4. L'évolution de la politique militaire russe en Asie centrale
L'avancée russe, dès la fin du XIXème
siècle en Asie centrale, trouve son fondement stratégique dans
une
doctrine militaire qui a de tout temps confondu défense et
offensive conquérante
. La configuration du terrain, et
particulièrement celle des steppes kazakhes, a conduit les responsables
russes à s'interroger sur les limites de l'espace stratégique et
des intérêts de la Russie en direction du Sud. L'Union
soviétique a consacré cette doctrine militaire sous le nom
" d'expansionnisme défensif ".
L'empire soviétique, au XXème siècle, notamment
après la seconde guerre mondiale, s'est arrêté à la
théorie de " l'espace stratégique unique ".
La création de la Communauté des Etats indépendants en
1991 a substitué au principe de " Forces armées
uniques " celui de " Forces armées unifiées de la
CEI ", avec l'espoir de créer au sein de cette communauté
une nouvelle alliance du type " Pacte de Varsovie ".
Aujourd'hui, la doctrine militaire de la Fédération de Russie
n'envisage plus la défense de la CEI considérée comme un
tout, mais préconise une coopération militaire entre les Etats de
la CEI et la possibilité de faire stationner des forces russes
sur
le territoire de ces Etats. Ceci marque le renoncement à une
organisation militaire centralisée.
Les formes prises par la coopération militaire entre la Russie et
l'Asie centrale sont multiples
: de la garde des frontières de la
CEI au maintien de bases militaires, de l'aide à l'édification
des armées nationales au soutien logistique des forces et d'aide
à la formation et à l'instruction des personnels.
Cette présence paraît aujourd'hui hors de proportion avec les
menaces extérieures, qui pèsent sur les Etats de la CEI. D'autant
plus que la Russie n'était pas toujours étrangère aux
crises locales, qui justifiaient le maintien de ses forces (Caucase,
Tadjikistan...).
Le recul stratégique spectaculaire auquel la Russie a été
contrainte ne signifie pas qu'elle ait renoncé à ses objectifs
militaires multi-séculaires. Si elle ne peut plus définir seule
les règles de la sécurité collective dans la zone, elle
n'en conserve pas moins une vision de l'Asie centrale, qui tend à
ignorer l'évolution récente de la région : affirmation des
nationalismes, rôle grandissant des multinationales
étrangères dans l'exploitation du pétrole et du gaz,
coopération économique avec l'Occident, présence des
Etats-Unis.