pourquoi y a-t-il quand même ça, ça plutôt que rien (plutôt que
seulement le tout-venant qui occupe les boutiques et les tréteaux médiatiques)
? Voilà des questions grossières (forcément), déplacées (comme toujours),
urgentes (plus que jamais). Défi : tenter de les recadrer, voire d'y proposer
quelques réponses minimales. »
Face à cela, il me paraît nécessaire d'emprunter cette citation à l'ancien
avocat de Touvier, distingué par le maire Front national de Toulon, qui
bénéficie de la complicité du préfet de la République : « Notre siècle, en fait
de catastrophes, n'a pas seulement connu la monstruosité de la guerre de 14,
Hitler et Staline, Hiroshima et Nagasaki, Auschwitz et les boucheries de
l'épuration. Il a connu aussi le surréalisme...
« ... les tyrans, Breton, Eluard, Desnos, Prévert et les bandes de prétentieux
dont je n'ai pas envie de citer les noms mais dont les livres de littérature
sont remplis - René Char, etc. - s'intitulaient "poètes". Les
sectaires de la non-poésie avaient conquis les places, les honneurs, les
maisons d'édition, les décorations, tout l'appareil bourgeois et financier qui
se donnait à eux d'autant plus qu'ils les flagellaient. »
On voit bien que si l'attaque est économique, elle concerne aussi le sens.
Voyons maintenant la deuxième mise en cause du droit d'auteur.
Jusqu'à demain se tient la réunion de l'OMPI à Genève, afin d'examiner
différentes propositions d'adaptation d'instruments internationaux en matière
de droit d'auteur.
Au cours des travaux, les fournisseurs américains de sites Internet ainsi que
des grandes sociétés de télécommunications américaines ont déclaré s'être
adressés au président Clinton pour dire qu'ils n'ont aucun moyen de connaître
le contenu des « paquets de signaux numériques véhiculés par millions sur leurs
réseaux » et récusent l'un des articles soumis à la conférence et visant à
étendre la notion d'auteur aux « reproductions d'oeuvres littéraires et
artistiques, même si ces reproductions sont de caractère éphémère ou accessoire
».
Qu'il y ait un problème technique, après tout c'est possible, mais il ne sera
pas durable. On résout toujours ces questions. Mais surtout, à chaque fois
qu'il y a une avancée technologique, on nous « fait le coup », avec le secret
désir de faire brèche, fissure dans la régulation, dans le droit d'auteur et
dans les droits voisins. La technologie n'est plus utilisée comme une
technique, mais devient alors idéologie.
En vérité, il y a actuellement des forces économiques et, surtout, financières
qui tentent de réduire
a minima
les droits existants et à supprimer tous
droits sur le futur.
La réunion de l'OMC qui a eu lieu à Singapour la semaine dernière, a déjà
commencé la déconstruction, en sauvegardant, c'est vrai, les droits sur les
CD-ROM - droits minima pour aujourd'hui - et en les annulant sur les fibres
optiques - dérégulation maximale pour l'avenir - sous la houlette d'une
personnalité bien connue pour sa frénésie déréglementaire, M. Brittan. Ce
dernier a déclaré qu'il s'agissait là du « plus important accord commercial
conclu depuis l'
Uruguay Round
en 1994 ». Je sais que le Gouvernement
français s'est battu, mais en fin de parcours, M. Galland, ministre délégué aux
finances et au commerce extérieur, a accepté la dérégulation sur les fibres
optiques.
De nombreux industriels se sont réunis au sein d'un groupement d'intérêt
public - GIP - qui estime que « l'économie de marché est le modèle de choix
pour Internet ».
Comme Octavio Paz a raison ! « Le marché est efficace, soit, mais il n'a ni
conscience ni miséricorde. » Comme le juriste spécialiste des droits d'auteur
André Lucas a raison : « Le droit moral est plus que jamais nécessaire pour
bien marquer qu'au-delà de la technique et des enjeux économiques les oeuvres
sont créées par des hommes. » Comme Georges Balandier a raison de nous appeler
à « civiliser les nouveaux mondes issus de l'oeuvre civilisatrice ».
Nous avons là, chez ces trois hommes, des pensées qui peuvent et doivent
nourrir une volonté politique aujourd'hui trop molle. Je ressens ici ou là de
l'impuissance démissionnaire. Or, nous sommes comme à un tournant qui a besoin
d'une nouvelle intelligence, de sauts de pensées, de se souvenir de
l'avenir.
Je viens de prendre connaissance d'un petit ouvrage - petit par son volume -
d'Anne Cauquelin intitulé
Petit traité d'art contemporain.
On n'est pas
obligé d'adhérer à l'intégralité de son propos. Cependant, elle a le grand
mérite de faire réfléchir. Elle écrit : « L'art contemporain semble craindre
d'être mis en boîte, cherche à s'évader des catégories, déménage sans cesse de
lieu, déjoue les ruses de la raison, les attentes d'un public et ce qu'on peut
dire de lui. » Elle aborde la question des « machines à communiquer considérées
comme un des beaux-arts ». Je sens intuitivement qu'il y a une réflexion en
profondeur à mener. Le projet Métafort à Aubervilliers sur les nouvelles
technologies vues d'un point de vue artistique, technologique et social - une
fertilisation croisée ! - pose précisément ces questions et je ne cesserai de
revenir sur ce projet d'intérêt national. Il faut l'aider, monsieur le
ministre, au niveau suffisant, sauf à faire perdre des places à notre pays dans
ce secteur décisif.
Eh bien, en complicité avec ce projet, je vais, avec les états généraux de la
culture, prendre une initiative nationale : réunir des artistes, des juristes,
des chercheurs, des industriels - producteurs afin d'appréhender ces mutations
technologiques et de tendre à les maîtriser sans toucher aux droits de l'homme.
Et le droit d'auteur est centralement un droit de l'homme, un droit de
civilisation ! Oui, il faut une volonté politique plus informée du nouveau,
plus forte alors, plus constructive, mais accompagnant bien sûr une démarche de
maintien de ce droit d'auteur que j'ai appelé « de civilisation ».
A ce propos, j'aborde maintenant le quatrième front, si j'ose dire, à savoir
les négociations qui se déroulent à l'OCDE en vue d'un accord multilatéral
d'investissement qui concerne les investissements étrangers dans chaque pays.
Jusqu'à présent, les accords étaient bilatéraux, mais en passant à la
multilatéralité se pose précisément la question de l'identification de la
propriété intellectuelle à l'investissement, avec pour conséquence que des
clauses comme celle de « la nation la plus favorisée » ou celle du « traitement
national » seraient applicables à tout investisseur du pays concerné. Cela veut
dire, par exemple, que le fonds de soutien à l'industrie cinématographique
serait ouvert aux producteurs américains, diminuant ainsi le financement des
films français d'une importante partie et ajoutant au contraire au financement
déjà si copieux des films américains. Cela veut dire aussi que les Américains
auraient accès au plan média, pourtant déjà si parcimonieux.
Sans doute le Gouvernement français a-t-il déposé une motion sur l'exception
culturelle, mais - je le dis parce que c'est la vérité - que d'interventions
pour accéder à la transparence, pour obtenir cette motion ! Que diantre ! si le
Gouvernement veut gagner, qu'il n'oublie pas cette remarque de Marc Bloch : «
Notre peuple mérite qu'on se fie à lui et qu'on le mette dans la confidence. »
Sur cette question, il n'y aura pas de succès si ce n'est pas l'affaire des
citoyens eux-mêmes : artistes d'abord, et leurs partenaires de plaisir
ensuite.
Ainsi, l'offensive est générale et concerne le droit d'auteur en tentant de
substituer, à travers ces quatre démarches, au droit moral à la française le
copyright
à l'américaine, c'est-à-dire au droit d'une personne ayant
créé le droit d'un industriel-producteur libéré de son auteur - sans qui,
pourtant, il ne produirait rien ! - par un versement forfaitaire. C'est le
volet civilisation que j'évoque là. Mais à tous les matamores des intérêts
économiques qui veulent tout brader de l'homme et de la femme au nom d'un
pragmatisme monétaire, je dirai : de combien était le déficit images Europe-USA
en 1988 ? Il s'élevait à 2,1 milliards de dollars. De combien est ce déficit en
1995, alors que les intérêts économiques ont régné sans partage ? Il se monte à
6,3 milliards de dollars. Les comptables supérieurs, suffisants, narcissiques,
totalitaires, fatalistes, sont pris la main dans le gousset. Ils veulent
toucher aux droits des créateurs, ils ne protègent même pas les intérêts
économiques du pays !
Si j'ai évoqué les droits voisins, c'est parce qu'ils sont concernés et aussi
parce que je ne peux pas en parler - il s'agit des artistes-interprètes, qu'ils
soient musiciens, techniciens, comédiens ou danseurs - sans dire d'un mot ma
totale solidarité avec ces femmes et ces hommes qui manifestent encore
aujourd'hui pour le maintien des annexes 8 et 10 de l'UNEDIC.
Je sais, monsieur le ministre, que vous avez obtenu, les rejoignant, qu'une
négociation s'engage en vue d'une prolongation de ces annexes - qui n'est pas
encore signée d'ailleurs - ce qui, je crois, est proche. Je sais que vous avez
publié hier un communiqué avec votre collègue M. Barrot, et c'est un pas en
avant que j'apprécie. Je sais aussi que vous allez nommer un modérateur - on ne
dit plus médiateur, je ne sais pas pourquoi, mais peut-être allez-vous nous
l'expliquer. Toutefois, une chose m'inquiète un peu dans le communiqué - je
sais que les syndicats y sont sensibles ; je ne m'identifie pas à eux, mais je
les écoute profondément. En effet, à la fin de ce communiqué, vous réaffirmez
avec M. Barrot, et j'imagine que vous y avez joué un rôle, que le système doit
garder sa spécificité, mais il n'y a pas les mots : « dans l'UNEDIC ». Or, vous
savez que M. Gandois voudrait bien vous « repasser le bébé », et, une fois dans
les crédits publics, cela perdrait d'abord son aspect professionnel mais
risquerait aussi, un jour d'économies... nécessaires, de s'amenuiser. Il
s'agit, là aussi, d'une bataille tout à fait importante. Cela rétrécirait, si
M. Gandois l'emportait, le « vivier » de la famille artistique et technicienne
de la création et de la production culturelles.
Allons donc ! Intraitabilité sur le droit moral et sur les droits voisins en
France, en Europe, à l'OMPI, à l'OMC et à l'OCDE ! Initiatives pour faire se
rencontrer artistes et nouvelles technologies ! Audace pour créer une grande
industrie audiovisuelle européenne car, en vérité, sans industrie productrice
et créatrice, nos défenses légitimes risqueraient de devenir vaines. Nous avons
besoin du couple résistance-construction.
Tel est l'environnement du projet dont nous discutons aujourd'hui. Si je ne
suis pas entré concrètement dans ce projet, je l'ai, en vérité, traité sur le
fond parce qu'il n'est pas « découplable » de l'environnement préoccupant et
grave que j'ai examiné. Mais le projet lui-même, par moment, laisse passer,
selon moi, de petites touches allant dans le même sens que l'environnement.
Nous avons déposé deux amendements. L'un vise à faire part de notre désaccord
avec la phrase par laquelle on permet à un auteur de céder ses droits a une
société de communication audiovisuelle. Bien évidemment, étant donné ce
qu'elles sont et comment elles travaillent, c'est l'éclatement de ce qui existe
actuellement et une avance possible pour le
copyright
. Nous avons
également présenté un autre amendement visant a ce que l'agrément soit
obligatoire pour les sociétés d'auteurs comme pour les sociétés d'auteurs
européennes nationales.
Je me souviens d'André Malraux disant : « Il n'y a d'hypothèse de culture
spécifiquement américaine opposée à la nôtre que dans la mesure précise de la
démission de l'Europe ». « Nous sommes la première génération d'héritiers de la
terre entière ». « Que s'agit-il de faire ? Le maximum de liberté ! »
J'ajoute, et je conclus par ces mots : oui, je sonne, d'une certaine manière,
le tocsin, mais pas seulement. Je me préoccupe dans un même mouvement des
perspectives potentielles, ouvertes par les mutations technologiques, avec
l'objectif d'élargir les libertés artistiques et de dégager de nouvelles
possibilités d'émancipation générale.
C'est le sens de la réalité ! C'est le sens aussi et surtout des probabilités,
et chacune, chacun devrait avoir à coeur d'en être une problématique vivante.
J'ai parlé, au début de mon exposé, d'un goutte-à-goutte, puis d'une pluie.
Cela me rappelle la phrase de Walter Benjamin : « Que cela suive ainsi son
cours, voilà la catastrophe. »
(Mme Pourtaud applaudit.)
M. le président.
La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais
tout d'abord féliciter M. Ralite de son vibrant exposé. J'ai d'ailleurs
constaté qu'il s'adressait non seulement au Gouvernement français, mais aussi à
l'Europe, et je salue cette attitude inhabituelle de la part d'un membre du
groupe communiste républicain et citoyen. En effet, il faut tenir compte du
fait que, face aux grandes forces internationales qui sont en jeu - et je
partage les réserves que M. Ralite a fortement exprimées à l'égard de la
politique américaine, notamment au sein de l'OMC et de l'OMPI - il est
indiscutablement nécessaire de renforcer la cohésion européenne, car nous
sommes dans l'Europe et nous ne voulons pas en sortir.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. Pierre Laffitte.
Il est vrai que l'on constate une forte offensive américaine, qui se traduit
en particulier par l'adoption d'une base juridique de protection des droits sur
le territoire américain dont l'efficacité serait très incertaine, car elle est
fondée sur des accords collectifs syndicaux conclus à l'échelon national
s'agissant des enregistremetns effectués aux Etats-Unis, et sur une
hypothétique modification législative du
Copyright Act
pour les
enregistrements réalisés à l'étranger. Vouloir nous forcer à accepter un
dispositif qui aboutirait au transfert sans contrepartie réelle à l'industrie
phonographique et audiovisuelle américaine de l'essentiel des droits collectés
en Europe me paraît peu admissible.
Cela étant, il faut avouer que la complexité de notre système rend, d'une
certaine façon, notre défense beaucoup plus délicate, et je salue ici la
création récente de SESAM en ce qui concerne la gestion collective des droits
multimédias, qui permettra de simplifier vis-à-vis des producteurs de produits
multimédias la gestion de ces droits.
Par ailleurs, il me paraît souhaitable de prévoir une préparation plus
collective des représentations nationales lorsqu'il s'agit de défendre des
objectifs complexes intervenant à la fois dans le domaine culturel et dans le
domaine économique.
En effet, la protection des logiciels, par exemple, est souvent très liée à la
protection des droits d'auteur. Il est donc, à mon avis, indispensable de créer
un groupement permanent qui associerait, aux côtés des différents ministères
concernés, à la fois des auteurs, des gestionnaires, des producteurs et des
éditeurs, afin de dégager une vision commune. Des industriels pourraient
éventuellement être associés à des délégations - c'est d'ailleurs ce que font
les Américains - afin de renforcer la présence de la France et d'appuyer les
fonctionnaires français amenés à débattre de telle ou telle question.
Sur ce plan-là, la commission pourra éventuellement formuler des observations
complémentaires.
Les sénateurs du groupe du Rassemblement démocratique social et européen
voteront donc ce projet de loi.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe Douste-Blazy
ministre de la culture.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Monsieur le rapporteur, vous venez d'exprimer des
observations sur le fonctionnement de sociétés de perception et de répartition
des droits et avez souhaité qu'une réflexion soit engagée à cet égard. Je suis
très favorable à une concertation élargie sur le devenir de ces structures qui
vont être confrontées aux nouvelles contraintes de l'exploitation numérique des
oeuvres. Les négociations en cours sur la modernisation des conventions
internationales et, sutout, sur l'harmonisation européenne nous y incitent.
Dans cette perspective des autoroutes de l'information, auxquelles, monsieur
Laffitte, vous êtes particulièrement sensible, j'envisage d'associer le
Parlement à la définition de ce que j'appellerai une « doctrine française de
l'administration des droits intellectuels ».
C'est dans cet esprit que nous pourrions faire un bilan de la gestion
collective des droits telle qu'elle a été pratiquée dans le contexte
traditionnel de la diffusion des oeuvres.
Monsieur Laffitte, vous avez bien voulu m'interroger sur les conditions
d'application de l'exception au droit de reproduction prévu à l'article 16. Je
vous en remercie, car cette question me donne l'occasion de préciser devant la
Haute Assemblée, comme je l'avais fait devant l'Assemblée nationale, que cette
exception ne vaudra que pour les catalogues de vente vendus à perte ou à prix
coûtant. C'est d'ailleurs le cas général et c'est, à mes yeux, une condition
fondamentale pour admettre une exception au droit d'auteur dans ce domaine.
Madame Pourtaud, je ne suis pas insensible à votre argument sur l'intérêt de
réunir en un même code, d'une part, la propriété littéraire et artistique et,
d'autre part, l'audiovisuel.
Ce n'est cependant pas le parti retenu par le Gouvernement, qui vient de
déposer sur le bureau du Sénat un projet de code de la communication et du
cinéma. Je souhaite apporter quelques explications à cet égard.
Il convient tout d'abord de relever que la principale enceinte internationale
dans le domaine des droits de l'auteur, l'Office mondial de la propriété
intellectuelle, l'OMPI, auquel la France est d'ailleurs très attachée, réunit
la propriété littéraire et artistique et la propriété industrielle. Le lien
entre ces deux aspects du droit de la propriété intellectuelle mérite donc
d'être maintenu afin, me semble-t-il, de ne pas affaiblir la cohérence de notre
position internationale.
J'ajoute que notre conviction partagée - M. Laffitte le disait tout à l'heure
- est que le droit d'auteur à la française est parfaitement capable de
s'accommoder des évolutions technologiques.
Dans ces conditions, il n'est sans doute pas indispensable de lier les droits
des auteurs et le droit des opérateurs économiques du secteur de la
communication. Cela étant, madame le sénateur, je répète que je ne suis pas
insensible à votre argument.
En réponse tant aux questions de M. Laffitte et de Mme Pourtaud qu'aux
préoccupations exprimées par M. Ralite, je dirai que la maîtrise de la
diffusion des oeuvres suppose l'identification technique des oeuvres mises en
réseau. C'est possible grâce à l'initiative française, d'ailleurs soutenue par
le ministère de l'industrie. Les dispositions de normalisation internationale
sont aujourd'hui prêtes. La conférence diplomatique, actuellement réunie à
l'OMPI, vient d'inviter les Etats à sanctionner ceux qui contourneront ces
dispositifs techniques.
J'ajoute que la délégation française à l'OMPI a pris la tête de l'opposition
aux initiatives d'outre-Atlantique. Vous n'en attendiez d'ailleurs pas moins de
la France, monsieur Ralite ! La consultation européenne se poursuit
aujourd'hui. Je connais les divergences entre les services de la Commission
européenne. Ce qui compte, à mon avis, c'est le Livre vert sur le droit
d'auteur face à la société de l'information, présenté par M. Monti, commissaire
de la direction générale XV , qui retient d'ailleurs une grande part des
propositions françaises.
Au sujet de la conférence de l'OMPI, je confirme, monsieur Ralite, que
l'essentiel est sauvegardé pour les auteurs. Pour les artistes-interprètes, la
France a obtenu le rejet d'une offre américaine imposant des conditions
inacceptables aux acteurs dans l'audiovisuel.
Monsieur Ralite, comme lors de la première lecture de ce texte, je vous
rejoins sur la nécessité de rechercher des solutions juridiques favorisant la
création française. Mes représentants défendent fortement cette position,
auprès de la Commission, à Bruxelles, et de l'OMPI, à Genève. Mais je constate
que nous n'entraînons pas aisément la majorité des Etats européens avec
nous.
Cependant, la détermination du Gouvernement ne faiblira pas. D'ores et déjà,
mon collègue M. Jean Arthuis m'a soutenu dans mon opposition à l'inscription de
l'audiovisuel et des droits d'auteur dans l'accord multinational sur
l'investissement qui s'élabore à l'OCDE. Je puis vous dire que notre position a
les plus grandes chances aujourd'hui de triompher.
Le ministre des affaires étrangères, quant à lui, est déterminé à préserver
l'autonomie de la propriété intellectuelle, autonomie menacée par les
procédures qu'envisage la Commission de Bruxelles en vue de l'élargissement de
l'Union européenne.
M. Adrien Gouteyron,
président de la commission des affaires culturelles.
Très bien !
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Les créateurs, les interprètes, les producteurs
savent que, dans ces combats, nous sommes aujourd'hui tous solidaires.
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
Très bien !
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
A Singapour, M. Galland a obtenu beaucoup de
choses, notamment la reconnaissance de l'exception culturelle, en particulier
pour les produits multimédia et, dont les CD-ROM.
La détermination du Gouvernement à défendre dans les enceintes internationales
notre conception du droit des créateurs est non seulement entière, en dépit des
assauts venus d'outre-Atlantique, mais aussi farouche. Cette détermination nous
gagne chaque jour, en ce moment même, des points dans toutes les instances
internationales où ces questions sont débattues. Nous continuerons à nous
battre, car le combat, soyons-en conscients, ne cessera pas.
En conclusion, j'évoquerai la situation des intermittents du spectacle.
Monsieur Ralite, il me paraît essentiel de reconnaître la spécificité des
professions du spectacle, qu'il s'agisse des artistes ou des techniciens du
spectacle.
Cette spécificité est importante pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, il s'agit de professions qui, structurellement, alternent des
périodes de chômage et des périodes d'emploi.
En outre, les périodes d'emploi sont très courtes, allant d'un jour à quelques
mois. D'ailleurs, le code du travail reconnaît cette spécificité, puisque le
contrat à durée déterminée y est dit « d'usage » pour les professions du
spectacle.
Enfin, en ce qui concerne le problème des heures travaillées pour pouvoir
bénéficier des indemnités de chômage, il serait très grave que la moitié des
intermittents du spectacle ne puissent pas y avoir droit, aujourd'hui.
Je souhaite donc, conformément au communiqué que j'ai publié hier avec M. le
ministre du travail, que cette spécificité soit reconnue. J'ai très bien
compris ce que vous avez dit sur l'UNEDIC, monsieur le sénateur ; c'est
également mon avis. Nous devons tout faire aujourd'hui pour qu'une négociation
spécifique, associant certes les ministères du travail et de la culture,
s'ouvre entre les partenaires sociaux et les intermittents du spectacle, afin
d'aboutir très rapidement à des mesures spécifiques.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la
discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du
Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - Il est inséré, après l'article L. 122-2 du code de la propriété
intellectuelle, deux articles L. 122-2-1 et L. 122-2-2 ainsi rédigés :
«
Art. L. 122-2-1
. - Le droit de représentation d'une oeuvre
télédiffusée par satellite est régi par les dispositions du présent code dès
lors que l'oeuvre est émise vers le satellite à partir du territoire
national.
«
Art. L. 122-2-2
. - Est également régi par les dispositions du présent
code le droit de représentation d'une oeuvre télédiffusée par satellite émise à
partir du territoire d'un Etat non membre de la Communauté européenne qui
n'assure pas un niveau de protection des droits d'auteurs équivalent à celui
garanti par le présent code :
« 1° Lorsque la liaison montante vers le satellite est effectuée à partir
d'une station située sur le territoire national. Les droits prévus par le
présent code peuvent alors être exercés à l'égard de l'exploitant de la station
;
« 2° Lorsque la liaison montante vers le satellite n'est pas effectuée à
partir d'une station située dans un Etat membre de la Communauté européenne et
lorsque l'émission est réalisée à la demande, pour le compte ou sous le
contrôle d'une entreprise de communication audiovisuelle ayant son principal
établissement sur le territoire national. Les droits prévus par le présent code
peuvent alors être exercés à l'égard de l'entreprise de communication
audiovisuelle. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
M. le président.
« Art. 2. _ Il est inséré, après l'article L. 132-20 du code de la propriété
intellectuelle, deux articles L. 132-20-1 et L. 132-20-2 ainsi rédigés :
«
Art. L. 132-20-1
. - I. _ A compter de la date d'entrée en vigueur de
la loi n° ....... du ..............., le droit d'autoriser la retransmission
par câble, simultanée, intégrale et sans changement, sur le territoire
national, d'une oeuvre télédiffusée à partir d'un Etat membre de la Communauté
européenne ne peut être exercé que par une société de perception et de
répartition des droits. Si cette société est régie par le titre II du livre
III, elle doit être agréée à cet effet par le ministre chargé de la culture.
« Si le titulaire du droit n'en a pas déjà confié la gestion à l'une de ces
sociétés, il désigne celle qu'il charge de l'exercer. Il notifie par écrit
cette désignation à la société, qui ne peut refuser.
« Le contrat autorisant la télédiffusion d'une oeuvre sur le territoire
national mentionne la société chargée d'exercer le droit d'autoriser sa
retransmission par câble, simultanée, intégrale et sans changement, dans les
Etats membres de la Communauté européenne.
« L'agrément prévu au premier alinéa est délivré en considération :
« 1° De la qualification professionnelle des dirigeants des sociétés et des
moyens que celles-ci peuvent mettre en oeuvre pour assurer le recouvrement des
droits définis au premier alinéa et l'exploitation de leur répertoire ;
« 2° De l'importance de leur répertoire ;
« 3° De leur respect des obligations que leur imposent les dispositions du
titre II du livre III.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de délivrance et de retrait
de l'agrément. Il fixe également, dans le cas prévu au deuxième alinéa, les
modalités de désignation de la société chargée de la gestion du droit de
retransmission.
« II. - Par dérogation au I, le titulaire du droit peut céder celui-ci à une
entreprise de communication audiovisuelle.
« Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux droits dont est cessionnaire
une entreprise de communication audiovisuelle.
«
Art. L. 132-20-2
. - Des médiateurs sont institués afin de favoriser,
sans préjudice du droit des parties de saisir le juge, la résolution des
litiges relatifs à l'octroi de l'autorisation de retransmission, simultanée,
intégrale et sans changement, d'une oeuvre par câble.
« A défaut d'accord amiable, le médiateur peut proposer aux parties la
solution qui lui paraît appropriée, que celles-ci sont réputées avoir acceptée
faute d'avoir exprimé leur opposition par écrit dans un délai de trois mois.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article et les modalités de désignation des médiateurs. »
Je suis saisi de deux amendements, présentés par MM. Ralite, Renar, Mme Luc et
les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 4 tend, dans la seconde phrase du premier alinéa du I du texte
proposé par l'article 2 pour l'article L. 132-20-1 du code de la propriété
intellectuelle, à supprimer le mot : « Si ».
L'amendement n° 5 vise à supprimer le paragraphe II du texte proposé par
l'article 2 pour l'article L. 132-20-1 du code de la propriété
intellectuelle.
La parole est à M. Ralite, pour défendre ces deux amendements.
M. Jack Ralite.
L'amendement n° 4 tend à rendre obligatoire l'agrément du ministère de la
culture, y compris dans le cas d'une société de perception et de répartition
européenne.
Nous avions déposé un amendement semblable lors de l'examen du projet de loi
en première lecture, et nous le présentons à nouveau faute d'avoir trouvé dans
les réponses qui nous ont été données à ce moment-là de véritables raisons de
nous satisfaire.
La rédaction actuelle du texte proposé pour l'article L. 132-20-1 du code de
la propriété intellectuelle prévoit que : « Si cette société est régie par le
titre II du livre III, elle doit être agréée. »
Cela signifie,
a contrario,
que l'on peut imaginer des sociétés non
régies par le titre II du livre III du code de la propriété intellectuelle, et
donc des sociétés non soumises à l'agrément.
Il y aurait donc, d'un côté, des sociétés soumises à des contraintes,
contraintes que nous approuvons dans l'intérêt des auteurs eux-mêmes - je pense
aux sociétés d'auteurs de notre pays - et, d'un autre côté, des sociétés,
telles les sociétés européennes, pour lesquelles un semblable agrément ne
serait pas obligatoire.
Cette possibilité ne nous semble pas aller dans le sens de l'intérêt des
auteurs et ouvre de façon inéquitable le champ d'une concurrence déloyale sur
le terrain de la défense des auteurs.
Nous souhaitons, pour notre part, que l'ensemble des sociétés d'auteurs qui
disposeraient du droit d'autoriser la retransmission par câble simultanée,
intégrale, sur le territoire national soient soumises à la procédure de
l'agrément.
J'en viens à l'amendement n° 5.
La cession des droits à des entreprises de communication audiovisuelle
remettrait en cause la spécificité du droit d'auteur et des sociétés d'auteurs
et serait, à terme, préjudiciable aux auteurs.
Les dispositions contenues dans le paragraphe II du texte proposé pour
l'article L. 132-20-1 du code de la propriété intellectuelle prévoient que
l'auteur peut céder ses droits à une société de communication audiovisuelle
dans le cadre de la transmission ou de la retransmission par câble.
Lorsque l'on connaît les moyens de pression dont disposent certaines grosses
sociétés audiovisuelles privées, on est en droit d'avoir des craintes pour la
défense des intérêts des auteurs. Cette disposition ne risque-t-elle pas de
soumettre les artistes à un chantage à l'emploi en offrant aux sociétés
audiovisuelles la possibilité de ne pas faire appel à un artiste qui refuserait
de céder ses droits ?
Il y a là, selon nous, une réelle atteinte aux principes qui ont prévalu, à la
spécificité du droit d'auteur dans notre pays. Et la frontière entre droits
d'auteur, d'un côté, et
copyright,
de l'autre, ne serait pas loin d'être
franchie si une telle disposition était maintenue.
Lors de la première lecture de ce texte, en mars dernier, nous vous avons
rappelé notre attachement au droit d'auteur, monsieur le ministre.
Depuis, l'actualité est venue mettre sur le devant de la scène nombre des
craintes que nous pressentions alors pour l'ensemble de la création culturelle
de notre pays.
Est-il bien opportun d'ajouter encore aux difficultés que rencontrent les
artistes dans la mise en oeuvre d'une politique culturelle du moindre coût ?
La retranscription dans notre code de la propriété intellectuelle des deux
directives du Conseil de l'Europe nous impose-t-elle de laisser le champ libre
à ceux pour qui la création n'est que le prétexte à de précieux profits aux
dépens même de la qualité et de la valeur culturelle de ce qui est
difficilement créé ? Nous ne le pensons pas ! C'est pourquoi l'amendement n° 5
tend à supprimer le paragraphe II du texte qui nous est proposé, afin que, en
matière de diffusion par câble, l'édifice juridique du droit d'auteur, qui fait
l'originalité de notre pays, reste applicable.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
Sur l'amendement n° 4, nous nous étions déjà expliqués en
première lecture.
Je vous rappelle que, si l'agrément n'est imposé qu'aux sociétés de perception
et de répartition des droits régies par le droit français, c'est pour deux
raisons très simples.
D'abord, il s'agit d'une mesure qui s'inscrit dans le cadre du contrôle,
d'ailleurs restreint, que le ministère de la culture exerce sur les sociétés
régies par la loi française. Les sociétés étrangères sont, quant à elles,
contrôlées en vertu de leurs lois nationales, souvent, d'ailleurs, de manière
beaucoup plus rigoureuse qu'en France.
Ensuite, et surtout, imposer un agrément des autorités françaises aux sociétés
communautaires qui exerceraient leur activité en France serait considéré comme
une entrave à la liberté de prestation de services. Ou alors, il faudrait les
agréer automatiquement, ce qui n'offrirait aucune garantie aux titulaires de
droits et serait au désavantage des sociétés françaises.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
S'agissant de l'amendement n° 5, nous ne pouvons pas supprimer le paragraphe
II de l'article, car c'est la directive qui prévoit que les titulaires de
droits de retransmission câblée devront soit les confier à une société de
gestion collective, soit les céder directement aux entreprises de communication
audiovisuelle.
Cette disposition est d'ailleurs conforme à la pratique actuelle, car, très
souvent, le diffuseur primaire acquiert lui-même les droits de rediffusion des
émissions pour pouvoir ensuite céder son programme libre de droits aux
câblo-distributeurs.
La commission est très consciente des préoccupations exprimées par M. Ralite
en ce qui concerne le « chantage à l'emploi » parfois exercé par certains
producteurs de disques ou de programmes audiovisuels à l'égard des artistes, et
qui est effectivement tout à fait condamnable. Mais, là, il est question de la
cession de droits effectuée par le producteur de programmes au diffuseur.
Pour toutes ces raisons, la commission est donc défavorable à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
S'agissant de l'amendement n° 4, le Sénat a déjà
repoussé en première lecture une disposition identique. Comme je l'avais alors
dit, il ne serait pas compatible avec le droit communautaire d'instituer un
agrément à l'égard des sociétés européennes non françaises.
Le Gouvernement ne peut donc qu'être défavorable à cet amendement.
Quant à l'amendement n° 5, il est directement contraire à la directive.
Le Gouvernement y est donc également défavorable.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jack Ralite.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite.
J'ai bien entendu les arguments qui ont été avancés, mais cela me fait
craindre un phénomène de délocalisation. En effet, les sociétés d'auteurs
étrangères seront régies par certaines règles tandis que les sociétés
françaises seront régies par d'autres règles.
Quant à l'amendement n° 5, il concerne les sociétés audiovisuelles. A ce
sujet, j'ai évoqué tout à l'heure les sept points de la stratégie américaine,
qui sont d'ailleurs bien connus à Bruxelles. Le septième, qui consiste à avoir
discrètement des relations avec les grandes compagnies privées en Europe qui
sont en opposition avec les quotas, telles TF1, et les mesures que la France
défend avec certains de ses partenaires européens risque d'ouvrir une brèche,
une fissure, au point de « tordre » les principes, et c'est parfaitement
regrettable.
Je considère que nos amendements sont bons et j'invite la Haute Assemblée à
les adopter.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Article additionnel après l'article 4
M. le président.
Par amendement n° 9, Mme Pourtaud et les membres du groupe socialiste et
apparentés proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi
rédigé :
« Le troisième alinéa de l'article L. 214-1 du code de la propriété
intellectuelle est ainsi rédigé :
« 2° A sa radiodiffusion par voie hertzienne terrestre à l'exclusion de sa
diffusion dans le cadre de tout programme musical destiné à un public d'abonnés
ou à tout autre public déterminé, non plus qu'à la distribution par câble ou à
la diffusion par satellite simultanées et intégrales de cette radiodiffusion.
