4. Un avenir incertain
a) Les incertitudes liées à l'après juillet 1997
Jusqu'à présent, Hong Kong a
bénéficié, dans le domaine des médias et notamment
de la presse, d'un régime de liberté encore peu commun en Asie.
On prétend même que la loi à Hong Kong offre une meilleure
protection qu'en Grande-Bretagne contre la diffamation ou les atteintes
à la vie privée...
Le retour de la colonie britannique à la Chine populaire le
1er juillet 1997 peut remettre en question les développements
actuels du secteur audiovisuel, tant sur le plan politique
qu'économique
.
Les autorités chinoises ont certes donné toutes les assurances et
ont garanti que Hong Kong jouira d'une grande liberté en ce qui concerne
l'expression d'opinion et la presse, cette liberté devant toutefois
s'exercer dans le cadre de la loi.
L'article 27 de la loi fondamentale de la Région administrative
spéciale, qui servira de " texte constitutionnel " au
territoire à partir du 1er juillet 1997, prévoit certes
explicitement que les habitants de Hong Kong "
jouiront de la
liberté de parler et d'écrire; de la liberté de la
presse
".
On peut par ailleurs penser que
la liberté d'expression constitue
l'un des critères sur lequel les autorités chinoises seront
jugées, par les milieux économiques notamment, pour
apprécier l'effectivité du principe "
un pays, deux
systèmes
".
Il a toutefois fallu que le premier ministre Li Peng démente, le
28 octobre 1996, des propos du ministre chinois des Affaires
étrangères, M. Qian Qichen, évoquant de probables
restrictions de cette liberté.
Quoi qu'il en soit, l'audiovisuel est,
depuis un certain temps, cogéré par Hong Kong et la Chine.
Cette situation politique, où se mêlent attentisme et scepticisme,
explique le choix de Singapour par le groupe Publicis pour implanter ses
activités dans la zone Asie-Pacifique, alors que Hong Kong avait
été un moment envisagée.
Un projet de loi visant à harmoniser et unifier la législation a
ainsi été abandonné par le Gouvernement au mois de janvier
1996, officiellement pour se concentrer en priorité sur la
déréglementation des services de télévision payante
et de vidéo à la demande.
Les observateurs s'accordent à penser que le Gouvernement n'a pas voulu,
à l'époque, prendre le risque de débattre d'un projet de
loi de nature à provoquer l'irritation de Pékin. Le projet avait
pour objet de renforcer la liberté de la presse, de libéraliser
l'accès des capitaux étrangers au secteur audiovisuel et de
moderniser le secteur des télécommunications et des nouvelles
technologies. L'abandon du projet a desservi l'intérêt du
territoire dans son rôle de centre régional, certains
opérateurs étrangers ayant alors pris le parti de s'installer
à Singapour (Discovery, Disney ESPN et HBO), qui leur propose des
conditions financières et fiscales plus favorables, et offre plus de
souplesse pour les liaisons satellitaires.
Sur le plan économique, on peut s'interroger sur les facilités
qui seront laissées aux opérateurs hongkongais pour nouer des
alliances internationales.
Les télévisions hertziennes ATV et TVB, concurrencées par
le câble et le satellite, cherchent, en effet, des alliances (ATV avec
Star TV pour la production), ou se développent sur d'autres
marchés. Le cas de TVB est le plus typique.
Alors qu'elle avait une part de marché de 85 % il y a encore
quelques années, elle subit en effet la concurrence d'ATV. Ses revenus
ont baissé de 25 % en 1995. Elle se tourne donc de plus en plus
vers l'étranger : Taïwan (quatre chaînes
câblées, dont TVBS, la plus regardée sur le câble
à Taïwan, distribuée aussi à Singapour et aux
Philippines), Singapour (une chaîne spécifique, en plus de TVBS),
l'Inde (participation dans Home TV), l'Indonésie, la Thaïlande
(projets en cours), les États-Unis (chaînes en mandarin et
cantonais sur le câble de la côte ouest, chaîne satellitaire
en mandarin), le Canada (20 % de Fairchild TV), l'Europe (60 % de
Chinese Channel). Enfin en Chine du sud, les deux chaînes sont
reçues et extrêmement suivies, ce qui leur permet de vendre
l'audience de Hong Kong et de Canton aux annonceurs.
Pour les opérateurs de chaînes transnationales,
la localisation
des programmes est plus que jamais la condition de leur rentabilité
.
En raison de l'exiguïté d'un marché fermé et
pratiquant une langue particulière (cantonais),
Hong Kong n'a pas
suscité de programme propre ou d'adaptation locale de chaînes
internationales. Le territoire reste le point de départ de nombreux
opérateurs. Le retour à la Chine peut toutefois remettre ce
rôle en jeu
, même si le nouveau statut est perçu comme
un avantage par ceux qui souhaitent pénétrer le marché
chinois. La concurrence de Singapour ou de pays comme la Malaisie, Taïwan
ou la Thaïlande, qui cherchent activement à attirer des
opérateurs internationaux, risque de jouer en la défaveur de Hong
Kong.