Faut-il modifier le mode de scrutin pour les élections européennes
M. de La Malène
Délégation du Sénat pour l'Union Européenne - rapport 123 - 1996 / 1997
Table des matières
- I. UN MODE DE SCRUTIN CONTESTÉ
- II. LA RÉFORME DU MODE DE SCRUTIN : DES PARAMÈTRES À PRENDRE EN COMPTE, DES OBJECTIFS À ATTEINDRE
- III. LES HYPOTHÈSES ALTERNATIVES
- EXAMEN DU RAPPORT
- CONCLUSIONS
- ENTRETIENS DU RAPPORTEUR
En 1976, les Etats membres de la Communauté
européenne ont décidé l'élection des
représentants des Etats au Parlement européen au suffrage
universel direct. Jusqu'à cette date, ces représentants
étaient désignés par les Parlements nationaux en leur sein.
Afin de mettre en oeuvre la décision du Conseil des ministres de la
Communauté, la France a mis en place un mode de scrutin proportionnel
dans le cadre d'une circonscription unique formée par le territoire de
la République. Ce mode de scrutin a été utilisé
à quatre reprises, en 1979, 1984, 1989 et 1994.
Ce système électoral est fortement critiqué depuis
longtemps. Le Parlement européen souffre d'un défaut de
légitimité qui n'a pas été comblé par
l'élection au suffrage universel, loin s'en faut. Il demeure une
institution méconnue des citoyens et dont les élus paraissent
coupés de leurs électeurs.
Forts de ce constat, nombreux sont ceux qui estiment que le mode de scrutin
retenu en France pour les élections européennes est largement
responsable de cette situation. Les propositions de modification de ce mode de
scrutin se sont multipliées au cours des dernières années.
Pour que les prochaines élections, qui auront lieu en juin 1999,
puissent se dérouler avec un nouveau mode de scrutin, il faudrait,
compte tenu du calendrier électoral français, que la
réforme de ce dernier soit adoptée au cours de la session
parlementaire qui s'est ouverte le 1
er
octobre dernier et qui
s'achèvera en juin 1997.
La Délégation du Sénat pour l'Union européenne,
créée en 1979 afin que le Parlement français conserve un
lien avec la construction communautaire après la décision
d'élire au suffrage universel les parlementaires européens, a
naturellement sa place dans un tel débat. Votre rapporteur, après
avoir entendu les représentants des forces politiques au Parlement
européen, a donc souhaité étudier les hypothèses
alternatives au mode de scrutin actuel en s'efforçant de rechercher les
moyens de mieux servir les intérêts français au Parlement
européen et de donner davantage de légitimité à la
construction européenne.
I. UN MODE DE SCRUTIN CONTESTÉ
A. LE MODE DE SCRUTIN ACTUEL
· L'élection du Parlement européen
au suffrage universel a été instituée en 1976 par l'
" Acte portant élection des représentants au Parlement
européen au suffrage universel direct ",
annexé à
la décision du Conseil des Communautés européennes du 20
septembre 1976.
L'article 138 du Traité de Rome prévoyait que, le moment venu,
l'Assemblée européenne serait élue au suffrage universel
direct. C'est le 10 décembre 1974 au Sommet de Paris que les Chefs
d'Etat et de Gouvernement des neuf Etats membres de la Communauté
européenne ont arrêté le principe de cette élection
au suffrage universel. Après dix-huit mois de négociations, le
Conseil a adopté l'Acte portant élection des représentants
au Parlement européen au suffrage universel.
L'Acte du 20 septembre 1976 définit certaines modalités de
l'élection des représentants au Parlement des peuples des Etats
membres. Il fixe le nombre de représentants élus dans chaque Etat
membre (voir tableau p. 7), et la durée du mandat (cinq ans). Il
évoque également le régime des privilèges et
immunités ainsi que celui des incompatibilités. Ainsi, l'Acte de
1976 prévoit notamment que la qualité de représentant au
Parlement européen est compatible avec celle de membre du Parlement d'un
Etat membre. En revanche, le mandat parlementaire européen est
incompatible avec les fonctions de membre du Gouvernement d'un Etat membre, de
membre de la Commission européenne, de juge, avocat
général ou greffier de la Cour de Justice des Communautés
européennes, de membre de la Cour des Comptes européenne, de
membre du comité consultatif de la CECA ou de membre du Comité
économique et social de la Communauté européenne... En
outre, l'Acte de 1976 prévoit que chaque Etat membre est libre de fixer
les incompatibilités applicables sur le plan national.
En ce qui concerne la vacance des sièges, chaque Etat membre doit
établir les procédures appropriées pour que, au cas
où un siège devient vacant au cours d'une législature, ce
siège soit pourvu pour le reste de la période. Lorsque la vacance
résulte de l'application des dispositions nationales en vigueur dans un
Etat membre, celui-ci en informe le Parlement qui en prend acte.
Plus généralement, l'article 7 de l'Acte annexé à
la décision du Conseil prévoit dans son paragraphe 2 que
" jusqu'à l'entrée en vigueur d'une procédure
électorale uniforme, et sous réserve des autres dispositions du
présent acte, la procédure électorale est régie,
dans chaque Etat membre, par les dispositions nationales ".
Les
Etats
membres, ayant constaté l'impossibilité de mettre en place une
procédure électorale uniforme, ont opté pour l'application
de dispositions nationales dans l'attente de la mise en oeuvre de la
procédure uniforme explicitement prévue par l'article 138 du
Traité de Rome.
· A la suite de l'adoption de cet Acte par le Conseil des
Communautés européennes, le Parlement français a
adopté une loi relative à l'élection des
représentants au Parlement européen, qui définit, dans ses
articles 3 et 4, le mode de scrutin applicable lors de ces élections.
Loi du 7 juillet 1977
Article 3
L'élection a lieu à la représentation
proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans
panachage ni vote préférentiel.
Les sièges sont attribués aux candidats d'après l'ordre de
présentation sur chaque liste.
Les listes qui n'ont pas obtenu au moins 5 pour cent des suffrages
exprimés ne sont pas admises à répartition des
sièges.
Article 4
Le territoire de la République forme une
circonscription unique.
Dans le système mis en place en 1977, l'ensemble des électeurs
votent sur la base de listes nationales comportant chacune
nécessairement les noms de 87 candidats correspondant aux 87
sièges de parlementaires européens attribués à la
France (le nombre de parlementaires européens français,
fixé à 81 en 1976, a été modifié à la
suite de la réunification allemande pour atteindre 87).
La circonscription nationale unique comprend les électeurs de
métropole, mais également les électeurs des
départements et territoires d'outre-mer ainsi que les électeurs
des collectivités à statut spécial (Mayotte, Saint-Pierre
et Miquelon). Le mode de scrutin retenu est la représentation
proportionnelle, qui permet la représentation de l'ensemble des forces
politiques. L'attribution des sièges est faite selon la règle de
la plus forte moyenne, qui conduit à favoriser les listes ayant obtenu
le plus grand nombre de voix. En outre, la dispersion des voix est
atténuée par le seuil de 5% en dessous duquel aucune liste ne
peut obtenir de siège.