»
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud.
Notre amendement vise à préserver l'intégrité et l'esprit de l'article L.
214-1 du code de la propriété intellectuelle qui dispose du régime de la
licence légale, notamment en matière de radiodiffusion de phonogrammes publiés
à des fins de commerce.
Lorsque la loi de 1985 a été votée, les services de radiodiffusion existant
diffusaient tous en mode analogique par voie hertzienne terrestre des
programmes destinés à un public indéterminé, avec, dans de rares cas, une
reprise à l'identique sur les premiers réseaux câblés. Il y avait donc unité
entre le vecteur utilisé et l'activité des services concernés.
Ce sont ces services qui ont été visés sous le terme « radiodiffusion » dans
l'article 22 de la loi du 3 juilllet 1985, devenu l'article L. 214-1 du code de
la propriété intellectuelle, mais en aucun cas la diffusion par satellite à
titre primaire.
Le législateur a, par ailleurs, clairement exclu du champ de la licence légale
la câblo-distribution primaire, qui était l'unique vecteur, à l'époque, des
services vis-à-vis des consommateurs et constituait une activité de même nature
que la vente de phonogrammes dans les magasins de détail ; il s'agissait de
services interactifs, c'est-à-dire de services en ligne fournissant des
phonogrammes à la demande mais également des services assimilables, de fait, à
des services interactifs, tels les services à thématique musicale distribués à
un public d'abonnés.
Or l'évolution technologique a abouti à ce que ces services utilisent
désormais le satellite, et bientôt la voie hertzienne grâce au DAB.
Pour prendre le cas des bouquets de programmes - par exemple, « Multimusic »
sur Canalsatellite - le numérique leur permet d'offrir à un public d'abonnés
des dizaines et, un jour, des centaines de programmes musicaux sans publicité
ni animateur et avec une qualité sonore proche de celle du disque compact.
Dans ces conditions, il convient d'éviter que la loi de transposition de la
directive sur la radiodiffusion par satellite et la retransmission par câble
n'étende le champ d'application de la licence légale à ces nouveaux services
dès lors qu'ils emprunteraient la voie satellitaire, voire la voie hertzienne
terrestre.
A ce sujet, les considérants du préambule de la directive sont clairs.
Considérant n° 15 : « Considérant que l'acquisition contractuelle des droits
exclusifs de radiodiffusion doit être conforme à la législation sur les droits
d'auteur et les drois voisins en vigueur dans l'Etat membre où a lieu la
communication au public par satellite. »
Considérant n° 21 : « Considérant qu'il est nécessaire de veiller à ce que la
protection des auteurs, des artistes-interprètes ou exécutants, des producteurs
de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion soit accordée dans tous les
Etats membres et qu'elle ne soit pas soumise à un régime de licences prévu par
la loi, que c'est le seul moyen d'éviter que d'éventuelles disparités du niveau
de protection à l'intérieur du marché commun ne donnent lieu à des disparités
de concurrence. »
Notre proposition a donc pour objectif de confirmer le sens donné par le
législateur, en 1985, au terme « radiodiffusion » à l'article L. 214-1 du code
de la propriété intellectuelle, et je vous demande de bien vouloir
l'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
La commission comprend, bien entendu, l'inquiétude des
producteurs de phonogrammes, qu'elle a elle-même reçus, devant la
multiplication des nouveaux services, qui ne sont d'ailleurs pas les seuls
visés par cet amendement.
Mais il ne lui semble pas possible de régler le problème dans le cadre de ce
projet de loi, par le biais d'un amendement qui vise à soustraire au régime de
la licence légale la diffusion hertzienne terrestre de phonogrammes du commerce
par des services thématiques qui seraient assimilés ainsi à des services
interactifs.
Cette solution serait, en outre, contraire à la directive n° 92-100 sur les
droits voisins.
Je remercie Mme Pourtaud d'avoir soulevé un problème qu'il nous faudra en
effet étudier de façon approfondie compte tenu de l'émergence des nouvelles
techniques d'information et de communication, du développement du DAB et du
développement des services interactifs. Les conséquences de ces différentes
évolutions ont d'ailleurs été évoquées avec brio par M. Ralite.
Il y a là réelle matière à réflexion, mais la question ne me paraît pas
susceptible d'être clarifiée au moyen d'un amendement qui ne peut évidemment
que s'apparenter à un cavalier par rapport au texte en discussion, bien qu'il y
trouve, d'une certaine façon, une relative place logique.
Pour toutes ces raisons, et en particulier parce qu'il est contraire à la
directive n° 92-100 sur les droits voisins, la commission est hostile à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Madame le sénateur, la disposition que vous
proposez est très importante, parce qu'elle entraîne des modifications
considérables qui devraient appeler un minimum de concertation entre les
artistes-interprètes et les producteurs. En effet, nous ne pouvons prendre
seuls une telle décision « antiartistes interprètes ». Aujourd'hui, vous le
savez, pour que de telles réformes soient acceptées, la concertation est
nécessaire entre les producteurs et les artistes. On ne peut pas abandonner le
« 50/50 » comme vous nous le proposez.
De plus, parce qu'il vise à transformer profondément la licence légale
instituée par l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, cet
amendement dépasse amplement le champ de la directive à transposer.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Jack Ralite.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite.
Je découvre cet amendement à l'instant et j'ai écouté Mme Pourtaud avec la
sympathie que je lui porte.
Si la loi de 1985 a institué les droits voisins, elle a aussi institué les
droits des producteurs de phonogrammes et, pour ma part, j'avais considéré à
l'époque qu'il s'agissait là d'un début de
copyright
à la française.
J'ai donc besoin d'une étude plus approfondie sur cette question parce que
cette loi, je le répète, concerne à la fois les artistes et les producteurs de
phonogrammes. Nous avons donc intérêt à les faire se rencontrer pour apprécier
à quel point de la lecture du texte ils sont parvenus.
Sans m'opposer
a priori
à cet amendement, il me semble néanmoins
prématuré. Dans la conférence où j'envisage de réunir des artistes, des
juristes, des chercheurs et des industriels producteurs, il y a là un thème à
débattre.
Je trouve qu'il est utile d'avoir, grâce à cet amendement, évoqué une question
qui se pose effectivement. Je n'en crains pas moins une décision qui serait
prise dans l'immédiat, sans qu'en soient assurés tous les fondements et je vous
mets en garde contre le danger qu'il y aurait à ne pas prendre en compte l'avis
d'un partenaire essentiel, dont les manifestations de rues montrent la
déstabilisation actuelle.
Mme Danièle Pourtaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud.
Je voudrais dissiper tout malentendu.
Notre amendement n'a nullement pour objet de modifier la répartition « 50/50 »
instituée par l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle ! Il
vise simplement à lever une ambiguité sur les modes de support.
Je comprends les réserves de M. le rapporteur et de M. Ralite et je veux bien
considérer que mon amendement est, en quelque sorte, un amendement d'appel.
Toutefois, le Gouvernement ne s'est pas engagé clairement sur le moment où
nous procéderons à un réexamen de ce dossier. Si M. le ministre me rassurait à
ce sujet, j'accepterais, éventuellement, de retirer mon amendement. Mais, pour
l'instant, je n'ai pas entendu de réponse à cette question que j'avais déjà
évoquée dans mon intervention liminaire.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Madame le sénateur, convenez qu'il est important
de défendre les artistes-interprètes aussi.
Mme Danièle Pourtaud.
Je suis tout à fait d'accord avec vous !
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Aujourd'hui, un débat sur l'interactivité est
ouvert dans le cadre de l'OMPI. Dès que ces discussions internationales
s'achèveront, nous y verrons un peu plus clair et nous pourrons envisager
d'aborder la concertation entre les producteurs et les artistes-interprètes.
Je m'associe complètement aux propos de M. Ralite, qui rejoignent très
exactement mon propre exposé.
M. le président.
Madame Pourtaud, maintenez-vous votre amendement ?
Mme Danièle Pourtaud.
Je le retire, monsieur le président.
M. le président.
L'amendement n° 9 est retiré.
Article 5
M. le président.
« Art. 5. _ Il est inséré, dans le code de la propriété intellectuelle, après
l'article L. 216-1, un chapitre VII ainsi rédigé :
« Chapitre VII
« Dispositions applicables à la télédiffusion par satellite
et à la retransmission par câble.
«
Art. L. 217-1. - Non modifié.
«
Art. L. 217-2. - Supprimé.
«
Art. L. 217-3
. - I. _ Lorsqu'il est prévu par le présent code, le
droit d'autoriser la retransmission par câble, simultanée, intégrale et sans
changement, sur le territoire national, de la prestation d'un
artiste-interprète, d'un phonogramme ou d'un vidéogramme télédiffusés à partir
d'un État membre de la Communauté européenne ne peut être exercé, à compter de
la date d'entrée en vigueur de la loi n° ....... du ................., que par
une société de perception et de répartition des droits. Si cette société est
régie par le titre II du livre III, elle doit être agréée à cet effet par le
ministre chargé de la culture.
« Si le titulaire du droit n'en a pas confié la gestion à l'une de ces
sociétés, il désigne celle qu'il charge de l'exercer. Il notifie par écrit
cette désignation à la société, qui ne peut refuser.
« Le contrat autorisant la télédiffusion sur le territoire national de la
prestation d'un artiste-interprète, d'un phonogramme ou d'un vidéogramme
mentionne la société chargée, le cas échéant, d'exercer le droit d'autoriser sa
retransmission par câble, simultanée, intégrale et sans changement, dans les
Etats membres de la Communauté européenne.
« L'agrément prévu au premier alinéa est délivré en considération des critères
énumérés à l'article L. 132-20-1.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de délivrance et de retrait
de l'agrément. Il fixe également, dans le cas prévu au deuxième alinéa, les
modalités de désignation de la société chargée de la gestion du droit de
retransmission.
« II. - Par dérogation au I, le titulaire du droit peut céder celui-ci à une
entreprise de communication audiovisuelle.
« Les dispositions du I ne sont pas applicables aux droits dont est
cessionnaire une entreprise de communication audiovisuelle.
«
Art. L. 217-4
. - Des médiateurs sont institués afin de favoriser,
sans préjudice du droit des parties de saisir le juge, la résolution des
litiges relatifs à l'octroi de l'autorisation, lorsqu'elle est exigée, de
retransmission par câble, simultanée, intégrale et sans changement, d'un
élément protégé par un des droits définis au présent titre.
« A défaut d'accord amiable, le médiateur peut proposer aux parties la
solution qui lui paraît appropriée, que celles-ci sont réputées avoir acceptée
faute d'avoir exprimé leur opposition par écrit dans un délai de trois mois.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article et les modalités de désignation des médiateurs. » -
(Adopté.)
Article 5
bis
M. le président.
« Art. 5
bis
_ I. _ L'article L. 321-1 du code de la propriété
intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les actions en paiement des rémunérations perçues par ces sociétés civiles
se prescrivent par dix ans à compter de la date de leur mise en répartition.
»
« II. _ L'article L. 321-9 du même code est ainsi modifié :
« 1° La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :
« Ces sociétés doivent utiliser à des actions d'aide à la création, à la
diffusion du spectacle vivant et à des actions de formation d'artistes, d'une
part, 25 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée et,
d'autre part, la totalité des sommes perçues en application des articles L.
122-10, L. 132-20-1, L. 214-1, L. 217-3 et L. 311-1 qui n'ont pu être réparties
au terme de cinq années après leur date de mise en répartition. » ;
« 2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« L'évaluation et l'utilisation de ces sommes font l'objet, chaque année, d'un
rapport spécial du commissaire aux comptes et d'un rapport de ces sociétés au
ministre chargé de la culture. »
Par amendement n° 1, M. Laffitte, au nom de la commission, propose de rédiger
ainsi cet article :
« I. - L'article L. 321-1 du code de la propriété intellectuelle est complété
par un alinéa ainsi rédigé :
« Les actions en paiement des droits perçus par ces sociétés civiles se
prescrivent par dix ans à compter de la date de leur perception, ce délai étant
suspendu jusqu'à la date de leur mise en répartition. »
« II. - L'article L. 321-9 du même code est ainsi modifié :
« A. - La première phrase du premier alinéa est remplacée par quatre alinéas
ainsi rédigés :
« Ces sociétés utilisent à des actions d'aide à la création, à la diffusion du
spectacle vivant et à des actions de formation des artistes :
« 1° 25 % des sommes provenant de la rémunération pour copie privée ;
« 2° La totalité des sommes perçues en application des articles L. 122-10, L.
132-20-1, L. 214-1, L. 217-3 et L. 311-1 et qui n'ont pu être réparties à
l'expiration du délai prévu au dernier alinéa de l'article L. 321-1.
« Elles peuvent utiliser à ces actions tout ou partie des sommes visées au 2°
à compter de la fin de la cinquième année suivant la date de leur mise en
répartition, sans préjudice des demandes de paiement des droits non prescrits.
»
« B. - Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Le montant et l'utilisation de ces sommes font l'objet, chaque année, d'un
rapport des sociétés de perception et de répartition des droits au ministre
chargé de la culture. Le commissaire aux comptes vérifie la sincérité et la
concordance avec les documents comptables de la société des informations
contenues dans ce rapport. Il établit à cet effet un rapport spécial. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
Cet amendement vise, sans en changer le fond, à récrire
l'article 5
bis.
Il a trois objets.
En premier lieu, nous voudrions fixer le point de départ du délai de
prescription à la date de perception des droits par les sociétés. C'est, en
effet, cette perception qui est le fait générateur de leur dette. En outre, la
notion de « mise en répartition » peut éventuellement prêter à controverse.
Cependant, pour ne pas raccourcir le délai utile dont disposent les titulaires
de droit, nous proposons que le délai soit suspendu jusqu'à la mise en
répartition. C'est une petite nuance juridique.
En deuxième lieu, nous nous sommes aperçus que la rédaction de l'Assemblée
nationale comportait une erreur de plume qui pourrait laisser croire que les
sociétés sont « obligées » d'utiliser au bout de cinq ans les sommes non
réparties. Cela équivaudrait à créer un délai de prescription particulier pour
les régimes de gestion collective obligatoire. Nous précisons donc clairement -
conformément, d'ailleurs aux intentions du rapporteur de l'Assemblée nationale
- que les sociétés sont tenues de payer les droits jusqu'à la fin du délai de
prescription.
En troisième lieu, nous proposons de rendre plus efficace le contrôle du
commissaire aux comptes, en précisant qu'il devra vérifier la sincérité et la
conformité aux comptes des sociétés des informations contenues dans leur
rapport annuel sur l'utilisation des sommes affectées à des actions d'intérêt
collectif.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Par son amendement n° 1, la commission des
affaires culturelles propose de réécrire l'article 5
bis
adopté par
l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement.
Comme l'Assemblée nationale, en fait, la commission considère qu'une
prescription décennale serait mieux adaptée que la prescription de cinq ans
initialement proposée. Le Gouvernement en prend acte.
Par ailleurs, le Gouvernement approuve les précisions apportées sur les
nouvelles règles d'affectation des sommes non réparties. Je tiens à préciser à
cette occasion que, conformément aux principes qui règlent les conflits de lois
dans le temps, ce nouveau dispositif trouvera naturellement à s'appliquer dès
l'entrée en vigueur de la loi et concernera toutes les répartitions non
prescrites.
Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 5
bis
est ainsi rédigé.
Articles 7 à 9, 12, 14 A, 14 et 15
M. le président.
« Art. 7. _ L'article L. 123-2 du code de la propriété intellectuelle est
complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les oeuvres audiovisuelles, l'année civile prise en considération est
celle de la mort du dernier vivant des collaborateurs suivants : l'auteur du
scénario, l'auteur du texte parlé, l'auteur des compositions musicales avec ou
sans paroles spécialement réalisées pour l'oeuvre, le réalisateur principal. »
-
(Adopté.)
« Art. 8. - L'article L. 123-3 du code de la propriété intellectuelle est
ainsi rédigé :
«
Art. L. 123-3
. - Pour les oeuvres pseudonymes, anonymes ou
collectives, la durée du droit exclusif est de soixante-dix années à compter du
1er janvier de l'année civile suivant celle où l'oeuvre a été publiée. La date
de publication est déterminée par tout mode de preuve de droit commun, et
notamment par le dépôt légal.
« Au cas où une oeuvre pseudonyme, anonyme ou collective est publiée de
manière échelonnée, le délai court à compter du 1er janvier de l'année civile
qui suit la date à laquelle chaque élément a été publié.
« Lorsque le ou les auteurs d'oeuvres anonymes ou pseudonymes se sont fait
connaître, la durée du droit exclusif est celle prévue aux articles L. 123-1 ou
L. 123-2.
« Les dispositions du premier et du deuxième alinéas ne sont applicables
qu'aux oeuvres pseudonymes, anonymes ou collectives publiées pendant les
soixante-dix années suivant l'année de leur création.
« Toutefois, lorsqu'une oeuvre pseudonyme, anonyme ou collective est divulguée
à l'expiration de la période mentionnée à l'alinéa précédent, son propriétaire,
par succession ou à d'autres titres, qui en effectue ou fait effectuer la
publication jouit d'un droit exclusif de vingt-cinq années à compter du 1er
janvier de l'année civile suivant celle de la publication. » -
(Adopté.)
« Art. 9. - Le premier alinéa de l'article L. 123-4 du code de la propriété
intellectuelle est ainsi rédigé :
« Pour les oeuvres posthumes, la durée du droit exclusif est celle prévue à
l'article L. 123-1. Pour les oeuvres posthumes divulguées après l'expiration de
cette période, la durée du droit exclusif est de vingt-cinq années à compter du
1er janvier de l'année civile suivant celle de la publication. » -
(Adopté.)
« Art. 12. - L'article L. 211-4 du code de la propriété intellectuelle est
ainsi rédigé :
«
Art. L. 211-4
. - La durée des droits patrimoniaux objet du présent
titre est de cinquante années à compter du 1er janvier de l'année civile
suivant celle :
« - de l'interprétation pour les artistes interprètes ;
« - de la première fixation d'une séquence de son pour les producteurs de
phonogrammes et d'une séquence d'images sonorisée ou non pour les producteurs
de vidéogrammes.
« - de la première communication au public des programmes visés à l'article L.
216-1 pour les entreprises de communication audiovisuelle.
« Toutefois, si une fixation de l'interprétation, un phonogramme ou un
vidéogramme font l'objet d'une communication au public pendant la période
définie aux trois premiers alinéas, les droits patrimoniaux de
l'artiste-interprète ou du producteur du phonogramme ou du vidéogramme
n'expirent que cinquante ans après le 1er janvier de l'année civile suivant
cette communication au public. » -
(Adopté.)
« Art. 14 A. - Lorsqu'un contrat de coproduction d'une oeuvre audiovisuelle,
conclu avant l'entrée en vigueur de la présente loi entre un ou plusieurs
coproducteurs établis en France et un ou plusieurs coproducteurs établis dans
un autre Etat, prévoit expressément un régime de répartition des droits
d'exploitation par zones géographiques sans distinguer le régime applicable à
la télédiffusion par satellite des dispositions applicables aux autres moyens
d'exploitation, et dans le cas où une telle télédiffusion par satellite
porterait atteinte à l'exclusivité, notamment linguistique, de l'un des
coproducteurs ou de ses ayants droit sur un territoire déterminé,
l'autorisation par l'un des coproducteurs ou ses ayants droit de télédiffuser
l'oeuvre par satellite est subordonnée au consentement préalable du
bénéficiaire de cette exclusivité, qu'il soit coproducteur ou ayant droit. » -
(Adopté.)
« Art. 14. - A compter du 1er janvier 2000, seront réputées non écrites, si
elles sont contraires aux dispositions des articles L. 122-2-1, L. 122-2-2 et
L. 217-1 du code de la propriété intellectuelle, les clauses des contrats
relatifs à la télédiffusion par satellite, sur le territoire de la Communauté
européenne, d'oeuvres ou d'éléments protégés par un droit voisin, et qui auront
été conclus avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi. » -
(Adopté.)
« Art. 15. - I A et I. _
Non modifiés.
« II. - Les dispositions du titre II de la présente loi n'ont pour effet de
faire renaître des droits sur des oeuvres, prestations, fixations ou programmes
tombés dans le domaine public avant le 1er janvier 1995 que s'ils étaient
encore protégés à cette date dans au moins un autre Etat membre de la
Communauté européenne. Dans ce cas :
« - les titulaires de ces droits ne peuvent les opposer aux actes
d'exploitation accomplis licitement avant la date d'entrée en vigueur de la
présente loi ;
« - les titulaires de ces droits ne peuvent s'opposer à l'exploitation d'une
oeuvre, d'une interprétation, d'un phonogramme, d'un vidéogramme ou d'un
programme pendant un an à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente
loi si l'exploitation en a été licitement engagée avant cette date ;
« - les titulaires de ces droits ne peuvent s'opposer, pendant un an à compter
de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, à la poursuite de
l'exploitation d'une oeuvre, d'une prestation, d'une fixation ou d'un programme
licitement créés avant cette date à partir de l'oeuvre, de la prestation, de la
fixation ou du programme sur lesquels ces droits ont recommencé à courir. A
l'issue de ce délai, ils ne peuvent faire valoir que leurs droits patrimoniaux,
pour la détermination desquels, en cas de difficulté, il est fait application
de l'article L. 122-9 du code de la propriété intellectuelle. Le défaut de
versement de la rémunération résultant du présent alinéa est puni de l'amende
prévue à l'article L. 335-4 du même code ;
« - les titulaires de ces droits ne peuvent s'opposer à la réalisation d'une
oeuvre audiovisuelle qui a fait l'objet, antérieurement à l'entrée en vigueur
de la présente loi, d'un contrat d'adaptation enregistré au registre public de
la cinématographie. En cas de difficulté pour la détermination des droits
patrimoniaux liés à l'oeuvre adaptée ou pour le versement de la rémunération,
il sera fait application des articles L. 122-9 et L. 335-4 du code de la
propriété intellectuelle.
« III. - La prolongation à compter du 1er juillet 1995 des droits
d'exploitation faisant l'objet, à cette même date, d'un contrat d'édition
n'emporte pas prorogation de ce contrat si sa durée n'est déterminée que par
référence à la durée légale de la propriété littéraire et artistique.
« Toutefois, à peine de nullité de la cession, l'auteur ne peut céder à un
autre éditeur les droits correspondant à cette prolongation sans en avoir au
préalable proposé l'acquisition, aux mêmes conditions, à l'éditeur cessionnaire
au 1er juillet 1995.
« Cette proposition est faite par écrit. Elle est réputée avoir été refusée si
l'éditeur n'a pas fait connaître sa décision par écrit dans un délai de deux
mois. » -
(Adopté.)
Article 16
M. le président.
« Art 16. - Il est inséré, après le septième alinéa (
c
du 3°) de
l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle, deux alinéas ainsi
rédigés :
«
d)
Les reproductions, intégrales ou partielles d'oeuvres d'art
graphiques ou plastiques destinées à figurer dans le catalogue d'une vente aux
enchères publiques effectuée en France par un officier public ou ministériel
pour les exemplaires qu'il met à la disposition du public avant la vente dans
le seul but de décrire les oeuvres d'art mises en vente.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les caractéristiques des documents et les
conditions de leur distribution. »
Par amendement n° 8, M. Blaizot propose de rédiger ainsi le premier alinéa du
texte présenté par cet article pour insérer deux alinéas après le septième
alinéa de l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle :
«
d)
Les reproductions, intégrales ou partielles d'oeuvres d'art
graphiques ou plastiques destinées à figurer soit dans le catalogue d'une vente
aux enchères publiques effectuée en France par un officier public ou
ministériel pour les exemplaires qu'il met à la disposition du public avant la
vente, soit dans le catalogue de vente des marchands et galeries spécialisés,
dans le seul but de décrire les oeuvres d'art proposées à la vente. »
La parole est à M. Blaizot.
M. François Blaizot.
Je propose que l'élargissement du domaine des exceptions de l'utilisation
gratuite d'une oeuvre divulguée, censé soutenir la reprise du marché de l'art,
profite à tous les professionnels intervenant sur ce marché et soit, en
conséquence, applicable aux marchands et galeries d'art, qui publient également
des catalogues reproduisant des oeuvres d'art proposés à la vente.
L'objectif de cet amendement est très clair et devrait susciter l'approbation
de tous mes collègues.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
En fait, cet amendement élargit considérablement l'exception
au droit de reproduction prévue à l'article 16.
Le Sénat avait prévu en première lecture une exception pour des introductions,
par exemple, sur Internet, afin de faciliter la communication des oeuvres
d'art. Nous ne demandons pas de la réintroduire, car nous admettons qu'il vaut
mieux que les exceptions soient limitées.
Le même raisonnement s'appliquant à l'amendement de M. Blaizot, la commission
a émis un avis défavorable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
A mon avis, l'amendement introduit une
discrimination probablement contraire à la Constitution au profit du marché de
l'art.
Les commissaires-priseurs exerçant dans le cadre d'un office avec un statut
d'officier ministériel ne sont pas dans la même situation juridique que les
galeries d'art ou les antiquaires. Donc, se pose là un premier problème d'ordre
constitutionnel.
En revanche, si comme vous le proposez, monsieur le sénateur, on étendait
l'exception au droit de reproduction à ces derniers, il faudrait alors
l'étendre aussi aux maisons d'édition ainsi qu'à toutes les sociétés
commerciales. Cela reviendrait à supprimer purement et simplement le droit de
reproduction. Le Gouvernement n'a pas voulu s'engager dans cette voie ; il veut
uniquement rétablir une situation qui paraît déséquilibrée par une
jurisprudence contraire.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet
amendement, même s'il en comprend les motivations.
M. le président.
L'amendement est-il maintenu, monsieur Blaizot ?
M. François Blaizot.
J'ai entendu les observations de la commission et du Gouvernement, et je
comprends les obstacles auxquels se heurte ma proposition ; ils sont d'une
importance telle que je dois retirer mon amendement. Mais je suis heureux que
le problème ait été reconnu, notamment par la commission. Peut-être
trouverons-nous ultérieurement le moyen de le résoudre.
M. le président.
L'amendement n° 8 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16.
(L'article 16 est adopté.)
Article 16
bis
M. le président.
« Art. 16
bis
. _ Dans l'article L. 131-8 du code de la propriété
intellectuelle, après les mots : "qui leur sont dues", sont insérés
les mots : "ou des dommages et intérêts compensant le non-paiement
desdites redevances et rémunérations". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 6, le Gouvernement propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 2, M. Laffitte, au nom de la commission, propose de rédiger
ainsi l'article 16
bis
:
« L'article L. 131-8 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé
:
«
Art. L. 131-8.
- En vue du paiement de la rémunération qui lui est
due ou de l'indemnité compensant le gain dont il a été privé pour les trois
dernières années à l'occasion de la cession, de l'exploitation ou de
l'utilisation de ses oeuvres, telles qu'elles sont définies à l'article L.
112-2, l'auteur bénéficie, sa vie durant, du privilège prévu au 4° de l'article
2101 et à l'article 2104 du code civil. Le cessionnaire de ses droits peut se
prévaloir de ce privilège pour le compte de l'auteur, et pour la part de sa
créance devant revenir à ce dernier. »
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
L'Assemblée nationale a introduit cet article
dans le projet de loi par le biais d'un amendement auquel le Gouvernement avait
donné un avis favorable parce qu'il lui était apparu de nature à renforcer la
protection des auteurs.
Le travail effectué par la commission des affaires culturelles du Sénat,
notamment par son rapporteur, a cependant mis en évidence les inconvénients qui
pourraient résulter d'une modification du régime actuel des privilètes des
auteurs.
Dans ces conditions, il apparaît plus sage de ne pas bouleverser le délicat
équilibre des privilèges institués par l'article L. 131-8 du code de la
propriété intellectuelle et de maintenir en l'état la rédaction de cette
disposition.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur
l'amendement n° 6 et pour défendre l'amendement n° 2.
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
La commission est favorable à l'amendement n° 6, qui, s'il
est adopté, rendra sans objet son propre amendement.
Si tel ne devait pas être le cas, je présenterai, alors l'amendement n° 2,
monsieur le président.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Jack Ralite.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite.
Nous nous trouvons finalement devant trois amendements : celui de l'Assemblée
nationale, par lequel a été inséré l'article 16
bis,
celui de notre
commission et celui du Gouvernement.
Personnellement, j'aurais suivi la proposition de l'Assemblée nationale, mais,
connaissant notre assemblée, j'ai l'impression que l'article 16
bis
ne
sera pas maintenu. Dans ce cas, je me rallierai à la position du
Gouvernement.
Cela étant, je vois là encore une petite fissure, et je trouve que l'on
fissure beaucoup !
(Sourires.)
Mme Danièle Pourtaud.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud.
Comme M. Ralite, je pense que le texte voté par l'Assemblée nationale
élargissait la protection. Aussi, je ne comprends pas bien pourquoi on souhaite
aujourd'hui revenir sur ce texte.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 16
bis
est supprimé et l'amendement n° 2 n'a
plus d'objet.
Article 16
ter
M. le président.
« Art. 16
ter.
_ Sous réserve des décisions de justice passées en force
de chose jugée, est validée et rendue applicable à compter du 1er janvier 1996
la décision du 28 juin 1996 publiée au
Journal officiel
de la République
française du 25 juillet 1996 de la commission créée par l'article L. 214-4 du
code de la propriété intellectuelle, fixant le barème de la rémunération due
par les exploitants de discothèques aux artistes-interprètes et aux producteurs
de phonogrammes en application de l'article L. 214-1 du même code. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 3, M. Laffitte, au nom de la commission, propose de
supprimer cet article.
Par amendement n° 7, le Gouvernement propose d'insérer, dans le texte de
l'article 16
ter
, après les mots : « et rendue applicable », les mots :
« pour cinq ans ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 3.
M. Pierre Laffitte.
L'amendement n° 7 du Gouvernement, même s'il ne résout pas tous les problèmes
que pose la validation demandée au législateur, rendra néanmoins acceptable
l'article 16
ter
. La commission y souscrit.
Avant donc de retirer l'amendement n° 3, je voudrais simplement, monsieur le
ministre, rappeler que c'est la deuxième fois que l'on demande au Parlement de
fixer, en lieu et place des parties intéressées, le montant de la rémunération
que devront payer les utilisateurs de phonogrammes du commerce ; en 1993, il
s'agissait de certaines radios ; aujourd'hui, ce sont les discothèques. Ce
n'est pas le rôle normal du législateur, et ce n'est pas non plus ce que
prévoyait la loi de 1985. J'espère que, désormais, ce secteur parviendra à se
gérer lui-même, dans le respect de la loi.
Sur ce, je retire l'amendement n° 3.
M. le président.
L'amendement n° 3 est retiré.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 7.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Les travaux de votre commission des affaires
culturelles ont conduit le Gouvernement à modifier l'article 16
ter
.
C'est l'objet de l'amendement n° 7. Comme l'a relevé M. le rapporteur, on ne
saurait admettre que la décision de la commission soit validée de façon
perpétuelle. Le Gouvernement propose donc, tout simplement, de limiter l'effet
de l'article 16
ter
à la durée normale de validité de la commission.
Je demande donc à la Haute Assemblée d'adopter l'article 16
ter
ainsi
amendé et remercie M. le rapporteur d'avoir retiré l'amendement de la
commission.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16
ter
, ainsi modifié.
(L'article 16
ter
est adopté.)
M. le président.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la deuxième
lecture.
M. Adrien Gouteyron,
président de la commission des affaires culturelles.
Je demande la
parole.
M. le président.
La parole à M. le président de la commission.
M. Adrien Gouteyron,
président de la commission des affaires culturelles.
Monsieur le
ministre, au terme de ce débat, je voudrais remercier, si vous le permettez, le
rapporteur et les membres de la commission des affaires culturelles, qui ont
beaucoup travaillé sur ce texte.
Il s'agit d'un texte difficile, technique, qui touche, comme cela a été dit
par les uns et par les autres au cours du débat, à des points essentiels, en
particulier le droit d'auteur, et à la conception française de ce droit, qui
tient à notre société même, à l'idée que nous nous en faisons, qui touche au
fond même de la culture. Tout le monde en a été conscient.
Je suis donc très heureux que nous aboutissions à un texte satisfaisant. Le
Sénat a bien travaillé, vous l'avez dit, monsieur le ministre.
Je voudrais simplement faire remarquer que la directive que nous transposons a
elle-même repris, pour l'essentiel, le droit français. Nous réintégrons donc,
en passant par les directives, les fondements mêmes de la législation qui,
jusqu'à présent, régissait le droit des auteurs.
Je voudrais reprendre la suggestion qu'a faite tout à l'heure M. le rapporteur
et que, monsieur le ministre, vous avez acceptée, à savoir la constitution d'un
groupe de travail qui, sereinement, comme on le fait au Sénat, traitera de ces
sujets essentiels et des points qui ont été évoqués tout à l'heure et qui
restent encore dans l'obscurité.
Il est bien évident que les nouveaux produits, nombreux, les nouvelles
techniques de diffusion et même les nouveaux modes de relations entre celui qui
reçoit l'oeuvre d'art et l'auteur - je pense à l'interactivité - imposent une
réflexion sereine, je l'ai dit, mais aussi globale sur la gestion collective
des droits. La commission des affaires culturelles y est prête. Notre
rapporteur nous l'a suggérée ; nous nous y prêterons, monsieur le ministre,
bien entendu en liaison avec vos services, dans le respect de l'autonomie du
Parlement, vous le comprenez bien.
Je terminerai par un troisième thème, qui me permettra de revenir très
rapidement sur le débat qui a eu lieu tout à l'heure entre M. Ralite et
vous-même, monsieur le ministre.
M. Ralite, à l'occasion d'une intervention extrêmement intéressante, très
complète, a passé en revue toutes les négociations internationales en cours. Il
nous a fait une description de la situation que je qualifierai, s'il me le
permet, de cataclysmique ! Nous imaginions une espèce de rouleau compresseur
auquel il serait impossible de résister. Pour reprendre son image, on passait
du goutte-à-goutte à la pluie diluvienne, le Déluge sans l'Arche de Noé !
