2. Les améliorations encore possibles des moyens matériels ne permettront plus beaucoup de gains de productivité
En ce qui concerne les moyens matériels, la situation apparaît moins préoccupante qu'au niveau des effectifs. En effet, l'informatisation est en voie d'achèvement, malgré beaucoup d'erreurs, difficilement explicables, et de retards ; les locaux ont bénéficié d'améliorations notables, même si quelques insuffisances persistent çà et là ; et des efforts ont été faits pour rationaliser la gestion des crédits budgétaires grâce à la déconcentration.
a) Une informatisation chaotique mais en voie d'achèvement
Le processus d'informatisation des juridictions a
été marqué par maints retards et péripéties
sur lesquelles il est inutile de s'attarder ici. On rappellera seulement, pour
mémoire, l'échec des grands projets d'applications nationales de
la Chancellerie et l'abandon, fin 1992, du schéma directeur informatique
pour 1990-1994, suivi d'une réorganisation, en 1993, de la
sous-direction de l'informatique.
Mises à part les juridictions de la région parisienne, dans
lesquelles a été mise en place la " nouvelle chaîne
pénale " gérée par la Chancellerie,
l'informatique
est désormais totalement
déconcentrée auprès des cours d'appel
, auxquelles
la " charte de l'informatique judiciaire ", adoptée en
septembre 1994 par le Garde des Sceaux, a confié la
responsabilité des choix informatiques locaux dans leur ressort.
Le développement des initiatives locales a permis la
généralisation de
l'informatisation des cours d'appel et des
tribunaux de grande instance, aujourd'hui en voie d'achèvement
(avec
un ratio moyen de deux agents par poste de travail).
Il présente cependant l'inconvénient d'une certaine
incohérence des matériels et des logiciels
utilisés
, souvent incompatibles entre eux, en dépit des
efforts de rationalisation qui ont pu être faits par la Chancellerie et
les cours d'appel. En outre, des difficultés subsistent en
matière de
formation
des fonctionnaires, pas toujours suffisante,
et de
maintenance
des matériels, voire de renouvellement des
équipements les plus anciens déjà obsolètes,
auxquelles s'ajoute le problème de la dépendance des juridictions
à l'égard de quelques grandes sociétés
d'informatique privées.
Dans leurs réponses à l'enquête de la mission, de nombreux
chefs de juridiction se plaignent également d'une autonomie insuffisante
dans ce domaine, du fait de la centralisation de la gestion des crédits
auprès de la cour d'appel et de la suppression récente de la
possibilité de financer des projets d'informatisation locale sur les
budgets de fonctionnement des juridictions : nécessité d'appeler
la cour d'appel pour faire venir le technicien, le plus souvent unique pour
tout le ressort, en cas de panne ; longs mois d'attente avant l'autorisation de
la cour pour l'achat d'un logiciel...
A titre d'exemple, tel responsable de tribunal de grande instance se plaint de
ne pas avoir obtenu, au bout de quatre mois, l'autorisation d'acheter un
logiciel de remplacement d'un coût de 1500 francs. Certaines juridictions
en viennent même à recourir à l'achat de machines à
écrire traditionnelles, qu'elles peuvent financer de façon
autonome sur leur budget de fonctionnement, contrairement à l'achat de
terminaux informatiques qui nécessite l'accord de la cour d'appel.
Par ailleurs, l'équipement en micro-ordinateurs des magistrats,
souhaité par nombre d'entre eux, reste très insuffisant.
Cependant,
l'informatisation des juridictions a d'ores et déjà
permis de réaliser des gains de productivité très
importants
. Il serait illusoire d'espérer que les progrès qui
restent à réaliser dans ce domaine permettent de résorber
l'engorgement croissant des juridictions.