· Avant de formuler une appréciation sur le mode de scrutin
appliqué en France, il est intéressant d'évoquer les
solutions retenues par nos partenaires, dont les principales
caractéristiques sont résumées dans le tableau suivant :
LES MODES DE SCRUTIN AUX ÉLECTIONS
EUROPÉENNES
|
Nombre de députés |
Mode de scrutin |
Nombre de circonscriptions |
Allemagne |
99 |
Scrutin proportionnel sans vote préférentiel. Les partis ont la possibilité de présenter des listes soit au niveau fédéral (SPD, Libéraux, Verts), soit au niveau des 17 Länder (CDU-CSU) |
|
Autriche |
21 |
Représentation proportionnelle avec vote préférentiel |
1 |
Belgique |
25 |
Représentation proportionnelle avec vote préférentiel |
4 |
Danemark |
16 |
Représentation proportionnelle sans vote préférentiel |
1
|
Espagne |
64 |
Représentation proportionnelle sans vote préférentiel |
1 |
Finlande |
16 |
Représentation proportionnelle. Les partis ont la possibilité de présenter des listes soit au niveau national soit au niveau régional (pour les premières élections, tous les partis ont choisi le niveau national) |
|
France |
87 |
Représentation proportionnelle sans vote préférentiel |
1 |
Grèce |
25 |
Représentation proportionnelle sans vote préférentiel |
1 |
Irlande |
15 |
Représentation proportionnelle avec système du vote simple transférable* |
4 |
Italie |
87 |
Représentation proportionnelle avec vote préférentiel |
5 Le décompte des voix et la répartition des sièges se font au niveau national où s'établit le quorum déterminant le nombre de voix nécessaires à l'obtention des sièges |
Luxembourg |
6 |
Représentation proportionnelle avec vote préférentiel et panachage |
1 |
Pays-Bas |
31 |
Représentation proportionnelle avec vote préférentiel |
1 |
Portugal |
25 |
Représentation proportionnelle sans vote préférentiel |
1 |
Royaume-Uni |
87 |
Scrutin uninominal majoritaire à un tour (représentation proportionnelle avec système du vote simple transférable* en Irlande du Nord) |
84 (Grande-Bretagne)
|
Suède |
22 |
Représentation proportionnelle avec vote préférentiel et panachage |
1 |
*Les noms des candidats figurent par ordre alphabétique
sur le bulletin de vote. L'électeur vote pour un candidat et, en plus,
marque l'ordre de préférence des candidats auxquels doit aller sa
voix au cas où le candidat désigné en premier lieu aurait
déjà obtenu le nombre de voix nécessaire pour être
élu ou aurait été éliminé faute d'avoir
recueilli ce nombre de voix.
Parmi les pays de la Communauté, nombreux sont ceux qui ont
adopté le même système que la France. Ainsi, la
représentation proportionnelle dans une circonscription nationale unique
est appliqué en Autriche, au Danemark, en Espagne, en Grèce, au
Luxembourg, aux Pays-Bas, au Portugal et en Suède. Les systèmes
allemand et finlandais sont assez particuliers puisque les partis peuvent
choisir de présenter des listes soit au niveau national soit au niveau
régional (au niveau des Länder en Allemagne). La Grande-Bretagne
applique un scrutin uninominal majoritaire à un tour avec
découpage du territoire en 84 circonscriptions (3 des sièges du
Royaume-Uni sont réservés à l'Irlande du Nord qui applique
un mode de scrutin différent). Enfin, quelques Etats ont choisi de
découper leur territoire en circonscriptions : 4 en Belgique, 4 en
Irlande, 5 en Italie.
La représentation proportionnelle dans une circonscription unique est
donc la solution la plus communément retenue parmi les pays de l'Union
européenne.
B. APPRÉCIATION
Le mode de scrutin actuel a été appliqué
à quatre reprises, en 1979, en 1984, en 1989 et en 1994. La
participation en France lors de ces élections a été dans
l'ensemble assez peu élevée et a connu une évolution
négative malgré une légère remontée en 1994
(60,7% en 1979, 56,7% en 1984, 48,7% en 1989 et 52,7% en 1994).
A titre de comparaison, la participation a atteint en 1994 74,8% en Italie,
71,2% en Grèce, 60% en Allemagne, 59,1% en Espagne, mais 35,5% au
Portugal, 36% aux Pays-Bas et 36,4% au Royaume-Uni.
Le mode de scrutin actuel fait depuis longtemps l'objet de critiques fortes et
justifiées.
La première d'entre elles concerne le lien entre l'électeur et
l'élu. Le choix de la représentation proportionnelle dans une
circonscription unique conduit à éloigner considérablement
l'élu de ses électeurs. Les citoyens ont le choix entre des
listes comportant plusieurs dizaines de noms, qu'ils ne peuvent qu'accepter ou
refuser en bloc, sans qu'aucune individualisation du vote ne soit possible.
Dans ces conditions, la composition des listes de candidats est largement
l'apanage des organes dirigeants des partis politiques. Le système
actuel exclut toute possibilité de sanction par l'électeur
à l'issue du mandat et rend largement fictive la notion de
responsabilité de l'élu devant les citoyens. Dans ce
système, la réélection des parlementaires ne dépend
pas - ou fort peu - de leur action au sein du Parlement
européen.
Certains font valoir que ce mode de scrutin est responsable de
l'absentéisme des députés européens français
au sein du Parlement européen.
Une seconde critique est adressée au mode de scrutin actuel : il ne
permet pas une représentation équilibrée des composantes
du territoire français. Ainsi, parmi les personnalités
actuellement élues au Parlement européen, 27 sont originaires de
la région parisienne alors qu'aucun élu n'est originaire de
Picardie, de Lorraine ou d'Auvergne.
En revanche, la représentation proportionnelle dans le cadre de la
circonscription nationale a l'avantage de permettre la représentation de
l'ensemble des courants d'opinion français.
Surtout, les
élections européennes sont l'occasion d'un large débat
national sur les questions européennes, qui pourrait être moins
aisé à conduire avec un autre mode de scrutin.
Enfin, ce mode
de scrutin est d'une grande simplicité et s'adaptera sans aucune
difficulté à la diminution éventuelle du nombre de
sièges attribués à la France dans le cadre de
l'élargissement futur de l'Union européenne.
Le mode de scrutin pour les élections européennes fait l'objet
depuis plusieurs années de demandes de modifications, compte tenu de ses
inconvénients. Deux propositions de loi ont ainsi été
déposées en ce sens en 1988 et 1992(1(
*
)). En
1993, M. Edouard BALLADUR, alors Premier ministre, avait envisagé
l'hypothèse d'une modification du mode de scrutin dans sa
déclaration de politique générale. M. Michel BARNIER,
ministre délégué chargé des Affaires
européennes a également évoqué cette
éventualité devant la Délégation du Sénat
pour l'Union européenne en estimant que
" une révision du
mode d'élection des membres français du Parlement européen
pourrait les aider à renforcer leur rôle au sein de cette
Assemblée, le mode de scrutin actuel favorisant un certain
éparpillement " (2(
*
)).
Si une réforme devait intervenir avant les prochaines élections,
qui se dérouleront en juin 1999, il serait indispensable que la loi
électorale soit modifiée au cours de l'actuelle session
parlementaire qui s'achèvera en juin 1997. En effet, il sera très
difficile d'envisager une telle réforme à quelques mois des
élections législatives prévues en mars 1998 et encore plus
difficile de faire aboutir ce projet entre les élections
législatives et les élections européennes. Dans ce cadre,
votre rapporteur a donc souhaité étudier la manière dont
le mode de scrutin pourrait être modifié.
II. LA RÉFORME DU MODE DE SCRUTIN : DES PARAMÈTRES À PRENDRE EN COMPTE, DES OBJECTIFS À ATTEINDRE
La réforme éventuelle du mode de scrutin aux élections européennes ne peut que conduire à l'éclatement de la circonscription nationale unique, élément fondamental du mode de scrutin actuel. Dans ce cadre, un certain nombre d'éléments doivent être intégrés dans une réflexion sur ce sujet. Il est en outre nécessaire que les hypothèses alternatives soient examinées au regard d'objectifs précis.
A. DE NOMBREUX PARAMÈTRES
Une éventuelle réforme du mode de scrutin pour les élections européennes implique de prendre en considération certains aspects propres à ce type de scrutin.