Monsieur le ministre, vous avez répondu en faisant le point au moment où nous
sommes. Nous croyons à la volonté du Gouvernement français, j'allais dire de
résister, mais il s'agit de plus que de cela, puisque le Gouvernement a une vue
différente de la relation entre les auteurs et les consommateurs, si j'ose
m'exprimer ainsi, d'oeuvres d'art. C'est essentiel en effet à notre culture.
Monsieur le ministre, peut-être faudra-t-il dans quelque temps, lorsque ces
négociations auront encore progressé, que vous veniez devant notre commission
des affaires culturelles pour faire le point sur ces sujets si importants. Nous
aurons à cette occasion un débat, dont cette assemblée aura peut-être des
échos. En tout cas, un tel débat est absolument nécessaire compte tenu de
l'importance de ces sujets.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de
l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Ralite, pour explication de vote.
M. Jack Ralite.
Je voudrais dire, pour répondre à M. Gouteyron, que je n'ai point parlé ni du
Déluge, ni de l'Arche de Noé, qui ne me concernent d'ailleurs pas tellement...
L'important pour moi était de faire prendre conscience du danger, car il y a
vraiment danger.
J'ai parlé, dans mon propos, d'une stratégie américaine nouvelle depuis «
l'exception culturelle » acquise lors du GATT. J'ai dit qu'elle comportait sept
points ; j'en ai lu trois, mais je peux en lire quelques autres.
Le deuxième point vise à « améliorer les conditions d'investissement pour les
firmes US en libéralisant les régulations existantes. »
Le cinquième point tend à « s'assurer que les restrictions actuelles liées aux
questions culturelles ne constituent pas un précédent pour les discussions qui
vont s'ouvrir dans d'autres enceintes internationales. »
Le sixième point a pour objet de « multiplier les alliances et les
investissements américains en Europe. »
Le septième point vise à « rechercher discrètement l'adhésion aux positions US
des opérateurs européens affectés par les quotas ou les réglementations :
télévisions privées, publicitaires, opérateurs de télécommunications... »
Certes, ce n'est qu'un programme, et les Américains ne gagnent pas toujours ;
nous en avons eu la preuve avec le GATT. Mais je tenais quand même à «
déplisser » la nouvelle stratégie qu'ils ont décidé d'utiliser pour remettre en
cause ce qui est pour eux - j'ai repris l'expression de M. Jack Valenti - un «
bacille » !
Il y a des droits de l'homme ; le droit d'auteur en est un. Sur ce point, je
suis d'une intransigeance intraitable. Voilà ce que j'ai voulu dire, et rien
d'autre, et c'est aussi pourquoi je suis si sensible aux petites fissures.
De même, j'aurais été sensible au fait que nos deux amendements soient pris en
considération, et cela d'autant plus que j'entends quelquefois dire, en cours
de débat, que mes propos ne sont pas si mal ; mais, au moment des actes, des
votes, rien ne suit !
Je pense à une très belle rencontre qui a eu lieu la semaine passée avec nos
amis italiens, notamment le ministre de la culture, M. Veltroni. Cette
rencontre a été très heureuse. Mais quel cri d'alerte nous y est venu d'Italie
! J'ai ressenti leur pessimisme, bien qu'ils aient enfin un ministre de la
culture.
Personnellement, je ne suis pas de nature pessimiste, et cela parce que je
suis arcbouté sur les traditions de notre pays. Mais je pense qu'il faut
néanmoins alerter. Vous vous en souvenez, au cours de la première lecture,
j'avais émis un vote d'abstention précisément pour alerter. Je continue
aujourd'hui à émettre le même vote, pour alerter encore.
Je vous l'assure, les sociétés d'auteurs et les artistes sont inquiets. Tous
pressentent la menace sur le droit moral, qui est un droit fondamental. Oui, je
persiste à m'abstenir !
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Laffitte,
rapporteur.
Je voudrais simplement préciser, puisque nous avons retiré
l'amendement n° 2, l'une des raisons pour lesquelles nous étions formellement
hostiles à l'article 16
bis
tel qu'il avait été rédigé par l'Assemblée
nationale. Cette hostilité rejoint d'ailleurs les préoccupations brillamment
exposées par M. Ralite.
Il nous semble que la rédaction de l'article 16
bis
affaiblissait le
droit exclusif. Il tendait à faire penser que, d'une certaine façon, le
problème que pose la contrefaçon est uniquement un problème financier.
Or, le problème essentiel, c'est qu'on utiliserait l'oeuvre d'un auteur contre
sa volonté, et d'une manière qu'il n'aurait pas acceptée, moyennant une
rémunération. C'est donc pour des raisons de principe que nous nous sommes
prononcés contre cet article.
La rédaction que nous avions suggérée dans notre amendement montrait bien
qu'il s'agissait d'une compensation de nature tout à fait particulière, qui
compensait le gain perdu mais qui ne touchait en rien la notion de droit
d'auteur.
Il serait important, à l'occasion de la deuxième lecture à l'Assemblée
nationale, que cette proposition de principe de notre commission soit maintenue
et que nous obtenions gain de cause sur ce plan-là, d'autant que les auteurs ne
toucheraient qu'un gain tout à fait symbolique puisqu'ils se placeraient après
les créances superprivilégiées et les créances des salariés.
M. le président.
La parole est à M. Machet, pour explication de vote.
M. Jacques Machet.
Le groupe de l'Union centriste votera ce texte.
Vos propos, monsieur Gouteyron, m'ont profondément touché. Alors que, pendant
des semaines, il n'a été question que de chiffres, vous avez rappelé que
l'homme n'était pas que chiffres, mais qu'il lui fallait, en raison même de son
humanité, des sujets de société à évoquer, de la culture.
Monsieur le ministre, vous avez exprimé la même idée tout à l'heure avec
beaucoup de conviction.
Enfin, s'agissant de M. Laffitte, je ne peux que le remercier. Il connaît
tout, il est spécialiste de tout !
A tous, je dis sincèrement : bravo !
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à onze heures
quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
4
ZONE DITE
DES CINQUANTE PAS GEOMÉTRIQUES
DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER
Adoption des conclusions modifiées
d'une commission mixte paritaire
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 149,
1996-1997) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur
les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à
l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante
pas géométriques dans les départements d'outre-mer.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Huchon,
rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte
paritaire relative au projet de loi sur l'aménagement, la protection et la mise
en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques s'est réunie le jeudi
12 décembre 1996 à l'Assemblée nationale.
Au cours de la seconde lecture, l'Assemblée nationale avait procédé à
plusieurs modifications importantes par rapport au texte voté en seconde
lecture au Sénat. Plusieurs questions restaient, en conséquence, à trancher.
Je me réjouis de constater que l'esprit de compromis a positivement inspiré
les membres de la commission mixte paritaire, ce qui les a conduits à adopter
un texte commun qui répond aux préoccupations des deux rapporteurs.
Le point le plus important restant en discussion tenait à la définition d'un
dispositif de lutte contre la spéculation. En effet, on peut craindre que, dans
les années à venir, les propriétaires les plus pauvres de terrains de la zone
des cinquante pas ne soient tentés de les vendre afin de réaliser des
plus-values. Le souci de la commission mixte paritaire a été de définir une
procédure de lutte contre la spéculation souple afin de ne pas « geler » le
marché immobilier de la zone. C'est pourquoi elle n'a pas retenu le dispositif
de taxation des plus-values, mais a choisi de rétablir un droit de préemption à
l'article L. 89-5
bis
du code du domaine de l'Etat au profit des
communes et, à défaut, des agences pour la mise en valeur de la zone, afin que
les opérations spéculatives puissent être sanctionnées.
Je considère, pour ma part, que cette procédure est indispensable et que la
commission mixte paritaire a choisi la voie de la sagesse.
En outre, la commission mixte a opéré plusieurs modifications, notamment à
l'article L. 89-1, paragraphe II, du code du domaine de l'Etat, où elle a
reconnu la nécessité d'une délimitation de toutes les parties de la zone des
cinquante pas.
La commission mixte paritaire a également choisi, à l'article L. 89-1
bis
du code du domaine de l'Etat, de prévoir qu'un notaire et deux
fonctionnaires assisteront - sans voie délibérative - les commissions de
vérification des titres.
A l'article 89-2 du code du domaine, la commission mixte paritaire a souhaité
qu'un décret en Conseil d'Etat prévoie les conditions dans lesquelles les
terrains autres que ceux qui sont libres de toute occupation pourront être
cédés aux communes ou aux organimses d'habitat social.
Elle a également prévu, à l'article L. 89-4
bis
du même code que les
terrains ne pourront être cédés tant qu'ils n'auront pas été délimités et tant
que les servitudes et usages dont ils font l'objet après la cession n'auront
pas été intégralement précisés.
Aux articles L. 89-4
ter
et L. 89-4
quater
, la commission a
supprimé les dispositions spécifiques relatives aux édifices religieux et aux
locaux associatifs ou syndicaux, en estimant que le droit en vigueur permettait
de résoudre les problèmes existants.
A l'article 5, la commission a retenu un texte aux termes duquel les
présidents des conseils d'administration des deux agences seront nommés par
décret, dans les conditions de droit commun pour les établissements publics
d'Etat.
Enfin, elle a supprimé le dernier article, l'article 11, estimant que la
remise d'un énième rapport ne constituait pas une garantie d'application de la
loi.
La commission mixte paritaire a également opéré des modifications
rédactionnelles aux articles L. 89-1, L. 89-4, L. 89-4
bis
du code du
domaine de l'Etat, ainsi qu'aux articles 2, 7 et 8 du projet de loi.
Mes chers collègues, la commission mixte paritaire a élaboré un texte
équilibré qui répondait à nos préoccupations. Aussi, je me proposais de vous
demander d'adopter les dispositions restant en discussion telles que la
commission mixte paritaire les avait retenues.
Mais le Gouvernement a déposé plusieurs amendements sur ces conclusions, ce
dont on peut s'étonner compte tenu du travail opéré par la commission mixte
paritaire. Nous allons examiner ces amendements à l'occasion de la discussion
des articles, et je vous exposerai, à ce moment-là, la position que la
commission des affaires économiques a adoptée sur chacun d'eux.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué à l'outre-mer.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, le Gouvernement se félicite de l'accord intervenu
entre les deux assemblées sur le projet de loi relatif à l'aménagement, la
protection et la mise en valeur de la zone dite des « cinquante pas
géométriques » dans les départements d'outre-mer, qui répond aux attentes
pressantes de très nombreux habitants de ces départements.
Votre assemblée a permis d'améliorer considérablement le projet du
Gouvernement en décidant, notamment, l'institution d'une commission de
vérification des titres et la mise en place d'un dispositif antispéculation.
Je tiens à remercier particulièrement la commission des affaires économiques
pour la qualité de ses travaux, qui ont permis de compléter efficacement les
dispositions prévues initialement.
Ce texte de consensus doit permettre de résoudre l'ensemble des problèmes
complexes liés à cette zone, objectif que s'est assigné le Gouvernement en
s'attelant à cette tâche. Il y a environ trente mille foyers qui attendent, et
ce depuis longtemps.
Néanmoins, je souhaiterais que trois dispositions soient encore modifiées pour
rendre plus efficace encore l'intention du législateur.
Tout d'abord, concernant la délimitation de la zone dite des cinquante pas
géométriques, je vous demanderai d'allonger de six mois à un an le délai
octroyé à l'administration pour achever cette délimitation. Il s'agit tout
simplement d'attendre la fin de la période cyclonique, c'est-à-dire
l'automne.
Ensuite, je me félicite de l'institution de commissions départementales de
vérification des titres, qui donneront une deuxième chance aux détenteurs de
titres non validés en 1955, mais je souhaiterais que ses décisions soient
inattaquables ; à cet effet, je vous proposerai de préciser les modalités
d'intervention de ses membres.
Enfin, vous avez souhaité qu'un dispositif antispéculation soit mis en place
en cas de revente d'un terrain avant dix ans, et vous proposez que les communes
exercent, au nom de l'Etat, parallèlement à l'agence, un droit de préemption.
Je vous proposerai de confier cette mission à l'agence.
Je crois sincèrement que nous aurons ainsi abouti à un texte de loi qui
permettra d'améliorer sensiblement le cadre de vie de milliers de Françaises et
de Français.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussions des articles.
Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, d'une
part, aucun amendement n'est recevable, sauf accord du Gouvernement ; d'autre
part, étant appelé à se prononcer avant l'Assemblée nationale, le Sénat statue
sur les amendements puis, par un seul vote, sur l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :
M. le président.
« Art. 1er. - I. - Il est inséré, au titre IV du livre IV du code du domaine
de l'Etat (partie législative), un chapitre premier
bis
ainsi rédigé
:
« Chapitre premier
bis
« Dispositions spéciales aux départements
de la Guadeloupe et de la Martinique
«
Art. L. 89-1.
- I. - Dans un délai d'un an à compter de la date de
publication de la loi n° ........ du ...................... relative à
l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante
pas géométriques dans les départements d'outre-mer, le préfet délimite, par
arrêté, après consultation des communes, à l'intérieur de cette zone, d'une
part, les espaces urbains et les secteurs occupés par une urbanisation diffuse,
d'autre part, les espaces naturels.
« II. - Lorsqu'elle n'a pas été délimitée en application de la législation et
de la réglementation en vigueur, la limite supérieure de la zone définie à
l'article L. 87 est fixée à partir de la limite du rivage de la mer tel qu'il a
été délimité en application de la législation et de la réglementation relatives
à la délimitation du rivage de la mer.
« Lorsque le rivage de la mer n'a pas été délimité, il est procédé aux
opérations nécessaires à sa délimitation dans un délai de six mois à compter de
la date de publication de la loi n° ........ du ................ précitée.
« III. - L'arrêté portant délimitation, d'une part, des espaces urbains et des
secteurs occupés par une urbanisation diffuse et, d'autre part, des espaces
naturels constate l'état d'occupation du sol.
« Le schéma d'aménagement régional prévu à l'article L. 4433-7 du code général
des collectivités territoriales, les schémas directeurs et les plans
d'occupation des sols prévus par le code de l'urbanisme sont pris en compte.
« VI. - Pour l'application des dispositions du présent article, la présence de
constructions éparses ne peut faire obstacle à l'identification d'un secteur
comme espace naturel.
«
Art. L. 89-1
bis. - Dans chacun des départements de la Guadeloupe et
de la Martinique, il est institué, dans un délai qui ne peut être supérieur à
un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi n° ........ du ..............
précitée, une commission départementale de vérification des titres.
« Cette commission apprécie la validité de tous les titres antérieurs à
l'entrée en vigueur du décret n° 55-885 du 30 juin 1955 qui n'ont pas été
examinés par la commission, prévue par son article 10, établissant les droits
de propriété, réels ou de jouissance sur les terrains précédemment situés sur
le domaine de la zone des cinquante pas géométriques dont la détention par la
personne privée requérante n'était contrariée par aucun fait de possession d'un
tiers, à la date du 1er janvier 1995.
« Sous peine de forclusion, seuls les titres présentés dans un délai de deux
ans à compter de la constitution de la commission départementale de
vérification des titres seront examinés.
« La commission départementale de vérification des titres comprend trois
membres en activité ou honoraires : un magistrat de l'ordre judiciaire qui
assure la présidence, un membre de la chambre régionale des comptes dont relève
le département concerné et un membre du corps des tribunaux administratifs et
des cours administratives d'appel.
« Un notaire présenté par la chambre départementale des notaires et deux
fonctionnaires des services déconcentrés de l'Etat sont associés à ses travaux,
sans prendre part à ses délibérations.
« Le secrétariat de cette commission est assuré par le greffe de la cour
d'appel.
« La cour d'appel connaît de l'appel interjeté à l'encontre des décisions de
la commission.
« Les personnes privées qui ont présenté un titre ne peuvent déposer une
demande de cession à titre onéreux pour les mêmes terrains, dans les conditions
prévues aux articles L. 89-3 et L. 89-4, tant que la commission n'a pas statué
sur la validation de ce titre.
« Les personnes privées qui ont déposé un dossier de demande de cession à
titre onéreux dans les conditions prévues aux articles L. 89-3 et L. 89-4 ne
peuvent saisir la commission en vue de la validation d'un titre portant sur les
mêmes terrains tant que la demande de cession n'a pas fait l'objet d'une
décision de l'Etat.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article.
«
Art. L. 89-2
. - L'Etat peut consentir aux communes et aux organismes
ayant pour objet la réalisation d'opérations d'habitat social, après
déclassement, la cession gratuite à leur profit de terrains situés dans la zone
définie à l'article L. 87 dépendant du domaine public maritime de l'Etat.
« Cette cession gratuite ne peut concerner que des terrains situés dans les
espaces urbains et les secteurs occupés par une urbanisation diffuse, délimités
selon les modalités prévues à l'article L. 89-1.
« Elle doit avoir pour but la réalisation par la commune d'opérations
d'aménagement à des fins d'utilité publique ou la réalisation par les
organismes compétents d'opérations d'habitat social.
« Toutefois, lorsque les terrains ont été équipés par l'agence créée en
application de l'article 3 de la loi n° ........ du ....................
précitée, la cession est faite au prix correspondant au coût des aménagements
réalisés sur les terrains cédés, et financés par l'agence.
« Lorsqu'ils n'ont pas été utilisés dans un délai de dix ans à compter de la
date de la cession conformément à l'objet qui l'a justifiée, les terrains cédés
reviennent dans le patrimoine de l'Etat, à charge pour celui-ci de rembourser,
le cas échéant, aux cessionnaires le coût des aménagements qu'ils auront
acquitté.
« Les conditions dans lesquelles les terrains autres que ceux libres de toute
occupation peuvent être cédés aux communes ou aux organismes d'habitat social
sont précisées par décret en Conseil d'Etat.
« Dans le département de la Guadeloupe sont rattachées au domaine privé de
l'Etat les parcelles AN 661, AN 662 et AN 663 autrefois cadastrées AN 591
situées sur le territoire de la ville de Basse-Terre.
«
Art. L. 89-3.
- Les terrains situés dans les espaces urbains et les
secteurs occupés par une urbanisation diffuse, délimités selon les modalités
prévues à l'article L. 89-1, peuvent être déclassés aux fins de cession à titre
onéreux aux occupants qui y ont édifié ou fait édifier avant le 1er janvier
1995 des constructions affectées à l'exploitation d'établissements à usage
professionnel.
« Le prix de cession est déterminé d'après la valeur vénale du terrain nu à la
date du dépôt de la demande de cession. Il est fixé selon les règles
applicables à l'aliénation des immeubles du domaine privé.
« La superficie cédée est ajustée en fonction des nécessités de l'équipement
du secteur en voirie et réseaux divers et des conditions de cession des fonds
voisins. Elle ne peut excéder de plus de la moitié la superficie occupée par
l'emprise au sol des bâtiments et installations édifiés avant le 1er janvier
1995.
«
Art. L. 89-4. -
Les terrains situés dans les espaces urbains et les
secteurs occupés par une urbanisation diffuse, délimités selon les modalités
prévues à l'article L. 89-1, peuvent être déclassés aux fins de cession à titre
onéreux aux personnes ayant édifié ou fait édifier avant le 1er janvier 1995,
ou à leurs ayants droit, des constructions à usage d'habitation qu'elles
occupent à titre principal ou qu'elles donnent à bail en vue d'une occupation
principale.
« A défaut d'identification des personnes mentionnées à l'alinéa précédent,
ces terrains peuvent être déclassés aux fins de cession à titre onéreux aux
occupants de constructions affectées à leur habitation principale et édifiées
avant le 1er janvier 1995.
« Le prix de cession est déterminé d'après la valeur vénale du terrain nu à la
date du dépôt de la demande de cession. Il est fixé selon les règles
applicables à l'aliénation des immeubles du domaine privé.
« La superficie cédée est ajustée en fonction des nécessités de l'équipement
du secteur en voirie et réseaux divers et des conditions de cession des fonds
voisins. Elle ne peut excéder un plafond fixé par décret.
«
Art. L. 89-4
bis. - Un terrain ne peut être cédé à une personne
privée tant qu'il n'a pas été délimité et que les servitudes et usages dont il
fait l'objet après sa cession n'ont pas été intégralement précisés.
« Dans les quartiers d'habitat spontané, les cessions font l'objet de la
délivrance d'un titre accompagné d'un plan de bornage extrait de la division
parcellaire.
«
Art. L. 89-4
ter et
L. 89-4
quater. -
Supprimés.
«
Art. L. 89-5
. - Les espaces naturels délimités selon les
modalités de l'article L. 89-1 sont remis en gestion au Conservatoire de
l'espace littoral et des rivages lacustres pour être gérés dans les conditions
prévues aux articles L. 243-1 à L. 243-10 du code rural. En cas de refus du
conservatoire, la gestion de ces espaces naturels peut être confiée à une
collectivité territoriale en vertu d'une convention de gestion prévue à
l'article L. 51-1 du présent code, passée après accord du Conservatoire de
l'espace littoral et des rivages lacustres.
«
Art. L. 89-5
bis
A
. -
Suppression maintenue.
«
Art. L. 89-5
bis. - Pendant un délai de six mois à compter de la date
de l'enregistrement ou de l'accomplissement de la formalité fusionnée, les
communes et, à défaut, les agences créées en application de la loi n° ........
du ............... relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur
de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements
d'outre-mer, peuvent exercer, au nom de l'Etat, un droit de préemption sur les
terrains cédés en application des articles L. 89-3 et L. 89-4, en offrant de
verser à l'acquéreur ou à ses ayants droit une indemnité égale au prix de
cession du terrain par l'Etat majoré du coût des aménagements réalisés par le
propriétaire. Il est tenu compte de l'évolution du coût de la construction pour
l'évaluation de ces aménagements.
« Aucune vente, aucune promesse de vente ni aucune promesse d'achat ne peut
être valablement conclue avant que celui qui souhaite acquérir n'ait été
informé par le vendeur du montant de l'indemnité de préemption prévue à
l'alinéa précédent.
« Seuls les terrains cédés depuis moins de dix ans dans le cadre des articles
L. 89-3 et L. 89-4 relèvent du droit de préemption prévu au premier alinéa.
«
Art. L. 89-5
ter. -
Supprimé.
«
Art. L. 89-6
. - Un décret en Conseil d'Etat, publié dans un délai de
trois mois à compter de la date de publication de la loi n° ........ du
............... précitée, précise les conditions d'application des dispositions
du présent chapitre. »
« II. - Il est inséré, au titre IV du livre IV du code du domaine de l'Etat
(partie Législative), deux articles L. 88-1 et L. 88-2 ainsi rédigés :
«
Art. L. 88-1
. - Dans les départements de Guyane et de la Réunion, les
espaces naturels situés à l'intérieur de la zone définie à l'article L. 87 sont
remis en gestion au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres
pour être gérés dans les conditions prévues aux articles L. 243-1 à L. 243-10
du code rural. En cas de refus du conservatoire, la gestion de ces espaces
naturels peut être confiée à une collectivité territoriale en vertu d'une
convention de gestion prévue à l'article L. 51-1 du présent code, passée après
accord du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres.
«
Art. L. 88-2
. - Dans le département de Guyane, il est institué une
commission départementale de vérification des titres dans les conditions
prévues à l'article L. 89-1
bis,
à l'exception des dispositions des
huitième et neuvième alinéas. »
Par amendement n° 1 rectifié, le Gouvernement propose, dans le second alinéa
du paragraphe II du texte présenté par cet article pour l'article L. 89-1 du
code du domaine de l'Etat, de remplacer les mots : « de six mois » par les mots
: « d'un an ».
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, il s'agit
simplement de porter de six mois à un an le délai fixé pour l'accomplissement
des opérations nécessaires à la délimitation, compte tenu de la période
cyclonique.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Huchon,
rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan.
Je m'en
remets à la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié, pour lequel la commission s'en
remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 2, le Gouvernement propose de compléter le cinquième alinéa
du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 89-1
bis
du code
du domaine de l'Etat par une phrase ainsi rédigée : « Le notaire ne peut
participer aux travaux de la commission lorsqu'il exerce ses fonctions dans une
étude ayant eu à connaître d'un acte relatif aux droits établis par le titre
litigieux. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Il s'agit de rappeler le principe général que constitue
l'obligation de déport devant les juridictions. Ce principe doit évidemment
s'appliquer aux notaires qui sont associés aux travaux de la commission comme
aux magistrats.
Le Gouvernement est convaincu que l'association d'un notaire aux travaux de la
commission départementale de vérification des titres ne peut qu'en améliorer
l'efficacité ; mais il est nécessaire de prévoir la disposition contenue dans
cet amendement dans la mesure où les notaires ne seront ni véritablement
membres de la juridiction, puisqu'ils n'y ont pas voix délibérative, et ne
seront donc pas soumis à l'obligation de déport, ni véritablement extérieurs à
elle, et ne seront donc pas soumis, à ce titre, aux règles de déontologie
qu'ils respectent dans l'exercice de leur fonction normale.
Cette précision évitera à mon avis bien des complications et des recours
contentieux.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Huchon,
rapporteur.
Comme pour l'amendement précédent, la commission s'en remet à
la sagesse du Sénat.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, pour lequel la commission s'en remet à la
sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 3 rectifié, le Gouvernement propose, dans la première phrase
du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 89-5
bis
du code du domaine de l'Etat, de supprimer les mots : « au nom de
l'Etat ».
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Les communes ne peuvent pas exercer un droit de
préemption au nom de l'Etat ; ce serait leur permettre d'engager sans limite
les finances de l'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Huchon,
rapporteur.
La commission n'a examiné que l'amendement n° 3, qui
supprimait le droit de préemption des communes. Elle y était défavorable.
L'amendement n° 3 rectifié nous donne satisfaction ; nous y sommes donc
favorables.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié, accepté par la commission.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je poursuis la lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
« Art. 2. - Les cessions visées à l'article L. 89-4 du code du domaine de
l'Etat font l'objet d'une aide exceptionnelle de l'Etat lorsque les personnes
qui demandent à en bénéficier remplissent des conditions de ressources,
d'ancienneté d'occupation et de rapport entre le revenu et le nombre des
membres du foyer fiscal, définies par décret en Conseil d'Etat.
« En cas de mutation totale ou partielle à titre onéreux du bien acquis dans
les conditions prévues à l'article L. 89-4 du code du domaine de l'Etat,
réalisée dans un délai de dix ans à compter de la date de l'acte ayant donné
lieu à l'attribution de l'aide prévue ci-dessus, le montant de l'aide est
reversé à l'Etat.
« Pour garantir le reversement de l'aide mentionnée aux alinéas précédents, le
Trésor possède sur le bien acquis une hypothèque légale.
« L'inscription de l'hypothèque est requise par le receveur des impôts du lieu
de situation des biens, concomitamment au dépôt aux fins de publication à la
conservation des hypothèques de l'acte de cession par l'Etat.
« La cession par l'Etat, l'inscription et la radiation de l'hypothèque légale
ne donnent lieu à aucune indemnité ou perception d'impôts, droits ou taxes.
»
« Art. 5. - Les agences mentionnées à l'article 3 sont administrées par un
conseil d'administration dont le président est désigné par décret.
« Leur conseil d'administration se compose de représentants des services de
l'Etat dans le département, de représentants élus de la région, du département,
des communes ainsi que de représentants de l'Agence d'urbanisme et
d'aménagement et de personnes choisies en raison de leur compétence dans le
domaine de l'urbanisme et de leur connaissance du littoral.
« Elles sont dirigées par un directeur nommé par décret, après avis du conseil
d'administration.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent
article.
« Art. 7. - Il est inséré, après l'article 1609 B du code général des impôts,
une section 9
quater
ainsi rédigée :
« Section 9 quater
« Taxe spéciale d'équipement perçue au profit de l'agence pour la mise en
valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en
Guadeloupe
«
Art. 1609 C. -
Il est institué, au profit de l'agence pour la mise en
valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en
Guadeloupe créée en application de la loi n° ... du ......................
relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite
des cinquante pas géométriques dans les départements d'outre-mer, une taxe
spéciale d'équipement destinée à financer l'exercice en Guadeloupe, par cet
organisme, des missions définies à l'article 4 de cette loi.
« Le montant de cette taxe est arrêté chaque année par le conseil
d'administration de l'agence dans les limites d'un plafond fixé par la loi de
finances.
« Les communes concernées sont préalablement consultées par le conseil
d'administration.
« Ce montant est réparti, dans les conditions définies au II de l'article 1636
B
octies,
entre toutes les personnes physiques ou morales assujetties
aux taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, à la taxe
d'habitation et à la taxe professionnelle dans les communes dont une partie du
territoire est comprise dans la zone de compétence de l'agence.
« A compter de l'année d'incorporation dans les rôles des résultats de la
révision générale des évaluations cadastrales effectuée dans les conditions
fixées par la loi n° 90-669 du 30 juillet 1990 relative à la révision générale
des évaluations des immeubles retenus pour la détermination des bases des
impôts directs locaux, les organismes d'habitations à loyer modéré, les
sociétés immobilières d'économie mixte créées en application de la loi n°
46-860 du 30 avril 1946 et les sociétés d'économie mixte locales sont exonérés
de la taxe additionnelle au titre des locaux d'habitation et dépendances dont
ils sont propriétaires et qui sont attribués sous conditions de ressources. Les
redevables au nom desquels une cotisation de taxe d'habitation est établie au
titre de ces locaux sont exonérés de la taxe additionnelle à compter de la même
date.
« Les cotisations sont établies et recouvrées, les réclamations sont
présentées et jugées comme en matière de contributions directes.
« Art. 8. - Il est inséré, après l'article 1609 C du code général des impôts,
une section 9
quinquies
ainsi rédigée :
« Section 9
quinquies
« Taxe spéciale d'équipement perçue au profit de l'agence pour la mise en
valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en
Martinique
«
Art. 1609 D. -
Il est institué, au profit de l'agence pour la mise en
valeur des espaces urbains de la zone dite des cinquante pas géométriques en
Martinique créée en application de la loi n° du précitée, une taxe
spéciale d'équipement destinée à financer l'exercice en Martinique, par cet
organisme, des missions définies à l'article 4 de cette loi.
« Le montant de cette taxe est arrêté chaque année par le conseil
d'administration de l'agence dans les limites d'un plafond fixé par la loi de
finances.
« Les communes concernées sont préalablement consultées par le conseil
d'administration.
« Ce montant est réparti, dans les conditions définies au II de l'article 1636
B
octies,
entre toutes les personnes physiques ou morales assujetties
aux taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, à la taxe
d'habitation et à la taxe professionnelle dans les communes dont une partie du
territoire est comprise dans la zone de compétence de l'agence.
« A compter de l'année d'incorporation dans les rôles des résultats de la
révision générale des évaluations cadastrales effectuée dans les conditions
fixées par la loi n° 90-669 du 30 juillet 1990 relative à la révision générale
des évaluations des immeubles retenus pour la détermination des bases des
impôts directs locaux, les organismes d'habitations à loyer modéré, les
sociétés immobilières d'économie mixte créées en application de la loi n°
46-860 du 30 avril 1946 et les sociétés d'économie mixte locales sont exonérés
de la taxe additionnelle au titre des locaux d'habitation et dépendances dont
ils sont propriétaires et qui sont attribués sous conditions de ressources. Les
redevables au nom desquels une cotisation de taxe d'habitation est établie au
titre de ces locaux sont exonérés de la taxe additionnelle à compter de la même
date.
« Les cotisations sont établies et recouvrées, les réclamations sont
présentées et jugées comme en matière de contributions directes. »
« Art. 11. -
Supprimé. »
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix
l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la
commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
L'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux
; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze
heures, sous la présidence de M. René Monory.)
PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY
M. le président. La séance est reprise.
5
QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT
M. le président.
L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Je me permets d'inviter chacun de ceux qui ont une question à poser à
respecter scrupuleusement son temps de parole, qui est de deux minutes et demie
- et cette recommandation vaut également pour les réponses des ministres - de
manière que tous puissent intervenir dans les limites de la retransmission
télévisée de cette séance. Tâchons de finir l'année en beauté !
APPLICATION DES EXONÉRATIONS
DANS LES ZONES DE REVITALISATION RURALE
M. le président.
La parole est à M. Dupont.
M. Ambroise Dupont.
Mesdames, messieurs les ministres, ma question rejoint l'excellente
intervention qu'a faite le président Gouteyron, hier soir, dans cet
hémicycle.
Certaines entreprises qui créent des emplois depuis le mois de septembre
dernier dans les zones de revitalisation rurale rencontrent des difficultés sur
lesquelles je souhaite appeler votre attention.
Malgré la parution du décret du 16 août 1996, les sociétés anonymes se voient
refuser le bénéfice de cette exonération de cotisations sociales.
En effet, le législateur a souhaité que cette exonération s'applique à toutes
les entreprises, quelle que soit leur forme juridique. Les services de l'Etat
ont d'ailleurs retenu cette interprétation et ont fait savoir dans le public
que cette exonération bénéficiait aux « entreprises », sans restriction.
Plusieurs sociétés se sont créées en conséquence depuis le mois de septembre
dernier et prétendent au bénéfice de l'exonération de cotisations sociales.
Hélas, celles qui s'étaient constituées en sociétés anonymes ont découvert que
l'administration refuse d'accorder le bénéfice de l'exonération précitée aux
sociétés anonymes.
Voilà des entreprises - j'en connais dans mon canton - qui ont créé des
emplois et qui apprennent que leurs calculs prévisionnels sont erronés ! Que
doivent-elles faire ? Que vont-elles faire ? Licencier ?
J'en appelle, monsieur le ministre, à votre compréhension et au volontarisme
dont, je le sais, vous faites preuve dans la poursuite de la politique
d'aménagement du territoire.
Le Sénat a voté hier, à l'article 32 du projet de loi de finances
rectificative, une mesure de portée rétroactive qui, en différant de janvier
1995 à février 1996 l'entrée en vigueur de l'article 59 de la loi d'orientation
pour l'aménagement et le développement du territoire, devrait permettre aux
URSSAF d'économiser 500 millions de francs, au détriment des entreprises qui se
sont installées dans les zones de revitalisation rurale avant cette dernière
date.
