M. le président. Par amendement n° 21, Mme Dieulangard, M. Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, à la fin de la première phrase du premier alinéa du texte présenté pour l'article L. 439-16 du code du travail, de supprimer les mots : « pour autant que ce soit nécessaire à l'accomplissement de leurs tâches ».
La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Le membre de phrase dont nous demandons la suppresion introduit un risque de restriction quant à la faculté qu'a le comité d'entreprise de se faire assister d'experts. Ceux qui jouissent du droit d'en apprécier la nécessité ne sont pas mentionnés, et nous craignons qu'il ne s'agisse unilatéralement d'une appréciation patronale.
Pourquoi introduire cette disposition, qui n'existe pas dans notre droit, tant il a toujours paru évident que les comités d'entreprise ne réclament pas l'assistance d'un ou de plusieurs experts si c'est inutile ?
C'est là une marque de suspicion à l'encontre des salariés qui met en doute leur sérieux et leur sens des responsabilités, et cela nous paraît particulièrement regrettable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Le recours à un expert - c'est vrai, madame Dieulangard - est souvent source de conflits. Mais le membre de phrase que vous contestez me semble relever du simple bon sens. En le respectant, on devrait, précisément, éviter ces conflits.
C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement.
En effet, madame Dieulangard, cette suppression conduirait à penser que les experts peuvent sortir de leur mission. La rédaction du projet de loi, qui précise clairement la portée de l'intervention de l'expert, nous paraît devoir être maintenue.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 28 est présenté par Mme Dieulangard, M. Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 58 est déposé par M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent, dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, à remplacer les mots : « des frais » par les mots : « les frais ».
La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 28.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous devons, encore une fois, souligner l'imprécision et l'ambiguïté des formulations de ce projet de loi. Pourquoi « des frais » et non pas « les frais » ? Qui va décider quels frais sont pris en charge et quels frais ne le sont pas ? En fonction de quels critères ? Seule la note de l'expert le moins onéreux sera-t-elle prise en charge, et seulement de façon partielle ? Ne sera-ce pas plutôt celle de l'expert qui aura les conclusions les plus conformes à ce que la direction de l'entreprise attendait ?
Ne s'agit-il pas, plus simplement, de décourager par cette forme de chantage financier, que certains appelleront sans doute de la « responsabilisation », le recours à des experts qui pourraient délivrer des conclusions contrariantes ? Nous craignons que cette véritable pingrerie, qui s'exercera exclusivement au détriment des salariés et dans des périodes spécialement difficiles pour eux, ne soit dictée par des intentions désagréables et surtout pénalisantes à leur égard.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 58.
M. Guy Fischer. L'article L. 439-16 prévoit la possibilité de recourir à un ou plusieurs experts, si tant est que le comité d'entreprise européen et son bureau en éprouvent le besoin.
Nous estimons important de préciser que les frais afférents à l'intervention d'un ou de plusieurs experts sont pris en charge par l'entreprise ou l'entreprise dominante du groupe d'entreprises de dimension communautaire.
L'expérience montre que le recours à plusieurs experts et non exclusivement à un seul s'avère bénéfique pour l'entreprise. Compte tenu de cet état de fait, que nul ici ne saurait contester, il est indispensable de permettre au comité d'entreprise européen et à son bureau de disposer des moyens financiers nécessaires à la prise en charge de ces experts.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur des deux amendements ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Là encore, un accord est intervenu, qui vise à ne pas alourdir outre mesure les charges de l'entreprise. Il convient donc de s'en tenir au texte, qui n'impose pas une prise en charge totale des frais d'expertise.
Il s'agit d'un seuil minimal. Il est bien évident qu'au cours de la négociation on pourra aller plus loin. C'est le socle de la discussion.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n°s 28 et 58.
L'article en question doit s'entendre comme prévoyant la prise en charge des frais afférents à l'intervention d'un expert.
Au bénéfice de cette précision, que j'invite le Sénat à faire sienne, le Gouvernement considère que ces amendements sont inutiles.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 28 et 58, repoussés par la commission et par le Gouvernement.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis à nouveau saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 22 est présenté par Mme Dieulangard, M. Mélenchon, les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 59 est déposé par M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent, dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, à remplacer les mots : « d'un expert » par les mots : « de ces experts ».
La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 22.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement est en cohérence parfaite avec les deux amendements précédents que nous avons défendus. Il s'agit bien de remboursement des frais « de ces experts », et non pas « d'un expert ».
Par ailleurs, il faut inscrire « des frais » et non pas « les frais ». C'est donc un amendement de conséquence.
