2°/ L'ASSAINISSEMENT DU COMPLEXE DE MARCOULE

Véritable berceau du nucléaire français, le complexe de Marcoule regroupe des installations du CEA, de la COGEMA, de Melox, Phénix et même d'activités diverses comme les équipements pour les analyses médicales.

Ce centre n'est pas uniquement tourné vers des applications militaires mais on y trouvait, entre autres, les réacteurs G1, G2, G3, principalement destinés à la production de plutonium, les deux réacteurs Célestin essentiellement orientés vers la production de tritium, et l'usine UP1 qui assurait le retraitement du combustible de G1, G2 et G3 en récupérant le plutonium de qualité militaire.

Le site de Marcoule est entré dans une phase de restructuration profonde du fait de l'arrêt de la plus grande partie des activités purement militaires.

De nombreuses installations civiles subsistent (atelier de vitrification des déchets, four électrique pour fondre les déchets métalliques, station de traitement des effluents, incinérateur de déchets TFA...), des laboratoires expérimentaux se développent (Atalante pour les expériences sur les déchets, unité de recherche sur les réactifs médicaux...), l'usine Melox destinée à la fabrication du MOX est entrée en service ; mais il n'en demeure pas moins que les mutations que connaît le bassin d'emplois de Marcoule préoccupent à juste titre les travailleurs de la région, qui doutent que la garantie de l'emploi puisse être assurée à long terme.

Ayant eu l'occasion de rencontrer, au sujet de l'implantation éventuelle d'un laboratoire souterrain de l'ANDRA, les organisations syndicales et les élus concernés, j'ai à plusieurs reprises insisté auprès des autorités compétentes pour que les restructurations en cours, tout à fait nécessaires, ne conduisent pas à une perte de capacité mais à une réorientation programmée et déterminée vers d'autres activités en fonction des nouvelles donnes de l'industrie nucléaire française.

Sur le plan des activités militaires du centre de Marcoule, la situation est actuellement la suivante :

- le réacteur G1 a été mis à l'arrêt en 1968 ;

- le réacteur G2 a été fermé définitivement en 1980 et le réacteur G3 en 1984 ;

- l'usine UP1 doit cesser son activité de retraitement à la fin de 1997 ;

- seuls resteront en service les réacteurs Célestin I et II qui assurent la production de tritium pour la DAM, aucune décision n'ayant été prise à ce jour sur leur avenir.

A/ La mise en place du groupement d'intérêt économique CODEM

Compte tenu de l'importance des opérations de démantèlement qui sont entreprises mais aussi compte tenu de l'imbrication des intérêts entre les trois partenaires concernés, CEA-DAM, COGEMA et EDF, le 24 mai 1996 a été constitué un GIE dénommé CODEM (COnditionnement des déchets et DEMantèlement de Marcoule). Dans ce GIE, le CEA représente 45 parts, EDF également 45 parts et la COGEMA 10 parts.

Grâce à cette structure, il y aura donc un pôle unique de décision, de contrôle et de financement qui s'exprimera, en principe d'une seule voix, face aux opérateurs chargés des travaux de démantèlement et d'assainissement. Il faut toutefois noter que l'opérateur principal est la COGEMA, qui se trouve donc être représenté également dans l'instance de décision.

La création de cette structure "ad hoc" était aussi justifiée par l'ampleur de l'opération et par son coût. On estime en effet à 37 milliards de francs, répartis sur une quarantaine d'années, le budget total de ce programme.

Pour 1997, le budget du CODEM a été de 360 millions de francs, ce qui, pour ses responsables, marque "l'engagement irréversible des trois partenaires dans ce projet" .

Comme le faisait remarquer les organisations syndicales de Marcoule, il ne reste plus désormais qu'à trouver la trentaine de milliards restants !

Pour le moment, ces crédits servent essentiellement à financer des études mais le début des opérations proprement dites devrait pouvoir avoir lieu, comme prévu, au début de 1998.

Comme on pouvait s'y attendre, la répartition des dépenses entre les trois parties concernées a donné lieu à d'âpres discussions.

EDF avait provisionné en prévision de l'arrêt des réacteurs G1, G2 et G3 qui lui fournissaient du courant. En effet, ces trois réacteurs essentiellement destinés à la production de plutonium de qualité militaire, exploités par la COGEMA, étaient aussi des réacteurs électrogènes d'une puissance non négligeable (250 Mégawatts).

Si EDF, entreprise fonctionnant sous des règles comptables commerciales, avait dès l'origine prévu le coût de l'arrêt de ces réacteurs, il n'en va pas de même pour le ministère de la Défense qui devrait assurer la moitié de la dépense. L'annualité des crédits budgétaires se prête mal, en effet, au financement d'opérations lourdes et longues de type industriel, qui nécessiteraient la constitution de provision ou au moins d'un échéancier pluriannuel précis et définitif.

En tout état de cause, le ministère de la Défense, qui était le principal bénéficiaire de l'activité de ces installations, doit payer, mais l'évolution actuelle des crédits de ce département et en particulier de ses crédits "nucléaires" qui ont diminué, en francs constants, de près de la moitié en cinq ans, risque de poser quelques problèmes.

Devant le coût, que certains qualifient de pharaonique, il est permis de se demander jusqu'à quel niveau il serait raisonnable de conduire les opérations de démantèlement.

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