B. LES INCERTITUDES DE LA MESURE DE LA DURÉE DU TRAVAIL
La mesure de la durée du travail est traditionnellement
délicate en raison notamment :
- des
variations conjoncturelles
de la durée du travail, sous les
effets du climat, de l'activité économique et du
calendrier
39(
*
)
;
- des difficultés de mesure des
heures supplémentaires
effectives, notamment pour les cadres et les salariés à temps
partiel. Celles-ci varient, en effet, du simple au double selon qu'est retenu
le point de vue des employeurs ou celui des salariés ;
- des difficultés de mesure du temps de travail des
indépendants
et de certaines professions, comme les enseignants
ou les professions pour lesquelles le code du travail a institué des
régimes d'équivalence en matière de durée du
travail pour tenir compte de périodes d'inactivité
(hôtellerie, transport routier, agriculture), si bien que le temps de
présence légal y est très nettement supérieur
à 39 heures.
· Par ailleurs, alors qu'on assistait jusqu'au début des
années 1980 à un double mouvement de
convergence
et
d'
uniformisation
de la durée hebdomadaire du travail autour de la
durée légale (ramenée de 40 heures à 39 heures
par semaine en 1982), cette évolution s'est inversée sous les
effets des
aspirations différenciées des salariés
,
comme du développement de nouvelles formes d'
organisation des
entreprises
. Plusieurs phénomènes concourent ainsi à
rendre la mesure de la durée du travail de plus en plus difficile :
- L'
individualisation
croissante des temps de travail, sous la forme
notamment du développement du travail à temps partiel, comme de
l'extension des horaires mobiles (23 % des salariés en 1995, contre
11 % en 1978) .
- Le développement progressif de la modulation et de l'annualisation du
temps de travail, qui se traduit par une irrégularité croissante
de la journée et de la semaine de travail.
- La
sensibilité
croissante de la durée du travail
effective à la conjoncture économique, via les heures
supplémentaires et un recours plus important au chômage
partiel
40(
*
)
.
- Le creusement des
disparités
de temps de travail entre les
différentes catégories de travailleurs. Entre 1985 et 1995 le
temps de travail habituel des cadres et des agents de maîtrise s'est
ainsi accru, tandis que celui des autres catégories professionnelles
tendait à se réduire, ce phénomène reflétant
l'inégale diffusion du temps partiel.
Au total, la part des actifs déclarant travailler plus de 45 heures
par semaine serait ainsi passée de 15,4 % en 1983 à
22,6 % en 1995, selon l'INSEE, cependant que la part des salariés
à temps partiel (moins de 32 heures hebdomadaires) dans l'emploi
total serait passée de 9,6 % en 1983 à 16 % en 1996. La
relative stabilité des durées du travail mesurées par
l'INSEE et la DARES
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*
)
dissimule donc des situations individuelles de plus en plus
hétérogènes, ce qui tend à altérer la
fiabilité et la signification des indicateurs de la durée moyenne
du travail.