1. Les contraintes constitutionnelles
En 1976, lorsque le Conseil des Communautés
européennes a décidé l'élection des
représentants au Parlement européen au suffrage universel direct,
le Président de la République a soumis au Conseil constitutionnel
la décision du Conseil des Communautés, conformément
à l'article 54 de la Constitution.
Celui-ci a déclaré la décision conforme à la
Constitution tout en apportant la précision suivante :
" considérant que l'engagement international du 20 septembre
1976 ne contient aucune stipulation fixant, pour l'élection des
représentants français à l'Assemblée des
Communautés européennes, des modalités de nature à
remettre en cause l'indivisibilité de la République, dont le
principe est réaffirmé par l'article 2 de la Constitution ; que
les termes de " procédure électorale uniforme " dont il
est fait mention à l'article 7 de l'acte soumis au Conseil
constitutionnel ne sauraient être interprétés comme pouvant
permettre qu'il soit porté atteinte à ce principe ; que de
façon générale, les textes d'application de cet acte
devront respecter les principes énoncés ci-dessus ainsi que tous
les autres principes de valeur constitutionnelle ".
Ainsi, le Conseil constitutionnel n'a admis l'élection au suffrage
universel direct des représentants français au Parlement
européen que pour autant qu'une telle élection ne porte pas
atteinte au principe d'indivisibilité de la République.
Ce considérant a fait l'objet de très nombreux commentaires et a
suscité des interprétations divergentes de la part des
spécialistes de droit constitutionnel. Ainsi, MM. L. FAVOREU et L.
PHILIPP en ont déduit que
" l'élection ne pourra se faire
selon un mode de scrutin supposant un découpage de la France en
circonscriptions grandes ou petites, et qu'en définitive, le seul mode
d'élection compatible avec le principe d'indivisibilité, tel que
l'interprète le Conseil constitutionnel, est l'élection des 81
représentants français à la représentation
proportionnelle dans le cadre d'une circonscription unique ". (3(
*
))
D'autres professeurs ont au contraire estimé que la décision du
Conseil constitutionnel visait uniquement à proscrire la création
de circonscriptions transnationales. Il est aujourd'hui difficile de savoir
laquelle de ces deux interprétations est exacte et
il subsiste une
incertitude sur la conformité à la Constitution d'un mode de
scrutin qui conduirait à l'éclatement de la circonscription
nationale.
Il faut noter que cette décision du Conseil constitutionnel a
probablement joué un rôle dans le choix du mode de scrutin actuel,
comme l'a reconnu M. Christian BONNET, alors ministre de l'Intérieur,
lors de la discussion de la loi du 7 juillet 1977 :
" Le
Gouvernement a
pensé que le cadre national pourrait seul, dans un tel scrutin,
respecter le principe de l'indivisibilité de la République,
réaffirmé par le Conseil constitutionnel, et permettre aux
élus de représenter le peuple français dans sa
totalité sans que se développent des forces centrifuges sur
lesquelles il me semble inutile d'insister ici ". (4(
*
)).
2. La perspective d'une procédure électorale uniforme
L'article 138 du Traité sur l'Union européenne prévoit la mise en oeuvre d'une procédure électorale uniforme dans l'ensemble des pays de l'Union européenne. Cette disposition était déjà inscrite dans le Traité de Rome.
Article 138 du Traité sur l'Union européenne
(...)
3. Le Parlement européen élaborera des projets en vue de
permettre l'élection au suffrage universel direct selon une
procédure uniforme dans tous les Etats membres.
Le Conseil, statuant à l'unanimité, après avis conforme du
Parlement européen, qui se prononce à la majorité des
membres qui le composent, arrêtera les dispositions dont il recommandera
l'adoption par les Etats membres, conformément à leurs
règles constitutionnelles respectives.
Le Parlement européen est donc chargé d'élaborer des
projets, le Conseil de l'Union européenne devant ensuite statuer
à l'unanimité. Depuis l'entrée en vigueur du Traité
de Maastricht, le Parlement européen doit en outre donner un avis
conforme sur le texte envisagé par le Conseil.
Depuis l'élection du Parlement européen au suffrage universel, ce
dernier a tenté à plusieurs reprises d'élaborer des textes
en vue de la mise en oeuvre d'une procédure électorale uniforme.
- En 1982, le Parlement européen a adopté le projet SEITLINGER
qui prévoyait la mise en place d'un système proportionnel avec
circonscriptions régionales plurinominales en nombre variable et
possibilité de coalition au niveau national des listes
présentées dans les régions. Ce projet, qui laissait une
certaine marge de manoeuvre aux Etats, n'a pu être adopté par le
Conseil.
- En 1985, un autre projet a été proposé par M. BOCKLETT,
mais il n'a pu franchir le passage de l'adoption par le Parlement
européen.
- Enfin, en 1993, le Parlement européen a adopté une
résolution présentée par M. de GUCHT. Ce projet avait pour
objectif d'harmoniser les éléments fondamentaux des
différents systèmes et non de créer une procédure
rigoureusement identique pour chacun des Etats membres.
Le projet de GUCHT envisageait la mise en place d'un scrutin proportionnel avec
répartition des sièges en tenant compte des suffrages
exprimés sur l'ensemble du territoire de l'Etat membre. Le
découpage éventuel en circonscriptions était laissé
à l'appréciation de chaque Etat. Le projet permettait même
le maintien du scrutin uninominal majoritaire, à condition que celui-ci
ne soit appliqué qu'à deux tiers des sièges, le dernier
tiers étant attribué à la proportionnelle. Il s'agissait
donc d'orientations très générales. Néanmoins, ce
projet n'a pu aboutir, faute d'accord au sein du Conseil. Il semble même
que ce dernier n'ait eu que deux brefs échanges de vues sur ce sujet.
Si 14 Etats membres sur 15 ont pour l'heure opté pour la
représentation proportionnelle, cela ne signifie pas que ces Etats
soient d'accord sur l'ensemble des aspects du mode de scrutin. En outre, le
Royaume-Uni paraît peu disposé à abandonner le mode de
scrutin majoritaire.
Il semble aujourd'hui que la mise en place d'une procédure
électorale uniforme ne soit pas possible avant plusieurs années.
Dans ces conditions, chaque Etat reste entièrement libre de
définir son mode de scrutin en fonction de ses intérêts et
de ses traditions.
3. La question de la représentation des départements et territoires d'Outre-mer
Le vote des populations des territoires d'Outre-mer aux
élections européennes a posé des problèmes
juridiques qui pourraient resurgir si le mode de scrutin était
modifié.
Les territoires d'Outre-mer n'appartiennent pas à la Communauté
européenne, ils lui sont associés. Dans ces conditions, on peut
s'interroger sur la légitimité de leur participation aux
élections européennes. Cependant, le Traité de Rome
s'applique
" à la République française "
dont font partie les territoires d'Outre-mer en vertu de la Constitution.
Les populations de ces territoires ont donc été appelées
à voter pour chacune des élections au Parlement européen.
Dans un arrêt
Nicolo
du 20 octobre 1989, le Conseil d'Etat a
confirmé la légalité de la participation des
ressortissants des territoires d'Outre-mer aux élections
européennes.
Toutefois, la difficulté risque de resurgir si une réforme du
mode de scrutin conduisait à faire éclater la circonscription
nationale. En effet, la participation d'entités électoralement
autonomes, n'appartenant pas au territoire de la Communauté
européenne pourrait être critiquée.
Une autre difficulté se pose, autant pour les départements
d'Outre-mer que pour les Territoires d'Outre-mer : l'éclatement
éventuel de la circonscription nationale impose d'envisager la
constitution de circonscriptions pour l'Outre-mer.
