2. Les critiques adressées au régime des dépenses
Le débat sur les montants prévus par les perspectives financières pour les différentes rubriques ne saurait être dissocié du débat sur le régime des dépenses ainsi programmées. Les règles d'utilisation de ces dépenses relèvent dans une large mesure de l' " accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire " . L'accord en vigueur, adopté le 29 octobre 1993, doit être prochainement renouvelé, sur la base de la proposition E 1128. Les principaux points de discussion du futur accord interinstitutionnel ont trait, d'une part, au statut des dépenses structurelles et, d'autre part, à la flexibilité, c'est-à-dire à la possibilité de transférer des dépenses d'une rubrique sur une autre ou d'une année sur l'autre.
a) Le débat sur le statut des dépenses structurelles
Selon
l'accord interinstitutionnel en vigueur, les perspectives financières
fixent en principe des plafonds de dépenses. Une exception a cependant
été prévue pour les dépenses des actions
structurelles, pour lesquelles la programmation des perspectives
financières est non pas un plafond, mais un objectif de
dépenses :
- d'une part, les crédits fixés par les perspectives
financières sont systématiquement inscrits au budget dans leur
intégralité :
" à l'intérieur des taux
maximaux d'augmentation des dépenses non obligatoires (...), le
Parlement européen et le Conseil s'engagent à respecter les
dotations en crédits d'engagements prévues dans les perspectives
financières pour les fonds structurels et le fonds de
cohésion "
(§ 21) ;
- d'autre part, les crédits non utilisés au cours d'un exercice
sont reportés sur les exercices suivants :
" sur proposition de
la Commission, les deux branches de l'autorité budgétaire
s'engagent à autoriser le transfert sur des exercices ultérieurs
(...) des dotations non utilisées "
correspondant aux actions
structurelles (§ 10).
Ce statut privilégié des dépenses structurelles est au
coeur d'un débat entre les Etats qui en sont les principaux
destinataires en proportion de leur PNB (Espagne, Portugal, Grèce),
partisans de l'objectif de dépenses, et les Etats contributeurs (dont
l'Allemagne), favorables au plafond et qui préconisent une plus stricte
orthodoxie budgétaire. De fait, force est de constater que :
- d'une part, comme l'a souligné le rapport de M. Yann
Gaillard,
" au cours des dernières années, il a
été observé une sous-utilisation des crédits
disponibles par les Etats membres. Jusqu'à présent, une
sous-consommation se traduisait par un report automatique des fonds non
utilisés pendant l'année sur l'exercice suivant "
. C'est
ainsi que, pour " solder " les actuelles perspectives
financières adoptées à Edimbourg, la Commission a
été conduite à inscrire dans l'avant-projet de budget pour
1999 une augmentation de 17 % par rapport à 1998 des crédits
des fonds structurels et du fonds de cohésion alors même que,
parallèlement, la plupart des Etats membres devaient réduire leur
déficit budgétaire dans la perspective de leur entrée dans
la troisième phase de l'Union économique et monétaire.
Cette situation, nous l'avons vu, ne peut que nuire à la
crédibilité de l'Union européenne. A cet égard, il
convient de souligner que, en France, les autorisations de programme des
budgets communaux ou régionaux peuvent, lorsqu'elles n'ont pas
donné lieu à crédits de paiement, être
annulées, ce qui paraît la moindre des choses. On ne voit
guère de raisons justifiant que l'Union européenne s'affranchisse
de cette règle de bon sens selon laquelle il n'y a pas lieu de
budgétiser des crédits dont on sait pertinemment qu'ils ne seront
point exécutés ;
- d'autre part, la discussion sur le statut des dépenses
structurelles ne peut être dissociée de la discussion sur leur
montant prévu par les perspectives financières. Ainsi,
dans un
contexte d'appel à une maîtrise des finances publiques
par la
Commission,
il paraît évident qu'une substantielle augmentation
des dépenses pour les actions structurelles ne peut aller de pair avec
le maintien de leur statut privilégié
.