B. UNE RÉPARTITION DES CRÉDITS ORIENTÉE VERS DES OPÉRATEURS ET DES MONUMENTS DE L'ÉTAT

1. La répartition des crédits du plan de relance

Le plan de relance en faveur des patrimoines est réparti entre deux enveloppes .

Une première enveloppe , représentant 334 millions d'euros, vise à soutenir la reprise d'activité des principaux opérateurs de l'État dans le domaine du patrimoine et à renforcer leur capacité d'investissement . Elle comprend 279 millions d'euros de crédits de fonctionnement destinés à atténuer les pertes subies par huit établissements et 55 millions d'euros de crédits d'investissement en faveur de trois de ces établissements.

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Répartition des crédits de fonctionnement entre les établissements

(en millions d'euros)

2021

2022

Total

Centre des monuments nationaux

50,00

39,30

89,30

Musée du Louvre

40,00

6,00

46,00

Musée et domaine national de Versailles

35,00

7,00

42,00

Réunion des musées nationaux-Grand Palais

26,75

10,00

36,75

INRAP

15,00

5,00

20,00

Centre Georges-Pompidou

11,70

5,00

16,70

Musée d'Orsay

12,00

3,00

15,00

Domaine national de Chambord

4,50

2,00

6,50

Total

194,95

77,30

272,25

Source : Ministère de la culture

Répartition des crédits d'investissement entre les établissements

(en millions d'euros)

2021

2022

Total

Château, musée et domaine national de Versailles

20,00

25,00

45,00

Domaine national de Chambord

5,00

0

5,00

Centre Georges-Pompidou

5,00

0

5,00

Total

30,00

25,00

55,00

Source : Ministère de la culture

La seconde enveloppe , comprenant 280 millions d'euros, vise à valoriser les métiers d'art et les savoir-faire d'excellence dans les territoires . Elle finance une centaine d'opérations de restauration du patrimoine à travers le territoire portant sur des monuments historiques, quelle que soit la nature de leur propriétaire, et une quinzaine d'opérations de rénovation d'équipements patrimoniaux en régions.

Les crédits de cette enveloppe sont ventilés entre cinq dispositifs :

- un apport de 100 millions d'euros afin de permettre l'achèvement du chantier de restauration et de mise en valeur du château de Villers-Cotterêts ;

- un « plan cathédrales » (80 millions d'euros) finançant à la fois des opérations de restauration et des opérations de mise en sécurité des cathédrales appartenant à l'État ;

- une dotation de 40 millions d'euros en faveur de la restauration des monuments historiques appartenant aux communes et aux propriétaires privés ;

- une autre dotation de 40 millions d'euros en faveur de la restauration de plusieurs monuments appartenant au réseau du CMN en régions ;

- et une enveloppe de 20 millions d'euros destinée à accompagner les collectivités territoriales dans leurs projets de rénovation de leurs équipements patrimoniaux (musées, archives, archéologie).

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

2. Une préférence accordée aux opérateurs et monuments de l'État qui n'est pas incompatible avec l'objectif de relance

La répartition de ces crédits fait apparaitre trois éléments saillants.

Ø Une part substantielle des crédits est destinée aux principaux opérateurs nationaux dans le domaine du patrimoine.

Une décision similaire a été prise concernant les crédits du plan de relance destinés à la création artistique et culturelle.

Face aux lourdes pertes enregistrées par ces opérateurs depuis le début de la crise sanitaire, ce soutien apparait néanmoins justifié . Il aurait été impensable que l'État abandonne ces établissements, alors que leur fragilité aux chocs est liée à la part que leurs ressources propres ont prises, à sa demande, dans leurs budgets au cours des dernières années.

Il convient de noter par ailleurs que ces mesures de soutien permettent seulement d'atténuer les pertes subies par les opérateurs, sans suffire à reconstituer leur capacité d'autofinancement, pourtant primordiale afin qu'ils retrouvent une réelle capacité d'investissement.

