A. L'ACTUALITÉ DU CONSEIL DE L'EUROPE ET DE SON ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE

1. La tenue de deux débats essentiels au fonctionnement de l'APCE et à l'exercice de ses prérogatives
a) Une réforme du Règlement, à l'initiative de la présidente de la délégation française, en vue d'améliorer la représentation des femmes et les équilibres entre les sexes

Mardi 28 septembre, l'APCE a débattu d'une réforme de son Règlement proposée par Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation française , au nom de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles. La résolution adoptée vise pour l'essentiel à améliorer la représentation des femmes au sein de l'Assemblée parlementaire.

En ouverture de la discussion générale, la rapporteure a rappelé la contestation des pouvoirs de six délégations nationales, en janvier 2020, au motif qu'elles ne comprenaient pas le nombre minimum de femmes requis, lequel est censé correspondre à leur pourcentage dans leur Parlement d'origine. À cette occasion, il s'est avéré que le Règlement ne sanctionne réellement que les délégations ne comportant en leur sein aucune femme en qualité de représentante.

Malgré plusieurs résolutions depuis plus de quinze ans, le Règlement actuel est clairement insatisfaisant quant à la place des femmes à l'APCE. En dix ans, la proportion de femmes y a progressé de 28 % pour atteindre désormais 37 %, reflétant ainsi les nets progrès réalisés dans la plupart des Parlements nationaux. La tendance semble néanmoins se stabiliser et, actuellement, seize délégations comprennent moins d'un tiers de femmes.

En outre, une représentation équilibrée ne se mesure pas uniquement aux nombres respectifs des femmes et des hommes. De ce point de vue, il n'est pas inutile de rappeler qu'aucune femme ne siège au Comité présidentiel de l'APCE, que le Bureau de cette dernière est à 77 % masculin, que seulement six femmes occupent l'une des vingt vice-présidences pourvues, que deux des neufs commissions sont présidées par une femme, que moins d'un tiers des membres des commissions du Règlement et de suivi sont des femmes et, enfin, que seulement 20 % des rapporteurs de la commission de suivi et 16 % des rapporteurs de la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme sont des femmes.

Il faut donc modifier le Règlement de l'Assemblée parlementaire pour changer cet état de choses, qui ne reflète pas la réalité de nos sociétés démocratiques modernes.

Mme Nicole Trisse a souligné qu'elle avait souhaité que son travail et ses propositions soient collégiaux, raison pour laquelle elle y avait associé les groupes politiques. Par le dialogue, son contenu a été enrichi et les points crispants ont été modifiés afin de parvenir à des règles plus ambitieuses mais aussi réalisables par les États membres et les groupes politiques. Elle a plus particulièrement insisté, à cet égard, sur les points suivants :

- tout d'abord, la date de mise en oeuvre des nouvelles règles a été reportée à janvier 2023, pour laisser le temps aux délégations nationales, au fil des renouvellements à venir, de se mettre en conformité ;

- la mixité a été expressément prévue, pour éviter qu'une délégation soit exclusivement masculine ou féminine ;

- la mise en place de quotas est assortie d'une certaine progressivité, selon la taille des délégations. Ainsi, pour les petites délégations de quatre membres, seule une femme représentante sera requise. Pour les autres délégations, la proposition minimale sera de 33 % de représentantes ;

- enfin, les groupes politiques seront invités à proposer une femme sur trois membres au minimum pour les désignations aux commissions de leur ressort et les orateurs, tandis que la fonction de rapporteur devra échoir à une femme dans 33 % des cas.

Toutes ces évolutions se veulent la première étape d'une approche progressive mais ambitieuse, avec en perspective une représentation féminine de 40 % en 2026. Il ne s'agit pas de renverser la table mais simplement de faire évoluer un Règlement qui parle à peine des femmes et qui date de plusieurs décennies. L'APCE se doit en effet de porter haut les valeurs de la démocratie et des droits humains, pour toutes et tous car restent malheureusement d'actualité les propos de la philosophe française Simone de Beauvoir, selon qui : « Rien n'est jamais définitivement acquis. Il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Votre vie durant, vous devrez rester vigilantes ».

