B. LES CONSÉQUENCES TOUJOURS ACTUELLES DU CONFLIT LIBANAIS : PLUS DE 400 000 DÉPLACÉS ET 750 000 ÉMIGRÉS.
Par tradition, le Liban est un pays d'émigration dans
la mesure où la diaspora libanaise a pu être estimée
à quelque 15 millions de personnes.
La guerre civile a entraîné une nouvelle vague
d'émigrés, notamment vers l'Amérique du Nord comme le
montre le tableau suivant :
Émigration libanaise entre 1975 et 1994
Pays |
Émigres |
% |
Etats-Unis |
144 342 |
19,8 |
Australie |
109 350 |
15 |
Canada |
107 892 |
14,8 |
France |
91 854 |
12,6 |
Autres |
275 562
|
37,8
|
Total |
729 000 |
100 |
Pour l'heure, on n'assiste pas à un retour significatif
des Libanais, sauf peut-être des Chiites qui reviennent au Liban
après avoir fait fortune en Afrique.
La question des déplacés est l'une des questions les plus graves
pour le chef du Gouvernement qui a d'ailleurs confié le ministère
des déplacés à M. Walid Joumblatt. A l'heure
actuelle, ce sont moins de 20 % de déplacés qui ont pu
retrouver leur domicile antérieur. L'appel final du Synode pour le Liban
qui s'est tenu à Rome en novembre 1995 a d'ailleurs mis l'accent sur la
nécessité de donner un nouvel élan à la politique
de retour. Il convient par ailleurs de signaler que le nombre total des
personnes occupant illégalement un logement s'élève
à 266 480.
Sans que l'on puisse parler de purification ethnique comme dans
l' " ex-Yougoslavie ", les communautés se sont
regroupées de fait sur des parties du territoire bien
déterminées, à telle enseigne qu'on a pu parler de la
" cantonnisation " du Liban.
Pour prendre un seul exemple, il ne reste après septembre 1983 plus de
chrétiens dans la région montagneuse du Chouf.
Par la nécessité des choses, le déplacement des
populations a provoqué une urbanisation sauvage qui, selon le maire de
Tripoli, a constitué le signe le plus apparent de la mise entre
parenthèses de l'Etat.
A l'instar de l'armée qui a éclaté en fractions
communautaires, l'Etat s'est effondré à partir de 1975.
Aucune autorité constituée n'a pu s'opposer à des
constructions illicites, notamment aux abords de l'aéroport
international de Beyrouth, constructions que le Gouvernement tente aujourd'hui
de faire détruire.
De même, le délitement de l'Etat a permis la multiplication
anarchique des organes de radio et de télévision. Là
encore, le Gouvernement s'efforce de réorganiser l'espace audiovisuel
par la création d'un organe semblable au Conseil Supérieur
Audiovisuel.
Tous ces efforts tendant à la reconstitution de l'Etat s'inscrivent dans
le droit fil de l'accord de Taëf qui, comme pour tourner la page du
conflit libanais, a institué la Deuxième République
libanaise.