La cinquième session de l'assemblée parlementaire de L'OSCE
Jacques Genton
Délégation du Sénat pour l'Union européenne - Rapport 75 - 1996 / 1997
Table des matières
- INTRODUCTION
- COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE
- ANNEXES
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Réunissant les délégués des Parlements de
55 Etats d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Asie centrale,
l'Assemblée parlementaire de l'OSCE est parvenue, en peu
d'années, à un fonctionnement convenable : dans l'intervalle
des sessions, les réunions du Bureau et de la Commission permanente,
ainsi que les activités du Président, assurent un minimum de
continuité des travaux ; les sessions sont elles-mêmes mieux
préparées, les documents étant disponibles plus
tôt ; le pluralisme linguistique est approximativement
respecté.
Le rôle international de l'Assemblée de l'OSCE a tendance à
se développer. La mission parlementaire envoyée en Turquie en
1995 a joué un rôle utile. Dans l'année séparant la
session d'Ottawa (juillet 1995) de la session de Stockholm (juillet 1996),
l'Assemblée a envoyé des observateurs à dix
élections parlementaires ainsi qu'aux élections
présidentielles en Russie. Les déplacements du Président
Franck SWAELEN dans les Pays Baltes et en Asie centrale ont été
bien perçus.
Cependant, des progrès restent à faire pour que la session
annuelle puisse pleinement remplir son rôle. Malgré les conditions
plus strictes désormais posées pour le dépôt des
amendements aux projets élaborés par les rapporteurs, ces
amendements restent très nombreux, et leur objet souvent
éloigné de celui du texte auquel ils s'appliquent. Compte tenu
des délais de traduction et de la difficulté de classer les
amendements, la discussion et le vote de ceux-ci peut manquer de clarté.
Ainsi, certains amendements qui devraient logiquement
" tomber " sont
maintenus en discussion et parfois adoptés, ce qui peut entraîner
des redondances, voire des ambiguïtés sur la signification du texte
adopté. Le souci de consensus et la volonté de permettre
l'expression de tous ne devraient pas exclure une organisation plus ferme des
travaux des commissions, de manière à clarifier au maximum la
signification des votes qui y sont émis. C'est lors des discussions
générales, en séance plénière, que doit
être assurée l'expression la plus large ; les travaux des
commissions, en revanche, qui servent de base à l'adoption de la
déclaration finale, doivent autant que possible dégager des
orientations précises à l'attention du Conseil des ministres.
Les débats de la session de Stockholm ont confirmé que la
crédibilité de l'OSCE s'était, malgré bien des
vicissitudes, plutôt renforcée au cours des deux dernières
années : même si son rôle demeure limité, elle a
fait la preuve de son utilité au côté d'autres
organisations internationales. Cependant, l'OSCE est manifestement encore
très loin de répondre aux espoirs placés en elle. Or, la
portée des travaux de l'Assemblée parlementaire ne pourra devenir
plus grande que si l'autorité de l'OSCE elle-même parvient
à s'affirmer davantage.
Les débats de Stockholm ont également montré, une nouvelle
fois, la place particulière qu'occupent dans les préoccupations
de l'Assemblée deux pays aux situations d'ailleurs bien
différentes, la Turquie et la Russie.
Confrontée à des périls graves, qu'il s'agisse de
l'intégrisme religieux ou du terrorisme du PKK, la Turquie reste
éloignée sur certains points des normes de l'OSCE en
matière de droits de l'Homme ; isolée sur la question
chypriote, elle n'en continue pas moins à renforcer ses relations avec
l'Union européenne, sans négliger les liens particuliers qui
l'unissent aux Etats turcophones nés de l'éclatement de
l'URSS ; pratiquement tous les Etats membres de l'OSCE mesurent les
dangers considérables qui naîtraient d'une remise en cause de sa
stabilité.
Le statut de la Russie est au coeur du débat sur le modèle de
sécurité pour l'Europe du XXI
ème
siècle.
La discussion de la déclaration finale a montré une prise de
conscience de plus en plus large de la stérilité d'une attitude
vis-à-vis de la Russie principalement fondée sur la
méfiance due au passé de cet Etat ; pour autant, la
manière dont la Russie pourrait s'intégrer à une
architecture européenne de sécurité avec un statut
à la mesure de sa puissance et de ses responsabilités,
n'apparaît pas plus clairement, au-delà des formules très
générales et des voeux pieux.
Les sénateurs membres de la délégation française
expriment leur gratitude à Mme Joëlle TIMSIT, Ambassadeur de
France en Suède au moment de la 5
ème
session de
l'OSCE, et à Mme Michèle BOCCOZ, premier secrétaire
à la représentation de la France aux négociations de
Vienne.
COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION FRANÇAISE
La délégation française à la
session de Stockholm de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE était
composée :
- pour l'Assemblée nationale, de M. Jean de LIPKOWSKI, président
de la délégation française, et de MM. Jacques BOYON,
Jacques FLOCH, Jean-Claude LEFORT, Arthur PAECHT et Michel VOISIN .
- pour le Sénat, de MM. James BORDAS, Guy CABANEL, Claude ESTIER,
Jacques GENTON et Yves GUÉNA.
Les membres de la délégation française étaient
répartis comme suit entre les trois commissions de l'Assemblée :
- Commission générale des Affaires politiques et de la
Sécurité :
MM. Jacques BOYON, député
Yves GUÉNA, sénateur
Jean de LIPKOWSKI, député
Arthur PAECHT, député
- Commission générale des Affaires économiques, de la
Science, de la Technologie et de l'Environnement :
MM. James BORDAS, sénateur
Guy CABANEL, sénateur
Jacques FLOCH, député
Jean-Claude LEFORT, député
- Commission générale de la Démocratie, des Droits de
l'Homme et des Questions humanitaires :
MM. Claude ESTIER, sénateur
Jacques GENTON, sénateur
Michel VOISIN, député.
I. LES TRAVAUX DE L'ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE
Le 5 juillet
, l'Assemblée plénière
a entendu successivement :
- M. Frank SWAELEN, Président de l'Assemblée parlementaire de
l'OSCE et Président du Sénat belge,
- Mme Birgitta DAHL, Présidente du Parlement suédois,
- Mme Lena HJELM-WALLEN, Ministre des Affaires étrangères de la
Suède,
- M. Flavio COTTI, Chef du département des Affaires
étrangères de la Suisse, Président en exercice de l'OSCE.
A l'issue de son allocution, M. Flavio COTTI a répondu aux questions
des parlementaires.
M. BAGIRZADEH (Azerbaïdjan) a évoqué la situation du conflit
avec l'Arménie.
M. COTTI a déclaré privilégier une approche pragmatique et
relevé la faiblesse des mécanismes à disposition.
M. KYPRIANOU (Chypre) s'est exprimé sur l'occupation turque du tiers de
l'île depuis 1974.