Au cours de la discussion générale, Mme Sylvie Goy-Chavent (Ain - Les Républicains) a rappelé que, dans ses résolutions et recommandations, l'APCE demande aux États membres de favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes et la participation de ces dernières à la vie civile et politique. C'est là un objectif essentiel et l'Assemblée parlementaire se doit d'être exemplaire sur cette question.

En dix ans, la proportion de femmes à l'APCE a progressé pour atteindre 37 %. En 2007, l'Assemblée parlementaire avait fixé comme objectif aux Parlements nationaux que leurs délégations comprennent un pourcentage de femmes au moins égal à celui que compte leur Parlement d'origine, avec l'objectif d'atteindre 30 %. Aujourd'hui, vingt-deux délégations affichent un pourcentage de femmes supérieur ou égal à 40 %, alors que seize délégations parlementaires comprennent moins d'un tiers de femmes.

Si l'on peut se féliciter que les Parlements nationaux aient adopté des mesures pour favoriser la parité et la présence des femmes au sein des assemblées délibérantes, la mise en place de quotas telle qu'elle est proposée ne paraît pas constituer la meilleure solution pour favoriser la participation des femmes.

L'Islande constitue à cet égard un contre-exemple parfait. Lors du dernier scrutin législatif, 48 % des députés élus ont été des femmes, ce qui constitue un record en Europe alors qu'aucun quota n'a été instauré dans ce pays. En revanche, il existe une véritable volonté politique des partis de faire participer davantage les femmes. Dans le cas de l'APCE, le Règlement prévoit déjà que les délégations nationales doivent comprendre un pourcentage de femmes au moins égal à celui que compte leur Parlement d'origine. Il ne semble pas nécessaire d'ajouter une contrainte supplémentaire, surtout si cela aboutit à une sanction en ne ratifiant pas les pouvoirs car cette contrainte pèserait davantage sur les petites délégations. Celles-ci seraient obligées de recruter des femmes qui n'ont pas forcément envie de participer aux débats, uniquement pour ratifier leurs pouvoirs, ce qui ne servirait pas la cause des femmes. La compétence de ces femmes risquerait en effet d'être remise en cause, comme dans tous les cas de discrimination positive.

Enfin, il ne faut pas perdre de vue que les délégations doivent être composées en tenant compte des groupes politiques représentés au sein de leur Parlement national. Cet élément est essentiel pour garantir le pluralisme de la représentation au sein de l'APCE. Or, si l'on ajoute une contrainte trop forte sur la représentation de genre, les petites délégations, en particulier, risquent d'être à nouveau en difficulté.

Convenant que le travail de la rapporteure était approfondi et animé de bonnes intentions, Mme Sylvie Goy-Chavent a estimé, en conclusion, que l'enfer est pavé de bonnes intentions et elle s'est déclarée réservée sur ce projet de résolution.

N'ayant pas pu prendre la parole dans le temps fixé par le service de la séance bien qu'elle était présente dans l'hémicycle, Mme Marie-Christine Dalloz (Jura - Les Républicains) a pu faire publier son intervention au compte-rendu, dans les conditions fixées par le Règlement de l'APCE. Dans cette intervention, elle salue l'importance du sujet, qui vise à améliorer la représentation quantitative des femmes au sein de l'APCE mais, également, à encourager la participation effective des femmes dans les processus décisionnels. Ce point est crucial car imposer des quotas n'aurait pas d'intérêt sinon.

Les quotas ont beau être insuffisants, ils n'en demeurent pas moins parfois nécessaires. L'APCE compte actuellement 37 % de femmes, ce qui est relativement satisfaisant. Mais des disparités persistent puisque quinze délégations n'atteignent toujours pas l'objectif minimal fixé par l'APCE en 2007 et comptent moins de 30 % de femmes.