Ne pourrait-on, monsieur le ministre, atténuer la rigueur de cette mesure à
caractère négatif, que le Sénat a accepté de voter eu égard à la nécessité de
réduire les déficits publics, par le biais d'une mesure également rétroactive,
mais de caractère positif, celle-là, et d'un bien moindre coût ?
Ne serait-il pas équitable de faire bénéficier de l'exonération des
cotisations sociales les entreprises constituées sous forme de société anonyme
qui ont créé des emplois dans ces mêmes zones, de septembre 1996 à janvier
1997, alors qu'elles ont cru entrer dans le champ de l'exonération de l'article
58 de la loi d'orientation sur la foi des indications fournies par la DATAR.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin,
ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de
l'artisanat.
Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser
l'absence de mon collègue M. Jean-Claude Gaudin, qui souhaitait vous répondre
lui-même mais qui en est, hélas, empêché. Il m'a demandé de vous répondre, «
avec soin », a-t-il précisé, compte tenu de votre engagement dans la défense
des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, tant dans
le Calvados que dans l'ensemble de notre pays.
M. Henri de Raincourt.
C'est une juste cause !
M. Jean-Pierre Raffarin,
ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de
l'artisanat.
Votre question soulève le délicat problème de la
rétroactivité des lois.
Effectivement, la loi du 4 février 1995 exclut qu'une société anonyme puisse
bénéficier de l'exonération des cotisations sociales, ce qui donne lieu à
certains dysfonctionnements.
M. Jean-Claude Gaudin a tenu à les corriger dans le cadre du pacte de relance
pour la ville, et le Parlement a bien voulu adopter sa proposition. Toutefois,
la mise en oeuvre de cette disposition exige que soit pris un décret
d'application, et celui-ci est actuellement en cours de préparation.
Je suis malheureusement au regret de vous dire que ce décret ne pourra pas
instituer la rétroactivité de la mesure. Telle est aujourd'hui la position du
ministère de l'aménagement du territoire. Il s'agit en effet de l'article 59 de
la loi d'orientation, dont l'entrée en application a dû être retardée en raison
de la nécessité d'obtenir l'autorisation de Bruxelles.
Monsieur le sénateur, M. Jean-Claude Gaudin m'a chargé de vous indiquer qu'il
se tenait à votre disposition pour tenter de trouver avec vous une solution à
ce dysfonctionnement qui cause de nombreuses difficultés, notamment dans les
zones rurales de notre pays.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
AVENIR DE L'INDUSTRIE DU RAFFINAGE EN FRANCE
M. le président.
La parole est à M. Vigouroux.
M. Robert-Paul Vigouroux.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, je désire attirer
votre attention sur un problème économique particulièrement grave qui concerne
la région de l'étang de Berre et, plus largement, l'avenir de l'industrie du
raffinage en France.
Depuis 1978, treize raffineries françaises ont été fermées. Il en reste onze
en activité, dont quatre dans le département des Bouches-du-Rhône, où le
secteur pétrolier représente 30 000 emplois et 400 millions de francs de
retombées fiscales pour les collectivités locales, dont bénéficient les trois
quarts des communes du département par le biais du fonds de péréquation de la
taxe professionnelle.
Le groupe pétrolier Shell a prévu la suppression de 274 postes sur sa
raffinerie de l'étang de Berre. Mais, plus grave encore, les groupes pétroliers
envisagent de supprimer 1 500 postes sur les sites français, soit 10 % de
l'effectif total et la fermeture d'une des raffineries de l'étang de Berre :
une catastrophe économique de plus en prévision pour notre département, déjà si
lourdement affecté par le chômage !
Les compagnies pétrolières réalisent des bénéfices importants à l'étranger,
mais les filiales françaises semblent connaître,
a contrario,
des
difficultés, alors même que notre parc automobile s'est accru de plus de 3
millions de véhicules en dix ans. Comment expliquer ce paradoxe ?
On nous parle de surcapacité de raffinage dans l'Union européenne. En France,
tous produits pétroliers traités confondus, nous en avons consommé en 1995 plus
que nous n'en avons produit : 81 millions de tonnes contre 75 millions de
tonnes.
Qu'on ne se cache pas derrière l'excuse de la pollution : les moyens de lutte
existent et les problèmes se situent surtout ailleurs.
Qu'on n'invoque pas non plus les accords européens, car l'Europe ne peut se
construire que dans une justice socio-économique.
Monsieur le ministre, je vous demande donc, au nom d'élus locaux de la région
de l'étang de Berre et de très nombreux salariés des raffineries, ce que vous
comptez faire afin d'éviter la fermeture d'une des raffineries de l'étang de
Berre et, plus largement, quelles mesures vous envisagez de prendre pour
apporter des solutions aux problèmes que rencontre cette industrie en France.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Monsieur
le sénateur, votre question a trait, d'une part, à l'économie générale de
l'industrie du raffinage en France et en Europe et, d'autre part, aux
raffineries situées autour de l'étang de Berre.
Il est clair que, dans le domaine du raffinage comme dans bien d'autres, on ne
peut plus isoler l'espace français de l'espace européen.
Les capacités de raffinage en Europe sont de 650 millions de tonnes, ce qui
représente probablement plus de 10 % de surcapacité. Cela signifie que, dans
les années qui viennent, au moins dix raffineries vont devoir fermer en
Europe.
Bien sûr, il ne faut pas que ce soit la France qui supporte l'essentiel de ce
nécessaire effort de restructuration.
Vous me demandez, monsieur le sénateur, pourquoi le raffinage français est
plus mal placé que le raffinage européen. En fait, même s'il y a une
surcapacité de raffinage en France, il existe surtout une distorsion de
consommation ente le gazole et les autres produits : on consomme en France plus
de gazole qu'on n'en produit ; nous sommes donc contraints d'en importer. Cela
s'explique essentiellement par la diéselisation de notre parc automobile. De
l'autre côté, nos raffineries cherchent à exporter du carburant dont personne
ne veut.
Ce hiatus entre la consommation et l'appareil de production de produits
pétroliers fait que l'outil de raffinage français travaille à perte. Il nous
faut donc chercher des solutions dans la restructuration de cet outil afin de
permettre à nos raffineries de retrouver un équilibre technique et, par là
même, financier.
Par ailleurs, dans le bassin du Sud-Est, nous avons 28 millions de tonnes de
capacités de raffinage. Une étude menée par les raffineurs fait apparaître une
surcapacité concernant l'essence de 1,5 million de tonnes ce qui représente
environ 4 millions de tonnes de surcapacité de distillation.
Les entreprises doivent se réunir, dialoguer pour essayer de trouver les
modalités d'une restructuration afin que soit maintenue et développée
l'industrie pétrochimique, plutôt que pétrolière, de l'étang de Berre. Cette
discussion est en cours, et les pouvoirs publics ne sont pas absents du
dialogue.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
STATUT DES INTERMITTENTS DU SPECTACLE
M. le président.
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et concerne le statut des
intermittents du spectacle.
Permettez-moi de saluer d'abord la mémoire d'un intermittent célèbre :
Marcello Mastroianni, qui vient, hélas ! de disparaître.
Une fois de plus, les intermittents manifestent aujourd'hui, après plusieurs
semaines d'une action menée dans un esprit de dignité, de fermeté et
d'invention.
Ils s'émeuvent légitimement de la remise en cause de leur statut et,
notamment, des modalités d'indemnisation du chômage dont ils bénéficient telles
qu'elles résultent des annexes 8 et 10 de l'UNEDIC.
En effet, sur l'initiative du CNPF, l'ouverture des droits aux ASSEDIC ne
deviendrait effective que dès lors que seraient accomplies 676 heures au lieu
des 507 qui sont nécessaires aujourd'hui. Un tel dispositif reviendrait à
exclure de l'assurance chômage, bien qu'ils aient cotisé, 75 % à 80 % des
intermittents, soit 64 000 personnes.
Mais, au-delà, c'est la clé de voûte de tout un système régissant l'emploi
salarié dans la culture qui se trouvait ébranlée. Car, contrairement à ce
qu'affirme le président du CNPF, l'indemnisation par l'UNEDIC des intermittents
n'est pas incongrue ; elle correspond à la spécificité même des emplois
culturels, qui ne sont pas des emplois permanents.
Comme le dit fort à propos Jean-Pierre Vincent, le directeur du théâtre des
Amandiers, « la production artistique ne se limite pas aux périodes liées à un
travail rémunéré : sans couverture ASSEDIC adaptée, la création elle-même est
rendue impossible ».
Nécessaire pour les artistes, les techniciens et les machinistes, la
couverture spécifique des intermittents l'est aussi pour les structures
culturelles qui ne peuvent embaucher du personnel permanent en trop grand
nombre, ou qui n'en ont tout simplement pas besoin. La réalité de la vie
culturelle est surtout caractérisée par l'emploi occasionnel, selon les
programmations, les spectacles. Le système actuel, c'est la garantie d'une vie
culturelle diversifiée, voire d'une vie culturelle tout court.
A côté des structures institutionnalisées, tout un tissu de création vivant
s'est développé. Le mode de couverture sociale des intermittents permet ainsi
aux petites structures - compagnies de danse, de théâtre, orchestres, jeunes
équipes cinématographiques - de vivre, voire de survivre dans un contexte
difficile. C'est également le garant d'un développement culturel, grâce aux
interventions artistiques dans les établissements scolaires, dans les zones
urbaines, dans les zones rurales.
Tout cet ensemble contribue au dynamisme et à la force culturels de notre
pays.
M. le président.
Posez votre question, monsieur Renar.
M. Ivan Renar.
J'y arrive, monsieur le président.
Décidément non, le cliché de l'artiste ou des techniciens du spectacle
travaillant peu et vivant aux crochets de l'assurance chômage ne tient pas !
Un moratoire de quatre mois a été obtenu. C'est un répit. Mais cela reste
insuffisant.
M. le président.
Votre question, s'il vous plaît !
M. Ivan Renar.
Allez-vous, monsieur le ministre, laisser faire M. Gandois et un patronat de
plus en plus réactionnaire ? Je vous demande donc quelles mesures vous comptez
prendre pour garantir le régime spécifique des intermittents et le maintien de
la vie et de la création culturelles, qui sont parties prenantes de l'exception
culturelle française.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Douste-Blazy,
ministre de la culture.
Permettez-moi à mon tour, monsieur le sénateur,
de rendre hommage à un géant, peut-être le plus grand, du cinéma européen,
Marcello Mastroianni. Avec lui vont s'éteindre un certain nombre de génériques
qui sont présents dans nos mémoires. Il va rejoindre un autre monstre sacré qui
nous a quittés voilà quelques années, Federico Fellini, réalisateur de
La
Dolce Vita
et de
Otto e Mezzo.
Monsieur le sénateur, vous avez posé une question importante sur les
intermittents du spectacle. Nous sommes tous très attachés à la spécificité des
professions du spectacle, qu'il s'agisse des artistes ou des techniciens.
Pourquoi parler de spécificité ? Premièrement, il s'agit de professions qui
alternent des périodes de travail et de chômage. L'activité en continu n'existe
pas pour elles.
Deuxièmement, les périodes de travail sont courtes puisqu'elles vont d'un jour
à quelques mois au maximum. D'ailleurs, le code du travail lui-même reconnaît
que le contrat à durée déterminée est d'usage.
Enfin, j'ajoute que la moitié des professionnels du spectacle n'arrive pas à
accomplir les 507 heures réglementaires et ne parvient donc pas à toucher les
indemnités de chômage.
C'est la raison pour laquelle M. Barrot, ministre du travail et des affaires
sociales, et moi-même avons demandé aux partenaires sociaux de proroger de
quatre mois les annexes 8 et 10 relatives aux intermittents. Cette proposition
sera présentée dans la soirée.
Nous voudrions que cette période de quatre mois soit mise à profit pour
engager le plus rapidement possible des négociations spécifiques. Les pouvoirs
publics sont décidés à faciliter le déroulement de ces négociations en oeuvrant
activement pour que leur cadre, leurs modalités et leur calendrier soient
arrêtés dans les prochains jours.
M. Jacques Barrot et moi-même nommerons prochainement une personnalité qui
prendra immédiatement tous les contacts nécessaires et proposera un calendrier
de discussion au sein du groupe de travail qu'elle constituera avec les parties
intéressées. Ses travaux devront commencer au début du mois de janvier afin
d'aboutir à une conclusion positive avant la fin du mois d'avril.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
NÉCESSITÉ D'UNE RESTRUCTURATION
DE L'INDUSTRIE AÉRONAUTIQUE EUROPÉENNE
M. le président.
La parole est à M. Pluchet.
M. Alain Pluchet.
Ma question s'adressait à M. le ministre de la défense, que je n'aperçois pas
en cet instant, mais, comme elle concerne également l'industrie, je crois que
M. Borotra pourra me répondre.
Je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la fusion
d'Aérospatiale et de Dassault, dont les modalités doivent être prochainement
fixées.
A l'heure où le mariage Boeing-McDonnell va créer, après Lockheed-Martin, un
nouveau géant mondial de l'industrie aérospatiale militaire, la restructuration
de notre industrie aéronautique est indispensable. Dans ce contexte de
concurrence mondiale, notre industrie aéronautique est en effet appelée à se
restructurer en passant du stade de la coopération à celui de l'intégration
nationale.
Plus largement, la baisse des budgets militaires à la suite de la fin de la
guerre froide, l'appel de plus en plus important à des technologies à double
usage, civil et militaire, voire à des financements bancaires, sont autant de
réalités qui nous montrent la nécessité stratégique et économique d'une
restructuration de l'industrie aéronautique à l'échelon européen.
Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quelle est la position
française sur la stratégie européenne à adopter s'agissant de l'industrie
aéronautique ? Face notamment à la stratégie des firmes américaines, qui
semblent avoir majoritairement suivi la voie de l'intégration par fusion ou
rachat, les firmes européennes doivent-elles privilégier une intégration
nationale et des coopérations transnationales ?
Enfin, pouvez-vous nous donner des précisions sur le projet d'organisation
industrielle regroupant Aérospatiale et Dassault, un projet industriel qui fixe
la création d'un groupe commun permettant de constituer une seule centrale
d'achats, mais se contentant, semble-t-il, d'établir de simples passerelles
entre les deux bureaux d'études ?
(Applaudissements sur les travées du RPR,
des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Franck Borotra,
ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications.
Monsieur
le sénateur, la fusion entre Boeing, qui est le premier constructeur d'avions
civils au monde, et McDonnell Douglas, qui est le troisième constructeur
débouche, il est vrai, sur un géant qui représente un chiffre d'affaires de 250
milliards de francs et qui est le premier au monde dans les domaines civil et
militaire.
Quand on assiste à une fusion qui était prévisible, il faut en tirer les
conséquences non seulement à l'échelon français et européen, mais aussi du
point de vue industriel et commercial. Il faut bien se rendre compte que, au
travers de cet engagement, les Etats-Unis sont en fait en train d'affirmer leur
prétention à une hégémonie mondiale en matière de stratégie industrielle dans
les domaines spatial et aéronautique.
La création d'une entreprise qui occupera la première place mondiale dans le
domaine de l'aéronautique civil et militaire crée, vous avez eu raison de le
souligner, une ambiguïté permanente en ce qui concerne les préfinancements ou
les subventions.
Il nous faut donc en tirer les conséquences.
La première se situe à l'échelon national. Il faut accélérer le processus du
rapprochement voulu par le Président de la République entre les deux
constructeurs remarquables dans le domaine de l'aéronautique que sont Dassault
et Aérospatiale. Cette fusion doit intervenir le plus rapidement possible, dans
le respect des intérêts des deux parties.
Deuxièmement, il faut accélérer le processus de la transformation d'Airbus en
société. Il est absolument nécessaire que cette entreprise, qui doit nous
permettre de relever le défi américain dans le domaine aéronautique, dispose de
tous les moyens pour être un concurrent mondial à l'égal des meilleurs. Il
l'est déjà du point de vue technique et technologique.
Il faut instamment lui confier des projets : l'avion lourd A 3 X, d'une part,
l'avion de cent places avec les Chinois, d'autre part, doivent constituer
l'occasion de créer ce groupe européen de dimension mondiale, doté de la
capacité et de l'ambition d'être l'un des tout premiers au monde.
Troisièmement, il faut réfléchir à l'attitude des Européens face au défi de
nature économique que nous lancent les Etats-Unis. Il faut prendre conscience
de la nécessité de mener une offensive industrielle à l'échelon européen, en
particulier dans les secteurs stratégiques, afin que puissent émerger des
groupes de dimension mondiale qui permettent de renforcer le socle industriel,
fondement de la puissance économique et politique de l'Europe de demain.
Je considère que, trop souvent dans ce domaine, des intérêts aujourd'hui
divergents dictent aux pays des comportements radicalement opposés à la
construction de cette industrie européenne. Du même coup, ils laissent la place
à des solutions bureaucratiques ou administratives ou au seul critère du
libéralisme, qui ne pèsent pas lourd à l'échelon européen lorsque ces secteurs
stratégiques sont engagés dans une concurrence mondiale.
Si l'Europe veut maintenir la puissance qui est la sienne aux plans économique
et industriel, elle doit s'engager dans la voie de la coopération, afin de
déboucher sur une stratégie industrielle commune.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. Yves Guéna.
Il faut en avoir la volonté !
M. Pierre Fauchon.
Il n'est rien de plus urgent que de faire l'Europe !
INDÉPENDANCE DES MAGISTRATS DU PARQUET
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Les récentes déclarations de M. le Président de la République tendant à «
sérieusement examiner la possibilité de rendre le parquet indépendant du garde
des sceaux » ont d'autant plus surpris que pendant sa campagne électorale, et à
la différence de Lionel Jospin, il n'avait rien dit de tel.
A l'en croire, il serait arrivé à cette conclusion après avoir constaté que «
les procureurs n'obéissent pas. »
Cette constatation est sans doute liée au curieux engagement du Président de
la République d'un « budget de la justice plus important », alors que le
Gouvernement vient de faire approuver par sa majorité un budget de la justice
en francs constants sans aucune augmentation. Il s'apprête sans doute à faire
des économies en ne recherchant plus un procureur dans l'Himalaya, hélicoptère
à l'appui !
M. Jacques Mahéas.
Absolument !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Nous estimions nous-mêmes nécessaire, dans le rapport
Justice et
transparence,
que « le parquet échappe à l'autorité du garde des sceaux »,
et Jacques Toubon, qui était du même avis en 1992, l'est apparemment de
nouveau.
Nous voici donc aujourd'hui unanimes à considérer qu'il n'est aucunement «
entendu que l'autorité indivisible de l'Etat est confiée tout entière au
Président par le peuple qui l'a élu » et « qu'il n'en existe aucune autre », en
particulier « judiciaire », qui ne soit « conférée et maintenue par lui »,
contrairement à ce que déclarait le général de Gaulle le 31 janvier 1964.
M. Alain Vasselle.
Très bonne référence !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
J'en arrive tout naturellement à ma question : le nouvel article 65 de la
Constitution laissant entre les mains de l'exécutif la carrière et la
discipline des magistrats du parquet, n'est-il pas nécessaire, pour les rendre
« indépendants du garde des sceaux », de modifier la Constitution, au besoin
par référendum, afin de contourner ce qui, dans notre pays, est le plus «
profondément conservateur », c'est-à-dire la majorité sénatoriale ?
(Rires
et applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations sur les travées
des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le sénateur, vous
comprendrez que je laisse le soin à la majorité sénatoriale de répondre à la
dernière partie de votre question.
M. Jean Delaneau.
On s'en chargera !
M. Emmanuel Hamel.
Elle est conservatrice, c'est une valeur essentielle.
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux.
Elle aura bien des fois l'occasion de démontrer que,
comme par le passé, et encore très récemment, elle adopte des positions
progressistes et non immobilistes, comme le groupe auquel vous appartenez,
monsieur Dreyfus-Schmidt, a souvent donné la preuve, et encore tout
récemment.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. Jacques Mahéas.
Et l'impôt sur la fortune ?
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux.
Mais j'avais bien compris que cette dernière partie de
la question n'était qu'accessoire par rapport à la première partie, à laquelle
je veux maintenant répondre en tant que ministre de lajustice.
Monsieur Dreyfus-Schmidt, je reprendrai les propos que j'ai tenus publiquement
: il existe deux façons d'appréhender la déclaration de M. le Président de la
République jeudi dernier, soit par le petit bout de la lorgnette, disons à
travers une lorgnette politicienne, soit, au contraire, en considérant
l'ampleur du dessein qui a été esquissé par le Président de la République et
qui, en fait, consiste à savoir si, à la fin du xxe siècle, nous devons ou non
conserver à la justice française la place, le rôle, l'autorité, le pouvoir et
la responsabilité qui sont les siens depuis la Révolution française.
L'autorité judiciaire doit-elle devenir un véritable pouvoir ? Comment, dès
lors, résoudre le problème de la séparation et des relations entre les
différents pouvoirs ? Faut-il, par exemple, fusionner l'autorité de poursuite
avec l'autorité d'instruction et de jugement, alors que, selon notre tradition,
celles-ci sont bien distinctes ?
J'arrête là mes questions propos. Le dessein et les hypothèses présentés par
M. le Président de la République sont en fait sous-tendus, si nous allons
jusqu'au bout, par une nouvelle vision de la justice dans notre pays,
c'est-à-dire un véritable bouleversement en ce domaine, deux cents ans après la
Révolution.
Par conséquent, monsieur Dreyfus-Schmidt, c'est tout l'intérêt d'une
commission de réflexion, composée bien entendu de juristes et de praticiens du
droit, mais aussi de philosophes, de sociologues, d'hommes et de femmes
capables d'envisager cette question dans toute son ampleur. Cette commission,
dont M. le Premier ministre et moi-même sommes en train de définir la
composition et la mission, sera mise en place au début du mois de janvier, afin
qu'elle puisse se mettre au travail dans les prochains mois et exercer, au
niveau nécessaire, cette réflexion qui est fondamentale.
Voilà de quoi il s'agit !
Monsieur Dreyfus-Schmidt, connaissant les positions qui sont les vôtres et les
propos que vous avez souvent tenus dans cet hémicycle, un peu longuement
quelquefois - mais, peu importe, ils sont souvent intéressants
(Sourires) -
je ne doute pas que vous serez l'un de ceux qui, au sein de
votre groupe, sauront le mieux concevoir la difficulté mais aussi l'ampleur de
cette tâche que le Président de la République nous a assignée.
Enfin, s'agissant du parquet lui-même, je rappellerai que, en 1993, cette
majorité sénatoriale que vous prétendez si conservatrice a créé, lors de la
révision de la Constitution, une formation du parquet au sein du Conseil
supérieur de la magistrature, ce que le Président de la République de l'époque,
et ce, depuis 1981 ! n'a jamais fait, contrairement à ses promesses.
M. Alain Gournac.
C'est vrai !
M. Jacques Toubon,
garde des sceaux.
Désormais, la situation du parquet est tout à fait
différente, ce qui montre bien, monsieur Dreyfus-Schmidt, que non seulement
nous avons des idées pour l'avenir, mais que nous savons également agir dans le
présent.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
Vous avez vous-même répondu un peu longuement, monsieur le garde des
sceaux.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il a été plus long que moi !
ILLETTRISME ET EXCLUSION
M. le président.
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues,
ma question s'adresse à M. Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche.
Illettrisme, exclusion, deux mots qui nous interpellent tous très fortement,
et en premier lieu les parents, car c'est ou ce devrait être au sein de nos
familles que se prépare l'éveil de l'enfant, par l'amour, l'affection et
l'apprentissage du respect des autres.
L'école ne peut ni ne doit remplacer la famille. Or, périodiquement, la presse
se fait l'écho des chiffres alarmants de l'illettrisme dans notre pays et des
difficultés en lecture ou en calcul que rencontrent un nombre croissant de
jeunes. Elle use, elle abuse de formules chocs sur le sujet. En voici un petit
florilège : « Alerte ! nos écoliers deviennent nuls » ; « Quarante-cinq fautes
par page dans une épreuve de français pour un examen d'institut universitaire
de technologie » ; « Le tableau noir de l'école ».
N'oublions pas les statistiques régulièrement publiées et qui ont de quoi
laisser pantois. Le dernier chiffre en date révèle ainsi que 26 % des écoliers
ne savent pas lire ou calculer à la fin du primaire. Est-ce la vérité, monsieur
le ministre ? Si tel est le cas, c'est trop, beaucoup trop !
Dans le même temps, des sondages et des études indiquent une élévation du
niveau général des élèves.
Mais, au-delà des polémiques, au-delà des chiffres qui souvent ne reflètent
qu'imparfaitement la réalité et qui se contredisent, l'illettrisme, même en
diminution, est un fait de société d'une immense gravité parce qu'il est
surtout facteur d'exclusion.
Je connais, monsieur le ministre, votre détermination à faire reculer l'échec
scolaire et à donner aux jeunes tous les moyens de leur réussite.
M. le président.
Veuillez poser votre question, monsieur Machet.
M. Jacques Machet.
Les dispositions du nouveau contrat pour l'école répondent en partie à cette
préoccupation. Mais il faut aller plus loin et surtout simplifier : trop de
directives tuent les directives.
Quelles orientations, monsieur le ministre, comptez-vous donc prendre pour
endiguer ce que l'on pourrait qualifier, sans trop forcer le trait, de « fléau
social » et d'« insulte à l'égalité des chances » ?
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Monsieur le sénateur, vous avez raison de dire que
l'illettrisme est un fléau. Je vous donne d'autant plus raison que, vous le
savez, avant d'être ministre de l'éducation nationale, j'ai, sous des
gouvernements successifs et de tendances contraires, présidé pendant des années
le groupe permanent de lutte contre l'illettrisme. J'ai donc eu l'occasion
d'évaluer l'importance de ce fléau.
On écrit quelquefois n'importe quoi, c'est exact !
Récemment, j'ai lu un article qui, faisant référence à une enquête, disait
qu'il y avait 40 % d'illettrés.
M. Jean Delaneau.
Aux Etats-Unis !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Face à ce chiffre ahurissant, je me suis procuré l'enquête en
question et j'ai moi-même essayé de répondre aux tests : je me suis retrouvé
dans la catégorie « illettrés » !
(Rires.)
Mme Maryse Bergé-Lavigne.
Vous exagérez !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Non, je ne dis que la vérité ! D'ailleurs, je suis prêt à faire
faire aux sénateurs qui le souhaiteront les tests en question.
(Nouveaux
rires.)
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Chiche !
M. le président.
Nous n'avons pas le temps aujourd'hui, monsieur le ministre !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
C'est dire, je le répète, que l'on écrit quelquefois n'importe
quoi !
Selon les niveaux, entre un sixième et un cinquième des élèves français se
trouvent en grande difficulté scolaire, souvent parce qu'ils ne maîtrisent pas
les outils fondamentaux qui permettent de construire un savoir ; l'écrit figure
parmi ces outils fondamentaux.
Qu'avons-nous fait ? Je citerai trois des mesures principales qui ont été
prises.
Tout d'abord, afin d'assurer la prévention la plus précoce possible dans les
zones les plus fragiles, nous avons diminué de manière très importante le
nombre des élèves de classe maternelle dans les zones d'éducation
prioritaire.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Vous avez diminué le nombre d'enseignants !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
En 1993, le nombre moyen était de trente élèves alors que, à la
prochaine rentrée, il sera de vingt-cinq.
M. Jacques Mahéas.
Vous avez commencé par l'augmenter !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
C'est dire que la baisse est considérable !
Ensuite, nous avons fait de l'écrit le centre de tous les programmes. A cet
effet, nous avons revu tous les programmes de l'école primaire et du début du
collège, la suite du collège étant en cours.
Enfin, nous avons institué des études dirigées tous les jours, dans toutes les
classes, à l'école primaire, en sixième et en cinquième ; ces études dirigées
permettent aux enseignants d'assurer un suivi pédagogique des élèves.
Pour l'instant, une chose n'a pas été faite, sur laquelle vous avez eu raison
d'insister, monsieur Machet, parce que c'est une tâche difficile : il s'agit
d'entraîner tous les enseignants en charge de la pédagogie de la lecture à une
réflexion sur, précisément, les méthodes de transmission des connaissances,
pour déterminer si une véritable recherche pédagogique peut nous amener à
isoler un certain nombre des éléments qui expliquent cet échec. Je pense que
oui.
Au mois de janvier prochain, je lancerai une étude dans ce sens avec tous les
enseignants chargés d'apprentissage de la lecture en France, car vous avez
raison - ce sera ma conclusion - d'insister sur ce point : l'échec subi en
début de scolarité est très difficile à rattraper plus tard. Quelle que soit la
raison de cet échec, lorsqu'un élève est engagé dans une situation où il
n'arrive pas à maîtriser les outils fondamentaux, il a le plus grand mal à
rattraper ce retard. Par conséquent, il vaut mieux éviter que ce retard se
crée.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
DIFFICULTÉS DE L'HÔTELLERIE-RESTAURATION
DANS LE CALVADOS
M. le président.
La parole est à M. de Bourgoing.
M. Philippe de Bourgoing.
Ma question s'adressait à M. Pons, ministre de l'équipement, du logement, des
transports, mais aussi ministre du tourisme. Cependant, je crois savoir que
c'est Mme Idrac qui me répondra. Je vous en remercie, madame le secrétaire
d'Etat aux transports.
Comme dans toutes les régions où le tourisme joue un rôle prépondérant, les
parlementaires, qui d'ailleurs viennent de vous écrire, et les conseillers
généraux du Calvados nourrissent les plus vives inquiétudes à la suite du cri
d'alarme que viennent de leur lancer, par deux fois, les hôteliers et
restaurateurs du département duCalvados.
Frappés de plein fouet par la diminution de leur clientèle, liée aux
circonstances économiques et à la concurrence internationale - cette diminution
atteint parfois 30 % et plus - ils éprouvent les plus grandes difficultés,
d'une part, à assurer un emploi à leur personnel, alors qu'ils sont le
quatrième employeur de France, d'autre part, à faire face à des engagements
financiers contractés dans des circonstances plus favorables, au risque de
réduire leurs achats de produits de qualité offerts par les agriculteurs et
pêcheurs français.
Les problèmes auxquels ils sont confrontés s'accumulent : taxe professionnelle
défavorable aux employeurs de main-d'oeuvre et aux investisseurs ; distorsion
de charges, avec une TVA au taux de 26 % - elle est plus élevée que dans les
autres pays d'Europe, parmi lesquels huit pays sont autorisés par dérogation à
utiliser un taux réduit - face à la restauration industrielle et à la
paracommercialisation, qui sont taxées à 5,5 %.
Pourtant, les charges salariales représentent 35 % à 40 % du chiffre
d'affaires des hôteliers et des restaurateurs, tandis qu'ils ne s'élèvent qu'à
12 % chez les autres.
On constate également une distorsion entre les tickets-restaurants, qui sont
exemptés de charges sociales, et les avantages en nature consentis au
personnel, qui y sont assujettis.
Dans ce contexte, ils ne peuvent plus faire face à leurs engagements
financiers : dans le seul ressort du tribunal de commerce de Caen, soixante
entreprises de cette branche ont été mises en liquidation judiciaire cette
année et plusieurs sont à la veille de l'être.
M. le président.
Veuillez poser votre question, monsieur de Bourgoing.
M. Philippe de Bourgoing.
Le lancement de la banque des petites et moyennes entreprises vient d'être
annoncé. Il est urgent que cela se traduise sur le terrain par des
rééchelonnements d'échéances car, jusqu'à présent, le système SOFARIS s'est
montré très décevant face au manque de confiance du système bancaire.
L'autorisation d'ouverture maintenant nécessaire pour les hôtels de plus de
trente chambres est une bonne mesure du fait du nombre trop élevé des
établissements déjà créés. Mais son influence ne se fera sentir que dans le
temps.
M. Claude Estier.
La question !
M. Philippe de Bourgoing.
Ce qui est indispensable, ce sont des mesures rapides. M. le ministre en a
annoncé quelques-unes lors de l'examen de son budget.
M. le président.
Posez votre question, M. deBourgoing.
M. Philippe de Bourgoing.
La voilà : quand entreront-elles dans les faits ?
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Anne-Marie Idrac,
secrétaire d'Etat aux transports.
Monsieur le sénateur, je vous prie de
bien vouloir excuser l'absence de M. Bernard Pons, qui se trouve aujourd'hui en
mission à l'étranger avec des représentants d'entreprises pour promouvoir
l'exportation et l'emploi français.
Il m'a chargée de vous dire à quel point il était conscient des problèmes que
vous avez évoqués et attentif aux difficultés que vous avez très bien relatées,
puisque vous y êtes vous-même confronté.
C'est la raison pour laquelle, sur la proposition de M. Bernard Pons - il
connaît bien ce secteur -, plusieurs avancées décisives ont été réalisées ces
derniers mois.
Une exonération des charges patronales sur les avantages en nature nourriture,
demandée depuis trente ans, a été enfin décidée elle entrera en vigueur par
étapes dès la signature de la convention collective nationale.
Le barème de la redevance télévision a été aménagé en faveur des petits
hôtels, ce qui était attendu depuis des années.
S'agissant de la TVA - je parle sous le contrôle de M. Alain Lamassoure - la
question est complexe, vous le savez. Le Gouvernement s'est engagé à la
baisser, dès que la situation des finances publiques le permettra. Dans
l'immédiat, une table ronde sera organisée dès le début de l'année avec les
professionnels par MM. Bernard Pons, Jean Arthuis et Jean-Pierre Raffarin -
également très concerné - pour examiner les moyens d'améliorer le régime de la
TVA spécifiquement applicable à la restauration.
Enfin, vous avez raison de souligner l'acuité du problème posé par
l'endettement hôtelier, que M. Bernard Pons souhaite traiter en priorité. Un
dispositif particulier a d'ores et déjà été mis en place avec la SOFARIS. Il
est insuffisant, vous l'avez dit. La banque de développement des PME mise en
place sur l'initiative de M. Jean-Pierre Raffarin pourra donc jouer un rôle
accru et, je l'espère, moteur dans ce domaine. D'autres mécanismes peuvent être
envisagés. Le Gouvernement y travaille et M. Bernard Pons fera prochainement
des propositions.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et
Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
ÉTAT D'AVANCEMENT DE LA RÉFORME DE L'ÉTAT
M. le président.
La parole est à M. Flandre.
