ÉLOGE FUNÈBRE DE GÉRARD GAUD,
SÉNATEUR DE LA DRÔME

M. le président. Mes chers collègues, je vais prononcer l'éloge funèbre de Gérard Gaud. (M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)
Notre collègue Gérard Gaud, sénateur de la Drôme, n'est plus. Emporté par une soudaine maladie, il nous a quittés le 3 septembre. Nous ne verrons plus la haute silhouette de cet homme cordial, dont chacun connaissait l'affabilité.
Gérard Gaud est né en 1925 à Juliénas, dans une modeste famille du Beaujolais. Orphelin à onze ans, il fait très jeune le dur apprentissage de la vie professionnelle. Il entre à quinze ans en qualité d'aide-dessinateur à la Compagnie nationale du Rhône. Il y fera toute sa carrière. A force de détermination et de travail, il s'élèvera au rang d'ingénieur. Il était fier de cette réussite, qu'il ne devait qu'à lui seul.
Pendant la guerre, le jeune homme a participé à la Résistance. Cette expérience a renforcé le sens de la solidarité qu'il développera dans l'action politique et l'action syndicale.
A la Libération, Gérard Gaud adhère à la SFIO. Il deviendra secrétaire-adjoint de la fédération de la Drôme. Dans cette vieille terre socialiste, les joutes politiques sont toujours empreintes de bonne humeur et de convivialité. Pourvu de l'une et de l'autre, Gérard Gaud y excelle. Il prendra une part active à l'oeuvre de rénovation de son mouvement et sera membre de la commission exécutive du parti socialiste à la suite du Congrès d'Epinay.
Militant syndical de longue date dans son entreprise, Gérard Gaud sera promu secrétaire général du syndicat Force ouvrière des ingénieurs et cadres. Cet engagement le conduira à la présidence de l'URSSAF et de l'ASSEDIC de son département.
En 1959, Gérard Gaud est entré au conseil municipal de Montélimar. Mais c'est à Bourg-lès-Valence qu'il déploie ses talents d'édile, à la tête de la mairie, qu'il conquiert en 1965, et qu'il abandonne volontairement en 1981, à la suite de son élection au Sénat ; il continuera toutefois de siéger au conseil municipal.
Proche de ses concitoyens, soucieux d'ouverture, le nouveau maire crée, dès 1965, des commissions extramunicipales, afin de faire participer le plus grand nombre à la décision.
Attaché au particularisme de sa ville, plus populaire et ouvrière que la proche Valence, il marque durablement la physionomie de Bourg-lès-Valence par ses réalisations urbaines. La ville connaît une croissance démographique spectaculaire. La municipalité s'emploie à favoriser les activités économiques, par la création de zones artisanales et industrielles où s'implantent de grandes entreprises.
Le maire de Bourg-lès-Valence est élu en 1973 au conseil général de la Drôme, dont il sera vice-président pendant dix ans. Il siège aussi au conseil de la région Rhône-Alpes de 1974 à 1981.
La force de cet enracinement ne pouvait que porter Gérard Gaud jusqu'à notre assemblée. Son élection au Sénat, le 28 septembre 1980, consacre la popularité d'un homme de contact et de terrain.
Il rejoint la commission des affaires étrangères, alors que son parcours professionnel et politique ne semblait pas, au départ, le prédisposer à l'étude des questions internationales.
Rapporteur pour avis du budget de la coopération, il souligne, à l'occasion du vote de la loi de finances ou des débats de politique étrangère, l'importance du soutien aux pays en voie de développement, de la coopération technique et des échanges culturels.
La commission le charge de présenter au vote du Sénat divers projets de loi portant ratification d'accords bilatéraux ou de conventions internationales. Son intérêt se porte tout particulièrement sur les questions d'ordre juridique, telles que l'accès international à la justice, la lutte contre les discriminations à l'égard des femmes ou la sauvegarde des droits de l'homme.
Au-delà de sa participation aux travaux de la commission des affaires étrangères, Gérard Gaud met son énergie au service des assemblées internationales dans lesquelles le Sénat est représenté. Particulièrement actif à l'Assemblée de l'Atlantique Nord, il fait partie de la commission permanente et préside la sous-commission des rapports économiques transatlantiques. Son goût de la négociation et son humour font de lui un excellent animateur de débats, apprécié de ses collègues français et étrangers.