M. COTTI a estimé que cette question relevait de l'ONU dans le cadre de
la répartition du travail entre organisations internationales.
M. WIMMER (Allemagne) a souhaité connaître l'opinion de
M. COTTI sur le rapport de la mission qu'une délégation de
l'Assemblée parlementaire a effectué en mai 1995 dans le sud-est
de la Turquie (Kurdistan) et à Ankara.
M. COTTI a indiqué que, Président en exercice depuis le
1
er
janvier 1996, il n'a pas été saisi
officiellement de ce rapport.
M. WIMMER a déploré l'attitude des soldats de l'IFOR
vis-à-vis des criminels de guerre.
M. COTTI a insisté pour que chaque parlementaire intervienne dans son
pays pour évaluer la contribution qu'il pourrait apporter à ce
que les inculpés soient déférés devant le Tribunal
de La Haye.
M. HARDY (Royaume-Uni) a approuvé cette suggestion.
M. Claude ESTIER (France) a relevé une phrase du discours de
M. COTTI
(" si les criminels de guerre ne sont pas
présentés devant le Tribunal international, si rien n'est
entrepris à leur encontre, les élections donneront des
résultats contraires à ceux qu'on attendait d'elles ")
et s'est interrogé sur la portée du processus électoral
dans de telles conditions.
M. COTTI a constaté qu'il restait encore deux mois et demi pour
préparer les élections, tout en soulignant la
nécessité d'un engagement de la communauté internationale
pour éloigner ces criminels de guerre.
M. VAN TRAA (Pays-Bas) s'est demandé si les élections
n'étaient pas un alibi pour permettre à l'IFOR de quitter la
Bosnie
M. COTTI a souhaité la continuation de la présence de l'IFOR.
Beaucoup de haine a été accumulée dans l'ex-Yougoslavie.
Il faudra des générations pour la surmonter. La Communauté
internationale doit se souvenir que des élections et la présence
d'une armée ne suffiront pas à résoudre le
problème.
M. ELMQUIST (Danemark) a demandé à M. COTTI sa conception de la
coordination avec d'autres organisations internationales : OTAN, UEO, UE.
M. COTTI a déclaré privilégier une approche pragmatique.
La Suisse n'étant pas membre de ces trois organisations, elle n'est pas
spécialement bien placée pour apprécier ce problème
qui sera certainement repris par la présidence danoise de l'OSCE en 1997.
M. BORIN (Belgique) a estimé que des élections ne suffisaient pas
pour que la démocratie s'établisse dans les ex-pays communistes.
Il a demandé à M. COTTI de se prononcer sur les dangers des
régimes ultraprésidentiels.
M. COTTI a déclaré qu'il n'entrait pas dans les tâches de
l'OSCE d'évaluer les régimes constitutionnels de chaque pays.
Pour un Suisse, pays où la présidence change chaque année,
tout régime présidentiel comporte déjà un
degré d'ultra-présidentialisme.
M. KOTKOV (Russie) a estimé qu'il n'était pas correct de
présenter MM. KARADJIC et MLADIC comme des criminels de guerre. Il
a remercié l'Ambassadeur Tim GULDIMANN, chef de la mission de l'OSCE en
Tchétchénie, pour le fait que cette mission fonctionnait, mais a
souligné que la Tchétchénie faisait partie de la
Fédération de Russie et a demandé que l'action de l'OSCE
n'attise pas des haines entre Russes et Tchétchènes.
M. COTTI a précisé qu'il utilisait les termes de " personnes
accusées de crimes de guerre ". Il a déclaré que,
pour l'OSCE, une solution à la question tchétchène ne
pouvait être trouvée que dans le cadre de la
Fédération de Russie.
M. Javier RUPEREZ (Espagne) s'est réjoui de l'apport de l'IFOR à
la préparation des élections en Bosnie. Il a regretté que
l'OSCE ne soit pas suffisamment connue dans l'opinion publique, contrairement
à l'OTAN.
M. COTTI a constaté que l'OSCE a été créée,
sous le nom de CSCE (1975), bien après l'OTAN (1949). Après la
chute du communisme, on s'est demandé si l'OSCE servirait encore
à quelque chose ! Quand la Suisse s'est présentée pour la
présidence, elle n'avait aucun concurrent. Les faits se sont
chargés de répondre à ces interrogations. Les accords de
Dayton ont confié un grand rôle à l'OSCE après la
signature de la paix. Jamais l'OSCE n'a été aussi présente
dans la presse qu'en 1996.
Ensuite a eu lieu la remise du " prix de l'OSCE pour le journalisme
et la
démocratie ", décerné par l'Assemblée
parlementaire de l'OSCE. Ce prix a été remis par Mme Birgitta
DAHL à l'écrivain et journaliste polonais Adam MICHNIK. Le
discours de remise du prix a été prononcé par M. Freimut
DUVE (Allemagne).
Les 6 et 7 juillet étant réservés aux travaux des
commissions, les travaux de l'Assemblée plénière ont
repris le 8 juillet.
Le 8 juillet
, l'Assemblée a tout d'abord entendu
l'ambassadeur américain Robert FROWICK, chef de la mission de
l'OSCE en Bosnie-Herzégovine, et M. Edouard van THIJN, ancien
ministre de l'intérieur des Pays-Bas, coordonnateur pour la surveillance
des élections en Bosnie-Herzégovine.
Puis elle a examiné un
projet de résolution sur
l'ex-Yougoslavie
présenté à l'initiative de
parlementaires américains.
Plusieurs paragraphes ont donné lieu à des échanges assez
vifs :
- le paragraphe visant nommément MM. KARADJIC et MLADIC,
- le paragraphe mettant en cause la responsabilité personnelle de
M. MILOSEVIC,
- le paragraphe priant la communauté internationale et l'IFOR
d'arrêter les personnes inculpées de crimes de guerre et de les
livrer au tribunal de La Haye.
Au cours du débat, M. Yves GUÉNA est intervenu, au nom de la
délégation française, dans les termes suivants :
" La décision de tenir les élections en
Bosnie-Herzégovine le 14 septembre prochain a été
prise, il y a quelques jours, par le Président en exercice de notre
Organisation, conformément au plan de paix. En l'annonçant, M.
Flavio Cotti a souligné la lourde responsabilité qui incombait
ainsi à l'OSCE, dans la mesure où les conditions pour la tenue
d'élections libres et honnêtes étaient loin d'être
réunies.
" Il importe que notre Assemblée manifeste son soutien à la
position adoptée par la Présidence en exercice, et qu'elle
apporte son plein concours à la réussite de la mission
confiée à notre Organisation.
" Des voix vont certainement s'élever pour critiquer le choix
effectué par la présidence en exercice. Ces critiques iront sans
doute croissant à l'approche du 14 septembre, notamment de la part
d'organisations humanitaires qui constatent, hélas à juste titre,
des violations quotidiennes et répétées des normes
humanitaires et démocratiques élémentaires.