M. Hilaire Flandre.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues,
ma question s'adresse à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme
de l'Etat et de la décentralisation.
Depuis plusieurs mois, le Gouvernement a engagé la vaste réforme de l'Etat
préconisée par M. le Président de la République. C'est ainsi que nous
préparerons la France à devenir un pays plus solidaire, plus uni et plus fort
et l'Etat français un Etat moderne, véritablement au service de l'ensemble de
nos concitoyens.
M. Jacques Mahéas.
En supprimant les fonctionnaires !
M. Hilaire Flandre.
Monsieur le ministre, nous savons qu'il ne s'agit ni de modifier le statut de
la fonction publique ni de porter atteinte aux principes du service public,
auxquels nous sommes très attachés.
Cette réforme de l'Etat, nous en approuvons pleinement l'objectif majeur, qui
est l'amélioration de la qualité de l'Etat. Nous souhaitons, comme vous, que la
vie quotidienne de tous soit facilitée, que les autorités publiques soient plus
proches des citoyens et que la gestion de l'Etat soit rénovée.
A l'occasion du conseil des ministres qui s'est tenu hier, vous avez présenté
une importante communication à ce sujet, monsieur le ministre. Pouvez-vous
informer le Sénat sur l'état exact d'avancement de cet ambitieux chantier
qu'est la réforme de l'Etat et que l'ensemble de nos concitoyens appellent de
leurs voeux ?
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de me donner
l'occasion de faire le point sur cette réforme.
Je ferai tout d'abord une remarque d'ordre général. En effet, pour une réforme
de ce type, ce qui compte c'est à la fois la définition de ses objectifs, mais
également la méthode par laquelle on peut avancer sur un dossier aussi vaste et
aussi complexe.
Depuis un an, le travail a été engagé et, en particulier, j'ai poursuivi une
concertation extrêmement approfondie avec tous les partenaires de l'action
administrative. Je crois pouvoir dire aujourd'hui que les mentalités ont
considérablement évolué par rapport à cet objectif et à cette nécessité de
réforme ; en particulier au sein de l'administration s'est créée
progressivement au fil des mois une véritable dynamique qui fait aujourd'hui de
chaque administration un élément moteur dans cette direction de la réforme, ce
qui n'était pas évident voilà seulement quelques mois.
Je voudrais également vous indiquer que, s'agissant des partenaires sociaux au
sein de la fonction publique, j'ai noté la même évolution, qui est probablement
le résultat du travail d'explication qu'ont pu faire les membres du
Gouvernement.
Où en sommes-nous ?
Il y a, comme vous le savez, deux objectifs principaux : un objectif de
simplification et un objectif de modernisation et d'accélération des processus
administratifs.
S'agissant de la simplification, le projet de loi qui fondera un certain
nombre de réformes importantes sera examiné par l'Assemblée nationale au début
du mois de janvier.
Il prévoira, en particulier, des règles nouvelles, aux termes desquelles, par
exemple, au-delà de deux mois, la non-réponse de l'administration vaudra
acceptation. Ce projet de loi donnera des pouvoirs supplémentaires
d'investigation et de conseil au Médiateur de la République. Par ailleurs, il
fondera la création des maisons de service public.
Au-delà de ce projet de loi, toujours en matière de simplification, nous
avançons sur le plan réglementaire, avec la mise au point d'un certain nombre
de décrets qui vont permettre la suppression, par centaines, de régimes
d'autorisation administrative ou la transformation de ces régimes
d'autorisation en régimes de simple déclaration.
Le second objectif, c'est la modernisation de l'administration. A cet égard,
un mot résume la volonté du Gouvernement : la déconcentration. Nous voulons
confier aux échelons locaux de l'administration un rôle accru par rapport à ce
qu'il est aujourd'hui.
A cet effet, j'ai transmis, voilà quelques jours, au Conseil d'Etat un projet
de décret qui fixera, à partir du 1er janvier 1998, la règle selon laquelle
toute décision individuelle de l'administration sera de la compétence exclusive
de l'échelon local de l'administration. Bien sûr, d'ici au 1er janvier 1998,
nous examinerons les cas particuliers qui ne peuvent pas répondre à cette règle
de caractère général.
Dans le même esprit, le Gouvernement a, voilà quelques jours, décidé, dans le
cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 1998, de fixer un
certain nombre de chapitres budgétaires qui seront déconcentrés, afin d'éviter,
grâce à ce mécanisme, la remontée au niveau ministériel de crédits que l'on
annonce comme déconcentrés en début d'année et qui, miraculeusement, se
révèlent être recentralisés en cours d'année en termes de décisions.
Je voudrais également vous indiquer qu'en tant que ministre de la fonction
publique j'ai engagé un effort important, qui est aujourd'hui accepté par
l'essentiel de mes partenaires, en matière de déconcentration de la gestion des
personnels. En effet, on ne fera pas une administration déconcentrée si l'on
maintient une gestion concentrée, centralisée de la gestion des personnels. Un
certain nombre de dispositifs, prévus par des décrets qui ont été soumis au
Conseil supérieur de la fonction publique voilà quelques jours, pourront être
mis en oeuvre au début de l'année 1997.
Par ailleurs, la réforme des ministères, qui comporte un double objectif, à
savoir la diminution des effectifs de 10 % et la diminution du nombre des
directions de 30 %, est en cours. A cet égard, je serai amené à faire des
propositions à M. le Premier ministre au cours du mois de janvier 1997.
Enfin, s'agissant des services déconcentrés de l'Etat - nos administrations
départementales dans les départements - nous mènerons des expériences en vraie
grandeur à partir du début de 1997 pour tester une architecture administrative
mieux adaptée à la réalité actuelle de notre société.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
INONDATIONS DANS LE MIDI
M. le président.
La parole est à M. Courteau.
M. Roland Courteau.
Il est de mon devoir, pour la deuxième fois en quelques jours, d'attirer
l'attention du Gouvernement sur l'exceptionnelle gravité des dommages provoqués
par les pluies diluviennes et les inondations survenues la semaine dernière
dans les départements du Midi : coulées de boue dans les habitations,
importants dommages aux équipements publics, dégâts aux zones agricoles,
viticoles et horticoles.
Face à ce cataclysme, la chaîne de solidarité doit s'étendre et s'amplifier,
tant les préjudices subis ont été importants. C'est pourquoi j'en appelle à une
intervention de l'Etat qui soit à la mesure du sinistre et qui traduise la
solidarité de la collectivité nationale à l'égard de nos concitoyens
cruellement éprouvés.
Pourra-t-on compter sur l'aide de l'Etat pour éviter que ne soient laissées
aux collectivités, aux personnes sinistrées et aux acteurs économiques des
charges qu'ils ne pourraient supporter ?
Il faut, par ailleurs, que soit reconnu très vite l'état de catastrophe
naturelle. Il importe, enfin, qu'en matière de calamités agricoles la
simultanéité des procédures de reconnaissance et d'indemnisation permette
d'aboutir à des indemnisations rapides.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous faire le point sur les mesures prises
en faveur de nos concitoyens si durement éprouvés ?
Par ailleurs, même si l'heure n'est certainement pas à la polémique, il
m'appartient de rappeler aux ministres ici présents les différents cris
d'alarme que j'ai lancés ici même au sujet de la poursuite des indispensables
travaux de protection contre les crues de l'Aude.
Ici au Sénat, en juin 1994, j'avais alerté le ministre de l'environnement en
disant que le danger était réel et que les pouvoirs publics se devaient de
réagir pour prévenir toute catastrophe, l'insuffisance des crédits risquant
d'entraîner l'arrêt des travaux de protection contre les crues. Mais je n'ai
pas été entendu !
M. Jacques Mahéas.
C'est vrai !
M. Roland Courteau.
En décembre 1994, toujours ici, j'ai lancé un deuxième cri d'alarme en
indiquant que l'Etat avait trop longtemps attendu pour accorder les
financements suffisants pour permettre de compléter les travaux de protection.
J'avais encore prévenu : plus l'Etat tardera et plus les risques
s'accroîtront.
M. Jacques Mahéas.
Eh oui !
M. Roland Courteau.
Mais je n'ai pas été davantage entendu !
L'impact de la catastrophe que nous venons de vivre et que nous ne voulons
plus revivre suffira-t-il à faire en sorte que les appels lancés par les élus
depuis quatre ans soient enfin pris en considération ?
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen. - M. Vigouroux applaudit
également.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Dominique Perben,
ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord
d'excuser M. Debré, qui participe en ce moment à la discussion d'un texte qu'il
a proposé à l'Assemblée nationale.
Monsieur Courteau, la solidarité nationale a d'ores et déjà été engagée, dans
la mesure où, au moment de la catastrophe, des moyens très importants ont été
mis en oeuvre pour secourir les personnes et les biens qui étaient menacés.
S'agissant des dispositifs d'indemnisation et d'aide de l'Etat, il existe,
comme vous le savez, différents degrés, divers chapitres. Il y a d'abord les
secours d'extrême urgence : le processus est en cours. Il y a ensuite, bien
sûr, la question de savoir s'il y a ou non reconnaissance de l'état de
catastrophe naturelle. Je vous confirme, comme M. Debré l'a indiqué voilà
quelques jours à l'Assemblée nationale, que c'est la commission
interministérielle du 20 décembre - c'est demain - qui examinera le dossier et
qui, très probablement - je ne peux pas préjuger son travail, mais je suppose
que c'est ce qu'elle fera ! - reconnaîtra cet état de catastrophe naturelle.
Enfin, il y a le dossier difficile que vous évoquez - c'est en général,
d'ailleurs, le plus difficile que l'on rencontre - celui des biens appartenant
à un certain nombre de personnes publiques, c'est-à-dire les biens des
collectivités publiques.
Dans ce domaine, il n'y a pas de règle automatique. Un certain nombre de
crédits sont inscrits dans les lois de finances initiales avec, en général, des
abondements dans les lois de finances rectificatives ; c'est ce qui s'est passé
en 1996. Ainsi, lors de la discussion de la dernière loi de finances
rectificative, vous avez vu apparaître un abondement de la ligne consacrée aux
inondations qui se sont déroulées en 1996.
C'est dans le cadre de ces crédits que l'Etat pourra apporter un élément de
solidarité nationale pour la reconstitution des patrimoines des collectivités
locales, selon des pourcentages de subventionnement qui se situent généralement
autour de 20 %, encore qu'il n'y ait pas de règle absolue en la matière.
Telles sont, monsieur le sénateur, les indications que M. Debré m'a demandé de
vous communiquer.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. Roland Courteau.
C'est un peu court !
M. Jacques Mahéas.
Et les mesures ? Répondez à la question !
POLITIQUE EUROPÉENNE DES TRANSPORTS
M. le président.
La parole est à M. Malécot.
M. Kléber Malécot.
Madame le secrétaire d'Etat, Les questions de transport sont au coeur de la
vie quotidienne des Français. Elles sont aussi très souvent au coeur des
politiques de libéralisation menées sous l'égide de la Communauté européenne,
ce qui ne va pas sans susciter d'assez fréquentes difficultés.
Vous venez de participer à Bruxelles au conseil des ministres de l'Union
européenne chargés des transports. Pouvez-vous nous dire quelles ont été les
conclusions de cette réunion et, tout particulièrement, comment a été prise en
compte la problématique que je viens d'évoquer entre la libéralisation
économique et la prise en compte des intérêts des entreprises de transport et
de leurs salariés, mais aussi, plus généralement, du service public ?
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Anne-Marie Idrac,
secrétaire d'Etat aux transports.
Monsieur le sénateur, vous avez tout à
fait raison de souligner la dimension communautaire de nos politiques de
transport et leurs aspects à la fois économiques, sociaux, d'aménagement du
territoire et de service public. Bref, par ces politiques, nous pouvons montrer
le type d'Europe que nous voulons.
Le Gouvernement est conscient des avantages que la concurrence apporte aux
usagers. On le voit bien, par exemple, avec la baisse des prix et le
développement du transport aérien qui a pu se faire dans des conditions qu'on
ne pouvait imaginer voilà encore quelques années. Toutefois, et cela doit être
affirmé fortement, nous militons pour une libéralisation maîtrisée.
Sans relater dans le détail la rénion de ce conseil des ministres, qui a,
comme toujours, été extrêmement riche, je m'empresse de dire que le problème se
présente de manière toute différente en ce qui concerne le transport
ferroviaire. Il est clair que nous ne souhaitons pas envisager quelque
libéralisation que ce soit de ce mode de transport, et c'est la position que
j'ai été amenée à prendre de la manière la plus claire, comme M. Pons l'avait
fait précédemment, à l'occasion du débat qui a eu lieu sur le trop célèbre
livre blanc sur le transport ferroviaire proposé par la Commission.
Cette dernière souhaite, par ailleurs, aller de l'avant, avec des
expérimentations en matière de transport de fret. Elle constate que les trains
de marchandises ne vont pas assez vite ; c'est sans doute une des raisons pour
lesquelles nombre d'entre nous considérons qu'il y a, comme on dit, un peu trop
de camions sur les routes. Je constate effectivement que le développement des
transports de marchandises par chemin de fer est une bonne idée, mais
certainement pas une idée dont la réalisation doit être envisagée par une
approche juridique et donc par une approche visant à modifier le système
communautaire existant. Je souhaite, en particulier, que l'on ne mette pas en
cause la législation en vigueur et que le développement du chemin de fer se
fasse par une coopération entre les entreprises ferroviaires.
Nous avons par ailleurs évoqué un certain nombre de sujets concernant le
transport par route. En ce qui concerne les voyageurs, j'ai été
particulièrement heureuse que la directive sur le détachement des travailleurs,
qui a été récemment adoptée, puisse s'appliquer au transport par route de
voyageurs.
En ce qui concerne les marchandises, j'ai pu constater l'appui de l'Allemagne,
et je m'en réjouis. Le ministre Mathias Wiesmann a donné son accord à des
progrès vers une harmonisation sociale en matière de marchandises.
De même, je pense que la nouvelle stratégie maritime développée maintenant par
l'Europe est favorable au maintien de l'emploi et va tout à fait dans le sens
du type d'Europe que nous souhaitons.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste.)
MISE AUX NORMES DES ÉQUIPEMENTS DE TRAVAIL
DANS LES COLLÈGES
M. le président.
La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot.
Ma question s'adresse à M. Bayrou, ministre de l'éducation nationale, de
l'enseignement supérieur et de la recherche, et concerne l'obligation, pour les
collectivités locales, et particulièrement les conseils généraux, de mettre aux
normes les équipements de travail dans les collèges.
M. Alain Vasselle.
Vaste problème !
M. Philippe Adnot.
Conscients du problème, nous avons mis en place une stratégie, nous avons fait
intervenir un cabinet pour déterminer la liste des matériels concernés, le coût
éventuel. Dans un département comme le mien, qui compte 290 000 habitants, cela
représente 20 millions de francs. Il nous faut maintenant passer à une autre
phase et faire appel de nouveau à un cabinet pour savoir exactement ce qu'il
convient de remplacer et de modifier. Il faudra ensuite passer par les artisans
ou les personnes concernées pour faire les modifications.
Or, nous devons faire cette mise aux normes avant le 1er janvier 1997. Sans
même parler du problème financier, c'est tout à fait impossible.
Je rappellerai, par comparaison, que le coût s'élève à 20 millions de francs
alors que, au moment du transfert, pour l'ensemble de l'entretien des collèges
- constructions et matériel - la dotation qui nous avait été attribuée
s'élevait à 5 millions de francs ; nous consacrons déjà huit fois cette somme
rien qu'à l'équipement immobilier dans le département de l'Aube.
Nous sommes dans l'incapacité de respecter les délais. Monsieur le ministre,
dans une lettre qu'il m'a envoyée, l'inspecteur d'académie précise, après avoir
rappelé l'obligation de mise en conformité : « Il m'est apparu que, dans un
contexte de mise en accusation par la justice des chefs d'établissement,
ceux-ci sont résolus à débrancher toutes les machines non conformes encore
présentes dans les ateliers à la rentrée de janvier. »
L'alternative est simple : à la rentrée de janvier, soit il n'y aura plus de
cours dans les classes de technologie, soit on nous accordera des délais ! Il
serait quand même étonnant que ce qui était acceptable au 25 décembre ne le
soit plus au 5 janvier ! J'aimerais connaître votre position à cet égard,
monsieur le ministre.
(Applaudissements sur les travées de l'Union
centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Je ne méconnais pas, monsieur Adnot, l'importance de la
question que vous posez. Permettez-moi seulement de la relativiser, en vous
précisant que la date du 1er janvier 1997, qui s'impose à nous, résulte d'une
directive européenne du 30 novembre 1989 et d'un décret du 11 janvier 1993.
Il ne s'agit donc pas d'une obligation qui vient d'apparaître !
M. Emmanuel Hamel.
Il fallait la rappeler !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Cela a été rappelé,...
M. Emmanuel Hamel.
Pas assez !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
... puisque l'un de mes prédécesseurs a pris un décret.
Je disais donc, monsieur Adnot, que cette obligation n'est pas nouvelle ; elle
est au contraire très ancienne, mais elle vient aujourd'hui à échéance.
M. Philippe Adnot.
Les matériels ne sont plus aux normes !
M. Alain Vasselle.
Les normes changent trop souvent !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Monsieur Adnot, le ministre de l'éducation nationale a trois
obligations.
La première de ses obligations, vous le comprendrez,...
M. Emmanuel Hamel.
C'est la sécurité des élèves !
M. Alain Vasselle.
Bien sûr !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
... c'est effectivement de garantir la sécurité des élèves.
La deuxième, c'est d'assurer la continuité du service.
Enfin, la troisième, c'est de veiller au respect des programmes.
Vous me demandez s'il est possible de changer la date d'échéance ; à cette
question, je dois vous répondre que, pour des raisons à la fois juridiques et
morales, cela ne me paraît pas imaginable.
Pour des raisons juridiques tout d'abord, la date du 1er janvier 1997 ne peut
pas être modifiée. En effet, comme je l'ai signalé, deux textes, à savoir une
directive européenne et un décret français, l'ont fixée. La conjonction des
deux rend donc impossible le report de cette date. Au demeurant, qui, parmi
nous, prendrait la responsabilité de différer l'application d'une mesure qui
vise à assurer la sécurité des élèves ? Aucun d'entre nous !
Il me paraît donc normal et légitime de ne pas toucher au dispositif
juridique.
M. Emmanuel Hamel.
Il faut des crédits pour remplacer les machines !
M. François Bayrou,
ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la
recherche.
Deuxièmement, M. Schléret, dans le rapport qu'il m'a remis
hier, a recensé à ma demande les risques et les difficultés. Il m'a d'ailleurs
confirmé qu'il était impossible de différer cette échéance.
J'ai donc donné deux types d'instructions précises.
J'ai tout d'abord demandé aux recteurs d'examiner, en liaison avec les
collectivités locales responsables, le parc de machines et de prendre toutes
dispositions pour accélérer les mises en conformité de ce parc, entreprendre
les travaux d'urgence et signer des conventions avec les régions et les
départements afin de pouvoir préciser cet échéancier.
J'ai par ailleurs demandé aux chefs d'établissement, dont la responsabilité
pourrait être engagée, de signaler les risques aux autorités académiques et
régionales ainsi qu'au comité d'hygiène et de sécurité et au conseil
d'administration de leur établissement, afin que soient précisément déterminées
les précautions à prendre pour l'emploi de chaque machine et que, si un danger
grave et imminent persistait, la machine soit arrêtée.
Nous avons, hélas ! à déplorer chaque année des accidents dans les ateliers,
et nous ne pouvons à mon avis pas mettre en danger la sécurité des élèves avec
des équipements dont nous saurions qu'ils sont défectueux. Je suis sûr que les
responsables de collectivité locale, les recteurs et les chefs d'établissement
feront en conscience leur travail dans cette affaire.
(Applaudissements sur
les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président.
Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures dix,
sous la présidence M. Jean Faure.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
DÉCÈS D'UN ANCIEN SÉNATEUR
M. le président.
J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Roger
Fossé, qui fut sénateur de la Seine-Maritime de 1993 à 1995.
7
MODIFICATION DE L'ORDRE DU JOUR
M. le président.
M. le président du Sénat a reçu de M. le ministre des relations avec le
Parlement une lettre en date de ce jour aux termes de laquelle, pour la séance
de demain, la discussion des conclusions de la commission mixte paritaire sur
le projet de loi relatif à la zone franche de Corse est inscrite après celle
des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à
l'élimination des cadavres d'animaux.
L'ordre du jour de la séance de demain, vendredi 20 décembre, est modifié en
conséquence.
8
TRAITÉ AVEC L'ESPAGNE
RELATIF À LA COOPÉRATION TRANSFRONTALIÈRE
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 106, 1996-1997),
adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du traité entre la
République française et le Royaume d'Espagne relatif à la coopération
transfrontalière entre collectivités territoriales, signé à Bayonne le 10 mars
1995. [Rapport n° 132 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Alain Lamassoure,
ministre délégué au budget, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le
président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat
est invité aujourd'hui à autoriser la ratification du traité bilatéral
franco-espagnol signé à Bayonne le 10 mars 1995, après le vote intervenu à
l'Assemblée nationale le 28 novembre dernier. Le même jour d'ailleurs, la
Chambre des députés espagnole a ratifié ce traité, qui sera soumis au Sénat
espagnol dans quelques jours.
Il s'agit d'un traité d'un nouveau type, à la fois par son contenu, par son
contexte européen et par son caractère exemplaire.
Ce texte est tout d'abord exemplaire par son contenu.
Ce traité fait suite à un traité précédent passé entre nos deux pays en 1856,
soit voilà plus de cent ans. A l'époque, il s'agissait de régler des problèmes
de bornage et des droits de pacage entre éleveurs par ce que l'on appelait un
traité de bonne correspondance : certains éleveurs frontaliers avaient le droit
de jouissance de pâturages, soit pour toute la durée de la saison - l'estive -
soit, comme le disait joliment le traité, « de soleil à soleil », c'est-à-dire
avec l'obligation de regagner son propre territoire à la nuit tombante.
Il existait déjà une originalité par rapport à notre droit international
classique : les communes pyrénéennes étaient, en France, les seules habilitées
à passer des accords internationaux, les « faceries », et les élus locaux de
l'époque étaient considérés comme des « faisans », au sens non pas des
volatiles
(Sourires)
mais des acteurs qui agissent, qui font, traduction
française du mot espagnol « faceros ». L'île des Faisans, sur la Bidassoa,
était en fait l'île des diplomates.
Le traité de 1995 a une tout autre portée : il s'agit de permettre aux
collectivités locales pyrénéennes de conduire des projets en commun dans tous
leurs champs de compétences : l'urbanisme, l'environnement, les transports, le
tourisme, l'aménagement de zones d'activités, l'enseignement, la formation
professionnelle, la culture.
Ce traité est original, ensuite, par son contexte européen. Il vise à mettre
fin à un paradoxe.
En effet, depuis la signature du traité de Rome, des élargissements successifs
se sont produits, notamment l'entrée de l'Espagne et du Portugal dans l'Union
européenne, et les relations transfrontalières se sont multipliées, tant sur
les plans économique et culturel qu'entre les élus des deux côtés de la
frontière. Pourtant, en dépit de ces évolutions et de la volonté politique des
élus locaux, les relations entre collectivités territoriales ne se sont pas
développées au même rythme. C'est l'absence de fondements juridiques aux
projets communs qui explique cet état de fait.
C'est pourquoi, dans le présent traité, est affirmée la liberté des
collectivités territoriales et de leurs groupements de passer des conventions
de coopération transfrontalière qui respectent les principes de la prééminence
du droit interne et de la compétence commune. Sont toutefois exclues de
l'objet, les matières relevant des pouvoirs de police, de réglementation, de la
fiscalité et les attributions exercées par les autorités locales en qualité
d'agent de l'Etat ou celles qui seraient de nature à porter atteinte aux droits
individuels.
En revanche, sont reconnus le libre choix du droit applicable à la convention
et la responsabilité contractuelle ou collective à l'égard des tiers et des
usagers.
De même - et c'est une très grande novation - est désormais possible la
participation de collectivités locales espagnoles aux structures de coopération
juridiques françaises actuelles, qu'il s'agisse des groupements d'intérêt
public, des sociétés d'économie mixte ou de toute autre forme de groupement de
collectivités, en particulier des structures intercommunales. En contrepartie,
les collectivités françaises pourront participer aux groupements espagnols tels
que les
consorcios.
Il est également possible de créer des structures conjointes qui rassembleront
des collectivités des deux côtés de la frontière.
Les évolutions internes à venir dans chaque pays sont nettement préservées en
matière de structures nouvelles de coopération.
Enfin, ont été précisées les dispositions de mise en oeuvre et de
fonctionnement de la commission franco-espagnole de coopération
transfrontalière. Cette commission aura pour tâche de rendre effectif et
efficace le fonctionnement de la coopération transfrontalière, en rendant
compte de ses progrès, des problèmes soulevés et des propositions concrètes à
envisager pour l'améliorer.
Le traité franco-espagnol de Bayonne devrait avoir un impact important dans
différents domaines.
En matière d'emploi, il devrait permettre la création d'un plus grand nombre
d'emplois transfrontaliers, tant par le développement de services et
d'administrations nouvelles que par l'impulsion économique dont profiteront les
entreprises locales.
Sur le plan de l'intérêt général, de nombreux projets envisagés et accords
déjà signés deviendront effectifs après l'approbation du traité.
J'en citerai quelques-uns, en commençant par l'est de la frontière : en
matière culturelle, l'accord entre la ville de Perpignan et la Généralité de
Catalogne ; le projet d'installation d'une radio franco-catalane à Barcelone ;
le projet d'une liaison Talgo régionale Toulouse-Barcelone par le tunnel
ferroviaire du Puymorens et, demain, le projet de train à grande vitesse entre
la France et l'Espagne par Perpignan et Barcelone ; en ce qui concerne la
gestion hydraulique, le projet de fourniture d'eau à Barcelone par la compagnie
Bas-Rhône-Languedoc. De l'autre côté de la frontière, au Pays basque,
l'euro-district Hendaye-Irun-Fontarrabia pour la collecte des ordures ménagères
et pour l'assainissement des eaux de la baie de Txingudi ; le développement des
accords qui ont été passés par la région Aquitaine avec la communauté autonome
d'Euskadi et avec la Navarre, par le département des Pyrénées-Atlantiques avec
ses homologues de l'autre côté de la frontière ou par le district
Bayonne-Anglet-Biarritz avec la
deputación
de Guipuzcoa.
Des retombées financières sont également attendues, notamment grâce aux fonds
que l'Union européenne met à la disposition de ces exemples de coopération
transfrontalière, notamment à travers le programme INTERREG.
Enfin, ce texte instaurera une meilleure sécurité juridique dans la mise en
oeuvre de la coopération transfrontalière, tout en préservant la marge de
manoeuvre et l'esprit d'initiative des collectivités territoriales, selon le
principe de subsidiarité.
En particulier, en ce qui concerne le Pays basque, ce texte pourra avoir des
conséquences historiques : le département des Pyrénées-Atlantiques, le district
de Bayonne-Anglet-Biarritz et les communes frontalières ont déjà beaucoup de
projets communs, mais, au-delà, ce traité nous permettra de créer des entités
communes pour agir ensemble.
Je voudrais, enfin, me réjouir de cette nouvelle traduction concrète des
bonnes relations franco-espagnoles et rappeler, au nom du gouvernement
français, que, sur tous les grands sujets européens, Paris et Madrid ont une
vision commune et que la France suit avec une très grande estime la politique
courageuse conduite par le gouvernement espagnol pour qualifier son pays pour
l'union économique et monétaire.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les
principales dispositions du traité entre la République française et le Royaume
d'Espagne relatif à la coopération transfrontalière, qui fait l'objet du projet
de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Alloncle,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers
collègues, le traité franco-espagnol signé à Bayonne le 10 mars 1995 constitue
une étape importante dans la construction d'un cadre juridique permettant de
développer la coopération entre collectivités locales frontalières.
Le Sénat a déjà abordé ce sujet au début de la session avec l'accord de
Karlsruhe, qui concernait, quant à lui, la coopération entre collectivités
françaises, allemandes, luxembourgeoises et suisses.
Nous avions alors souligné l'intérêt croissant de nos collectivités locales
pour ce type de coopération. Leurs initiatives se sont multipliées depuis
quelques années mais, durant trop longtemps, les projets concrets visant à
créer ou à gérer des équipements communs n'ont pu voir le jour faute de cadre
juridique approprié.
En effet, les instruments juridiques capables de donner une base légale à ces
initiatives n'ont été mis en place que très progressivement : il s'agit de la
convention-cadre du Conseil de l'Europe de 1980, dite « convention de Madrid »,
et surtout des lois de 1992 sur l'administration territoriale et de 1995 sur
l'aménagement du territoire, dont j'ai présenté, dans mon rapport écrit, les
principales dispositions favorisant la coopération transfrontalière.
Cette évolution importante du droit français n'a pas pour autant aplani tous
les obstables juridiques qui entravent encore les actions de coopération. C'est
pourquoi il a été nécessaire de conclure avec les pays voisins des accords
interétatiques permettant de régler, au cas par cas, les problèmes pratiques
soulevés par la coopération transfrontalière.
Le traité de Bayonne constitue l'un des trois accords conclus par la France
avec ses partenaires.
Vous avez présenté de manière très complète, monsieur le ministre, les
principales caractéristiques de ce traité, qui vous doit beaucoup puisque vous
aviez activement oeuvré à sa conclusion alors que vous occupiez les fonctions
de ministre des affaires européennes.
Je me limiterai simplement à deux observations.
La première concerne le champ d'application géographique du traité. Celui-ci
est très vaste puisque toute collectivité locale incluse dans l'une des quatre
communautés autonomes espagnoles ou l'une des trois régions françaises
frontalières pourra participer à un accord ou à un organisme de coopération.
Le traité ne se limite pas aux collectivités situées sur la frontière. Des
villes telles que Bordeaux, Toulouse ou Montpellier, ainsi que des départements
non frontaliers mais proches de l'Espagne comme les Landes ou l'Hérault,
pourront aussi s'intégrer dans le dispositif.
En revanche, il faudra trouver une solution permettant d'associer Andorre, qui
n'est pas couvert par le traité mais qui participe à la communauté de travail
des Pyrénées, instance de coopération très active mise en place depuis 1983.
Ma seconde observation me conduit à constater que le traité de Bayonne est
moins novateur que l'accord de Karlsruhe, qui, il est vrai, lui est postérieur.
Ce dernier instaure en effet, sous la forme du groupement local de coopération
transfrontalière, un instrument juridique nouveau, plus souple et plus adapté
que les groupements d'intérêt public ou les sociétés d'économie mixte, seuls
visés par le traité de Bayonne.
Toutefois, la situation n'est pas définitivement figée. Le traité de Bayonne,
en vertu de son article 5, pourra couvrir les formes nouvelles de coopération
qui apparaîtraient, à l'avenir, dans le droit français ou le droit espagnol.
Par ailleurs, comme le précise l'article 11, la commission franco-espagnole de
coopération transfrontalière devra étudier les problèmes d'application du
traité et formuler des propositions pour les résoudre ou pour améliorer le
traité lui-même.
Tout cela démontre que, dans l'esprit des deux gouvernements, le traité de
Bayonne établit le socle d'une coopération appelée, par la suite, à évoluer et
à se doter de moyens nouveaux.
De plus, la commission franco-espagnole de coopération transfrontalière, qui
doit se réunir quatre fois par an, constitue un élément très important de ce
traité.
Il nous paraît indispensable, monsieur le ministre, que, par sa composition et
par ses méthodes de travail, cette commission franco-espagnole soit le plus
proche possible des préoccupations de terrain. Elle doit devenir, entre les
collectivités pyrénéennes et les gouvernements, un intermédiaire efficace,
soucieux de développer la coopération transfrontalière et d'améliorer ses
conditions de mise en oeuvre.
En conclusion, je voudrais citer, après M. le ministre, quelques exemples
concrets de coopération entre collectivités qui, grâce au traité de Bayonne,
pourront désormais disposer d'une base juridique.
A l'est des Pyrénées, l'Eurorégion, qui regroupe la Catalogne et les régions
Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, pourra mettre en place des organes
destinés à gérer des projets communs.
A l'ouest, le fonds commun Aquitaine-Euskadi-Navarre disposera lui aussi
d'instruments nouveaux.
Il en va de même du protocole d'accord liant la
deputación
de Guipuzkoa
et le district Bayonne-Anglet-Biarritz, auquel vous êtes, monsieur le ministre,
tout particulièrement attentif. Le texte fournit les moyens de traiter à
l'échelle de la zone urbaine s'étendant de Bayonne à Saint-Sébastien des
problèmes tels que celui des transports ou des déchets urbains.
Le conseil général des Pyrénées-Atlantiques, quant à lui, pourra intervenir
plus efficacement, avec l'ensemble des collectivités françaises et espagnoles
concernées, sur les questions d'environnement et de traitement de la pollution
côtière.
Ces quelques exemples illustrent les perspectives très larges ouvertes par le
traité de Bayonne. Dans un domaine récent, et très évolutif, il fournit un
support juridique qui jusqu'à présent faisait défaut.
Ce traité marque donc une étape importante qui renforce, au travers de cette
coopération, les formes les plus concrètes et les plus utiles de la
construction européenne.
C'est pourquoi la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées a donné à l'unanimité un avis favorable au présent projet de loi
et vous propose de l'adopter.
