II. LE CADRE LÉGISLATIF EN VIGUEUR EN ALLEMAGNE EN MATIÈRE D'ÉCHANGE D'INFORMATIONS
A. LA CONSTITUTION DE FICHIERS COMMUNS
Aux termes de la loi sur le service national de renseignement du 20 décembre 1990 ( Gesetz über den Bundesnachrichtendienst - BNDG) 29 ( * ) , « Le Service fédéral de renseignement peut, à des fins d'échange et d'évaluation conjointe de données personnelles, gérer des fichiers communs avec des organismes publics étrangers ou y participer. Ces données doivent se référer à des situations de risque déterminées ou à certaines catégories de personnes. » La coopération n'est toutefois possible que dans la mesure où :
- il existe pour l'Allemagne un intérêt considérable en matière de politique étrangère et de sécurité ;
- le respect des principes fondamentaux de l'État de droit est assuré dans les pays participants ;
- il est garanti que le principe de réciprocité sera appliqué.
Si cette coopération s'effectue avec un pays membre de l'Union Européenne, de l'Association européenne de libre-échange (AELE) ou de l'OTAN, l'approbation émane des services de la Chancellerie. S'il s'agit d'un pays tiers, l'approbation doit alors émaner du directeur de la Chancellerie 30 ( * ) . La commission de contrôle parlementaire doit être informée de cette coopération.
Le cadre de la coopération doit être préalablement consigné par écrit dans une déclaration d'intention, qui doit inclure :
- les objectifs de la coopération ;
- des précisions sur le partage des données ;
- l'indication que les données ne devront être utilisées que pour ces objectifs ;
- que le service de renseignement fédéral ( Bundesnachrichtendienst, ci-après BND) se réserve le droit de demander des informations sur l'utilisation qui a été faite des données transmises dans le fichier partagé.
La constitution de fichiers communs nécessite de prendre un acte (dateianordnung) à cet effet, devant contenir des informations telles que :
- l'intitulé du fichier ;
- sa finalité ;
- les conditions de conservation, de communication et d'utilisation ;
- la fourniture ou l'alimentation en données, y compris la possibilité par le service étranger participant d'inscrire, pour une personne, des données complémentaires à celles déjà présentes ;
- le droit d'accès ;
- le délai de réexamen et la durée de conservation ;
- pour chaque consultation du fichier commun, la consignation par le BND du moment de la consultation ainsi que du service l'ayant fait ;
- la base juridique du fichier de données ;
- les services étrangers autorisés à saisir et à consulter les données ;
- l'information immédiate aux services étrangers participants en cas d'indice d'inexactitude des données saisies ainsi que la vérification et, si nécessaire, la modification, la correction ou la suppression des données par le service les ayant entrées ;
- la responsabilité du BND s'agissant des demandes de dommages et intérêts des personnes concernées.
Cet acte nécessite l'approbation de la Chancellerie et, préalablement à son adoption, le commissaire fédéral à la protection des données et à la liberté de l'information 31 ( * ) doit être entendu.
L'inscription de données personnelles par le BND dans les fichiers communs avec les services étrangers n'est possible qu'à une double condition : les données sont communicables à tous les pays participants ; le BND est également autorisé à entrer les données dans ses propres fichiers. Autant le BND que les services partenaires peuvent accéder directement et utiliser les données personnelles stockées dans la mesure où cela est nécessaire pour atteindre les objectifs pour lesquels le fichier a été créé. Toute inscription dans le fichier, ainsi que tout accès, doit être enregistré dans un journal dont les données doivent être conservées jusqu'à la fin de la deuxième année civile suivant leur inscription, puis supprimées immédiatement.
En cas de transmission par le BND de données à caractère personnel, les dispositions de la loi fédérale sur la protection constitutionnelle s'appliquent, en particulier ses paragraphes 23 à 26.
* 29 https://www.gesetze-im-internet.de/bndg/BJNR029790990.html
* 30 Le Directeur de la Chancellerie est nommé par le Chancelier et peut être soit un secrétaire d'État, soit un ministre fédéral en charge des missions particulières (Bundesminister für besondere Aufgaben) . C'est le cas du directeur actuel .
* 31 Équivalent de la CNIL.