" Certes, les parlementaires que nous sommes devraient être les
premiers à se montrer sensibles à cette situation - et nous le
sommes. Cependant, nous devons clairement manifester notre soutien à la
logique pragmatique qui sous-tend la décision prise par l'OSCE : les
élections ne sont pas une fin en soi ; elles constituent une
première étape dans un long processus de réconciliation et
d'apprentissage de la démocratie. Les ajourner risquerait
d'arrêter tout le processus de l'accord de paix, et de redonner vie aux
forces favorables à la désintégration de la
Bosnie-Herzégovine. Il faut tirer au contraire profit des
possibilités offertes par la présence des forces internationales
pour enraciner les premiers germes de normalisation.
" De plus, ces élections ne doivent pas être
présentées comme un aboutissement. Elles doivent être
considérées comme le début d'une période
transitoire de stabilisation et de consolidation. A l'issue de cette
période transitoire, de nouvelles élections pourront être
organisées dans un environnement plus libre et plus démocratique,
peut-on espérer, que celui que nous connaîtrons dans deux mois et
demi.
" Cette optique permet d'offir une perspective aux forces politiques
émergentes qui ne pourront faire entendre leur voix lors des
élections de septembre. Elle tend aussi à confirmer la
disponibilité de la communauté internationale à poursuivre
ses efforts au-delà de l'échéance du plan de paix.
" Enfin, je voudrais souligner que notre Assemblée a de toute
évidence un rôle spécifique à jouer dans
l'observation des élections. Tout en gardant à l'esprit les
problèmes pratiques que posera l'arrivée massive d'observateurs
internationaux dans un pays où la sécurité, les moyens de
transport et les possibilités de logement ne sont guère
assurés, nous nous devons de participer pleinement à l'effort qui
sera mené sous la tutelle de l'OSCE.
" Ainsi, des tâches importantes appellent de notre part une
disponibilité qui soit à la hauteur de l'enjeu politique que
représente le processus de paix engagé en Bosnie. C'est une
oeuvre importante pour la stabilité et la sécurité du
continent européen, c'est-à-dire pour des questions qui sont au
coeur de l'action et des préoccupations de notre
Assemblée. "
Le projet de résolution a été finalement adopté
par 129 voix contre 12 et 4 abstentions
. Ce texte figure en
annexe au présent rapport.
Puis l'Assemblée a examiné et approuvé le
projet de
" code de conduite relatif aux aspects politico-démocratiques de la
coopération
". Ce texte a pour objet de préciser les
engagements des Etats participants à l'OSCE dans le domaine de la
démocratie et des droits de l'homme. Il figure également en
annexe au présent rapport.
Le même jour s'est tenu
le débat sur le " modèle de
sécurité pour le
XXI
ème
siècle "
préparant le vote
sur la déclaration finale. Au cours de ce débat, M. Jean de
LIPKOWSKI est intervenu, au nom de la délégation
française, dans les termes suivants :
" Près de sept ans après la chute du mur de Berlin, la
nouvelle architecture européenne de sécurité demeure
à construire.
" La nouvelle Europe que célébrait la Charte de Paris du
21 novembre 1990 émerge difficilement. La preuve en est que nos
débats ont porté essentiellement sur la définition de
cette nouvelle architecture. Je ne suis d'ailleurs pas sûr que nous y
avons totalement réussi.
" Certes, d'autres organisations peuvent, de leur côté,
amorcer une réflexion similaire et nous devons en tous cas les y
inviter. Je pense en particulier à la nécessaire synergie avec
l'OTAN, l'UEO, l'ONU, le Conseil de l'Europe, voire la CEI.
" L'OSCE occupe une position privilégiée pour faire avancer
cette réflexion globale, car elle est la seule Organisation qui ait une
vocation multidiciplinaire, embrassant l'ensemble des éléments
d'une politique de sécurité. Elle seule peut avoir cette vue
d'ensemble, car elle recouvre le continent européen, les
républiques d'Asie centrale, les Etats-Unis, le Canada.
" Enfin, nous sommes la seule Organisation où chacun, quelle que
soit sa taille, peut faire entendre sa voix en disposant d'un égal
pouvoir de décision, grâce à la règle du consensus.
" Or, notre réflexion est difficile, car les enjeux de
sécurité sont en pleine évolution. Le projet
d'élargissement de l'OTAN revient au premier plan de l'actualité.
Deux principes doivent nous guider à cet égard :
" - cet élargissement ne doit en aucun cas aboutir à
créer de nouvelles lignes de division en Europe. Il doit être
envisagé dans un esprit positif à l'égard de la Russie et
des pays de la CEI.
" - ce processus, effectué dans une totale transparence, doit
être engagé parallèlement à la rénovation de
l'OTAN. En effet, l'OTAN a été créée comme une
alliance défensive, face à un danger potentiel à l'Est. Le
moins que l'on puisse dire c'est que ce danger s'est singulièrement
estompé. Une nouvelle réflexion sur l'alliance s'impose donc.
" Dans la perspective de son élargissement, le rôle de notre
Organisation prend d'autant plus d'importance, car elle est le seul forum
où les préoccupations sécuritaires des pays non membres de
l'OTAN pourront s'exprimer. Ceci doit s'accompagner d'un renforcement des
capacités opérationnelles de l'Organisation dans ses domaines de
compétences privilégiés, c'est-à-dire
principalement la gestion des crises.
" Dès lors que les blocs ont disparu, la question des garanties
à donner à des pays n'appartenant pas à des alliances
politico-militaires ne peut plus être éludée. Dans cet
esprit, nous nous adressons à la Russie et aux pays de la CEI pour leur
dire que, si nous comprenons leurs préoccupations, nous attendons qu'ils
nous fassent des propositions concrètes quant à la façon
dont ils conçoivent leur place dans l'architecture européenne de
sécurité. Nous sommes prêts au dialogue. Encore faut-il
savoir ce que souhaitent nos partenaires. Précisément, le
débat que nous avons eu ici-même nous éclaire à cet
égard.
" L'approche proposée par la France et la Grande-Bretagne dans ce
débat pourrait amorcer une réponse aux préoccupations
exprimées par la Russie et les pays de la CEI. Il s'agit
d'élaborer ce que l'on appelle une plate-forme de sécurité
coopérative qui comprendrait notamment des garanties de
sécurité. Ce concept de garantie implique toutefois que chaque
Etat garde intact son droit à l'autodéfense, ainsi que le droit
de choisir librement ses alliances.
" Enfin, nous ne pouvons pas ignorer l'émergence de nouvelles
menaces. Je veux parler du développement de foyers de crises locales ou
régionales, pas seulement dans l'espace de l'OSCE mais également
sur le pourtour méditerranéen. Notre Organisation ne peut pas se
désintéresser de la stabilité et de la
sécurité en Méditerranée. Des tensions graves
risquent d'y renaître.
