III. DES CRÉDITS CONSACRÉS À L'ORGANISATION DES ÉLECTIONS EN FORTE HAUSSE POUR RELEVER LES MULTIPLES DÉFIS LOGISTIQUES QUI PÈSENT SUR LES ÉLECTIONS EN 2022
A. UNE HAUSSE CONJONCTURELLE DES CRÉDITS ALLOUÉS À LA VIE POLITIQUE EN RÉPONSE AUX ÉCHÉANCES ÉLECTORALES MAJEURES DE 2022
Les crédits du programme 232 « Vie politique » augmentent plus fortement que ceux des autres programmes de la mission (+ 12,9 % en AE, + 12,6 % en CP) du fait d' une activité électorale importante en 2022 9 ( * ) . Les prochaines élections présidentielle et législatives devraient coûter respectivement 4,72 euros et 3,97 euros par électeur inscrit sur les listes électorales en moyenne. À titre de comparaison, le coût moyen par électeur s'est élevé à 3,67 euros pour les élections régionales et 3,52 euros pour les élections départementales de juin 2021. Cette différence tient à la fois à la nature des élections concernées (nombre de candidats, montant du remboursement forfaitaire des dépenses électorales des candidats, etc. ) mais aussi aux adaptations réglementaires mises en oeuvre pour sécuriser l'organisation des élections .
B. DE MULTIPLES DÉFIS LOGISTIQUES À RELEVER DANS UN CONTEXTE SANITAIRE ENCORE INCERTAIN
L'organisation des prochaines élections se heurte à des défis logistiques considérables aggravés par les incertitudes qui continuent de peser sur le contexte sanitaire . De nombreux dysfonctionnements ont été constatés dans la confection, la mise sous pli et la distribution de la propagande électorale à l'occasion des élections régionales et départementales de juin 2021. Au second tour, 26,6 % des électeurs n'ont ainsi reçu aucune propagande pour les élections départementales et 40,3 % pour les élections régionales 10 ( * ) .
La mission d'information créée par la commission des lois du Sénat pour faire la lumière sur ces dysfonctionnements a formulé de nombreuses recommandations pour s'assurer que ces problèmes soient résolus en vue des prochains scrutins d'avril et de juin 2022 telles que la résiliation de l'accord-cadre portant sur la distribution de la propagande électorale jusqu'en 2024 et la révision des critères de sélection des candidats au marché de distribution des plis électoraux.
Le Gouvernement a pris en compte certaines de ces propositions puisque, dès le 13 août 2021, le ministère de l'intérieur a résilié le contrat qui le liait à Adrexo , titulaire de sept des quinze lots de l'accord-cadre. Dans un courrier du 4 novembre 2021 adressé au Président du Sénat, le ministre de l'intérieur a précisé que « ce nouveau marché accorder[ait] dans ses critères d'attribution un poids plus important aux capacités opérationnelles du prestataire » et imposerait une clause obligeant « celui-ci à indiquer le nombre d'agents qu'il a prévu de mobiliser, la part des intérimaires notamment ainsi que le contenu et la durée de la formation qui leur sera dispensée », conformément aux recommandations de la mission d'information. Lors de son audition par la commission des lois, Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté, a annoncé qu'un nouvel appel d'offre avait été lancé le 6 novembre 2021 pour assurer la distribution de la propagande électorale pour les sept lots concernés jusqu'en 2024 . Ce nouvel appel d'offre a été adapté pour prendre en compte plusieurs recommandations formulées par la commission des lois du Sénat.
Recommandations de la commission des lois du
Sénat
11
(
*
)
prises
en compte dans le nouvel appel d'offre portant sur la distribution
de
la propagande électorale
Recommandations |
Dispositions du nouvel appel d'offre |
Recommandation n° 3 : Revoir les critères de sélection des candidats au marché de la distribution des plis électoraux, pour donner la prépondérance aux moyens opérationnels. |
Le critère financier représente 40 % de la note globale et le critère technique 60 %. La répartition a été inversée par rapport à l'appel d'offre précédent. |
Recommandation n° 6 : Afin de limiter le nombre de plis non distribués, mieux tirer parti des bases d'adresses des opérateurs postaux pour corriger le fichier des électeurs. |
Le titulaire du marché doit informer l'administration des corrections entreprises par commune pour redresser les adresses. |
Recommandation n° 7 : Préciser et uniformiser les consignes de distribution à donner aux agents. |
Le nouvel appel d'offre ne précise pas davantage les consignes de distribution mais mentionne l'obligation de résultat du titulaire du marché. |
Recommandation n° 8 : Préciser, dans les clauses du marché public, les exigences minimales de formation des agents chargés de la distribution. |
Lors de la réunion de lancement, le titulaire indique le nombre de personnes affectées à la distribution des enveloppes en détaillant notamment la part de agents en contrat à durée indéterminée et des contractuels et intérimaires ainsi que les modalités de formation des personnels non titulaires. |
Recommandation n° 9 : Améliorer les systèmes de reporting imposés aux opérateurs, afin de mettre fin aux discordances entre chiffres déclarés et constatés. |
Le titulaire du marché est responsable du marquage des contenants. Un tiers dûment désigné par l'administration pourra effectuer des vérifications sur les prestations réalisées. |
En réponse aux difficultés rencontrées dans la mise sous pli de la propagande électorale, le ministère de l'intérieur a par ailleurs décidé d'internaliser cette tâche qui sera désormais réalisée par les préfectures en régie ou par les communes via des conventions liant préfectures et mairies. Le surcoût de cette ré-internalisation est estimé à 5 millions d'euros en titre II, hors comptes d'affectation spéciale.
Cette décision a suscité de nombreuses interrogations au sein des préfectures dont certaines ne disposent pas des moyens humains et matériels nécessaires pour relever un tel défi logistique, en particulier dans les départements les plus peuplés . À titre d'exemple, la préfecture du Val-de-Marne devrait mobiliser entre 1 200 et 1 300 personnes sur une journée pour assurer la mise sous pli de la propagande électorale 12 ( * ) . Afin d'éviter de mettre certaines préfectures en difficulté, le ministère de l'intérieur a fixé , par une circulaire du 4 novembre 2021 13 ( * ) , les trois conditions cumulatives qui permettront aux préfectures de continuer à externaliser ces prestations :
• le lieu de routage doit se situer à moins d'une heure et trente minutes de route du chef-lieu de la préfecture ;
• les opérations sont intégralement mécanisées ;
• le routeur détenteur du marché de mise sous pli n'a rencontré aucune difficulté lors du double scrutin de juin 2021. Les préfectures qui comptent plus de 500 000 électeurs sont exemptées de remplir ce dernier critère.
Le ministère de l'intérieur espère ainsi renforcer le contrôle des préfectures sur l'ensemble des opérations tout en prévoyant des exceptions nécessaires et strictement encadrées au principe de l'internalisation de la mise sous pli .
* 9 Élections présidentielle, législatives et territoriales à Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
* 10 « Dysfonctionnements constatés lors des élections départementales et régionales de juin 2021 », rapport d'information n° 785 (2020-2021) fait par François-Noël Buffet au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale.
* 11 « Dysfonctionnements constatés lors des élections départementales et régionales de juin 2021 », rapport d'information n° 785 (2020-2021) fait par François-Noël Buffet au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale.
* 12 Source : audition d'Olivier Jacob, directeur de la modernisation et de l'administration territoriale.
* 13 Circulaire de Jean-Benoît Albertini, préfet, secrétaire général du ministère de l'intérieur, du 4 novembre 2021 relative à la mise sous pli et au colisage de la propagande électorale pour les élections présidentielle et législatives 2022.