III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION EN FAVEUR DE L'AMÉLIORATION DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE
Afin d'améliorer la sécurité et la veille
sanitaires, votre commission formule des propositions.
Bien entendu, elle souhaite que le Gouvernement oeuvre en faveur de leur
transposition au niveau communautaire.
A. L'ÉTAT DOIT ÊTRE EN MESURE D'ASSUMER TROIS MISSIONS, L'ÉVALUATION DES ACTES THÉRAPEUTIQUES, LE CONTRÔLE DES PRODUITS ET LA VEILLE SANITAIRE ; IL DOIT AUSSI POUVOIR LES COORDONNER
La sécurité sanitaire comporte trois
exigences correspondant à trois missions : l'évaluation des actes
thérapeutiques, le contrôle des produits et la veille sanitaire.
Si une de ces missions n'est pas, ou pas convenablement remplie, c'est
l'ensemble de la sécurité sanitaire qui est menacé.
Pour assurer l'évaluation des actes thérapeutiques, le
gouvernement a choisi de créer l'Agence nationale d'accréditation
et d'évaluation en santé par l'ordonnance du 24 avril 1996 ; il a
donné à cette agence les moyens juridiques et matériels
d'assumer convenablement sa mission. Ce premier pôle est donc
déjà structuré.
En ce qui concerne le contrôle des produits, le bilan établi par
le présent rapport a montré que cette mission n'était pas
bien assurée : les institutions de contrôle sont trop
" verticales " pour les produits thérapeutiques, certains
biens ne sont pas efficacement contrôlés et le contrôle des
produits alimentaires n'est pas satisfaisant au regard de la protection de la
santé humaine. Ce second pôle, correspondant à la
deuxième mission de l'Etat, doit donc être réformé.
Le troisième pôle, correspondant à la veille sanitaire,
fait également défaut. Si de multiples organismes font de la
veille sanitaire presque sans le savoir, et si le Réseau national de
santé publique, malgré ses faibles moyens, réalise une
veille épidémiologique, le système n'est pas
organisé ni coordonné et il ne couvre pas tout le champ de la
santé de la population. Pour ce troisième pôle aussi, votre
Commission fera des propositions.
1. Garantir le contrôle des produits
Il n'a pas paru possible à votre Commission de garantir
le contrôle des produits, qui constitue une mission dont l'unicité
ne saurait être contestée, sans prendre en considération,
au plan de l'organisation, les éléments propres à
distinguer les produits et biens médicaux, d'une part, et les produits
alimentaires, d'autre part.
Cette distinction s'explique par l'histoire. La législation concernant
le médicament est éprouvée depuis plusieurs
décennies par tous les acteurs, industries, contrôleurs,
prescripteurs, patients. La même culture doit être mieux
acceptée en matière de produits sanguins et pour ce qui concerne
les greffes. La législation, européenne et française,
applicable aux dispositifs médicaux doit être renforcée et
une culture doit être développée dans un cadre
administratif qui reste à mettre en place afin que tous les produits de
santé offrent, sur des bases communes de principes et de
méthodes, des garanties égales.
La même démarche doit être entreprise pour ce qui concerne
les produits alimentaires sur des bases semblables.
Il reste que la diversité des acteurs, le stade d'élaboration des
législations concernées, la nécessité d'une
réflexion commune à plusieurs départements
ministériels placent la réponse aux problèmes posés
par la sécurité sanitaire des produits alimentaires sur un autre
rythme.
C'est de l'arythmie que pourrait naître l'échec de ceux qui
entreprendraient la construction d'un système complètement
unitaire.
C'est de cette arythmie que pourrait naître l'incompréhension de
l'opinion publique, qui serait alors portée à croire que tous les
problèmes sont résolus avec une qualité de réponse
identique.
C'est pourquoi, après y avoir longuement réfléchi,
votre Commission propose la création de deux institutions, l'une
chargée du contrôle des produits et des dispositifs
médicaux et l'autre de la sécurité sanitaire des produits
alimentaires, mises au service, il faut y insister, d'une mission unique.
a) Mettre en place une Agence des produits et dispositifs médicaux
Votre Commission propose de mettre en place une Agence des
produits et dispositifs médicaux, chargée du contrôle de la
sécurité de ces biens.
Ainsi, à côté d'une institution spécialisée
dans l'évaluation des actes diagnostiques et thérapeutiques,
l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en
santé, nous aurions un établissement public unique chargé
de l'ensemble des produits destinés à la santé :
médicaments, dispositifs médicaux et biomatériaux,
produits sanguins, organes, tissus et cellules (y compris les gamètes)
d'origine humaine ou animale lorsqu'ils sont destinés à une
utilisation thérapeutique chez l'homme, réactifs et milieux de
culture, produits issus des thérapies génique et cellulaire,
lentilles de contact, cosmétiques.
Il serait donc mis fin à une administration sanitaire fractionnée
et cloisonnée, " en tuyaux d'orgue ", produit par produit.
Bien entendu, une telle unité de structure, qui comporterait logiquement
plusieurs départements -par exemple médicaments,
matériels, produits biologiques...- permettrait d'unifier autant que
possible les méthodes de contrôle.
L'unicité de cet établissement public, constitué à
partir de l'Agence du médicament et placé sous la tutelle du
ministère chargé de la santé, permettrait aussi
d'harmoniser les procédures de vigilance applicables à chaque
catégorie de produits. Cela simplifierait grandement la tâche des
professionnels de santé appelés à signaler les effets
inattendus ou indésirables résultant de l'utilisation de ces
produits ou matériels.
L'Agence française du sang deviendrait un Etablissement français
de la transfusion sanguine ; ainsi seraient isolées les missions
d'organisation de la transfusion sanguine et de coordination de
l'activité des établissements de transfusion sanguine, d'une
part, et celles qui correspondent au contrôle des produits sanguins,
d'autre part.
L'Etablissement français des greffes serait maintenu pour toutes ces
missions qui ne correspondent pas au contrôle des organes, tissus et
cellules.