C. IL EST URGENT DE TROUVER UNE SOLUTION AUX ANOMALIES DU PLAN CADASTRAL
En France, il existe deux représentations du parcellaire cadastral : d'une part le plan cadastral géré par la direction générale des finances publiques (DGFIP) pour ses missions foncières et fiscales et, d'autre part, la base de données (BD) parcellaire qui constitue l'une des composantes du référentiel à grande échelle (RGE) de l'IGN 56 ( * ) . Cette situation est insatisfaisante , non seulement car elle génère des doublons au détriment du bon usage des deniers publics mais aussi car les anomalies du plan cadastral occasionnent de graves difficultés dans la mise en oeuvre des politiques publiques territoriales.
En effet, depuis la période napoléonienne, le plan cadastral français se compose de feuilles indépendantes réalisées chacune selon une géométrie locale qui lui est propre. Cette configuration n'est pas un obstacle à la gestion foncière et fiscale assurée par la direction générale des finances publiques (DGFIP) en revanche, elle est une contrainte forte pour de nombreux autres usages essentiels dans la mesure où le plan cadastral n'est pas superposable avec les autres cartes qui décrivent le territoire. Cette situation pose de graves difficultés aux collectivités locales , en particulier pour des enjeux aussi importants que la prévention des risques . Ainsi, à titre d'exemple, pour établir leurs plans de prévention des risques (PPR), les collectivités doivent nécessairement croiser les cartes de simulation des risques avec le plan cadastral pour déterminer précisément les propriétés exposées. Faute de pouvoir superposer les deux cartes, les collectivités sont dans l'obligation de corriger comme elles le peuvent les feuilles cadastrales. Cette situation insatisfaisante peut conduire à fausser la cartographie des risques. Le même problème se pose en matière de politique du logement et notamment pour l'élaboration des plans locaux d'urbanisme (PLU).
Ces difficultés ne sont pas propres à notre pays mais, pour les résoudre, l'IGN fait valoir que tous les pays d'Europe, à l'exception notable de la France, ont d'ores et déjà réaménagé leur plan cadastral à l'occasion de sa numérisation pour constituer une base nationale dont la géométrie est continue sur l'ensemble du territoire, permettant ainsi le croisement de celle-ci avec toutes autres données représentées sous forme cartographique. Pour y parvenir, certains pays ont décidé de rapprocher les services de gestion du cadastre avec leur institut géographique national.
La représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU)
Le projet de RPCU consiste à réconcilier le plan cadastral de la DGIP avec la base de données (BD) parcellaire de l'IGN et, plus généralement, le corriger pour qu'il soit juste et puisse être superposé avec les autres représentations cartographiques du territoire. En 2014, la DGFIP, l'IGN et le ministère de l'écologie ont signé une convention visant à constituer une nouvelle représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU). Co-produite par l'IGN et la DGFIP, la RPCU a vocation à présenter un géoréférencement exacte et continu sur tout le territoire et, ainsi, à pouvoir se superposer avec l'ensemble des cartographies utilisées dans le domaine de l'information géographique.
La RPCU a vocation à être produite et déployée progressivement, département par département. En 2015, une première expérimentation a été conduite sur les départements de l'Île-et-Vilaine et du Loiret. Les contrôles de qualité ont identifié une anomalie structurante induite par le traitement des raccords entres les feuilles du plan cadastral ainsi que d'autres anomalies plus ponctuelles. Suite à ces constatations, la production de la RPCU a été suspendue en mai 2016.
Après la mise au point d'un nouveau process technique, les travaux ont été relancés en septembre 2017. Une phase de pré-généralisation a démarré en 2018. À ce jour, la RPCU est devenue le plan cadastral des départements du Val-de-Marne, de l'Île-et-Vilaine, du Loiret, des Hauts-de-Seine et de la Loire Atlantique.
En 2022, l'IGN a développé un nouvel outil de production baptisé RPCU V2 en cours d'expérimentation dans le département du Morbihan.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses de la DGFIP et de l'IGN au questionnaire du rapporteur spécial
En France, à partir de 2014 une collaboration entre l'IGN et la DGFIP a été lancée pour constituer une représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU) . Ce projet en co-production, prévu à l'origine pour être achevé en sept ans, a connu de graves difficultés et des retards très significatifs. En 2016 le projet a été suspendu avant d'être relancé en 2017 sur la base d'une nouvelle méthode. Cette année un nouvel outil de production dit « RPCU V2 » est en phase d'expérimentation. Promise et attendue depuis si longtemps, la RPCU apparaît plus que jamais « en sursis ». Nombreux sont ceux qui se demandent si elle verra le jour. Certains acteurs proposent d'abandonner purement et simplement ce projet. D'autres craignent que le déploiement s'étende sur dix ans voire plus. Pendant ce temps les collectivités s'impatientent et réclament à juste titre de la visibilité. À l'heure où les dérèglements climatiques rendent les politiques de prévisions des risques toujours plus critiques, il n'est pas acceptable de laisser ainsi les collectivités dans l'expectative .
Le rapporteur spécial insiste sur l'urgente nécessité de trouver une solution en faisant aboutir rapidement, et selon un calendrier prévisionnel déterminé et réaliste, le projet de représentation parcellaire cadastrale unique (RPCU) ou, à défaut en développant une alternative permettant de satisfaire les attentes fortes des collectivités locales.
* 56 Depuis 2019, la BD parcellaire est figée, l'IGN ayant suspendu ses mises à jour. Il a été remplacé par le parcellaire express dont la structure est similaire et est basé sur le plan cadastral informatisé (PCI) diffusé trimestriellement par la DGFiP.