Sur le plan du Règlement, les obligations restent très limitées puisque seules les délégations ne comptant aucune femme titulaire peuvent être sanctionnées par la procédure de contestation des pouvoirs. Imposer la même obligation à des délégations de tailles différentes est une aberration. Les propositions formulées vont dans le bon sens car elles tiennent compte des différences entre délégations. Mais au-delà du seul critère chiffré, la priorité doit rester l'intérêt et la volonté de siéger au sein de l'APCE. Pour certains pays, se pose aussi la question de la langue puisque le Conseil de l'Europe a deux langues officielles, le français et l'anglais.

Dix-sept ans après avoir inscrit le principe de l'égalité des sexes dans son Règlement, l'APCE offre un bilan très perfectible : aucune femme ne siège au Comité présidentiel, le Bureau est à 77 % masculin, deux commissions sur neuf sont présidées par des femmes, seulement un tiers des rapporteurs sont des femmes. Ce constat est une réalité.

Plusieurs modifications du Règlement sont proposées, visant à imposer un minimum de 33 % de femmes au sein des commissions et parmi les rapporteurs. Il est également demandé aux groupes politiques de promouvoir plus efficacement la représentation et la participation équilibrée des femmes et des hommes dans les organes décisionnels de l'APCE. Ces mesures sont bienvenues et chaque groupe politique devrait prendre en considération ces éléments.

Un autre point semble lui aussi préoccupant en matière de représentation. Prendre en compte la composition des Parlements nationaux dans la désignation des membres des délégations relève non seulement du bon sens mais constitue également une exigence démocratique.

Lors de l'examen du projet de résolution, l'APCE a adopté un amendement de clarification cosigné par M. Olivier Becht (Bas-Rhin - Agir Ensemble) et sept de ses collègues de la délégation française, ainsi que trois sous-amendements de simplification cosignés par M. Jacques Maire (Hauts-de-Seine - La République en Marche), président du groupe ADLE, et les présidents des groupes PPE/DC, CE/AD et GUE.

b) Une discussion sur les lignes directrices relatives à la portée des immunités dont bénéficient les membres de l'APCE

En clôture de sa journée inaugurale de la session, le 27 septembre, l'Assemblée parlementaire approuvé, sur le rapport de M. Tiny Kox (Pays-Bas - GUE), au nom de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, une résolution fixant, à travers des lignes directrices, des critères clairs et objectifs permettant aux privilèges et immunités accordés aux membres de l'APCE de répondre à leur finalité institutionnelle tout en prévenant davantage tout risque de détournement à des fins personnelles.

À l'occasion de la discussion générale, le rapporteur a relevé que tous les membres de l'APCE, s'ils bénéficient d'un régime d'immunité garanti par les Statuts du Conseil de l'Europe, ne sont pas nécessairement conscients de l'existence de ce régime de protection. En 1949, les pères fondateurs ont jugé nécessaire de protéger l'Assemblée parlementaire contre toute influence extérieure et toute menace à son autonomie : cela pour de bonnes raisons, car elle est souvent à l'initiative de nouvelles conventions et élit les 47 juges de la Cour européenne des droits de l'Homme, ainsi que les plus hauts responsables du Conseil de l'Europe.

Cette protection des membres de l'APCE a été développée dans le cadre de l'Accord sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe, dont l'article 14 accorde une immunité absolue, permanente et perpétuelle par nature. Elle continue à s'appliquer après la fin du mandat et ne peut être levée, ni par l'Assemblée parlementaire, ni par les Parlements nationaux. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme est on ne peut plus claire : aucun État membre n'a le droit de poursuivre un membre de son Parlement national qui est ou a été membre de l'APCE pour des opinions exprimées dans le cadre de celle-ci.

Une autre immunité est stipulée à l'article 15 de l'Accord général sur les privilèges et immunités, qui protège contre toute pression indue pour des actes ne faisant pas partie des activités parlementaires habituelles mais essentiels à l'exercice du mandat. Non absolue, elle peut être levée à la demande de l'autorité compétente de l'État membre concerné mais, sous son empire, un parlementaire bénéficie d'une protection totale contre les interrogatoires, arrestations et emprisonnements dans son propre pays et dans tout autre État membre.