" Nous avons ici la présence d'observateurs du Maghreb, d'Egypte et
d'Israël. Nous devons demander au conseil permanent de
réfléchir avec eux à la création d'une structure de
dialogue plus approfondie. En effet, la sécurité ne se divise pas
et si nous sommes soucieux de la nôtre, nous sommes aussi directement
concernés par la leur. "
Le 9 juillet
,
l'Assemblée a entendu successivement :
- M. Ahmed FATHY SOROUR, président de l'Assemblée du peuple
d'Egypte, en sa qualité de président de l'Union
interparlementaire ;
- Sir Dudley SMITH (Royaume-Uni), président de l'Assemblée de
l'Union de l'Europe occidentale ;
- Mme Leni FISCHER (CDU, Allemagne), président de l'Assemblée
parlementaire du Conseil de l'Europe.
Puis, l'Assemblée est passée au
vote sur le projet de
déclaration finale
résultant des textes adoptés par
les commissions.
La déclaration finale a été adoptée à une
large majorité
(17 voix contre). Son texte est reproduit en
annexe au présent rapport.
Enfin, l'Assemblée a procédé
au renouvellement partiel
de son Bureau.
M. Javier RUPEREZ (Espagne) a été élu à la
présidence contre Mme Helle DEGN (Danemark).
Ont été élus vice-présidents : MM. John
ENGLISH (Canada), Kazys BOBELIS (Lithuanie), Wojtech LAMENTOWICZ (Pologne) et
Jacques GENTON (France).
Les autres candidats étaient MM. KHLIKOV (Ouzbkistan), MOROZ
(Ukraine), SENDOV (Bulgarie) et TSYARESCHCHANKA (Belarus).
Le Bureau de l'Assemblée est désormais composé comme
suit :
-
Président
: M. Javier RUPEREZ (Espagne),
(jusqu'à la
fin de la session de 1997)
-
Vice-présidents
:
jusqu'à la fin de la session
de 1999
: MM. John ENGLISH (Canada), Kazys BOBELIS (Lithanie) et
Wojtech LAMENTOWICZ (Pologne)
Jusqu'à la fin de la session de 1998
: M. Steny HOYER
(Etats-Unis), Mme Helle DEGNE (Danemark) et M. Andra BARSONY (Hongrie)
Jusqu'à la fin de la session de 1997
: MM. Jacques
GENTON (France), Willy WIMMER (Allemagne) et Ivan RYBKIN (Russie).
-
Trésorier
: Sir Peter EMERY (Royaume-Uni)
II. LES TRAVAUX DES COMMISSIONS
1. La commission des Affaires politiques et de la Sécurité
La " première commission " s'est
réunie les 6 et 7 juillet sous la présidence de
M. Javier RUPEREZ (Espagne).
Elle a examiné le rapport de M. Bruce GEORGE (Royaume-Uni) sur
" un modèle de sécurité commun et global pour
l'Europe du XXI
ème
siècle ".
Après avoir retracé les étapes du débat sur le
modèle de sécurité depuis le document de Budapest de 1994
(1(
*
))
, puis rappelé les missions
confiées à l'OSCE par les accords de Dayton (21 novembre 1995),
ce rapport s'attachait à cerner les principales questions qui sont au
coeur du débat sur le modèle de sécurité :
1) " Pourquoi la perspective d'une OSCE dotée d'un fondement
juridique attire-t-elle les uns et repousse-t-elle les autres ? Quelles sont
les aspirations, quelles sont les appréhensions en jeu ?
2) " Si la Russie s'intéresse vraiment au renouveau de l'OSCE,
pourquoi aucun progrès n'a-t-il été enregistré au
sujet d'une force de maintien de la paix de l'OSCE au Nagorny-Karabakh ? Est-ce
dû aux parties directement concernées ou au fait que la Russie ne
souhaite pas l'engagement de l'OSCE ?
3) " A quoi bon perpétuer le Conseil de coopération
nord-atlantique, tel qu'il a été fondé,
c'est-à-dire sur le principe désormais périmé qui
visait à réunir d'anciens adversaires ? Les points figurant
à son ordre du jour ne pourraient-ils pas être mieux
traités dans le cadre plus vaste de l'OSCE compte tenu, toutefois, des
contributions de l'OTAN et d'autres organisations ?
4) " Si l'OTAN peut coopérer avec la Russie et de nombreux Etats
non membres de l'OTAN dans le cadre de l'IFOR, pourquoi ne pas envisager cette
mission comme un essai en vue d'une option future de sécurité
collective à l'échelle de l'OSCE et non pas forcément
comme une nouvelle Ligue des Nations ?
5) " Le fait que l'OSCE s'écarte du principe du consensus dans ses
prises de décisions aurait-il un impact pratique ? Un Etat participant
se sentirait-il obligé de ne pas respecter ce qu'il considérerait
comme son intérêt national dans le seul but de se conformer
à une décision de l'OSCE ? " Un consensus - moins -
un " ou " un consensus - moins - deux "
entraînerait-il
des conséquences importantes, comme par exemple des sanctions, et non
seulement des déclarations politiques ? La proposition de
l'Assemblée parlementaire de l'OSCE préconisant un
" consensus approximatif " de 90 pour cent permettrait-elle
d'améliorer et de rationaliser le processus de prise de décisions
?
6) " Ressort-il assez clairement du Document de Helsinki 1992 que
l'OSCE
peut décider d'elle-même d'effectuer une mission de maintien de la
paix, ou bien est-il nécessaire ou opportun qu'elle ait un mandat du
Conseil de sécurité des Nations Unies, comme la Russie l'a
exigé pour le Nagorny-Karabakh ?
7) " Que faut-il faire avec l'ensemble des
" mécanismes "
guère utilisés de l'OSCE ? Faut-il les réunir en un seul
mécanisme déterminant les violations présumées de
tout engagement de l'OSCE ? Les inspections prévues au titre du
régime des mesures de confiance et de sécurité
pourraient-elles être menées non seulement par des équipes
nationales mais par des équipes multinationales à partir d'une
agence de maîtrise des armements relevant de l'OSCE, idée
avancée par l'Assemblée parlementaire à Ottawa, ce qui
permettrait de s'écarter d'un modèle selon lequel,
conformément à un document de réflexion de la Suède
daté de décembre 1995, la sélection d'Etats-cibles
continue de refléter les caractéristiques de la guerre froide et
selon lequel la moitié seulement des Etats participants de l'OSCE aurait
jusqu'à présent mené des inspections ou des visites
d'évaluation ? Etant donné qu'immanquablement le travail de
l'OSCE sur la maîtrise des armements en Bosnie ne sera pas terminé
d'ici 12 mois comme c'est le cas pour l'IFOR (si tout se passe comme
prévu) ne sera-t-il pas nécessaire de créer une agence de
l'OSCE chargée de la maîtrise des armements ?