Quelle que soit l'option retenue sur le territoire métropolitain, il
n'existe que peu de possibilités pour la représentation de
l'Outre-mer. On peut envisager la constitution d'une circonscription unique,
dans laquelle les électeurs, compte tenu de l'importance de la
population, seraient appelés à désigner trois
parlementaires européens. Une autre hypothèse consisterait
à créer trois zones géographiques : une zone Pacifique,
une zone Océan indien et une zone Amérique. Dans chacune de ces
zones, les populations éliraient un représentant au Parlement
européen.
Dans un cas comme dans l'autre, on peut craindre que la participation des
départements et territoires d'Outre-mer aux élections
européennes ne perde toute signification.
Aux dernières élections européennes, le taux de
participation a été de 36% en Nouvelle-Calédonie, de 24%
à La Réunion, de 23% en Polynésie française, de 17%
en Martinique et de 14,5% en Guadeloupe.
Si l'enjeu national venait à
disparaître, au profit de circonscriptions ne correspondant à
aucune réalité humaine, la participation des départements
et territoires d'Outre-mer n'aurait vraisemblablement plus qu'un
caractère purement formel.
En outre, le Conseil constitutionnel pourrait censurer la création de
telles circonscriptions ad hoc.
4. La représentation des Français établis hors de France
La représentation des Français hors de France
doit également être examinée dans l'hypothèse d'un
éclatement de la circonscription nationale. Le vote dans une
circonscription nationale unique présente pour eux l'avantage de la
simplicité.
Pour l'avenir, si la circonscription nationale disparaissait, deux solutions
pourraient être envisagées : le rattachement à l'une des
circonscriptions françaises créées dans le cadre de la
réforme du mode de scrutin ou la création d'une circonscription
spécifique. Mais cette seconde solution se heurte au faible nombre de
Français établis hors de France inscrits sur les listes
électorales (196.542 lors des élections européennes de
1994).
Dans la réflexion sur le mode de scrutin, il convient désormais
de tenir compte du fait que, dans le cadre de l'application des dispositions du
Traité sur l'Union européenne relatives à la
citoyenneté, les Français établis dans un autre pays de
l'Union européenne peuvent voter dans le pays de leur résidence
aux élections européennes. La mise en place d'une
procédure complexe pour le vote des Français établis hors
de France pourrait inciter ceux d'entre eux qui sont établis dans un
pays membre de l'Union européenne à participer aux
élections organisées dans ce pays.
5. La difficile question du cumul des mandats et des fonctions
Depuis de nombreuses années, le cumul des mandats et
des fonctions fait l'objet de critiques. Des limites ont d'ores et
déjà été apportées aux possibilités
de cumuls. Le Mouvement européen a récemment mis en place une
commission chargée de réfléchir à la réforme
du mode de scrutin aux élections européennes et
présidée par M. Jean-Claude CASANOVA (5(
*
)).
Dans le rapport publié par cette commission, les auteurs ont
demandé l'interdiction du cumul de deux mandats parlementaires ou d'un
mandat parlementaire et d'une fonction exécutive dans une
collectivité décentralisée.
L'objectif est louable. Le travail au Parlement européen
nécessite une pleine implication du parlementaire dans les travaux des
commissions et des groupes politiques et le cumul des mandats en France est
souvent considéré comme responsable d'un certain
absentéisme des députés français au sein de cette
Assemblée.
Pour autant, on peut se demander si le remède ne serait pas pire que le
mal. L'objectif de toutes les propositions de réforme du mode de scrutin
aux élections européennes est le rapprochement entre l'élu
et l'électeur.
Un tel rapprochement n'est possible que si
l'élu européen représente une réalité sur le
territoire français, s'il existe véritablement aux yeux de ses
électeurs.
On peut se demander si l'exercice du seul mandat de parlementaire
européen est susceptible de conduire à un tel rapprochement. Il
n'est pas certain qu'un changement de mode de scrutin puisse à lui seul
permettre de donner au parlementaire européen un véritable
ancrage. Même en envisageant la mise en place d'un scrutin majoritaire
uninominal, le parlementaire européen serait élu dans des
circonscriptions de près de 700.000 habitants, ce qui ne conduirait
qu'à un enracinement limité.
Dans ces conditions, ne faut-il pas reconsidérer la question du cumul
des mandats et des fonctions au regard de cette nécessité pour la
légitimité du Parlement européen que l'élu
représente quelque chose dans son pays d'origine ?
Avant l'adoption de l'Acte du 20 septembre 1976 sur l'élection des
représentants au Parlement européen au suffrage universel, ces
représentants étaient désignés par les Parlements
nationaux en leur sein. Assurément, le cumul de deux mandats
parlementaires pouvait sembler être une gageure au regard des contraintes
imposées par chacun de ces mandats, mais ce système
présentait au moins l'avantage d'envoyer au Parlement européen
des représentants bénéficiant d'un ancrage incontestable
dans la vie politique nationale. Et un tel ancrage peut seul favoriser le
développement de la légitimité d'une Assemblée par
définition très éloignée des peuples appelés
à l'élire.
La question du cumul des mandats et fonctions mérite donc une
appréciation plus nuancée que celle qui est parfois
portée. Quel serait l'intérêt de vouloir associer une
meilleure représentation des composantes du territoire national si l'on
interdisait à toutes les personnalités bénéficiant
d'un ancrage au sein de ces composantes du territoire de présenter leur
candidature au Parlement européen ?
Certes, il est nécessaire de prendre en compte le fait que le mandat de
parlementaire européen est extrêmement contraignant, compte tenu
notamment des déplacements qu'il impose. Il convient toutefois de se
demander si ces contraintes temporelles ne sont pas, partiellement au moins,
liées à un fonctionnement contestable de l'institution
elle-même, dont les activités semblent parfois illimitées.
En tout état de cause, le problème du cumul des mandats et
fonctions doit être examiné de manière très
approfondie dans le cas du mandat de parlementaire européen.
B. LES OBJECTIFS D'UNE RÉFORME
Le Parlement européen présente des
spécificités qui doivent être prises en compte dans la
définition des objectifs d'une réforme du mode de scrutin. En
l'absence de peuple européen et d'élection véritablement
européenne, les élections des représentants au Parlement
européen donnent lieu à des débats distincts dans chaque
Etat membre. Chaque Etat est doté d'un système de partis qui lui
est propre. Dans ces conditions, les élections européennes ne
peuvent avoir pour objectif de constituer une majorité destinée
à soutenir un gouvernement.
Deux dispositions des traités seulement évoquent la conception
traditionnelle du régime parlementaire, à savoir le vote
d'approbation de la Commission européenne (instauré par le
Traité de Maastricht) et la possibilité de renverser la
Commission européenne (disposition présente dans le Traité
de Rome). Cette dernière disposition n'a jamais été
utilisée avec succès.
Dans le processus décisionnel communautaire, le Parlement
européen est appelé à exercer, conjointement avec le
Conseil de l'Union européenne, le pouvoir législatif. Son
intervention peut prendre des formes variées, allant de l'avis à
la co-décision (dans ce cas, le Parlement européen dispose d'un
véritable droit de veto sur les textes qui lui sont soumis). Par
ailleurs, le Parlement européen est appelé à donner un
avis conforme sur certains textes importants et sur des accords internationaux
passés par l'Union.
En matière budgétaire, le Parlement européen dispose de
pouvoirs étendus puisqu'il décide en dernier ressort sur les
dépenses dites non obligatoires, qui représentent aujourd'hui
plus de 50% du budget communautaire.
Dans le système décisionnel communautaire, les majorités
au Parlement européen se font texte par texte après des
négociations entre délégations nationales au sein de
chaque groupe politique, puis, éventuellement, entre groupes politiques.
Il est nécessaire de prendre en compte cette situation dans une
réflexion sur la réforme du mode de scrutin.