Afin de s'assurer l'absence de tout malentendu, la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles a convenu, à l'unanimité, de formuler des lignes directrices claires sur la portée des immunités parlementaires. Ces lignes directrices seront annexées au Règlement, en conformité avec le Statut et l'Accord général sur les privilèges et immunités. Ce faisant, l'APCE répondra positivement à la demande antérieure du groupe d'États contre la corruption (GRECO) et de l'organe d'enquête indépendant créé suite aux allégations de corruption au sein de l'Assemblée parlementaire.

Néanmoins, immunité ne signifie pas impunité. Ainsi, l'utilisation abusive des structures de l'APCE pour des actes de corruption ne sera aucunement couverte par le régime des immunités. De la même manière, les enquêtes sur les infractions liées à la corruption, l'offre ou la demande d'avantages indus en échange d'un certain comportement de vote ne seront pas empêchées, étant donné que ces infractions ne concernent pas les opinions exprimées ou les votes émis.

S'exprimant au nom du groupe ADLE, M. Claude Kern (Bas-Rhin - Union Centriste) a souligné que les immunités parlementaires sont des dispositions prévues pour garantir le bon fonctionnement de la démocratie, et non pour conférer un quelconque privilège aux parlementaires. Il s'est montré favorable à ce projet de résolution, qui vise à garantir une application cohérente du régime des immunités.

Le rôle des parlementaires est de voter la loi et de contrôler l'action du gouvernement dans l'intérêt général. Compte tenu des enjeux politiques et économiques de leur action, ils peuvent être soumis à différentes pressions. C'est donc pour les protéger de ces pressions et ainsi garantir leur indépendance que le régime des immunités existe. Dès lors, aucun parlementaire ne peut être poursuivi pour les opinions et votes émis dans l'exercice de son mandat, et ce sur les territoires de tous les États membres.

De la même manière, un État membre ne peut refuser l'accès à son territoire à un parlementaire de l'APCE qui aurait dénoncé certains manquements dans la mise en oeuvre des principes que soutient le Conseil de l'Europe. Dans une résolution de 2016, l'APCE a réitéré son attachement à la liberté de déplacement sans restriction de ses membres, comme le prévoit expressément l'Accord général sur les privilèges et immunités de 1949. Le Président Rik Daems a dû le rappeler tout récemment à la Russie, qui avait voulu déclarer M. Jacques Maire persona non grata . Pour autant, les propos injurieux n'ont pas leur place dans l'hémicycle et, dans le cas contraire, il appartient à l'Assemblée parlementaire, sur proposition de son Président, de prononcer des sanctions, comme le prévoit l'article 22 du Règlement.

L'inviolabilité, quant à elle, a pour but de protéger les parlementaires faisant l'objet d'accusations trafiquées en vue de les démettre de leurs fonctions. Les mesures restrictives de liberté ne peuvent être prononcées pour des faits ne relevant pas de leur activité d'élu qu'après une levée de leur immunité, dans les conditions prévues par l'article 73 du Règlement. Toutefois, l'article 15 de l'Accord général sur les privilèges et immunités prévoit que sur leur territoire national, les membres de l'APCE bénéficient des immunités reconnues aux membres du Parlement de leurs pays. Cette disposition peut donc créer des inégalités de protection, de sorte qu'il est nécessaire d'interpréter la protection accordée par l'article 15 aux membres de l'Assemblée parlementaire de manière la plus extensive possible.