8) " Alors que l'OTAN se prépare à décider, en
décembre 1996, les " prochaines étapes " de son
élargissement en proposant probablement des décisions relatives
aux nations qui seront les premières invitées à y
adhérer, a-t-on assez réfléchi à la manière
dont un élargissement et une transformation de l'OTAN et de l'OSCE
peuvent ensemble répondre à de nouveaux défis ?
Certes, l'IFOR constitue un précédent d'importance vitale pour
les activités de maintien de la paix de l'OSCE, qui ont
été définies dans le Document de Helsinki 1992, notamment
en ce qui concerne le recours aux moyens dont disposent d'autres organisations,
mais ne se sont pas encore concrétisées sur le terrain. Le droit
souverain d'adhérer à des traités d'alliance est
inconditionnel mais indissociable de la tâche plus vaste qui consiste
à s'efforcer de créer un espace commun de sécurité
dans l'ensemble de la région de l'OSCE, notamment d'instaurer un
partenariat actif entre l'OTAN, la Russie et l'Ukraine et d'approfondir les
autres thèmes que le présent rapport a tenté de mettre en
évidence ".
Le rapport de M. Bruce GEORGE ne proposait pas de réponses à ces
questions. Toutefois, la proposition de résolution soumise à la
" première commission " esquissait certains aspects du
nouveau
" modèle de sécurité " :
- adoption du principe du " consensus approximatif " pour
les
décisions et renforcement de l'exécutif de l'OSCE ;
- mise en place d'un régime de sanctions pour non-respect des
engagements pris par les Etats participants ;
- soutien au concept d'" institutions se renforçant
mutuellement " dans le domaine de la sécurité et de la
coopération en Europe.
L'examen du projet de résolution a donné lieu à un large
débat ; de nombreux amendements ont été
adoptés et le texte voté par la commission -qui a
été, à un paragraphe près, repris dans la
déclaration finale- diffère sensiblement du texte initial.
Le texte final conserve, certes, l'orientation en faveur du
" consensus
approximatif " et du renforcement de l'exécutif, et se prononce en
faveur d'un régime de sanctions propre à l'OSCE ; mais il ne
reprend pas le concept d'" institutions se renforçant
mutuellement ", lui préférant la formule d'un
"
accord sur une procédure contraignante garantissant un
échange réciproque permanent d'informations ainsi que des
consultations et une coordination étroite des activités entre
l'OSCE, l'Organisation des Nations Unies, l'Union européenne, le Conseil
de l'Europe, l'OTAN et l'UEO au niveau du Secrétaire
général ou du Président, sur un pied
d'égalité, sans hiérarchie ni responsabilité
supérieure et avec toutes les parties intéressées dans le
but de maintenir la paix et la stabilité, et répondre ainsi aux
préoccupations de tous les Etats participants de l'OSCE en
matière de sécurité
".
Par ailleurs, alors que le texte initial abordait un seul conflit en cours,
celui de l'ex-Yougoslavie -en apportant son soutien aux actions en cours et en
"
reconnaissant qu'une présence internationale à long
terme en faveur de la paix pourra être nécessaire pour garantir
une viabilité durable des accords de Dayton
"- le texte
adopté, tout en reprenant cet aspect, mentionne également les
différents conflits dans lesquels intervient l'OSCE et souligne tout
particulièrement la nécessité d'intensifier les efforts
pour résoudre le conflit du Nagorny-Karabakh.
En outre, le texte final :
- prône le "
renforcement de l'OSCE dans les domaines de la
diplomatie préventive, de la prévention des conflits ainsi que de
la reconstruction dans les périodes post-conflit, y compris le
renforcement de ses instruments et la mise à disposition de ses
institutions des moyens nécessaires
" ;
- demande que soit encouragée "
la création de zones
dénucléarisées dans la région de l'OSCE, en tant
qu'élément nécessaire et important d'un nouveau
système de sécurité paneuropéen
" ;
- invite à un règlement du conflit en Tchétchénie
sur la base de l'accord de Nazran ;
- demande que "
toutes les parties en Albanie envisagent, dans un
délai raisonnable mais limité, de nouvelles élections
parlementaires tenues dans de meilleures conditions et en présence
d'observateurs internationaux
" ;
- invite "
l'OSCE et ses Etats participants à appuyer d'un
commun accord une interdiction unilatérale des mines antipersonnel
à l'échelon du monde, y compris la production, la vente,
l'exportation, le transfert à l'étranger et l'utilisation de ces
mines ainsi que la destruction des stocks existants
" ;
- invite également l'OSCE et ses Etats participants à signer le
protocole II de la Convention des Nations Unies sur les armes
conventionnelles (CWC), et à soutenir l'élargissement de la
portée de ce protocole aux conflits armés non internationaux.
Enfin, la commission a adopté un amendement préconisant de
"
prendre des mesures particulières pour une meilleure
intégration de la Russie dans l'architecture de sécurité
européenne comme la création d'un conseil de
sécurité européen dans le cadre de l'OSCE
".
Toutefois ce passage a été retiré de la déclaration
finale à la suite d'un vote organisé en session
plénière (70 voix contre 66) en raison de l'opposition de la
délégation ukrainienne. A l'exception de ce paragraphe, le texte
adopté par la commission a été intégralement repris
dans la déclaration finale.
A l'issue de ses travaux, la commission a renouvelé son Bureau,
désormais ainsi composé :
Président : M. Bruce GEORGE (Royaume-Uni), seul candidat ;
Vice-Président : M. Kimmo KILJUNEN (Finlande), qui l'a emporté
sur M. Anatoly KOTKOV (Russie)
Rapporteur : M. Anton BUTEIKO (Ukraine), qui l'a emporté sur
M. Jean de LIPKOWSKI (France).
2. La commission des Affaires économiques, de la Science, de la Technologie et de l'Environnement
La " deuxième commission " s'est
réunie les 6 et 7 juillet sous la présidence de M. Jacques FLOCH
(France).
Le 6 juillet, elle a examiné le rapport et le projet de
résolution présentés par M. William KELLY (Canada) sur
" les faits nouveaux survenus en Europe centrale et dans la CEI en
matière d'économie et d'environnement et leurs incidences pour la
sécurité dans la région de l'OSCE ".
Le rapport de M. KELLY souligne la diversité des situations en Europe
centrale et orientale :
- certains Etats avaient connu une économie de marché
relativement avancée avant leur intégration au bloc
soviétique ;
- après la disparition de ce bloc, certains Etats ont adopté un
" traitement de choc " tandis que d'autres pratiquaient le
gradualisme ;
- certains Etats en transition ont d'ores et déjà renoué
avec la croissance tandis que d'autres sont encore en récession ;
- l'inflation est généralisée, mais relativement
maîtrisée dans certains pays alors que d'autres sont
guettés par l'hyperinflation ;
- les taux de chômage sont très variables selon les pays.
Le rapport constate par ailleurs que les investissements directs
étrangers sont faibles, très inférieurs aux
prévisions.