M. le président. La parole est à Mme Demessine, pour défendre l'amendement n° 59.
Mme Michelle Demessine. L'article 3 du présent projet de loi prévoit que le comité d'entreprise européen et son bureau peuvent être assistés, pour l'accomplissement de leurs tâches, d'experts de leur choix.
Etant donné la complexité croissante des sujets que doivent traiter les représentants des salariés, ce recours à des experts s'avère de plus en plus nécessaire.
En effet, ne l'oublions pas, ces représentants des salariés exercent leur fonction en plus de leur travail. Cela exige, vous le savez bien, un investissement extrêmement lourd.
Alors que le recours à plusieurs experts est indispensable dans les faits - vous le savez aussi puisque vous avez prévu cette possibilité - pourquoi, à ce moment-là, ne pas mettre à la charge de l'entreprise dominante du groupe uniquement les frais afférents à l'intervention d'un seul expert ? Il y a là une incohérence inexplicable !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 22 et 59 ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Le texte précise que l'entreprise prend en charge un seul expert. Il respecte l'équilibre qui a été accepté par les partenaires sociaux. Je ne vois pas comment on pourrait ne pas s'y tenir, sauf à démolir l'ensemble du texte !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements. En effet, le texte résulte vraiment de l'équillibre qui a été négocié entre les partenaires européens, tant patronoaux que syndicaux, évidemment !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 22 et 59, repoussés par la commission et par le Gouvernement.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 61, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après les mots : « de dimension communautaire, qui », de rédiger ainsi la fin de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail : « le dote des ressources financières, matérielles et humaines nécessaires à l'accomplissement de ses missions ».
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Cet amendement ouvre la possibilité au comité d'entreprise européen de se voir doter par l'entreprise des moyens humains nécessaires à l'accomplissement de ses missions.
Le texte proposé par le projet de loi pour le deuxième alinéa de l'article L. 439-12 concerne les dépenses de fonctionnement du comité d'entreprise européen. Il est spécifié qu'elles sont supportées par l'entreprise chargée de doter les membres du comité de moyens matériels et financiers nécessaires à l'accomplissement de leur mission.
Au titre de ces dépenses, le texte cite expressément les frais d'organisation des réunions et d'interprétation, ainsi que les frais de séjour et de déplacement.
Il nous semble utile d'ajouter à la liste des éléments nécessaires à l'accomplissement des missions du comité d'entreprise européen, à côté des moyens matériels et financiers, une référence aux moyens humains.
En effet, pour assurer ne serait-ce que le suivi quotidien des travaux du comité, que ce soit par exemple l'envoi des documents, des courriers, des comptes rendus des travaux du comité, il est nécessaire de prévoir des moyens en personnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées à propos de l'amendement n° 38, à savoir que les ressources financières permettent, le cas échéant, de rémunérer du personnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, les ressources financières permettant en effet de rémunérer des collaborateurs.
Le texte du projet de loi doit donc être maintenu dans sa rédaction actuelle.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 61, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 60, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après la première phrase du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, la phrase suivante :
« Ce budget ne saurait être inférieur à 0,1 % de la masse salariale. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. La mise en place des comités d'entreprise européens, outre qu'elle nécessitera sans doute le recrutement par les directions d'entreprise de quelques interprètes-traducteurs, pose bien évidemment la question fondamentale des moyens qui seront mis à la disposition des élus pour assumer leurs fonctions et pour accomplir les missions que la loi aura fixées à ces organismes.
La France a acquis, depuis un demi-siècle qu'existent les comités d'entreprise, une expérience irremplaçable en matière de développement des activités sociales et économiques des structures paritaires.
Le rôle économique des comités d'entreprise qui est, d'une certaine façon, le moins connu n'est, par exemple, pas à négliger puisque la mise en oeuvre des procédures d'alerte sur la définition même des stratégies de court et de moyen termes de développement ou de restructuration de l'entreprise passe par un examen critique effectué au sein de ces instances paritaires.
Dans un certain sens, on ne peut nier que l'expertise comptable de la situation de l'entreprise effectuée à la demande du comité d'entreprise lors de la présentation d'un plan de restructuration participe du nécessaire dialogue social et se traduise notamment par une plus large appréciation par l'ensemble des salariés des tenants et aboutissants de la situation.
Evidemment, l'activité des comités européens doit, dans les faits, permettre la pérennité de ces droits et faciliter par là même la pleine appréciation des évolutions économiques ou technologiques par les salariés. On sait la complexité de ce mécanisme.
Plus connue est l'activité à caractère socioculturel mise en oeuvre par les comités d'entreprise.