N'ayant pas pu prendre la parole dans le temps fixé par le service de la séance bien qu'il ait été connecté à distance, M. François Calvet (Pyrénées-Orientales - Les Républicains) a pu faire publier son intervention au compte-rendu, dans les conditions fixées par le Règlement de l'APCE. Dans celle-ci, il souligne que les immunités, constitutives du mandat parlementaire, sont au nombre de deux : l'irresponsabilité pour les actes effectués dans le cadre de l'exercice du mandat, ce qui comprend les discours et les votes, et l'inviolabilité qui garantit qu'aucune mesure restrictive de liberté ne pourra être mise en oeuvre contre un parlementaire sans l'accord de l'assemblée au sein de laquelle il siège. Elles sont respectivement prévues par les articles 14 et 15 de l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe. Toutefois, il convient de clarifier les conditions de leur mise en oeuvre.

Tout d'abord, il peut arriver que le mandat national d'un parlementaire cesse et que son mandat au sein de l'APCE se poursuive pour quelques mois encore, le temps qu'une nouvelle délégation soit nommée. Dans ce cas, le parlementaire doit continuer à bénéficier des immunités, que ce soit dans son pays ou sur le territoire d'un autre État membre. De plus, il faut rappeler que l'immunité relative aux opinions et votes émis dans le cadre de la fonction de parlementaire revêt un caractère absolu, permanent et perpétuel. Les anciens parlementaires restent donc protégés et ne peuvent être poursuivis pour les opinions et votes émis lorsqu'ils étaient parlementaires. En outre, cette immunité ne peut être levée ni par l'APCE, ni par une assemblée nationale. Enfin, concernant l'inviolabilité, les parlementaires bénéficient des immunités reconnues aux membres du Parlement de leur pays. Dès lors, selon les règles en vigueur dans leurs pays respectifs, deux membres de l'Assemblée parlementaire ne bénéficieront pas de la même protection, ce qui est regrettable.

Lors de l'examen d'une demande de levée d'immunité, l'APCE doit s'assurer que les poursuites judiciaires engagées contre son membre ne mettent pas en péril son bon fonctionnement et que la demande n'est pas dictée par d'autres motifs que celui de rendre la justice. La Cour européenne des droits de l'Homme a proposé une liste d'éléments à prendre en considération pour s'assurer que la procédure judiciaire n'est pas motivée par des arrière-pensées politiques. L'Assemblée parlementaire devra assurément en tenir compte.

2. L'élection de plusieurs juges à la Cour européenne des droits de l'Homme
a) Le choix du juge de la République tchèque

Il revient aux membres de l'APCE d'élire les juges proposés par les États membres pour un mandat de neuf ans au sein de la Cour européenne des droits de l'Homme. Pour la République tchèque, le scrutin est intervenu le mardi 28 septembre. Les suffrages ont été exprimés comme suit :

- M. Tomas Langáek : 10 voix ;

- Mme Kateøina imáèková : 204 voix ;

- M. Pavel Simon : 8 voix.

Mme Kateøina imáèková ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, elle a été élue juge à la Cour européenne des droits de l'Homme dès le premier tour de scrutin pour un mandat qui débutera le 1 er novembre 2021.

b) La désignation du juge moldave

Pour la Moldavie, l'élection est également intervenue le mardi 28 septembre. Les suffrages ont été exprimés comme suit :

- M. Nicolae E°anu : 3 voix ;

- M. Vladimir Grosu : 102 voix ;

- Mme Diana Scobioalã : 122 voix.

Mme Diana Scobioalã ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, elle a été élue juge à la Cour européenne des droits de l'Homme dès le premier tour de scrutin pour un mandat qui débutera le 3 décembre 2021.

c) Le scrutin concernant le juge russe

Après que la commission sur l'élection des juges a finalement accepté la liste proposée par la Fédération de Russie, le 23 juin dernier, les membres de l'Assemblée parlementaire ont élu, mardi 28 septembre, un juge issu de cette liste à la Cour européenne des droits de l'Homme. Les suffrages ont été exprimés comme suit :

- M. Andrei Yurievich Bushev : 4 voix ;

- M. Mikhail Borisovich Lobov : 187 voix ;

- Mme Natalia Vladimirovna Pavlova : 18 voix.