(Applaudissements.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
«
Article unique. _
Est autorisée la ratification du traité entre la
République française et le Royaume d'Espagne relatif à la coopération
transfrontalière entre collectivités territoriales, signé à Bayonne le 10 mars
1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
9
STATUT GÉNÉRAL DES FONCTIONNAIRES
DE MAYOTTE ET STATUT
DE SAINT-BARTHÉLEMY ET DE SAINT-MARTIN
Adoption d'un projet de loi en deuxième lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi (n°
122, 1996-1997), modifié par l'Assemblée nationale, portant ratification de
l'ordonnance n° 96-782 du 5 septembre 1996 prise en application de la loi n°
96-87 du 5 février 1996 d'habilitation relative au statut général des
fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des
établissements publics de Mayotte et relatif au statut administratif, douanier
et fiscal de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. [Rapport n° 135
(1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué à l'outre-mer.
Monsieur le président, monsieur le
président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, le projet de loi portant ratification de l'ordonnance
du 5 septembre 1996 prise en application de la loi du 5 février 1996
d'habilitation relative au statut général des fonctionnaires de la collectivité
territoriale, des communes et des établissements publics de Mayotte vous est
soumis en deuxième lecture aujourd'hui.
L'Assemblée nationale, sensible aux arguments qui avaient emporté votre accord
et aux amendements que votre commission des lois avait déposées, a adopté
l'ensemble du projet de loi, modifié.
Ce projet comporte, outre la dénomination de droit commun pour les lettres A,
B, C et D des catégories hiérarchiques introduites par le Gouvernement pour
tenir compte de demandes unanimes, les amendements que le Sénat a souhaité
introduire. Ces amendements ont pour dénominateur commun une garantie accrue
des droits et des libertés des fonctionnaires à Mayotte, à l'image de celle
qu'ont instituée les titres I à III du statut général des fonctionnaires de
l'Etat et des collectivités territoriales.
Le présent statut répond à une demande ancienne de clarification et
d'unification du droit statutaire des agents publics locaux à Mayotte. Je ne
puis que me féliciter que la présente étape de cette construction statutaire
soit franchie dans des conditions qui ont emporté la satisfaction de tous les
interlocuteurs.
Le nouveau statut a, en particulier, reçu l'avis favorable du conseil général.
L'avis du conseil général était requis par la loi d'habilitation ainsi que
celui des maires.
Les orientations qui ont été présentées à cette tribune en janvier ont fait
l'objet d'un consensus.
Le nouveau statut respecte le particularisme et les contraintes d'un
développement harmonieux de Mayotte. Il confère aux fonctionnaires locaux
pleine qualité d'agent titulaire de droit public, avec les garanties protégeant
leur carrière.
Je veillerai à ce que la première série de textes d'application intervienne
dès le premier semestre de l'année prochaine. Je tiens, en particulier, à ce
que les intégrations dans les nouveaux cadres de fonctionnaires ainsi que la
mise en route du centre de gestion, véritable clé de voûte de la jeune fonction
publique territoriale de Mayotte, interviennent dans les meilleurs délais.
Enfin, je précise que, si la fonction publique de Mayotte est, pour l'heure,
autonome, des passerelles pourront être instaurées dans les années à venir,
lorsqu'une symétrie de qualifications et de correspondances hiérarchiques aura
été constatée entre les fonctionnaires de Mayotte et leurs collègues de la
métropole et des départements d'outre-mer. Il en a été ainsi avec les autres
fonctions publiques non soumises au titre Ier du statut général des
fonctionnaires de droit commun, c'est-à-dire à la loi du 13 juillet 1983. Il a
été pris bonne note de cette demande formulée par les élus de Mayotte.
Il est un deuxième volet que nous aurons à examiner ; il fait suite une
initiative du président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, qui
a ajouté, par voie d'amendement, deux articles, les articles 11 et 12, pour
préciser le statut administratif, douanier et fiscal des communes de
Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.
Beaucoup de choses ont été dites sur cette affaire. Je tiens à rassurer la
Haute Assemblée : ces deux articles permettent de résoudre dans des conditions
satisfaisantes le problème du régime de ces deux îles du Nord, rattachées au
département de la Guadeloupe mais qui, à bien des égards, en sont très
éloignées. Elles se trouvent à plus de 200 kilomètres de Basse-Terre, et il
n'est pas question de couvrir la distance par autoroute !
Ces deux îles présentent en effet, on l'oublie trop souvent, des spécificités
héritées de l'histoire, notamment le partage avec les Pays-Bas pour ce qui
concerne Saint-Martin, et l'appartenance à la Suède, de 1785 à 1877, s'agissant
de Saint-Barthélemy. L'acte de cession à la France de cette dernière île
comportait, en outre, des engagements quant au maintien des droits acquis.
Vous n'ignorez pas que, sur le plan tant fiscal que douanier, ces deux îles
connaissent une situation de fait tout à fait particulière, qui se caractérise
par la non-perception d'un très grand nombre d'impôts et droits de douane.
Il s'agit, pour l'essentiel, je le répète, d'une situation de fait, et non de
droit. Pour autant, certains textes font déjà une place particulière aux îles
du Nord. C'est le cas du code des douanes communautaires, qui reconnaît
l'existence de pratiques « coutumières » particulières si elles sont de portée
géographique et économique limitée ; c'est également le cas de la loi du 17
juillet 1992, relative à l'octroi de mer, qui exonère les deux îles de cette
taxe. Il était bon, je crois, de le rappeler.
Aucun gouvernement n'a jamais entrepris de remettre en cause une situation
héritée, je le disais, de l'histoire, même en 1946, à la suite de la
départementalisation.
A vrai dire, la fragilité juridique qui entoure le régime de fait appliqué
dans les îles du Nord n'était pas véritablement préjudiciable. Ses habitants
s'en satisfaisaient, et l'Etat ne cherchait pas à modifier une pratique qui
semblait justifiée par l'étroitesse de ces îles et le partage avec les
Pays-Bas. Du reste, cette pratique n'était guère choquante, eu égard à la
modestie des dépenses publiques nécessaires, à cette époque - je dis bien « à
cette époque » - à la bonne administration des deux communes.
Les choses ont bien changé. Les deux îles ont connu un développement
considérable, fondé entièrement sur le tourisme. Dans ce dernier secteur, de
très gros investissements privés ont été réalisés, notamment grâce à des
capitaux provenant de métropole. Pour cette première raison, une clarification
du régime juridique est devenue indispensable.
Par ailleurs, ce développement touristique impose de conduire une politique
ambitieuse d'aménagement, d'urbanisme et de protection de l'environnement,
comme il impose de réaliser des infrastructures publiques importantes.
Les communes de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy ont été conduites à
prendre en charge elles-mêmes ces politiques et ces investissements, y compris,
parfois, quand ils auraient pu relever de l'action du département ou de la
région. Le coût en est important.
Les deux communes ont donc besoin de ressources propres.
Les populations concernées et leurs élus en sont conscients. Ils sont
d'ailleurs tout à fait disposés à instaurer sur l'île des taxes appropriées
afin de disposer des ressources dont ils ont besoin pour prendre en charge
eux-mêmes leur développement, c'est-à-dire jusques et y compris l'éducation et
la santé.
Le dispositif que proposent M. Mazeaud et l'Assemblée nationale apporte une
réponse appropriée, puisqu'il permet de consolider en droit le régime de fait
dont Saint-Martin et Saint-Barthélemy ont hérité de l'histoire, de créer un
système fiscal spécifique, adapté à l'économie de ces îles, qui est entièrement
tournée vers le tourisme, et de déléguer aux conseils municipaux, de façon
pragmatique, les compétences du département et de la région dans certaines
matières qui seront mieux exercées localement que depuis le continent
guadeloupéen.
Je voudrais, mesdames, messieurs les sénateurs, rassurer ceux d'entre vous qui
se sont inquiétés du risque qu'il y aurait de créer ainsi une sorte de paradis
fiscal. Ce n'est nullement de cela qu'il s'agit, bien au contraire, puisqu'il
n'est question ici que de consolider une situation existante au profit des
seuls habitants.
Les exonérations prévues ne s'appliquent qu'aux seules personnes qui résident
effectivement dans l'île, ou qui exercent effectivement une activité grâce à
des moyens autonomes. Pas de sièges sociaux fictifs, donc, pas de sociétés
boîtes aux lettres, pas de domicile de convenance !
De plus, et bien entendu, cette exonération ne vaut que pour des opérations
accomplies ou des activités exercées à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy, pour
des revenus ou des bénéfices obtenus à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy, pour
des biens obtenus ou possédés à Saint-Barthélemy.
Il ne faut donc pas dénaturer cette démarche en pensant qu'artificiellement
nous allons créer un paradis fiscal. Nous photographions une situation et nous
la cadrons essentiellement sur les habitants, sur ceux qui ont des activités
sur place.
Le dispositif est donc verrouillé : résidence effective, activité effective,
et seulement pour des revenus perçus localement ou des biens possédés
localement.
Par ailleurs, l'Etat conservera l'ensemble de ses pouvoirs de contrôle, sur le
plan fiscal comme sur le plan douanier. C'est évidemment lui qui continuera à
percevoir les recettes, comme dans toute commune.
Il y a enfin un point qui me paraît essentiel, et qui constitue un progrès
considérable par rapport à la situation actuelle.
En effet, aujourd'hui, les « contribuables » de Saint-Martin et
Saint-Barthélemy, qui sont les habitants de ces îles, ne paient pas d'impôt et
ne participent pas à la solidarité nationale. Les textes adoptés par
l'Assemblée nationale prévoient que 20 % du produit des taxes spécifiques qui
seront mises en place seront attribués à l'Etat. Cette grande nouveauté est
tout bénéfice pour le budget de l'Etat, notamment pour le ministère de
l'économie et des finances.
C'est donc un progrès considérable qui, loin d'éloigner ces deux îles de la
métropole, les conduira désormais à participer pleinement à la solidarité
nationale.
Certes, on pourrait continuer comme cela, et s'en tenir à la situation de
fait. Mais c'est une attitude bien hypocrite. Quant à réinstaurer une situation
de droit, je vous souhaite bien du plaisir, mesdames, messieurs, parce que cet
état de fait est centenaire, et même plusieurs fois centenaire, à
Saint-Barthélemy comme à Saint-Martin !
Voila pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement estime que
les articles 11 et 12 du projet de loi apportent une réponse à la fois
réaliste, constructive et équilibrée à un problème qu'il est devenu urgent de
régler.
Les deux collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin sont tout à fait
disposées, dès qu'elles pourront percevoir les taxes, à prendre en charge un
certain nombre d'opérations d'urgence qui nous paraissent extrêmement
nécessaires et, bien sûr, dans la mesure du possible, avec l'appui de la
collectivité régionale.
Je vous demande donc, pour ces raisons, d'adopter, en même temps que le projet
de loi, les deux articles qui ont été ajoutés par l'Assemblée nationale.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Blaizot,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi portant
ratification de l'ordonnance n° 96-782 du 5 septembre 1996 portant statut
général des fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des
établissements publics de Mayotte, dont le Sénat avait délibéré en première
lecture le 20 novembre 1996, a été examiné par l'Assemblée nationale le 4
décembre. Il nous revient en deuxième lecture aujourd'hui.
L'Assemblée nationale s'est montrée très favorable aux dispositions proposées
par le Sénat, dont les dix articles ont été votés conformes, à l'exception,
d'une part, d'une modification rédactionnelle heureuse au début de l'article
1er, à laquelle la commission vous propose de vous rallier, et, d'autre part,
d'un complément à l'intitulé rendu nécessaire par l'adoption, par l'Assemblée
nationale, de deux articles nouveaux, les articles 11 et 12, dont vous venez,
monsieur le ministre, de nous entretenir.
Ce sont donc ces deux articles additionnels que nous devons maintenant
examiner, étant entendu qu'en ce qui concerne la fonction publique à Mayotte
les dispositions que nous avions votées se trouvent définitivement adoptées.
Ces deux articles additionnels ont trait au statut administratif, douanier et
fiscal des îles de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
Le sujet qu'ils traitent est étranger au statut de la fonction publique et à
la collectivité de Mayotte, c'est bien évident. Il s'agit donc de ce que nous
appelons en général un « cavalier », et un cavalier de grande taille, parce que
le sujet est tout à la fois vaste et complexe.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué à l'outre-mer.
Le cavalier est de grande taille, mais la
monture est solide !
(Sourires.)
M. François Blaizot,
rapporteur.
Par ailleurs, leur introduction en deuxième lecture ne permet
pas l'étude approfondie qu'ils eussent exigée. Pour ces deux raisons de
procédure - j'insiste sur le fait qu'il s'agit de raisons de procédure - la
commission des lois vous proposera, pour chacun de ces deux articles, un
amendement de suppression.
Cependant, il me paraît indispensable, et équitable, d'indiquer que la
commission des lois, défavorable pour ces motifs de procédure, n'a pas pour
autant voulu ignorer le problème de fond. Elle a demandé à la commission des
finances du Sénat de l'éclairer sur la situation fiscale actuelle de
Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. Le travail très important réalisé par
notre commission des finances a mis en évidence que, en matière d'impôts
indirects, les deux îles sont, « dans pratiquement tous les domaines »,
exonérées, et que, même si les contributions directes - impôt sur le revenu,
impôt de solidarité sur la fortune, impôt sur les sociétés et impôts locaux -
sont exigibles, elles ne sont pas réellement perçues. C'est ce que vous venez
de nous confirmer, monsieur le ministre, voilà un instant.
Cette situation met en évidence que la transposition de la fiscalité de la
métropole à ces deux îles méconnaît les réalités, car, autrement, on ne
constaterait pas l'écart qui s'est constamment creusé entre la loi et son
application.
Or les articles 11 et 12 adoptés par l'Assemblée nationale s'appuyaient sur
cette situation et proposaient une réforme intéressante, sur laquelle il nous
faut donner quelques explications.
Elle était constituée de quatre points.
Premièrement, il s'agissait d'abolir à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy un
certain nombre de textes fiscaux métropolitains actuellement réputés
applicables et cependant non observés.
Deuxièmement, il s'agissait de maintenir, en sens inverse, les dispositions
fiscales qui sont adaptées. On ne pouvait que s'en réjouir.
Troisièmement, il s'agissait de reconnaître à ces deux communes la possibilité
d'exercer directement, en accord avec l'Etat, la région et le département,
certaines compétences.
Enfin, quatrièmement, et vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, il
s'agissait d'autoriser ces deux communes à voter des impositions liées aux
compétences nouvelles qu'elles exerceraient et leur assurant les ressources
nécessaires aux investissements correspondants.
Par ailleurs, comme l'a également rappelé M. le ministre, 20 % du produit de
ces taxes reviendraient à l'Etat.
La commission des lois a estimé que ces dispositions additionnelles exigeaient
une étude approfondie. Elle a donc souhaité que la réflexion se prolonge avant
que nous parvenions, le plus rapidement possible, à élaborer des dispositions
pour que la pratique cesse d'être dans ces îles en opposition avec la loi et
que ces dernières y trouvent les bases et les moyens de leur développement.
Les amendements de suppression des articles 11 et 12 qui ont été adoptés par
la commission des lois ne portent pas sur le fond du problème. Il ne s'agit ni
d'ignorer la difficulté ni de s'écarter de la solution. Il s'agit de manifester
notre volonté de trouver des règles sûres et bien assises.
Nous souhaitons, monsieur le ministre, que, sous votre autorité, soient
élaborées des dispositions qui, je le redis, permettraient d'envisager tous les
aspects de ce problème et, nous l'espérons, de les résoudre dans les meilleures
conditions.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ? ...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la
discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du
Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ Est ratifiée, telle que modifiée par les dispositions de la
présente loi, l'ordonnance n° 96-782 du 5 septembre 1996 portant statut général
des fonctionnaires de la collectivité territoriale, des communes et des
établissements publics de Mayotte prise en application de la loi n° 96-87 du 5
février 1996 d'habilitation relative au statut général des fonctionnaires de la
collectivité territoriale, des communes et des établissements publics de
Mayotte. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 11
M. le président.
« Art. 11. _ I. _ L'article 3 de la loi du 2 mars 1878 portant approbation du
traité pour la rétrocession à la France de l'île de Saint-Barthélemy, conclu le
10 août 1877 entre la France et la Suède est complété par trois alinéas ainsi
rédigés :
« L'île de Saint-Barthélemy constitue, du point de vue douanier, une zone
franche au sens de l'article 286 du code des douanes. En conséquence et hormis
le droit de quai institué par l'article 10 de la loi de finances rectificative
pour 1974 (n° 74-1114 du 27 décembre 1974), les opérations d'importation ou
d'exportation ne peuvent y donner lieu à la perception d'aucun droit de douane
ou droit assimilé, octroi de mer ou taxe visée au titre X dudit code ; cette
disposition ne fait pas obstacle à l'exercice par l'État de ses pouvoirs pour
la recherche, la constatation et la poursuite des infractions à la législation
et à la réglementation sur les produits et les marchandises dont l'importation,
l'exportation, le commerce ou la détention sont prohibés. De même, les taxes
sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées, ainsi que les contributions
indirectes, monopoles fiscaux et taxes diverses institués par les titres II et
III de la première partie du livre premier du code général des impôts ne sont
pas applicables à Saint-Barthélemy, à l'exception de la taxe sur la valeur
ajoutée sur les opérations visées au 7° de l'article 257 dudit code, sans qu'il
soit porté atteinte à l'éligibilité de la commune aux versements du fonds de
compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.
« De même, les impôts directs et taxes assimilées perçus au profit de l'État,
à l'exception de la taxe d'apprentissage, des cotisations au titre des
participations des employeurs à l'effort de construction et au développement de
la formation professionnelle continue et de la contribution des institutions
financières ainsi que de l'impôt de solidarité sur la fortune, et les
impositions au profit des collectivités locales et de divers organismes, à
l'exception de l'impôt sur les spectacles et des droits d'enregistrement, ne
sont pas dus lorsqu'ils trouvent leur origine dans des opérations ou activités
accomplies ou exercées ou dans des revenus, bénéfices ou biens obtenus ou
possédés à Saint-Barthélemy par des personnes qui y exercent une activité
effective ou qui, n'exerçant aucune activité, justifient y résider de façon
permanente et effective ; lorsque les intéressés exercent une activité
industrielle, commerciale, libérale, artisanale, agricole, bancaire, financière
ou d'assurance, ils doivent justifier disposer à Saint-Barthélemy de moyens
d'exploitation leur permettant de le faire d'une manière autonome.
« Les droits de timbre et les droits d'enregistrement, à l'exception de la
taxe différentielle sur les véhicules à moteur et de la taxe sur les
certificats d'immatriculation des véhicules et, d'une manière générale, tous
les autres impôts et taxes sont perçus à Saint-Barthélemy dans les conditions
de droit commun applicables en Guadeloupe. »
« II. _ La loi du 2 mars 1878 précitée est complétée par deux articles 4 et 5
ainsi rédigés :
«
Art. 4
. _ Par conventions passées avec l'État, la région de la
Guadeloupe ou le département de la Guadeloupe, la commune de Saint-Barthélemy
peut exercer des compétences relevant de l'État, de la région ou du département
dans les domaines de l'aménagement du territoire, de l'éducation et de la
formation professionnelle, de l'environnement, de l'exploitation des ressources
de la mer, de la santé, des transports, du tourisme et de l'urbanisme. Ces
conventions, conclues pour une durée ne pouvant pas excéder dix ans et
renouvelables, déterminent les conditions administratives et financières de
l'exercice de ces compétences pour la commune de Saint-Barthélemy.
« Dans ce cadre, celle-ci peut édicter des réglementations dérogeant à celles
de l'État, de la région ou du département, sous réserve d'approbation par le
ministre chargé des départements d'outre-mer lorsqu'il s'agit de compétences de
l'État ou par le président du conseil régional ou du conseil général lorsqu'il
s'agit de compétences régionales ou départementales. L'absence de réponse dans
les deux mois de la saisine vaut approbation. »
«
Art. 5
. _ La commune de Saint-Barthélemy a la faculté d'instituer une
ou plusieurs des impositions suivantes :
« _ une taxe sur les consommations de carburants, dont le taux est fixé dans
la limite de 1,5 F par litre de carburant consommé ;
« _ une taxe sur les hébergements touristiques, ainsi qu'une taxe sur les
locations de véhicules de tourisme ou sur les locations de bateaux à usage
touristique ou de loisir, dont les taux sont fixés dans la limite de 7,5 % du
montant des prestations d'hébergement ou de location ;
« _ une taxe sur les débarquements par voie aérienne ou maritime de passagers
non résidents, dont le montant est fixé dans la limite de 100 F par passager
;
« _ une taxe sur les véhicules, dont le montant annuel est fixé dans la limite
de 500 F pour les véhicules de tourisme et de 1 000 F pour les véhicules
utilitaires.
« Le produit de ces taxes est réparti à hauteur de 80 % au profit de la
commune de Saint-Barthélemy et de 20 % à celui de l'État, dont 5 % au titre des
frais d'assiette et de recouvrement. Ces taxes sont établies et recouvrées, les
infractions sont recherchées, constatées et poursuivies et les contestations
sont instruites et jugées selon les modalités et sous les garanties applicables
aux droits de douane et taxes assimilées pour la taxe sur les consommations de
carburants, aux taxes sur le chiffre d'affaires pour les taxes sur les
hébergements touristiques et sur les locations de véhicules ou de bateaux et
aux droits de timbre pour les taxes sur les débarquements de passagers et sur
les véhicules. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 1, M. Blaizot, au nom de la commission, propose de supprimer
cet article.
Par amendement n° 4, Mme Michaux-Chevry propose :
I. - Dans le deuxième alinéa du texte présenté par le I de l'article 11 pour
compléter l'article 3 de la loi du 2 mars 1878, après les mots : « des
institutions financières », d'insérer une virgule ; après les mots : « ainsi
que », de supprimer le mot : « de » ; après les mots : « l'impôt de solidarité
sur la fortune », de supprimer la virgule.
II. - Dans le troisième alinéa dudit texte, après les mots : « véhicules à
moteur et », de supprimer le mot : « de », et après les mots : «
d'immatriculation des véhicules », de rédiger comme suit la fin de l'alinéa : «
, sont perçus à Saint-Barthélemy ».
Par amendement n° 5, MM. Faure et Machet proposent, dans le deuxième alinéa du
texte présenté par le paragraphe I de l'article 11 pour compléter l'article 3
de la loi du 2 mars 1878 portant approbation du traité pour la rétrocession à
la France de l'île de Saint-Barthélemy, conclu le 10 août 1877 entre la France
et la Suède, de remplacer les mots : « ainsi que de l'impôt de solidarité sur
la fortune » par les mots : « , ainsi que l'impôt de solidarité sur la fortune
».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1.
M. François Blaizot,
rapporteur.
J'ai dit l'essentiel dans mon intervention générale. Mais je
tiens à insister sur le fait que la commission des lois a ressenti le besoin
d'étudier d'une façon approfondie la situation, notamment en matières fiscale
et douanière.
Estimant que ces dispositions relevaient plus particulièrement des compétences
de la commission des finances, nous avons souhaité connaître l'avis de
celle-ci. Je tiens à la remercier pour la qualité du travail qui a été effectué
en son sein et pour son avis circonstancié ; celui-ci débouche néanmoins sur
une position défavorable à l'adoption immédiate des articles 11 et 12.
Notre amendement de suppression de l'article 11 ne traduit pas une opposition
sur le principe. Il traduit simplement notre souhait d'étudier de manière plus
approfondie les dispositions législatives qui nous sont soumises.
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry, pour défendre l'amendement n° 4.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je suis quelque peu surprise de voir mes collègues demander la suppression des
articles 11 et 12 relatifs à Saint-Martin et Saint-Barthélemy. En effet, c'est
notre assemblée qui aurait dû prendre l'initiative de ce dispositif que j'ai
été la première à proposer.
Ces deux îles sont dans une situation de droit héritée de l'histoire et dans
une situation de non-droit, compte tenu de l'application des textes.
Désormais, le problème se pose en termes de revendication institutionnelle
dans la mesure où les deux communes se sont prononcées, à l'unanimité, pour un
changement de statut, pour la création d'une collectivité à Saint-Martin et
d'une collectivité à Saint-Barthélemy.
Nos deux assemblées locales, le conseil régional, que je préside, et le
conseil général, que préside M. Larifla, ont toutes deux été saisies de ce
dossier et ont émis un avis favorable à la régularisation de la situation de
ces îles, car nous sommes tous conscients de leurs caractères particuliers.
M. le ministre a d'ailleurs dit que les articles 11 et 12 visaient à
concrétiser une situation que je qualifierai quasiment de droit coutumier. En
effet, connaissant mal notre histoire, nous perdons de vue que l'île de
Saint-Barthélemy a été vendue par le roi de Suède au roi de France, qui était à
l'époque son ami, sous la réserve expresse qu'elle soit un port franc et que
l'on n'y paie pas d'impôt. Mais rien n'a jamais été fait, et l'île a connu une
alternance de périodes où l'on payait l'impôt et d'autres où l'on ne le payait
pas.
Et puis, il y a eu la défiscalisation, le développement du tourisme et, en
conséquence, beaucoup de nouveaux arrivants. Ces derniers ne paient pas
d'impôt, dans des conditions tout à fait irrégulières.
L'île de Saint-Bathélemy revendique, pour ses seuls ressortissants, des
exemptions au titre de leurs activités en faveur du développement de l'île.
Qu'on en finisse avec une situation où tout un chacun se sert de cette île
comme d'une boîte à lettres ! C'est la raison pour laquelle il n'est pas
question d'y créer un paradis fiscal.
Quand à Saint-Martin, c'est une zone franche que je qualifierai de « bâtarde »
et qui n'est pas reconnue formellement par la Communauté européenne.
L'île comporte deux parties : une partie hollandaise, qui est une vraie zone
franche, et une partie française, plus vaste, qui n'est pas tout à fait une
zone franche.
C'est une île tout à fait pittoresque.
Dans la zone française, officiellement, on parle le français, mais, en fait,
on y parle l'anglais et l'on paie en dollars.
Il n'y a pas de barrière entre les deux zones, qui sont pourtant chacune dans
une situation spécifique.
A toutes ces particularités, il faut ajouter le fait, comme M. le ministre l'a
indiqué à juste titre, que toutes les îles environnantes - Saba,
Saint-Eustache, Monserrat, la Barbade, Trinidad, Antigua - bénéficient de zones
franches qui attirent les touristes. La situation est donc totalement
aberrante.
Mes chers collègues, le 5 septembre, j'ai saisi notre Haute Assemblée d'une
demande de commission d'enquête, pour que certains de ses membres viennent sur
place ; que nous les recevions et qu'ils touchent du doigt la réalité. Il m'a
été répondu qu'une commission d'enquête c'était trop lourd.
J'ai donc écrit, le 26 septembre, pour dire que, si une commission d'enquête,
c'était trop, il n'y avait qu'à mettre sur pied une mission parlementaire. Mais
aucune décision n'a été prise.
De son côté, le député de la Guadeloupe, M. Chaulet, a fait la même démarche,
et l'Assemblée nationale, elle, est allée à la vitesse grand V.
Je suis donc un petit peu triste qu'on me dise aujourd'hui : « Nous n'étions
pas informés. » Il est regrettable que mes collègues n'aient pas suivi ma
requête, ne soient pas venus sur les lieux pour voir la réalité de tous les
jours dans ces deux îles où, un jour, on paie l'impôt, un jour, on ne le paie
pas.
Mais, mes chers collègues, qui fera payer l'impôt à Saint-Barthélemy ou à
Saint-Martin ?
Pensez à la manière dont est né le droit de quai à Saint-Barthélemy ; ce droit
était refusé et l'on a été mis en demeure de l'appliquer !
Sachez donc que les deux amendements votés par l'Assemblée nationale
permettent, en quelque sorte, de faire jouer la solidarité des citoyens devant
l'impôt. En demandant à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy de percevoir des
impôts, vous faites entrer ces deux îles dans une situation de droit qu'elles
n'ont jamais connue.
Je terminerai sur une nouvelle note de tristesse. Oui, cela m'attriste
d'entendre sur les bancs de la Haute Assemblée parler du trafic de drogue à
Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy.
Je dis : attention ! Nous sommes dans la Caraïbe, entre l'Amérique du Sud et
l'Amérique du Nord, et il est difficile pour la France de mettre un garde-côte
sur chaque plage. C'est la raison pour laquelle, parfois, des contrebandiers
lâchent la drogue sur les plages.
Nous n'avons pas à déplorer de toxicomanie à Saint-Martin ou à
Saint-Barthélemy. Je connais très bien ces deux îles, car j'en ai été le député
pendant de longues années et je sais le comportement extrêmement solide de la
jeunesse.
De tels propos attristent les habitants de ces îles. Leurs jeunes réussissent
dans les compétitions internationales.
J'insiste sur ce point : ce sont nos jeunes qui portent le plus haut les
couleurs de notre pays ; ils sont les phares avancés de ce morceau de la France
un peu oublié. Pourtant, on n'entend parler que de passage de drogue et de
paradis fiscaux. Pensez à leur dignité !
Mes chers collègues, je vous demande de régulariser la situation. Je considère
qu'il s'agirait là du deuxième grand pas dans l'histoire des départements et
territoires d'outre-mer que vous feriez aujourd'hui.
Ce matin, en effet, mes chers collègues, vous avez fait tomber le pan le plus
important de la représentation symbolique du colonialisme. C'est la fameuse
affaire que je qualifierai non pas des « cinquante pas géométriques », mais des
« cinquante pas du roi ».
Chez nous, l'Etat français était propriétaire des plus belles terres, et le
Gouvernement, après un travail d'une année, dans des conditions difficiles, a
répondu à des revendications parfaitement justifiées.
Je rends hommage à mes collègues du Sénat, qui ont discuté avec l'ensemble des
élus, dans le respect de leurs conceptions politiques. Ce matin, nous avons
voté un texte qui permet de régler ce fameux dossier.
Ce soir, réglons le dossier de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. Ainsi, la
loi sera respectée dans la tradition, et les textes, qui ne sont pas appliqués
dans ces régions, le seront enfin.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Emmanuel Hamel.
Réglons-le, mais comme il faut !
M. le président.
Monsieur Machet, je pense que votre amendement n° 5, qui est pratiquement
identique à celui de Mme Michaux-Chevry, a été largement défendu par celle-ci.
En êtes-vous d'accord ?
M. Jacques Machet.
Tout à fait, monsieur le président.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 4 et 5.
M. François Blaizot,
rapporteur.
Monsieur le président, l'avis de la commission découle bien
évidemment de mes propos précédents.
La commission éprouve beaucoup de sympathie pour toutes les observations qui
viennent d'être présentées. Simplement, elle a considéré qu'elles étaient
malvenues dans les conditions présentes et que les études suffisantes n'avaient
peut-être pas été faites.
La commission ayant déposé un amendement de suppression, elle est défavorable
à l'amendement qui vient d'être défendu.
Mais je tenais à souligner dans quel esprit elle y était opposée.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 1, 4 et 5 ?
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Monsieur le président, il me semble que, tout à
l'heure, Mme Michaux-Chevry s'est uniquement prononcée contre l'amendement de
la commission.
M. le président.
J'ai cru comprendre que Mme Michaux-Chevry était contre l'amendement de la
commission parce qu'elle a effectivement déposé un amendement tendant à
apporter quelques modifications à l'article 11.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégue.
Vous me demandez pourtant de me prononcer sur son
amendement.
M. le président.
Je vous demande l'avis du Gouvernement sur les trois amendements.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
S'agissant des amendements de suppression, je comprends
tout à fait la démarche de la commission et de M. le rapporteur, qui consiste à
bien cibler leur position sur la procédure et non sur le fond.
On peut très bien attendre encore quelques mois ! En effet, pour Saint-Martin,
on attend depuis trois siècles et demi et pour Saint-Barthélemy depuis un
siècle et dix-huit ans !
Le problème, c'est l'évolution démographique. Si mes souvenirs sont exacts, la
population de Saint-Martin est passée de 8 000 habitants en 1981 à 34 000 ou 36
000 aujourd'hui.
Imaginez la situation des responsables politiques élus dans cette île. De
quels moyens disposent-ils pour faire face à cette situation ? Il en est
d'ailleurs de même pour la région, qui doit faire face à bien d'autres
problèmes, que ce soit celui des planteurs de bananes ou de la filière canne à
sucre, par exemple.
La situation est extrêmement critique, notamment en matière de santé à
Saint-Martin. Des équipements sont nécessaires.
Il faut également résoudre le problème de l'immigration, de l'intégration de
ceux qui sont sur place. Lors du dernier cyclone, nous avons vu comment les
choses se passaient.
Il s'agit exclusivement, je le repète, de photographier une situation, que
nous encadrons, pour empêcher des profiteurs de s'installer à Saint-Barthélemy
ou à Saint-Martin pour bénéficier d'avantages auxquels ils n'ont normalement
pas droit. Ajourd'hui, en s'installant dans ces îles, ils sont traités comme
tout un chacun et considérés comme des autochtones : on ne leur réclame donc
pas d'impôts, ou l'on n'ose pas leur en réclamer, parce que telle est la
tradition depuis des siècles.
M. Emmanuel Hamel.
Il y a des traditions que l'on peut améliorer !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
M. Jacques Larché me demande pourquoi il en est ainsi.
Je vais vous le dire : parce que le régime qui prévaut à Saint-Barthélemy a été
reconnu par la loi du 2 mars 1878, laquelle précise explicitement que les
droits acquis, c'est-à-dire, pour Saint-Barthélemy, l'exonération fiscale à
laquelle Mme Michaux-Chevry faisait allusion, doivent être maintenus. C'est
donc un texte législatif qui a fait perdurer cette situation.
M. Emmanuel Hamel.
Du temps de Grévy ! Or, on est en 1996 !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Monsieur le sénateur, les lois de la République
perdurent tant qu'elles ne sont pas abrogées, si mes souvenirs de droit sont
bons.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Et à Saint-Martin ?
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
A Saint-Martin, il s'agit d'une situation de fait, mais
qui dure depuis trois siècles et demi ! C'est alors plus qu'une coutume, c'est
un état de fait, et je mets au défi aujourd'hui quelque administration ou
quelque organisme que ce soit d'aller percevoir à Saint-Barthélemy ou à
Saint-Martin les impôts comme en métropole !
Voilà pour l'amendement n° 1 de suppression.