Il aborde ensuite le coût social de la transition, qu'il juge très
élevé dans la plupart des pays, avec une baisse du taux de
scolarisation et une nette diminution de l'espérance de vie
(augmentation de la mortalité infantile, de la morbidité, des
suicides).
Le rapport se félicite que, malgré ces conditions très
défavorables, aggravées dans certains cas par l'existence de
tensions ethniques, "
le public continue à approuver les
libertés qui caractérisent une démocratie
".
Puis il recommande que le rythme de la transition économique soit choisi
en tenant compte du coût social qu'elle entraîne, plaide pour le
maintien de l'assistance technique occidentale et pour un développement
des échanges entre les pays de la région.
Le rapport aborde ensuite le problème de la dégradation de
l'environnement en soulignant ses enjeux en termes de sécurité
:
" La dégradation de l'environnement à l'échelle
régionale ou locale en Europe orientale et dans l'ex-Union
soviétique risque de constituer une menace pour la
sécurité traditionnelle de trois manières
différentes. Premièrement, comme c'est le cas des effets de la
régression économique, la dégradation de l'environnement
peut provoquer une baisse de qualité de vie de la population et
contribuer ainsi à des troubles sociaux et à une
instabilité politique. Deuxièmement, la pollution
transfrontière que ce soit par le sol, les cours d'eau ou la mer peut
créer des conflits entre Etats car la qualité de l'air, de l'eau
et du sol d'un pays subit les effets négatifs des actions d'un autre
pays. Enfin, le fait de se disputer des ressources naturelles qui se
raréfient peut devenir source de différends et, dans les cas
extrêmes, de conflits entre Etats ".
En conséquence, il plaide pour le développement d'une assistance
technologique et pour l'harmonisation des règles relatives à
l'environnement en Europe occidentale et orientale.
Lors du débat qui s'est déroulé à la suite de la
présentation du rapporteur, de nombreux délégués
sont intervenus.
Les délégués du Kazakhstan, d'Ukraine, d'Azerbaïdjan,
de la République de Biélorussie et de Lettonie ont
évoqué les réformes que leurs pays avaient entreprises au
cours des dernières années et les difficultés qu'ils
rencontraient dans leur mise en oeuvre.
A l'issue de ces interventions, le rapporteur a souligné que la mise en
place de structures juridiques, financières et administratives
adaptées à l'économie de marché était une
priorité. Les délégués des pays en transition ont
également souligné l'acuité des problèmes sociaux
à la suite des difficultés de paiement des salaires et des
retraites. La situation catastrophique de la mer d'Aral, le drame de
Tchernobyl, ont suscité de la part des délégués du
Kazakhstan et d'Ukraine une demande d'assistance.
A propos de la nécessité d'harmoniser les normes en
matière d'environnement entre l'Europe occidentale et orientale, M.
Martin NILSSON (Suède) a proposé que cette harmonisation
s'effectue au niveau le plus élevé possible. En revanche, M.
Jean-François LEUBA (Suisse), s'il a trouvé intéressante
la proposition du rapporteur relative au respect des normes écologiques
de leurs propres pays par les entreprises occidentales qui construisent dans
les pays en transition des installations industrielles, en a souligné la
difficulté d'application en raison de la concurrence.
Plusieurs délégués, ceux de la Suède et de Suisse
notamment, ont regretté que la lutte contre la criminalité
organisée ne soit pas évoquée dans le rapport. M. KELLY
leur a répondu que ce point avait déjà été
abordé dans son rapport présenté à la session
d'Ottawa.
M. Jean-François LEUBA (Suisse), favorable au passage progressif de
l'économie planifiée à l'économie de marché,
a cité les très bons résultats des pays de Visegrad dont
le rythme des réformes a été très rapide. Sur ce
point, M. KELLY a précisé que les conditions de départ
étaient favorables à l'adoption d'un tel rythme.
Sir Peter EMERY (Royaume-Uni), après avoir noté que les travaux
de la commission s'orientaient dans la même direction que ceux du
IVème Forum économique de l'OSCE qui s'est tenu à Prague,
du 27 au 29 mars 1996, a regretté que les crises bancaires survenues en
Russie et en Roumanie aient ébranlé la confiance des populations
dans le système bancaire et celle des investisseurs étrangers qui
restent réticents à des opérations d'investissements dans
ces pays. Il a également évoqué la sous-estimation des
coûts sociaux de la transition.
La discussion du projet de résolution de M. William KELLY, reprenant
l'ensemble des propositions de son rapport, établissant d'une part, les
priorités des pays réformateurs, et d'autre part les mesures de
coordination et de coopération, s'est déroulée dans un
climat très consensuel.
Ainsi, à l'exception d'un amendement invitant la Norvège à
procéder à l'arrêt de la chasse à la baleine, les
sept amendements déposés par la Délégation
française, à l'initiative de MM. Jacques FLOCH et Jean-Claude
LEFORT, ont été adoptés.
Deux de ces amendements portaient plus particulièrement sur la dimension
écologique de la résolution. Le premier rappelle :
" que
la pollution transfrontalière et l'inégale répartition des
ressources naturelles peuvent être sources de tension, voire de conflits,
entre pays voisins ".
Le second recommande la prise en compte des
travaux entrepris dans le cadre du processus
" Environnement pour
l'Europe ".
Concernant les priorités pour les pays réformateurs, un
amendement invite les gouvernements des Etats réformateurs à
recourir
" au dialogue social entre les responsables politiques et
les
acteurs économiques et sociaux de la transition "
pour obtenir
l'assentiment du public sur les mesures économiques et politiques que
prennent ces Etats.
Un autre amendement demande aux gouvernements de conduire des politiques de
nature à éviter la marginalisation de groupes de population sur
des bases ethniques ou régionales.
Les trois autres amendements invitent l'OSCE à appuyer l'action des
organisations économiques régionales à l'égard des
pays en transition dans la collecte des données sur les
difficultés sociales et dans l'identification des situations
économiques et sociales qui peuvent être sources de tension, et
recommandent à l'OSCE
" de tirer pleinement parti de
l'expérience et des moyens de la commission économique des
Nations-Unies pour l'Europe en renforçant sa coopération avec
cette dernière et en recourant à son expertise ".
Au total, 37 amendements au projet de résolution de M. William
KELLY ont été adoptés, la plupart d'entre eux soulignant
le rôle essentiel des organisations internationales dans l'accompagnement
des réformes.
Le texte adopté par la commission a été
intégralement repris dans la déclaration finale.
La commission des affaires économiques a consacré la seconde
journée de ses travaux à la proposition pour une initiative en
vue d'une
" charte économique de l'OSCE "
présentée par Mme Rita SUSSMUTH (Allemagne), rapporteur
spécial.
Mme SUSSMUTH a rappelé que c'est à l'occasion de la session
annuelle d'Ottawa de juillet 1995 qu'avait été donné
mandat à la commission des affaires économiques d'élaborer
un projet de charte économique de l'OSCE.