M. Mikhail Borisovich Lobov a donc été élu juge à la Cour européenne des droits de l'Homme dès le premier tour de scrutin pour un mandat qui débutera le 2 janvier 2022.

d) Le rejet de la liste de candidats présentée par l'Ukraine

En revanche, l'APCE n'a pas désigné de juge à la Cour européenne des droits de l'Homme au titre de l'Ukraine.

En effet, lors de sa réunion du 16 septembre 2021, la commission sur l'élection des juges à la Cour européenne des droits de l'Homme, chargée de donner préalablement son avis sur les listes des États membres, avait considéré que celle présentée par les autorités ukrainiennes ne remplissait pas les critères requis par l'Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres.

Au cours de l'examen du rapport d'activité du Bureau et de la Commission permanente, le 27 septembre, Mme Mariia Mezentseva s'est opposée, au nom de la délégation ukrainienne, à la recommandation de la commission sur l'élection des juges de rejeter la liste des candidats au titre de son pays. L'Assemblée parlementaire, par 41 voix contre 37 (et 14 abstentions), a conforté la décision de sa commission.

En conséquence, le Gouvernement ukrainien devra soumettre une nouvelle liste de candidats d'ici une prochaine session de l'APCE.

3. La formulation d'un avis sur le projet de deuxième protocole additionnel à la convention sur la cybercriminalité, relatif au renforcement de la coopération et de la divulgation de preuves électroniques

Á la demande du Comité des Ministres, l'Assemblée parlementaire peut être appelée à formuler un avis sur l'adhésion de nouveaux États membres au Conseil de l'Europe, les projets de conventions, le budget ou la mise en oeuvre de la Charte sociale européenne. Une requête de ce type ayant été émise le 12 mai 2021 au sujet du projet de deuxième protocole additionnel à la convention sur la cybercriminalité, relatif au renforcement de la coopération et de la divulgation de preuves électroniques, l'APCE s'est prononcée à l'occasion d'un débat d'urgence, sur la base du rapport de M. Kamal Jafarov (Azerbaïdjan - CE/AD), au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme.

Au cours de la présentation de ses conclusions en plénière, le rapporteur a estimé que si l'exercice pouvait apparaître purement technique, il n'en soulevait pas moins des questions considérables en matière d'État de droit et de droits de l'Homme. Les dispositions les plus contestées du protocole additionnel dont il est question sont celles qui introduisent la possibilité d'une « coopération directe » des autorités répressives avec les fournisseurs d'accès à Internet et d'autres entités privées dans d'autres États parties.

L'objectif du projet de protocole est de faciliter la coopération internationale dans la lutte contre la cybercriminalité. Les cybercriminels eux-mêmes profitent de la pandémie de Covid-19, toujours en cours, pour lancer des cyberattaques contre des hôpitaux et des laboratoires développant des vaccins et pour utiliser abusivement des noms de domaine afin de promouvoir de faux vaccins et traitements. La cybercriminalité est donc considérée à juste titre, par de nombreux États, comme une menace sérieuse pour les droits de l'Homme, l'État de droit, le fonctionnement des sociétés démocratiques et même la sécurité nationale.

Ce protocole doit s'inscrire dans le cadre des systèmes nationaux de justice pénale des États parties, avec toutes les procédures, réglementations, méthodes de transmission des données, conditions et garanties qu'ils prévoient.

Des propositions d'améliorations formulées par différentes parties prenantes méritent d'être prises au sérieux. Cependant, elles ne peuvent pas toutes être suivies. Les experts du comité intergouvernemental de rédaction ayant négocié ce texte, pour leur part, se sont opposés à toute proposition de changement. Ils veulent éviter de rouvrir un accord global qui a été difficile à obtenir après de nombreux cycles de négociations.