Si nous pouvions aller de l'avant, quitte à étudier comment les choses se
passent sur le terrain au bout d'un an, je pense que nous aurions régularisé et
clarifié la situation vis-à-vis des habitants de Saint-Barthélemy et de
Saint-Martin - puisque c'est d'eux et d'eux seuls qu'il s'agit - et de ceux qui
ont une activité sur place.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 4 de Mme Michaux-Chevry. Il
risquerait en effet de créer un petit paradis fiscal. De plus, il serait
quelque peu contradictoire d'exclure ces îles de l'ISF alors que, je l'ai fait
vérifier, cet impôt est perçu sur Saint-Barth et sur Saint-Martin... sur ceux
qui doivent le payer, bien sûr.
Mais, madame le sénateur, vous n'avez pas défendu cet amendement à ma
connaissance ?
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Non, je ne l'ai pas défendu.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Monsieur le président, voilà pourquoi je vous posais la
question tout à l'heure.
J'en reviens aux deux amendements de suppression des articles 11 et 12.
Je souhaite vraiment que nous puissions avancer compte tenu du concret,
c'est-à-dire des situations auxquelles sont confrontés les maires de
Saint-Barth et de Saint-Martin. Il suffit d'une courte mission pour prendre
conscience de la situation sur place en matière de santé publique par exemple.
Vous verrez qu'il faut beaucoup de moyens !
Les contribuables vont payer un impôt pour la première fois depuis plus d'un
siècle pour Saint-Barth, depuis plus de trois siècles pour Saint-Martin, un
impôt que je qualifierai de solidarité nationale puisque, dans le système
imaginé par le président Mazeaud, 20 % des sommes recueillies sur place,
abonderont le budget de l'Etat. Sur le plan de la fiscalité, ce sera déjà le
rétablissement d'une certaine égalité des citoyens devant l'impôt, et cela
enrichira le budget de l'Etat. C'est d'ailleurs cette disposition qui
m'autorise à croire que notre démarche est tout à fait constitutionnelle, alors
que la situation de fait, elle, est effectivement anticonstitutionnelle.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Je demande
la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Nous sommes évidemment dans une
situation difficile.
Nous comprenons très bien les arguments qui ont été avancés, mais je voudrais
faire remarquer, malgré tout, que le rôle du Sénat, une fois de plus, n'est pas
commode !
M. Emmanuel Hamel.
Oh que non !
M. Jacques Larché,
président de la commission.
Notre rôle est de rappeler un certain nombre
d'exigences de droit auxquelles il est normal de satisfaire.
Monsieur le ministre, nous aurions accueilli avec, disons, beaucoup
d'ouverture d'esprit, un texte qui aurait traité le problème de manière
autonome après une étude suffisante. Mais voilà que vous n'avez rien trouvé de
mieux que d'introduire cette disposition dans une ordonnance relative à Mayotte
et portant sur le statut des fonctionnaires !
(Mme Michaux-Chevry manifeste sa désapprobation.)
Monsieur le ministre, je vous le dis simplement, ce n'est pas sérieux, ce
n'est pas une méthode de travail. Puisque vous parlez de constitutionnalité,
sur ce terrain, il y a une jurisprudence qui est bien connue, c'est la
jurisprudence Séguin : un amendement manifestement sans rapport avec le contenu
du texte principal doit être considéré comme un abus de procédure
parlementaire.
Je vous rassure tout de suite : je n'aime pas saisir le Conseil
constitutionnel. Je ne le fais d'ailleurs que très rarement ; je n'ai apposé ma
signature qu'en cinq ou six occasions. Je vous le dis dès maintenant : si
d'aventure ce texte était voté, je ne m'associerais pas, si d'aucuns avaient
envie d'y avoir recours, à une saisine du Conseil constitutionnel.
Je voudrais que ce problème soit traité d'une manière sérieuse.
Nous connaissons tous la genèse quelque peu pittoresque de cette affaire.
Nous avons tous reçu des délégations nous demandant de tranformer
Saint-Barthélemy et Saint-Martin en collectivités à statut particulier avec, à
la clé, bien évidemment, un député, un sénateur, un conseil général. Je dois
dire que nous avons accueilli cette démarche avec curiosité.
Nous n'avons pas cru devoir répondre à une invitation touristique qui nous a
été adressée. Nos collègues de l'Assemblée nationale, ayant sans doute envie de
voyager, y sont allés immédiatement. Notre ordre était chargé ; si nous
l'avions pu, nous y serions allés.
Malgré tout, l'état de droit - nous sommes là, monsieur le ministre, pour le
faire respecter ! - n'est pas ce que vous dites ! Ces coutumes, si tant est
qu'elles aient jamais existé ont été battues en brèche - nous sommes un pays de
droit écrit - par des avis et des décisions du Conseil d'Etat, qui a déclaré
purement et simplement que la législation fiscale de la Guadeloupe est
applicable de droit à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. J'ai ici une décision
du Conseil d'Etat de 1985 - demandeur, ministre du budget - et un avis du
Conseil d'Etat de 1988. Donc, les décisions existent.
Pour ne pas prendre une décision précipitée et pour ne pas nous en tenir à un
aspect purement formel des choses, qui n'est pas l'élément déterminant mais qui
compte quand même, nous avons sollicité l'avis de nos collègues de la
commission des finances.
A l'unanimité, ils ont rendu un avis négatif. Ils ont estimé que le problème
fiscal était important, que l'on ne pouvait pas le traiter au détour d'une
discussion comme celle qui s'engage aujourd'hui ; dans le même temps, certains
ont évoqué devant nous un effet d'entraînement possible. Pourquoi, en effet, ce
que l'on fait aujourd'hui à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, ne le ferait-on
pas ailleurs ? En la matière, dira-t-on, les précédents n'ont pas de valeur,
mais ils peuvent servir malgré tout de fondement à quelques réclamations.
Je voudrais rendre hommage à notre rapporteur parce que, fidèle à la mission
que lui a confiée la commission, il a émis cet avis alors que, au fond de
lui-même, il aurait souhaité une autre solution. Malgré le travail remarquable
qu'il avait fait, et après en avoir délibéré, la commission des lois n'a pas
suivi sa proposition et nous avons été confortés par l'avis de la commission
des finances.
Maintenant, si le Sénat estime que les avis des deux commissions ne doivent
pas être pris en considération... Mais alors je me demande à quoi sert le
travail législatif approfondi, qui, à mon sens, ne consiste pas à se laisser
aller à quelques mouvements sympathiques, que l'on comprend fort bien, mais qui
peuvent avoir des conséquences de droit auxquelles nous répugnons !
M. Emmanuel Hamel.
Différer pour mieux décider !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Je voudrais simplement répondre très gentiment à M. le
président de la commission des lois sur la méthode : ce n'est pas le
Gouvernement qui a introduit dans le texte de Mayotte cette disposition, c'est
le président de la commission des lois à l'Assemblée nationale. On ne peut pas
penser qu'il a agi à la légère.
Pourquoi l'a-t-il fait ?
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Il est allé à Saint-Barth !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Parce qu'il revenait de là-bas et qu'il s'est rendu
compte là-bas de l'ampleur et du caractère critique de la situation.
Vous avez, par ailleurs, fait allusion à des études. Beaucoup ont été
réalisées, et ce depuis très longtemps, par des cabinets spécialisés, par les
élus eux-mêmes. Des débats ont eu lieu au sein des conseils régional et
général. Mes prédécesseurs se sont saisis de tout ce travail sans vraiment
aller jusqu'au bout du raisonnement.
Vous avez fait allusion à la « jurisprudence » Séguin. Je note qu'elle n'a pas
été appliquée à l'Assemblée nationale !
M. Emmanuel Hamel.
C'est regrettable !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
L'un des points importants que vous avez soulevés
concerne, bien sûr, la démarche faite par les élus de Saint-Barthélemy et de
Saint-Martin pour une collectivité territoriale autonome.
Les réserves du Gouvernement sont nombreuses et très fortes, car cela voudrait
dire en effet que l'on ouvre la boîte de Pandore et que tout un chacun pourrait
demander, ici ou là, à bénéficier d'un statut particulier dès lors qu'il y a
problème.
Malgré les décisions ou les avis qui ont été rendus par le Conseil d'Etat, la
situation perdure. C'est bien pour cela qu'il faut une loi aujourd'hui, pour
consolider la situation existante ! Nous essayons de la stabiliser en la
photographiant par la loi. Je ne pense pas qu'il s'agisse pour autant d'une
décision précipitée.
Avec, bien sûr, tout le respect que je dois à la commission des finances et à
ceux qui ont travaillé sur ce texte, je voudrais dire que j'ai vu des notes
circuler à propos de ces amendements et de leur impact, notes qui laissaient
notamment entendre que n'importe quelle activité financière pourrait, à la
suite de la promulgation de ce texte, s'installer à Saint-Barth ou à
Saint-Martin. Or c'est faux ! Ce sont des arguments qui ont été utilisés - et
dans des notes bien faites et bien construites - pour induire en erreur, et, à
partir de là, on a dit que l'on était en train de créer un nouveau paradis
fiscal à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin.
En conclusion, je voudrais vous expliquer la raison pour laquelle le
Gouvernement souhaite un vote conforme de ce texte.
Les exonérations prévues ne s'appliquent qu'aux seules personnes qui résident
effectivement dans l'île ou qui exercent une activité effective, grâce à des
moyens autonomes, c'est-à-dire pas de sièges sociaux fictifs, donc pas de
sociétés boîtes à lettres, ni de domiciles de convenance. De plus, bien
entendu, cette exonération ne vaut que pour des opérations ou activités
accomplies ou exercées à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin, pour des revenus
ou des bénéfices obtenus dans ces mêmes îles.
Le dispositif étant donc totalement verrouillé - résidences effectives,
activités effectives, seulement pour des revenus perçus localement ou des biens
possédés localement - la démarche qui est à l'origine de la proposition
d'amendement de Pierre Mazeaud est une démarche de bon sens, que le
Gouvernement soutient.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Je tiens tout d'abord à vous remercier, monsieur le président, de laisser aux
orateurs le temps de s'exprimer autant qu'il le faut. Le débat, en effet, le
mérite.
De plus, cela nous a donné l'occasion - trop rare ! - d'apprécier le talent de
Mme Michaux-Chevry, qui connaît bien la région en question et qui a pris la
parole pour défendre son amendement... qu'elle n'a d'ailleurs pas défendu.
Je ne sais pas si elle le retire ou non, mais l'adoption de cet amendement ou
de celui de M. Machet et... d'une autre de nos collègues, aurait pour
conséquence qu'il n'y aurait plus d'impôt sur la fortune payé dans les îles de
Saint-Martin et de Saint-Barthélemy, alors que, jusqu'à présent, effectivement,
il l'est.
C'est un sujet dont on a beaucoup parlé au Parlement ces derniers temps, même
si ce n'était pas à propos de ces deux îles.
J'ai été vraiment très content d'entendre Mme Michaux-Chevry. J'ai appris
qu'elle avait demandé la constitution d'une commission d'enquête d'abord, d'une
mission ensuite. Nous regrettons très vivement de ne pas l'avoir su. Je ne sais
pas qui n'a pas donné suite à cette demande.
(Mme Michaux-Chevry brandit avec insistance un document.)
Mais je vous
crois, madame ! S'il y a des vérifications à faire sur place, nous sommes prêts
à y aller. Si vous avez demandé cette mission, c'est bien parce que vous
pensiez qu'il fallait y aller. Mais comme, précisément, non prévenus, nous n'y
sommes pas allés, je ne comprends pas très bien pourquoi vous nous appelleriez
à prendre une décision maintenant.
La situation que vous décrivez dure depuis trois siècles, dites-vous, et il
faudrait la régler tout de suite, en cinq minutes ?
Nous sommes le 19 décembre, à la veille des vacances parlementaires et,
subitement, il y aurait urgence à adopter, pour que, à l'occasion de la
discussion d'un projet de loi portant ratification d'une ordonnance sur le
statut général des fonctionnaires de Mayotte, deux « cavaliers » - puisqu'il
s'agit bien de cela - qui, par définition, n'ont aucun rapport avec le texte en
discussion et sont donc irrecevables de ce seul fait.
Si M. le président Jacques Larché vous rassure en disant que, en ce qui le
concerne, il ne s'associerait pas à une saisine du Conseil constitutionnel,
c'est qu'il sait bien que, en ce qui nous concerne, nous n'hésiterions
évidemment pas à y avoir recours.
Que ce soit bien clair : s'il y a quelque chose soient claires : s'il y a
quelque chose à faire, il faudra le faire, mais pas de cette manière-là !
Nous avons appris - nous en avons tous été fort choqués en commission des lois
- qu'il y a des gens qui vivent dans l'illégalité, ne payant pas d'impôts, et
que, pour supprimer cette illégalité, il nous est proposé de changer la loi.
A priori,
c'est choquant et anticonstitutionnel.
Comme il s'agissait de dispositions financières, la commission des lois a
demandé l'avis de la commission des finances. Nous avons entendu ce matin le
représentant de la commission des finances nous exposer les nombreuses raisons
pour lesquelles, comme la commission des lois, la commission des finances est
hostile aux ajouts proposés au texte d'origine.
Il nous a notamment expliqué que, contrairement à ce qui nous a été dit tout à
l'heure - il a cité notre collègue Yann Gaillard ici présent, qui l'aurait
constaté - qu'il n'est pas tout à fait exact de dire qu'on ne paie pas d'impôt
dans aucune des deux îles.
A Saint-Martin, on en paie quelque peu ! C'est écrit en toutes lettres dans le
document établi par la commission des finances. Il serait bon, d'ailleurs, que
chacun ait l'occasion de le lire. Je vais vous en citer un passage.
« Il existe donc, comme l'a constaté l'inspecteur général des finances notre
collègue M. Yann Gaillard, une certaine différence entre les deux îles : 1 500
déclarations d'impôt sur le revenu à Saint-Martin, pratiquement pas à
Saint-Barthélemy. »
Alors, ne venez pas nous dire, madame, qu'on ne paie pas d'impôt dans aucune
de ces deux îles, c'est inexact !
Or, si nous votions le texte qui nous est proposé, ne seraient même plus payés
les impôts qui le sont actuellement. Il est bien évident que beaucoup d'autres
territoires - je ne parle pas du territoire de Belfort
(Sourires.)
- seraient autorisés ensuite à demander à être traités de la
même manière.
Je sais bien que nombre d'entre nous vont sans doute aller en vacances dans
les Caraïbes.
M. Hilaire Flandre.
Nous n'en avons pas les moyens !
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Ils seraient d'autant mieux reçus à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin que les
articles cavaliers auraient été adoptés...
Pour notre part, nous aurions tendance à demander au moins que les bases de
l'impôt, là où elles n'existent pas, soient mises sur pied. On serait
d'ailleurs en droit de s'interroger : comment voulez-vous faire payer des
impôts alors que les bases n'existent pas ?
Curieuse logique aussi, monsieur le ministre, que de dire : ils ne paient pas
d'impôt, ils n'en ont jamais payé - ce qui est d'ailleurs inexact - ils n'ont
donc pas à en payer, mais il faut voter ce texte pour qu'ils en paient
desormais un peu ! Allons donc ! Est-ce là le but de ce texte ?
Il est décidement très cavalier de nous proposer de telles dispositions ! Bien
entendu, nous n'en voulons pas. C'est pourquoi nous voterons l'amendement de
suppression de la commission des lois.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry.
Tout d'abord, monsieur le président, je tiens à dire que je retire
l'amendement n° 4, et que je soutiendrai le texte voté par l'Assemblée
nationale.
Je salue le président du groupe d'amitié France-Caraïbes, mais j'aurai
l'occasion de lui démontrer qu'il connaît bien peu les Caraïbes.
En tout cas, je ne peux pas laisser dire devant la Haute Assemblée qu'il se
serait agi d'une visite de tourisme !
J'ai déposé devant la Haute Assemblée, le 5 septembre 1996, une demande de
constitution de commission d'enquête ainsi libellée : « Il est indispensable
que la représentation nationale se saisisse de ce dossier et qu'une commission
d'enquête soit désignée. »
M. le président de la commission m'a répondu que c'était compliqué. Je vous ai
alors fait parvenir, le 26 septembre, monsieur le président, une lettre pour
vous demander la création d'une mission parlementaire d'information afin
d'analyser la situation des îles. Pour ce faire, j'avais le soutien du conseil
général de la Guadeloupe, qui n'est pas du même bord politique que moi. Vous
m'avez répondu, le 19 novembre, que vous aviez reçu mes deux courriers et que,
après en avoir pris connaissance, ainsi que des documents qui vous avaient été
adressés par les maires, vous aviez demandé à M. François Blaizot, rapporteur
pour avis du budget de l'outre-mer, de bien vouloir prêter la meilleure
attention à ces questions.
La meilleure attention a traîné ! Pendant ce temps, mon collègue député
faisait la même démarche à l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale s'est saisie de la question, et M. Mazeaud s'est rendu
dans les îles.
Vous ajoutiez, monsieur le président de la commission : « Si vous le voulez
bien, M. Blaizot, qui doit rencontrer à Paris le maire de Saint-Barthélemy,
prendra dans un délai rapproché votre attache pour recueillir vos informations
sur ce projet de mission. »
Entre-temps, l'Assemblée nationale, saisie après le Sénat, a constitué sa
mission parlementaire, qui s'est rendue sur les lieux.
Un amendement a été déposé sur le présent projet de loi à l'Assemblée
nationale c'est ainsi que notre assemblée est aujourd'hui saisie de ce
texte.
Monsieur Larché, je le repète, respectueusement mais très fermement, je ne
peux pas admettre que vous parliez de promenade touristique ! J'ai demandé une
réunion de travail, comme j'ai l'habitude de le faire. J'ai demandé qu'une
misssion se tranporte sur les lieux ; si elle avait eu lieu, la Haute Assemblée
aurait été informée.
Maintenant, si le Conseil constitutionnel est saisi, le vrai visage du parti
socialiste apparaîtra aux yeux des élus et de la population de la
Guadeloupe.
En effet, c'est M. Larifla qui, le premier, en Guadeloupe, a soutenu ce
projet. Alors ! il y aurait un discours à Paris et un discours en Guadeloupe
?
D'ailleurs, M. Jospin s'est rendu dans un lycée sans m'en demander
l'autorisation et a harangué les étudiants en leur disant que je ne faisais
rien pour eux, alors que l'aide de l'Etat pour les étudiants s'élève à 21
millions de francs et que la région Guadeloupe accorde 106 millions de francs
!
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Quel est le rapport avec le texte ?
Mme Lucette Michaux-Chevry.
M. Jospin aurait dû avoir l'élémentaire correction d'aviser de sa visite le
président de région. En outre, il est peu courageux : si j'étais en Guadeloupe,
il ne serait pas entré au lycée.
(MM. Delong et Alloncle applaudissent.)
M. le président.
Je prends acte que l'amendement n° 4 est retiré.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
On peut poursuivre le débat, mais il
nous faudrait revenir à une tonalité plus calme, à laquelle d'ailleurs nous
sommes habitués.
Nous avons traité comme il se devait la demande que vous nous avez adressée,
madame, d'aller vérifier si, après que les conseils municipaux de Saint-Martin
et de Saint-Barthélemy se furent prononcés à l'unanimité pour la création d'une
collectivité territoriale à statut particulier, il était opportun d'envisager
une telle mesure.
Il ne nous est pas apparu nécessaire, j'irai même plus loin, il ne nous a pas
semblé sérieux, en tous les cas conforme au travail habituel de la commission
des lois d'aller vérifier sur place si l'île de Saint-Barthélemy devait devenir
une collectivité territoriale avec un député, un sénateur et un conseil
général.
Voilà pourquoi nous avons répondu que nous allions examiner ce problème et
nous efforcer de le traiter en le ramenant à sa juste dimension.
M. Yann Gaillard.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard.
Monsieur le président, je suis un peu embarrassé, je dois le dire, puisque mon
nom, non pas en tant que parlementaire mais en tant qu'ancien fonctionnaire, a
été prononcé par un membre éminent de notre assemblée. Je me vois donc
contraint de m'exprimer en raison de la connaissance que j'ai de ce dossier.
Voilà maintenant trois ans, je me suis rendu à Saint-Martin et à
Saint-Barthélemy à l'occasion d'une inspection. J'y ai étudié le régime fiscal
de ces deux îles et j'ai formulé quelques suggestions au ministre de l'économie
et des finances de l'époque, suggestions qui lui appartiennent et sur
lesquelles je ne me suis jamais exprimé publiquement.
Le rapporteur de la commission des finances a obtenu des renseignements auprès
du ministère des finances, qui ne lui a pas communiqué le document, lequel
appartient au ministre. Il n'est pas d'usage, semble-t-il de communiquer ce
genre d'informations aux assemblées.
Voilà exactement pourquoi mon nom a été mêlé à cette affaire. Je ne le
regrette pas : il est toujours agréable de constater que le travail qu'on a
effectué a quelque utilité, ce qui n'est pas fréquent dans l'administration.
J'en viens au sujet qui nous occupe.
A Saint-Barthélemy, aucun impôt n'est perçu, sauf les droits de quai, et aucun
impôt ne sera jamais perçu.
A ce propos, je rends tout à fait hommage au réalisme de Mme Michaux-Chevry :
on pourra faire tout ce que l'on voudra, mes chers collègues, on n'arrivera
jamais à percevoir aucun impôt à Saint-Barthélemy. Cette île, qui est
d'ailleurs bien particulière et qui a une histoire très forte, considère que ce
droit lui est acquis depuis que le roi de Suède l'a rétrocédée à la France -
après que la Suède l'eut acheté à la France un siècle auparavant - sous la
promesse d'une exemption fiscale générale ou presque.
Il est de fait que ce régime heurte notre esprit un peu jacobin et que nous
nous accommodons très mal d'un tel état de choses.
Le Conseil d'Etat, qui était dans son rôle, a émis plusieurs avis, selon
lesquels les impôts étaient exigibles à Saint-Barthélemy ; l'île se trouve donc
dans une situation d'illégalité tolérée.
En tant que simple fonctionnaire, j'avais recommandé de trouver un moyen de
concilier le fait et le droit. En effet, j'imagine mal que l'on puisse exiger
des impôts qui n'ont jamais été payés, et je ne pense pas, d'ailleurs, que les
problèmes que cela créerait seraient compensés par des rentrées suffisantes
pour justifier une telle politique.
Mais le fait est que Saint-Barthélemy est dans l'illégalité.
Je pense, bien que je ne sois pas juriste - sur ce point, je suis d'accord,
même si je parle à titre strictement personnel, avec la position adoptée par
les conseils général et régional de Guadeloupe - que la bonne solution en droit
serait de créer une collectivité à statut spécial dotée de l'autonomie fiscale,
ce qui est le cas de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte. Je ne vois
d'ailleurs pas en quoi cela menacerait la souveraineté française - mais j'ouvre
là un débat qui dépasse probablement le cadre de notre discussion.
Je reconnais que la solution, qui est mal fondée en droit et qui risquerait
une censure du Conseil constitutionnel est effectivement apportée par le texte
qui nous est soumis, texte que, pour des scrupules d'ordre technique et
juridique, je ne voterai pas, mais contre lequel je ne voterai pas non plus.
En fait, s'agissant de Saint-Barthélemy deux problèmes se posent.
Il s'agit, d'abord, d'éviter que ce régime n'apporte la « contagion », au-delà
des droits historiques de ceux qu'on appelle les « Saint-Barth ». De ce point
de vue, le texte du Gouvernement prend, me semble-t-il, des précautions tout à
fait louables.
Ensuite, et là je m'avoue un peu choqué, alors que l'île n'est pas frappée par
la TVA, elle émarge au fonds de compensation de TVA. Cela ne me paraît pas très
logique ! Je pense que la solidarité nationale peut très bien s'exprimer
autrement, par le biais de la DGF, par exemple. Mais, enfin, je n'irai pas
jusqu'à déposer un amendement, que je serais ensuite obligé de retirer ou que
je ne pourrais pas défendre.
S'agissant de Saint-Martin, la situation est différente. Monsieur le ministre,
je suis au regret de dire qu'on ne peut pas assimiler la situation de
Saint-Martin et celle de Saint-Barthélemy. Bien sûr, à Saint-Martin, il y a la
frontière, extrêmement poreuse, entre la partie française et la partie
hollandaise, il y a l'environnement caraïbe et bien d'autres nombreux facteurs.
Mais le fait est que Saint-Martin a connu ces dernières années un début de
fiscalisation, même si les rentrées fiscales n'ont rien d'extraordinaire. Au
demeurant, d'une manière générale, dans les départements d'outre-mer, les taux
de recouvrement ne sont pas comparables à ceux que l'on constate dans les
départements métropolitains. Cela dit, ce taux est encore plus bas à
Saint-Martin que dans le reste de la Guadeloupe.
Il n'en demeure pas moins qu'on enregistre un début de fiscalisation
s'enregistre à Saint-Martin et qu'on ne peut donc traiter le problème de
Saint-Martin et celui de Saint-Barthélemy en suivant exactement le même
raisonnement.
C'est pourquoi je suis encore plus réservé sur l'article relatif à
Saint-Martin que sur celui qui a trait à Saint-Barthélemy.
M. Jacques Machet.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet.
J'ai écouté avec attention l'explication de Mme Michaux-Chevry sur la
situation. Elle m'a convaincu, et je retire mon amendement.
M. le président.
L'amendement n° 5 est retiré.
M. Philippe de Bourgoing.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. de Bourgoing.
M. Philippe de Bourgoing.
Mme Michaux-Chevry a dit tout à l'heure que le Sénat savait prendre des
mesures très rationnelles, comme il l'avait fait ce matin à propos des
cinquante pas géométriques, et elle a ajouté « à la suite d'une très grande
réflexion ».
Eh bien, je crois que c'est ce qui nous a manqué dans cette affaire, et ce que
je viens d'entendre me renforce dans l'idée selon laquelle il est prématuré de
prendre une telle décision.
Après le président Larché, je voudrais rendre hommage à notre rapporteur, qui
a quelque peu souffert pour prendre la position qu'il a prise.
On nous propose un dispositif qui aboutit à faire payer des impôts dans un
lieu où, nous a-t-on dit, ces impôts ne seront jamais recouvrés, où il n'existe
aucune base d'imposition : on conviendra que tout cela mérite plus de
réflexion. D'ailleurs, l'urgence n'est peut-être pas si grande.
J'ajoute, monsieur le ministre, que, dans une affaire comme celle-là, il
serait essentiel que vous veniez devant la commission des lois afin que nous
ayons tous les éléments nécessaires pour prendre une décision.
Voilà pourquoi je voterai l'amendement de la commission des lois.
M. Emmanuel Hamel.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lequel
d'entre nous n'a pas été bouleversé par l'éloquence et la passion avec
lesquelles notre collègue Mme Lucette Michaux-Chevry a exprimé son point de vue
sur ce texte ? Nous comprenons que, avocate de profession et ambassadrice par
vocation, elle se fasse un devoir de défendre le point de vue des habitants
d'îles dont elle est, et c'est son honneur, l'élue.
Il est, dans l'exercice de notre mission de parlementaire, des moments
crucifiants, où nous nous trouvons écartelés entre, d'une part, les devoirs que
nous créent les liens d'amitié et les sentiments d'admiration et, d'autre part,
ceux que nous impose notre conception de la République.
Quelle que soit l'estime que je peux avoir pour les votes de l'assemblée
nationale, à laquelle j'ai eu l'honneur d'appartenir pendant trois
législatures, je ne me sens pas engagé par ces votes lorsque deux des
commissions de l'Assemblée à laquelle, malgré mon indignité, j'ai aujourd'hui
l'honneur d'appartenir, la commission des finances et la commission des lois,
expriment soit des réserves, soit le sentiment que le devoir d'Etat est
d'attendre d'être mieux informé avant, sur un problème de cette importance, de
prendre une décision véritablement éclairée.
Madame Michaux-Chevry, ne voyez pas dans mon propos un parti pris contre ce
que vous exprimez. Comprenez que, en conscience, un membre de la commission des
finances ne peut se désolidariser de l'avis que celle-ci a émis il y a si peu
de temps. Comprenez aussi que, nonobstant le talent de M. le ministre et votre
passion, je ne peux voter un texte qui constitue un cavalier, on l'a dit, et
qui, au-delà même des problèmes concernant les habitants de ces deux îles
admirables, interpelle les citoyens de la République tout entière par les
facilités - et j'ai peut-être tort de les évoquer - qu'il pourrait donner à des
manquements au devoir de solidarité fiscale et à l'égalité de tous les Français
devant l'impôt.
C'est la raison pour laquelle, ma chère collègue, avec regret, car j'ai été
véritablement bouleversé par votre éloquence, je ne pourrai joindre ma voix à
la vôtre et voterai les amendements de la commission des lois.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Je veux simplement apporter quelques éléments
d'information supplémentaires.
Monsieur Gaillard, vous avez eu, je crois, la bonne formule : personne n'ira à
Saint-Barthélemy pour faire en sorte que les impôts soient perçus. C'est ainsi
!
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Faut-il l'inscrire dans la loi ?
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Outre-mer, monsieur le président, il faut aussi tenir
compte des situations. Il ne s'agit pas d'allumer des mèches alors que ces
situations perdurent depuis des années, voire des siècles.
M. Jacques Larché,
président de la commission des lois.
Pourquoi, alors, ne pas attendre
encore un peu ? Nous ne demandons que cela !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Le problème qui se pose aujourd'hui, c'est l'évolution
de la démographie : elle est telle qu'il faut subvenir au financement
d'équipements structurants extrêmement importants, notamment hospitaliers.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Il faut choisir !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Il faut choisir, bien sûr, mais alors, il faut
m'expliquer comment on peut le faire ! Si l'on avait pu le faire, on l'aurait
fait depuis très longtemps, parce que l'augmentation de la population date de
1981, pas de dix-huit mois. Aujourd'hui, à Saint-Martin, je suis confronté à 34
000 habitants qui n'ont, en matière de santé et d'éducation, pas le quart du
dixième de ce dont nous disposons ici, en métropole.
M. Michel Dreyfus-Schmidt.
Sauf ceux qui paient l'ISF !
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Que proposent les élus ? C'est à cela que je veux en
venir.
En ce qui concerne le fonds de compensation de la TVA, ils se sentent
eux-mêmes un peu gênés, à Saint-Barthélemy comme à Saint-Martin. Ils m'ont dit
: « Dans la mesure où nous pourrons, nous, percevoir des impôts indirects, il
est bien évident que le fonds de compensation de la TVA, nous le laisserons à
la région : nous n'aurons plus aucune raison de le percevoir. »
Les 20 % qui seront prélevés le seront sur l'ensemble des impôts indirects,
notamment les taxes sur les carburants. A cet égard, à Saint-Martin, la
situation est totalement aberrante puisque tout change selon que vous êtes dans
la partie hollandaise ou dans la partie française.
Il y a donc une réalité qu'il ne faut pas fuir !
On peut effectivement considérer qu'il convient d'y réfléchir encore un peu,
mais je crois qu'il y a tout de même urgence.
Pour conclure, je dirai simplement qu'il y a des textes. Il y a, bien sûr, des
tolérances administratives, qui expliquent la situation présente, mais il y a
aussi des textes.
Ainsi, le décret du 30 mars 1948 relatif aux contributions indirectes dispose,
en son article 12, que « le régime particulier appliqué aux dépendances de
Saint-Martin et de Saint-Barthélemy est maintenu en vigueur ».
De plus, le code des douanes communautaire reconnaît l'existence de pratiques
coutumières de portée géographique et économique limitée : c'est le cas.
Enfin, dans le même sens, la loi du 17 juillet 1992 relative à l'octroi de mer
exonère de cette taxe les deux îles dont nous parlons.
En tout état de cause, il y a une situation qu'il faut remettre en ordre.
C'est pourquoi nous pensions que la proposition qui a été faite sur la base de
la mission conduite par M. Mazeaud était de bon sens en ce qu'elle «
photographiait » une situation. Il était important de mettre un certain nombre
de garde-fous, et c'est ce qui a été fait, conformément au souhait du
Gouvernement. Il convenait aussi de faire en sorte que, d'une certaine manière,
la solidarité de nos concitoyens de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy
s'exprime par le prélèvement de 20 % sur les taxes qu'ils devraient acquitter
dans le cadre du dispositif proposé.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 11 est supprimé.
Article 12
M. le président.
« Art. 12. _ I. _ L'île de Saint-Martin constitue, du point de vue douanier,
une zone franche au sens de l'article 286 du code des douanes. En conséquence,
les opérations d'importation ou d'exportation ne peuvent y donner lieu à
perception d'aucun droit de douane ou droit assimilé, octroi de mer ou taxe
visée au titre X dudit code ; cette disposition ne fait pas obstacle à
l'exercice par l'État de ses pouvoirs pour la recherche, la constatation et la
poursuite des infractions à la législation et à la réglementation sur les
produits et les marchandises dont l'importation, l'exportation, le commerce ou
la détention sont prohibés. De même, les taxes sur le chiffre d'affaires et
taxes assimilées, ainsi que les contributions indirectes, monopoles fiscaux et
taxes diverses institués par les titres II et III de la première partie du
livre premier du code général des impôts ne sont pas applicables à
Saint-Martin, sans qu'il soit porté atteinte à l'éligibilité de la commune aux
versements du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée.
« De même, les impôts directs et taxes assimilées perçues au profit de l'État,
à l'exception de la taxe d'apprentissage, des cotisations au titre des
participations des employeurs à l'effort de construction et au développement de
la formation professionnelle continue et de la contribution des institutions
financières ainsi que de l'impôt de solidarité sur la fortune, ne sont pas dus
lorsqu'ils trouvent leur origine dans des opérations ou activités accomplies ou
exercées ou dans des revenus, bénéfices ou biens obtenus ou possédés à
Saint-Martin par des personnes qui y exercent une activité effective ou qui,
n'exerçant aucune activité, justifient y résider de façon permanente et
effective ; lorsque les intéressés exercent une activité industrielle,
commerciale, libérale, artisanale, agricole, bancaire, financière ou
d'assurance, ils doivent justifier disposer à Saint-Martin de moyens
d'exploitation leur permettant de le faire d'une manière autonome.