La réforme éventuelle du mode de scrutin français pour
les élections européennes devrait avoir deux objectifs essentiels
:
-
améliorer la défense des intérêts de la France
au sein du Parlement européen ;
- donner davantage de légitimité à la construction
européenne.
La réalisation de ces objectifs implique un ancrage de l'élu
européen dans la vie politique nationale car le premier reproche
formulé à l'encontre du Parlement européen est son
éloignement des réalités du terrain. Les parlementaires
européens sont trop éloignés des citoyens, n'ont, dans le
système actuel, pas de compte à rendre et sont, en quelque sorte,
en apesanteur. Il est incontestable qu'une meilleure assise des élus
renforcerait la défense des intérêts français au
sein du Parlement européen, même si les parlementaires ont d'ores
et déjà de nombreux contacts avec des organisations
socio-professionnelles.
En revanche, votre rapporteur n'est pas persuadé que la défense
des intérêts français passe nécessairement par le
regroupement des élus au sein des deux grands groupes du Parlement
européen, comme cela est parfois affirmé.
De fait, deux grands groupes dominent le Parlement européen. Cela
signifie-t-il que seule l'appartenance à l'un de ces deux groupes permet
de jouer un rôle au sein de l'institution ? Votre rapporteur n'en est pas
convaincu. L'acceptation d'un tel postulat conduirait inévitablement
à défendre le scrutin majoritaire, qui seul permet une
amplification des mouvements du corps électoral.
Il est clair que les travaillistes britanniques ont actuellement une influence
considérable au sein du groupe du Parti des socialistes
européens, mais cela tient d'abord à leur nombre (63 sur un total
de 215 membres) et il est probable que leur influence ne serait guère
moindre s'ils avaient constitué un groupe autonome, comme l'avaient
d'ailleurs fait les conservateurs lorsque leurs représentants
bénéficiaient d'un nombre de sièges comparable.
En revanche, peut-on réellement penser que la délégation
française (12 députés) au sein du groupe PPE (Parti
populaire européen), qui comprend 173 membres, pèserait bien
davantage sur les décisions du Parlement européen si elle
était renforcée par les 17 élus français
siègeant au groupe UPE (Union pour l'Europe) ?
Votre rapporteur s'attachera donc à examiner les possibilités de
modification du mode de scrutin français au regard des objectifs
précédemment énoncés, tout en restant attentif
à la nécessité d'éviter la mise en place d'un
système qui, dans un but louable de rapprochement entre l'élu et
l'électeur, conduirait en fait à rendre plus difficile la
perception des enjeux du scrutin et conduirait mécaniquement à
une participation électorale plus faible encore qu'aujourd'hui.
III. LES HYPOTHÈSES ALTERNATIVES
Quatre hypothèses paraissent envisageables pour remplacer le mode de scrutin actuel : le scrutin majoritaire, le scrutin proportionnel mixte régional et national, le scrutin purement régional et le scrutin proportionnel dans le cadre de quelques grandes circonscriptions.
A. LE SCRUTIN MAJORITAIRE
La modification la plus radicale du mode de scrutin actuel
consisterait à introduire le scrutin majoritaire tel qu'il est
pratiqué en Grande-Bretagne depuis l'adhésion de ce pays à
la Communauté européenne. Dans le cadre actuel, le scrutin ne
pourrait comporter qu'un tour, dans la mesure où l'Acte de 1976 qui
mentionne le scrutin à deux tours comme une possibilité, enferme
la procédure électorale dans une période comprise entre le
jeudi et le dimanche de la même semaine. La mise en oeuvre d'un scrutin
à deux tours impliquerait donc une modification de la décision du
Conseil de 1976.
Ce mode de scrutin impliquerait le découpage du territoire
français en 87 circonscriptions qui ne pourraient correspondre,
même de manière approximative, au cadre départemental,
compte tenu des déséquilibres démographiques entre
départements. En revanche, les circonscriptions pourraient être
obtenues par regroupement de circonscriptions législatives. Un tel
découpage conduirait à l'apparition de circonscriptions
entièrement nouvelles. L'une des principales difficultés d'un tel
mode de scrutin est qu'il faudrait reprendre entièrement le
découpage après chaque élargissement de l'Union
européenne dans la mesure où le nombre de représentants
français serait appelé à diminuer.
Naturellement, ce mode de scrutin est celui qui rapprocherait le plus
l'élu de l'électeur. Toutefois, dans le cadre européen, ce
rapprochement resterait limité, chaque parlementaire étant
élu en moyenne par 450.000 personnes dans des circonscriptions
très vastes. Par ailleurs, on a vu que la vertu traditionnelle du
scrutin majoritaire - la constitution d'une majorité large -
présentait peu d'intérêt dans le cadre du Parlement
européen.
En réalité, le véritable
progrès qu'entraînerait l'adoption d'un tel mode de scrutin serait
dans la possibilité offerte aux électeurs de sanctionner le
parlementaire au terme de son mandat.
L'élu européen
deviendrait ainsi véritablement responsable devant les citoyens. Compte
tenu de la distance qui sépare le Parlement européen des
citoyens, seul le scrutin majoritaire serait à même de faire
naître une telle responsabilité.
Cependant, outre les difficultés pratiques déjà
évoquées d'une telle solution, ce mode de scrutin ne permet pas
la représentation de l'ensemble des forces politiques du pays, alors
même que le fonctionnement du Parlement européen ne
nécessite pas l'apparition d'une ample majorité. Si même
une telle majorité était souhaitable, elle serait
problématique à réaliser, les élections
européennes conduisant à la juxtaposition de quinze débats
nationaux largement dépendants de la situation intérieure de
chaque pays.
Par ailleurs, l'adoption d'un tel mode de scrutin irait à l'encontre de
la mise en oeuvre d'une procédure électorale uniforme, quatorze
Etats membres ayant pour l'heure mis en oeuvre un scrutin proportionnel. Il est
toutefois vrai que, indépendamment de la réforme
éventuelle du mode de scrutin français, la réalisation
d'une telle procédure électorale uniforme paraît
aujourd'hui bien hypothétique.
B. LE SCRUTIN PROPORTIONNEL MIXTE RÉGIONAL ET NATIONAL
Il s'agirait de mettre en place un système attribuant
une partie des sièges dans le cadre régional et une autre partie
dans le cadre national.
· En 1988, MM. Adrien ZELLER, Edmond ALPHANDERY et 45 autres
députés ont déposé une proposition de loi (6(
*
)) visant à
attribuer deux tiers des sièges dans
le cadre des régions et un tiers des sièges dans le cadre du
système actuel de liste nationale (cette proposition a été
déposée avant que le nombre de parlementaires français
passe de 81 à 87). L'objectif de cette proposition de loi était
de rapprocher les citoyens de l'Europe tout en leur permettant
" d'identifier à côté de leurs
préoccupations plus quotidiennes, les engagements nationaux ".
Dans le système proposé par ces députés, certaines
régions ne devaient bénéficier que d'un siège qui
devait donc être pourvu au scrutin uninominal majoritaire. Les citoyens
devaient être appelés à voter deux fois : une fois pour une
liste nationale et une fois pour une liste régionale. Le seuil de 5%
aurait été supprimé, le mode de scrutin devant permettre
à lui seul de limiter le phénomène de dispersion des voix.
· Plus récemment, la commission mise en place par le
Mouvement européen pour étudier la réforme du mode de
scrutin a étudié une hypothèse similaire, sans toutefois
la retenir. La possibilité envisagée conduirait à
attribuer 70 sièges dans le cadre régional et 14 sièges au
niveau national (3 sièges étant réservés
à l'Outre-mer). Le mode de scrutin serait la représentation
proportionnelle au plus fort reste.