La convention sur la cybercriminalité et ses protocoles additionnels sont soumis à un dilemme : leur objectif exige que le plus grand nombre possible d'États participent à la lutte contre ce fléau car les cybercriminels ne connaissent pas de frontières, mais les systèmes juridiques nationaux sont très différents, y compris dans les domaines du droit pénal et de la protection des données. La convention et ses protocoles ne peuvent donc que fixer des normes minimales à suivre par tous les États participants. Dans le même temps, ils peuvent laisser la possibilité aux États plus avancés de prévoir des protections plus fortes mais celles-ci ne doivent pas, à leur tour, mettre en péril l'objectif initial commun.

Bien que le deuxième protocole additionnel établisse en principe un équilibre raisonnable, l'APCE ne devrait pas s'abstenir de faire toute proposition d'amendement. Dans ses avis précédents sur des projets de conventions, y compris sur la convention initiale sur la cybercriminalité elle-même, l'Assemblée parlementaire n'avait déjà pas accepté d'être une simple chambre d'enregistrement.

Les propositions d'enrichissement sont à cet égard constructives. Elles visent à améliorer la protection des droits de l'Homme, en particulier le droit à la vie privée, ainsi que le droit fondamental à un procès équitable. Il s'agit notamment du droit d'être assisté par un avocat également lors des séances de témoignage en ligne, du respect des privilèges et immunités de certaines professions, dont celle d'avocat, et de la possibilité que les instruments prévus par le projet de protocole puissent être utilisés non seulement par l'accusation mais aussi par la défense.

S'exprimant au nom du groupe ADLE, M. André Gattolin (Hauts-de-Seine - Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants) a souligné que la convention de Budapest sur la cybercriminalité représente une avancée importante dans la lutte contre l'exploitation des technologies de l'information à des fins criminelles. Soixante-six pays l'ont déjà ratifiée, dont 21 n'appartenant pas au Conseil de l'Europe, car il s'agit d'une convention ouverte. Tous les États membres du Conseil de l'Europe l'ont ratifiée, à deux exceptions près : l'Irlande et la Fédération de Russie, qui ne l'a même pas signée.

Ce succès de la convention de Budapest montre que les États ont conscience du risque que représente la cybercriminalité, une grave menace pour les droits de l'Homme, pour l'État de droit et pour le fonctionnement des sociétés démocratiques, ainsi que pour la sécurité nationale.

Depuis l'ouverture du texte aux signatures en 2001, la cybercriminalité a explosé, rendant nécessaire une adaptation de cette convention. Une étude de 2014 évaluait le coût de la cybercriminalité en 2020 à 2 000 milliards de dollars ; en réalité, ce montant avoisinait plutôt 6 000 milliards de dollars et on estime à plus de 10 000 milliards de dollars le total des pertes pour la société et les entreprises en 2025.

Il est donc important de disposer d'un protocole additionnel mais aboutir n'est jamais simple, compte tenu de la diversité des ordres juridiques des États parties. L'avis proposé à l'APCE reconnaît à juste titre ce point en indiquant que la convention et ses protocoles peuvent uniquement établir des normes minimales de protection tout en laissant aux États les plus avancés la possibilité de prévoir des protections renforcées au profit de leurs citoyens. Ces normes plus rigoureuses ne doivent pas compromettre l'objectif commun ; il s'agit là d'une ligne de crête. D'ailleurs, s'agissant des États membres de l'Union européenne, ceux-ci ont d'abord engagé des négociations séparément avant que, dans un deuxième temps, la Commission européenne soit chargée de négocier pour leur compte.

Il reste que le protocole issu des négociations comprend de réelles avancées pour lutter contre la cybercriminalité et faciliter l'accès aux preuves électroniques. Le rapporteur suggère quelques améliorations, en vue de renforcer notamment le principe de proportionnalité. Cet objectif est louable mais il ne saurait faire tomber le texte issu des négociations, difficiles, menées ces dernières années et qui aboutit à un « équilibre raisonnable ». Le mieux est toujours souhaitable mais il est hélas parfois l'ennemi du bien, de sorte que l'Assemblée parlementaire doit faire preuve de prudence en la matière.