La subvention annuelle au comité d'entreprise dans les entreprises constitue dans les faits une utilisation particulière de la valeur ajoutée créée par le travail des salariés - sans lesquels le capital ne produirait pas grand-chose - qui permet de répondre à un certain nombre de besoins sociaux qui demeureraient non satisfaits.
Dans les faits, chacun sait que de nombreux salariés ne pourraient décemment accéder à la culture, aux loisirs, aux vacances sans l'intervention particulière des comités d'entreprise.
De la même façon, les enfants de salariés ne disposeraient sans doute pas de structures d'accueil adaptées pour leurs loisirs ou leurs vacances sans la mise en oeuvre des moyens matériels accordés par les comités aux centres de loisirs et aux colonies de vacances dont ils assurent la gestion.
Dans une certaine mesure, l'action sociale et culturelle des comités d'entreprise participe de la lutte contre l'exclusion sociale, ou la cohésion sociale, dirait-on aujourd'hui, encore que, pour conclure sur ce point, les salariés attachés au fonctionnement de ces structures n'aient pas attendu la naissance du concept pour agir.
Ainsi, le comité d'entreprise de la RATP a-t-il ouvert ses centres de vacances ces dernières années à des familles de sans-emploi, traduisant dans les faits la solidarité agissante des salariés auprès de ceux qui sont privés de travail.
Maintenir et développer cette action exige dans les faits que des moyens soient dégagés pour permettre un fonctionnement le plus satisfaisant possible des comités d'entreprise.
C'est le sens de cet amendement qui propose de fixer une norme minimale de subvention annuelle aux comités d'entreprise européens en la fixant au millième de la masse salariale du groupe.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Je voudrais rappeler à M. Fischer - il le sait - que nous ne sommes pas dans le cadre d'un comité d'entreprise.
Fixer un cadre financier trop rigide n'est sans doute pas tellement utile. Encore une fois, j'y insiste, il ne faut pas trop alourdir les contraintes si l'on veut que ce droit nouveau se développe sans heurt. C'est le raisonnement qui a été suivi par la commission des affaires sociales et qui a conduit cette dernière à donner un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Ai-je besoin d'ajouter, après M. le rapporteur, qu'aucune disposition de ce type pour le comité de groupe n'existe en droit français ? De plus, un montant uniforme pour toutes les entreprises n'est ni souhaitable ni possible.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 60, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 62, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, à la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, après les mots : « du comité d'entreprise européen », d'insérer les mots : « , de leurs suppléants ».
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous proposons, à travers l'amendement n° 62, que les frais prévus dans le deuxième alinéa de l'article L. 439-16 soient pris en charge par l'entreprise non seulement pour les membres du comité d'entreprise européen, mais également pour leurs suppléants.
Or le texte du projet de loi ne prévoit pas de suppléant. C'est pourquoi notre amendement n° 62 anticipe sur d'autres amendements déposés par notre groupe portant sur l'article L. 439-18 du code du travail, amendements qui seront examinés ultérieurement et qui prévoient que chaque membre du comité d'entreprise européen puisse bénéficier d'un suppléant.
Il nous semble utile, en effet, si l'on accepte l'idée de suppléants au comité d'entreprise européen, que ceux-ci bénéficient des moyens mis à la disposition des membres titulaires.
Nous nous inspirons en cela de ce qui existe déjà dans le comité d'entreprise français, à savoir que les suppléants peuvent participer, au côté des titulaires, aux réunions du comité d'entreprise.
Cette innovation permettrait, dans un domaine qui, compte tenu de sa dimension internationale, est particulièrement complexe, de créer les conditions d'une bonne intervention des membres du comité d'entreprise européen.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 62. En effet, la prise en charge ne concerne que les frais engagés par les participants ; la précision apportée par cet amendement n'est donc pas nécessaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. En effet, les organisations syndicales désignent des représentants des salariés au comité d'entreprise européen. La directive ne prévoyant pas l'institution de suppléants, il revient donc au règlement intérieur de prévoir les conditions de remplacement du représentant en cas d'empêchement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 62, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 63, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le troisième alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, après les mots : « membres du comité d'entreprise », d'insérer les mots : « et leurs suppléants, ».
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec l'amendement précédent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 64, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, de remplacer les mots : « cent vingt heures », par les mots : « deux cent quarante heures ».
II. - En conséquence, de rédiger comme suit la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail :
« Le temps passé par le secrétaire et les membres du comité n'est pas déduit de ces deux cent quarante heures. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Le fonctionnement du comité d'entreprise européen ne doit pas être entravé par l'insuffisance du temps laissé à ses membres par le chef d'entreprise.
