IV. LES OPPORTUNITÉS POUR L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
Comme cela a déjà été
souligné dans cet ouvrage, les nouvelles techniques d'information et de
communication offrent à l'aménagement du territoire des
opportunités
certaines dont l'exploitation suppose cependant un
effort
particulier des collectivités concernées, avec
l'aide de l'Etat.
Les opportunités des NTIC, du point de vue de l'aménagement du
territoire, résultent des interactions vertueuses qu'elles permettent
d'établir entre maintien ou localisation, dans des zones
défavorisées, de
populations
et d'
activités
vitales.
Téléservices et télétravail se confortent
mutuellement.
-
n Les téléservices (enseignement, santé, culture,
adminis-tration...) améliorent la mobilité géographique
des personnes actives et incitent au maintien sur place ou à
l'installation de retraités (fraction croissante de la population de
l'ensemble du pays et clientèle importante des commerces ou des autres
services locaux).
n le télétravail qui, de son côté, peut entraîner l'installation, dans les mêmes régions en difficulté, d'activités spécifiques [travail d'arrière guichet (back office), télémaintenance, traitement à distance d'informations...], s'en trouve favorisé dans la mesure où il garantit aux personnes concernées et à leurs enfants l'accès à distance à des prestations de qualité notamment dans les domaines des soins et de l'éducation.
n Si les téléservices encouragent ainsi le télétravail, la réciproque existe : le télétravail consiste en grande partie en téléservices.
-
n réduction des surfaces de bureaux donc des coûts immobiliers,
le télétravail à temps partiel à domicile ou
pendant les déplacements, entraînant l'utilisation collective et
partagée, et non plus individuelle, des espaces correspondants (68(
*
)).
n gains de productivité du fait d'économies sur les temps de transports et du raccourcissement des délais nécessaires à l'accomplissement de certaines tâches (transmission de rapports de missions, établissements de contrats de ventes chez les particuliers...).
n décentralisation, pour mieux satisfaire la clientèle, de certaines activités (maintenance, services de proximité...) ou de tâches d'arrière guichet ("back office" par opposition à "front office") pour revitaliser des zones dépeuplées ou défavorisées.
Mais ce n'est pas seulement à travers le développement du télétravail indépendant ou salarié que l'aménagement du territoire se trouve encouragé par les NTIC, mais aussi grâce aux possibilités qu'offrent ces dernières de s'affranchir de certaines contraintes géographiques (proximité de la clientèle, des donneurs d'ordre ou des sous-traitants, des partenaires...) dans l'implantation d'industries ou de services.
Ceci est particulièrement vrai des productions immatérielles (logiciels, télégestion...).
Rien n'est cependant acquis et le développement des NTIC n'entraînera pas ipso facto la localisation ou le maintien d'activités dans les zones en difficulté.
Les technologies de l'information, en effet :
-
n accroissent la concurrence de ce point de vue entre municipalités,
pays, régions, Etats en même temps qu'elles leur donnent à
tous de nouvelles chances.
n ne suppriment pas le besoin chez l'homme de contacts enrichissants et diversifiés, qui ne soient pas seulement virtuels, tels qu'il s'en établit dans des grandes métropoles ou des communautés comme la Silicon Valley.
n peuvent aboutir à accentuer la centralisation de certaines activités tertiaires (en ce qui concerne, par exemple, les réservations de billets d'avions ou les succursales de banques américaines en Europe, tentées de n'ouvrir qu'une seule agence à Londres, du fait du marché unique, plutôt qu'une dans chaque capitale européenne...).
Elle doit tendre à :
-
n accorder aux investissements relatifs aux NTIC (enseignement et
infrastructures) la même considération qu'aux transports
terrestres (pour lesquels environ 100 milliards de francs sont
dépensés chaque année), sans négliger pour autant
ces derniers.
n encourager la mobilité professionnelle par le développement de téléservices également accessibles sur tout le territoire (soins et enseignement de qualité, services administratifs...).
n favoriser le télétravail, notamment dans les services publics (éducation, enseignement supérieur, recherche...) et en dotant les télétravailleurs indépendants d'un statut juridique et fiscal approprié.
n partir des atouts réels des territoires concernés (leur potentiel économique, environnemental, culturel...) sans succomber, au niveau national, au saupoudrage des moyens et à la dispersion de nos forces, ni privilégier, au niveau local, les créations d'activités nouvelles au détriment du renforcement des tissus régionaux existants, dans leurs composantes encore viables.
n laisser émerger les initiatives locales (qu'elles viennent des entreprises, des collectivités ou du système d'éducation et de formation professionnelle...), les fédérer et les appuyer.
n recourir à des expérimentations concrètes qui sont autant de moyens de sensibilisation des usagers.
n rationaliser les dispositifs de transferts de technologies vers les PME-PMI régionales ou locales.
Il ne faut donc pas tout miser sur elles et jouer aussi sur d'autres facteurs : la qualité de la vie et des hommes, l'environnement culturel.
En même temps que s'étendent les réseaux se renforce le besoin d'identification des hommes à un territoire et c'est tant mieux. Cela peut créer une forte motivation des acteurs concernés afin d'exploiter au mieux, grâce aux NTIC, les atouts de leurs régions.
Dans un monde de plus en plus exposé à la concurrence internationale, l'aménagement du territoire doit se servir des nouvelles techniques d'information de deux manières :
- en les utilisant, de façon diffuse, sur tout le territoire,
- en regroupant leurs moyens de conception et de développement dans des pôles compétitifs, nécessairement peu nombreux à l'échelon national (sortes de Silicon Valley à la Française) où peuvent s'effectuer les mêmes fertilisations croisées et se créer des synergies bénéfiques à l'ensemble du territoire.