« Les impositions perçues au profit des collectivités locales et de divers
organismes, les droits de timbre et d'enregistrement à l'exception de la taxe
différentielle sur les véhicules à moteur et de la taxe sur les certificats
d'immatriculation des véhicules et, d'une manière générale, tous les autres
impôts et taxes sont perçus à Saint-Martin dans les conditions de droit commun
applicables en Guadeloupe.
« II. _ Par conventions passées avec l'État, la région de la Guadeloupe ou le
département de la Guadeloupe, la commune de Saint-Martin peut exercer des
compétences relevant de l'État, de la région ou du département dans les
domaines de l'aménagement du territoire, de l'éducation et de la formation
professionnelle, de l'environnement, de l'exploitation des ressources de la
mer, de la santé, des transports, du tourisme et de l'urbanisme. Ces
conventions, conclues pour une durée ne pouvant pas excéder dix ans et
renouvelables, déterminent les conditions administratives et financières de
l'exercice de ces compétences pour la commune de Saint-Martin.
« Dans ce cadre, celle-ci peut édicter des réglementations dérogeant à celles
de l'État, de la région ou du département, sous réserve d'approbation par le
ministre chargé des départements d'outre-mer lorsqu'il s'agit de compétences de
l'État ou par le président du conseil régional ou du conseil général lorsqu'il
s'agit de compétences régionales ou départementales. L'absence de réponse dans
les deux mois de la saisine vaut approbation.
« III. _ La commune de Saint-Martin a la faculté d'instituer une ou plusieurs
impositions suivantes :
« _ une taxe sur les hébergements touristiques, ainsi qu'une taxe sur les
locations de véhicules de tourisme et les locations de bateaux à usage
touristique ou de loisir, dont les taux sont fixés dans la limite de 7,5 % du
montant des prestations d'hébergement ou de location ;
« _ une taxe sur les véhicules dont le montant annuel est fixé dans la limite
de 500 francs pour les véhicules de tourisme et de 1 000 francs pour les
véhicules utilitaires.
« Le produit de ces taxes est réparti à hauteur de 80 % au profit de la
commune et de 20 % à celui de l'État, dont 5 % au titre des frais d'assiette et
de recouvrement. Ces taxes sont établies et recouvrées, les infractions sont
recherchées, constatées et poursuivies et les contestations sont instruites et
jugées selon les modalités et sous les garanties applicables aux taxes sur le
chiffre d'affaires pour les taxes sur les hébergements touristiques et sur les
locations de véhicules de tourisme et de bateaux et aux droits de timbre pour
la taxe sur les véhicules.
« L'article 1585 I du code général des impôts, l'article L. 2563-7 du code
général des collectivités territoriales et le II de l'article 41 de la loi de
finances rectificative pour 1989 (n° 89-936 du 29 décembre 1989) sont abrogés.
»
Par amendement n° 2, M. Blaizot, au nom de la commission, propose de supprimer
cet article.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je pense pouvoir considérer que
chacun s'est déjà expliqué sur cet article et sur cet amendement et que nous
pouvons passer directement au vote.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 12 est supprimé.
Intitulé du projet de loi
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Blaizot, au nom de la commission, propose, dans
l'intitulé du projet de loi, de supprimer les mots : « et relatif au statut
administratif, douanier et fiscal de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin ».
Là encore, compte tenu du long débat qui s'est déjà déroulé, je pense que nous
pouvons passer directement au vote.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'intitulé du projet de loi est ainsi modifié.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la deuxième
lecture.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
10
RATIFICATION D'ORDONNANCES PRISES
EN MATIÈRE PÉNALE POUR MAYOTTE
ET LES TERRITOIRES D'OUTRE-MER
Adoption d'un projet de loi
en deuxième lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi (n°
121, 1996-1997), modifié par l'Assemblée nationale, de ratification des
ordonnances prises en matière pénale pour Mayotte et les territoires
d'outre-mer. [Rapport n° 134 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué à l'outre-mer.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, votre assemblée est saisie en deuxième lecture du
projet de loi portant ratification des ordonnances relatives à l'extension et à
l'adaptation de la législation en matière pénale applicable aux territoires
d'outre-mer et à la collectivité territoriale de Mayotte.
Je rappelle l'importance des deux ordonnances du 28 mars 1996.
La première ordonnance a pour objet de rendre applicable le nouveau code
pénal, en vigueur en métropole depuis le 1er mars 1994, dans les territoires
d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte en procédant aux
adaptations nécessaires.
L'autre ordonnance concerne l'extension des dispositions de procédure pénale,
notamment les dernières modifications relatives aux régimes de la garde à vue
et de la détention provisoire.
La dernière adaptation de ces textes dans les territoires d'outre-mer
remontait à l'ordonnance du 12 octobre 1992.
Avec la création, au sein du code pénal et du code de procédure pénale, de
livres regroupant les dispositions spécifiques aux territoires d'outre-mer et à
Mayotte, les praticiens comme les justiciables disposent d'un outil moderne qui
facilite l'accès à un domaine du droit essentiel pour les libertés publiques et
individuelles.
Nos concitoyens de l'outre-mer bénéficient ainsi, à compter du 1er mai, des
droits reconnus en métropole depuis plus de deux ans.
Le projet initial a été amélioré par les amendements retenus par votre
assemblée et par ceux qui l'ont été à l'Assemblée nationale.
Ces modifications ont permis de préciser certaines dispositions des
ordonnances ou de corriger des erreurs matérielles.
Plusieurs amendements ont eu aussi pour objet de rectifier la définition des
incriminations relatives aux dons d'organes et de produits humains, afin
d'assurer le respect du principe de légalité.
Enfin, le régime juridique des jeux de hasard et des loteries en Polynésie
française a également été modifié par voie d'amendement.
Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de bien vouloir adopter
conforme ce projet de loi, comme vous le propose, cette fois-ci, la commission
des lois.
(Sourires.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Blaizot,
en remplacement de M. Jean-Marie Girault, rapporteur de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale.
Monsieur le président, monsieur le ministre,
mes chers collègues, M. Jean-Marie Girault, empêché, m'a demandé de vous prier
de l'excuser et de vous présenter son rapport.
Ma tâche est simple, puisque ce projet de loi a été adopté en première lecture
par le Sénat, le 20 novembre dernier, sur le rapport de M. Jean-Marie Girault,
et qu'il nous revient de l'Assemblée nationale fort peu modifié.
L'Assemblée nationale a en effet entériné toutes les modifications que nous
avions apportées au projet de loi déposé par le Gouvernement.
Elle a introduit une modification strictement rédactionnelle au début de
l'article 1er, qui ne nous pose aucun problème et que nous vous proposons
d'adopter. Elle a corrigé une erreur de numérotation d'alinéas à l'article 2
quinquies
et a raccourci, sans en réduire la portée, l'intitulé du
projet de loi.
La commission des lois vous propose donc d'adopter ce projet de loi dans une
rédaction conforme à celle qui a été votée par l'Assemblée nationale.
M. le président.
La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel.
Au risque de manquer aux règles en vigueur au sein de notre assemblée - et je
prie M. le président de la commission des lois de bien vouloir me pardonner -
je tiens, en tant que sénateur du Rhône, à saisir cette occasion pour demander
à M. le ministre de bien vouloir faire part à M. le préfet, représentant du
Gouvernement de la République à Mayotte, du regret qu'éprouvent les Rhodaniens
à l'idée de son départ.
En effet, avant d'être nommé à Mayotte, il a servi avec tant de dévouement et
de rayonnement la République dans la région Rhône-Alpes que ce fut, pour nous,
à la fois une fierté de le voir ainsi promu et un regret de le voir partir.
Transmettez-lui notre déférente amitié et notre espoir qu'à Mayotte il serve
la République avec le talent et l'efficacité qui firent l'admiration des
Rhône-Alpins lorsqu'il était secrétaire général auprès de M. le préfet de la
région Rhône-Alpes.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques de Peretti,
ministre délégué.
Monsieur Hamel, je ne manquerai pas de transmettre
votre message. Néanmoins, partir, c'est déjà un peu revenir et, s'agissant d'un
fonctionnaire, il n'est nullement exclu qu'il revienne un jour en métropole.
M. Emmanuel Hamel.
En tant que préfet de la région Rhône-Alpes, j'espère !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la
discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du
Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. _ Sont ratifiées, telles que modifiées par les dispositions de la
présente loi, les ordonnances suivantes, prises en application de la loi n°
96-1 du 2 janvier 1996 d'habilitation relative à l'extension et à l'adaptation
de la législation en matière pénale applicable aux territoires d'outre-mer et à
la collectivité territoriale de Mayotte :
« 1° Ordonnance n° 96-267 du 28 mars 1996 relative à l'entrée en vigueur du
nouveau code pénal dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité
territoriale de Mayotte ainsi qu'à l'extension et à la modification de
certaines dispositions législatives rendues nécessaires par cette entrée en
vigueur ;
« 2° Ordonnance n° 96-268 du 28 mars 1996 portant actualisation des
dispositions législatives de procédure pénale applicables dans les territoires
de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et des îles Wallis et
Futuna ainsi que dans la collectivité territoriale de Mayotte ».
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2 quinquies
M. le président.
« Art. 2
quinquies
. _ Le deuxième alinéa de l'article 46 inséré dans
l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante par
l'article 2 de l'ordonnance n° 96-268 du 28 mars 1996 précitée est ainsi rédigé
:
« I. _ Pour son application dans les territoires de la Nouvelle-Calédonie, de
la Polynésie française et des îles Wallis et Futuna, au onzième alinéa de
l'article 10, les mots : "par le ministre de la justice" sont
remplacés par les mots : "dans les conditions fixées par la réglementation
applicable localement". » -
(Adopté.)
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Mes chers collègues, nous allons suspendre la séance pendant quelques
instants, afin de permettre à M. le ministre délégué au logement de gagner
l'hémicycle.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit
heures dix.)
M. le président. La séance est reprise.
11
SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président.
M. le président a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une
lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été
saisi le 19 décembre 1996, en application de l'article 61, alinéa 2, de la
Constitution par plus de soixante députés, d'une demande d'examen de la
conformité à la Constitution de la loi de finances pour 1997.
Le texte de cette saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau
de la distribution.
12
UNION D'ÉCONOMIE SOCIALE DU LOGEMENT
Adoption des conclusions
d'une commission mixte paritaire
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 150,
1996-1997) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur
les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l'Union
d'économie sociale du logement.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Marcel-Pierre Cléach,
rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Monsieur le
président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte
paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en
discussion du projet de loi relatif à l'Union d'économie sociale du logement
s'est réunie à l'Assemblée nationale le jeudi 12 décembre 1996.
L'Assemblée nationale a adopté le projet de loi en reprenant la plupart des
modifications votées par le Sénat et en modifiant le dispositif lui-même à
l'article L. 313-18 du code de la construction et de l'habitation, afin
d'ajouter à la liste des associés de l'Union d'économie sociale du logement,
l'UESL, à titre obligatoire, chaque chambre de commerce et d'industrie agréée
aux fins de collecter le 1 %.
J'avais indiqué, lors des débats en première lecture, tout l'intérêt qui
s'attachait à ce que les chambres de commerce et d'industrie adhèrent au
nouveau dispositif, mais à la seule condition qu'elles soient volontaires pour
cette adhésion ; cet accord peut maintenant être considéré comme acquis,
puisque M. Gérard Trémège, président de l'Assemblée des chambres françaises de
commerce et d'industrie, par lettre en date du 9 décembre dernier, avait fait
part à M. Pierre-André Périssol, ministre délégué au logement, de son accord
sur l'intégration, à titre individuel, des chambres de commerce et d'industrie
collectrice du 1 % logement dans l'UESL.
Aucune difficulté de fond ne subsistait donc et la commission mixte paritaire
a pu trouver facilement un accord sur l'ensemble des points restant en
discussion, afin de préciser certaines rédactions et de tirer les ultimes
conséquences de l'adhésion des chambres de commerce et d'industrie, notamment
en ce qui concerne les modalités du prélèvement exceptionnel institué pour 1997
et 1998 définies à l'article 4 du projet de loi.
La commission mixte paritaire a adopté l'article 1er dans la rédaction de
l'Assemblée nationale sous réserve des modifications suivantes : à l'article L.
313-18 du code de la construction et de l'habitation, elle a harmonisé la
rédaction des deuxième et troisième alinéas ; aux articles L. 313-19, L. 313-20
et L. 313-22, la commission a précisé, chaque fois que nécessaire, que seuls
étaient concernés les fonds issus de la participation des employeurs à l'effort
de construction ; à l'article L. 313-21, elle a adopté un amendement
rédactionnel sur la désignation ou l'élection des membres suppléants.
La commission a ensuite apporté plusieurs précisions rédactionnelles : à
l'article 2, relatif aux sanctions applicables aux collecteurs du 1 % logement
; à l'article 2
bis,
qui met à jour certaines dispositions du code de la
construction et de l'habitation ; à l'article 2
ter,
qui prévoit une
réorganisation du même code pour sa partie relative à la participation des
employeurs à l'effort de construction.
Elle a, par ailleurs, confirmé la suppression de l'article 3
bis
et
adopté l'article 3
ter
dans la rédaction de l'Assemblée nationale, sous
réserve d'une précision rédactionnelle.
La commission mixte paritaire a adopté l'article 4 en substituant au mot «
associations » les termes « associés collecteurs » et en précisant, au
troisième alinéa, l'origine des fonds servant de support au paiement de la
contribution exceptionnelle, afin d'étendre, au nom du principe d'égalité des
actionnaires, la faculté de substitution de l'UESL aux chambres de commerce et
d'industrie, associées au même titre que les comités interprofessionnels du
logement, et ce pour le paiement de la contribution exceptionnelle prévue en
1997.
Enfin, la commission a adopté le texte de l'article 5 relatif à l'organisation
des premières élections à l'UESL, sous réserve de précisions
rédactionnelles.
Mes chers collègues, je vous propose donc d'adopter les dispositions restant
en discussion que la commission mixte paritaire a retenues et que je viens de
vous présenter brièvement.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué au logement.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici parvenus au terme du
processus législatif qui doit permettre au dispositif du 1 % logement de
retrouver toute sa légitimité...
M. Emmanuel Hamel.
Il ne l'avait pas perdue !
M. Pierre-André Périssol,
ministre délégué.
... et d'être plus efficace.
La nécessité de cette réforme a été reconnue par les partenaires sociaux et
par la majorité des collecteurs, qu'il s'agisse des CIL ou des chambres de
commerce et d'industrie, qui ont décidé d'adhérer, comme vient de l'indiquer M.
le rapporteur, à l'Union d'économie sociale du logement.
Cette réforme donne à la profession les moyens de se moderniser elle-même, ce
qui est un gage de réussite.
Le Gouvernement se félicite de l'accord intervenu au sein de la commission
mixte paritaire. En effet, cet accord et les dispositions qui ont été retenues
viennent parachever le travail approfondi accompli en première lecture tant au
Sénat qu'à l'Assemblée nationale. A cet égard, je tiens tout particulièrement à
remercier la commission des affaires économiques, notamment son rapporteur, M.
Marcel-Pierre Cléach.
Le texte élaboré par la commission mixte paritaire recueille l'accord du
Gouvernement, car il permettra d'inscrire l'action du 1 % logement dans un
cadre stable et clair.
(Applaudissements.)
M. Emmanuel Hamel.
Monsieur le ministre, vous êtes très clair !
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, d'une
part, aucun amendement n'est recevable, sauf accord du Gouvernement ; d'autre
part, étant appelé à se prononcer avant l'Assemblée nationale, le Sénat statue
sur les amendements puis, par un seul vote, sur l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :
« Art. 1er. - L'article L. 313-17 du code de la construction et de
l'habitation est remplacé par neuf articles ainsi rédigés :
«
Art. L. 313-17. -
L'Union d'économie sociale du logement est une
société anonyme coopérative à capital variable, soumise aux règles applicables
aux unions d'économie sociale régies notamment par le titre II
bis
de la
loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération et aux
dispositions de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1996 sur les sociétés
commerciales, sous réserve des dispositions du présent chapitre.
«
Art. L. 313-18. -
L'Union d'économie sociale du logement a pour seuls
associés :
« - à titre obligatoire, chaque organisme collecteur agréé aux fins de
participer à la collecte des sommes définies à l'article L. 313-1 et ayant le
statut d'association à caractère professionnel ou interprofessionnel ;
« - à titre obligatoire, chaque chambre de commerce et d'industrie agréée aux
fins de participer à la collecte des sommes définies à l'article L. 313-1 ;
« - sur sa demande, toute organisation interprofessionnelle et représentative
au plan national de salariés ou d'entreprises assujetties au versement de la
participation des employeurs à l'effort de construction.
«
Art. L. 313-19. -
L'Union d'économie sociale du logement :
« 1° Représente les intérêts communs de ses associés, notamment auprès des
pouvoirs publics ;
« 2° Conclut avec l'Etat, après information des associés collecteurs, des
conventions définissant des politiques nationales d'emploi des fonds issus de
la participation des employeurs à l'effort de construction et des ressources du
fonds d'intervention de l'union, à mettre en oeuvre par les associés
collecteurs. L'union peut en outre conclure avec l'Etat des conventions ayant
pour objet de favoriser la coopération entre associés, de coordonner les tâches
de collecte, d'harmoniser les modalités d'emploi des fonds issus de la
participation des employeurs à l'effort de construction, de contribuer, avec
les associations départementales d'information sur le logement qui ont signé
une convention avec l'Etat, à l'information sur le logement des salariés et
d'améliorer la gestion des associés collecteurs ;
« 3° Elabore, dans l'intérêt commun, des recommandations aux associés aux fins
mentionnées au 2°. Ces recommandations ne peuvent déroger aux conventions
ci-dessus mentionnées ;
« 4° Donne, dans les conditions prévues par ses statuts, un avis préalablement
aux opérations par lesquelles les associés collecteurs convertissent ou
transforment en titres ou subventions des créances constituées avec les fonds
issus de la participation des employeurs à l'effort de construction ou par
lesquelles ils cèdent ou prennent des participations financées avec les mêmes
fonds. L'union peut demander une seconde délibération aux associés collecteurs
;
« 5° Assure, dans les limites fixées par ses statuts, la gestion d'autres
intérêts communs de ses associés et contribue au développement de leurs
activités. Ces opérations sont retracées dans une comptabilité distincte ;
« Les associés collecteurs communiquent à l'union les renseignements
nécessaires à l'exercice de sa mission.
« Les statuts de l'union sont approuvés par décret en Conseil d'Etat.
«
Art. L. 313-20. -
Les stipulations des conventions prévues au 2° de
l'article L. 313-19 s'imposent aux associés.
« Pour l'exécution de ces conventions par les associés collecteurs, l'union
dispose d'un fonds d'intervention qui contribue à la bonne adaptation des
ressources des associés collecteurs aux besoins locaux, compte tenu des
politiques nationales et locales d'emploi de la participation des employeurs à
l'effort de construction. Les opérations du fonds sont retracées dans une
comptabilité distincte.
« Chaque associé collecteur apporte sa contribution au fonds d'intervention.
Le conseil d'administration de l'union fixe, après consultation du comité des
collecteurs mentionné à l'article L. 313-21, le montant des contributions sous
la forme de versements, de transferts de créances constituées avec des fonds
issus de la participation des employeurs à l'effort de construction ou
d'inscriptions au bilan de ces associés de dettes dont le paiement à l'union
est garanti par les actifs des associés issus de cette participation.
« Le fonds peut également être alimenté par toutes ressources de l'union.
«
Art. L. 313-21. -
Le conseil d'administration de l'union comporte
cinq représentants des associés collecteurs, élus en son sein, par le comité
des collecteurs, cinq représentants permanents au plus désignés par les
organisations d'employeurs associées et cinq représentants permanents au plus
désignés par les organisations de salariés associées. Un suppléant de chacun de
ces représentants est élu ou désigné dans les mêmes conditions. Le conseil
d'administration est présidé par l'un de ces représentants. Ces représentants
et leurs suppléants ne peuvent être propriétaires d'actions de l'union.
« Le comité des collecteurs est élu pour trois ans par les associés
collecteurs dans les conditions fixées par les statuts. Il est renouvelé par
tiers chaque année. Il doit être réuni dès que la demande en est faite par le
quart des associés collecteurs. Il peut demander la réunion du conseil
d'administration sur un ordre du jour déterminé.
«
Art. L. 313-22. -
Le comité paritaire des emplois est composé des
représentants permanents des organisations d'employeurs et de salariés
associées ou de leurs suppléants. Sur proposition du comité paritaire,
notamment en vue de la conclusion avec l'Etat des conventions prévues au 2° de
l'article L. 313-19, le conseil d'administration de l'union délibère sur les
politiques d'emploi des fonds issus de la participation des employeurs à
l'effort de construction.
«
Art. L. 313-23. -
Deux commissaires du Gouvernement représentent
l'Etat auprès de l'union. Ils assistent aux séances du conseil d'administration
et peuvent se faire communiquer tous documents. Ils peuvent conjointement
demander que l'union procède à une seconde délibération sur les avis prévus au
4° de l'article L. 313-19 et sur les décisions relatives aux contributions
prévues à l'article L. 313-20. La confirmation de la décision prise par le
conseil d'administration en première délibération ne peut être acquise qu'à la
majorité des membres composant le conseil.
«
Art. L. 313-24. -
Toute augmentation du capital de l'union par
incorporation des réserves, bénéfices ou primes d'émission est interdite, sauf
dérogation accordée par l'autorité administrative.
« L'union ne peut procéder à l'amortissement de son capital et ne peut servir
aucun dividende, intérêt ou rémunération de quelque nature que ce soit à son
capital.
« Le prix maximal de cession des actions de l'union est limité au montant
nominal de ces actions.
« Les opérations intervenues en violation des dispositions du présent article
sont frappées d'une nullité d'ordre public.
«
Art. L. 313-25.
- Pour ses frais de fonctionnement afférents aux
attributions prévues aux 1° à 4° de l'article L. 313-19, l'union dispose d'un
prélèvement opéré chaque année sur les sommes collectées par les associés
collecteurs. Elle en détermine le montant annuel dans la limite d'un plafond
fixé par l'autorité administrative.
«
Art. L. 313-26. - Suppression maintenue.
« Art. 2. - Le code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié
:
« I. - L'article L. 313-2 est complété par un 7° ainsi rédigé :
« 7° les personnes interdites et les personnes suspendues en application de
l'article L. 313-13. »
« II. - Après la première phrase du neuvième alinéa de l'article L. 313-7, il
est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Elle contrôle en outre le respect des conventions que l'Union d'économie
sociale du logement a conclues avec l'Etat et, sur demande de cette union, le
respect des recommandations de l'union par ses associés. »
« II
bis.
- Dans le dernier alinéa de l'article L. 313-7, les mots :
"et propose aux ministres intéressés les éventuelles adaptations du taux
visé au premier alinéa de l'article L. 313-1" sont supprimés.
« III. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 313-13 ainsi que dans le
dernier alinéa du même article, les mots : "un ou plusieurs dirigeants
ou" sont insérés après le mot : "suspendre".
« IV. - Au troisième alinéa de l'article L. 313-13 :
« - Le début de l'alinéa est ainsi rédigé :
« L'Agence nationale peut proposer au ministre chargé du logement
l'interdiction d'un ou de plusieurs dirigeants, pour une durée de dix ans au
maximum, ou le retrait de l'agrément de l'association concernée. Elle peut
également proposer de prononcer à l'encontre de l'association une sanction
pécuniaire...
(la suite sans changement)
»
« Les deux dernières phrases du même alinéa sont ainsi rédigées :
« L'association ou le dirigeant concerné doit être mis en mesure de présenter
ses observations préalablement au prononcé de l'une des sanctions
susmentionnées. La décision du ministre prononçant une sanction d'interdiction
ou une sanction pécuniaire peut faire l'objet d'un recours de pleine
juridiction devant la juridiction administrative. »
« V. - Il est inséré, après le troisième alinéa de l'article L. 313-13, un
alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article sont en outre applicables lorsque
l'association ne souscrit pas sa quote-part du capital de l'Union d'économie
sociale du logement, ne s'acquitte pas des contributions prévues aux articles
L. 313-20 et L. 313-25, manque de manière grave et répétée aux recommandations
de l'union, ne respecte pas les conventions prévues au 2° de l'article L.
313-19 ou réalise des opérations en méconnaissance des dispositions du 4° du
même article. Toutefois, la sanction n'est prononcée par le ministre après avis
de l'Agence nationale et de l'union. »
« VI. - Il est inséré, après le deuxième alinéa de l'article L. 313-7-1, un
alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'organisme est associé de l'Union d'économie sociale du logement et
qu'il ne souscrit pas sa quote-part du capital de cette union, ne s'acquitte
pas des contributions prévues aux articles L. 313-20 et L. 313-25, manque de
manière grave et répétée aux recommandations de l'union, ne respecte pas les
conventions prévues au 2° de l'article L. 313-19 ou réalise des opérations en
méconnaissance des dispositions du 4° du même article, l'Agence nationale met
l'organisme en demeure de prendre, dans un délai déterminé, toute mesure de
redressement utile. En cas de carence de l'organisme à prendre ces mesures de
redressement, le ministre chargé du logement peut, après avis de l'Agence
nationale et de l'union, retirer l'agrément de collecte de cet organisme. »
« Art. 2
bis.
- I. - Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 313-2
du code de la construction et de l'habitation, les mots : "par les
articles 150 et 151 du code pénal" sont remplacés par les mots : "par
l'article 441-1 du nouveau code pénal".
« II. -
Suppression maintenue.
« Art. 2
ter.
I. - Il est créé, dans le chapitre III du titre Ier du
livre III du code de la construction et de l'habitation, une section 1
intitulée : "Participation des employeurs à l'effort de construction"
et comportant les articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-5 et L. 313-6.
« II. - Il est créé, dans le même chapitre, une section 2 intitulée :
"Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de
construction" et comportant les articles L. 313-7, L. 313-8 à L. 313-15
et, sous le numéro L. 313-16, l'article L. 313-7-1.
« III. - Il est créé, dans le même chapitre, une section 3 intitulée :
"Union d'économie sociale du logement" et comportant les articles L.
313-17 à L. 313-25.
« IV. - Il est créé, dans le même chapitre, une section 4 intitulée :
"Dispositions diverses" et comportant, respectivement sous les
numéros L. 313-26 à L. 313-32, les articles L. 313-1-1, L. 313-1-2, L. 313-1-3,
L. 313-2, L. 313-3, L. 313-16 et L. 313-16-1.
« IV
bis.
- La même section 4 est complétée par un article L. 313-33
ainsi rédigé :
«
Art. L. 313-33.
- Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités
d'application du présent chapitre. Il fixe notamment les conditions dans
lesquelles les délibérations du conseil d'administration de l'Agence nationale
pour la participation des employeurs à l'effort de construction sont rendues
exécutoires ainsi que les conditions de dépôt et de placement des
disponibilités financières du fonds d'intervention de l'Union d'économie
sociale du logement en attente de l'emploi fixé par les conventions prévues au
2° de l'article L. 313-19. Il fixe enfin le délai à l'expiration duquel, faute
de réponse de l'union, l'avis prévu au 4° de l'article L. 313-19 est réputé
rendu. »
« V. - Les renvois aux articles renumérotés en application des II et IV sont
remplacés par des renvois aux mêmes articles ainsi renumérotés.
« VI. - Les renvois à l'article L. 313-17 du code de la construction et de
l'habitation sont remplacés par des renvois à l'article L. 313-33 du même
code.
« Art. 3
bis. - Suppression maintenue.
« Art. 3
ter.
- Les créances de toute nature constituées avec des fonds
issus de la participation des employeurs à l'effort de construction et détenues
par les associés collecteurs de l'Union d'économie sociale du logement prévue à
l'article L. 313-17 du code de la construction et de l'habitation peuvent être
cédées ou données en nantissement à un établissement de crédit ou à cette union
par la seule remise du bordereau prévu à l'article premier de la loi n° 81-1 du
2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises.
« Les créances cédées ou données en nantissement à l'Union d'économie sociale
du logement dans les conditions de l'alinéa précédent peuvent être cédées ou
données en nantissement par cette union à un établissement de crédit par la
seule remise du bordereau prévu à l'article premier de la loi n° 81-1 du 2
janvier 1981 précitée.
« Les dispositions de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 précitée, à l'exception
de celles du premier alinéa de l'article premier et de l'article 3, sont
applicables aux créances cédées ou données en nantissement en application du
présent article.
« Art. 4. - L'Union d'économie sociale du logement est habilitée à se
substituer à ses associés collecteurs agréés aux fins de participer à la
collecte des sommes définies à l'article L. 313-1 du code de la construction et
de l'habitation, pour le versement de la contribution au financement des aides
à la pierre prévue par la loi de finances pour 1997.
« L'engagement de l'union résulte d'une convention conclue avec l'Etat et dont
les dispositions s'imposent aux associés collecteurs à peine de retrait de leur
agrément.
« Pour l'exécution de cette convention, chaque associé collecteur apporte sa
contribution à l'union. L'union fixe le montant des contributions sous la forme
de versements, de transferts de créances constituées avec des fonds issus de la
participation des employeurs à l'effort de construction ou d'inscriptions au
bilan de ces associés de dettes dont le paiement à l'union est garanti par les
actifs des associés issus de cette participation.
« Art. 5. - I. - Les premiers statuts de l'Union d'économie sociale du
logement sont approuvés par décret en Conseil d'Etat après avoir été adoptés
par l'assemblée générale des associés constituée comme il est dit à l'alinéa
suivant. Les dispositions de l'article 87 de la loi n° 66-537 du 24 juillet
1966 sur les sociétés commerciales ne sont pas applicables aux premiers
statuts.
« Cette assemblée est convoquée et présidée par le président de l'Union
nationale interprofessionnelle du logement. Elle est composée d'un représentant
de chacun des organismes collecteurs, chambres de commerce et d'industrie et
organisations interprofessionnelles mentionnés à l'article L. 313-18 du code de
la construction et de l'habitation. Chaque représentant dispose d'une voix et
peut donner pouvoir. Cette assemblée ne délibère valablement que si les
représentants présents ou ayant donné pouvoir disposent du tiers des voix. Elle
statue à la majorité des deux tiers des voix dont disposent les représentants
présents ou ayant donné pouvoir.
« II. - Après publication du décret prévu au I, le président de l'Union
nationale interprofessionnelle du logement convoque et préside :
« - l'assemblée générale des associés qui procède à la première désignation du
ou des commissaires aux comptes ;
« - l'assemblée spéciale des associés collecteurs qui procède à la première
élection du comité des collecteurs ;
« - le comité des collecteurs qui procède à la première élection des
représentants des associés collecteurs au conseil d'administration ;
« - le conseil d'administration qui procède à la première désignation de son
président. »
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ? ...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix
l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la
commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.)
13
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de MM. Serge Mathieu, Henri Revol et Jean Boyer une proposition de
loi visant à interdire le port du voile islamique à l'intérieur des
établissements de l'enseignement public.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 164, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
14
TRANSMISSION
D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président.
J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi,
adoptée par l'Assemblée nationale, modifiant les articles 54, 62 et 66-5 de la
loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions
judiciaires et juridiques.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 163, distribuée et renvoyée
à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage
universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la
constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues
par le règlement.
15
DÉPO^T D'UNE PROPOSITION
D'ACTE COMMUNAUTAIRE
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire
suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article
88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Conseil concernant le rapprochement des
législations des Etats membres relatives aux licenciements collectifs.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E755 et
distribuée.
16
DÉPO^T DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Alain Lambert, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au
nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion sur le projet de loi de finances
rectificative pour 1996.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 161 et distribué.
J'ai reçu de M. Michel Mercier, rapporteur pour le Sénat, un raport fait au
nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les
dispositions restant en discussion sur le projet de loi relatif à la zone
franche de Corse.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 162 et distribué.
17
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au vendredi 20 décembre 1996, à neuf heures trente et, éventuellement, à
quinze heures :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 161, 1996-1997) fait au nom de la
commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions
restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 1996.
M. Alain Lambert, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte
paritaire.
Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble.
2. Discussion des conclusions du rapport (n° 155, 1996-1997) de la commission
mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en
discussion du projet de loi relatif à la collecte et à l'élimination des
cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs et modifiant le code rural.
M. Roger Rigaudière, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte
paritaire.
3. Discussion des conclusions du rapport (n° 162, 1996-1997) fait au nom de la
commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions
restant en discussion du projet de loi relatif à la zone franche de Corse.
M. Michel Mercier, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte
paritaire.
4. Eventuellement, navettes diverses.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures vingt.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ET D'AMINISTRATION GÉNÉRALE
- pour la proposition de loi n° 86 (1995-1996) de M. Serge Mathieu, relative à
la polygamie, en remplacement de M. Patrice Gélard désigné le 13 décembre 1995
;
- pour la proposition de loi n° 451 (1995-1996) de M. Serge Mathieu, relative
au certificat d'hébergement, en remplacement de M. René-Georges Laurin désigné
le 26 juin 1996.
M. Daniel Hoeffel pour le projet de loi n° 143 (1996-1997) portant
dispositions statutaires relatives au corps des tribunaux administratifs et des
cours administratives d'appel.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Difficultés rencontrées par les PME à l'exportation
528. - 19 décembre 1996. - M. Paul Girod attire l'attention de M. le ministre délégué aux finances et au commerce extérieur sur les difficultés à l'exportation rencontrées par les PME. Seules les grandes entreprises sont habilitées à exporter car elles peuvent financer des cadres capables de gérer les problèmes rencontrés. En revanche, il semblerait que les procédures d'aides aux PME, nombreuses mais complexes, devraient être dynamisées. La complémentarité des départements, des DRCE (directions régionales du commerce extérieur), des agences régionales à l'exportation, des chambres de commerce, permettrait une meilleure répartition des budgets affectés à des actions d'exportation, les coûts ne correspondant pas aux résultats constatés. En Picardie, une DRCE de quatre personnes, une DRIRE (direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement) d'une personne et, enfin, une CCI sans aucun professionnel de ce métier sont des exemples qui traduisent l'apparente inadéquation évoquée. Il lui demande donc quelles mesures il envisage d'adopter à cet égard.