Hypothèses moyennes de fréquentation et de recettes des opérateurs du programme 175 « Patrimoines »

Source : Commission des finances du Sénat

Ø Une partie des mesures inscrites au titre du plan de relance aurait, de toute façon, dû être financée, même en l'absence de ce plan.

Il s'agit des mesures de soutien aux opérateurs (334 millions d'euros) et des crédits affectés à l'achèvement du chantier du château de Villers-Cotterêts (100 millions d'euros), qui doit accueillir le projet présidentiel de Cité internationale de la langue française.

Ces crédits contribuent cependant à la relance du secteur :

- deuxième chantier de France par sa taille après celui de Notre-Dame de Paris, le chantier du château de Villers-Cotterêts permet de former de nouveaux professionnels de la restauration du patrimoine. 500 personnes y travaillent au quotidien. Il contribue à l'emploi local grâce aux clauses d'insertion sociale figurant dans l'ensemble de ses appels d'offres ;

- les opérateurs nationaux sont des fleurons de la culture française et jouent un rôle de locomotive en matière de tourisme. Les crédits de fonctionnement qui leur sont alloués au titre du plan de relance devraient leur permettre de développer une offre adaptée aux nouvelles attentes des publics. Les crédits d'investissement, attribués à trois établissements (château de Versailles, domaine de Chambord et Centre Georges-Pompidou), visent à leur permettre de contribuer à la relance en amplifiant leur programme de travaux.

Ø Plus des deux-tiers des crédits de l'enveloppe destinée au patrimoine dans les territoires portent sur des monuments appartenant à l'État .

Cette répartition étonne d'autant plus que l'État ne possède que 3 % des monuments historiques et que ceux-ci sont globalement en meilleur état que ceux des autres catégories de propriétaires.

Le faible montant de crédits affectés à la restauration du patrimoine n'appartenant pas à l'État (40M€) est d'autant plus regrettable qu'une aide supérieure de l'État aurait été utile pour stimuler les projets des collectivités territoriales et des propriétaires privés, dont les capacités financières ont pu être dégradées par la crise. Par son effet de levier, elle aurait pu générer davantage d'activités pour les entreprises de restauration du patrimoine.

Au demeurant, le « plan cathédrales » constitue une nécessité face aux retards accusés par l'État en matière de restauration de ses cathédrales, faute d'un montant annuel suffisant des crédits ordinaires (besoins évalués en 2020 à 350 millions d'euros sur cinq ans). La mise en sécurité de ces édifices fait aussi figure de priorité après l'émotion suscitée par les incendies de Notre-Dame de Paris en 2019 et de la cathédrale de Nantes en 2020.

Ces travaux, comme ceux qui portent sur des monuments du réseau du CMN, contribuent, en tout état de cause, à l'activité des entreprises de restauration du patrimoine dans les territoires et à l'attractivité de ces derniers . Les visiteurs n'opèrent pas de distinction entre les patrimoines selon la nature de leur propriétaire. Ils créent par ailleurs un appel d'air en libérant des crédits ordinaires pour financer d'autres opérations dans les territoires.

Par ailleurs, les crédits de cette enveloppe ont été répartis de manière à assurer un certain équilibre entre les territoires . La ministre de la culture a refusé que les crédits « relance » financent la restauration de monuments nationaux situés en Ile-de-France (Panthéon, Sainte-Chapelle) afin d'éviter qu'ils ne se concentrent excessivement sur cette région, où sont déjà implantés la très grande majorité des opérateurs nationaux soutenus. On peut néanmoins regretter le faible nombre d'opérations programmées dans les outre-mers.

Répartition territoriale des crédits du plan de relance en faveur des patrimoines
(hors crédits destinés aux opérateurs et à la restauration du château de Villers-Cotterêts)

8,4

M€

8,3 M€

11 M€

9,8 M€

1,1 M€

1,1 M€

2,4 M€

0,7 M€

1,8
M€

18,3 M€

18,3 M€

9,8 M€

11 M€

10,5M€

14,6 M€

15,8 M€

16,5 M€

19 M€

20 M€

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

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