Habituellement, dans notre pays, les membres salariés des comités d'entreprise disposent d'un crédit d'environ 240 heures.
Compte tenu de l'étendue du territoire européen, compte tenu de la complexité des dossiers à traiter dans un cadre supranational, il paraît justifié d'accorder aux représentants des salariés aux comités d'entreprise européens un temps propre destiné à leur permettre d'assurer pleinement leurs missions.
Un alignement sur la pratique française des 240 heures paraît constituer un temps nécessaire à l'exercice de la démocratie au sein de l'entreprise.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.
Un tel amendement est contraire à l'équilibre accepté.
De plus, il semble inutile parce que le rôle du comité d'entreprise européen n'est pas développé au point de justifier un tel crédit d'heure. Je suis d'ailleurs persuadé que si je lui avais donné une réponse favorable de la commission, M. Fischer aurait été vraiment surpris !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Il y a eu un accord des partenaires sociaux. Il faut tout de même leur faire un peu confiance ! Ce sont eux qui ont fixé ces horaires, lesquels sont, je crois, raisonnables.
Attention, le mieux est l'ennemi du bien ! Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 64.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le ministre, certes, « le mieux est l'ennemi du bien », mais, quand il s'agit de faire avancer les choses, il faut être audacieux et, surtout, ne pas confiner notre assemblée dans un rôle de chambre d'enregistrement. Cela nous paraît important et nous y reviendrons lors de notre explication de vote finale.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 64, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 65, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit le dernier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail :
« Les documents fournis aux membres du comité et à leurs suppléants, par le président du comité ou son représentant, seront en langue française. Il appartient à l'entreprise de prendre en charge les frais de traduction. »
Par amendement n° 66, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le dernier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail par la phrase suivante : « En outre, chaque membre du comité et leur suppléant ont droit à une version dans leur langue de ces documents. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. Je retire ces amendements, ainsi que l'amendement n° 68, qui viendra ultérieurement.
M. le président. Les amendements n°s 65 et 66 sont retirés.
Par amendement n° 67, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le dernier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, d'insérer un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« Un droit de visite aux établissements et entreprises couverts par l'accord est accordé aux membres du comité. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Avec cet amendement, nous posons un problème important pour les salariés. Le droit de visite de tous les établissements par les membres du comité d'entreprise européen, s'il n'est pas interdit, n'est pas expressément prévu.
Or, on peut aisément concevoir qu'un délégué français soit interpellé par des salariés d'un établissement situé à l'étranger, et ce d'autant plus si cet établissement n'a pas de représentant sur place.
La défense des salariés, par le biais de la concertation, de l'échange entre les salariés, ne peut pas se passer de l'instauration de ce droit de visite. Ce ne serait que justice ! En effet, chacun sait que les directions, aux frais de l'entreprise, ne se privent nullement de déplacements à l'étranger pour obtenir les informations qu'elles jugent nécessaires.
J'ajoute que ce droit de visite serait un élément déterminant pour les salariés afin de pallier une mise en concurrence trop souvent invoquée par les directions. Combien de fois n'a-t-on pas entendu dire : « Les coûts sont nettement inférieurs dans tel autre pays, alors, si vous n'augmentez pas la productivité, si vous n'acceptez pas de concessions, on transférera l'activité là-bas et, ici, on sera contraint de supprimer des emplois » ? L'affaire Hoover en a été une illustration flagrante.
Vous comprendrez donc, mes chers collègues, que nous insistions particulièrement sur cette instauration d'un droit de visite des membres à tout établissement concerné par l'accord.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement dépasse de loin - M. Fischer le sait - le cadre de la directive, qui règle précisément le fonctionnement du comité d'entreprise européen en l'absence d'accord.
L'article L. 439-16 du code du travail suppose qu'il n'y a pas eu d'accord. S'il y en a eu un, le comité d'entreprise européen est régi par l'article L. 439-9 du même code et par l'accord. Celui-ci peut prévoir, s'il en est ainsi décidé, un droit de visite. Rien ne l'interdit. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. Les représentants des salariés au comité d'entreprise européen n'ont pas vocation à se substituer aux représentants syndicaux désignés dans les entreprises ou aux délégués du personnel. Le droit de visite ne paraît donc pas justifié pour eux.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 67, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 68, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le dernier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« L'entreprise mettra à la disposition des membres du comité qui le souhaitent des moyens d'apprentissage des langues, en particulier du français. »
Cet amendement a été précédemment retiré.
