B. UN OBJECTIF PARTAGÉ : ORGANISER LES ÉLECTIONS CONSULAIRES EN MAI 2021
1. Un relatif consensus chez les représentants des Français de l'étranger, malgré des inquiétudes sur le déroulement de la campagne
Lors des auditions menées par les rapporteurs, les représentants de l'AFE, de l'Union des Français de l'étranger (UFE) et de Français du monde (ADFE) se sont exprimés en faveur du maintien des élections consulaires en mai 2021, sous réserve de l'évolution de la situation sanitaire .
La direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire (DFAE) du Quai d'Orsay a confirmé avoir « lancé les préparatifs pour l'organisation des élections consulaires dans le cadre législatif et réglementaire en vigueur » 12 ( * ) .
En tout état de cause, la démocratie ne peut pas rester confinée, les élections consulaires ayant déjà été reportées d'une année .
Ce scrutin, le deuxième depuis 2014, représente également une nouvelle étape pour la représentation de nos compatriotes expatriés : à compter des prochaines élections, les conseils consulaires seront présidés par un conseiller des Français de l'étranger et non plus par l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire 13 ( * ) . Il s'agit d'une avancée majeure, résultant d'une proposition du Sénat.
Un nouveau report des élections consulaires pourrait d'ailleurs soulever des difficultés sur le plan constitutionnel , même si cette question n'est pas définitivement tranchée.
Les difficultés juridiques soulevées par un nouveau report des élections consulaires
Certes, le Conseil constitutionnel a déjà admis deux reports successifs pour l'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger, dans l'attente d'une réforme de l'institution 14 ( * ) .
Sur le fondement de l'article 3 de la Constitution 15 ( * ) , il a toutefois rappelé que les électeurs devaient « exercer selon une périodicité raisonnable leur droit de suffrage » 16 ( * ) .
En l'espèce, le juge constitutionnel pourrait considérer que l'administration disposait d'un délai suffisant pour adapter l'organisation des élections consulaires aux contraintes sanitaires, et donc censurer tout nouveau report .
Un tel report remettrait également en cause l'élection des membres de l'AFE (prévue en juin 2021) et l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France (prévue en septembre 2021).
En juillet dernier, le Conseil constitutionnel a admis le report de l'élection de ces sénateurs - initialement prévue en septembre 2020 - afin qu'ils « ne soient pas désignés par un collège en majeure partie composé d'élus exerçant leur mandat au-delà de son terme normal » 17 ( * ) .
Sur le terrain, les candidats aux élections consulaires s'interrogent néanmoins sur les conditions d'organisation de la campagne électorale . Cette dernière risque d'être réduite à sa plus simple expression, en raison des interdictions de circulation et de rassemblement mises en place dans les différents États.
Des mesures d'adaptation sont donc indispensables pour permettre aux candidats de faire valoir leurs arguments (voir infra ).
Proposition n° 3 : S'assurer, pour les élections consulaires de mai 2021, que les électeurs pourront s'exprimer en toute sécurité et que les candidats pourront faire campagne.
Les élections de 2021 seront les premières élections « locales » se déroulant avec le répertoire électoral unique (REU) . Les Français installés à l'étranger pourront ainsi s'inscrire sur la liste électorale consulaire jusqu'au sixième vendredi précédant le scrutin 18 ( * ) , ce que beaucoup ignorent .
L'enjeu de la participation étant majeur, il est proposé de mettre en place, en lien avec les conseils consulaires, un plan de communication encourageant l'inscription sur les listes électorales.
Proposition n° 4 : Mettre en place, dans chaque circonscription électorale et en liaison avec le conseil consulaire, un plan de communication avec des annonces dans un minimum de quatre médias différents encourageant à l'inscription sur les listes électorales consulaires et rappelant le rôle des conseils consulaires.
2. La difficile gestion des « pics épidémiques »
Lors des auditions, la direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire (DFAE) a indiqué qu'elle examinait la possibilité d' un report partiel des élections consulaires pour les pays confrontés à un « pic épidémique » au printemps 2021 .
Le scrutin pourrait être reporté de quelques semaines dans ces seules circonscriptions, notamment si les autorités locales « décident de mesures strictes de confinement [et d']interdire tout déplacement et l'ouverture des bureaux de vote » 19 ( * ) . Ce dispositif s'inspirerait de celui mis en oeuvre en octobre 2020 pour les élections municipales en Guyane 20 ( * ) .
Le dispositif envisagé par le Gouvernement : les interrogations qui subsistent
Un report partiel des élections consulaires nécessiterait une nouvelle loi , qui serait adoptée quelques semaines seulement avant le scrutin.
À ce stade, au moins trois interrogations subsistent :
1. Quels seraient les critères sanitaires pris en compte pour reporter les élections dans certaines circonscriptions et selon quelle procédure (avis préalable du comité de scientifiques, information du Parlement, etc .) ?
2. Quel serait le nombre maximal de circonscriptions concernées par ce report ?
Par définition, le régime dérogatoire ne pourrait couvrir qu' une minorité de conseillers des Français de l'étranger , au risque de remettre en cause l'ensemble du scrutin.
Sur le plan statistique, la DFAE rappelle que les 27 circonscriptions comportant le plus d'électeurs - qui se situent majoritairement en Europe et en Amérique du Nord - élisent 231 conseillers des Français de l'étranger et délégués consulaires, soit 44 % du total. À l'inverse, les 20 circonscriptions les moins peuplées élisent 20 conseillers et délégués, soit 3,8 % du total.
3. Quelles seraient les conséquences d'un report partiel des élections consulaires sur l'Assemblée des Français de l'étranger ?
Deux options peuvent être envisagées :
- attendre l'élection de l'ensemble des conseillers des Français de l'étranger pour élire les membres de l'AFE ;
- ou réunir l'AFE sous un format « hybride », en présence de conseillers élus en 2021 et de conseillers élus en 2014 mais dont le mandat serait prolongé en raison de la crise sanitaire.
* 12 Source : réponse écrite au questionnaire des rapporteurs, transmise par la DFAE à l'issue de son audition.
* 13 Article 111 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.
* 14 Conseil constitutionnel, 6 juin 2013, Loi portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français à l'étranger , décision n° 2013-671 DC.
* 15 L'article 3 de la Constitution dispose, notamment, que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum ». Le suffrage « est toujours universel, égal et secret ».
* 16 Conseil constitutionnel, 6 décembre 1990, Loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux , décision n° 90-280 DC.
* 17 Conseil constitutionnel, 30 juillet 2020, Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France , décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020.
* 18 Article 6 de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République.
* 19 Source : réponse écrite au questionnaire des rapporteurs, transmise par la DFAE à l'issue de son audition.
* 20 Article 17 de la loi n° 2020-760 du 22 juin 2020 précitée. Dans cette collectivité d'outre-mer et contrairement au reste du territoire national, le second tour des élections municipales n'a pas pu se dérouler le 28 juin 2020. Une nouvelle élection à deux tours a été organisée en octobre 2020.