Dans ce système, les électeurs ne voteraient qu'une fois, pour
une liste régionale. Les sièges nationaux seraient
répartis de la manière suivante :
- établissement du nombre de voix obtenues sur l'ensemble du territoire
national pour les listes portant la même étiquette et ayant
passé entre elles un accord d' " apparentement " ;
- calcul pour chaque ensemble de listes apparentées du nombre moyen de
voix par élu ;
- attribution des 14 sièges successivement à chacune des listes
qui a la plus forte moyenne de voix par député.
Quelle que soit l'hypothèse retenue, ce mode de scrutin permet de
compenser les effets majoritaires induits par l'existence de circonscriptions
grâce à l'attribution de sièges au niveau national.
Surtout, il permet le maintien d'un débat national sur l'Europe à
l'occasion des élections européennes.
Cependant, la complexité de ce système totalement
étranger aux habitudes françaises conduit à s'interroger
sur les effets qu'il pourrait avoir sur une participation électorale
déjà peu élevée.
Par ailleurs, il n'est pas
certain que la mise en place de deux types d'élus au Parlement
européen soit conforme à la Constitution.
C. LE SCRUTIN RÉGIONAL
Le scrutin pourrait se dérouler intégralement
dans le cadre des 22 régions actuelles. 84 sièges seraient
répartis entre les régions en fonction de la démographie,
trois revenant à l'Outre-mer.
· En 1992, MM. Alain LAMASSOURE et Charles MILLON ont
déposé une proposition de loi visant à mettre en oeuvre ce
mode de scrutin (7(
*
)).
· La commission mise en place par le Mouvement européen s'est
récemment prononcée, après avoir examiné plusieurs
autres solutions, pour ce mode de scrutin dans le cadre des 22 régions
métropolitaines, trois sièges étant réservés
à l'Outre-mer.
Une fois le principe du scrutin proportionnel dans le cadre régional
retenu, diverses modalités peuvent être envisagées. La
répartition des restes peut être faite à la plus forte
moyenne ou au plus fort reste selon qu'on souhaite éviter la dispersion
ou favoriser les petites listes.
Dans leur proposition de loi, MM. LAMASSOURE et MILLON ont
suggéré que, dans les circonscriptions ayant plusieurs
représentants à élire, on mette en place le vote
préférentiel, c'est-à-dire la possibilité pour
l'électeur de modifier l'ordre des candidats sur les listes qui lui sont
proposées.
Ce système permettrait évidemment une plus grande
personnalisation du scrutin et renforcerait le rôle de l'électeur.
Son principal défaut est de déplacer l'enjeu de l'élection
à l'intérieur de chaque liste.
Dans le système défendu par la commission du Mouvement
européen, la répartition des sièges se ferait de la
manière suivante :
Régions |
Population |
Nombre de sièges |
Base démographique par siège |
Ile-de-France |
10.660.554 |
16 |
666.284 |
Rhône-Alpes |
5.350.701 |
8 |
668.837 |
Provence-Côte d'Azur |
4.257.907 |
6 |
709.651 |
Nord-Pas-de-Calais |
3.965.058 |
6 |
660.843 |
Pays de Loire |
3.059.112 |
5 |
611.822 |
Aquitaine |
2.795.830 |
4 |
698.957 |
Bretagne |
2.795.638 |
4 |
698.909 |
Midi Pyrénées |
2.430.663 |
4 |
607.665 |
Centre |
2.371.036 |
3 |
790.345 |
Lorraine |
2.305.726 |
3 |
768.575 |
Languedoc-Roussillon |
2.114.985 |
3 |
704.995 |
Picardie |
1.810.687 |
3 |
603.562 |
Haute-Normandie |
1.737.247 |
3 |
579.082 |
Alsace |
1.624.372 |
2 |
812.186 |
Bourgogne |
1.609.153 |
2 |
804.576 |
Poitou-Charentes |
1.595.081 |
2 |
797.540 |
Basse-Normandie |
1.391.318 |
2 |
695.659 |
Champagne-Ardennes |
1.347.848 |
2 |
673.924 |
Auvergne |
1.321.214 |
2 |
660.607 |
Franche-Comté |
1.097.276 |
2 |
548.638 |
Limousin |
722.850 |
1 |
722.850 |
Corse |
249.736 |
1 |
249.736 |
Population métropolitaine totale |
56.613.992 |
|
|
Source :
" Réformer le mode de scrutin
européen ",
rapport de la commission présidée par
JC. CASANOVA, Mouvement européen - France, La lettre des
Européens, hors série n° 1, juin 1996
La première réflexion qui s'impose à la lecture d'un tel
tableau est que le scrutin proportionnel serait très sérieusement
mis à mal dans un tel système. Quelle signification peut bien
avoir la représentation proportionnelle dans une circonscription
où deux sièges seulement doivent être pourvus ? A
titre de comparaison, pour les élections sénatoriales, le scrutin
est proportionnel dans les départements où cinq sièges au
moins sont à pourvoir.
Certes, on peut envisager certains correctifs qui conduiraient à limiter
le nombre de régions qui se verraient attribuer deux sièges, mais
le principe de la représentation proportionnelle serait néanmoins
remis en cause. Deux régions seraient même soumises au scrutin
majoritaire puisqu'elles ne bénéficieraient que d'un
siège. En outre, ce phénomène devrait être
accentué à l'occasion des futurs élargissements de l'Union
européenne, qui conduiront nécessairement à une
réduction du nombre de représentants français au Parlement
européen.
Par ailleurs, ce mode de scrutin risque de faire disparaître les enjeux
proprement européens de l'élection au profit de débats sur
la défense de telle ou telle région auprès des
institutions européennes.
Les parlementaires européens ne
cesseront-ils pas d'être les représentants de la France pour
devenir ceux de la Bretagne, de la Corse ou du Limousin ?
D'ores et
déjà, certaines régions d'Europe ont ouvert des
représentations à Bruxelles afin de défendre directement
leurs intérêts sur certains dossiers, par exemple les fonds
structurels. On peut se demander s'il est souhaitable que ce
phénomène soit accentué par la réforme du mode de
scrutin.
Malgré les défauts immédiatement perceptibles de ce mode
de scrutin, il convient de s'interroger sur sa pertinence en ce qui concerne le
rapprochement entre l'électeur et l'élu, souvent
évoqué pour justifier la réforme du mode de scrutin.
L'élection dans le cadre national conduit à laisser aux organes
dirigeants des partis politiques une grande marge de manoeuvre pour la
constitution des listes, au risque de voir privilégier des
critères sans rapport avec le mandat à exercer. On peut toutefois
se demander si la régionalisation du scrutin améliorerait
sensiblement la situation dans ce domaine en l'absence de véritable
possibilité de sanction de l'élu par l'électeur. Ne
risque-t-on pas de voir simplement les organes régionaux des partis
prendre le relais des organes nationaux ?
Dans son rapport, la commission mise en place par le Mouvement européen
et présidée par M. Jean-Claude CASANOVA fait valoir que
" les candidats devront nécessairement avoir un ancrage
territorial et bénéficier, indépendamment de leur
appartenance politique au plan national, d'une certaine notoriété
au plan local, ou du moins régional. "
Il est clair que cet
ancrage devrait être le principal apport d'un tel mode de scrutin.
Cependant, la même commission recommande d'interdire strictement le cumul
d'un mandat de parlementaire européen et d'un autre mandat parlementaire
ou d'une fonction exécutive dans une collectivité territoriale.
Dans ces conditions, ne peut-on craindre que l'objectif d'ancrage territorial
et de notoriété de l'élu européen ne soit
réduit à peu de choses ? Il s'agit de l'une des
difficultés essentielles que pose le mandat de parlementaire
européen.
L'organisation du Parlement européen est aujourd'hui adaptée
à la situation de parlementaires élus sur liste nationale et
n'ayant pas de compte à rendre à leurs électeurs. Ainsi,
les parlementaires sont invités à participer à de
multiples réunions de groupes et de commissions, en plus des sessions
plénières qui, elles-mêmes, tendent à se multiplier.