Elle a précisé le cadre de cette démarche en
déclarant que l'OSCE ne devait pas répéter les travaux
d'autres organisations internationales, et son contenu : la charte
économique de l'OSCE devrait fixer des normes minimales.
Le rapporteur spécial a évoqué les discussions
menées au cours de l'année avec plusieurs membres de la
commission des affaires économiques et indiqué que le texte
qu'elle présentait tenait compte des suggestions de MM. William
KELLY, Thomas JEZEK (Pologne) et Jacques FLOCH.
Ce texte s'inscrit dans le contexte du débat actuel sur un modèle
de sécurité pour le XXIème siècle et souligne
l'urgence de l'examen de la contribution que la dimension économique de
l'OSCE pourrait apporter au débat sur la sécurité. Il
énonce les principes de base de cette charte économique reposant
sur l'économie de marché, définit les modalités de
la coopération économique et traite également de la
dimension financière et des objectifs à atteindre dans les
domaines des affaires sociales, de l'éducation et de la formation, de la
science, de la technologie et de l'environnement.
M. Jacques FLOCH a introduit le débat en précisant que le texte
proposé constituait un document provisoire de travail.
Aussi, le débat a-t-il plus porté sur l'opportunité de la
démarche proposée que sur le contenu même du texte.
M. Guy CABANEL (France), lors de son intervention, a constaté l'accord
des membres de la commission sur le traitement des questions économiques
ayant un effet direct sur la sécurité. Disposer de données
statistiques fiables sur l'évolution économique et sociale des
pays de l'OSCE lui est apparu particulièrement nécessaire. A cet
égard, il a cité les contributions que pourraient apporter
l'Union européenne, dont il a souligné l'action, l'ONU et la BERD.
Il a déclaré que le projet de charte économique devait
conduire à la mise en place d'une " structure de veille " au
sujet des problèmes économiques et sociaux. L'OSCE pourrait
faciliter le rôle des organisations citées et, dans une bonne
synergie, attirer l'attention des gouvernements sur les situations de tension.
Il s'est interrogé sur la nécessité d'un texte normatif.
Sir Peter EMERY (Royaume-Uni) s'est également montré
réservé à l'égard de cette intiative qui envisage
en fin de compte de conférer un rôle économique
opérationnel à l'OSCE alors que les gouvernements des pays de
l'Union européenne, notamment la République
fédérale d'Allemagne, y sont opposés.
Le délégué bulgare, en revanche, s'est prononcé en
faveur de cette initiative visant à élaborer un texte qui
pourrait être utilisé dans son pays comme une
référence.
Contestant la notion de
" zone économique de
l'OSCE ",
M. William KELLY a souhaité que, lorsque le texte aurait
été examiné de manière plus approfondie, l'avis
d'institutions telles que l'Union européenne, le Fonds monétaire
international, soit sollicité.
A l'issue de ce débat, M. Jacques FLOCH, a observé que,
depuis quatre ans, la commission des affaires économiques de
l'Assemblée parlementaire de l'OSCE avait porté sa
réflexion sur l'amélioration des relations entre pays membres de
l'OSCE, mais n'avait pas jusqu'alors adopté de texte de principe, ce qui
constitue une démarche plus ambitieuse et plus difficile. Aussi, a-t-il
proposé que la mission de Mme Rita Süssmuth soit
confirmée et qu'un groupe
ad hoc
soit constitué. Reprenant
la suggestion de M. Guy CABANEL, il a également proposé que
les travaux de ce groupe
ad hoc
se concentrent sur la mise en place
d'une structure dont la finalité serait le recensement de données
statistiques fiables sur les pays en voie de réforme.
La commission des affaires économiques a adopté ces trois
propositions. MM. Jacques FLOCH et Guy CABANEL participeront aux travaux
du groupe
ad hoc
ainsi constitué.
A l'issue de ses travaux, la commission a renouvelé son Bureau, qui est
désormais ainsi composé :
Président : M. Jacques FLOCH (France), seul candidat ;
Vice-Président : Mme Helena NILSSON (Suède), élue par
36 voix contre 28 totalisées par quatre autres candidats .
Rapporteur : M. William KELLY (Canada), seul candidat.
3. La commission de la Démocratie, des Droits de l'Homme et des Questions humanitaires
La " troisième commission " s'est
réunie les 6 et 7 juillet sous la présidence de M. Freimut
DUVE (Allemagne). Après avoir entendu la médiatrice pour les
droits de l'homme en Bosnie-Herzégovine (Mme Gret HALLER) expliquer
son activité, la commission a examiné le rapport de M. Jerzy
CIESLAK (Pologne) sur " les problèmes d'adaptation des
réfugiés, des exilés et des immigrants dans leurs pays de
résidence permamente ou temporaire ".
Le rapport de M. CIESLAK souligne que
" les leçons tirées
des conflits dans l'ex-Yougoslavie, en Moldova, au Nagorny-Karabakh, en
Arménie, en Géorgie et en Tchétchénie indiquent que
les problèmes nationaux, ethniques et religieux non résolus
peuvent désormais constituer le facteur principal des conflits
armés ".
Il évoque également les
répercussions des problèmes des minorités nationales sur
les relations entre Etats, en citant les exemples des minorités
hongroises en Slovaquie et Roumanie et des populations russophones d'Urkraine
et des Pays Baltes.
Abordant ensuite la situation des réfugiés, exilés et
immigrants, il relève la tendance de ces groupes à former des
"
enclaves
" au sein du pays d'accueil, en raison
d'une
tolérance insuffisante de la part de celui-ci, mais aussi d'un manque de
volonté de s'adapter de la part des immigrants ; il analyse les
dangers de cette situation pour la sécurité intérieure et
extérieure des Etats, en insistant notamment sur le développement
préoccupant du fondamentalisme islamique.
Le rapport examine ensuite les obstacles à l'intégration des
immigrés en s'appuyant sur les réponses à un questionnaire
adressé à tous les Etats membres :
" La plupart des réponses nous permettent de conclure que les
facteurs les plus graves faisant obstacle à l'intégration des
réfugiés ou des immigrés sont les suivants :
1.
l'ignorance ou la connaissance insuffisante de la langue du pays de
résidence ;
2. le chômage ou l'inaptitude à trouver du travail ;
3. l'établissement d'immigrants dans des agglomérations
homogènes, entraînant la création d'enclaves de
minorités nationales dans des villes et des communes. Les causes de ce
phénomène sont souvent les suivants :
a) l'établissement, par le passé, de réfugiés
(immigrés dans un Etat où ils bénéficient d'une
aide sociale) dans certains quartiers ou dans les banlieues de villes, en
raison du coût réduit de la location des appartements ;
b) la tendance d'immigrants à s'établir dans certaines villes ou
régions qui offrent les plus vastes perspectives d'emploi en raison de
leur prospérité économique ;
c) la tendance d'immigrants à s'établir là où
existent déjà des concentrations de représentants de leurs
groupes ethniques ou nationaux qui peuvent les aider à trouver du
travail ou un appartement (les conditions de vie n'y sont souvent pas
très bonnes et ces appartements sont surpeuplés et d'un standing
médiocre).