Il faut souligner, enfin, avec quel enthousiasme Gérard Gaud préside le groupe sénatorial France-République tchèque. Très attaché à ce pays et à son peuple, il tisse des liens d'amitié fidèles grâce aux rencontres et aux manifestations culturelles dont il prend régulièrement l'initiative.
Au service du Sénat et du rayonnement extérieur de la France, Gérard Gaud sera un voyageur inlassable.
Homme de conviction et de dialogue, c'est sans esprit de doctrine qu'il défend les idées auxquelles il croit.
Chacun garde en mémoire la joie de vivre de cet humaniste, son égalité d'humeur, sa cordialité à l'égard de tous ses interlocuteurs, sans distinction. Chacun se souvient de son sens du partage et de l'amitié. Mais il savait aussi observer la nature et la beauté des choses. Loin du bruit et des foules, il se plaisait à peindre, avec talent.
Gérard Gaud rayonnait de la chaleur des gens du Sud, qu'il aimait tant et représentait si bien.
En ce dernier hommage rendu au nom de la Haute Assemblée, j'assure de notre profonde sympathie ses amis du groupe socialiste et ses collègues de la commission des affaires étrangères. A son épouse et à sa famille, j'exprime le témoignage de notre grande tristesse. Qu'elles soient assurées que nous garderons le souvenir de cet homme bon et généreux, de cet excellent collègue.
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, le Gouvernement s'associe à l'hommage que vous venez de rendre, au nom de la Haute Assemblée, à Gérard Gaud, qui nous a quittés le 3 septembre dernier. Il était l'exemple de ces réussites dues au seul mérite que la République se doit d'honorer.
Gérard Gaud était en effet issu d'un milieu modeste. Il n'a que onze ans lorsque meurt son père et qu'il devient pupille de la nation. Il doit travailler dès l'âge de quinze ans et entre à la Compagnie nationale du Rhône.
Travailleur acharné, animé d'un grand désir d'apprendre, il suit assidûment les cours du soir, mais ses efforts sont interrompus par la guerre.
Gérard Gaud est un patriote : il n'hésite pas à risquer sa vie pour notre pays. Il rend de grands services à la Résistance à partir de 1943 et devance l'appel sous les drapeaux le 20 août 1944.
Démobilisé en décembre 1945, il reprend son travail à la Compagnie nationale du Rhône. Ses qualités humaines, ses compétences techniques et sa force de travail lui assurent des promotions régulières et rapides. Il terminera ainsi sa carrière comme ingénieur des travaux publics.
Homme de contact, toujours soucieux du sort des autres, Gérard Gaud ne tarde pas à entrer en politique. Ses convictions le conduisent à militer à la SFIO.
Conseiller municipal à Montélimar en 1959, il est élu maire de Bourg-lès-Valence en 1965, puis conseiller général en 1973 et devient premier vice-président du conseil général.
Son humanisme et son ouverture d'esprit l'éloignent de tout sectarisme et font de lui un élu apprécié bien au-delà des clivages politiques.
Ses grandes qualités et son action à la tête de sa commune et au conseil général lui attirent l'estime de ses collègues élus locaux. C'est ainsi qu'il est élu sénateur en 1980 et réélu en 1989.
Membre de votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, il participe aux activités d'institutions internationales, comme l'assemblée de l'Atlantique Nord ou l'association interparlementaire de langue française.
Partisan d'un rapprochement avec les anciens pays de l'Est, il devient président de votre groupe d'amitié France - République tchèque.
Il enrichit ainsi son expérience, déjà grande, et acquiert par ses nombreux voyages à l'étranger une large vision des problèmes de notre temps.
Homme de coeur et homme d'action, Gérard Gaud a beaucoup travaillé pour notre pays. Il manquera à la Haute Assemblée.
Au nom du Gouvernement, j'adresse à sa famille, à ses collègues du groupe socialiste et à tous ceux qui l'ont aimé et apprécié mes sincères condoléances.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants en signe de deuil.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Jacques Valade.)