Le calendrier des travaux du Parlement européen est conçu de
telle manière que la participation à ces travaux occupe à
temps plein un parlementaire consciencieux. Aussi,
la proximité de
l'électeur, source de légitimité, paraît-elle
incompatible avec la participation à la vie d'une institution dont les
activités semblent s'étendre sans répit.
Enfin, il convient de signaler que le seul Etat comparable par la taille
à la France et ayant opté pour un découpage en
circonscriptions - l'Italie - a choisi de créer cinq
circonscriptions seulement (8(
*
)).
En définitive, le choix d'un mode de scrutin dans le cadre des 22
régions actuelles présente de lourds inconvénients pour
qui est attaché à l'idée que les élus
européens sont les représentants de la France tout entière
au Parlement européen.
Il convient désormais de s'interroger sur la possibilité de
créer en France quelques grandes circonscriptions pour les
élections européennes, qui permettraient peut-être de
limiter les inconvénients du mode de scrutin régional.
D. LE SCRUTIN PROPORTIONNEL DANS DE GRANDES CIRCONSCRIPTIONS
Pour limiter les inconvénients
précédemment évoqués du mode de scrutin dans le
cadre des 22 régions actuelles, on envisage parfois le découpage
de la France en grandes circonscriptions électorales, dont le nombre
pourrait être compris entre cinq et dix, et regroupant plusieurs
régions administratives. Le scrutin demeurerait véritablement
proportionnel, les électeurs devant élire plus d'une dizaine de
représentants dans chaque circonscription. L'écueil de la
résurgence du débat sur l'Europe des régions serait
fortement atténué dans ce cadre. La représentation des
courants minoritaires continuerait en outre à être assurée.
En fait, le principal défaut de ce système est de n'avoir
aucun avantage par rapport au mode de scrutin actuel, tout au moins au regard
des objectifs évoqués par votre rapporteur : servir les
intérêts de la France au Parlement européen, donner
davantage de légitimité à la construction
européenne.
Le rapprochement entre l'élu et l'électeur ne serait aucunement
assuré, les listes continueraient d'être constituées selon
les mêmes principes qu'actuellement. Si, par exemple, le territoire
métropolitain était divisé en huit circonscriptions,
chacune d'entre elles comprendrait environ sept millions d'habitants,
chargés d'élire une dizaine de députés
européens. L'intérêt d'une telle évolution en termes
de responsabilisation des élus paraît donc limité. En
revanche, le débat national sur l'Europe que permet le mode de scrutin
actuel pourrait être altéré par ce découpage du
territoire.
En définitive, on peut se demander s'il est vraiment indispensable de
modifier le mode de scrutin au profit d'un système aussi semblable au
cadre actuel.
Au terme de cet examen, au cours duquel votre rapporteur a souhaité
évoquer davantage les principes que les modalités techniques, il
apparaît qu'aucun mode de scrutin ne paraît présenter
d'avantage décisif pour atteindre les objectifs évoqués
par votre rapporteur. Le mode de scrutin actuel n'est pas satisfaisant, mais
chacune des hypothèses alternatives présente des défauts
importants ou n'apporte aucune véritable amélioration à la
situation présente.
L'élection européenne et le Parlement européen
présentent des spécificités telles qu'aucun mode de
scrutin ne semble à lui seul en mesure de remédier à la
faiblesse persistante de l'institution européenne élue au
suffrage universel : sa légitimité encore fragile.
Neuf Etats
de l'Union européenne sur quinze ont opté pour le scrutin dans le
cadre d'une circonscription nationale unique et semblent se satisfaire d'un tel
système. La légitimation du Parlement européen et de ses
membres ne passe-t-elle pas aujourd'hui davantage par une évolution de
son organisation, de son fonctionnement, plus que par une réforme du
système électoral français ?
Depuis de nombreuses années, votre rapporteur est convaincu que
l'élection au suffrage universel des parlementaires européens
aurait dû être accompagnée de la rédaction d'une
" loi fondamentale " définissant les compétences
exactes du Parlement européen, précisant clairement ce qu'il peut
faire et ce qu'il ne peut pas faire.
Faute d'un tel texte, les citoyens ne sont guère à même de
percevoir l'influence que peut avoir leur vote à l'occasion des
élections européennes, pour lesquelles l'enjeu n'est pas de
constituer une majorité de gouvernement.
Au cours des dernières décennies, le Parlement européen a
eu tendance à étendre constamment le champ de ses
activités, brouillant par là-même l'image qu'il donnait de
lui-même.
Ce débordement s'est traduit ces dernières années par la
multiplication des sessions additionnelles à Bruxelles, qui s'ajoutent
aux sessions tenues à Strasbourg. Il a également pris la forme
d'une multitude de résolutions dans les domaines les plus variés,
en l'absence de toute compétence inscrite dans leTraité. Pour
prendre un exemple récent, au cours de sa session de septembre 1996, le
Parlement européen a notamment adopté des résolutions sur
la situation à Chypre, au Burundi et en Indonésie, sur
l'incarcération en Russie de M. Alexander NIKITINE, sur les sanctions
contre les homosexuels en Roumanie et sur l'expulsion des immigrés
illégaux en Europe, tous sujets fort intéressants, mais sur
lesquels le Parlement européen ne dispose d'aucune compétence
dans le Traité sur l'Union européenne.
Dans ces conditions, on peut se demander si la difficulté de combiner
un enracinement local avec un mandat de parlementaire européen ne
provient pas de cette incertitude qui entoure le champ des compétences
du Parlement européen.
Le renforcement de la légitimité de l'institution parlementaire
européenne pourrait donc passer par une définition plus claire de
ses compétences, qui donnerait une visibilité plus grande
à ses travaux. Il s'agit d'un sujet qui dépasse le cadre de ce
rapport et mériterait une analyse approfondie. Quoi qu'il en soit, la
modification du mode de scrutin aux élections européennes,
malgré son caractère intellectuellement séduisant, ne
semble pas à même d'apporter un progrès significatif dans
le renforcement de la légitimité du Parlement européen.
EXAMEN DU RAPPORT
La Délégation a examiné le présent
rapport au cours de sa réunion du 4 décembre 1996.
Au cours du débat qui a suivi l'exposé du rapporteur,
M.
Jacques Genton, président,
a rappelé qu'à l'origine,
les membres de l'Assemblée parlementaire européenne avaient pour
vocation de représenter l'entité européenne et non chacun
des Etats membres et que, pour cette raison, les Etats avaient tout fait pour
limiter au maximum les compétences de cette Assemblée.
M. Pierre Fauchon
a tout d'abord évoqué le cumul des
mandats et des fonctions et a fait valoir qu'il paraissait impossible
aujourd'hui d'exercer deux mandats parlementaires. Il a revanche estimé
qu'un enracinement local était nécessaire, tant aux
parlementaires nationaux qu'aux parlementaires européens, et en a conclu
que le cumul d'un mandat parlementaire et d'un mandat ou d'une fonction locale
devait être autorisé. A propos du mode de scrutin, M. Pierre
Fauchon s'est déclaré en accord avec le rapporteur pour constater
que les possibilités envisagées pour modifier le mode de scrutin
actuel ne rapprocheraient pas l'élu des électeurs, à moins
d'envisager un mode de scrutin uninominal majoritaire. Soulignant qu'il
faudrait beaucoup de courage pour aller vers un tel système, il a
souhaité que le rapport, sans demander la mise en oeuvre d'un tel mode
de scrutin, souligne que seule cette réforme aurait une véritable
signification. Il a estimé qu'à défaut d'une telle
évolution, le mode de scrutin actuel était probablement le moins
mauvais, permettant en particulier la mise en place de listes conduites par des
personnalités politiques de premier plan. M. Pierre Fauchon a enfin
déclaré approuver les propos du rapporteur relatifs à la
mise en place d'une loi fondamentale. Il a fait valoir qu'il était de
plus en plus indispensable de mettre en oeuvre une Constitution
européenne et que ce problème ne pourrait être
indéfiniment ignoré.