Les autres facteurs sont notamment les suivants :
-
dans certains Etats, l'inadaptation à la situation actuelle et le
besoin d'une législation relative aux immigrants ou aux
réfugiés ;
- la situation économique de certains Etats participants, ce qui
explique l'impossibilité de verser des subventions sous forme d'une aide
sociale aux réfugiés ;
- l'attitude réservée des populations locales à
l'égard des immigrants ou des réfugiés, souvent pour les
motifs suivants :
a)
différences culturelles ou religieuses ;
b) mauvaise situation économique du pays de résidence ; ou
c) absence de contacts fréquents entre la population autochtone du pays
ou de la région en question avec des gens de race, de nationalité
ou de religion différente ".
Le rapport préconise en conséquence la mise en place de
"
programmes d'adaptation
" à l'intention des
réfugiés, exilés et immigrants, comportant des cours de
langue ainsi que des cours d'initiation aux
"
valeurs
" de
l'état d'accueil, portant sur "
sa Constitution, son histoire,
sa société
". Il suggère également le
développement, sous une forme adaptée à ces populations,
de la formation professionnelle et des services de conseil à l'emploi.
Le rapport évoque également la situation des pays en
développement "
considérés par les immigrants
comme des Etats de transit
", et préconise à cet
égard que les pays développés qui ne souhaitent pas
accueillir de nouvelles vagues d'immigrants accordent à ces pays une
aide financière et logistique, de manière à leur permettre
d'accueillir durablement les immigrants en cause.
Le débat sur le rapport a permis à certaines
délégations d'attirer l'attention sur certains foyers de tensions
ou de conflits, notamment l'Abkhasie, la Tchétchénie et Chypre.
De nombreux délégués ont regretté que le rapport
abordât de la même manière les problèmes des
exilés et réfugiés, d'une part, et des immigrants
économiques, d'autre part. Si certains orateurs ont plaidé pour
le développement de la solidarité financière en faveur des
Etats accueillant des réfugiés, d'autres se sont prononcés
avant tout pour une meilleure surveillance des conflits ethniques et pour des
mesures tendant à dissuader la persécution des minorités.
Puis la commission a examiné le projet de résolution concluant le
rapport.
Le projet de résolution présenté par le rapporteur
recommandait tout d'abord :
- la ratification, par tous les Etats membres, de la Convention de
Genève sur les réfugiés ;
- le développement de la formation et du conseil à l'emploi
à l'attention des réfugiés, exilés et migrants ;
- le lancement de campagnes contre la xénophobie et le racisme ;
- l'appui financier et logistique aux pays prêts à accueillir
certains migrants, mais ne pouvant le faire pour des raisons économiques.
Ces orientations ont été approuvées par la commission.
Le projet de résolution proposait par ailleurs la création d'une
unité spéciale de l'OSCE chargé des questions relatives
aux réfugiés, exilés et immigrants.
Cette recommandation a été repoussée par la commission,
sur proposition de M. Jacques GENTON qui a pris la parole en ces termes :
" Le projet de résolution suggère la création
d'une unité spéciale de l'OSCE chargée de stimuler et de
coordonner l'échange d'informations et de données
d'expérience entre les pays d'accueil à propos de l'adaptation et
de l'intégration des immigrés, des réfugiés et des
exilés.
" Comme toutes les autres organisations internationales, l'OSCE
dispose
d'un budget limité et a donc tout intérêt à se
concentrer sur les domaines où elle peut avoir une valeur
ajoutée. Ce ne serait pas le cas avec la
création d'une
telle cellule, qui serait naturellement trop limitée en taille, pour
apporter un avantage par rapport à ce qui se fait déjà
dans le cadre du H.C.R. qui dispose de la compétence voulue et des
moyens requis. A un moment où l'on cherche à renforcer les
synergies entre organisations, cette proposition paraît
contre-productive ".
Le projet de résolution prévoyait également la
création d'un fonds de péréquation destiné à
faire partager le coût de l'accueil des étrangers. Cette
recommandation a été repoussée et remplacée par une
invitation à renforcer les moyens des organisations internationales
compétentes existantes, en particulier l'ONU, l'OIM et l'Union
européenne.
Enfin, la commission a adopté des amendements complétant le
projet de résolution sur plusieurs points. Ces amendements :
- soulignent la nécessité de distinguer les cas des
réfugiés ou exilés et des immigrants ;
- déclarent inacceptable l'utilisation des minorités nationales
pour exercer des pressions politiques ;
- demandent de porter une attention particulière aux problèmes du
retour sur leurs "
terres historiques
" de personnes
déportées en masse par des régimes totalitaires ;
- se félicitent des initiatives prises conjointement par le HCR, l'OIM
et l'OSCE pour traiter les problèmes des réfugiés et
autres personnes déplacées contre leur volonté ;
- demandent un renforcement de la lutte contre le trafic des femmes et des
jeunes filles dans la région de l'OSCE ;
- suggèrent aux Etats membres de l'OSCE de veiller à ce que toute
personne citoyenne d'un Etat prédécesseur et résidant en
permanence sur le territoire d'un Etat successeur puisse recevoir sans
condition la citoyenneté de ce dernier.
Ainsi modifié, le projet de résolution a été
adopté. Puis la commission a adopté avec modification un projet
de résolution sur la Turquie présenté notamment à
l'initiative de délégués américains.
Ce texte, tout en condamnant le terrorisme du PKK, déplore les atteintes
aux droits de l'homme commises par les autorités turques et appelle
à une solution pacifique du problème kurde dans le respect de
l'intégrité territoriale de la Turquie.
Il a été adopté avec une seule opposition et trois
abstentions, en l'absence de la délégation turque
retournée à Ankara pour participer au vote sur l'investiture du
nouveau Gouvernement. Le vice-président du Parlement turc s'est
déclaré disposé à inviter une
délégation de l'Assemblée parlementaire pour examiner
l'évolution de la situation en matière de droits de l'homme
depuis la précédente visite d'une délégation, en
mai 1995.
Les deux projets de résolution ainsi adoptés ont
été intégrés dans la déclaration finale.
A l'issue de ses travaux, la commission a renouvelé son bureau, qui est
désormais ainsi composé :
Président : M. Freimut DUVE (Allemagne), seul candidat.
Vice-présidente : Mme Dorota SIMONIDES (Pologne), qui a battu la
candidate russe, Mme Elena MZIZULINA, par 45 voix contre 29 et 2 abstentions.
Rapporteur : Mme Guikje ROETHOF (Pays-Bas), seule candidate.
ANNEXES
(1) Voir le rapport n° 396 (1994-1995) de M. Jacques GENTON sur la quatrième session de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE (juillet 1995).