4. La remise de plusieurs distinctions décernées par l'Assemblée parlementaire
a) La cérémonie d'attribution du Prix Václav Havel 2021

Le Prix des droits de l'Homme Václav Havel, créé en 2013 à l'initiative de M. Jean-Claude Mignon, alors Président de l'APCE, récompense des actions exceptionnelles de la société civile pour la défense des droits de l'Homme. Chaque année, lors de la partie de session d'automne, l'Assemblée parlementaire, en partenariat avec la Bibliothèque Václav Havel et la Fondation Charte 77, remet ce prix en mémoire du célèbre dramaturge tchèque, opposant au totalitarisme, artisan de la Révolution de Velours de 1989 en Tchécoslovaquie, symbole de la défense des valeurs défendues par le Conseil de l'Europe. Il se décompose en une somme de 60 000 euros, un trophée et un diplôme.

L'édition 2020 de ce prix a été remise conjointement à Mme Loujain Alhathloul, dirigeante du mouvement féministe saoudien qui a passé plus de mille jours en prison et, depuis février 2020, reste assignée à résidence, pour avoir fait campagne afin de mettre fin au système de tutelle masculine et aux abus contre les femmes dans le Royaume d'Arabie Saoudite.

Pour 2021, le jury, composé de personnalités indépendantes et présidé par M. Rik Daems (Belgique - ADLE), en sa qualité de Président de l'Assemblée parlementaire, avait retenu les candidatures de :

- Mme Maria Kalesnikava, l'une des figures de proue de l'opposition politique à Alexandre Loukachenko en Biélorussie qui, après avoir déchiré son passeport à la frontière pour ne pas être expulsée de force, se trouve emprisonnée à Minsk depuis septembre 2020 et a été condamnée le 6 septembre dernier à onze ans de prison pour « complot visant à s'emparer du pouvoir » ;

- l'organisation Reporters Sans Frontières, ONG internationale de premier plan qui défend depuis 1985 la liberté d'expression et d'information en apportant un soutien d'urgence à des milliers de journalistes en danger dans le monde et qui soutient la démocratie en faisant reculer la désinformation ;

- et M. Germain Rukuki, défenseur burundais des droits humains condamnés en 2018 à trente-deux ans de prison, et dont la peine a depuis été réduite, conduisant à sa libération cette année.

C'est la figure de l'opposition biélorusse Maria Kalesnikava qui a finalement été désignée lauréate du Prix des droits de l'Homme Václav Havel 2021. Du fait de son emprisonnement en Biélorussie, cette distinction a été remise à sa soeur, Mme Tatsiana Khomich, lors de la cérémonie organisée à cet effet à l'ouverture de la session d'automne, le lundi 27 septembre.

b) La remise officielle des diplômes européens 2020 et 2021

Jeudi 30 septembre, la sous-commission du prix de l'Europe a officiellement remis, au cours d'une cérémonie dans l'enceinte du Palais de l'Europe, les diplômes européens attribués au titre des années 2020 et 2021 aux villes européennes retenues pour leurs actions dans le domaine européen (jumelages, manifestations, échanges, etc.).

Pour 2020, ont ainsi obtenu ce diplôme : Neumarkt in der Steiermark (District de Murau en Autriche), Bayeux (en Normandie), Velbert (en Rhénanie-du-Nord-Westphalie), Cavaglià (dans le Piémont), Contigliano (dans le Latium), Reggio Emilia (en Émilie-Romagne), Bilbao (au Pays Basque), Tarragone (en Catalogne), Çiðli (située dans la région égéenne turque), Çorlu (dans la région de Marmara), Selçuk (dans la région égéenne turque) et Poltava (dans l'Oblast du même nom, en Ukraine).

Pour 2021, les récipiendaires ont été : Nagold (dans le Bade-Wurtemberg), Santhià (dans le Piémont), Cascais (dans larégion de Lisbonne), Be°ikta° (dans la région de Marmara), Kirklareli (dans la région de Marmara) et Konak (dans la région égéenne turque).

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