M. Paul Masson
a rappelé que les signataires des traités
fondateurs des Communautés européennes se méfiaient
profondément des Parlements et souhaitaient avant tout construire un
système efficace, tout en lui donnant une touche démocratique. Il
a observé que cette manière de faire n'était plus possible
aujourd'hui, la construction communautaire souffrant avant tout d'un
déficit de légitimité. Approuvant les propos du
rapporteur, il a observé qu'il n'existait aucun Parlement au monde, en
dehors du Parlement européen, ne disposant d'aucune loi fondamentale
pour définir l'étendue de ses compétences. Il a
estimé qu'on ne pouvait attendre aucune amélioration d'une
réforme du mode de scrutin et qu'une telle réforme serait
très mal perçue par l'opinion à un moment où les
difficultés de la France ne font pas de ce problème un sujet
prioritaire.
M. Daniel Millaud
a évoqué l'incohérence de la
situation dans laquelle se trouvent actuellement les territoires d'Outre-mer au
regard du droit communautaire. Les territoires d'Outre-mer n'appartiennent pas
à la Communauté européenne en vertu du Traité de
Rome, mais leurs populations votent néanmoins aux élections
européennes en vertu du principe d'indivisibilité de la
République inscrit dans la Constitution. De même, le statut de la
Polynésie française confère au territoire la
compétence d'autoriser ou non l'entrée des étrangers en
Polynésie, mais cette compétence ne s'applique pas aux
ressortissants communautaires en vertu du principe de non-discrimination qui
sous-tend l'ensemble du droit communautaire. M. Daniel Millaud a estimé
que la situation actuelle n'était plus acceptable, que certains
partenaires de la France avaient trouvé des solutions originales pour
leurs territoires respectifs, et qu'il convenait de redéfinir les
relations entre la Communauté européenne et les territoires
d'Outre-mer dans le respect de l'organisation particulière de ces
territoires prévue par l'article 74 de la Constitution.
M. Pierre Lagourgue
a fait valoir que le mode de scrutin actuel ne
permettait que très rarement et de manière marginale la
représentation des départements d'Outre-mer au Parlement
européen. Rappelant que les départements d'Outre-mer comptent
presque deux millions d'habitants, il a souhaité que, quelle que soit la
solution retenue, on réfléchisse au moyen d'améliorer la
représentation de ces départements au Parlement européen.
Il a enfin observé que, dans cette perspective, le mode de scrutin
uninominal majoritaire serait probablement le meilleur.
M. Emmanuel Hamel
a estimé que le mode de scrutin actuel
était le moins mauvais et qu'il n'était pas souhaitable de le
modifier.
En réponse aux orateurs,
M. Christian de La Malène
a tout
d'abord précisé qu'il ne plaidait pas pour le cumul de mandats
parlementaires, mais qu'il estimait nécessaire que les parlementaires
européens bénéficient d'un enracinement local. A propos du
mode de scrutin, il a suggéré que la délégation,
sans proposer un tel mode de scrutin, souligne les avantages du mode de scrutin
uninominal majoritaire. Evoquant la question de la loi fondamentale
définissant les compétences du Parlement européen, il a
rappelé qu'il défendait cette idée depuis longtemps, mais
qu'elle impliquait un débat difficile entre ceux qui souhaitent que le
Parlement européen soit doté de compétences très
étendues et ceux qui plaident pour des compétences plus
limitées. Il a observé que le Parlement européen
lui-même s'accommodait très bien de la situation actuelle,
craignant que ses compétences ne soient figées dès lors
qu'elles seraient inscrites dans une loi fondamentale.
M. Christian de La Malène
a ensuite rappelé que les
départements d'Outre-mer, du fait de leur statut de département
et de leur ultra-périphicité, bénéficiaient
d'avantages importants, mais subissaient également certaines contraintes
et que des améliorations étaient sans doute possibles. Il a enfin
estimé que les territoires d'Outre-mer bénéficiaient bel
et bien d'une organisation particulière conformément à
l'article 74 de la Constitution, même si leurs rapports avec la
Communauté européenne pouvaient ne pas paraître
satisfaisants.
La délégation a adopté à l'unanimité le
rapport d'information ainsi que les conclusions résultant du
débat.
CONCLUSIONS
La Délégation,
-
constate qu'aucun mode de scrutin envisageable pour les élections
européennes n'est susceptible d'apporter un remède significatif
aux insuffisances découlant du mode de scrutin actuel qui
présente l'avantage de permettre un débat national sur les
questions européennes ;
- estime que, si une réforme devait néanmoins voir le jour, le
scrutin uninominal majoritaire, malgré les défauts qui lui sont
inhérents, serait seul à même de conduire au rapprochement
entre l'électeur et l'élu nécessaire à une
meilleure expression de la démocratie ;
- considère que la réforme du mode de scrutin ne peut à
elle seule conforter la légitimité et la place du Parlement
européen au sein des institutions communautaires et souligne, à
cet effet, la nécessité d'une loi fondamentale définissant
clairement les compétences du Parlement européen.
ENTRETIENS DU RAPPORTEUR
-
M. Klaus HÄNSCH
, président du Parlement
européen ;
- Mme Pervenche BERES
, député européen, groupe du
Parti des Socialistes Européens (P.S.E.) ;
- M. Jean-Louis BOURLANGES
, député européen, groupe
du Parti Populaire Européen (P.P.E.) ;
- Mme Nicole FONTAINE
, vice-présidente du Parlement
européen, groupe du P.P.E. ;
- M. Jean-Claude PASTY
, président du groupe de l'Union pour
l'Europe au Parlement européen (U.P.E.) ;
- M. René PIQUET
, président du groupe de la Gauche
Unitaire Européenne (G.U.E.) ;
- M. Konrad Karl SCHWAIGER
(Allemagne), député
européen, groupe du P.P.E. ;
- M. Tom SPENCER
(R-U), député européen, groupe du
P.P.E. ;
- M. Yves VERWAERDE
, député européen, groupe du
P.P.E.
(1) Proposition de loi
tendant à rapprocher la
Communauté européenne des citoyens
de MM. Adrien ZELLER,
Edmond ALPHANDERY et plusieurs de leurs collègues, n° 499, 21
décembre 1988.
Proposition de loi
tendant à modifier le mode de scrutin des
représentants de la France au Parlement européen
de MM. Alain
LAMASSOURE et Charles MILLON, n° 3184, 17 décembre 1992.
(2) Bulletin des commissions du Sénat, réunion du mardi 30 avril
1996, p. 3841.
(3) Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, 1986
(4) JO Débats Assemblée nationale, 1
ère
séance du 21 juin 1977, p. 3988
(5) Réformer le mode de scrutin européen, rapport de la
commission présidée par Jean-Claude CASANOVA, Mouvement
européen - France, La lettre des Européens, hors série
n° 1, juin 1996.
(6) Proposition de loi tendant à rapprocher la Communauté
européenne des citoyens de MM. Adrien ZELLER, Edmond ALPHANDERY et
plusieurs de leurs collègues, n° 499, 21 décembre 1988.
(7) Proposition de loi tendant à modifier le mode de scrutin des
représentants de la France au Parlement européen, n° 3184,
17 décembre 1992.
(8) En Allemagne, le choix est laissé aux partis entre liste nationale
et liste au niveau des Länder, qui sont au nombre de 17. Seule la CDU-CSU
présente des listes au niveau des Länder.