B. DES INSTITUTIONS SANS CONTREPOIDS
Ainsi que le relevait ce rapport, les institutions européennes " exercent toutes, même si c'est à des degrés divers, une poussée de même sens vers un développement des interventions communautaires ".
1. La Commission
Les services de la Commission européenne
obéissent aux tendances à l'expansion qui sont celles de toute
administration, mais ces tendances sont d'autant plus fortes, dans le cas de
l'administration communautaire, que celle-ci peut jouer sur le
" dernier
mot " du Parlement européen pour développer les
dépenses non obligatoires (celles pour lesquelles se pose tout
particulièrement le problème de la subsidiarité), et que
sa gestion n'est soumise, malgré certains progrès, qu'à
une surveillance réduite. La moindre efficacité du frein
financier, dans le cas de l'administration communautaire, découle
également des particularités de la procédure
budgétaire de l'Union, qui revient à aligner les recettes sur les
dépenses, et à les imputer sur les budgets nationaux, diluant
ainsi la responsabilité financière.
La composition très particulière de l'administration
communautaire va dans le même sens. On souligne parfois, pour
dénoncer le mythe d'une bureaucratie bruxelloise tentaculaire, que les
services de la Commission n'ont guère plus de fonctionnaires que la
Ville de Paris. Comparaison étrange, dans la mesure où les
employés municipaux sont pour la plupart chargés d'assurer des
missions qui n'ont naturellement rien à voir avec celles des
fonctionnaires européens. C'est à l'évidence moins le
nombre des fonctionnaires de la Commission qui importe que la nature de leur
rôle : 4.000 d'entre eux sont des fonctionnaires de conception,
chargés de problèmes de législation ou de programmation.
On voit mal comment des services de conception d'une telle ampleur - qui n'ont
d'équivalent dans aucun Etat membre- pourraient ne pas multiplier les
initiatives.
Par ailleurs, l'augmentation du nombre de commissaires européens qui a
résulté de l'élargissement de l'Union a conduit à
attribuer à des commissaires européens des secteurs où la
Communauté n'a que des compétences très réduites.
Il est naturellement tentant pour ces commissaires de chercher à donner
plus de consistance au " portefeuille " qui leur est confié,
et donc de s'efforcer de développer les interventions communautaires
précisément là où les compétences de la
Communauté sont en principe résiduelles.
D'une manière générale, comme la Commission
européenne n'a de légitimité et de moyens d'action
qu'à l'échelon communautaire, elle est incitée par la
force des choses à rechercher le transfert des décisions à
l'échelon de l'Union et à militer pour l'utilisation de la
procédure communautaire qui lui donne, en raison de son monopole sur
l'initiative des textes, de très larges pouvoirs (rappelons que les
Etats membres doivent être unanimes pour amender une proposition de la
Commission et que celle-ci peut retirer à tout moment un projet).