Par amendement n° 69, M. Fischer, Mmes Demessine et Fraysse-Cazalis, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le dernier alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 439-16 du code du travail, un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« Les membres du comité, ainsi que leurs suppléants, disposeront du droit de participer à une formation de douze jours financée par l'entreprise. »
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine. L'article 3 traite de la question déterminante de la mise en place des comités de groupe européens.
Cette situation appelle d'ailleurs de notre point de vue un certain nombre d'observations qui tiennent, en particulier, aux évolutions mêmes de la situation économique.
La première question posée est celle de l'externalisation de l'activité de nos principaux groupes industriels, marquée notamment par une politique de conquête de marchés associée à la recherche permanente de gains de productivité, caractérisée notamment par la délocalisation intracommunautaire des structures de production.
C'est un euphémisme que de dire que les différents pays de l'Union européenne connaissent des situations sociales et économiques fort différentes.
Certains de ces pays, dont on sait pertinemment qu'ils seront dans l'incapacité de satisfaire aux fameux critères de convergence fixés par les penseurs ultralibéraux du traité de Maastricht, connaissent en particulier chômage endémique, déflation salariale et dévaluation compétitive.
Dans ce contexte, les politiques économiques qu'ils suivent sont marquées par une série de dispositions comme la réexportation de telle ou telle partie de la production réalisée dans le cadre des implantations étrangères accueillies sur leur territoire.
Ainsi en est-il des unités du groupe Danone ou des usines FASA-Renault implantées en Espagne qui, outre qu'elles procurent des emplois industriels aux travailleurs madrilènes ou catalans, procèdent à la réimportation sur le territoire français d'une partie de la production réalisée.
Cela est d'ailleurs d'autant plus significatif que les débouchés intérieurs de leurs productions demeurent obérés par les inégalités de pouvoir d'achat existantes.
Pour pousser un peu plus loin l'analyse, nous pourrions rappeler aussi à bon escient le traumatisme créé par l'affaire Hoover, cette société américaine qui, en fermant son unité de production de la banlieue dijonnaise et en choisissant une implantation en Ecosse, où jouent à plein la dévaluation compétitive de la pauvre livre sterling et la faiblesse des garanties sociales et salariales accordées aux travailleurs écossais, avait montré dans toute l'étendue de son cynisme ce que peut être une logique de groupe à l'échelle européenne.
Plus près de nous, puisqu'il s'agit d'une entreprise à base française, comment ne pas s'interroger sur la stratégie du groupe Danone, dont le président ne manque jamais pourtant une occasion de s'exprimer en faveur de « l'entreprise citoyenne », qui s'apprête, alors même que tous les éléments de la rentabilité sont réunis - valeur ajoutée en croissance régulière du fait notamment de la poussée des produits alimentaires de troisième et quatrième gammes - à fermer ses usines de Strasbourg et de Seclin et à liquider un peu plus de 300 emplois, ce qui ne manquera pas, dans ma région, le Nord - Pas-de-Calais, déjà lourdement frappée par le chômage, de créer de nouvelles difficultés.
Le fait est que la stratégie européenne de nos principaux groupes industriels et commerciaux, comme d'ailleurs celle des sociétés à base allemande ou autres implantées dans notre pays, impose de donner aux salariés des droits particuliers, lesquels seraient appréhendés comme une avancée en matière de législation sociale européenne.
On ne peut en effet que constater aujourd'hui que la fameuse Europe sociale n'est qu'un voeu pieux et qu'il conviendrait de sortir de cette situation.
Qui plus est, sauf erreur, les normes comptables qui ne sont pas sans influence sur l'interprétation et l'appréciation de la situation des groupes transnationaux ne sont pas tout à fait identiques d'un pays à l'autre de l'Union.
Tel est le sens de cet amendement que nous vous invitons à adopter, mes chers collègues, puisqu'il crée un congé de formation des salariés membres des comités de groupe européens et répond, par conséquent, aux exigences nouvelles de la situation créée par le projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. Cet amendement introduit trop de contraintes dans un dispositif novateur. Cela dit, le code du travail, et plus particulièrement les articles L. 451-1 et suivants, prévoit une formation des représentants des salariés. Il pourra donc évidemment s'appliquer aux délégués français.
Telle est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Les dispositions du projet de loi reprennent les prescriptions subsidiaires de la directive qui ont fait l'objet d'une négociation et il ne nous paraît pas souhaitable de revenir sur l'équilibre de ce texte. Il convient d'ajouter que les partenaires sociaux peuvent toujours prévoir, par accord, des dispositions plus favorables, notamment en matière de formation destinée aux salariés de l'entreprise qui appartiennent au comité européen.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 69, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 439-16 du code du travail.
(Ce texte est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous poursuivrons ce débat à la reprise de nos travaux.
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