B. EXIGENCE RÉGLEMENTAIRE EUROPÉENNE EN MATIÈRE DE SOLVABILITÉ98( * )
La solvabilité, essentielle à toute entreprise, est particulièrement cruciale dans l'industrie de couverture des risques des autres agents économiques qu'est l'assurance. C'est pourquoi elle est réglementée et surveillée à plusieurs niveaux :
-
- il existe d'abord une exigence de fonds de garantie minimum, exprimé
en valeur absolue et indépendamment du niveau d'activité de la
société d'assurance ;
- puis une exigence plus élevée de fonds de garantie, définie comme le tiers de la marge de solvabilité ;
- ensuite une exigence de marge de solvabilité minimale ;
- ensuite encore, en vitesse de croisière, les règles de provisions techniques, qui doivent être suffisantes pour le respect intégral des engagements pris envers les assurés et dont le calcul a été largement harmonisé par les directives " assurance ", dont le contenu et le niveau restent jusqu'à présent très largement nationaux ;
- enfin, la couverture des provisions techniques doit être assurée par des actifs adéquats sûrs, liquides et rentables.
Depuis les premières directives de coordination (73/239/CEE pour l'assurance non-vie, 79/267/CEE pour l'assurance-vie), un fonds de garantie minimum, qui est un montant en valeur absolue, a été fixé comme plancher de l'exigence de solvabilité, sans changement ni relèvement pour suivre l'inflation depuis 1973 et 1979 respectivement.
a) Fonds de garantie minimum en assurance non-vie
Les compagnies et les mutuelles d'assurance ayant été classées par l'assurance non-vie en quatre catégories de risque, il existe quatre niveaux de fonds de garantie minimum (Fgm).
|
Niveau
du FGM
|
Catégorie 1 |
1,4 |
Catégorie 2 |
0,4 |
Catégorie 3 |
0,3 |
Catégorie 4 |
0,2 |
Le
montant de fonds propres minimum exigé en matière d'assurance-vie
est de 800 000 Ecus.
Compte-tenu de l'invariance de ces niveaux de solvabilité minimum
exigée depuis l'origine, une réflexion a été
entreprise à l'initiative de la Commission européenne au niveau
de la conférence des services de contrôle des assurances des Etats
membres de l'Union européenne dans le cadre d'un groupe de travail sur
la solvabilité dans l'assurance, présidé par le
Dr. Helmut Müller, alors vice-président de l'Office
fédéral allemand de contrôle des assurances et devenu
président depuis. Le groupe a publié un rapport en
avril 1997, dit rapport Müller. Ce rapport, qui a ouvert une
large réflexion sur les risques dans l'assurance, recommande notamment
une évolution des niveaux de fonds de garantie minimum, visant à
les relever d'un niveau au moins égal à l'inflation intervenue
entre-temps. Par ailleurs le groupe Müller propose de procéder
à une refonte simplificatrice des catégories de risque, en
fusionnant la plupart des risques de la catégorie 2 avec ceux de la
catégorie 1, et en classant divers dommages entrant dans la
catégorie 4 (grêle, gel ...) au même niveau que les
sinistres causés par les incendies et les catastrophes naturelles.
La nouvelle grille de FGM de l'assurance non-vie pourrait alors
devenir :
|
(en M Ecus) |
Catégorie 1 |
3 |
Catégorie 2 |
2 |
Catégorie 3 |
1,5 ou 1 |
Le
groupe n'est pas parvenu à un accord sur la question de savoir si
l'option donnée aux Etats membres jusqu'à présent
d'autoriser les assurances mutuelles à diminuer de 25 % le fonds de
garantie minimum devait ou non être abrogée. Une majorité
des membres du groupe de travail a jugé opportun que des
dérogations soient à la rigueur accordées aux entreprises
déjà créées.
On ne peut que constater ici qu'une exigence de fonds de garantie minimum de
près de 20 MF, ou au minimum de 10 MF, est prohibitive pour la
survie d'un certain nombre de mutuelles en particulier les plus petites, qui ne
sont pas nécessairement les plus mal gérées. Ceci pose en
même temps la question plus générale de savoir si
l'inspiration réputée libérale de la réglementation
prudentielle européenne n'est pas de nature à exercer un effet
protectionniste en empêchant le maintien ou l'entrée sur le
marché d'un certain nombre d'acteurs qui remplissent bien leur fonction
(les problèmes de la mutualité sont étudiés plus
loin) mais ne peuvent satisfaire à des conditions de solvabilité
exorbitantes par rapport à leur niveau d'activité et de risques
par conséquent. Par ailleurs, il semble à certains étrange
que l'on puisse par le biais d'une directive européenne porter atteinte
à la densité du tissu économique national.
L'idée de distinguer entre petites et grandes sociétés
d'assurance a également été émise pour les
nouvelles sociétés, la distinction se ferait à partir d'un
critère du montant de primes brutes. La suggestion de respecter un
rapport de 1 à 5 entre primes et fonds de garantie a été
faite, avec toutefois des minima absolus imposés.