2. Un retour progressif mais fragile à l'ordre public
Le trait dominant des émeutes de février et mars
1997 a sans doute été
l'effondrement de l'armée et de
la police
, qui sont restées passives devant le développement
des violences quant elles n'ont pas purement et simplement vu leurs effectifs
disparaître dans la nature.
Les destructions infligées aux casernes et aux matériels ont
été considérables, mais c'est surtout le
pillage des
dépôts d'armements
disséminés dans toute
l'Albanie qui entraîne les conséquences les plus graves. Le
ministre de la défense albanais a évoqué la disparition de
plusieurs dizaines de milliards de cartouches, d'un million d'armes
légères, de dizaines de milliers d'armes lourdes, de plusieurs
milliers de mines, d'obus et de tonnes d'explosifs.
Seule une part infime de ces armements a pu être
récupérée, notamment 70 000 fusils-mitrailleurs, soit
environ 7% de la quantité disparue. Pour une part, les armes
volées ont été vendues hors d'Albanie, avec les risques
que cela implique au Kosovo et en Macédoine. Une quantité
importante est conservée par la population, en particulier dans un souci
d'autodéfense. Enfin, une large part reste aux mains de groupes
criminels.
Le bilan humain des événements de l'hiver 1997 est
extrêmement lourd. De février à novembre, on compterait
plus de 2 000 tués et de 10 000 blessés
par
armes à feu dans l'ensemble de l'Albanie. Comme l'ont confirmé
à vos rapporteurs le Premier ministre et le ministre de
l'intérieur, le gouvernement considère avoir
démantelé les plus importantes bandes criminelles, qui
étaient parvenues à faire régner leur loi face à un
Etat impuissant dans certaines régions du pays. Pourtant,
le
banditisme et la criminalité demeurent une réalité
quotidienne
, y compris à Tirana. Chaque journée apporte son
lot de blessés ou de tués par armes à feu, à la
suite de règlements de compte ou d'attaques à main armée,
que ce soit dans le centre des villes, où les banques et les entreprises
sont particulièrement visées, ou le long des routes, où
l'on rançonne les conducteurs.
Le relatif retour au calme depuis le mois de septembre ne permet en rien
d'écarter le risque de nouveaux incidents graves, compte tenu du nombre
d'armes en circulation et du temps nécessaire à la
réorganisation des forces de l'ordre. De plus, les organisations
criminelles et mafieuses restent puissantes et pourvues de moyens d'action
importants.
La
reconstruction de l'armée et de la police
est donc une des
toutes premières priorités du gouvernement albanais.
Sur le plan militaire, l'Albanie a conclu des accords de coopération
avec la Turquie, la Grèce et l'Italie. Sur la base de ces accords, et
à la suite du retrait de la force multinationale ALBA, les grecs ont
maintenu un petit contingent dans le sud-ouest du pays et les italiens en ont
fait de même à Tirana et à Durrës. Par ailleurs,
l'Albanie attend beaucoup du Partenariat pour la paix de l'OTAN, auquel elle
participe depuis février 1994 et qui a été redéfini
pour faire face aux besoins les plus urgents. Pour le moment, plusieurs
missions d'experts de l'OTAN se succèdent à Tirana en vue
d'évaluer les actions à mener.
L'UEO pour sa part s'est vue confier la restructuration et la formation des
forces de police. Un
Elément multinational de conseil en
matière de police
a été mis en place à Tirana
et placé sous le commandement d'un colonel de gendarmerie
français. Ses effectifs se limitaient au mois de novembre à 24
hommes, dont 5 gendarmes français, mais il était envisagé
de les renforcer.